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Suzanne Barou de la Lombardière de Canson, héritière du fameux papier à dessin Canson, menait grand train, notamment grâce aux toiles de maîtres léguées par son père. Un jour, «Le Gentilhomme sévillan» de Murillo, l'un des fleurons de sa collection, s'est retrouvé au catalogue du plus célèbre marchand d'art londonien et le tableau est entré au Louvre. Cette opération n'aurait jamais été autorisée du vivant de Suzanne Barou de la Lombardière. Quand la famille de l'héritière a eu vent de cette transaction, elle a cherché à avoir de ses nouvelles. C'est ainsi que Jeanne Deschamps, sa soeur, a appris sa mort alors qu'elle était déjà incinérée depuis des mois. Affamée et maltraitée par une ex-Miss Toulon qui lui volait peu à peu toutes ses oeuvres, madame de Canson est morte de la gangrène, une maladie rarissime en 1987.

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Personnes
Transcription
00:00:00Bonjour, c'est Dominique Rizet. Dans ce podcast, nous allons vous raconter, Frédéric Lantieri et moi, l'histoire de Suzanne Decanson, l'héritière dépouillée.
00:00:17Un épisode de Faites entrer l'accusé, écrit par Anne Gauthier, réalisé par Bernard Farou. Bonne écoute.
00:00:30Qui a tué Suzanne Barou de la Lombardière de Cançon ? La gangrène ou la cupidité ? La vieille dame était riche, très riche même.
00:00:46C'était l'héritière du fameux papier à dessin Cançon. Une femme fantasque, originale, qui gérait sa fortune d'hôtel en hôtel entre la Côte d'Azur et le lac Léman.
00:00:56Elle y promenait des toiles de maître fabuleuses qu'elle vendait au gré de ses besoins, jusqu'au jour où elle a croisé deux escrocs.
00:01:06Elle est morte dans des conditions effroyables, affamées, séquestrées, et personne ne s'est demandé ce qu'elle était devenue.
00:01:12Ni les marchands d'art, ni le Louvre, ni les ténors du barreau qui tournaient autour de ses toiles.
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00:01:41Avril 1987, les Deschamps ont rendez-vous avec un avocat parisien, maître Vichenzini.
00:01:53Musique
00:01:54Il ignore pourquoi ce couple qui réside en Suisse a tant insisté pour le rencontrer.
00:02:00Maître Edgar Vincenzini, avocat de la famille Deschamps.
00:02:04Un homme très grand, bel homme, et une femme beaucoup plus petite, avec un regard bleu d'une extraordinaire intensité et une chevelure blanche qui faisait comme un halo au milieu de son visage.
00:02:18Et je vois tout de suite dans ce regard de la détermination et de l'inquiétude.
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00:02:24Musique
00:02:25Et elle me dit, ma petite soeur est morte il y a quelques mois, elle a été incinérée, et j'appartiens, nous appartenons à une famille, je m'appelle Jeanne Barou de la Lombardière de Canson, et on ne se fait pas incinérer dans la famille.
00:02:45Donc ça n'est pas normal, il s'est certainement passé quelque chose.
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00:02:50Suzanne Barou de la Lombardière de Canson est morte à 76 ans.
00:02:56Elle a été incinérée à l'insu de sa famille, deux jours seulement après son décès.
00:03:01Les deux soeurs ne se fréquentaient plus, c'est un ami de Suzanne qui a tout appris à Jeanne Deschamps.
00:03:06Musique
00:03:06Suzanne aurait été recueillie chez une aventurière et que c'est chez cette femme que Suzanne de Canson serait décédée.
00:03:15Elle serait morte de la gangrène, or on ne meurt pas en 1986 de la gangrène si on est soigné.
00:03:24Quelqu'un qui est malade, qui a une maladie dont on connaît l'issue fatale et qui ne reçoit pas de soins, c'est probablement qu'il y a eu une défaillance quelque part,
00:03:33et donc l'idée d'une non-assistance à personne en danger s'impose naturellement à mon esprit.
00:03:40Ce n'est pas tout. Quelque chose intrigue particulièrement la soeur de Suzanne de Canson.
00:03:50Madame Deschamps me dit que ma soeur avait une collection de tableaux de maîtres, de très beaux tableaux,
00:03:58et un de ces tableaux aurait été acheté par le Louvre.
00:04:02Or ma soeur n'a jamais voulu vendre un de ces tableaux au Louvre.
00:04:07Elle considérait les gens du Louvre comme des malfrats.
00:04:11Ce tableau, c'est un murillot, une toile du XVIIe siècle.
00:04:15Le peintre espagnol l'a intitulé « Le gentilhomme sévillant ».
00:04:20Suzanne en avait hérité de son père, et d'après sa soeur, elle y tenait comme à la prunelle de ses yeux.
00:04:25« Donc, si ce tableau a été acheté par le Louvre, c'est anormal, il s'est passé quelque chose d'anormal.
00:04:37Que peut-on faire ? »
00:04:39L'avocat propose au couple de porter plainte contre X, pour vol et non-assistance à personne en danger.
00:04:47Quelques semaines après, la plainte se retrouve au tribunal de Toulon,
00:04:52la ville où Suzanne de Canson est morte neuf mois plus tôt, le 16 septembre 1986.
00:04:57Jean-Pierre Bernard, à l'époque, vous êtes juge d'instruction au tribunal de Toulon.
00:05:08Vous avez en charge des dossiers de grand banditisme, de stupes.
00:05:11Vous avez instruit, par exemple, l'affaire Roberto Succo, ce tueur en série italien qui sévissait en France.
00:05:17Et pourtant, vous vous intéressez à ce petit dossier, si je puis dire. Pourquoi ?
00:05:22Vous vous intéressiez particulièrement à la peinture ?
00:05:23Quand j'étais à l'ENM, j'ai travaillé justement sur le circuit du tableau.
00:05:27C'est un mémoire de travaux dirigés.
00:05:32Donc cet intérêt personnel, je l'ai poursuivi quand j'étais à Toulon,
00:05:37en fréquentant les galeries de peinture et en m'intéressant aussi aux différentes jurisprudences
00:05:43qui se rapportaient à l'importation, l'exportation et le contrôle des toiles.
00:05:50Et j'allais dire que les circonstances assez mystérieuses des faits présentés
00:05:55m'ont incité à accepter cette procédure.
00:06:00Donc vous rentrez au contact avec les déchants.
00:06:03Et que vous disent les déchants de Madame de Canson ?
00:06:06C'est une personne qui vit de manière autonome, indépendante depuis des années
00:06:11et qui a un petit peu une vie de nomade, partageant sa vie entre la France et la Suisse.
00:06:16Voilà grosso modo ce que j'ai comme information.
00:06:20Suzanne de Canson est née le 15 janvier 1910 à Paris,
00:06:25quelques jours seulement avant la grande crue historique.
00:06:29Elle et sa sœur sont les héritières d'une famille riche et connue,
00:06:33les Baroux de la Lombardière de Canson.
00:06:37Une famille qui a fait fortune au 18e siècle dans l'industrie du papier en Ardèche.
00:06:43Le papier à dessin Canson, qui devient célèbre dans le monde entier.
00:06:46Le père de Suzanne et de Jeanne ne s'occupe plus de l'usine.
00:06:51Il est devenu antiquaire.
00:06:53Richissime, il habite avec sa famille dans un hôtel particulier des Champs-Elysées.
00:06:58Meubles, argentrices, sculptures, tableaux de maître,
00:07:01Jacques de Canson collectionne les antiquités et initie ses filles à sa passion.
00:07:06Marie-Françoise Krieger, amie de Suzanne de Canson.
00:07:11Elle parlait beaucoup d'art, elle avait été élevée dans l'art.
00:07:15Et comme elle admirait beaucoup son père, elle était souvent avec lui.
00:07:17Elle connaissait bien les peintres, les sculpteurs.
00:07:23Elle avait une grande culture d'histoire de l'art, en fait.
00:07:28Très approfondie.
00:07:29Adolescente, Suzanne se sent différente.
00:07:36Et si elle se marie très tôt, à 18 ans, avec un cousin germain,
00:07:41ce n'est pas par amour.
00:07:42Maître Edgar Vincenzini, avocat de la famille Deschamps.
00:07:47Elle prenait sa liberté, elle s'affranchissait du carcan familial,
00:07:51elle s'émancipait et enfin, elle allait pouvoir vivre la vie qu'elle voulait vivre.
00:07:56Quelques mois plus tard, Suzanne de Canson quitte son mari pour une femme,
00:08:03Laurence Paul, de 10 ans, son aînée.
00:08:06A l'époque, en 1928, cela fait scandale.
00:08:09Mais Suzanne assume quitte à affronter son milieu.
00:08:16Elle a eu un grand amour dans sa vie, c'était cette Madame Paul.
00:08:21Et elle lui a été d'une remarquable fidélité toute sa vie.
00:08:26Elle était certainement très en décalage vis-à-vis de son temps,
00:08:30mais elle était, je pense, très moderne.
00:08:34Pendant 30 ans, les deux femmes mènent une vie de luxe, presque marginale,
00:08:39d'hôtel en palace, de la Côte d'Azur, au riz du lac Clément.
00:08:44Suzanne profite des largesses de son père,
00:08:47mais donne peu de nouvelles au reste de la famille.
00:08:49Quand le père meurt, Jeanne ne sait pas où est Suzanne.
00:08:56Et donc, pour la retrouver, un appel est passé à la radio
00:09:00pour l'informer du décès de son père.
00:09:02En 1958, Suzanne de Canson hérite de la moitié de la fortune de son père,
00:09:13300 millions de francs, une somme colossale à l'époque.
00:09:18Des meubles, des toiles, beaucoup d'objets d'art que leur père collectionnait.
00:09:22Dans le lot, elle récupère le gentilhomme sévillant de Murillaud et d'autres chefs-d'œuvre.
00:09:34Et figurent dans ces tableaux deux mémoires, un Rembrandt,
00:09:39des sanguines de Boucher, un Guardi, un Vateau, un Hubert Robert, un Quentin Latour.
00:09:48Enfin, des noms avandiques, portraits de Lady Fane, si mes souvenirs sont bons.
00:09:54Elle avait des choses extraordinaires.
00:09:57Et donc, elle vendait au fur et à mesure pour vivre.
00:10:02Elle voyageait.
00:10:03Elle voyageait, elle vendait, elle partait, elle revenait.
00:10:06Donc, elle vendait à Paris, elle vendait à Monaco,
00:10:08et elle vendait peut-être ailleurs, je ne sais pas.
00:10:11Elle vendait ses affaires.
00:10:12M. Bernard, Suzanne de Canson était donc en rupture avec sa famille.
00:10:19Pourtant, sa sœur aurait dû hériter, ce qui n'a pas été le cas.
00:10:22Comment c'est possible, ça ?
00:10:23Qu'est devenu l'héritage ?
00:10:24Étant un ascendant, le seul ascendant de Suzanne de Canson,
00:10:28effectivement, elle aurait dû, elle-même, faire une déclaration d'ouverture de succession.
00:10:32Mais elle est dans l'ignorance complète de ce qui est devenu le patrimoine de sa sœur.
00:10:37Tout en sachant que certaines pièces ont été vendues pour faire la subsistance de Mme de Canson.
00:10:44Donc, elle peut imaginer aussi que sa sœur a tout vendu.
00:10:46Elle ne sait pas.
00:10:48Qui a prévenu Mme Deschamps de la mort de sa sœur ?
00:10:51Un certain M. Céloti.
00:10:53Et qui c'est, ce monsieur ?
00:10:53Et M. Céloti est un ébéniste antiquaire qui a une galerie d'art à Vevey, en Suisse.
00:11:00Et à ce moment-là, qu'est-ce qui vous intéresse le plus dans ce dossier ?
00:11:03La possibilité d'une captation d'héritage ou éventuellement une mort suspecte ?
00:11:07Si vous voulez, les deux éléments sont intéressants.
00:11:12Ils ne sont pas forcément liés.
00:11:14Puisque, après tout, la captation d'héritage, il faut l'établir.
00:11:19Et la deuxième interrogation, c'est pourquoi cette Suzanne de Canson est décédée de manière inconnue
00:11:25dans une petite commune du Var ?
00:11:28Elle a été incinérée que sa famille n'a pas été prévenue.
00:11:31Donc, si vous voulez, les deux éléments sont intéressants.
00:11:33On n'a pas forcément cherché à faire le lien entre les deux.
00:11:37Mais les deux pistes se sont croisées, forcément.
00:11:39Le 30 mars 88, un an et demi après la mort de Suzanne de Canson,
00:11:51la brigade de recherche de la gendarmerie d'Aix-en-Provence est saisie.
00:11:58Le gendarme Jean-Louis Bertrand s'y colle, presque à contre-cœur.
00:12:02Major Jean-Louis Bertrand, directeur d'enquête, section de recherche de la gendarmerie d'Aix-en-Provence.
00:12:08J'étais pas très chaud parce que, dans le métier, les captations d'héritage,
00:12:13c'est pas ce qui nous intéressait le plus.
00:12:15Le juge Bernard lui demande d'interroger l'homme qui a prévenu la famille de Suzanne de Canson,
00:12:21l'antiquaire ébéniste de Vevey, le fameux Louis Céloti.
00:12:25Il nous fallait absolument entendre cet individu, parce qu'il a connu Madame de Canson,
00:12:31il affirmait des choses, le juge lui avait téléphoné,
00:12:34donc il lui avait dit, et tout ce que le juge nous disait, il nous fallait absolument le mettre par écrit.
