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Racisme structurel, violences policières, stigmatisation des musulmans et politique d’assimilation : ce reportage dévoile la face sombre d’un pays souvent idéalisé. À travers les témoignages de Dylan, Myiam, ou encore les familles de détenus morts en prison, l’enquête remonte aux origines coloniales des discriminations toujours présentes.

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Transcription
00:00Une marche silencieuse est organisée dans les rues de Sydney.
00:10Ces familles aborigènes protestent contre la mort de l'un de leurs proches en prison.
00:15Dans l'indifférence générale, mais sous la surveillance de nombreux policiers,
00:20ce petit groupe de natifs australiens veut dénoncer l'impunité des bourreaux de leurs enfants.
00:24« Ça se passe partout dans le pays, dans tous les états. Le nombre de morts est scandaleux. C'est intolérable. »
00:35En moins de 30 ans, près de 450 aborigènes sont morts en détention.
00:41Les premiers australiens ont environ 15 fois plus de risque d'y perdre la vie que les blancs.
00:46Ces familles aborigènes sont toutes dans l'attente d'une enquête ou d'un procès.
00:51Leitona Dungay se bat depuis 5 ans pour obtenir justice.
00:54Son fils David purgeait une peine pour vol et agression.
00:58Il est mort étouffé par ses geôliers.
01:0229 décembre 2015.
01:04Les gardiens veulent transférer David dans une autre cellule.
01:07Mais le détenu refuse.
01:09Alors, il décide d'employer la force.
01:16Cette vidéo a été filmée par la caméra embarquée d'un surveillant.
01:20Les lettres à l'écran sont utilisées pour identifier chaque gardien.
01:23David est emmené dans la cellule voisine et plaqué sur le lit.
01:33Une infirmière lui administre alors un sédatif.
01:35Peu à peu, sa respiration se fait de plus en plus difficile.
01:55Quelques secondes plus tard, David est inconscient.
02:03Il ne se réveillera jamais.
02:04C'est après des mois de procédure que les avocats de la famille ont réussi à récupérer et à diffuser cette vidéo.
02:17Mais pour l'instant, aucun procès n'a eu lieu.
02:19Ils ne peuvent plus se cacher, c'est la preuve.
02:24Voilà ce qu'ils font aux aborigènes.
02:27Mon fils ne se défendait pas.
02:29Ils se sont jetés sur lui.
02:30À six, ils l'ont pulvérisé.
02:33Son visage était tout écrasé quand ils me l'ont ramené dans un cercueil.
02:37Ils n'ont pas respecté les procédures.
02:40Ils devraient être poursuivis.
02:41Les espoirs de la famille Dengue sont minces.
02:46Aucun décès d'un aborigène en prison n'a jusqu'ici donné lieu à des condamnations.
02:51Pour Paley Gibson, universitaire et défenseur des droits aborigènes,
02:55cela s'explique par le racisme des autorités australiennes.
02:58Pour en arriver à de telles injustices, il faut déshumaniser ces gens.
03:05Faire croire à tout le monde qu'ils sont des êtres inférieurs.
03:09Et cela se produit tous les jours.
03:11Dans toutes les facettes de notre société.
03:14200 ans après la colonisation par les Anglais,
03:17de nombreux aborigènes vivent comme exclus de la société.
03:20Comme si les premiers Australiens étaient des étrangers sur leurs propres terres.
03:24C'est la face cachée de ce pays du bout du monde qui fait tant rêver.
03:30L'Australie, une île-continent.
03:32Un pays de 26 millions d'habitants, grand comme 14 fois la France.
03:36Une terre d'opportunité affichant une forte croissance économique.
03:40Un eldorado pour nombre d'étrangers.
03:42Chaque année, sur invitation du pays, 200 000 d'entre eux sont sélectionnés.
03:46Et viennent d'ailleurs y tenter leur chance.
03:49Mais derrière ces images de carte postale, un drame se joue depuis des siècles.
03:53Celui des premiers Australiens.
03:54Installés sur ces terres depuis des millénaires,
03:58les aborigènes sont la plus ancienne civilisation humaine vivant sur notre planète.
04:02Mais depuis l'arrivée des colons anglais au 19e siècle,
04:05ils vivent au banc de la société.
04:09D'abord massacrés par milliers,
04:11les aborigènes sont assimilés de force aux mœurs de la société blanche.
04:16Placés dans des couvents ou des familles d'accueil,
04:17les enfants indigènes doivent apprendre à vivre comme de bons petits blancs.
04:22En organisant le métissage de la population,
04:25le pouvoir a même tenté pendant des décennies de blanchir les natifs australiens.
04:31Aujourd'hui, de nombreux aborigènes ont la peau pâle.
