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  • 12/05/2025
Focus sur deux dossiers qui illustrent les dessous des meurtres de nouveau-nés.
« Les bébés congelés d'Audrey Chabot ». En 2002, dans l'Ain, Audrey Chabot, 21 ans, écope de 15 ans de prison pour le meurtre de son bébé, avec l'aide de sa mère et de sa grand-mère. En 2011, peu après sa sortie de prison, elle récidive.
« L'octuple crime de Dominique Cottrez ». Tout juste installé dans sa nouvelle maison, un couple découvre deux corps de nouveau-nés dans un sac poubelle. Très vite, Dominique Cottrez, fille de l'ancien propriétaire, avoue être l'auteure des crimes...

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Personnes
Transcription
00:00:00La justice a parfois le tueur sous les yeux, à portée de main, sans enquête ou presque.
00:00:12Certains sont pris en flagrant délit, d'autres assument leur crime et pourtant,
00:00:16l'instruction est loin d'être terminée, parce qu'il faut tenter de comprendre pour juger.
00:00:23Ces crimes flagrants, je vais vous les raconter aussi.
00:00:26Ces histoires de criminels d'un genre très particulier, qui ne se cachent pas, ou si peu, ou si mal.
00:00:56Audrey Chabot, Dominique Cotteret, deux criminels d'un genre très particulier.
00:01:21Leur cible, leur bébé.
00:01:23On parle de néonaticide, c'est le meurtre d'un enfant de moins de 24 heures.
00:01:30Audrey Chabot, elle a fait tuer son bébé par sa mère, elle a été condamnée,
00:01:34et dix ans plus tard, elle en a tué un autre, et un an plus tard, encore un autre.
00:01:39Elle les a posés dans le bac de douche, elle a fait couler la douche et elle est partie.
00:01:45Un double néonaticide en récidive, une première dans les annales judiciaires françaises.
00:01:49De nouveau, on apprenait qu'il y avait une affaire avec deux nouveaux-nés qu'elle venait également de tuer.
00:01:56Donc j'avoue que c'était quand même une affaire qui relève de l'exceptionnel.
00:02:02Dominique Cotteret, elle, est l'auteur d'un triste record en Europe.
00:02:06Cette femme a tué huit nourrissons.
00:02:08Ça fait un peu froid dans le dos, puisqu'on se dit, cette dame, elle était enceinte, elle a accouché,
00:02:15elle les a mis dans les sacs poubelles, mais elle ne sait pas combien de fois elle l'a fait,
00:02:19et pourquoi elle a continué à le faire.
00:02:23Ses proches, ses juges, les experts psychiatres, tout le monde a essayé de comprendre.
00:02:27Elles ne font pas tout pour être découvertes, mais elles ne font pas tout ce qu'il faut pour ne pas l'être.
00:02:31Elle aurait tellement aimé qu'à un moment, il y ait quelque chose de divin, de l'ordre du divin,
00:02:35qui serait venu l'aider à sortir de cette spirale infernale.
00:02:40Qui sont ces criminels qui savent cacher une grossesse, cacher une naissance,
00:02:44tuer l'enfant qu'elles viennent de mettre au monde,
00:02:47et qui s'effondrent dès la découverte de leur crime ?
00:02:53En Bériault-en-Buget, dans l'Ain, le dimanche 24 mars 2013.
00:02:58Il est 8h moins 20 quand une femme appelle la gendarmerie.
00:03:02Son père vient de faire une découverte tellement choquante chez sa compagne,
00:03:06qu'il est incapable de prendre le téléphone.
00:03:09Gendarmerie de vous rembresse, bonjour.
00:03:12Bonjour monsieur, on a un petit souci.
00:03:15Mon père est venu me chercher chez moi en pleurs,
00:03:18parce qu'il était avec une fille qui s'appelle Audrey,
00:03:22et quand il leur a demandé ce qu'il voulait manger pendant la semaine,
00:03:25elle n'a pas répondu, mon père a ouvert le frigo, il y avait un frétule dedans.
00:03:28Il est en état de choc, je vous préviens, d'accord ?
00:03:33Un petit souci, un fœtus dans le frigo.
00:03:40Les gendarmes foncent chez Audrey Chabot.
00:03:42Elle est seule, prostrée.
00:03:44Dans la cuisine, il ne découvre pas un, mais deux bébés, congelés.
00:03:53Leur mère, c'est cette femme de 32 ans, et elle ne s'en cache pas.
00:03:58Elle était assise sur son lit, avec son chien,
00:04:04et elle avait l'air extrêmement détachée.
00:04:10Ça ne veut pas dire qu'elle était insensible à tout ce qui était en train de se passer,
00:04:13qu'il n'y avait pas de tristesse, qu'il n'y avait pas de regrets, qu'il n'y avait pas de remords.
00:04:18Mais l'apparence qu'elle a à ce moment-là,
00:04:21au vu de tout ce qui est en train de se passer, du drame qui est en train de se jouer,
00:04:24c'est qu'elle, elle contraste.
00:04:28Les constatations commencent.
00:04:33La congélation a maintenu ses corps dans leur aspect intact.
00:04:40Finalement, on avait le sentiment d'être en présence de poupons
00:04:44qu'on pourrait acheter à une petite fille pour Noël.
00:04:48De poupons tout lisses, pas abîmés.
00:04:52On n'avait pas des corps dégradés.
00:04:54À 20h45, Audrey Chabot est placée en garde à vue pour le meurtre de ses deux bébés.
00:05:03Et le lendemain matin, elle s'explique.
00:05:07Elle a accouché en 2011, puis en 2012.
00:05:11Elle est sûre que l'homme qui a découvert les petits dans le congélateur est bien le père,
00:05:15puisqu'ils sont ensemble depuis deux ans.
00:05:20Il n'y avait pas de vie commune à proprement parler, pas de vie conjugale.
00:05:24Il se retrouvait la plupart du temps chez lui, après sa journée de travail, à elle.
00:05:30Et je crois qu'au moment des faits, c'était seulement la deux ou troisième fois
00:05:33qu'il se rendait à son domicile à elle.
00:05:35Le compagnon d'Audrey Chabot est rapidement mis hors de cause.
00:05:41Il ignorait ses grossesses.
00:05:46La mère prend tout sur elle.
00:05:51Il va y avoir des pleurs.
00:05:52Autant elle a été dans le mensonge et la dissimulation
00:05:55auprès de ses proches, de son entourage pendant des mois ou des années.
00:05:58Mais alors, à partir du moment où elle est prise,
00:06:00comme on dit dans notre jargon, elle se met directement à table.
00:06:03Elle explique à quel moment elle avait accouché,
00:06:09dans quelles conditions, dans quelles circonstances,
00:06:11à quel endroit, donc chez elle, sur ses toilettes.
00:06:16Le premier, elle va le garder auprès d'elle,
00:06:19dans sa chambre, dans son lit, 4, 5, 6 jours.
00:06:27Elle est aussi partie travailler,
00:06:29tout en laissant chez elle, parfois pendant plusieurs heures, tout seule,
00:06:32dans son lit, elle a su, malgré tout, le mettre en sécurité
00:06:35et le protéger pour pas qu'il tombe du lit en mettant entre des coussins.
00:06:43Elle l'avait appelé Colin.
00:06:45Ce qui, symboliquement, aussi pose question pour un bébé qu'on met dans un congélateur.
00:06:49Et pour le second, ça va intervenir plus vite, parce qu'elle dit de manière très...
00:06:59Et là aussi, ça paraît complètement à côté de la plaque, quoi.
00:07:02Elle dit, je devais partir travailler à 5 heures du matin,
00:07:05donc il fallait que je m'en débarrasse.
00:07:10Le mode opératoire est malheureusement identique.
00:07:12Elle les a posés dans le bac de douche.
00:07:16Elle a fait couler la douche et elle est partie.
00:07:19Quand elle, autrement dit, elle n'a pas assisté au décès.
00:07:23Et ensuite, elle a mis les enfants dans un sac de 10 sacs à provision
00:07:27et le tout dans le congélateur.
00:07:29Audrey Chabot savait que ce qu'elle faisait n'était pas bien.
00:07:41Mais, dit-elle, elle n'avait pas d'autre recours.
00:07:46Elle a les symptômes de quelqu'un qui est enceinte.
00:07:49Elle le sait, simplement.
00:07:51Elle ne le dit à personne.
00:07:52Elle ne l'assume pas.
00:07:54Elle dit qu'elle est bien enceinte,
00:08:00qu'elle est bien quand elle porte ses enfants,
00:08:03qu'elle les a à l'intérieur d'elle,
00:08:05mais qu'elle a la certitude, la conviction.
00:08:08Ce n'est pas juste le sentiment ou l'impression.
00:08:10C'est la certitude, la conviction
00:08:12de ne pas pouvoir être mère,
00:08:15de ne pas être capable d'être mère
00:08:16et de ne pas avoir le droit d'être mère.
00:08:20Et elle se l'interdit.
00:08:24Parce qu'elle traîne déjà un lourd passé judiciaire.
00:08:30Un passif dont un journaliste local
00:08:32se souvient immédiatement
00:08:33quand il découvre l'affaire ce dimanche-là.
00:08:39Je commence à parler un peu avec des voisins
00:08:41qui me donnent le nom de la personne
00:08:43qui a été emmenée par les gendarmes.
00:08:46Et Audrey Chabot, ça me dit quelque chose.
00:08:49Je crois que cette personne a déjà été jugée aux Assises
00:08:52pour un néonaticide.
00:08:55Et là, de nouveau, on apprenait
00:08:56qu'il y avait une affaire avec deux nouveaux-nés
00:08:58qu'elle venait également de tuer.
00:09:00Donc j'avoue que c'était quand même
00:09:02une affaire qui relève de l'exceptionnel.
00:09:05A 32 ans, Audrey Chabot est donc une récidiviste.
00:09:15Elle s'est déjà débarrassée d'un bébé.
00:09:18C'était en mars 2002, 11 ans plus tôt,
00:09:20quasiment jour pour jour.
00:09:21L'affaire du 28 mars 2002,
00:09:32elle débute à l'hôpital d'Ambéry-en-Bugé.
00:09:34C'est-à-dire qu'ils accueillent une jeune femme
00:09:37qui vient de faire une fausse couche, selon ses dires.
00:09:40Et le gynécologue s'aperçoit que pour une fausse couche,
00:09:44ça ne colle pas.
00:09:45Il y a du placenta, il y a des signes
00:09:49vraiment chez une parturiante qui ne trompent pas.
00:09:52Et donc l'hôpital alerte la gendarmerie en disant
00:09:55voilà, on a une femme qui nous dit
00:09:58qu'elle a fait une fausse couche.
00:09:59Or c'est une femme qui vient d'accoucher,
00:10:01mais il n'y a pas de bébé.
00:10:04Audrey Chabot a alors 21 ans.
00:10:06Elle vit encore chez ses parents.
00:10:10Dès le lendemain de ce signalement,
00:10:12les gendarmes l'entendent,
00:10:13ainsi que sa mère Jocelyne.
00:10:17Bizarre cette fausse couche
00:10:18à laquelle ne croient pas les médecins.
00:10:21Mais la fille et la mère s'entêtent.
00:10:27Ce qui est curieux,
00:10:28et les gendarmes qui ont interrogé l'entourage
00:10:30le rappellent à Audrey,
00:10:32c'est qu'elle a déjà eu des soucis
00:10:33avec son premier enfant.
00:10:35Un petit garçon de 2 ans
00:10:37dont elle a caché l'arrivée à tout le monde.
00:10:40Ils l'ont découvert au bout de 6-7 mois environ.
00:10:44Et ensuite,
00:10:44comme elle continuait à être scolarisée,
00:10:47il a été élevé plutôt par sa maman.
00:10:49Et elle, finalement,
00:10:50elle l'a dit plus tard,
00:10:51elle se considérait un peu comme une grande sœur.
00:10:54La conviction des gendarmes est faite.
00:10:57Audrey Chabot a sans doute caché
00:10:59sa deuxième grossesse.
00:11:01Et les experts confirment.
00:11:03Cette femme a pu accoucher
00:11:04d'un enfant viable
00:11:05en mars 2002.
00:11:10Alors,
00:11:11le 24 juillet,
00:11:124 mois après le signalement du gynéco,
00:11:15Audrey Chabot est placée en garde à vue.
00:11:17Avec sa mère,
00:11:18Jocelyne,
00:11:19qui est soupçonnée
00:11:19de l'avoir assistée.
00:11:23Coincée,
00:11:23Audrey reconnaît
00:11:24qu'elle attendait bien un bébé
00:11:25et qu'elle a découvert sa grossesse
00:11:27à la fin de l'année 2001.
00:11:29Et là,
00:11:32elle a accouché dans les toilettes.
00:11:34Son petit garçon de 2 ans
00:11:35dormait dans la chambre d'à côté.
00:11:38Sa maman était là.
00:11:39Elle a été réveillée
00:11:39probablement par les pleurs du nouveau-né.
00:11:43Et elle a vu,
00:11:44enfin,
00:11:45elle a découvert que
00:11:45en un seul trait de temps
00:11:48que sa fille était enceinte
00:11:50et qu'elle venait d'accoucher.
00:11:53Audrey Chabot raconte
00:11:54qu'elle lui a demandé
00:11:55d'aller chercher une paire de ciseaux
00:11:57pour couper le cordon ombilical.