00:12:42Le problème, c'est que Louis Céloti est suisse,
00:12:45et les gendarmes français ne sont pas autorisés à l'interroger.
00:12:48Seule solution, le faire venir en France, à Évian.
00:12:55Un début d'enquête assez rocambolesque.
00:12:58Il voulait pas venir, on lui a dit qu'on envoyait la vedette de Jean Lambrouille traverser le lac
00:13:03pour qu'il puisse venir, donc il était content.
00:13:06Il arrivait, il a passé la journée avec nous,
00:13:09et là, ça commençait à prendre forme.
00:13:13Il raconte qu'effectivement, il était un ami très proche de Madame de Canson.
00:13:17Il l'avait rencontré en 1984.
00:13:21La vieille dame lui avait demandé de vendre certains de ses plus beaux tableaux,
00:13:25dont le fameux gentilhomme sévillant.
00:13:29Elle avait d'ailleurs rédigé un mandat.
00:13:31Si Louis Céloti vendait cette toile, il toucherait une commission confortable.
00:13:38Mais quelques semaines plus tard,
00:13:40Suzanne de Canson s'est ravisée.
00:13:41Elle a débarqué brusquement dans la boutique,
00:13:44en compagnie d'une femme et d'un homme.
00:13:47Ils sont arrivés, puis ils ont piqué les tableaux.
00:13:50Ils sont repartis avec Madame de Canson.
00:13:52Et là, il était très inquiet,
00:13:53parce qu'il n'avait pas reconnu Madame de Canson telle qu'elle était.
00:13:57Tel qu'il avait connu une femme petite,
00:14:00fuette, mais très autoritaire,
00:14:01qui savait ce qu'elle voulait.
00:14:02Et là, il est tombé sur quelqu'un qui,
00:14:04manifestement, était dans les pattes de mauvaise personne.
00:14:08Ces gens, Louis Céloti connaît leur nom.
00:14:13Il s'agit d'un avocat toulonné,
00:14:15maître Robert Boissonnet,
00:14:17et d'une artiste peintre, Joël Penel.
00:14:19On l'a laissé parler,
00:14:24sans trop poser des questions.
00:14:26Parce qu'à ce moment-là,
00:14:28on est arrivé à un point où on se dit,
00:14:29mais qu'est-ce qui se passe ?
00:14:31On nous parlait de tableaux de maîtres,
00:14:33d'extraordinaire,
00:14:35d'avocats, maîtres Boissonnet,
00:14:38qui ne correspondaient pas à l'image
00:14:39qu'on se donnait d'un avocat.
00:14:40Louis Céloti raconte ensuite au gendarme
00:14:44qu'il est tombé sur le Murillo un an plus tard,
00:14:47par hasard,
00:14:49en feuilletant un catalogue de vente de Christie's,
00:14:52le fameux marchand d'art londonien.
00:14:54Ce qui l'a étonné,
00:14:56c'est que le tableau n'appartenait plus à Suzanne de Canson.
00:14:59D'après le catalogue,
00:15:00la propriétaire était une certaine Jeanne Chapuis,
00:15:04morte à Genève en 1979,
00:15:07six ans plus tôt.
00:15:09Louis Céloti n'a rien compris,
00:15:10les gendarmes, eux,
00:15:12sentent bien que le juge Bernard
00:15:13a raison de s'intéresser à cette histoire d'héritage.
00:15:18On avait besoin d'aller voir le juge,
00:15:20de discuter avec lui,
00:15:22de faire le point,
00:15:23et de nous dire,
00:15:23on va faire un plan de travail,
00:15:24parce que là, il va falloir faire d'une façon différente.
00:15:36Les gendarmes sont désormais convaincus,
00:15:38comme le juge Bernard,
00:15:39de l'intérêt de cette affaire.
00:15:42Une héritière qui promène ses chefs-d'œuvre,
00:15:44d'un pays à l'autre,
00:15:45sans prévient la douane,
00:15:46en compagnie d'un avocat et d'une artiste peintre,
00:15:48cela ne leur dit rien qui vaille.
00:15:50Suzanne de Canson avait peut-être décidé
00:15:53de mener ses affaires comme ça,
00:15:54de cette manière,
00:15:55mais peut-être pas.
00:15:57Et si la vieille dame s'était fait manipuler
00:15:59par des escrocs ?
00:16:01Les gendarmes qui ne veulent pas attirer leur attention
00:16:03se gardent bien pour l'instant
00:16:05d'interroger Maître Boissonnet
00:16:07ou Joël Pénel.
00:16:08Ils préfèrent enquêter discrètement
00:16:09dans l'entourage de Suzanne de Canson.
00:16:13Madame de Canson a très peu d'amis,
00:16:16elle n'est pas très sociale.
00:16:19À quoi c'est dû, je ne sais pas.
00:16:20Peut-être le fait que son homosexualité
00:16:22la place hors de la société,
00:16:24quelque part,
00:16:24mais il y a Céloti,
00:16:26il y a Madame Guerrier,
00:16:27et il n'y en a que 4 ou 5, pas plus.
00:16:33Au fur et à mesure des auditions,
00:16:35les gendarmes commencent à cerner
00:16:36la personnalité de Suzanne de Canson.
00:16:39Tous ses amis la décrivent
00:16:40comme une femme extrêmement méfiante,
00:16:44voire un peu paranoïaque.
00:16:46Richard Krieger,
00:16:47amie de Suzanne de Canson.
00:16:49Elle avait le sentiment
00:16:51qu'on en voulait
00:16:52à tout ce qu'elle possédait.
00:16:54et ça s'est confirmé
00:16:57à chaque fois,
00:16:57si vous voulez,
00:16:58qu'on la voyait,
00:16:59qu'à chaque fois,
00:17:00elle vous disait
00:17:00écoutez,
00:17:02j'ai l'impression
00:17:03qu'il y a quelqu'un
00:17:03qui peut me poursuivre
00:17:04ou j'ai l'impression
00:17:05qu'il y a quelqu'un
00:17:06qui veut m'acheter ça
00:17:07pour 3 francs 6 sous
00:17:08et qu'il est prêt
00:17:09à faire n'importe quoi
00:17:10pour pouvoir l'obtenir.
00:17:11C'est une personne
00:17:11qui a été roulée
00:17:12nombreuses fois dans sa vie
00:17:13ou tentée de roulée,
00:17:14donc elle ne faisait confiance
00:17:15pratiquement à personne.
00:17:17Et elle avait trouvé une manie,
00:17:18elle avait un pendule
00:17:19et elle lui faisait tourner
00:17:21son pendule.
00:17:22Si c'était positif,
00:17:24elle faisait confiance.
00:17:25Si ce n'était pas positif,
00:17:27elle ne faisait pas confiance.
00:17:29Son pendule,
00:17:30son instinct
00:17:31et une manière
00:17:32bien à elle
00:17:33de gérer ses affaires.
00:17:35Suzanne de Canson
00:17:36vivait au jour le jour
00:17:37sans compte en banque
00:17:38ni couverture sociale.
00:17:41Au gré de ses besoins,
00:17:42elle vendait
00:17:43ou gageait ses biens
00:17:44dans les mondes piétés.
00:17:45Une gestion
00:17:46qui surprend les gendarmes
00:17:47car elle frisait
00:17:47parfois la malhonnêteté.
00:17:49En fait,
00:17:51Mme de Canson
00:17:52était une roublarde.
00:17:54Elle se débrouillait souvent
00:17:55pour retirer son tableau
00:17:58bien avant
00:17:59d'atteindre
00:18:00la somme limite
00:18:02et en disant
00:18:04que je vais vous rembourser
00:18:05et elle ne remboursait jamais.
00:18:06On s'est aperçu
00:18:07que Mme de Canson
00:18:07devait de l'argent
00:18:08à peu près partout.
00:18:10Dans ses affaires,
00:18:12c'est donc Suzanne de Canson
00:18:13qui fixait les règles.
00:18:14Un couple monégasque
00:18:18raconte aux gendarmes
00:18:19qu'en 1980,
00:18:21la vieille dame
00:18:21avait demandé
00:18:22un bien étrange service
00:18:23à leur fille,
00:18:24installée depuis peu à Paris.
00:18:27Marie-Françoise Krieger,
00:18:28amie de Suzanne de Canson.
00:18:30Donc un jour,
00:18:31Maman m'appelle,
00:18:31on venait de déménager
00:18:32dans cet appartement
00:18:33qui est grand
00:18:34et elle me dit
00:18:35tu as de la place,
00:18:36tu vas héberger
00:18:36Suzanne de Canson
00:18:38avec ses tableaux
00:18:39parce qu'elle doit
00:18:41les sortir
00:18:41de son garde-meuble
00:18:43pour œuvres d'art
00:18:44extraordinaires.
00:18:45Ces deux grands tableaux
00:18:46puisque les deux faisaient
00:18:48à peu près
00:18:49en hauteur
00:18:50de 1,30 m
00:18:51sur 1,50 m
00:18:53L'un était
00:18:54le gentleman
00:18:55de Sévillan
00:18:56de Murillo
00:18:57et l'autre
00:18:58Lady Westmoreland
00:18:59de Van Dyck.
00:19:03Le Murillo
00:19:04était à Paris
00:19:04en 1980
00:19:05et il appartenait
00:19:07bien à Suzanne de Canson.
00:19:09Mais pourquoi
00:19:10l'a-t-elle sorti
00:19:10de son garde-meuble ?
00:19:12Que voulait-elle en faire ?
00:19:14Et elle nous a dit
00:19:15est-ce que vous avez
00:19:15un cutter
00:19:16parce que nous allons
00:19:17les enlever du châssis.
00:19:19J'ai donc pris mon cutter
00:19:20j'ai commencé
00:19:22à cisailler le bord
00:19:24de façon à pouvoir
00:19:26les désolidariser
00:19:27des châssis
00:19:27et puis après
00:19:28j'ai commencé
00:19:29à rouler la première
00:19:30et ça s'est mis
00:19:31à sentir la peinture
00:19:32très très fort
00:19:33comme s'il venait
00:19:34d'être peint
00:19:34c'était absolument
00:19:35émouvant
00:19:36et voilà
00:19:37on les a roulés
00:19:38et elle nous a dit
00:19:39maintenant vous allez
00:19:40les garder ici
00:19:41et donc je les ai mis
00:19:43sous un canapé
00:19:44ma porte n'était pas blindée
00:19:45je n'avais pas d'alarme
00:19:47je n'osais plus sortir
00:19:48et moi je n'en revenais pas
00:19:50d'avoir ça à la maison
00:19:50c'était incroyable.
00:19:55Quelques semaines plus tard
00:19:56Suzanne est venue
00:19:57reprendre ses oeuvres.