04:35Mais qu'ils soient blancs ou noirs de peau,
04:37ils vivent toujours comme des citoyens de seconde zone.
04:40On n'a pas de famille, on n'a pas de maison, on dort dans l'herbe.
04:47Les gens viennent dans ce pays en pensant que c'est un eldorado,
04:49mais ils ne savent pas que pour nous les natifs, c'est le tiers monde.
04:53Alors que ce sont nos terres.
04:58Depuis une dizaine d'années et l'accession au pouvoir de la droite conservatrice,
05:01d'autres minorités se sentent stigmatisées.
05:04L'Australie, l'un des pays qui accueillait le plus d'étrangers au monde,
05:07a durci sa politique migratoire.
05:10Les communautés africaines, asiatiques ou de confession musulmane
05:12s'inquiètent aujourd'hui de la montée en puissance
05:15d'un sentiment anti-immigré au sein d'une partie de la population.
05:19On me dit souvent de retourner dans mon pays.
05:23Et moi, ça me fait rire.
05:25Parce que c'est mon pays ici.
05:27Je suis né ici.
05:28Depuis quelques années, l'extrême droite gagne du terrain.
05:32De nouveaux partis xénophobes affichent ouvertement leur haine des étrangers.
05:35La Chine ressemble à la Chine parce qu'elle est pleine de chinois.
05:41A quoi ressemblera l'Australie quand il n'y aura plus de blanc ?
05:44Ce ne sera plus l'Australie.
05:48Autre victime de ces tensions,
05:50la communauté musulmane qui se sent de plus en plus pointée du doigt par la droite radicale.
05:56Il faudrait interdire l'immigration musulmane.
06:01Et moi, je pense qu'il faudrait tous les ficher.
06:05Et depuis peu, un acte sanglant a renforcé leur peur.
06:09À Christchurch, en Nouvelle-Zélande, le pays voisin,
06:11un suprémaciste australien a ouvert le feu dans une mosquée.
06:15Bilan, 51 morts et 49 blessés.
06:17Nouveaux arrivants ou natifs,
06:23en Australie, certaines minorités se sentent victimes de racisme.
06:28Enquête sur le plus grand tabou du pays.
06:36Prison pour mineurs de Raibi,
06:38à 50 kilomètres au sud de Sydney.
06:41Face à la délinquance juvénile,
06:43l'Australie est l'un des pays les plus répressifs au monde.
06:47Ici, les plus jeunes détenus ont tout juste 10 ans.
06:54Derrière ces portes blindées,
06:56se cache un autre tabou.
06:59Noirs de peau ou métisse,
07:00plus de la moitié des détenus sont aborigènes.
07:03En moyenne, les premiers Australiens
07:05ont 25 fois plus de risque que les Blancs
07:07de finir derrière les barreaux.
07:09Les pires statistiques au monde,
07:11pour une minorité.
07:13Après des mois de négociations,
07:15nous avons obtenu l'autorisation exceptionnelle
07:16de filmer cette unité pour filles.
07:19Mais nous n'avons pas le droit
07:20de montrer leur visage,
07:21ni de révéler leur identité.
07:24Ces adolescentes vivent surveillées 24 heures sur 24.
07:28La plupart d'entre elles
07:28purgent des peines de prison pour vol
07:30ou agression.
07:31Moi, je suis là pour vol à ma armée.
07:36Je suis sortie pendant quelques temps.
07:38Enfin, j'étais dehors,
07:39mais en liberté surveillée.
07:41C'est un peu comme s'ils te donnaient
07:42une seconde chance.
07:43Mais bon, il faut pointer au tribunal.
07:46Voilà, c'est ça.
07:47Mais je n'ai pas respecté les conditions.
07:52Alors je me suis retrouvée ici.
07:53Encore.
07:56À Raibi, comme ailleurs dans le pays,
07:59c'est souvent le désœuvrement
08:00et la pauvreté qui conduisent
08:01tant de jeunes aborigènes en prison.
08:04Scott Harrison,
08:05le manager de l'établissement,
08:07est fier de nous montrer
08:08qu'il s'attaque au problème.
08:10Ici, les détenus reçoivent
08:12des formations pour préparer leur avenir.
08:13Bonjour.
08:18Vous en avez bientôt fini pour aujourd'hui ?
08:21Alors qu'est-ce que vous faites ?
08:23Plein de biscuits différents
08:24et des cookies.
08:25Qu'est-ce que tu as fait
08:27comme cookies aujourd'hui ?
08:28Des biscuits.
08:30Voilà, on nous a dit
08:31que ça s'appelait des biscuits
08:32et pas des cookies.
08:36Ce matin, elle faisait des gâteaux
08:37et des cookies.
08:39Et là, c'est l'atelier pizza.