00:11:59Et elle lui a dit
00:12:00« Je n'en veux pas,
00:12:02fais-en ce que tu veux. »
00:12:08Elle assure qu'elle a donné l'enfant
00:12:10à sa mère
00:12:10et elle ne sait pas
00:12:11ce que Jocelyne en a fait.
00:12:13Et elle ne le lui a jamais demandé.
00:12:16Elle dénonce donc sa propre mère.
00:12:19Jocelyne aurait supprimé
00:12:20le nouveau-né.
00:12:24Le problème,
00:12:25c'est que,
00:12:25dans le bureau d'à côté,
00:12:27sa mère dit exactement l'inverse.
00:12:29Jocelyne Chabot raconte
00:12:32qu'elle a vu
00:12:32un sac poubelle
00:12:33dans la cuisine
00:12:34et qu'à l'intérieur,
00:12:36le bébé ne bougeait plus.
00:12:40Chacune campe sur sa version
00:12:41pendant plus d'un an
00:12:42derrière les barreaux.
00:12:45Et c'est la fille
00:12:45qui craque la première
00:12:46devant la juge
00:12:47en septembre 2003.
00:12:51« Audrey Chabot raconte
00:12:53qu'elle lui a demandé
00:12:54d'aller chercher un sac,
00:12:55un sac poubelle.
00:12:55Et c'est Audrey Chabot
00:12:56qui a placé
00:12:57le nouveau-né
00:12:58dans le sac poubelle.
00:12:59Elle a refermé le sac.
00:13:01Elle a donné le sac
00:13:02à sa mère. »
00:13:06Sa mère avoue
00:13:07à son tour.
00:13:09Jocelyne Chabot
00:13:10reconnaît que c'est elle
00:13:11qui a étranglé
00:13:11le bébé,
00:13:12son petit-fils,
00:13:13dans le sac poubelle
00:13:14avant de se débarrasser
00:13:15du corps.
00:13:16Sa maman finira
00:13:20par conduire
00:13:21les enquêteurs
00:13:21dans une maison
00:13:22qui est un peu
00:13:23sur les hauteurs
00:13:23d'Amberieux,
00:13:24sur les hauteurs
00:13:24du lotissement
00:13:25et dans laquelle
00:13:26elle a dissimulé
00:13:27ce petit cadavre.
00:13:35La justice donne
00:13:36une existence légale
00:13:37à cet enfant,
00:13:38ce sera Vincent,
00:13:39Vincent Chabot.
00:13:40En avril 2005,
00:13:41mère et fille
00:13:42se retrouvent
00:13:42devant la cour
00:13:43d'assises de Lain,
00:13:43Jocelyne pour meurtre
00:13:45et Audrey Chabot
00:13:46pour assassinat.
00:13:52C'est une affaire
00:13:53qui est finalement
00:13:54assez exceptionnelle.
00:13:56Un néonaticide,
00:13:57bon,
00:13:57c'est déjà pas très courant,
00:13:59mais surtout
00:13:59un néonaticide
00:14:00commis avec l'aide
00:14:02de la grand-mère
00:14:03de l'enfant,
00:14:04de la maman
00:14:05de la femme
00:14:06qui accouche.
00:14:11Audrey Chabot,
00:14:12elle,
00:14:13n'a commis
00:14:13aucun acte
00:14:14pour tuer cet enfant.
00:14:15C'est la grand-mère
00:14:16qui, elle,
00:14:17a accompli
00:14:17le geste meurtrier.
00:14:19Et tout l'enjeu
00:14:20du procès,
00:14:20c'était finalement
00:14:21de savoir
00:14:22qui était responsable
00:14:23de quoi,
00:14:24est-ce qu'Audrey Chabot
00:14:25quelque part
00:14:25avait pu inciter
00:14:26sa maman
00:14:27à commettre cet acte ?
00:14:29Pour aider les jurés
00:14:30à répondre à ces questions,
00:14:32les experts psychiatres
00:14:33et psychologues
00:14:34dressent le portrait robot
00:14:35de ces deux femmes.
00:14:38Jocelyne Chabot
00:14:39est née d'une fratrie
00:14:40de sept enfants
00:14:41et elle a une vie
00:14:43particulière
00:14:44parce que dès l'âge
00:14:46de sept ans,
00:14:47en CP,
00:14:48elle est placée
00:14:49en internat
00:14:50où elle restera
00:14:51tout au long
00:14:52de sa scolarité.
00:14:55Donc,
00:14:55on peut penser
00:14:56que ça a dû être
00:14:57bien difficile
00:15:00et douloureux.
00:15:00la mère d'Audrey
00:15:01a épousé
00:15:04un militaire
00:15:05à l'époque
00:15:06qu'elle travaillait
00:15:07mais elle n'a plus
00:15:08travaillé
00:15:08par la suite
00:15:09pour s'occuper
00:15:10de ses enfants,
00:15:11elle en aura trois
00:15:11et aussi pour suivre
00:15:13son mari
00:15:14au gré
00:15:14de toutes
00:15:15ses différentes mutations.
00:15:20Audrey Chabot
00:15:21est sa deuxième enfant.
00:15:24Après un bac pro
00:15:24en hôtellerie,
00:15:25elle devient serveuse
00:15:26aux messes des officiers
00:15:27à la base aérienne
00:15:29d'Amberieux-en-Buget.
00:15:32À l'issue de ses études,
00:15:33elle s'est engagée
00:15:34dans l'armée
00:15:34et elle travaillait
00:15:35sur la même base
00:15:36militaire
00:15:37que son père,
00:15:38Amberieux-en-Buget.
00:15:40Elle avait signé
00:15:41un contrat de quatre ans
00:15:42et c'est durant ce contrat
00:15:44que les faits
00:15:45se sont déroulés.
00:15:49Très rapidement,
00:15:51la relation mère-fille
00:15:52est au cœur des débats.
00:15:55Les relations d'Audrey
00:15:57avec sa mère
00:15:59ne sont pas décrites
00:16:01par la fille
00:16:01de la même manière
00:16:03que par la mère.
00:16:06Jocelyne Chabot
00:16:07ne se limite
00:16:08qu'à vouloir
00:16:09donner une bonne image
00:16:11d'elle-même,
00:16:12une bonne image
00:16:12d'elle-même
00:16:13en tant que personne,
00:16:14en tant que mère.
00:16:16Elle a pu dire
00:16:16qu'elle a aimé
00:16:18ses enfants
00:16:18car il ne manquait
00:16:20de rien.
00:16:20Je pense que ça résume
00:16:22bien ses capacités
00:16:23maternelles
00:16:24sur le plan affectif.
00:16:25Audrey décrit
00:16:29une mère
00:16:29très distante,
00:16:32très froide,
00:16:33imprévisible,
00:16:34agressive,
00:16:35qui passe son temps
00:16:36à faire le ménage.
00:16:40Un détachement
00:16:40que le public
00:16:41perçoit aussi
00:16:42pendant l'audience.
00:16:44La mère d'Audrey Chabot,
00:16:46c'est un bloc de glace.
00:16:47Finalement,
00:16:47elle parlait mieux
00:16:48à son chien
00:16:48qu'à sa fille.
00:16:49Et ça,
00:16:49ça veut tout dire.
00:16:53Ni la mère,
00:16:55ni la fille
00:16:55ne s'est expliquée
00:16:56à la cour
00:16:57pourquoi elle a tué
00:16:59ce bébé.
00:17:02Ce qui est certain,
00:17:03c'est qu'Audrey
00:17:03ne voulait pas
00:17:04cet enfant,
00:17:05dit-elle.
00:17:06Ce qui est certain,
00:17:07c'est que la mère
00:17:07n'a pas pu s'opposer
00:17:08à cette parole
00:17:09prononcée par quelqu'un
00:17:11qui vient d'accoucher.
00:17:13Audrey a un peu
00:17:14plus de 20 ans
00:17:15et elle est très immature.
00:17:17Et la mère,
00:17:19elle,
00:17:19ne joue pas
00:17:20son rôle de mère
00:17:21d'adulte.
00:17:22La maman d'Audrey Chabot,
00:17:24même si elle était
00:17:25surprise de la situation,
00:17:26on aurait pu imaginer
00:17:27qu'elle allait dire
00:17:28« bon, c'est un enfant,
00:17:29je ne vais pas tuer un enfant ».
00:17:30Elle aurait pu avoir
00:17:30plus de recul.
00:17:33Une fille immature,
00:17:36une mère si détachée
00:17:37qu'elle est incapable
00:17:38de raisonner sa fille
00:17:39ou de prendre
00:17:40la bonne décision.
00:17:42Et entre les deux,
00:17:44pas de parole,
00:17:45pas d'échange.
00:17:48Il avait été question
00:17:49de la maison du silence.
00:17:50C'est-à-dire qu'il faut
00:17:51imaginer quand même
00:17:52cette scène
00:17:52de cette jeune femme
00:17:54qui accouche dans les toilettes,
00:17:56qui confie le bébé à sa mère,
00:17:57qui ensuite le tue
00:17:58et va cacher le corps.
00:18:00Mais elles ne reparleront
00:18:01plus jamais de cette scène.
00:18:03Pas un mot,
00:18:04pas un regard.
00:18:06Si ce n'est pas
00:18:07la maison du silence,
00:18:08qu'est-ce que c'est ?
00:18:09Face à ces silences,
00:18:13les jurés se montrent
00:18:14plus sévères avec Jocelyne,
00:18:16cette femme de 51 ans,
00:18:18mère de trois enfants
00:18:19qui a étranglé
00:18:20un nourrisson.
00:18:2118 ans de prison pour elle.
00:18:24Sa fille Audrey,
00:18:25elle, écope de 15 ans
00:18:26de réclusion criminelle,
00:18:28de peine très lourde
00:18:30pour ce genre de crime.
00:18:31Dans ces affaires
00:18:35de néonaticide,
00:18:37la justice estime
00:18:38quand même souvent
00:18:40que la maman a commis
00:18:42un crime,
00:18:42mais un crime
00:18:43qui est souvent lié
00:18:45à une solitude,
00:18:47à ce sont des mères
00:18:48souvent désemparées.
00:18:49La justice n'est quand même
00:18:50pas très très sévère.
00:18:51Là, c'est un quantum
00:18:52qui est quand même
00:18:52très élevé.
00:18:57Dominique Audrey Chabot
00:18:58est condamnée
00:18:58à 15 ans de prison en 2005
00:19:00et pourtant,
00:19:02cinq ans plus tard,
00:19:03elle est libre.
00:19:04Pourquoi ?
00:19:0515 ans de prison,
00:19:06la sûreté légale,
00:19:06c'est la moitié.
00:19:07Sept ans et demi.
00:19:09Quand elle est condamnée
00:19:09en 2005,
00:19:10Audrey Chabot a déjà fait
00:19:11de la détention préventive.
00:19:12Donc, en septembre 2010,
00:19:14elle est fondée
00:19:15à demander
00:19:15une libération conditionnelle.
00:19:17Ce qu'elle fait ?
00:19:18Elle a un excellent dossier.
00:19:19Elle s'est bien tenue en prison.
00:19:21Elle a un projet de sortie.
00:19:22Son père va l'héberger.
00:19:24Une association lui a trouvé
00:19:25un boulot.
00:19:26Et puis, elle explique
00:19:26à la juge d'application
00:19:27des peines
00:19:27qu'elle veut demander
00:19:28la garde de son fils.
00:19:29et ça, c'est un plus.
00:19:30Alors, le juge d'application
00:19:31des peines,
00:19:32qui s'appuie aussi
00:19:32sur des expertises psychiatriques,
00:19:34qu'est-ce qu'elle dit d'ailleurs ?
00:19:35Alors, les experts
00:19:36sont interrogés
00:19:37sur sa dangerosité.
00:19:39Tous soulignent
00:19:40son immaturité constante
00:19:42pendant toute la période
00:19:43de sa détention.
00:19:43Mais ils disent
00:19:44qu'Audrey Chabot
00:19:46ne présentera
00:19:47aucune dangerosité
00:19:48plus tard
00:19:49en milieu libre
00:19:49et que le risque
00:19:51de récidive
00:19:51est très faible.
00:19:53D'ailleurs, elle-même,
00:19:54Audrey Chabot,
00:19:54dit à un psychiatre
00:19:55en mai 2010,
00:19:56je cite,
00:19:57« Ça ne se reproduira pas
00:19:59car j'ai pris conscience
00:20:00de la chose. »
00:20:01La chose,
00:20:01c'est ce qu'elle a fait.
00:20:02Là où tout le monde
00:20:03est d'accord, Christophe,
00:20:04c'est qu'Audrey Chabot,
00:20:05si elle sort,
00:20:06elle doit faire l'objet
00:20:07d'un suivi psychiatrique.
00:20:09D'ailleurs,
00:20:09le juge d'application
00:20:10des peines
00:20:11va l'inscrire
00:20:12dans ses obligations.
00:20:13Elle doit avoir un psychiatre
00:20:14sinon son contrôle judiciaire saute,
00:20:17elle peut retourner en prison.
00:20:18Donc, pas de dangerosité
00:20:19et pas de risque de récidive,
00:20:21on est d'accord.
00:20:22Oui.
00:20:22Et pourtant,
00:20:23en 2013,
00:20:25les gendarmes trouvent
00:20:26deux bébés dans son congèle.
00:20:27Oui, mais les psys
00:20:28avaient prévenu.
00:20:29Les psys avaient dit
00:20:30qu'il faut qu'elles suivent
00:20:31une psychanalyse.