00:19:58Elle a mis ça dans une toile
00:20:01elle a mis
00:20:02on lui a
00:20:03avec des ficelles
00:20:04fait des poignets
00:20:05et puis elle est partie
00:20:06avec ses deux toiles
00:20:08On l'a accompagnée
00:20:09à la gare de Lyon
00:20:10elle a pris un train
00:20:11je ne sais pas
00:20:13pour où
00:20:14mais voilà
00:20:15elle est partie
00:20:16avec ses toiles
00:20:17Quand on l'a vue
00:20:21plus tard
00:20:22elle nous a dit
00:20:23que ses toiles
00:20:23étaient parties en Suisse
00:20:25Maître Boissonnais
00:20:26m'a emmenée
00:20:27en voiture
00:20:28avec sa famille
00:20:29les toiles cachées
00:20:30au fond de la voiture
00:20:31roulées dans des tapis
00:20:32avec tous les skis
00:20:33par dessus
00:20:33et les toiles
00:20:35sont passées
00:20:36sans problème
00:20:36ont passé la frontière
00:20:37sans problème
00:20:38Elle savait
00:20:41que ce n'était pas légal
00:20:43de passer ces tableaux
00:20:44en Suisse
00:20:45alors qu'ils étaient
00:20:46répertoriés en France
00:20:47puisque ces tableaux
00:20:50appartenaient à son père
00:20:51J'imagine
00:20:52qu'elle ne voulait pas
00:20:52les vendre en France
00:20:53Elle voulait en tirer
00:20:55un meilleur prix ailleurs
00:20:56certainement
00:20:56Elle ne nous a pas
00:20:57donné l'explication
00:20:58Voilà donc
00:21:01comment le Murillo
00:21:02est passé en Suisse
00:21:045 ans
00:21:05avant sa vente au Louvre
00:21:06Major Jean-Louis Bertrand
00:21:08directeur d'enquête
00:21:09section de recherche
00:21:11de la gendarmerie
00:21:11d'Aix-en-Provence
00:21:12Là quand même
00:21:14on se posait
00:21:14quelques questions
00:21:15à savoir
00:21:15Madame Canson
00:21:17D'accord
00:21:18c'est une victime
00:21:19mais
00:21:20une victime
00:21:23un peu
00:21:24qui participe
00:21:24à son propre vol
00:21:25à ce propre détournement
00:21:26Des gens ont commencé
00:21:29à se demander
00:21:31un peu
00:21:32quel était le rôle
00:21:33de chacun
00:21:33dans la réalité
00:21:35Notamment celui
00:21:38de Robert Boissonnet
00:21:39l'avocat
00:21:40Un homme
00:21:41dont tous les amis
00:21:42de Suzanne de Canson
00:21:42ont beaucoup entendu parler
00:21:44Pour Madame de Canson
00:21:46Boissonnet
00:21:47était un homme parfait
00:21:48c'était la justice
00:21:50c'était l'avocat
00:21:51c'était
00:21:51un homme
00:21:52chrétien
00:21:54pratiquant
00:21:55qui allait à la messe
00:21:56tous les dimanches
00:21:57avec ses enfants
00:21:58enfin quelqu'un de très bien
00:21:59et elle avait
00:22:01une confiance aveugle
00:22:03Quand elle a tourné
00:22:04le pendule
00:22:04pour Boissonnet
00:22:05le pendule
00:22:06a dû fortement tourner
00:22:07parce qu'à partir
00:22:08de ce moment-là
00:22:08Boissonnet est devenu
00:22:10un demi-lieu
00:22:10pour Madame de Canson
00:22:11Le pendule
00:22:14pas seulement
00:22:15l'avocat l'a tiré
00:22:17d'une mauvaise passe
00:22:18ils se sont rencontrés
00:22:20en 73
00:22:21une année pénible
00:22:22pour Suzanne de Canson
00:22:23Après 40 ans
00:22:26de vie commune
00:22:27sa compagne de toujours
00:22:28Laurence Paul
00:22:29l'a quittée
00:22:30un beau matin
00:22:31à plus de 70 ans
00:22:33Madame de Canson
00:22:38elle était sûrement
00:22:38très très mal
00:22:39mais elle n'en parlait
00:22:43pas trop
00:22:43je pense qu'elle était
00:22:46aussi très vexée
00:22:47parce qu'elle se vexait
00:22:49aussi
00:22:49elle était très fière
00:22:50et elle n'a pas dû
00:22:51comprendre
00:22:52ce qui lui arrivait
00:22:52D'autant que
00:22:55dans sa fuite
00:22:56Laurence Paul
00:22:57a emporté
00:22:58deux tableaux
00:22:59de grande valeur
00:22:59un Titien
00:23:01et un Rembrandt
00:23:03Suzanne remue
00:23:04ciel et terre
00:23:04pour les retrouver
00:23:05Et c'est en recherchant
00:23:09d'ailleurs
00:23:09Madame Paul
00:23:10que Madame de Canson
00:23:12en se déplaçant
00:23:14à Brignoles
00:23:14dans la famille
00:23:15de Madame Paul
00:23:16va rencontrer
00:23:16Maître Boissonnet
00:23:18Elle va charger
00:23:19Boissonnet
00:23:20de récupérer
00:23:21ses tableaux
00:23:21L'avocat
00:23:24assigne Laurence Paul
00:23:25qui s'est enfuie
00:23:26à Sion
00:23:27en Suisse
00:23:27Mais elle meurt
00:23:29en pleine procédure
00:23:30en léguant
00:23:31les deux tableaux
00:23:32à la ville
00:23:32Qu'à cela ne tienne
00:23:35Robert Boissonnet
00:23:36poursuit la municipalité
00:23:38et gagne le procès
00:23:39La ville n'a pas
00:23:42rendu les tableaux
00:23:43mais pour Suzanne
00:23:44de Canson
00:23:44Robert Boissonnet
00:23:46est devenu
00:23:46un héros
00:23:47Dorénavant
00:23:48elle le consulte
00:23:49sur tout
00:23:49et pour tout
00:23:50Elle semble avoir
00:23:51trouvé un protecteur
00:23:53Pourtant
00:23:54au fil des mois
00:23:54son comportement
00:23:55change
00:23:56et ses amis
00:23:57commencent à s'inquiéter
00:23:58Marie-Françoise
00:23:59Krierger
00:24:00amie de Suzanne
00:24:01de Canson
00:24:01Il y a quand même
00:24:02des choses bizarres
00:24:03Elle disparaît
00:24:05de plus en plus souvent
00:24:05Elle ne donne plus
00:24:06de nouvelles
00:24:07Quand elle revient
00:24:07elle est très
00:24:08très effrayée
00:24:10très craintive
00:24:11Elle reçoit
00:24:14des coups de téléphone
00:24:14Il faut toujours
00:24:15qu'elle reparte
00:24:16très très vite
00:24:16comme si on l'attendait
00:24:18comme si
00:24:19elle était surveillée
00:24:20Ma mère pensait
00:24:22qu'elle était
00:24:22qu'elle était
00:24:25sous une contrainte
00:24:26sous la contrainte
00:24:27de quelqu'un
00:24:28ou de plusieurs personnes
00:24:29et qu'elle n'arrivait pas
00:24:31à s'en sortir
00:24:32Plus grave
00:24:34en quelques mois
00:24:36Suzanne de Canson
00:24:36est devenue
00:24:37l'ombre d'elle-même
00:24:38Richard Krierger
00:24:40amie de Suzanne de Canson
00:24:41On avait vraiment
00:24:42l'impression
00:24:43qu'elle avait dormi
00:24:43dans le caniveau
00:24:45ou sur le pas
00:24:48de la porte
00:24:48Elle n'avait plus
00:24:50de tenue
00:24:50si vous voulez
00:24:51C'était effectivement
00:24:52triste de voir
00:24:53que c'était
00:24:53pas clochardisé
00:24:55au sens où
00:24:55elle n'avait pas
00:24:56une bouteille de vin
00:24:58dans la poche
00:24:59non
00:24:59mais c'est simplement
00:25:00après tout
00:25:02on aurait pu lui donner
00:25:03son saut
00:25:03comme on dit
00:25:03Major Jean-Louis Bertrand
00:25:05directeur d'enquête
00:25:06section de recherche
00:25:08de la gendarmerie
00:25:08d'Aix-en-Provence
00:25:09Tous
00:25:10nous disent
00:25:12la même chose
00:25:12ils ont vu
00:25:13quelqu'un
00:25:14qui était en train
00:25:14de dépérir totalement
00:25:15quelqu'un
00:25:17qui était absent
00:25:18à qui il n'arrivait pas
00:25:20à discuter
00:25:20ce n'était plus
00:25:21la même personne
00:25:22qu'ils avaient connue avant
00:25:23mal habillée
00:25:25alors qu'elle était coquette
00:25:26mal coiffée
00:25:30un début de barbe
00:25:33de barbiche
00:25:34pas entretenue
00:25:36et qui arrêtait là
00:25:39qui regardait
00:25:40qui disait
00:25:40comme si elle attendait
00:25:42quelque chose
00:25:42du secours
00:25:43sans rien demander
00:25:43Durant l'été 84
00:25:47Suzanne raconte
00:25:48une histoire étrange
00:25:49une histoire de vol
00:25:51Marie-Françoise
00:25:52Krieger
00:25:53amie de Suzanne
00:25:54de Canson
00:25:55Un jour
00:25:58ma mère me téléphone
00:25:59en me disant
00:25:59c'est une catastrophe
00:26:01Suzanne s'est fait voler
00:26:02les récipicés
00:26:02qu'elle avait
00:26:03du Mont de Piété
00:26:04de Paris
00:26:04où elle avait
00:26:05engagé des dessins
00:26:07des flambeaux
00:26:08en argent massif
00:26:09et ces récipicés
00:26:11lui ont été volés
00:26:12elle était complètement
00:26:13paniquée
00:26:13affolée
00:26:14parce que
00:26:14évidemment
00:26:15ça représentait
00:26:15beaucoup d'argent
00:26:16pour elle
00:26:16et la personne
00:26:18qui possède
00:26:19le récipicé
00:26:20peut sortir
00:26:21comme elle veut
00:26:22ces objets d'art
00:26:23du Mont de Piété
00:26:24lui appartiennent
00:26:26On ira faire
00:26:26nos propres vérifications
00:26:27et on s'apercevra
00:26:28au crédit municipal
00:26:29qu'effectivement
00:26:30les tableaux
00:26:31ont été dégagés
00:26:31alors on ne sait pas
00:26:33qui a volé
00:26:34le récipicé
00:26:35mais les tableaux
00:26:37ont été dégagés
00:26:37avec le récipicé
00:26:39un dessin
00:26:41un dessin de Fragonard
00:26:42et deux amours
00:26:43de Boucher
00:26:44autant dire
00:26:44des chefs-d'oeuvre
00:26:45Suzanne de Canson
00:26:50les avait gagés
00:26:50pour une somme
00:26:51dérisoire
00:26:5216 000 francs
00:26:532500 euros
00:26:54car elle pensait
00:26:55les récupérer
00:26:56très vite
00:26:56la personne
00:26:58qui lui a volé
00:26:58le récipicé
00:26:59savait très bien
00:27:00ce qu'elle faisait
00:27:01On a tout de suite
00:27:02pensé à son avocat
00:27:04On a tout de suite
00:27:06pensé qu'elle était
00:27:07chez lui
00:27:07et qu'on pensait
00:27:09qu'elle était chez lui
00:27:10et que comme elle avait
00:27:10disparu
00:27:11on n'avait plus de nouvelles
00:27:12On a pensé à ça
00:27:14mais on ne savait pas
00:27:16on ne pouvait pas
00:27:17accuser
00:27:18et je sais que maman
00:27:19a passé beaucoup
00:27:19de coups de fil
00:27:19à Boissonneig
00:27:20Au début
00:27:21il était très agréable
00:27:22et après
00:27:23il était très désagréable
00:27:25avec ma mère au téléphone
00:27:27avec quasiment
00:27:28en lui disant
00:27:29de quoi vous vous mêlez
00:27:30vous n'avez pas
00:27:33à vous mêler
00:27:33des affaires
00:27:34de Suzanne
00:27:34Tout semble accusé
00:27:36boissonné
00:27:37Mais quand les gendarmes
00:27:39découvrent
00:27:40dans quelles conditions
00:27:41le gentilhomme sévillant
00:27:43a été vendu
00:27:44ils pensent que l'affaire
00:27:45est trop grosse
00:27:46pour l'avocat toulonais
00:27:47Le catalogue Christie's
00:27:49proposait le Murillo
00:27:50à 10 millions de francs
00:27:52Mais curieusement
00:27:53le marchand d'art
00:27:54a renoncé à la vente
00:27:55et c'est le Louvre
00:27:56qui a acquis la toile
00:27:57Y aurait-il eu
00:27:59des pressions ?
00:28:00Monsieur le juge
00:28:05que savez-vous
00:28:06de cette vente ?
00:28:08Nous savons
00:28:08de cette vente
00:28:09que ce tableau
00:28:10avait été programmé
00:28:12pour être vendu
00:28:13par la société Christie's
00:28:14à Londres
00:28:15Nous savons
00:28:16que le Louvre
00:28:17Monsieur Rosenberg
00:28:18est intervenu
00:28:19auprès de Christie's
00:28:20pour que ce tableau
00:28:21soit rapatrié en France
00:28:22car le Louvre
00:28:24a soutenu
00:28:25qu'il faisait partie
00:28:25du patrimoine français
00:28:26Dans ces conditions
00:28:28le prix convenu
00:28:30par le ministère
00:28:31de la Culture
00:28:32a été de 5 millions
00:28:33de francs
00:28:34et ce prix-là
00:28:35a été versé
00:28:37en Suisse
00:28:38sur le compte
00:28:39du notaire
00:28:40en charge
00:28:40de la succession
00:28:41Chapuis
00:28:41Et donc vous vous rendez
00:28:43au Louvre
00:28:43pour en savoir un peu plus ?
00:28:45Je rends au Louvre
00:28:46parce que je veux
00:28:48avoir accès
00:28:48aux dossiers de vente
00:28:49Et là
00:28:50nous attendons
00:28:51Malgré Fierre et moi
00:28:52à peu près 3 heures
00:28:53Et au bout de 3 heures
00:28:55on nous dit
00:28:55que c'est pas la peine
00:28:57il n'y a plus personne
00:28:57du cabinet
00:28:58les responsables
00:28:59sont tous en réunion
00:29:00etc.
00:29:02Bref
00:29:02personne ne veut
00:29:03vous recevoir
00:29:03Sauf que vous apprenez
00:29:04quand même quelque chose
00:29:05c'est le nom
00:29:05de la personne
00:29:06qui a vendu le tableau
00:29:07J'ai
00:29:08la confirmation
00:29:10que l'héritière
00:29:13de Mme Chapuis
00:29:16est une certaine
00:29:18Joël Pénel
00:29:19qui est effectivement
00:29:20Joël Pénel
00:29:22qui est la personne
00:29:22chez qui
00:29:23Mme de Canson
00:29:23est décédée
00:29:24en 1986
00:29:26Et c'est elle
00:29:28qui met en vente
00:29:28le tableau ?
00:29:29C'est elle
00:29:29qui a donc
00:29:30diligenté cette vente
00:29:31Et cette Joël Pénel
00:29:32elle a reçu de l'argent
00:29:33pour cette vente ?
00:29:342 millions et demi
00:29:35de francs
00:29:36en somme
00:29:37qu'elle va
00:29:37dilapider
00:29:39très rapidement
00:29:40Comment se fait-il
00:29:41que le Murillot
00:29:42se soit retrouvé
00:29:43dans la succession
00:29:44de sa grand-mère
00:29:44Mme Chapuis
00:29:45alors que dans le même temps
00:29:47il appartenait
00:29:48à Mme de Canson
00:29:48qui était vivante ?