08:42La plupart du temps,
08:43on leur enseigne la cuisine
08:45de tous les jours
08:45pour qu'elles apprennent
08:46à se débrouiller.
08:48Mais aujourd'hui,
08:49c'est vraiment une formation
08:50pour trouver un emploi.
08:53Leur punition,
08:54c'est le fait d'être ici.
08:56Nous, on essaye
08:56de les préparer à sortir
08:57et surtout,
08:59à ne pas revenir.
09:02Malgré les efforts de Scott,
09:0360% des jeunes détenus
09:05aborigènes récidivent
09:06et repassent par la case prison.
09:09C'est le cas de Marie.
09:10À seulement 15 ans,
09:12c'est déjà son quatrième séjour
09:13en Rehbi.
09:16Je vis dans une petite ville
09:17et j'essaye de m'en sortir,
09:21mais il n'y a pas grand-chose
09:22à faire dehors.
09:24Et il y a beaucoup
09:25de mauvaises personnes.
09:28On est abandonnés.
09:31Alors, on traîne
09:31avec des gens
09:32pas très recommandables.
09:33Et on termine ici.
09:37Sous ces airs
09:38d'établissement modèle,
09:39Rehbi n'en reste pas
09:40moins une prison.
09:44En dehors
09:45des activités obligatoires,
09:46les détenus passent
09:47le plus clair de leur temps,
09:48isolés,
09:49en cellule.
09:50Kelly a été condamnée
09:52pour couser blessure.
09:54Elle a accepté
09:55de nous montrer
09:56sa chambre.
10:00Ça, c'est mon lit.
10:02C'est là que je dors.
10:03Ça, c'est ma radio.
10:07Et ce bouton-là,
10:08c'est pour appeler
10:09les gardiens.
10:12Ma salle de bain
10:14avec ma douche.
10:16Là, on met le savon.
10:18J'étais ici
10:19pour mon anniversaire.
10:21J'ai eu 17 ans.
10:21Et ça, ça vient de dehors.
10:24J'ai reçu ces cartes
10:24de mes copines.
10:27Et ça, là-haut,
10:28c'est un endroit
10:29où j'ai affiché mes rêves.
10:31J'ai découpé ça
10:31dans des journaux.
10:33Mais quels sont tes rêves ?
10:35Bien sûr,
10:37j'aimerais bien me marier,
10:39avoir une maison,
10:40voyager,
10:41ce genre de choses.
10:43Je ne sais pas trop
10:44si ça va arriver,
10:45mais je l'espère.
10:47J'espère aussi
10:47que c'est ma dernière fois.
10:49Je vais bientôt avoir 18 ans,
10:50alors je vais devoir
10:51mieux me conduire.
10:54Parce que je pourrais finir
10:55dans un endroit
10:56bien pire qu'ici.
11:03Avec son programme
11:04de réinsertion,
11:06Reby fait figure
11:06d'exemple en Australie.
11:08Mais c'est aussi
11:08une exception.
11:10Dans nombre
11:11de prisons du pays,
11:12les aborigènes
11:13représentent près de 100%
11:14des détenus.
11:15Et la vie
11:15peut rapidement
11:16y devenir un enfer.
11:23Nous avons obtenu
11:24ces vidéos
11:25qui ont choqué
11:25tout le pays.
11:29Tournées dans
11:30plusieurs centres
11:30de détention
11:31pour mineurs,
11:32elles révèlent
11:32les violences
11:33subies par les jeunes
11:34prisonniers.
11:36Sur ces images,
11:37cet enfant aborigène
11:38métis n'a que 13 ans.
11:40Après une altercation
11:41avec ses geôliers,
11:42il est dénudé de force.
11:45La procédure vise
11:46soi-disant à l'empêcher
11:47de se faire du mal
11:47avec ses vêtements.
11:52Traumatisé,
11:53le jeune garçon
11:53fond en larmes.
12:01Cet enfant,
12:07nous l'avons retrouvé.
12:09Malgré sa peau blanche,
12:10Dylan est aborigène
12:11par ses ancêtres.
12:13Âgé de 21 ans,
12:14il est désormais libre.
12:15Après plus de 8
12:16longues années
12:16passées derrière
12:17les barreaux
12:17pour des vols
12:18avec violence.
12:23Lorsque j'avais 12 ans,
12:24le juge a voulu
12:25faire de moi
12:25un exemple.
12:27Et il m'a condamné
12:28à 22 mois de prison.
12:29Maintenant,
12:30quand je repense
12:31à tout ça,
12:31je me dis
12:32qu'il n'y a rien
12:32de normal.
12:34Ça a détruit
12:34ma vie pour toujours.
12:36Je ne retrouverai
12:37jamais mon enfance.
12:39Dylan grandit
12:40dans un contexte difficile.