00:20:32Or, Audrey Chabot
00:20:33n'a jamais pris rendez-vous
00:20:35avec un psy.
00:20:35Mais personne ne s'en est rendu compte
00:20:36de ça ?
00:20:37Non.
00:20:37Elle se présentait régulièrement
00:20:39au rendez-vous du SPIP,
00:20:40le service pénitentiaire
00:20:42d'insertion et de probation.
00:20:44Elle y est allée
00:20:44une quinzaine de fois
00:20:45jusqu'à la fin de son suivi,
00:20:4723 janvier 2013.
00:20:49Et la conseillère
00:20:49d'insertion et de probation
00:20:50lui demandait
00:20:50« Vous avez pris rendez-vous ?
00:20:51Non, non, mais je vais le faire. »
00:20:52Puis ensuite,
00:20:53« Oui, oui, j'ai pris rendez-vous. »
00:20:54Et puis ensuite,
00:20:55« J'ai pris rendez-vous,
00:20:56mais le psychiatre
00:20:56va vous envoyer
00:20:57les justificatifs. »
00:20:58Et cette conseillère
00:20:59d'insertion,
00:21:00elle le dira aux gendarmes
00:21:01en 2013.
00:21:01Elle leur dira
00:21:02« Je l'ai cru.
00:21:03Tout simplement, je l'ai cru. »
00:21:04La suite, on la connaît.
00:21:05Deux bébés noyés
00:21:06fin 2011 et fin 2012.
00:21:08Oui, ça fait à peine
00:21:08un an qu'elle est sortie de prison.
00:21:12Le 26 mars 2013,
00:21:14un peu plus de deux ans
00:21:14après sa libération conditionnelle,
00:21:17Audrey Chabot est donc
00:21:18à nouveau mise en examen
00:21:19pour meurtre sur mineur
00:21:20de 15 ans.
00:21:22Et devant la juge d'instruction,
00:21:24elle répète son besoin
00:21:25de garder ses bébés
00:21:26près d'elle.
00:21:27« Régulièrement,
00:21:30elle va ouvrir
00:21:30ce congélateur
00:21:32et leur dire
00:21:33qu'elle les aime.
00:21:34Ils sont
00:21:35son émanation,
00:21:37son prolongement,
00:21:38ils font partie d'elle. »
00:21:41En juillet 2013,
00:21:43Audrey Chabot
00:21:44accepte de refaire
00:21:45chacun de ses gestes
00:21:47lors d'une reconstitution.
00:21:52« Je l'ai embrassée. »
00:21:55« D'accord, alors,
00:21:55on va prendre une photo
00:21:56de vous en train
00:21:57d'embrasser le poupon. »
00:21:59« Le poupon. »
00:22:00« Je ne pourrais pas. »
00:22:06« Je ne pourrais pas. »
00:22:08« Alors, c'est juste
00:22:09un poupon. »
00:22:11« Je ne pourrais pas. »
00:22:16Dans les questions
00:22:17qu'on se pose classiquement
00:22:18dans une enquête,
00:22:20il y a qui,
00:22:21où,
00:22:22comment
00:22:23et pourquoi.
00:22:25Les trois premières questions,
00:22:26on a rapidement la réponse.
00:22:28« Je vais la poser pour celle-là. »
00:22:30« D'accord, donc ça,
00:22:31on est fatale. »
00:22:31« Oui. »
00:22:32C'est surtout pourquoi.
00:22:33Pourquoi,
00:22:35après une condamnation lourde
00:22:37à 15 ans de réclusion criminelle,
00:22:398 ans d'incarcération,
00:22:41pourquoi est-ce qu'elle a pu
00:22:42non seulement recommencer,
00:22:43mais recommencer deux fois ?
00:22:45Donc,
00:22:45ça va être un dossier
00:22:47qui va essentiellement porter
00:22:48sur la personnalité,
00:22:51la psychologie
00:22:52d'Audrey Chabot.
00:22:57Les psychiatres et psychologues
00:22:59qui avaient expertisé
00:23:00Audrey Chabot
00:23:0111 ans plus tôt
00:23:01après son premier crime
00:23:03sont de nouveau appelés
00:23:04à l'examiner.
00:23:08On ne peut analyser
00:23:10dans le risque de récidive
00:23:11qu'à partir d'éléments psychiatriques,
00:23:13est-ce que c'est quelqu'un
00:23:14d'impulsif,
00:23:14est-ce que c'est quelqu'un
00:23:15qui délire,
00:23:16est-ce que c'est quelqu'un
00:23:16qui est ordonnement violent ?
00:23:17Or,
00:23:18Audrey Chabot
00:23:19n'avait aucune
00:23:20de ses caractéristiques,
00:23:21donc il n'y avait,
00:23:22hélas,
00:23:23aucun facteur
00:23:24qui pouvait laisser penser
00:23:25qu'elle pouvait récidiver.
00:23:31Comme le magistrat,
00:23:32les experts s'intéressent
00:23:33à la vie qu'Audrey Chabot
00:23:34menait depuis sa sortie de prison
00:23:36en décembre 2010.
00:23:40C'est quelqu'un qui travaille,
00:23:42elle a un emploi de serveuse
00:23:43dans un bar d'amberieux
00:23:46en bugé
00:23:47où elle donne
00:23:47globalement entière satisfaction.
00:23:52Elle est décrite
00:23:52comme quelqu'un de serviable,
00:23:53comme quelqu'un
00:23:54de tourné vers les autres,
00:23:56qui ne compte pas ses heures,
00:23:57qui travaille,
00:23:58qui est souriante,
00:23:58qui est avenante.
00:24:00Ça, c'est l'extérieur,
00:24:01c'est la façade.
00:24:02L'intérieur est très différent.
00:24:06Il est important
00:24:06de comprendre le clivage
00:24:08qu'il y a dans sa personnalité,
00:24:10entre ce qu'elle donne à voir
00:24:13et un champ affectif,
00:24:15je dirais, dévasté.
00:24:17Je l'interroge.
00:24:17Dans votre famille,
00:24:19qui compte sur le plan affectif,
00:24:21avec qui pouvez-vous vous rattacher ?
00:24:23Dix personnes.
00:24:24Et du reste,
00:24:25j'ai dû prendre un chien
00:24:26pour avoir de l'affection.
00:24:30Il n'a plus de nouvelles
00:24:31de sa mère,
00:24:31qu'elle a croisé en détention,
00:24:33sans se parler.
00:24:34En revanche,
00:24:35elle continue d'avoir
00:24:36des relations avec son père.
00:24:38Ses parents ont divorcé,
00:24:38son père s'est remarié.
00:24:39il vient la voir.
00:24:42Il s'inquiète,
00:24:43ce père,
00:24:44compte tenu
00:24:44des antécédents d'Audrey,
00:24:46il se pose des questions.
00:24:47Mais elle ne lui dit rien.
00:24:50Absolument rien.
00:24:57Audrey Chabot est quelqu'un
00:24:58qui a une très forte
00:24:59mésestime d'elle-même.
00:25:01Elle se situe
00:25:02à une place d'objet
00:25:04dans sa relation à l'autre,
00:25:06en général,
00:25:07singulièrement au plan affectif
00:25:09et pas de sujet
00:25:11qui peut dire oui,
00:25:11qui peut dire non,
00:25:13qui peut donner son avis
00:25:14et qui s'affirme.
00:25:19Contrairement au crime de 2002,
00:25:20cette fois,
00:25:21Audrey a agi seule.
00:25:23Mais les mécanismes
00:25:24de la mère néonaticide
00:25:25restent identiques.
00:25:26On parle de personnalité asif,
00:25:32de personnalité comme si.
00:25:34Elle fait comme si
00:25:35la réalité n'existait pas.
00:25:39Elle dit qu'elle sait
00:25:40qu'elle est enceinte,
00:25:41mais elle fait comme si
00:25:43elle ne l'était pas.
00:25:45Et de toute façon,
00:25:46physiquement,
00:25:46ça ne se voit pas.
00:25:47C'est ce fameux concept
00:25:52de grossesse secrète
00:25:54que j'oppose
00:25:55au déni de grossesse.
00:25:57Et de façon synthétique,
00:25:59on peut retenir,
00:26:00un,
00:26:01qu'elle a une gestion
00:26:01de la contraception
00:26:02qui est très fantaisiste.
00:26:04Deux,
00:26:05qu'elle adore
00:26:06le fait d'être enceinte.
00:26:08Trois,
00:26:08qu'elle adore l'idée
00:26:09d'être mère.
00:26:10Et donc ça,
00:26:11c'est quelque chose
00:26:12que je découvre
00:26:13avec Audrey,
00:26:14finalement,
00:26:15c'est une sorte
00:26:15de toxicomanie
00:26:16à la grossesse.
00:26:18C'est-à-dire qu'elle
00:26:18se sent vraiment très bien
00:26:19quand elle est enceinte.
00:26:23C'est quelqu'un
00:26:24qui a un rapport
00:26:25à la grossesse
00:26:26et aux enfants
00:26:27qui est quand même
00:26:27très pathologique.
00:26:31Tout se passe
00:26:32comme si elle avait
00:26:33droit de vie et de mort
00:26:34sur ses enfants,
00:26:35dans une position
00:26:36qu'on pourrait qualifier
00:26:37d'omnipotente,
00:26:38de toute puissance.
00:26:41C'est un peu
00:26:42comme des poupées.
00:26:44et finalement,
00:26:46une fois qu'elle ne peut
00:26:47plus jouer avec,
00:26:48elle les tue.
00:26:49Et après,
00:26:50elle a un rapport
00:26:51avec eux
00:26:52comme on peut l'avoir
00:26:53avec un jouet cassé.
00:26:54C'est-à-dire qu'elle dit
00:26:55que de temps en temps,
00:26:57elle ouvrait
00:26:57la porte du congélateur
00:26:59et elle mettait
00:26:59la main sur leur corps,
00:27:01comme on peut le faire
00:27:02avec un jouet cassé.
00:27:03Donc elle a un rapport
00:27:04à ses enfants
00:27:05qui est un rapport
00:27:05à un objet.
00:27:06Tenter de comprendre
00:27:14Audrey Chabot
00:27:14ou la punir sévèrement ?
00:27:16C'est le dilemme
00:27:17de la justice
00:27:17dans cette affaire
00:27:18extraordinaire.
00:27:20Son procès s'ouvre
00:27:20le 27 février 2015
00:27:22à Bourg-en-Bresse.
00:27:23En état de récidive légale,
00:27:25Audrey Chabot
00:27:26encourt la réclusion
00:27:26criminelle à perpétuité.
00:27:27L'affaire est tellement
00:27:35exceptionnelle.
00:27:37On voudrait comprendre
00:27:38pourquoi elle a fait ça,
00:27:40pourquoi elle n'a pas parlé,
00:27:42pourquoi elle s'est repliée
00:27:43sur elle-même.
00:27:51Vous auriez dit
00:27:52presque un oiseau
00:27:53tombé du nid,
00:27:54un peu roc-roc-villé,
00:27:56la tête baissée,
00:27:57cette femme était rétractée,
00:28:00comment dire,
00:28:01écrasée par son malheur.
00:28:03Ça, c'était frappant.
00:28:10La presse est là,
00:28:11il y a un public
00:28:12très important dans la salle.
00:28:14Elle est livrée en pâture
00:28:15à tous ses regards
00:28:16et pour des actes
00:28:19que la morale réprouve
00:28:20absolument.
00:28:22Dans ce procès,
00:28:24les regards se tournent aussi
00:28:25vers le compagnon
00:28:26d'Audrey Chabot,
00:28:26celui que les expertises génétiques
00:28:28ont désigné
00:28:29comme le père
00:28:30des deux bébés tués.
00:28:33Il aura une phrase terrible
00:28:34à la cour d'assises
00:28:35à propos d'Audrey Chabot.
00:28:37Je vais l'interroger
00:28:37afin de savoir
00:28:38s'il lui reconnaît
00:28:40au moins une qualité.
00:28:42Il me répondra
00:28:43« Oui, elle fait bien
00:28:43les fellations. »
00:28:45Donc, lorsqu'un homme
00:28:46qui a vécu pendant trois ans
00:28:47avec une femme
00:28:48vous dit ça,
00:28:49je crois que tout est dit.
00:28:53Elle décrit un homme
00:28:54qui la maltraite,
00:28:55mais elle ne le quitte pas
00:28:57comme si tout vaut mieux
00:29:00que d'être abandonné,
00:29:01je dirais.
00:29:01Elle se sert de l'autre
00:29:03comme d'une charpente.
00:29:05C'est-à-dire que
00:29:05c'est ça,
00:29:06la personnalité abandonnée,
00:29:07c'est-à-dire qu'elle a besoin
00:29:08d'être avec quelqu'un.
00:29:10Et que si l'autre
00:29:11vient à partir,
00:29:12si le couple vient
00:29:13à éclater,
00:29:14elle se retrouve
00:29:15comme une maison
00:29:16en charpente,
00:29:16elle va s'écrouler.
00:29:20Mais la personnalité
00:29:21d'Audrey Chabot
00:29:22est rapidement reléguée
00:29:23au second plan
00:29:24car ce procès
00:29:25à Bourg-en-Bresse,
00:29:27c'est celui
00:29:27de la récidive.
00:29:29Et le ministère public
00:29:30se montre sévère
00:29:32avec l'accusé.