00:29:49Là à l'époque
00:29:50je veux dire
00:29:50on est vraiment
00:29:51l'infraction
00:29:52de captation d'héritage
00:29:53se dessine
00:29:54Pour ne pas éveiller
00:29:57les soupçons
00:29:58de maître
00:29:58boissonné
00:29:59de Joël Pénel
00:30:00les gendarmes
00:30:01préfèrent retourner
00:30:02en Suisse
00:30:03Ils veulent entendre
00:30:04les avocats
00:30:05et les notaires
00:30:06qui ont réglé
00:30:06la succession
00:30:07Major Jean-Louis Bertrand
00:30:09directeur d'enquête
00:30:10section de recherche
00:30:11de la gendarmerie
00:30:12d'Aix-en-Provence
00:30:13Là-bas
00:30:14oui on a eu
00:30:14d'énormes difficultés
00:30:15on n'a pas pu entendre
00:30:16aucun
00:30:16là-bas
00:30:17aucun avocat
00:30:18Le fait
00:30:19c'est qu'ils ne vous reçoivent pas
00:30:20ils vous disent
00:30:21qu'ils ne sont pas là
00:30:22ou qu'ils n'ont pas le temps
00:30:24Un avocat
00:30:25c'est à la fois
00:30:26un avocat
00:30:26et un notaire
00:30:27ils font les deux professions
00:30:28en Suisse
00:30:29c'est des gens
00:30:31très haut placés
00:30:31ils ont beaucoup
00:30:32d'influence
00:30:33Alors les gendarmes
00:30:35essayent d'en savoir plus
00:30:36sur Jeanne Chapuis
00:30:37la grand-mère maternelle
00:30:39de Joël Penel
00:30:40Pourquoi
00:30:41Suzanne de Canson
00:30:42lui aurait-elle légué
00:30:43le tableau
00:30:44le plus prestigieux
00:30:45de son patrimoine
00:30:46Encore une fois
00:30:47les gendarmes
00:30:48se tournent vers
00:30:49les amis proches
00:30:49de Suzanne
00:30:50Marie-Françoise
00:30:52Krierger
00:30:52amie de Suzanne de Canson
00:30:54On n'a jamais entendu
00:30:56parler de Jeanne Chapuis
00:30:57jamais jamais
00:30:59Elle n'a pas pu donner
00:31:00de tableau
00:31:00à Madame Chapuis
00:31:01c'est pas possible
00:31:02on l'aurait su
00:31:03elle nous en aurait parlé
00:31:05elle vendait
00:31:06vraiment pour vivre
00:31:07donc elle ne pouvait pas donner
00:31:09ça c'était pas possible
00:31:10Personne n'a entendu parler
00:31:13de cette Jeanne Chapuis
00:31:14les deux femmes
00:31:15n'étaient d'ailleurs
00:31:16vraiment pas du même monde
00:31:18Jeanne Chapuis
00:31:19veuve d'un cordonnier
00:31:20finira sa vie à Genève
00:31:22pauvre
00:31:24elle n'aura rien
00:31:25dans l'indigence
00:31:27la plus complète
00:31:28apparemment
00:31:30Madame Canson
00:31:30et Madame Chapuis
00:31:32ne vivaient absolument pas
00:31:33dans le même milieu
00:31:34un c'était un milieu
00:31:36le plus pauvre possible
00:31:37l'autre c'était un milieu
00:31:38de luxe
00:31:39ils ne pouvaient pas
00:31:40se rencontrer
00:31:40La succession Chapuis
00:31:47semble plus que douteuse
00:31:49on dirait un montage
00:31:51élaboré pour spolier
00:31:52Suzanne de Canson
00:31:53mais les gendarmes
00:31:54n'en ont pas la preuve
00:31:55ils s'intéressent donc
00:31:57maintenant très sérieusement
00:31:58à cette Joël Penel
00:31:59chez qui Suzanne de Canson
00:32:01est morte dans des circonstances
00:32:02très troubles
00:32:03Joël Penel
00:32:06est née en 1940
00:32:07en Indochine
00:32:08elle a 8 ans
00:32:10quand sa famille
00:32:11rentre en France
00:32:11elle est fille
00:32:14elle est fille d'un militaire
00:32:15elle va donc aller
00:32:17de port en port
00:32:18puisque c'est un militaire
00:32:19et un marin
00:32:20à 16 ans
00:32:22ou 18 ans
00:32:22elles sont sur Toulon
00:32:24elle se fait alors
00:32:27remarquer par sa beauté
00:32:28elle est élue
00:32:29Miss Toulon
00:32:30et rêve de gloire
00:32:31mais en 58
00:32:34au moment où
00:32:35Suzanne de Canson
00:32:35hérite de son père
00:32:36et mène la grande vie
00:32:37Joël, elle
00:32:39se marie avec
00:32:40un soldat marinier
00:32:41et fréquente
00:32:42les ports de garnison
00:32:44elle a marre
00:32:47de cette vie
00:32:47qu'elle a toujours connue
00:32:48qui est toujours la même
00:32:49partir, déménager
00:32:51et impermanence
00:32:52Joël Penel
00:32:54a 3 enfants
00:32:552 garçons
00:32:56et une petite fille
00:32:57qui meurt
00:32:58à l'âge de 8 ans
00:32:59en 1970
00:33:02elle demande le divorce
00:33:03et s'installe à Toulon
00:33:05la ville
00:33:06de sa courte gloire
00:33:07elle y rencontre
00:33:09un autre marin
00:33:10avec lequel
00:33:11elle a encore
00:33:112 garçons
00:33:12elle le persuade
00:33:16de quitter la marine
00:33:16et à tous les deux
00:33:18ils ouvrent
00:33:18un bar
00:33:19à Chicago
00:33:21Chicago étant
00:33:23le surnom
00:33:24de la basse ville
00:33:25de Toulon
00:33:25que tous les marins connaissent
00:33:27et là le bar
00:33:28le Candice Bar
00:33:29ils le tiennent
00:33:31à tous les deux
00:33:31mais l'affaire tourne court
00:33:34à l'époque
00:33:35le petit Chicago
00:33:36et le quartier
00:33:37chaud de Toulon
00:33:37le quartier
00:33:39où les marins
00:33:39peuvent consommer
00:33:40filles de joie
00:33:41et alcool
00:33:42les rixes
00:33:44sont fréquentes
00:33:45et un jour
00:33:46une bagarre éclate
00:33:46au Candice Bar
00:33:47le compagnon de joël
00:33:49tue alors
00:33:50un client
00:33:50à bout portant
00:33:51pour le compagnon
00:33:54c'est la prison
00:33:55et le Candice Bar
00:33:56doit fermer
00:33:57deux mois seulement
00:33:58après son ouverture
00:33:59et là elle va se retrouver
00:34:02encore toute seule
00:34:02et elle va commencer
00:34:05à vivre d'expédients
00:34:08d'abord
00:34:09elle va commencer
00:34:10à peindre
00:34:10et aller dans des ventes
00:34:13ramasser des croûtes
00:34:14en faire des faux
00:34:16mettre des fausses signatures
00:34:17ou les revendre
00:34:18elle va vivre comme ça
00:34:20par la suite
00:34:21elle va aussi
00:34:23essayer d'escroquer des gens
00:34:25mais au début
00:34:27des années 80
00:34:28Joëlle Penel
00:34:29se stabilise
00:34:30elle a trouvé
00:34:31un petit boulot
00:34:32chez un avocat de Toulonnais
00:34:33le fameux
00:34:34maître Boissonnet
00:34:35en fait
00:34:39elle allait apporter
00:34:40des dossiers
00:34:40pour Boissonnet
00:34:42elle les portait
00:34:43au tribunal
00:34:44ou à
00:34:45d'autres
00:34:46cabinets d'avocats
00:34:47et c'est tout
00:34:48elle faisait des courses
00:34:48les gendarmes
00:34:54savent donc
00:34:55maintenant
00:34:55comment maître Boissonnet
00:34:57connaissait les deux femmes
00:34:58Suzanne de Cançon
00:34:59bien sûr sa cliente
00:35:00mais aussi
00:35:01Joëlle Penel
00:35:02ils sont persuadés
00:35:03que l'avocat
00:35:04et l'artiste peintre
00:35:05ont fait main basse
00:35:06sur les biens
00:35:07de la vieille dame
00:35:07reste à trouver
00:35:08de quelle manière
00:35:09et surtout
00:35:10jusqu'où
00:35:11sont-ils allés pour ça
00:35:12les enquêteurs
00:35:14se penchent sur les relations
00:35:15entre Suzanne de Cançon
00:35:16et Joëlle Penel
00:35:17en fouillant
00:35:20dans la vie
00:35:20de Joëlle Penel
00:35:21les gendarmes
00:35:22apprennent
00:35:22qu'elle a vécu
00:35:23avec Suzanne de Cançon
00:35:24pendant plusieurs mois
00:35:25au grand hôtel
00:35:27de Toulon
00:35:27c'était en 1985
00:35:30justement
00:35:31au moment où Suzanne
00:35:32ne donne plus
00:35:33de signe de vie
00:35:34à ses amis
00:35:34les gendarmes
00:35:36interrogent alors
00:35:37les employés
00:35:37de l'hôtel
00:35:38rose était femme
00:35:39de chambre
00:35:40c'est elle
00:35:41qui a accueilli
00:35:42les deux femmes
00:35:43quand elles sont arrivées
00:35:44madame Penel
00:35:45est venue
00:35:46avec madame
00:35:47de Cançon
00:35:47et les deux enfants
00:35:49ils ont pris
00:35:51le troisième étage
00:35:52ils ont pris
00:35:54les trois chambres
00:35:56le lendemain
00:35:57madame Penel
00:35:58elle a ramené
00:36:00des tableaux
00:36:01dans sa chambre
00:36:02quatre grands tableaux
00:36:03elle m'avait dit
00:36:05rose vous faites attention
00:36:06qu'on vous ferait le ménage
00:36:08étant donné
00:36:08ce sont des tableaux
00:36:09de maître
00:36:10madame Penel
00:36:13elle était assez grande
00:36:15avec une chevelure
00:36:18assez ébouriffée
00:36:20c'est pour ça
00:36:20qu'on l'appelait
00:36:22la lionne
00:36:22elle était très gentille
00:36:24très avenante
00:36:25sympathique
00:36:26elle s'absentait souvent
00:36:28elle allait voir
00:36:29pour vendre les tableaux
00:36:30madame de Cançon
00:36:32elle tournait
00:36:33dans sa chambre
00:36:33je suis rentrée
00:36:34une fois l'après-midi
00:36:35pour lui demander
00:36:36madame de Cançon
00:36:37avez-vous besoin
00:36:37de quelque chose
00:36:38elle m'a dit
00:36:39non ma petite rose
00:36:40c'est gentil
00:36:40non
00:36:41vous sortez pas
00:36:42un peu
00:36:43j'ai dit
00:36:43si madame Penel
00:36:45ne vient pas me chercher
00:36:46je ne peux pas sortir
00:36:47pour la raison
00:36:48que je risque de tomber
00:36:49et puis madame Penel
00:36:51ça ne lui fera pas plaisir
00:36:52vous avez des bonnes relations
00:36:54mais au fil des semaines
00:36:57l'état de la vieille dame
00:36:59de 75 ans
00:37:00semble se dégrader
00:37:01elle avait un visage triste
00:37:05renfermé
00:37:07je lui ai posé la question
00:37:09madame de Cançon
00:37:11est-ce que vous êtes fatiguée
00:37:12madame de Cançon
00:37:15me répond
00:37:16oh ma pauvre rose
00:37:17si vous saviez
00:37:18alors je dis
00:37:19qu'est-ce qui vous arrive encore
00:37:21madame de Penel
00:37:23me fait des misères
00:37:24je n'ai pas prise au cirque
00:37:30parce que je n'ai pas trouvé
00:37:33madame Penel
00:37:35si méchante que ça
00:37:38grâce au personnel de l'hôtel
00:37:41les gendarmes apprennent
00:37:43que Joël Penel
00:37:44était en relation avec Londres
00:37:45et la Suisse
00:37:46elle se donnait beaucoup de mal
00:37:48pour vendre ses tableaux
00:37:49elle avait même embauché
00:37:51quelqu'un pour l'aider
00:37:52il nous parle d'une secrétaire
00:37:55d'une femme qui travaillait
00:37:56pour le compte
00:37:57de Joël Penel
00:37:58comme secrétaire
00:38:01comme dame de compagnie
00:38:02comme un peu
00:38:03pour tenir compagnie
00:38:05à De Cançon également
00:38:06et on va se mettre
00:38:08à la recherche
00:38:08de cette personne
00:38:09une secrétaire
00:38:10c'est au courant
00:38:12de tout
00:38:12on suit sa trace
00:38:14on arrive à un endroit
00:38:16on nous dit
00:38:16allez là on y va
00:38:17on interroge autour
00:38:18les gens
00:38:18ah mais je crois
00:38:20qu'elle est à tel endroit
00:38:21on va voir à tel endroit
00:38:21ah non non
00:38:22elle n'est pas là
00:38:22alors on revient
00:38:23et là on va perdre du temps
00:38:24la secrétaire reste introuvable
00:38:28alors les gendarmes
00:38:29s'intéressent à la maison
00:38:30où Suzanne de Cançon
00:38:31est morte
00:38:31une villa
00:38:33achetée par Joël Penel
00:38:35à la garde
00:38:35sur les hauteurs de Toulon
00:38:37les deux femmes
00:38:38s'y étaient installées
00:38:39en novembre 85
00:38:40après avoir quitté
00:38:42le grand hôtel
00:38:42Suzanne n'avait plus
00:38:44que 10 mois à vivre
00:38:45Joël Penel
00:38:47y habite toujours
00:38:47les gendarmes
00:38:48interrogent les voisins
00:38:50discrètement
00:38:50une voisine
00:38:54va nous expliquer
00:38:55qu'elle a aperçu
00:38:58une vieille dame
00:38:59que cette vieille dame
00:39:01semblait
00:39:02un peu délaissée
00:39:05ou souvent
00:39:05on l'entendait
00:39:06des cris
00:39:06madame de Cançon
00:39:10lorsqu'on nous
00:39:11on fait une enquête
00:39:11est déjà morte
00:39:12depuis deux ans
00:39:13et là
00:39:14on constate
00:39:15que plus on prend du temps
00:39:18plus les preuves
00:39:19si on en trouve
00:39:20vont disparaître
00:39:21le juge me dit
00:39:22il faut tomber
00:39:23il faut y aller
00:39:24tomber
00:39:27c'est à dire
00:39:28arrêter Joël Penel
00:39:29et perquisitionner
00:39:30sa villa
00:39:30le 15 juin 88
00:39:32les gendarmes débarquent
00:39:34à 6h du matin
00:39:35on sonne
00:39:37personnelle
00:39:38ouvre la porte
00:39:39elle est
00:39:40en robe de chambre
00:39:42elle ne crie pas
00:39:43au loup
00:39:43elle n'est pas étonnée
00:39:44on dit qu'on a une perquisition
00:39:47à faire
00:39:47et puis on commence
00:39:48à se gratter la tête
00:39:48parce que
00:39:49on jette un oeil
00:39:50à droite et à gauche
00:39:51et on voit des documents
00:39:52partout
00:39:53des documents
00:39:56partout
00:39:57partout
00:39:57partout
00:39:58on ne peut pas lire
00:40:01à ce moment là
00:40:02tout
00:40:02donc on va tout saisir
00:40:04et puis on va saisir
00:40:05les
00:40:06la centaine de tableaux
00:40:08que l'on va trouver
00:40:09dans l'appartement
00:40:10certains manifestement
00:40:12avaient été peints
00:40:13par madame Pesnel
00:40:14puisqu'on y trouve
00:40:15un chevalet
00:40:15avec des tuts de peinture
00:40:16et tout ça
00:40:17Joël Penel
00:40:19se présente
00:40:19comme artiste peintre
00:40:21elle aurait fait
00:40:21les beaux-arts
00:40:22et signes-étoiles
00:40:23Candice-Candy
00:40:25la perquisition continue
00:40:28et au milieu du désordre
00:40:30les gendarmes
00:40:30tombent sur son portefeuille
00:40:32et là on va
00:40:34aux surprises
00:40:35trouver une photo
00:40:36de madame de Quinson
00:40:39quand vous regardez
00:40:42la photo
00:40:43vous avez le haut au cœur
00:40:45parce que cette photo
00:40:47vous voyez une petite dame
00:40:49qui a des moustaches
00:40:50qui a une barbe
00:40:52qui n'est pas entretenue
00:40:52qui a les cheveux raides
00:40:54manifestement
00:40:55c'est la photo
00:40:55d'une dame
00:40:56qui est délaissée
00:40:57Joël Penel
00:41:03est mise en garde à vue
00:41:04Joël Penel
00:41:09ne va faire que de parler
00:41:10elle va raconter
00:41:11un tas d'histoires
00:41:12c'est plus
00:41:14la mythomanie
00:41:14qu'autre chose
00:41:15elle va se faire passer
00:41:16tantôt pour la comtesse
00:41:18de bonne main
00:41:19semble-t-il
00:41:20elle nous dira même
00:41:21qu'elle connaît un ministre
00:41:22qu'elle citera
00:41:23qu'elle a des avocats
00:41:26très connus
00:41:27et de renom
00:41:27qui s'occupent d'elle
00:41:28qu'elle connaît du monde
00:41:29et c'est pas des menaces
00:41:31mais bon
00:41:33ça pourrait y ressembler
00:41:34pour certains
00:41:35elle essaye de s'en sortir
00:41:36Au bout de 48 heures
00:41:38de garde à vue
00:41:39Joël Penel
00:41:40est présenté
00:41:41au juge
00:41:42d'instruction
00:41:42de Toulon
00:41:43Monsieur Bernard
00:41:45Joël Penel
00:41:46se retrouve donc
00:41:46dans votre bureau
00:41:47et que vous dit-elle
00:41:49des relations
00:41:50qu'elle entretenait
00:41:51avec Madame Suzanne
00:41:52de Canson ?
00:41:53Ce sont des relations
00:41:54je ne dis pas
00:41:55quasiment filiales
00:41:56mais en tout cas
00:41:57affectives
00:41:58c'est une
00:41:58c'était une dame
00:42:00abandonnée
00:42:01qu'elle a hébergée
00:42:03qu'elle a nourrie
00:42:05qu'elle a fait voyager
00:42:07l'a emmenée en Suisse
00:42:08dans différents endroits
00:42:09et elle l'a présentée
00:42:11de manière très courante
00:42:13comme sa tante
00:42:14il a été relevé
00:42:15dans la procédure
00:42:16que Joël Penel
00:42:17se faisait appeler
00:42:18par certains
00:42:18Penel de Canson
00:42:19c'est dire
00:42:21elle a même eu
00:42:22un passeport
00:42:22sous ce nom
00:42:23Comment explique-t-elle
00:42:24que Madame de Canson
00:42:25est léguée d'étoiles
00:42:27à sa grand-mère
00:42:28Madame Chapuis ?
00:42:29Sa grand-mère
00:42:30donc Jeanne Chapuis
00:42:32était une milliardaire
00:42:34qui fréquentait
00:42:35la famille de Canson
00:42:36et sa grand-mère même
00:42:39qui aurait été
00:42:42à un moment donné
00:42:42la maîtresse de Balthus
00:42:43ce qui faisait
00:42:45que Joël Penel
00:42:46était devenu
00:42:46le modèle de Balthus
00:42:47cette grand-mère
00:42:49donc avait même
00:42:50acheté des toiles
00:42:51au père de Canson
00:42:53donc avant 1958
00:42:56et ils étaient connus
00:42:59de la famille
00:42:59ce qui fait que
00:43:00Madame de Canson
00:43:02tout naturellement
00:43:03dans l'année 79
00:43:04avait décidé
00:43:05de tout donner
00:43:08à Jeanne Chapuis
00:43:10ça c'est de la mythomanie
00:43:12pure et simple
00:43:12complètement oui
00:43:14Le juge l'inculpe
00:43:21et l'écrou pour vol
00:43:22faux et usage de faux
00:43:24et non-assistance
00:43:25à personne en danger
00:43:26A la section de recherche
00:43:29d'Aix-en-Provence
00:43:30les gendarmes
00:43:31ont du pain sur la planche
00:43:32ils doivent analyser
00:43:34tous les papiers
00:43:35saisis dans la maison
00:43:36de Joël Penel
00:43:36Major Jean-Louis Bertrand
00:43:39directeur d'enquête
00:43:40section de recherche
00:43:41de la gendarmerie
00:43:42d'Aix-en-Provence
00:43:43On va retrouver des donations
00:43:44de Canson
00:43:46d'une date
00:43:47et puis d'une autre date
00:43:48on va retrouver
00:43:49des documents
00:43:51attestant
00:43:52que c'est
00:43:52sa grand-mère
00:43:54une certaine Chapuis
00:43:56qui lui donnera
00:43:56les tableaux
00:43:58donc tout ça
00:43:59on sait qu'on va pouvoir
00:44:00travailler là-dessus
00:44:00et on va le faire
00:44:02Un travail de 10 ans
00:44:04Les donations
00:44:05sont toutes signées
00:44:06par Suzanne de Canson
00:44:07Certaines sont datées
00:44:08de 85
00:44:09d'autres de 86
00:44:11et même de 84
00:44:12Des donations étranges
00:44:15qui se contredisent
00:44:16En 84
00:44:17Suzanne donne ses biens
00:44:18à Joël Penel
00:44:19directement
00:44:20Mais en 85
00:44:21elle les a donnés
00:44:22ou vendus
00:44:23à Jeanne Chapuis
00:44:24Les gendarmes
00:44:25s'arrachent les cheveux
00:44:26lorsqu'ils tombent
00:44:27sur un document officiel
00:44:28authentifié par un notaire
00:44:30C'est le testament
00:44:32de Suzanne
00:44:33qui fait de Joël Penel
00:44:34son unique héritière
00:44:36Elle l'a signée
00:44:37six mois avant sa mort
00:44:38devant deux témoins
00:44:40un ami de Joël Penel
00:44:42son chauffeur
00:44:43et son aide-ménagère
00:44:45Généralement
00:44:47on prend
00:44:48deux personnes
00:44:49mais il ne faut pas
00:44:50que ces personnes
00:44:50soient liées
00:44:51soit avec
00:44:52le bénéficiaire
00:44:54soit le testateur
00:44:55Ce n'est pas possible
00:44:57Mais là
00:44:58on va retrouver
00:44:59les deux personnes
00:44:59une est employée
00:45:00de Pessnel
00:45:01donc elle est dépendante
00:45:02de Pessnel
00:45:03et l'autre
00:45:04c'est le chauffeur
00:45:05chauffeur amant
00:45:06de Pessnel
00:45:07Le document est suspect
00:45:10Les gendarmes
00:45:12cherchent l'aide-ménagère
00:45:13Josiane n'est plus
00:45:15au service de Penel
00:45:16aujourd'hui
00:45:17elle peut parler
00:45:18On va la retrouver
00:45:21et lorsqu'on va l'entendre
00:45:22on va lui poser des questions
00:45:24sur les conditions
00:45:26dans lesquelles
00:45:26elle a été témoin
00:45:28pour le testament
00:45:30et elle va
00:45:32on lui demande
00:45:33de nous raconter
00:45:33comment ça s'est passé
00:45:34elle va commencer
00:45:35à nous dire
00:45:36que madame de Canson
00:45:38était très affaiblie
00:45:39qu'il fallait plus ou moins
00:45:40la porter
00:45:41pour la mener
00:45:42qu'elle était assise
00:45:44et que le notaire
00:45:45posait des questions
00:45:46et que c'était souvent
00:45:47Pessnel
00:45:48qui répondait aux questions
00:45:49Josiane
00:45:51aide-ménagère
00:45:51de Joël Penel
00:45:52Le notaire lui a demandé
00:45:54à plusieurs reprises
00:45:55est-ce que vous êtes d'accord
00:45:56pour signer ?