00:29:35J'ai commencé
00:29:36mon réquisitoire
00:29:37en demandant
00:29:39à la courreur jurée
00:29:40si par hasard
00:29:42on ne pouvait pas
00:29:44observer
00:29:45une minute de silence
00:29:46en l'honneur
00:29:47de ces deux enfants
00:29:48qui étaient morts
00:29:49et qui n'avaient
00:29:49eu quasiment pas
00:29:51d'existence juridique.
00:29:56Attention,
00:29:57l'infanticide
00:29:58n'est pas
00:29:58un crime ordinaire.
00:30:00Et la loi
00:30:01est plus exigeante
00:30:02envers ceux
00:30:03qui ont déjà
00:30:04été condamnés
00:30:05une fois
00:30:05Audrey Chabot
00:30:09a tué
00:30:09cette fois-ci
00:30:10deux enfants
00:30:11et dans des conditions
00:30:13absolument épouvantables.
00:30:15Mais ça pritit.
00:30:17Si ce n'est pas
00:30:18l'avocat
00:30:19de la société
00:30:19qui défend
00:30:21des nourrissons
00:30:22qui ont
00:30:22entre quelques heures
00:30:24et quelques jours
00:30:25pour vivre
00:30:28en disant
00:30:28ça
00:30:29c'est un crime
00:30:31majeur
00:30:31mais qui le fera ?
00:30:33L'avocat général
00:30:37retient
00:30:37l'altération
00:30:38du discernement
00:30:39et il requiert
00:30:4027 ans
00:30:41de réclusion criminelle
00:30:42avec une période
00:30:44de sûreté
00:30:44des deux tiers.
00:30:47Certains
00:30:48ont voulu
00:30:48absolument
00:30:49se placer
00:30:50sur le plan
00:30:50de la morale
00:30:51alors que la morale
00:30:52n'avait rien à voir
00:30:53dans tout ça
00:30:53que ce n'était pas
00:30:54le problème
00:30:55et qu'une justice
00:30:56qui résonne
00:30:57par rapport à la morale
00:30:59est forcément
00:30:59une justice
00:31:00qui va se tromper.
00:31:05La cour et le jury
00:31:07ont condamné
00:31:07Audrey Chabot
00:31:08à la peine
00:31:09de 23 ans
00:31:10de réclusion criminelle.
00:31:14Ce verdict
00:31:15Audrey Chabot
00:31:16ne l'accepte pas.
00:31:20Le 20 juin 2016
00:31:22son procès
00:31:22en appel
00:31:23s'ouvre à Lyon
00:31:23et là
00:31:24les cartes
00:31:25sont rebattues
00:31:26car l'accusé
00:31:27a choisi
00:31:27la contraception
00:31:28définitive
00:31:29la ligature
00:31:30des trompes
00:31:31et c'est un argument
00:31:32pour la défense.
00:31:35La récidive
00:31:36est impossible
00:31:36puisque médicalement
00:31:37ce n'est plus possible.
00:31:38On ne peut pas
00:31:39prédire l'avenir
00:31:40mais on a le sentiment
00:31:41que ça va mieux
00:31:43se passer
00:31:43qu'à Bourg-en-Bresse.
00:31:48Car le président
00:31:48de la cour d'assises
00:31:49comme l'avocat général
00:31:50tiennent avant tout
00:31:51à comprendre
00:31:52le geste
00:31:53de l'accusé.
00:31:56On peut se dire
00:31:57elle n'a pas compris
00:31:59la première fois
00:31:59il faut taper
00:32:00plus fort
00:32:00la seconde.
00:32:02Ça me paraît
00:32:02un peu
00:32:03binaire
00:32:04comme raisonnement
00:32:05peut-être pas
00:32:06assez subtil
00:32:08pour un dossier
00:32:09qui est essentiellement
00:32:10axé sur l'évolution
00:32:11d'une personnalité.
00:32:13Ce n'est pas aussi
00:32:14simple que de
00:32:15convaincre quelqu'un
00:32:16qu'il ne faut pas
00:32:17tuer l'amant
00:32:18de sa femme
00:32:19par jalousie
00:32:19qu'il ne faut pas
00:32:20braquer une banque
00:32:21par un pas du gain.
00:32:23C'est un peu plus
00:32:24compliqué que ça
00:32:24parce que les ressorts
00:32:26psychologiques
00:32:27et psychiatriques
00:32:28de sa personnalité
00:32:30la justice
00:32:31a quand même
00:32:32assez peu
00:32:32de prise dessus
00:32:34me semble-t-il.
00:32:38À la barre
00:32:39les experts
00:32:40tentent d'apporter
00:32:41des solutions
00:32:41pour éviter
00:32:42les récidives
00:32:43en matière
00:32:43de néonaticide.
00:32:44L'enseignement
00:32:46que nous pouvons
00:32:47tirer nous
00:32:48en tant qu'experts
00:32:49de cette récidive
00:32:50c'est la nécessité
00:32:53au cours
00:32:54du FIVI
00:32:54de demander
00:32:55des tests
00:32:55réguliers
00:32:56de grossesse.
00:32:57C'est-à-dire
00:32:57non pas
00:32:58pour qu'il y ait
00:32:59forcément
00:33:00une interruption
00:33:00de cette grossesse
00:33:01mais au moins
00:33:02celle-ci soit suivie.
00:33:03Et ça c'est quelque chose
00:33:04qui n'est rarement fait
00:33:05et je pense
00:33:06qui devrait être généralisé.
00:33:09Malgré cette volonté
00:33:10de comprendre
00:33:10l'accusé
00:33:11l'avocat général
00:33:12requiert 20 ans
00:33:14de réclusion criminelle.
00:33:15Alors la défense
00:33:17se lève
00:33:17et elle va
00:33:18retourner la salle.
00:33:22C'est une femme
00:33:23extrêmement dévalorisée
00:33:24extrêmement culpabilisée
00:33:26qui a une
00:33:28très faible estime
00:33:29d'elle-même
00:33:29et donc
00:33:31elle n'est pas digne
00:33:31d'être mère
00:33:32parce que pour être mère
00:33:33il faut avoir
00:33:33une certaine estime
00:33:36de soi
00:33:36une certaine confiance
00:33:37en soi
00:33:37et je crois qu'au moment
00:33:38où elle passe à l'acte
00:33:39c'est véritablement
00:33:40tout le mal-être
00:33:42qu'elle a en elle-même
00:33:43qui s'exprime.
00:33:46Une plaidoirie
00:33:47qui touche
00:33:48l'avocat général.
00:33:50Dès que son conseil
00:33:52s'est rassis
00:33:52après une plaidoirie
00:33:55je peux qualifier
00:33:56de remarquable
00:33:56j'étais
00:33:58assez convaincue
00:34:00que 20 ans
00:34:01c'était trop.
00:34:02Pourquoi est-ce
00:34:03qu'on incarcère
00:34:03les gens
00:34:04pour qu'ils soient punis
00:34:05et parce que
00:34:06on estime
00:34:06qu'ils sont dangereux.
00:34:08Audrey Chabot
00:34:09était dangereuse
00:34:10pour les enfants
00:34:12qu'elle était susceptible
00:34:13de mettre au monde.
00:34:14Donc la dangerosité
00:34:15la notion de dangerosité
00:34:16elle était quand même
00:34:17assez réduite.
00:34:20Finalement
00:34:21Audrey Chabot
00:34:22est condamnée
00:34:22à 13 ans de prison.
00:34:25On était très très
00:34:26très touchés.
00:34:28Je le suis encore d'ailleurs
00:34:29parce que
00:34:29on a vraiment le sentiment
00:34:31qu'on a été face
00:34:34à des magistrats
00:34:35et des jurés
00:34:35qui ont eu
00:34:36une certaine empathie
00:34:37à l'égard
00:34:38d'Audrey Chabot
00:34:39et non pas
00:34:39une condamnation morale
00:34:40aveugle
00:34:41telle qu'on avait pu
00:34:43la vivre
00:34:43dans le passé.
00:34:49Daniel Zaguri
00:34:50pourquoi ces mères
00:34:51tutelles leurs enfants ?
00:34:53Pourquoi ?
00:34:53Ce que je vais dire
00:34:54c'est extrêmement cynique.
00:34:57Elle tue
00:34:57une chose
00:34:59qui sort
00:35:00de leur ventre
00:35:01et qui n'a jamais
00:35:03été anticipée
00:35:04comme un enfant
00:35:06parce que dans une grossesse
00:35:08si vous voulez
00:35:08il y a les manifestations
00:35:09physiques, biologiques
00:35:11de la grossesse
00:35:11mais il y a aussi
00:35:12un vécu psychique.
00:35:14Elles n'ont jamais
00:35:15été enceintes psychiquement.
00:35:17Donc
00:35:17cette chose
00:35:18qui sort de leur ventre
00:35:19c'est ce qui vient
00:35:19contredire
00:35:20le déni
00:35:21qui a été le leur
00:35:23pendant des mois.
00:35:25Et donc
00:35:25elles vont le faire
00:35:26disparaître
00:35:27au plus vite
00:35:27pour rétablir
00:35:29ce déni.
00:35:30Disparaître
00:35:31oui et non
00:35:31parce qu'elle tue
00:35:33elle congèle
00:35:34et elle conserve
00:35:36leur bébé
00:35:36parfois près d'elle
00:35:37dans un sac.
00:35:39Oui alors
00:35:39ce qu'il faut noter
00:35:41d'abord
00:35:41c'est que généralement
00:35:43il n'y a pas
00:35:43de grandes précautions
00:35:45pour ne pas être appréhendées.
00:35:47Donc elles font tout
00:35:47pour être découvertes ?
00:35:49Elles ne font pas tout
00:35:49pour être découvertes
00:35:50mais
00:35:51elles ne font pas tout
00:35:52ce qu'il faut
00:35:52pour ne pas l'être.
00:35:54Alors
00:35:55la congélation.
00:35:57Je vais vous faire
00:35:58une double réponse.
00:36:00Une première réponse
00:36:01pragmatique
00:36:02cynique, atroce
00:36:03je dirais
00:36:04que c'est parce que
00:36:05le congélateur
00:36:06c'est ce qu'il y a
00:36:06de plus pratique
00:36:06pour garder un bébé
00:36:07dans une maison.
00:36:09La deuxième réponse
00:36:10c'est que cette chose
00:36:11qui est sortie
00:36:12de leur ventre
00:36:13elles ont
00:36:14en quelque sorte
00:36:15le pressentiment
00:36:17que ce n'est pas une chose
00:36:19mais ça n'est pas non plus
00:36:21un bébé
00:36:22il n'est pas vivant
00:36:23il n'est pas mort
00:36:24il est comme dans les limbes
00:36:26et le fait
00:36:27de le congeler
00:36:28c'est comme
00:36:29laisser
00:36:30ouvert
00:36:32l'espoir
00:36:33d'une accession
00:36:36à la vie
00:36:36et ça nous paraît
00:36:38ça nous paraît
00:36:39complètement fou.
00:36:40Mais Daniel Zaguri
00:36:41qu'on le fasse une fois
00:36:42bon
00:36:42mais parfois
00:36:44les cas s'enchaînent.
00:36:45Il y a quelque chose
00:36:46qui défie
00:36:47notre rationalité
00:36:50et
00:36:50alors
00:36:51on a
00:36:52très vite
00:36:53envie de penser
00:36:54que ce sont
00:36:54des malades mentales
00:36:55que ce sont des folles
00:36:56ça ne l'est pas
00:36:57et non
00:36:59et non
00:37:00alors il y a un cas
00:37:00que vous connaissez
00:37:01c'est celui de Dominique Cotteret
00:37:02puisque vous l'avez
00:37:03co-expertisé
00:37:04elle est accusée
00:37:06d'avoir tué
00:37:06huit bébés
00:37:07les siens.
00:37:17Arleu dans le Nord
00:37:19le samedi 24 juillet 2010
00:37:21il est environ
00:37:2319h
00:37:24quand le téléphone sonne
00:37:25à la gendarmerie.
00:37:28C'est un monsieur
00:37:30de Villers-Roters
00:37:31qui nous explique
00:37:31qu'en faisant du jardinage
00:37:33il a découvert
00:37:34des sacs plastiques
00:37:36contenant probablement
00:37:38des animaux morts
00:37:39et veut simplement savoir
00:37:40quelle est la marche
00:37:42à suivre
00:37:42et je décide
00:37:43par acquis de conscience
00:37:44d'aller faire une vérification
00:37:45d'aller voir
00:37:46ce qu'il y a
00:37:47dans ces sacs.
00:37:51Il y a une odeur
00:38:00très forte
00:38:02de putréfaction
00:38:02qui se dégage.
00:38:07On a deux emballages différents
00:38:08on en prend un au hasard
00:38:10et on commence à l'ouvrir
00:38:12et on va constater
00:38:13tout de suite
00:38:14la présence
00:38:15d'une masse
00:38:17grisâtre
00:38:19un peu gluante
00:38:20pour moi
00:38:22rien de connu
00:38:22rien de déjà vu
00:38:24mais ce qui m'étonne
00:38:26c'est l'absence
00:38:27de poils
00:38:27alors que je m'attendais
00:38:29à trouver des animaux.
00:38:32Sur cette boule
00:38:32on va rapidement
00:38:34voir
00:38:34qu'il y a quelques plis
00:38:36on va découvrir un bras
00:38:41et le visage
00:38:43d'un nourrisson.
00:38:46C'est un sentiment
00:38:47partagé
00:38:48entre
00:38:48la surprise
00:38:51et
00:38:52l'horreur.