00:45:57Il l'a demandé
00:45:57à plusieurs reprises
00:45:58parce qu'elle ne répondait pas
00:45:59Elle faisait
00:46:00eux, eux, eux
00:46:01C'est tout ce qu'elle faisait
00:46:03C'est tout ce qu'elle disait
00:46:04Puis elle a fini par signer
00:46:07Le notaire l'a accepté
00:46:09mais moi j'étais
00:46:10Je me suis dit
00:46:12c'est bizarre
00:46:13qu'il accepte ça
00:46:14comme ça
00:46:15Mais on lui a dit
00:46:18elle l'aurait-elle battu
00:46:19l'aurait-elle secoué
00:46:20devant le notaire
00:46:21ça nous paraissait
00:46:21totalement improbable
00:46:24Elle dit non
00:46:25c'est depuis quelque temps
00:46:26elle nous disait
00:46:26elle lui disait toujours
00:46:27tu vas signer
00:46:28tu vas signer
00:46:28et puis Mme Pessnel
00:46:30était de plus en plus
00:46:31sévère et plus rude
00:46:33avec Mme de Canson
00:46:34Elle la privait de tout
00:46:38elle n'avait
00:46:39même pas un mouchoir
00:46:41pour s'essuyer le nez
00:46:42elle n'avait rien
00:46:43pas un crayon pour écrire
00:46:45elle n'avait pas
00:46:46pas de papier à lettres
00:46:47pas d'enveloppe
00:46:48elle n'avait rien
00:46:49absolument rien
00:46:50rien rien
00:46:51dans sa chambre
00:46:52il n'y avait que le matelas
00:46:53le drap et la couverture
00:46:55c'est tout ce qu'elle avait
00:46:56elle n'avait pas de meubles
00:46:59pas de placards
00:47:00Mme Pessnel m'a simplement dit
00:47:07c'est une vieille tante
00:47:07au cinquième degré
00:47:08je la garde
00:47:10parce que les gendarmes
00:47:11l'ont amenée
00:47:12elle dormait dans les cartons
00:47:14et elle m'a dit
00:47:15qu'elle était folle
00:47:16qu'elle était dangereuse
00:47:18et folle
00:47:19voilà c'était tout
00:47:20ce qu'elle me disait
00:47:21il y avait une porte vitrée
00:47:32elle ne pouvait pas sortir
00:47:34c'était fermé
00:47:34et l'autre porte
00:47:36qui donnait dans l'appartement
00:47:37était fermée à clé aussi
00:47:38elle était dans le noir
00:47:40strictement
00:47:41dans le noir
00:47:42même en pleine journée
00:47:43que ce soit un jour et une nuit
00:47:44si elle était dans le noir
00:47:45c'est Mme Pessnel
00:47:47qui a dévissé l'ampoule
00:47:48parce qu'elle trouvait
00:47:49que Mme de Canson
00:47:51usait trop d'électricité
00:47:52elle était squelettique
00:47:56elle était
00:47:58un squelette ambulant
00:48:00elle était vraiment squelettique
00:48:02elle tenait pas bien debout
00:48:03elle était faible
00:48:05elle mangeait pas
00:48:07elle n'avait rien à manger
00:48:08que des yaourts
00:48:10des céréales
00:48:11mais elle mangeait jamais
00:48:13avec nous à table
00:48:14comme nous
00:48:14jamais
00:48:15Mme Pessnel la douchait
00:48:21évidemment
00:48:22c'est toujours elle
00:48:23qui la douchait
00:48:24et Mme de Canson
00:48:25s'est plaint
00:48:25que c'était trop chaud
00:48:26et ça
00:48:27elle s'est plaint
00:48:28plusieurs fois
00:48:28elle lui lavait
00:48:29tout le corps
00:48:30avec le mire
00:48:31les cheveux
00:48:32tout
00:48:32tout
00:48:32tout
00:48:33tout est passé
00:48:34avec des serpillères
00:48:36elle l'essuyait
00:48:37pas de serviettes
00:48:38des serpillères
00:48:38je me souviens très bien
00:48:40et un jour
00:48:41elle l'a douchée
00:48:42puis à un moment donné
00:48:43Mme Pessnel s'est éclipsée
00:48:46et je me suis retrouvée seule
00:48:48avec Mme de Canson
00:48:49puis elle a failli glisser
00:48:51elle s'est accrochée
00:48:53elle s'est accrochée
00:48:55au dernier moment
00:48:55puis elle m'a dit
00:48:56elle s'est retournée vers moi
00:48:57d'un air réplorant
00:48:58en me disant
00:48:59elle veut me tuer
00:49:00elle veut me tuer
00:49:01voilà c'est tout ce qu'elle m'a dit
00:49:02moi je savais pas quoi faire
00:49:06moi je me dis
00:49:07dans quel drap je me suis mise
00:49:08je savais pas
00:49:10j'étais pas tranquille non plus
00:49:12de voir ça
00:49:13et je ne pouvais rien faire
00:49:15elle était sous la coupe
00:49:17de Mme de Penel
00:49:18Major Jean-Louis Bertrand
00:49:21directeur d'enquête
00:49:23section de recherche
00:49:24de la gendarmerie d'Aix-en-Provence
00:49:25on va de surprise en surprise
00:49:28ça s'aggrave en permanence
00:49:32les gendarmes retrouvent
00:49:35trois autres aides ménagères
00:49:36qui ont travaillé chez Joël Penel
00:49:38entre janvier et septembre 1986
00:49:40elles racontent toutes
00:49:42la même histoire épouvantable
00:49:44l'une d'elles aurait même alerté
00:49:46les services sociaux sans succès
00:49:48elle avait vu Mme de Canson
00:49:52manger ses excréments
00:49:53Mme Luçon
00:49:55aide ménagère de Suzanne de Canson
00:49:57dans le journal télévisé
00:49:59du 6 octobre 1991
00:50:01je lui ai dit
00:50:02Mme de Canson
00:50:03vous êtes une dame sensée
00:50:05elle m'a dit
00:50:06oui j'ai toute ma tête
00:50:07je lui ai dit
00:50:07alors pourquoi vous mangez vos matières
00:50:09je lui ai dit
00:50:10les premiers jours
00:50:11que je suis arrivée
00:50:12vous aviez toujours des matières
00:50:13dans la bouche
00:50:14et elle s'est vraiment redressée
00:50:19j'ai senti une dame
00:50:22vraiment du bon monde
00:50:24qui s'est redressée
00:50:25pour me dire
00:50:25j'ai faim
00:50:26mais ça a claqué sec net
00:50:29quand elle m'a dit
00:50:30j'ai faim
00:50:30et elle mourait de faim
00:50:32elle mourait de faim
00:50:34M. Francis Piner
00:50:46avec M. Vicentini
00:50:48vous êtes l'avocat
00:50:48de la partie civile
00:50:49avec le témoignage
00:50:50des aides ménagères
00:50:51l'affaire prend
00:50:52une autre tournure
00:50:53comment va réagir
00:50:55la famille à ces témoignages
00:50:56la famille elle est effondrée
00:50:57parce qu'au départ
00:50:58elle a une démarche
00:51:00on veut connaître la vérité
00:51:01mais elle ne pense pas
00:51:02que la vérité puisse être ça
00:51:03et après il y a
00:51:05toute une série de sentiments
00:51:06il y a le sentiment
00:51:08de se dire
00:51:08qu'on n'a pas été
00:51:09assez vigilants
00:51:10il y a le sentiment
00:51:11on aurait dû avoir
00:51:12plus de nouvelles
00:51:12il y a le sentiment
00:51:13pourquoi personne n'a parlé
00:51:15pourquoi ces aides ménagères
00:51:17n'ont pas prévenu la police
00:51:18donc c'est des sentiments variés
00:51:19et puis surtout
00:51:20c'est une profonde tristesse
00:51:22parce que c'est une fin
00:51:23triste et sordide
00:51:24Pensez-vous que
00:51:25Suzanne Descanson
00:51:26ait pu succomber
00:51:27au sévice
00:51:29infligé par Joël Penel ?
00:51:31Est-ce qu'en gros
00:51:32c'est un meurtre ?
00:51:33Est-ce que c'est des actes
00:51:34de torture et de barbarie
00:51:35qui ont entraîné la mort ?
00:51:37Ou est-ce que c'est
00:51:38la séquestration ?
00:51:39Le juge d'instruction
00:51:39va retenir la qualification
00:51:41de séquestration
00:51:42parce que celle-là
00:51:42elle est indiscutable
00:51:43elle est établie
00:51:44par de nombreux témoignages
00:51:46Les conséquences de la séquestration
00:51:48sont-elles la mort ?
00:51:50C'est difficile de répondre
00:51:51on a quelqu'un
00:51:53dont le corps a été incinéré
00:51:54on n'a pas d'éléments
00:51:56qui permettent d'établir
00:51:57ce qu'en droit
00:51:58on appellerait
00:51:58le lien de causalité
00:51:59entre les mauvais traitements
00:52:00et le décès
00:52:02et donc l'homicide volontaire
00:52:04on ne peut pas le retenir
00:52:05donc on reste sur la séquestration
00:52:06enfin qui est une qualification
00:52:07suffisamment grave
00:52:09puisque ça relève
00:52:10de la cour d'assises
00:52:11Tandis que Joël Penel
00:52:17est poursuivi pour séquestration
00:52:19Maître Robert Boissonnet
00:52:21est inculpé
00:52:22de non-assistance
00:52:23à personne en danger
00:52:24et complicité de vol
00:52:25L'avocat est lui aussi écroué
00:52:27On a la conviction
00:52:36à ce moment-là
00:52:37qu'elle est morte
00:52:38à cause des tableaux
00:52:39Donc pour conforter
00:52:43notre opinion
00:52:44et ce qu'on fait
00:52:45il nous faut retrouver
00:52:46tous les tableaux
00:52:46et de toute façon
00:52:47ça fait partie
00:52:48de notre mission
00:52:50Et le gendarme a une idée
00:52:54Publier un appel à témoins
00:52:57dans la gazette
00:52:58de l'hôtel Drouot
00:52:58avec une photo
00:53:00des tableaux recherchés
00:53:01et le portrait
00:53:02de Joël Penel
00:53:03et Robert Boissonnet
00:53:04Et ça marche
00:53:06Un grand antiquaire
00:53:11français va nous contacter
00:53:12et lorsqu'on ira le voir
00:53:15il nous remettra
00:53:17trois dessins
00:53:18de Boucher
00:53:19et de Fragonard
00:53:19et nous indiquera
00:53:21que c'est Joël Penel
00:53:22qui lui a vendu
00:53:23C'est Penel
00:53:30qui a vendu
00:53:31ses trois dessins
00:53:31ceux que Suzanne de Canson
00:53:33avait déposé
00:53:34au Mont de Piété
00:53:35en 1984
00:53:36Elle ne retrouvait plus
00:53:38son récipicet
00:53:38et quelqu'un
00:53:39avait retiré
00:53:40ses dessins
00:53:41Les gendarmes
00:53:43savent maintenant
00:53:44qui est la voleuse
00:53:45Alors qu'elle ne connaissait
00:53:49Suzanne de Canson
00:53:50que depuis quelques mois
00:53:51elle avait déjà fait
00:53:53main basse
00:53:53sur ses biens
00:53:54L'antiquaire
00:53:56explique aussi
00:53:57aux gendarmes
00:53:58que Joël Penel
00:53:59a voulu lui vendre
00:54:00des faux
00:54:01Elle se sert
00:54:05à la collection
00:54:06de Canson
00:54:06pour écouler
00:54:07tous les faux
00:54:08qu'elle a fait
00:54:08et même des oeuvres
00:54:09qu'elle a fait
00:54:10à signer
00:54:11Candie Candice
00:54:12Elle arrivera
00:54:13à en vendre
00:54:14Elle va en vendre
00:54:15quelques-uns
00:54:16Elle va en vendre
00:54:17des faux muraux
00:54:17je crois
00:54:18et puis je ne sais plus
00:54:19d'un chagall
00:54:19qui va lui créer
00:54:21quelques ennuis
00:54:22mais elle ne remboursera jamais
00:54:24Les gendarmes
00:54:27retrouvent aussi
00:54:28le guardi
00:54:29chez un galeriste
00:54:30Le Quentin Latour
00:54:31lui
00:54:31est chez un avocat suisse
00:54:33Tous disent
00:54:35la même chose
00:54:36C'est Joël Penel
00:54:37qui leur a vendu
00:54:38ses toiles
00:54:39souvent pour une bouchée
00:54:40de pain
00:54:40Petit à petit
00:54:42les gendarmes
00:54:43découvrent cette femme
00:54:44une aventurière
00:54:45dotée d'un aplomb
00:54:46extraordinaire
00:54:47Il faut voir
00:54:51Mme Penel
00:54:51Elle a
00:54:53c'est une
00:54:54ce qu'on appelle
00:54:56une forte femme
00:54:56Elle a un caractère
00:54:58Elle arrive
00:54:59à être convaincante
00:55:00quand elle parle
00:55:01Ça ne la gêne pas
00:55:02de mentir
00:55:03devant tout le monde
00:55:03même si elle est prise
00:55:04en train de mentir
00:55:05elle va retomber
00:55:06sur ses pattes
00:55:06en permanence
00:55:07Ses proches
00:55:10décrivent
00:55:11une personne
00:55:11à la fois
00:55:12attachante
00:55:13et complexe
00:55:15Christine
00:55:16amie de Joël Penel
00:55:18C'était un personnage
00:55:19qui pouvait être
00:55:20très sympathique
00:55:21et qui parfois
00:55:24pouvait être
00:55:24odieuse
00:55:25Elle se débrouillait
00:55:27toujours pour avoir raison
00:55:28Puis moi
00:55:28je ne la contrariais pas
00:55:29à partir du moment
00:55:30où quelqu'un
00:55:32veut absolument
00:55:32affirmer quelque chose
00:55:34même si je sais
00:55:35que c'est faux
00:55:35je lui laisse
00:55:37le brôle
00:55:37Elle était
00:55:40de bonne compagnie
00:55:41même quand elle
00:55:41quand elle
00:55:44mythomaniait
00:55:44et bien je l'écoutais
00:55:47avec plaisir
00:55:48parce que c'était drôle
00:55:49C'est une personne
00:55:52qui avait
00:55:53grand besoin
00:55:54de reconnaissance
00:55:55de se faire mousser
00:55:57comme on dit
00:55:57Oui