00:38:57Un cadavre
00:38:58de nouveau-né
00:38:59enterré
00:38:59dans un jardin.
00:39:02À 20h25
00:39:03la brigade
00:39:04de recherche
00:39:04de Douai
00:39:04et les techniciens
00:39:06en identification
00:39:06criminelle
00:39:07prennent le relais.
00:39:09Je constate
00:39:10qu'il y a la présence
00:39:10de deux fontanelles
00:39:11donc il y a au moins
00:39:12deux bébés
00:39:13deux corps
00:39:14après effectivement
00:39:14vient la phase enquête
00:39:16et notamment
00:39:16à qui sont ces bébés.
00:39:22Rapidement
00:39:22les propriétaires
00:39:23des lieux
00:39:24sont écartés.
00:39:26Leur profil
00:39:27d'âge
00:39:28ne me semblait pas
00:39:28correspondre
00:39:29avec ce qu'on avait découvert
00:39:30puisque les cadavres
00:39:31et ce qu'on avait découvert
00:39:33malheureusement
00:39:34dans le jardin
00:39:34c'était pas
00:39:36quelque chose
00:39:36qui avait été mis la veille.
00:39:37On apprend
00:39:44que ce corps
00:39:45de ferme
00:39:45a appartenu
00:39:46à la famille
00:39:47l'empereur.
00:39:50On va chercher
00:39:51à connaître
00:39:51la composition
00:39:52de la famille
00:39:52aussi bien
00:39:53les garçons
00:39:54que les filles.
00:39:57Pour la majorité
00:39:58des frères et sœurs
00:39:59ils habitent encore
00:40:00dans le Douaisy.
00:40:04Parmi eux
00:40:04Dominique
00:40:05la petite dernière
00:40:06de la famille.
00:40:08Elle a 46 ans
00:40:09et elle vit avec son mari
00:40:11Pierre-Marie Cotteret
00:40:12à quelques mètres
00:40:13de la ferme
00:40:14où elle a grandi.
00:40:17On rencontre
00:40:18Madame Cotteret
00:40:19qui était dans la cuisine
00:40:20donc très simplement
00:40:21on se présente
00:40:22on regarde des recherches
00:40:24de Douais
00:40:24on aurait besoin
00:40:26de vous entendre.
00:40:29On dit ok
00:40:29demain matin
00:40:30je viendrai
00:40:31à 8h30-9h.
00:40:33On remonte
00:40:34dans la voiture
00:40:34avec mon collègue
00:40:35on n'échange
00:40:36aucun mot
00:40:36et à ce moment-là
00:40:38on se tourne
00:40:39l'un vers l'autre
00:40:40et on s'est dit
00:40:41il y a un problème.
00:40:42Il y a un problème
00:40:43parce qu'en général
00:40:44quand on convoque les gens
00:40:45ils nous demandent pourquoi.
00:40:48Trois jours
00:40:48après la découverte
00:40:49des sacs
00:40:50à 8h30
00:40:51Dominique Cotteret
00:40:54et son mari
00:40:54se présentent
00:40:55à la brigade
00:40:56de Douais
00:40:56en tant que
00:40:59simple témoin.
00:41:00elle est soignante
00:41:04à la domicile
00:41:04donc
00:41:05elle fait un métier
00:41:06où elle rend
00:41:07service aux gens
00:41:08elle fait son environnement
00:41:09familial
00:41:10sa vie
00:41:11elle est mariée
00:41:12deux enfants.
00:41:15Deux filles
00:41:16d'une vingtaine d'années
00:41:17dont une
00:41:18la deuxième
00:41:19a surpris
00:41:20tout le monde
00:41:21à sa naissance.
00:41:23D'après sa famille
00:41:24Dominique
00:41:24a en effet
00:41:25caché
00:41:25qu'elle était enceinte.
00:41:26J'ai la pousse
00:41:29en disant
00:41:29mais
00:41:29si vous l'aviez cachée
00:41:30la deuxième
00:41:31pourquoi vous n'auriez pas
00:41:32cachée la troisième
00:41:32et la quatrième
00:41:33et
00:41:34au bout d'un moment
00:41:35je vois qu'elle commence
00:41:36à vraiment être très mal
00:41:38on a fait une petite pause
00:41:39pour qu'elle se calme
00:41:41un peu
00:41:41et puis on a repris
00:41:46l'audition
00:41:47assez rapidement
00:41:47elle a dit
00:41:48que c'était elle
00:41:48en fait
00:41:49c'était deux de ses enfants
00:41:51qu'elle avait mis
00:41:52à enterrer.
00:41:56Il est 11 heures
00:41:59Dominique Cotteret
00:42:01est placée
00:42:01en garde à vue
00:42:02et elle raconte tout.
00:42:06Ça s'est passé
00:42:07en 1989
00:42:08puis en 1991.
00:42:12Lorsque les contractions
00:42:13viennent
00:42:13elle va s'isoler
00:42:14dans les toilettes
00:42:15elle va accoucher seule
00:42:16en essayant de retenir
00:42:17ses cris
00:42:17dans des conditions
00:42:19extrêmement rudimentaires.
00:42:24Elle savait pertinemment
00:42:25qu'elle lui donnerait la mort.
00:42:26Donc elle explique
00:42:28qu'elle avait préparé
00:42:29des serviettes
00:42:30des sacs poubelles
00:42:33tout de suite
00:42:34et en fait
00:42:34elle l'a étouffée.
00:42:38C'était assez dur
00:42:39parce que
00:42:39quand on lui pose la question
00:42:41est-ce que le bébé a crié ?
00:42:43Elle dit
00:42:43je crois que le premier a crié.
00:42:46Pour d'un coup
00:42:47dans le moral quand même.
00:42:48Et le deuxième bébé
00:42:49comment vous avez fait ?
00:42:51Elle explique
00:42:52et elle dit
00:42:52le deuxième bébé
00:42:53je ne me souviens plus
00:42:55s'il a crié
00:42:57je lui ai dit
00:42:57c'était un garçon
00:42:59ou une fille ?
00:43:00Elle dit
00:43:01je ne sais pas
00:43:01je n'ai pas regardé.
00:43:07Les gendarmes
00:43:08sentent que
00:43:08Dominique Cotteret
00:43:09leur cache encore des choses.
00:43:13Dominique Cotteret
00:43:14parlait souvent
00:43:14de sacs poubelles
00:43:15de couleur noire
00:43:16or lors des consultations
00:43:17il s'agissait
00:43:18de sacs poubelles
00:43:19de couleur bleue.
00:43:23J'ai pris la décision
00:43:24de lui montrer les photos
00:43:24des sacs poubelles
00:43:26et des sacs
00:43:26je la vois
00:43:27pareil que la première fois
00:43:29blocage.
00:43:32C'est là que j'ai refait
00:43:33une pause
00:43:33je dis
00:43:34on va en faire
00:43:34une petite pause
00:43:35parce que là
00:43:35pas bien.
00:43:39C'est elle
00:43:39qui a commencé
00:43:40à me reparler
00:43:41de ses sacs.
00:43:42Elle m'a déclaré
00:43:43il y en a d'autres
00:43:45il y en a beaucoup d'autres.
00:43:48Donc je vous avoue
00:43:49que sur l'instant
00:43:50on a été
00:43:51un petit peu surpris.
00:43:54Parce que là
00:43:54je ne comprends plus
00:43:54parce que moi
00:43:55dans mon esprit
00:43:56il n'y en avait plus d'autres
00:43:58quand on en avait trouvé
00:43:59deux
00:43:59voilà
00:44:00je me suis dit
00:44:03mais
00:44:03combien
00:44:05ou quoi
00:44:06elle n'arrive pas
00:44:09à nous donner
00:44:09un chiffre exact.
00:44:10Elle a consenti
00:44:11à nous expliquer
00:44:11à nous dire
00:44:12voilà
00:44:13les sacs
00:44:14se trouvent
00:44:15dans mon logement
00:44:15à Villers-aux-Tertres
00:44:17sous l'ancien emplacement
00:44:18de la cuve à fioul.
00:44:20Impossible d'emmener
00:44:20Madame Cotteret
00:44:21parce qu'elle n'était pas
00:44:22dans un état physique
00:44:23qu'on puisse
00:44:24l'emmener
00:44:25c'était impossible.
00:44:26Donc on a emmené
00:44:27le mari avec nous.
00:44:38Dans le garage
00:44:39on trouve
00:44:40ce qu'elle nous a dit
00:44:41quand on enlève
00:44:43les pots de fleurs
00:44:44en plastique
00:44:45qui étaient de sucre
00:44:46et on trouve
00:44:46des sacs de poubelle
00:44:47en fait
00:44:47on ouvrait des sacs
00:44:50et dans les sacs
00:44:51il y avait d'autres sacs
00:44:52alors on se dit
00:44:52mais ça ne s'arrêtera jamais
00:44:54quoi.
00:44:59Et le mari
00:45:00qui était à côté
00:45:00il ne voulait plus regarder
00:45:01parce que le mari
00:45:02il ne voulait pas
00:45:03il était assis
00:45:03il ne pouvait plus
00:45:04à la fin
00:45:07on ne savait même plus
00:45:08combien on en est arrivé
00:45:09et au total
00:45:10on trouvera
00:45:12six autres bébés
00:45:13elles sont dans un état
00:45:18de conservation
00:45:19assez étonnant
00:45:21en plus technique
00:45:22enfin
00:45:22c'est ce qu'on appelle
00:45:23un état de saponification
00:45:25c'est un petit peu
00:45:26le corps se momifie
00:45:28en fait
00:45:28psychologiquement
00:45:32ça a été difficile
00:45:32c'était le soir
00:45:33j'ai mal dormi
00:45:35honnêtement
00:45:35j'ai mal dormi
00:45:36ce soir
00:45:36des cadavres
00:45:37j'en ai fait
00:45:38mais huit bébés
00:45:39j'ai essayé
00:45:39elle était la première
00:45:40j'espère la dernière fois
00:45:41huit infanticides
00:45:49du jamais vu en Europe
00:45:51les gendarmes ont des aveux
00:45:53mais l'enquête
00:45:54est loin d'être terminée
00:45:55Dominique Cotteret
00:45:56a-t-elle tué
00:45:57ses enfants toutes seules
00:45:57est-ce que quelqu'un
00:45:59était au courant
00:45:59et puis
00:46:00pourquoi ces crimes
00:46:01le lendemain matin
00:46:03le 28 juillet 2010
00:46:04sa garde à vue
00:46:05et celle de son mari
00:46:06reprennent
00:46:07c'était assez délicat
00:46:13de lui dire
00:46:14à madame Cotteret
00:46:15en fait
00:46:16il y en avait six
00:46:17dans les sacs
00:46:18dans le garage
00:46:19ça c'était
00:46:20assez difficile
00:46:22donc je voulais avoir
00:46:24des explications
00:46:25sur comment
00:46:26on l'avait fait
00:46:27sur les six autres
00:46:27la manière d'opérer
00:46:29était la même
00:46:29que sur les deux premiers
00:46:30ça fait un peu froid
00:46:32dans le dos
00:46:32puisqu'on se dit
00:46:33cette dame
00:46:34elle était enceinte
00:46:36elle a accouché
00:46:37elle les a mis
00:46:39dans les sacs poubelle
00:46:39mais elle ne sait pas
00:46:40combien de fois
00:46:41elle l'a fait
00:46:41et pourquoi
00:46:43elle a continué
00:46:45à le faire
00:46:45puisqu'on se dit
00:46:48il y a des moyens
00:46:48de contraception
00:46:49il y a des choses
00:46:50qu'on peut mettre
00:46:51en place
00:46:51donc ça a été compliqué
00:46:55à un moment
00:46:55de comprendre
00:46:56les gendarmes
00:47:02insistent
00:47:02pourquoi
00:47:04avoir caché
00:47:05huit grossesses
00:47:05et tué
00:47:06huit bébés
00:47:07il faut prendre
00:47:10le temps
00:47:11de l'écouter
00:47:11c'est quelqu'un
00:47:12qui parle pas beaucoup
00:47:13qui est très introverti
00:47:14qui a du mal
00:47:15à dire les choses
00:47:15la question
00:47:19avait été posée
00:47:20à Dominique Cotteret
00:47:20si elle n'avait pas
00:47:21été victime
00:47:22d'un inceste
00:47:22ou d'une agression
00:47:23ou d'un viol
00:47:24ou d'une quelconque
00:47:25agression sexuelle
00:47:26on lui demande
00:47:28qui est le père
00:47:29et on lui demande
00:47:31ensuite ses motivations
00:47:32la raison
00:47:32de ses infanticides
00:47:33elle a voulu cacher
00:47:37les enfants
00:47:38à son mari
00:47:39elle n'a jamais eu
00:47:40de relation extra-conjugale
00:47:41d'après toute la famille
00:47:42je lui pose la question
00:47:44quand même
00:47:44et à aucun moment
00:47:46elle n'a de doute
00:47:47elle dit
00:47:47non non c'est lui
00:47:48c'est lui
00:47:49c'est mon mari
00:47:50enfin de garde à vue
00:47:53lors de sa septième audition
00:47:54Dominique Cotteret
00:47:56finit par lâcher
00:47:57une explication
00:47:57en fait
00:47:59elle a peur
00:48:01des docteurs
00:48:01elle ne veut plus
00:48:04être auscultée
00:48:05puisque lors
00:48:06de l'accouchement
00:48:07de sa première fille
00:48:08elle a été confrontée
00:48:10dit-elle
00:48:10à une sage-femme
00:48:11qui l'a clairement
00:48:12malmenée
00:48:13ils ont dû utiliser
00:48:17une ventouse
00:48:18pour sortir l'enfant
00:48:19la sage-femme
00:48:21me disputait
00:48:22par rapport
00:48:22à mon poids
00:48:23et Dominique Cotteret
00:48:27a fait un rejet
00:48:29du corps médical
00:48:30dans son ensemble
00:48:30aucune contraception
00:48:34aucun suivi
00:48:35gynécologique
00:48:36Dominique Cotteret
00:48:37est tombée enceinte
00:48:38huit fois
00:48:39à partir de 1989
00:48:40et elle a tué
00:48:42ses huit bébés
00:48:42les deux premiers
00:48:46elle raconte
00:48:47que ce n'est pas elle
00:48:48qui les a mis dans le jardin
00:48:49elle s'étonne
00:48:53de leur présence
00:48:54enterrée dans le jardin
00:48:55elle les avait laissées
00:48:57dans le grenier
00:48:58de l'habitation
00:48:59de la ferme
00:49:00ça elle n'a
00:49:01aucune explication
00:49:02et ma foi
00:49:03son raci assez spontané
00:49:05nous laisse croire
00:49:06qu'effectivement
00:49:06elle dit la vérité
00:49:07à ce sujet
00:49:08quelqu'un d'autre
00:49:11les aurait donc déplacés
00:49:13les six autres bébés
00:49:14elle ne les a pas
00:49:16tout de suite cachés
00:49:17dans le garage
00:49:17pendant des années
00:49:19ils sont restés
00:49:21tout près d'elle
00:49:21à un moment donné
00:49:24elle les a mis
00:49:24dans l'armoire
00:49:25qui se trouve
00:49:25dans la chambre parentale
00:49:26et en fait
00:49:27quasiment au pied du lit
00:49:29mais est-ce qu'elle a fait
00:49:35tout ça
00:49:35toute seule ?
00:49:38on s'est posé
00:49:39la question
00:49:39effectivement
00:49:39comment le mari
00:49:41ne s'est jamais aperçu
00:49:42que son épouse
00:49:43était enceinte
00:49:44notamment
00:49:45huit fois en plus
00:49:47en garde à vue
00:49:50le mari jure
00:49:51qu'il ne savait rien
00:49:52ce que sa femme a fait
00:49:55c'est une honte
00:49:57Dominique Cotteret
00:50:01est une personne
00:50:01qui est obèse
00:50:02et qui s'habille toujours
00:50:04de manière
00:50:05à cacher ce corps
00:50:06dont elle nous a dit
00:50:08avoir honte
00:50:08donc en fait
00:50:09je pense que
00:50:10son mari
00:50:12physiquement
00:50:13n'a jamais remarqué
00:50:15qu'elle était enceinte
00:50:16je lui ai dit
00:50:16quand vous accouchez
00:50:17il y a du sang
00:50:18votre mari
00:50:20ne s'en est jamais aperçu
00:50:20soit elle faisait ça
00:50:23dans les toilettes
00:50:23soit sur son lit
00:50:24et elle rangeait tout
00:50:26le juge se laisse aussi convaincre
00:50:32entendu pour recel de cadavres
00:50:34Pierre-Marie Cotteret
00:50:35est finalement placé
00:50:36sous le statut
00:50:36de témoin assisté
00:50:37sa femme
00:50:38elle
00:50:39est mise en examen
00:50:40pour homicide volontaire
00:50:41sur mineur de 15 ans
00:50:42et elle est immédiatement
00:50:43incarcérée
00:50:44et l'instruction se poursuit
00:50:45comment cette aide-soignante
00:50:47de 46 ans
00:50:48aux petits soins
00:50:49pour sa famille
00:50:50en est arrivé à étouffer
00:50:518 bébés
00:50:52une instruction
00:50:53qui suscite
00:50:54beaucoup de curiosité
00:50:55ça allait être
00:51:00le plus gros
00:51:01infanticide
00:51:02de l'histoire
00:51:02judiciaire française
00:51:03donc ça pouvait pas
00:51:05être anodin
00:51:06et ça pouvait pas
00:51:07ne pas intéresser
00:51:08les médias
00:51:08et ça les a intéressés
00:51:09en France
00:51:10et à l'étranger
00:51:10et notamment en Corée
00:51:12parce que depuis
00:51:13l'affaire Courjou
00:51:14les Coréens
00:51:14voilà
00:51:15sont très intéressés
00:51:17à ces histoires
00:51:18d'infanticide français
00:51:19voilà
00:51:20des fois j'ai l'impression
00:51:21qu'ils ont l'impression
00:51:22que c'est une de nos spécialités
00:51:23voilà
00:51:23il y a les médias
00:51:27du monde entier
00:51:27qui débarquent
00:51:28à Villers-aux-Terres
00:51:29c'est un petit village
00:51:30de 610 habitants
00:51:31à 15 km de Douai
00:51:32petit village tranquille
00:51:33il y a vraiment
00:51:34une stupéfaction
00:51:34parce que c'est vraiment
00:51:35Dominique Cotterer
00:51:36c'est la mère modèle
00:51:39dévouée
00:51:39grand-mère idéale
00:51:41toujours prête
00:51:41à rendre service
00:51:42très discrète
00:51:44donc il y a une espèce
00:51:46de sidération
00:51:46tout de suite
00:51:47il y a ce côté
00:51:48c'est l'enfant du village
00:51:49il y a une espèce
00:51:50de défense
00:51:50tout de suite
00:51:51d'empathie
00:51:52de compassion énorme
00:51:53dans cette affaire
00:51:53le village
00:51:56fait bloc
00:51:57derrière Dominique
00:51:58comme son mari d'ailleurs
00:51:59qui la soutient
00:52:01sans relâche
00:52:02devant les caméras
00:52:03je peux pas partir
00:52:05d'une femme comme ça
00:52:06c'est pas possible
00:52:06c'est pas possible
00:52:08les gens
00:52:08ils pourront se dire
00:52:09ce qu'ils veulent
00:52:09c'est mon épouse
00:52:12c'est tout
00:52:12mais au fil des mois
00:52:18la famille
00:52:19de Dominique Cotterer
00:52:20se divise
00:52:20jusqu'à imaginer
00:52:22l'inimaginable
00:52:24et le souffler
00:52:25aux gendarmes
00:52:26on a décidé
00:52:30avec le juge
00:52:31d'instruction
00:52:31de mettre
00:52:32la totalité
00:52:33de la famille
00:52:34sur écoute
00:52:34cette mise
00:52:35sur écoute
00:52:36avait surtout
00:52:37pour but
00:52:37d'avoir des éléments
00:52:38nouveaux
00:52:39à exploiter
00:52:41l'un des beaux frères
00:52:46de Dominique Cotterer
00:52:47a dit
00:52:48dans la discussion
00:52:49avec une soeur
00:52:51que
00:52:52selon lui
00:52:54il serait pas étonné
00:52:55que Dominique Cotterer
00:52:56ait eu des relations
00:52:56sexuelles
00:52:57avec son père
00:52:58un inceste
00:53:03le beau frère
00:53:05est en boucle
00:53:06sur cette explication
00:53:07la juge
00:53:09veut en avoir
00:53:09le coeur net
00:53:10alors le 2 février
00:53:122011
00:53:13Dominique Cotterer
00:53:13est de retour
00:53:14dans son bureau
00:53:15le procureur
00:53:16est là
00:53:17lui aussi
00:53:17pour un nouvel
00:53:19interrogatoire
00:53:20le cinquième
00:53:22en six mois
00:53:23on est tous
00:53:27dans l'envie
00:53:28de comprendre
00:53:29et en réalité
00:53:30madame Cotterer
00:53:30elle est horripilante
00:53:31elle est horripilante
00:53:32parce que
00:53:33elle est pas claire
00:53:34au cours
00:53:38d'un même interrogatoire
00:53:39elle peut dire
00:53:41tout est son contraire
00:53:41ce jour là
00:53:44la juge décide
00:53:45d'aborder
00:53:45cette question
00:53:46de l'inceste
00:53:47avec Dominique Cotterer
00:53:48elle a dit
00:53:50non non
00:53:50mon père
00:53:51est un petit peu
00:53:52très bien
00:53:52j'ai beaucoup aimé
00:53:53mon papa
00:53:54j'avais même
00:53:54une relation
00:53:56privilégiée
00:53:56avec lui
00:53:57j'étais sans doute
00:53:58sa fille préférée
00:53:59l'avocat de Dominique Cotterer
00:54:02s'y met aussi
00:54:03il a envie de savoir
00:54:06il a envie de comprendre
00:54:07donc
00:54:08on lui laisse poser
00:54:09toutes les questions
00:54:10qu'il veut
00:54:11aussi librement
00:54:11qu'il le veut
00:54:12donc il insiste
00:54:13il insiste
00:54:13il insiste
00:54:14et on insiste tellement
00:54:15qu'on obtient
00:54:16donc les réponses
00:54:17son père savait
00:54:20il savait
00:54:21qu'elle avait tué
00:54:22ses bébés
00:54:22elle lui racontait tout
00:54:23c'était un secret
00:54:25entre elle et lui
00:54:26alors l'avocat
00:54:31de Dominique Cotterer
00:54:31revient sur cette histoire
00:54:33d'inceste
00:54:33encore et encore
00:54:35jusqu'à lui expliquer
00:54:37ce qu'est
00:54:38un inceste
00:54:39elle nous dit
00:54:45finalement
00:54:45c'est
00:54:46ouais
00:54:47mon papa m'a violé
00:54:49ses relations
00:54:57commençaient dans l'enfance
00:54:58se perpétuent
00:55:00une fois qu'elle est mariée
00:55:01après son mariage
00:55:02on s'est tous dit
00:55:08ah enfin
00:55:08voilà
00:55:08elle nous le dit
00:55:09ce qu'on attendait
00:55:10elle nous le dit
00:55:11et on a l'explication
00:55:12et on a une explication
00:55:13simple
00:55:13voilà
00:55:14et presque rassurante
00:55:15Dominique Cotterer
00:55:19avait peur
00:55:20que ses bébés
00:55:20soient les enfants
00:55:21de son père
00:55:21mais les gendarmes
00:55:23ont écarté
00:55:23cette éventualité
00:55:24depuis plusieurs mois
00:55:25déjà
00:55:26cette théorie
00:55:32au niveau de l'enquête
00:55:33a été
00:55:34un peu mise de côté
00:55:36après
00:55:36l'obtention des résultats
00:55:38d'ADN
00:55:39des bébés
00:55:40puisqu'on a su
00:55:41de manière officielle
00:55:42que les parents
00:55:43des huit bébés
00:55:44étaient
00:55:44Dominique Cotterer
00:55:46et son mari
00:55:46si les bébés
00:55:50ne sont pas de son père
00:55:51ça ne prouve pas
00:55:53qu'elle n'a pas
00:55:54couché avec lui
00:55:55mais il n'y a
00:55:56aucune preuve
00:55:57de cet inceste
00:55:58et le père
00:55:59de Dominique Cotterer
00:56:00est mort
00:56:01trois ans plus tôt
00:56:02pourtant
00:56:04l'explication
00:56:05satisfait tout le monde
00:56:06magistrats
00:56:07avocats
00:56:08mais aussi journalistes
00:56:10qui font
00:56:11leur chou gras
00:56:12de cette révélation
00:56:13c'est une déflagration
00:56:15c'est avoir des retentissements
00:56:16sur sa famille
00:56:16sur ses filles
00:56:17c'est très compliqué
00:56:19c'est lourd
00:56:20et puis à la suite
00:56:23de ce papier
00:56:24où on révèle
00:56:24la théorie
00:56:25de l'inceste
00:56:25on a
00:56:26un coup de téléphone
00:56:28d'un membre
00:56:28de la famille
00:56:29qui est très en colère
00:56:32et qui n'y croit pas
00:56:33une seconde
00:56:34et qui regrette
00:56:35qu'on salisse
00:56:36la mémoire
00:56:36du grand-père
00:56:37oui ce coup de fil
00:56:39est peut-être
00:56:39assez symptomatique
00:56:40de ce qui se passe
00:56:42dans l'univers
00:56:43de Dominique Cotterer
00:56:44on comprend que
00:56:49là où elle est née
00:56:50là d'où elle vient
00:56:50on ne parle pas
00:56:52des taiseux
00:56:58Dominique Cotterer
00:56:59et sa famille
00:57:00mais la juge d'instruction
00:57:01a besoin d'explications
00:57:02deux collèges
00:57:04d'experts psychiatres
00:57:05vont se pencher
00:57:05sur la personnalité
00:57:06de l'accuser
00:57:07j'ai l'impression
00:57:15qu'elle est en quête
00:57:16de se comprendre
00:57:17elle-même
00:57:18et donc
00:57:19je dirais
00:57:20que l'entretien expertal
00:57:22j'ose le dire
00:57:22était un bonheur
00:57:24on a envie
00:57:24de la prendre
00:57:25dans les bras
00:57:25et de la consoler
00:57:26elle est au-delà
00:57:27de la douleur
00:57:28c'est une douleur
00:57:28c'est une douleur en soi
00:57:30elle est totalement
00:57:35sincère
00:57:38en commençant
00:57:38par décrire
00:57:40la peur qu'elle a
00:57:42du regard des autres
00:57:44j'ai peur
00:57:45d'être considéré
00:57:47comme un monstre
00:57:48et même
00:57:48est-ce que je ne suis pas
00:57:50un monstre ?