00:55:58Ses avocats
00:56:00eux-mêmes
00:56:01restent bluffés
00:56:02par cette femme
00:56:03Maître Jean-Claude Gudicelli
00:56:05avocat de Joël Penel
00:56:07Elle avait un don
00:56:08inouï
00:56:09je dis bien inouï
00:56:10de la sagacité
00:56:12le sang de l'anticipation
00:56:13Elle réussissait
00:56:14à tisser
00:56:16des relations
00:56:17privilégiées
00:56:18Elle était une prédatrice
00:56:19et lorsqu'elle rencontre
00:56:20Madame de Cançon
00:56:21pour elle
00:56:21c'est bingo
00:56:23elle sait
00:56:24qu'elle va gagner au loto
00:56:25Madame de Cançon
00:56:29représente tout
00:56:31ce que
00:56:33ne détenait pas
00:56:35Joël Penel
00:56:36c'est-à-dire
00:56:36un nom
00:56:37particule
00:56:39l'argent
00:56:41le milieu culturel
00:56:44Maître Hervé Andréani
00:56:46avocat de Joël Penel
00:56:48C'est quelqu'un
00:56:49qui n'a pas eu sans doute
00:56:49la vie
00:56:50qu'elle espérait avoir
00:56:51et qui a essayé
00:56:52de recomposer
00:56:53une vie
00:56:54à la quarantaine
00:56:55ou la cinquantaine
00:56:56à partir d'éléments
00:56:57qui n'étaient pas vraiment
00:56:57les siens
00:56:58pour essayer de se propulser
00:56:59dans un rôle
00:56:59pour être enfin
00:57:00la grande dame
00:57:01qu'elle espérait être
00:57:02et qu'elle n'avait pas pu être
00:57:03en réalité
00:57:04dans la vraie vie
00:57:05Une manipulatrice
00:57:07certes
00:57:08une voleuse
00:57:08peut-être
00:57:09mais de là
00:57:10à séquestrer
00:57:10Suzanne de Cançon
00:57:11ou à monter seule
00:57:12cette captation d'héritage
00:57:14les avocats
00:57:15de Joël Penel
00:57:15ne l'en croient pas capable
00:57:17A cette période
00:57:19les gendarmes
00:57:20et les juges
00:57:21pensent la même chose
00:57:22que la défense
00:57:22sur la captation d'héritage
00:57:24d'autant plus
00:57:25qu'il y a du nouveau
00:57:26côté enquête
00:57:27les gendarmes
00:57:28ont retrouvé
00:57:28un témoin capital
00:57:29qui a beaucoup de choses
00:57:30à leur raconter
00:57:31Ce témoin si précieux
00:57:34c'est la secrétaire
00:57:36Joël Penel
00:57:37l'avait embauchée
00:57:38quelques mois
00:57:38en 85
00:57:39quand elle s'était installée
00:57:41au grand hôtel de Toulon
00:57:41avec Suzanne de Cançon
00:57:43Les gendarmes
00:57:44la cherchaient partout
00:57:45ils l'ont retrouvée
00:57:46en octobre 88
00:57:47Joël Castro
00:57:49secrétaire de Joël Penel
00:57:51Je vois arriver
00:57:52deux gendarmes
00:57:52chez moi
00:57:53qui me disent
00:57:55voilà
00:57:56on vient pour
00:57:57madame Penel
00:57:58et je leur dis
00:57:59et bien
00:57:59ça devait arriver
00:58:00et en fait
00:58:01j'étais ravie
00:58:02parce que
00:58:03elle ne m'avait jamais payée
00:58:04pendant ces six mois
00:58:05et donc
00:58:06je me suis dit
00:58:07et bien voilà
00:58:07la retourne
00:58:08Du coup
00:58:09la secrétaire
00:58:10parle volontiers
00:58:11elle explique
00:58:12que Penel
00:58:13l'a embauchée
00:58:13pour inventorier
00:58:14tous ses tableaux
00:58:15mais pas seulement
00:58:16Un jour
00:58:19elle me demande
00:58:19de taper
00:58:19un petit texte
00:58:21de quelques lignes
00:58:22qui disait
00:58:23je sous-signais
00:58:24madame de Cançon
00:58:25et etc
00:58:27en fait
00:58:27qui voulait dire
00:58:28qu'elle voulait
00:58:29que madame de Cançon
00:58:30lui léguait
00:58:31à madame Penel
00:58:32les tableaux
00:58:32Joël Castro
00:58:35raconte
00:58:35qu'elle a tapé
00:58:36trois donations bizarres
00:58:37au nom de
00:58:38Joël Penel
00:58:39et de Jeanne Chapuis
00:58:40elle les reconnaît
00:58:41parmi celles
00:58:42que les gendarmes
00:58:43ont saisies
00:58:43dans la villa
00:58:44Et l'une des attestations
00:58:49sera datée
00:58:50de 1979
00:58:51on lui fera remarquer
00:58:53mais bon
00:58:54elle était secrétaire
00:58:55à l'époque
00:58:56elle cherchait du travail
00:58:57elle en avait besoin
00:58:57et donc
00:58:59on comprend très bien
00:59:00qu'elle était
00:59:00aux ordres
00:59:01de Penel
00:59:02Elle avait une emprise
00:59:03psychologique
00:59:04sur ses enfants
00:59:06sur madame de Cançon
00:59:07sur moi
00:59:08de toute façon
00:59:12elle manipulait
00:59:13tout le monde
00:59:13Une forte personnalité
00:59:16des donations bidons
00:59:17des signatures douteuses
00:59:19jusqu'ici
00:59:19rien de neuf
00:59:20Les gendarmes
00:59:21veulent saisir
00:59:22la machine à écrire
00:59:23la secrétaire
00:59:24ne l'a plus
00:59:25la machine
00:59:26n'était pas à elle
00:59:27ni à Joël Penel
00:59:28elle appartenait
00:59:30à une avocate
00:59:31de Marseille
00:59:32Les deux femmes
00:59:34étaient allées
00:59:35la chercher
00:59:35chez elle
00:59:36Nous l'avons attendue
00:59:39devant sa villa
00:59:40en discutant
00:59:41avec madame
00:59:42Pénage
00:59:42je sais qu'elle s'appelait
00:59:43maître Pestel de Bord
00:59:44elle est descendue
00:59:45et elle nous a amené
00:59:46une machine à écrire
00:59:47Maître Marie-France
00:59:50Pestel de Bord
00:59:51l'une des collaboratrices
00:59:52du plus célèbre
00:59:53et plus mondain
00:59:54ténor de l'époque
00:59:55maître Paul Lombard
00:59:57Proche du pouvoir
00:59:59il est le spécialiste
01:00:00des successions prestigieuses
01:00:02comme celles de Picasso
01:00:03Miro
01:00:04ou Bonnard
01:00:05Le témoignage
01:00:07de la secrétaire
01:00:07est une bombe
01:00:08Pourquoi Pestel de Bord
01:00:10a-t-elle prêté
01:00:11une machine à écrire
01:00:12à Joël Penel ?
01:00:13L'aurait-elle aidé
01:00:14à monter
01:00:15la fausse succession
01:00:16Chapuis ?
01:00:18Major Jean-Louis Bertrand
01:00:20directeur d'enquête
01:00:21section de recherche
01:00:22de la gendarmerie
01:00:23d'Aix-en-Provence
01:00:24Bon ben
01:00:24on va voir Pestel de Bord
01:00:25Alors là
01:00:27Pestel de Bord
01:00:28n'est plus
01:00:28collaboratrice de Lombard
01:00:30c'est
01:00:31elle tient un cabinet
01:00:32elle a ouvert un cabinet
01:00:33à elle-même
01:00:33mais elle n'a pas d'état d'âme
01:00:35elles vont nous expliquer
01:00:36qu'elle a œuvré
01:00:36sous les ordres
01:00:37de maître Paul Lombard
01:00:39et que
01:00:40elle a effectivement
01:00:41passé la machine
01:00:42à écrire
01:00:43mais qu'elle n'est pas
01:00:44responsable du contenu
01:00:45de ce qui a été tapé
01:00:46Monsieur le juge
01:00:47qu'avez-vous à ce moment-là
01:00:48contre Marie-France Pestel de Bord ?
01:00:51Madame Pestel de Bord
01:00:52se présente
01:00:53j'allais dire
01:00:54comme la collaboratrice
01:00:55c'est-à-dire
01:00:56je fais ce que mon patron
01:00:58m'a demandé de faire
01:00:59mon patron m'a demandé
01:01:00de gérer
01:01:01les aspects
01:01:02administratifs
01:01:04et techniques
01:01:05de la vente des tableaux
01:01:07ce que je fais
01:01:08Maître Pestel de Bord
01:01:11dit
01:01:11la stratégie
01:01:13en quelque sorte
01:01:13la globalité du dossier
01:01:15c'était
01:01:16Maître Lombard
01:01:16qui dirigeait
01:01:17bien sûr
01:01:17bien sûr
01:01:19cette affaire
01:01:19c'est lui
01:01:20qui avait été saisi
01:01:20c'est pas Maître Pestel de Bord
01:01:22vous entendez
01:01:23Maître Lombard
01:01:23dans votre bureau
01:01:24pendant 5 heures
01:01:25il m'affirme
01:01:26je ne suis intervenu
01:01:27personnellement
01:01:28que dans les contacts
01:01:29avec le Louvre
01:01:30et Christiz
01:01:30le surplus
01:01:32je n'ai pas géré
01:01:34le surplus
01:01:35tout le reste
01:01:36ressortait
01:01:37de la compétence
01:01:38de ma collaboratrice
01:01:39le 9 décembre
01:01:40vous inculpez
01:01:41Maître Pestel de Bord
01:01:42pour quel motif ?
01:01:44pour sa complicité
01:01:45de faux en écriture privée
01:01:47et complicité de vol
01:01:48et Maître Lombard ?
01:01:50je n'ai pas encore
01:01:52à ce moment-là
01:01:52au début du mois de décembre
01:01:55d'éléments
01:01:56pouvant
01:01:57me permettre
01:02:00de prononcer
01:02:00une mise en examen
01:02:02Dominique
01:02:07le juge
01:02:08n'a pas que le cabinet
01:02:09d'avocat marseillais
01:02:10dans le collimateur
01:02:10il a aussi le Louvre
01:02:11pourquoi ?
01:02:12parce que le juge
01:02:13d'instruction
01:02:13va découvrir
01:02:14l'existence
01:02:15de cette lettre
01:02:15Frédéric
01:02:16c'est une lettre
01:02:17qui a été écrite
01:02:18par Pierre Rosenberg
01:02:19qui est le chef
01:02:21du département
01:02:22des peintures
01:02:23au musée du Louvre
01:02:23et il a écrit
01:02:24cette lettre
01:02:25le 6 mars 1981
01:02:27à Madame de Cançon
01:02:28dans cette lettre
01:02:30il lui explique
01:02:31que le musée du Louvre
01:02:32aimerait se porter
01:02:33acquéreur
01:02:34d'un tableau
01:02:35qu'elle possède
01:02:36et qui est
01:02:36le gentilhomme
01:02:37sévillant
01:02:38de Murillo
01:02:39et alors ?
01:02:40et alors
01:02:41ça pose un vrai problème
01:02:42parce que
01:02:43Pierre Rosenberg
01:02:45écrit cette lettre
01:02:46en 1981
01:02:47à Madame de Cançon
01:02:48ce qui fait
01:02:49que c'est très bien
01:02:50à qui appartient
01:02:51le tableau
01:02:51en 1981
01:02:52et c'est lui
01:02:54quelques années plus tard
01:02:55en 1985
01:02:56qui va se charger
01:02:58des transactions
01:02:59entre Christie's
01:03:00et le musée du Louvre
01:03:01pour l'achat
01:03:02du même tableau
01:03:03qui apparaît
01:03:04au catalogue
01:03:05de Christie's
01:03:06mais appartenant
01:03:07à une certaine
01:03:08Madame Chapuis
01:03:09décédée en 79
01:03:11ça aurait quand même
01:03:12dû éveiller des soupçons
01:03:13pour Pierre Rosenberg
01:03:14donc pour le juge
01:03:16Pierre Rosenberg
01:03:17a fermé les yeux
01:03:18sur la véritable
01:03:20propriétaire
01:03:20de ce tableau
01:03:21il aurait pu être
01:03:22un peu plus prudent
01:03:23en tout cas
01:03:23il ne s'est pas posé
01:03:24plus de questions que ça
01:03:25et c'est la raison
01:03:26pour laquelle
01:03:27le 13 décembre 1988
01:03:29le juge Bernard
01:03:30va mettre en examen
01:03:32enfin va inculper
01:03:33aujourd'hui on dirait
01:03:33mettre en examen
01:03:34Pierre Rosenberg
01:03:35pour complicité de recel
01:03:37Maître Lombard
01:03:44Maître Pesteldebord
01:03:45Pierre Rosenberg
01:03:46la liste des personnalités
01:03:48impliquées dans l'affaire
01:03:49grossit
01:03:50et la presse
01:03:51s'empare de l'histoire
01:03:52dans les journaux
01:03:53on ne parle plus
01:03:54que du Murillo
01:03:55et des inculpations
01:03:56qui se succèdent
01:03:57l'affaire Conson
01:03:58devient une affaire
01:03:59nationale
01:04:00pas loin
01:04:01de l'affaire d'Etat
01:04:01le 21 décembre 88
01:04:05Paul Lombard
01:04:07est à nouveau
01:04:07convoqué par le juge
01:04:08les journalistes
01:04:10se précipitent
01:04:11Pierre Rancet
01:04:11ex-journaliste
01:04:12à la 5
01:04:13le TGI
01:04:14de Toulon
01:04:16était entouré
01:04:17de cars
01:04:18de régies
01:04:19de voitures
01:04:20de télévision
01:04:21d'équipes
01:04:22de journaux
01:04:24donc on voyait
01:04:25visiblement
01:04:26qu'à Toulon
01:04:27il y avait
01:04:27un événement
01:04:28majeur
01:04:29même si ce n'était
01:04:30qu'une affaire judiciaire
01:04:31Jean-Pierre Bonico
01:04:35journaliste
01:04:36à Var Matin
01:04:37c'était une meute
01:04:38une harde
01:04:40voilà
01:04:41lorsque Paul Lombard
01:04:43est arrivé
01:04:44il y avait
01:04:44comme une vague
01:04:45qui traversait
01:04:47la salle des pas perdus
01:04:48qui allait à droite
01:04:49qui allait à gauche
01:04:50qui heurtait le fond
01:04:51qui revenait
01:04:52Paul Lombard
01:04:53prisonnier au milieu
01:04:54cherchant
01:04:55à rejoindre
01:04:56le cabinet
01:04:57de l'instruction
01:04:58Maître Paul Lombard
01:05:00dans le journal télévisé
01:05:01du 21 décembre
01:05:021988