00:57:53Dominique Cotterer
00:57:54se confie
00:57:54et très vite
00:57:56un premier traumatisme
00:57:57émerge
00:57:58l'élément le plus important
00:58:01c'est le fait
00:58:03qu'elle était grosse
00:58:04obèse
00:58:05et la souffrance
00:58:07de cet état de fait
00:58:08dans le regard des autres
00:58:10vers l'âge
00:58:14de 15-16 ans
00:58:14elle avait déjà
00:58:15plus de 85 kilos
00:58:17et pour attention
00:58:19pour 1m55
00:58:20et comme vous le savez
00:58:22les enfants
00:58:22sont impitoyables
00:58:23et elle a subi
00:58:26tous les colibés
00:58:27possibles
00:58:28et elle était
00:58:29mise à l'écart
00:58:29une fois adulte
00:58:33son poids
00:58:34est resté tabou
00:58:351m57
00:58:37pour
00:58:38130
00:58:39voire 140 kilos
00:58:41une obésité
00:58:43qui lui a donc valu
00:58:43un premier accouchement
00:58:44difficile
00:58:45et ce traumatisme-là
00:58:48il lui est infligé
00:58:50par la sage femme
00:58:51qui lui dit
00:58:53à ma grosse
00:58:54la prochaine fois
00:58:55il faut que tu perdes
00:58:5630 kilos
00:58:57dans ce témoignage
00:59:00est-ce qu'il y a
00:59:01du factuel
00:59:02et puis des choses
00:59:03un peu interprétées
00:59:04peu importe
00:59:05à la limite
00:59:05on voit que
00:59:06la manière
00:59:07dont elle l'a vécu
00:59:08quand on est à l'écoute
00:59:10prend valeur
00:59:11traumatique
00:59:12dans son histoire
00:59:14l'obésité
00:59:18de possibles
00:59:19maltraitances
00:59:20gynécologiques
00:59:21et surtout
00:59:21Dominique Cotteret
00:59:23maintient devant
00:59:24les psychiatres
00:59:24qu'elle a bien été
00:59:25victime d'inceste
00:59:26les histoires incestueuses
00:59:30qui continuent
00:59:32au-delà du mariage
00:59:33d'une jeune fille
00:59:35qui a été
00:59:36touchée dans son adolescence
00:59:38sont
00:59:39plus rares
00:59:40mais
00:59:40elle a une telle
00:59:42manière
00:59:43de le raconter
00:59:44que
00:59:46ça sonne
00:59:48juste
00:59:48Madame Cotteret
00:59:53elle est gentille
00:59:53et jamais
00:59:54elle ne dirait
00:59:55du mal
00:59:56de son père
00:59:57elle n'a jamais
00:59:59prétendu
01:00:01qu'elle avait été
01:00:02forcée
01:00:03de manière violente
01:00:04par son père
01:00:05la formule
01:00:07je vous la répète
01:00:08tout ce que j'ai senti
01:00:09c'est qu'il poussait
01:00:10maintenant
01:00:12c'était très
01:00:13sobre
01:00:14très restreint
01:00:15comme discours
01:00:16je cite presque
01:00:17texto
01:00:18pour moi
01:00:20finalement
01:00:22quand on faisait
01:00:23l'amour
01:00:24ce n'était pas
01:00:26un père
01:00:27mais un homme
01:00:28et un homme
01:00:29qui semblait
01:00:31m'apprécier
01:00:32un homme
01:00:32qui semblait
01:00:33m'aimer
01:00:34reste maintenant
01:00:37à parler des faits
01:00:38avec l'accusé
01:00:38elle n'est pas
01:00:41dans le déni
01:00:42de grossesse
01:00:43elle se sait
01:00:44enceinte
01:00:45elle n'est pas
01:00:46dans le clivage
01:00:47elle est dans le brouillage
01:00:48elle ne voit rien
01:00:49elle ne mentalise rien
01:00:51elle ne projette rien
01:00:52c'est une grossesse
01:00:57non sociabilisée
01:00:58qui n'est jamais
01:01:00investie
01:01:02par le psychisme
01:01:04de la femme
01:01:05comme un enfant
01:01:07à naître
01:01:07elle tue
01:01:09quelqu'un
01:01:11qui n'existe pas
01:01:13pour elle
01:01:14voilà la vérité
01:01:16clinique
01:01:17profonde
01:01:18les huit bébés
01:01:19elle ne s'en est
01:01:21jamais séparée
01:01:22alors un jour
01:01:23je lui dis
01:01:23mais
01:01:24pour les deux premiers
01:01:26vous étiez dans une maison
01:01:27et vous étiez chauffé
01:01:29avec un poêle à charbon
01:01:30pourquoi
01:01:32n'avez-vous pas
01:01:33brûlé les camps
01:01:34on a dit
01:01:35ah ben non
01:01:36ça leur aurait fait
01:01:37trop mal
01:01:37c'est ça
01:01:40le phénomène
01:01:41inexplicable
01:01:42ça leur aurait fait
01:01:46trop mal
01:01:46on ne comprend pas
01:01:48on ne comprend pas
01:01:49cette réponse
01:01:50on ne comprend pas
01:01:51cette réponse
01:01:52parce qu'elle défie
01:01:53évidemment
01:01:53tous nos repères
01:01:55cartésiens
01:01:56mais
01:01:57si
01:01:59on parvient
01:02:00à réaliser
01:02:02que pour ces femmes
01:02:04cette chose
01:02:05qui est sortie
01:02:06de leur ventre
01:02:08n'est ni
01:02:09un bébé vivant
01:02:10ni un bébé mort
01:02:11qu'il est
01:02:13entre les deux
01:02:14et qu'elle le garde
01:02:16auprès d'elle
01:02:16pour ne pas
01:02:18s'en débarrasser
01:02:18justement
01:02:19comme d'un simple objet
01:02:21on peut comprendre
01:02:23qu'elles aient
01:02:25comme Dominique Cotteres
01:02:27cette idée
01:02:28que ça fait mal
01:02:30ou cette idée
01:02:32qu'il faut laisser
01:02:32les cadavres
01:02:34les uns à côté
01:02:34des autres
01:02:35pour qu'ils puissent
01:02:36jouer ensemble
01:02:37je vais être sûr
01:02:38de bien comprendre
01:02:39quand vous dites
01:02:41cette chose
01:02:42c'est-à-dire
01:02:42qu'elles ont
01:02:43des douleurs
01:02:44elles perdent
01:02:45les os
01:02:45et c'est une surprise
01:02:48de voir arriver
01:02:49l'enfant
01:02:49alors on ne peut pas
01:02:50généraliser
01:02:51il y a des dénis
01:02:54de grossesse
01:02:55tout à fait
01:02:55caractéristiques
01:02:56et puis
01:02:57il y a
01:02:58des situations
01:03:00cousines
01:03:01on va dire
01:03:02donc
01:03:03qu'elles peuvent
01:03:04avoir
01:03:05le pressentiment
01:03:06qu'elles sont enceintes
01:03:07elles peuvent
01:03:08l'avoir su
01:03:09et elles peuvent
01:03:10l'avoir refoulé
01:03:12c'est-à-dire
01:03:12elles l'ont su
01:03:15j'y pense
01:03:15et puis j'oublie
01:03:16comme dit la chanson
01:03:17c'est-à-dire
01:03:18qu'elles n'ont pas
01:03:19envie d'y penser
01:03:19et qu'il y a
01:03:20en quelque sorte
01:03:21un déni
01:03:22de l'inéluctabilité
01:03:25du terme
01:03:25de la grossesse
01:03:26parce que ça finit
01:03:27toujours
01:03:27une grossesse
01:03:28au bout de neuf mois
01:03:29alors elles n'y pensent pas
01:03:30en général
01:03:32ce sont des femmes
01:03:33qui sont plutôt
01:03:33taiseuses
01:03:34et l'arrivée
01:03:36de cet enfant
01:03:37cette chose
01:03:37sonne quand même
01:03:39comme une libération
01:03:40non ?
01:03:41non c'est pas une libération
01:03:42pour elles
01:03:42c'est un vécu
01:03:43catastrophique
01:03:44il y a une chose
01:03:45qui sort dans la douleur
01:03:46et elles improvisent
01:03:48des gestes
01:03:49je parle
01:03:49quand c'est une fois
01:03:50pas quand c'est huit fois
01:03:51et
01:03:53la libération
01:03:55après avoir
01:03:57dit deux ou trois
01:03:59mensonges
01:04:00aux enquêteurs
01:04:02en général
01:04:03très vite
01:04:04elles disent
01:04:05la vérité
01:04:05et là
01:04:06commence
01:04:07quelque chose
01:04:08qui est de l'ordre
01:04:09de la honte
01:04:10évidemment
01:04:11mais aussi
01:04:12d'une forme
01:04:14de libération
01:04:14en effet
01:04:15une honte
01:04:21qu'une journaliste
01:04:22saisie
01:04:23quand Dominique
01:04:24Cotteret
01:04:24est libérée
01:04:25sous contrôle judiciaire
01:04:26le 2 août 2012
01:04:27et qu'elle accepte
01:04:28de se dévoiler
01:04:29un peu
01:04:31on est de part et d'autre
01:04:35de la table
01:04:36de la cuisine
01:04:36il y a un canari
01:04:37orange
01:04:38dans la cage
01:04:39et c'est lui
01:04:40qui ponctue
01:04:40la discussion
01:04:43le canari
01:04:44et le tic-tac
01:04:44de l'horloge
01:04:45on a le poids
01:04:46du non-dit
01:04:46qui est là
01:04:47et en même temps
01:04:49elle a dit
01:04:50sa vérité
01:04:50elle explique
01:04:52qu'elle aurait tellement aimé
01:04:53qu'à un moment
01:04:53il y ait quelque chose
01:04:54de divin
01:04:55de l'ordre du divin
01:04:56qui serait venu l'aider
01:04:57à sortir
01:04:58de cette spirale
01:04:59infernale
01:04:59qu'a de nasser
01:05:02Dominique Cotteret
01:05:03quand ses avocats
01:05:05la pressent
01:05:06de s'ouvrir
01:05:06de parler
01:05:07de s'humaniser
01:05:08en prévision
01:05:10d'un procès
01:05:11qu'ils redoutent
01:05:12et tentent
01:05:13d'éviter
01:05:13en invoquant
01:05:14la prescription
01:05:15des faits
01:05:16Dominique Franck-Berton
01:05:18et Marie-Hélène Carlier
01:05:19les avocats
01:05:20de Dominique Cotteret
01:05:21ferraudure
01:05:21depuis 2011
01:05:22pour faire reconnaître
01:05:23la prescription
01:05:24d'abord
01:05:25que dit la loi ?
01:05:25Alors
01:05:26en matière
01:05:27criminelle
01:05:28à l'époque
01:05:29la prescription
01:05:30elle est de 10 ans
01:05:31après les faits
01:05:32le problème
01:05:33c'est que Dominique Cotteret
01:05:34elle est incapable
01:05:35de dater
01:05:35la naissance
01:05:36et donc la mort
01:05:37de ses enfants
01:05:38on sait simplement
01:05:39que pour les deux premiers
01:05:40nés en 89
01:05:41et 91
01:05:42les faits sont
01:05:43prescrits
01:05:44ensuite
01:05:45elle dit aux enquêteurs
01:05:46je n'ai plus été enceinte
01:05:48après 2003-2004
01:05:51donc la question
01:05:52c'est
01:05:52est-ce qu'elle a eu
01:05:53un enfant
01:05:54ou des enfants
01:05:55entre juillet 2000
01:05:57et 2003-2004
01:05:59parce que ces faits-là
01:05:59ne seraient pas prescrits
01:06:01donc
01:06:02l'instruction doit
01:06:03dater les cadavres
01:06:04est-ce que c'est possible ça ?
01:06:05non c'est impossible
01:06:06compte tenu
01:06:07de l'état
01:06:07des corps
01:06:08des bébés
01:06:08qui ont été retrouvés
01:06:09dans le jardin
01:06:09en revanche
01:06:10les enquêteurs
01:06:11ont une idée
01:06:12Dominique Cotteret
01:06:13est épileptique
01:06:14elle prend un traitement
01:06:15depuis 1991
01:06:16qui a évolué
01:06:17avec le temps
01:06:17on a changé
01:06:18son traitement
01:06:19et les enquêteurs
01:06:20vont demander
01:06:21à des toxicologues
01:06:23s'il est possible
01:06:25en étudiant
01:06:26la peau
01:06:27les cheveux
01:06:28du bébé
01:06:28d'y retrouver
01:06:29des traces
01:06:30des molécules
01:06:31des médicaments
01:06:32que prenaient
01:06:33leur maman
01:06:34et à partir de là
01:06:35d'en déduire
01:06:36une période de naissance
01:06:37et d'après
01:06:38ces analyses
01:06:39pour
01:06:407 bébés
01:06:41il y a prescription
01:06:42la question se pose
01:06:44pour le 8ème
01:06:45donc la question
01:06:46est de savoir
01:06:46s'il est né
01:06:47avant ou après
01:06:48le 24 juillet 2000
01:06:49oui
01:06:49et pour l'avocate
01:06:50Dominique Cotteret
01:06:51Franck Berton
01:06:51c'est impossible
01:06:52de le dire
01:06:53pour lui
01:06:53les experts
01:06:54ne peuvent pas
01:06:55être aussi précis
01:06:56à 2 ou 3 mois après
01:06:57donc
01:06:58Franck Berton
01:06:59adresse à la juge
01:06:59d'instruction
01:07:00une demande
01:07:01de constatation
01:07:02de la prescription
01:07:03de l'action publique
01:07:04demande rejetée
01:07:06Franck Berton
01:07:07fait appel
01:07:08demande rejetée
01:07:09une seconde fois
01:07:10l'avocat
01:07:11se pourvoie
01:07:12en cassation
01:07:12entre temps
01:07:13Dominique Cotteret
01:07:14sort de prison
01:07:15et en août
01:07:162014
01:07:17la cour statut
01:07:19Dominique Cotteret
01:07:20est renvoyée
01:07:21devant une cour d'assises
01:07:22mais je ne comprends pas
01:07:23Dominique
01:07:23les faits sont prescrits
01:07:24et elle est quand même
01:07:25renvoyée devant une cour d'assises
01:07:26c'est la première fois
01:07:27dans une affaire criminelle
01:07:29que la cour considère
01:07:31que le délai de prescription
01:07:33de 10 ans
01:07:34peut être suspendu
01:07:36dès lors qu'un obstacle
01:07:38insurmontable
01:07:39rend les poursuites impossibles
01:07:40et en l'occurrence
01:07:41cet obstacle insurmontable
01:07:42c'est quoi ?