01:05:03Je viens
01:05:04au rendez-vous
01:05:06que me fixe
01:05:07l'autorité judiciaire
01:05:08je viens serein
01:05:09détendu
01:05:10et déterminé
01:05:11Serein et détendu
01:05:18pas pour longtemps
01:05:19quelques heures plus tard
01:05:20en plein journal télévisé
01:05:22William Lémergie
01:05:23journal télévisé
01:05:25du 21 décembre
01:05:261988
01:05:27Alors justement
01:05:28cette information
01:05:29qui nous parvient
01:05:29à l'instant
01:05:30c'est une dépêche
01:05:31de l'AFP
01:05:32qui est datée
01:05:32de 13h09
01:05:33il est 13h10
01:05:34il y a quelques secondes
01:05:35Alors l'avocat
01:05:36Paul Lombard
01:05:37vient d'être inculpé
01:05:38de complicité
01:05:39de recel
01:05:40et usage de faux
01:05:41en écriture privée
01:05:42inculpé par le juge
01:05:43d'instruction
01:05:44Jean-Paul Bernard
01:05:45Jacques Bertolotti
01:05:46journaliste
01:05:47à France 3 Marseille
01:05:48Paul Lombard
01:05:49il a un destin
01:05:50national
01:05:51à cette époque-là
01:05:52on parle de lui
01:05:53comme peut-être
01:05:54le futur
01:05:55garde des sous
01:05:56moi ce que je me suis dit
01:05:57c'est
01:05:58il va loin
01:05:59il va loin le juge Bernard
01:06:00il n'a pas peur
01:06:01il y va
01:06:01il fonce
01:06:02quoi
01:06:02voilà
01:06:02le juge fonce
01:06:04et certains murmurent
01:06:05qu'il pourrait même
01:06:06aller plus loin
01:06:06car Paul Lombard
01:06:08appelle à la rescousse
01:06:09un ami avocat
01:06:10et pas n'importe lequel
01:06:11nous avons appris
01:06:13je ne sais pas trop
01:06:14comment encore
01:06:14mais par la rumeur du palais
01:06:15que son avocat
01:06:17maître Kijman
01:06:19toutes les affaires
01:06:20cessantes
01:06:21prenaient un avion
01:06:22à Paris
01:06:23pour rejoindre
01:06:24Toulon
01:06:25nous avons dit
01:06:27il y a du mandat
01:06:28de dépôt dans l'air
01:06:29on attend que
01:06:30Paul Lombard
01:06:30soit placé en détention
01:06:31on pense qu'il va y aller
01:06:34Paul Lombard
01:06:36derrière les barreaux
01:06:37impensable
01:06:38pourtant dans le bureau
01:06:39du juge
01:06:40c'est bien de cela
01:06:41qu'il s'agit
01:06:41vers 15h
01:06:43Georges Kijman arrive
01:06:45avec une idée en tête
01:06:46épargner la prison
01:06:48à son ami Paul Lombard
01:06:49dans le huis clos
01:06:51tendu
01:06:51qui l'oppose au juge
01:06:52le substitut du procureur
01:06:54Pierre Cortès
01:06:55vient lui prêter
01:06:56main forte
01:06:57je présente
01:06:58pour le compte
01:06:59mystère public
01:06:59le point de vue suivant
01:07:01on a saisi
01:07:04toutes les preuves
01:07:04souhaitables dans ce dossier
01:07:05il y a eu une perquisition
01:07:06au cabinet de maître Lombard
01:07:07ce dernier a toujours
01:07:09répondu aux convocations
01:07:10il offre toutes les garanties
01:07:11souhaitables
01:07:12de représentation
01:07:12et si on peut craindre
01:07:14encore
01:07:14qu'il y ait
01:07:15éventuellement
01:07:16des concertations
01:07:16frauduleuses
01:07:17comme dit la loi
01:07:18un contrôle judiciaire
01:07:19est suffi
01:07:20qui lui ferait
01:07:21interdiction
01:07:21de rentrer en contact
01:07:22avec les autres
01:07:23protagonistes
01:07:23de ce dossier
01:07:24c'est ce que je propose
01:07:25de l'instruction
01:07:25lequel suit
01:07:27effectivement
01:07:28cette proposition là
01:07:29il renonce
01:07:29à sa décision
01:07:31de placer
01:07:31en détention provisoire
01:07:32Paul Lombard
01:07:33Paul Lombard a eu chaud
01:07:35il est inculpé
01:07:37mais libre
01:07:37il quitte le palais
01:07:39de justice de Toulon
01:07:40par la petite porte
01:07:41à l'arrière du tribunal
01:07:43pour échapper
01:07:44aux journalistes
01:07:45Dominique dans son édition
01:07:49du 21 décembre 88
01:07:51le canard enchaîné
01:07:52met en cause
01:07:53Paul Lombard
01:07:54sous le titre
01:07:54l'insoutenable
01:07:55légèreté du maître
01:07:56qu'est-ce qu'il y a
01:07:57dans cet article
01:07:57un article de Louis-Marie Auro
01:07:59qui accuse
01:08:01Paul Lombard
01:08:02de ne pas avoir dit
01:08:02tout ce qu'il savait
01:08:03sur cette affaire
01:08:04la version du canard
01:08:05enchaîné est la suivante
01:08:06les journalistes disent
01:08:08nous avons contacté
01:08:09Paul Lombard
01:08:09plusieurs semaines
01:08:10avant la publication
01:08:11de cet article
01:08:11Paul Lombard
01:08:13nous a répondu
01:08:14qu'il ne s'était intéressé
01:08:15dans cette affaire
01:08:16qu'à la vente
01:08:17du Murillo
01:08:18à Christise
01:08:19puis à la vente
01:08:20du Murillo
01:08:20au musée du Louvre
01:08:22qu'il n'avait
01:08:23jamais eu à connaître
01:08:24qu'il ne s'était
01:08:24jamais intéressé
01:08:26au faux testament
01:08:27et aux fausses donations
01:08:29qu'on trouve
01:08:30un peu partout
01:08:31dans ce dossier
01:08:32or dans cet article
01:08:33le canard enchaîné
01:08:34publie des notes
01:08:36des notes inédites
01:08:37des notes manuscrites
01:08:38de la main
01:08:39de Paul Lombard
01:08:40qui sont écrites
01:08:41sur un papier en tête
01:08:42d'un hôtel de Genève
01:08:43où il séjournait
01:08:44avec
01:08:45processus en résumé
01:08:47l'historique
01:08:49de la succession
01:08:50des différents
01:08:51propriétaires du tableau
01:08:52d'abord monsieur de Canson
01:08:54ensuite sa fille Suzanne
01:08:55et puis madame Chapuis
01:08:56et puis Joël Penel
01:08:57et à partir de ce moment-là
01:08:59le canard enchaîné
01:09:00considère
01:09:01par ses notes
01:09:02l'existence de ses notes
01:09:03que Paul Lombard
01:09:05était au courant
01:09:05de ce qui se passait
01:09:06dans cette succession
01:09:07et qu'un avocat
01:09:08de sa dimension
01:09:09de son calibre
01:09:10qui connaît parfaitement
01:09:11les histoires de succession
01:09:12aurait dû prendre ses jambes
01:09:13à son cou
01:09:13et laisser tomber
01:09:14cette affaire
01:09:15Et comment le canard enchaîné
01:09:17s'est-il procuré ses notes ?
01:09:20Quand il y a une fuite
01:09:21comme ça
01:09:21ça s'appelle une fuite
01:09:22dans la presse
01:09:23ça vient forcément
01:09:25de quelqu'un
01:09:25qui a intérêt
01:09:26à ce que ses notes sortent
01:09:28L'article du canard enchaîné
01:09:30paraît le 21 décembre
01:09:32c'est-à-dire le jour même
01:09:34où Paul Lombard
01:09:35est entendu
01:09:37dans le cabinet
01:09:38du juge Bernard
01:09:38où il va être
01:09:39à l'époque
01:09:39on disait inculpé
01:09:40donc mis en examen
01:09:42le papier sort ce jour-là
01:09:43Maître Paul Lombard
01:09:50cet article
01:09:50du canard enchaîné
01:09:51vous fait beaucoup de tort
01:09:53pourquoi avoir écrit ces notes
01:09:55et dans quelles conditions ?
01:09:57Ce sont des notes
01:09:58que j'ai prises
01:09:59comme je prends
01:10:00dans toutes les affaires
01:10:01lorsque je débarque
01:10:03dans un univers
01:10:04qui n'est pas le mien
01:10:05je demande
01:10:06à mes interlocuteurs
01:10:08à ceux ou à celles
01:10:09qui me font confiance
01:10:10ou qui viennent me voir
01:10:11de me faire le point
01:10:13de l'affaire
01:10:13et j'ai noté
01:10:15ce que me disait
01:10:16Madame Pénel
01:10:17Alors comment vous vous êtes retrouvé
01:10:19dans cette succession ?
01:10:20Qui vous a appelé ?
01:10:21A l'époque
01:10:22j'étais le grand spécialiste
01:10:23du droit artistique
01:10:25et le spécialiste
01:10:27des successions de peintres
01:10:28c'est pourquoi
01:10:29Madame Pénel
01:10:30pour l'appeler par son nom
01:10:32a fait appel à moi
01:10:33Donc c'est Joël Pénel
01:10:34qui vous a contacté ?
01:10:35Evidemment
01:10:36C'est pas moi
01:10:36qui se l'est
01:10:37la contact
01:10:37Qu'est-ce que je ne sais pas
01:10:38son existence ?
01:10:39Ce n'est pas le Louvre
01:10:40Le Louvre ne vous a pas contacté ?
01:10:41Pas du tout
01:10:42A aucun moment
01:10:43le Louvre m'a contacté
01:10:44J'ai pensé
01:10:45que lorsqu'il fallait discuter
01:10:47l'interlocuteur
01:10:49le plus prestigieux
01:10:51le plus insoupçonnable
01:10:53c'était le Louvre
01:10:54et que par conséquent
01:10:56c'est avec lui
01:10:56et lui seul
01:10:57qu'on pouvait discuter
01:10:58mais à aucun moment
01:10:59mais alors à aucun moment
01:11:00j'ai été
01:11:02en dehors
01:11:04des normes
01:11:05de la loi
01:11:05Le juge
01:11:06il vous soupçonnait
01:11:07de quoi en fait ?
01:11:08Il pensait
01:11:08que vous aviez fait quoi ?
01:11:09On pensait
01:11:10que j'avais
01:11:10peut-être facilité
01:11:12à un moment donné
01:11:13quelconque
01:11:14une démarche
01:11:16d'une fausse succession
01:11:17Or
01:11:17cette Madame Pénel
01:11:19avait trois notaires
01:11:20deux notaires français
01:11:21et un notaire suisse
01:11:22et vous voulez moi
01:11:23avocat
01:11:24qui ne possède
01:11:25que moyen d'investigation
01:11:26j'ai la puce à l'oreille
01:11:27dire des choses pareilles
01:11:29c'est indigne
01:11:30Voilà
01:11:30Le juge pensait
01:11:32que votre intérêt
01:11:32il était où
01:11:33à vous ?
01:11:34Je le cherche toujours
01:11:35Les honoraires
01:11:36que mon cabinet a touché
01:11:37étaient de 60 000 euros
01:11:39à peu près
01:11:40Après le fixe
01:11:41c'était plus
01:11:42que de 30 000 euros
01:11:43et pour 30 000 euros
01:11:44qui est déjà
01:11:45une somme importante
01:11:46vous croyez que
01:11:47j'aurais touché
01:11:49les 30 deniers
01:11:50du déshonneur
01:11:50et que j'aurais flanqué
01:11:52ma vie en l'air
01:11:52Non mais dites
01:11:53qui peut prétendre
01:11:53ça sérieusement ?
01:11:55Maître Lombard
01:12:02inculpé
01:12:03le juge
01:12:04veut éclaircir
01:12:04le rôle des uns
01:12:05et des autres
01:12:05Jusqu'ici
01:12:06tout le monde
01:12:07se renvoie la balle
01:12:08alors le juge
01:12:09tente un coup
01:12:10il organise
01:12:11une confrontation générale
01:12:13Une confrontation
01:12:17en présence
01:12:18de tous les inculpés
01:12:19mais aussi
01:12:20de Jeanne Deschamps
01:12:21la sœur de Suzanne
01:12:22de Canson
01:12:22c'est la première fois
01:12:24que les journalistes
01:12:25peuvent l'approcher
01:12:25Ce jour-là
01:12:27c'est un cirque
01:12:28un peu
01:12:28un cirque médiatique
01:12:31et avec
01:12:33les ténors du barreau
01:12:34en vedette
01:12:35Maître Georges Kiegeman
01:12:37avocat de Paul Lombard
01:12:38journal télévisé
01:12:40du 30 décembre 1988
01:12:42Je crois que
01:12:43le magistrat instructeur
01:12:44a déclaré récemment
01:12:45que peut-être
01:12:47Maître Lombard
01:12:48était le sommet
01:12:48d'une pyramide
01:12:49moi je crois
01:12:49que c'est une pyramide
01:12:50qui marche sur la tête
01:12:52Et pour accueillir
01:12:57tout le monde
01:12:58la confrontation
01:13:00a lieu
01:13:00dans la bibliothèque
01:13:01du palais
01:13:01Mais c'est un échec
01:13:03Chacun campe
01:13:04sur ses positions
01:13:05et 1988
01:13:07s'achève
01:13:09sans révélation
01:13:10Le 4 janvier
01:13:12coup de théâtre
01:13:13Joël Penel
01:13:15fait volte-face
01:13:16Elle avoue
01:13:16que Suzanne
01:13:17de Canson
01:13:17n'a jamais rien
01:13:18légué à sa grand-mère
01:13:19Et elle accuse
01:13:21Paul Lombard
01:13:22d'être le cerveau
01:13:24de cette fausse succession
01:13:25Une stratégie de rupture
01:13:28orchestrée
01:13:29par son avocat
01:13:29Jacques Vergès
01:13:30Maître Jacques Vergès
01:13:32avocat de Joël Penel
01:13:34dans le journal télévisé
01:13:35du 5 janvier 1989
01:13:37Que ma cliente
01:13:39Madame Penel
01:13:39n'est ni l'inventeur
01:13:41ni le maître d'oeuvre
01:13:43de la tentative
01:13:44de fraude fiscale
01:13:45C'est qui l'instigateur ?
01:13:47L'instigateur est forcément
01:13:48Ok ?

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