01:07:43c'est l'obésité
01:07:44de Dominique Cotteret
01:07:45qui lui a permis
01:07:46de cacher ses grossesses
01:07:48à son entourage
01:07:49c'est-à-dire que
01:07:50comme personne
01:07:50ne s'est aperçu
01:07:51du fait qu'elle était enceinte
01:07:53personne n'a pu engager
01:07:55des poursuites
01:07:56après que ses bébés
01:07:56ont disparu
01:07:57c'est ça
01:07:58l'obstacle insurmontable
01:08:00Dominique Cotteret
01:08:00est donc renvoyée
01:08:01devant la cour d'assises
01:08:02pour octuple assassinat
01:08:04une semaine avant le procès
01:08:09le procureur annonce
01:08:10qu'il va donner un nom
01:08:12à chacun des bébés
01:08:12jusqu'ici
01:08:13les 8 bébés
01:08:15sont des scellés
01:08:16donc ils ont des numéros
01:08:17je voulais
01:08:19qu'on comprenne bien tous
01:08:22qu'on parlait
01:08:23d'êtres humains
01:08:24qui avaient été tués
01:08:25et même assassinés
01:08:26et non pas de bébés chats
01:08:28c'est une démarche
01:08:31qui pose question
01:08:31dans ce dossier
01:08:32où on sent que
01:08:33pour cette femme
01:08:35justement
01:08:36tout l'enjeu est là
01:08:37est-ce que vraiment
01:08:38ça a été des enfants
01:08:38pour elle à un moment
01:08:39c'est l'une des questions
01:08:43centrales du procès
01:08:44qui s'ouvre
01:08:45à Douai
01:08:45le 25 juin 2015
01:08:47le public
01:08:50découvre la femme
01:08:51qui a tué
01:08:52ses 8 bébés
01:08:53quand elle apparaît
01:08:56il y a une réaction
01:08:57d'étonnement
01:08:59elle porte un très long
01:09:03gilet gris
01:09:03il fait canicule dehors
01:09:05et on sent
01:09:05qu'elle se protège
01:09:06dans ce gilet
01:09:07les premiers jours
01:09:09d'audience
01:09:10il est question
01:09:11de sa vie de mère
01:09:12de grand-mère
01:09:14mais aussi de femme
01:09:15elle partage son temps
01:09:18entre le travail
01:09:19le soin qu'elle prodigue
01:09:20aux autres
01:09:21en étant une soignante
01:09:21le soin qu'elle prodigue
01:09:22chez elle
01:09:22en étant un petit soin
01:09:23pour les siens
01:09:24en portant le café
01:09:25à son mari
01:09:25dès le réveil
01:09:27en préparant la gamelle
01:09:28pour le midi
01:09:28il n'y a pas d'espace
01:09:29pour elle
01:09:30il n'y a pas de place
01:09:30pour elle
01:09:31elle a une vie
01:09:34une vie de couple
01:09:35pas forcément épanouissante
01:09:36pour une femme
01:09:37le mari
01:09:38est entendu longuement
01:09:39on voit un homme
01:09:40qui se débat lui-même
01:09:41avec ses propres silences
01:09:42qui se dit amoureux
01:09:43qui écrit des lettres
01:09:43quand sa femme
01:09:44est en prison
01:09:45qui lui dit
01:09:45j'espère que tu vas
01:09:46rentrer bientôt
01:09:46pour en faire mon manger
01:09:47la défense
01:09:49explique le geste
01:09:50de sa cliente
01:09:51par ce sentiment
01:09:52de solitude
01:09:53avant d'aborder
01:09:54la question
01:09:55de l'inceste
01:09:56le 29 juin 2015
01:09:59au 4ème jour
01:10:00d'audience
01:10:01elle est au coeur
01:10:02des débats
01:10:03je descends de l'estrade
01:10:06et je me positionne
01:10:08face à elle
01:10:08M. Cotteret
01:10:09je la connais bien
01:10:10la meilleure façon
01:10:11de lui parler
01:10:11c'est d'être proche d'elle
01:10:13et donc je lui dis
01:10:15écoutez
01:10:15on a besoin de savoir
01:10:16est-ce que vous avez été
01:10:17victime d'inceste
01:10:18ou pas
01:10:19et donc j'essaye
01:10:20de la remuer
01:10:21un petit peu
01:10:21et je lui dis
01:10:23si vous nous mentez
01:10:24sur ce sujet
01:10:25tout le monde croit
01:10:26que votre père
01:10:26est un salopard
01:10:27alors que c'est un brave homme
01:10:28et elle dit
01:10:28non non
01:10:29j'ai été victime
01:10:29d'inceste
01:10:30je remonte
01:10:33moi donc
01:10:34à mon bureau
01:10:35et là
01:10:36M. Berton
01:10:37repart sur le même sujet
01:10:38il l'aménage pas
01:10:40je disais
01:10:40vous avez compris
01:10:41que le procureur
01:10:43vous traite de menteuse
01:10:44maintenant ça suffit
01:10:45il faut qu'on sache
01:10:45écoutez
01:10:47le plus simple
01:10:47vous n'avez qu'à jurer
01:10:49sur la tête de vos filles
01:10:50que votre père
01:10:50vous a violé
01:10:51et là
01:10:51M. Cotteret
01:10:52a un petit mouvement
01:10:53de recul
01:10:54et dit
01:10:54avec une toute petite voix
01:10:56non
01:10:56et là
01:10:59tout le monde
01:10:59dans la salle
01:11:00comprend
01:11:00qu'il vient
01:11:01de se passer
01:11:01un coup de théâtre
01:11:02qu'elle vient
01:11:02de changer
01:11:03d'angle de position
01:11:04les experts psychiatres
01:11:08attendus au lendemain
01:11:09de cette révélation
01:11:09viennent au secours
01:11:10de la défense
01:11:11j'ai présenté
01:11:15mon analyse
01:11:15en disant
01:11:16in fine
01:11:17l'inceste
01:11:19on s'en fout
01:11:20on n'a pas besoin
01:11:21de ça
01:11:22pour expliquer
01:11:23la mécanique
01:11:24répétitive
01:11:25des néonaticiens
01:11:26chez Dominique Cotteret
01:11:28si l'inceste
01:11:29avait été là
01:11:30ça aurait été
01:11:30un élément
01:11:31complémentaire
01:11:32d'explication
01:11:33mais pas un élément
01:11:34central
01:11:35de la mécanique
01:11:36de ce qui s'est joué
01:11:37moi j'insiste
01:11:41à propos
01:11:41du fait
01:11:43qu'elle connaît
01:11:44ce qu'on appelle
01:11:45aujourd'hui
01:11:45un syndrome
01:11:46de stress post-traumatique
01:11:47elle a un syndrome
01:11:48de stress post-traumatique
01:11:50de toute sa vie
01:11:52c'est une suite
01:11:53de petites violences
01:11:54qui paraissent comme ça
01:11:54anodines
01:11:55mais mises bout à bout
01:11:56on a une espèce
01:11:57de destin
01:11:58de vie de femme
01:11:59qui se dessine comme ça
01:11:59et qui permet
01:12:00de comprendre
01:12:01encore une fois
01:12:01sans justifier
01:12:02mais de comprendre
01:12:03comment elle en est arrivée là
01:12:04Les psychiatres
01:12:08demandent que
01:12:08l'altération
01:12:09du discernement
01:12:10soit retenue
01:12:11et le 1er juillet
01:12:13l'avocat général
01:12:14se lance dans ses réquisitions
01:12:15J'avais vécu
01:12:17entre guillemets
01:12:18avec Madame Cotteret
01:12:19pendant 4 ans
01:12:19au point qu'à la fin
01:12:20je ressentais
01:12:21une sorte d'empathie
01:12:22mais je me disais
01:12:23tu risques de requérir
01:12:24un peu bas
01:12:25Elle avait quand même
01:12:28tué
01:12:288 bébés
01:12:30et quand on tue
01:12:318 êtres humains
01:12:32ça peut pas
01:12:34être une peine de principe
01:12:35ça peut pas être
01:12:35une peine symbolique
01:12:37et c'est pour ça
01:12:38que j'ai requis
01:12:3918 ans
01:12:40de réclusion criminelle
01:12:41beaucoup ont été surpris
01:12:43de la sévérité
01:12:44de mes réquisitions
01:12:44moi-même
01:12:46j'étais qu'à moitié
01:12:47satisfait
01:12:48Moi je pensais
01:12:52véritablement
01:12:52que l'affaire Courgeot
01:12:54je pensais
01:12:54que les articles
01:12:55qui avaient eu lieu
01:12:56dans la presse
01:12:57je pensais
01:12:57que les avis
01:12:58des experts médicaux
01:12:59avaient fait avancer
01:13:00les choses
01:13:01mais pas du tout
01:13:01j'ai l'impression
01:13:02qu'on juge
01:13:03un néonaticide
01:13:04comme en 1950
01:13:06Finalement
01:13:09les jurés
01:13:09entendent la défense
01:13:10Après 5 heures
01:13:12de délibérés
01:13:13Dominique Cotteret
01:13:14est condamnée
01:13:15pour un meurtre
01:13:16et 7 assassinats
01:13:18à 9 ans
01:13:19de réclusion criminelle
01:13:20Elle a dit
01:13:22sa satisfaction
01:13:23elle a dit
01:13:24sa joie
01:13:25d'avoir été entendue
01:13:26pour une fois
01:13:27d'avoir été comprise
01:13:29pour une fois
01:13:30qu'on puisse
01:13:31enfin l'accompagner
01:13:33et au-delà
01:13:34de la peine
01:13:34d'élimination
01:13:35qui avait été requise
01:13:36de 18 années
01:13:37de réclusion criminelle
01:13:38les 9 ans
01:13:39pour elle
01:13:39sont un soulagement
01:13:40Daniel Zaguri
01:13:46elle a tué
01:13:468 bébés
01:13:47est-ce que
01:13:47il y a un élément
01:13:49qui aurait pu
01:13:49la faire sortir
01:13:50de cette spirale ?
01:13:51Il y a quelque chose
01:13:52d'extrêmement frappant
01:13:53dans ces histoires
01:13:55de néonaticide
01:13:57qui est
01:13:58le partage
01:13:59du déni
01:14:00par l'entourage
01:14:01Ce qui peut
01:14:03interrompre
01:14:05ce processus terrible
01:14:07c'est une grand-mère
01:14:09un médecin
01:14:10une maman
01:14:12un mari
01:14:13qui tout d'un coup
01:14:14se dit
01:14:16mais
01:14:16c'est pas possible
01:14:17et ce qu'on voit
01:14:19à ce moment-là
01:14:20c'est la reprise
01:14:22d'un processus
01:14:23normal
01:14:24et on est
01:14:25on est frappé
01:14:26par exemple
01:14:27de voir
01:14:28qu'une femme
01:14:29qui a le ventre plat
01:14:30à partir du moment
01:14:31où elle
01:14:33se sait enceinte
01:14:34tout d'un coup
01:14:35va avoir
01:14:38en quelque sorte
01:14:39les signes physiques
01:14:40de la grossesse
01:14:41qu'elle n'a pas eu
01:14:42tous les mois précédents
01:14:44Il y a une espèce
01:14:45de switch
01:14:45parce que
01:14:47tout d'un coup
01:14:48elle est enceinte
01:14:49psychiquement
01:14:50Dominique Cotteret
01:14:58a purgé sa peine
01:14:59elle est sortie de prison
01:15:01le 3 juillet 2018
01:15:02et elle est restée mariée
01:15:04à Pierre-Marie Cotteret
01:15:05Sous-titres par Jérémy Diaz
01:15:07Sous-titres par Jérémy Diaz
01:15:10Sous-titres par Jérémy Diaz
01:15:12Sous-titres par Jérémy Diaz
01:15:12Sous-titres par Jérémy Diaz
01:15:15Sous-titres par Jérémy Diaz
01:15:17Sous-titres par Jérémy Diaz
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01:15:22Sous-titres par Jérémy Diaz
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01:15:27Sous-titres par Jérémy Diaz
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01:15:35Sous-titres par Jérémy Diaz

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