12:42Pauvreté,
12:43drogue,
12:44mauvaise fréquentation.
12:45Il bascule très jeune
12:46dans la délinquance.
12:48Mais il est alors
12:48loin de s'imaginer
12:49ce qui l'attend en prison.
12:55Ça, c'était
12:56en octobre 2010.
12:58J'avais à peu près
12:5812 ans.
13:02Ce qu'il y a
13:02de plus triste
13:03dans cette vidéo,
13:04c'est que le gardien
13:05était lui aussi
13:06aborigène.
13:08On s'est engueulés,
13:09il m'a attrapé
13:10par le short
13:10et il m'a balancé
13:13sur le matelas.
13:20C'est la première fois
13:23que je me suis
13:23vraiment senti mal.
13:27J'avais peur.
13:34Là, j'avais 16 ans.
13:35tu restes tranquille, hein ?
13:38On va revenir te voir.
13:40On ne veut pas te garder là.
13:42J'avais menacé
13:43de me suicider.
13:45Alors, ils m'ont attaché
13:46sur cette chaise
13:46pendant près de 3 heures.
13:49C'était très humiliant.
13:51Et pourquoi il tombait
13:53une cagoule ?
13:54Parce que j'avais
13:55craché sur les gardiens.
13:57Les gardiens,
13:58ils étaient plus forts
13:58que moi.
14:00Je ne pouvais pas
14:00me défendre.
14:02Je ne pouvais pas
14:02les repousser.
14:04Alors pour moi,
14:05c'était le seul moyen
14:05de leur rendre l'appareil,
14:07de les énerver,
14:08de leur faire ressentir
14:09ce que je ressentais.
14:12Je me sentais
14:13comme un animal.
14:14Révélée il y a 3 ans
14:17par une commission
14:18d'enquête indépendante,
14:19ces vidéos ont fait
14:20de Dylan un symbole.
14:22Celui d'une jeunesse
14:23aborigène,
14:24sacrifiée.
14:29Pour moi,
14:30c'est une question de race.
14:31C'est certain.
14:32L'essentiel de cette violence
14:34est dirigé
14:34contre les aborigènes.
14:37Rien n'est fait
14:37pour réinsérer les jeunes
14:38et faire de nous
14:39de meilleures personnes.
14:41Il s'agit seulement
14:42de nous briser.
14:44Certains des officiers
14:46présents dans ces vidéos
14:47ont été poursuivis
14:48en justice.
14:49A ce jour,
14:50aucun n'a été condamné.
14:55Aujourd'hui,
14:56en Australie,
14:56d'autres minorités
14:57sont aussi victimes
14:58de discrimination.
15:00Attisées par des partis
15:01nationalistes et xénophobes,
15:02la haine des musulmans
15:03gagne du terrain.
15:05Fraser Hanning
15:06est l'homme politique
15:07le plus controversé d'Australie.
15:09Après l'attentat
15:09de Christchurch,
15:10ses déclarations ont soulevé
15:11une vague d'indignation.
15:13Et cette vidéo
15:13a fait le tour du monde.
15:16Je crois que ce genre
15:17de choses arrive
15:18quand les gens
15:19se sentent attaqués
15:20dans leur propre...
15:21Grand habitué
15:25des provocations,
15:26Fraser Hanning
15:27s'est fait connaître
15:27des Australiens
15:28lors de son discours
15:29d'investiture au Sénat.
15:34Il y faisait alors
15:35une référence ambigüe
15:36à l'Holocauste.
15:36Il faut une solution finale
15:39au problème de l'immigration
15:40et c'est le vote populaire.
15:44Nous retrouvons le sénateur
15:45en pleine campagne
15:46pour sa réélection.
15:48Fraser Hanning
15:49a toujours nié
15:50faire référence
15:50au régime nazi
15:51dans ses discours.
15:53La solution finale,
15:55ça a été sorti
15:55de son contexte.
15:57Dans les 9 ans
15:58qui ont précédé
15:59mon discours,
16:0022 hommes politiques
16:01ont utilisé
16:02ces deux mêmes mots
16:03dans des allocutions
16:03au Parlement
16:04et personne ne s'est indigné.
16:07On me met des étiquettes
16:08de néo-nazi,
16:08de suprémaciste blanc,
16:10de raciste,
16:11mais tout ça,
16:11c'est des mensonges.
16:13Par exemple,
16:13moi, je défends
16:14la communauté juive
16:15et les Israéliens.
16:18En ce jour de vote,
16:20le sénateur controversé
16:21est venu soutenir
16:22son candidat
16:22dans ce district
16:23à quelques kilomètres
16:24de Brisbane.
16:29Hey, comment ça va ?
16:31Ça va et toi ?
16:32Sympa ta casquette,
16:34dis donc.
16:34J'aime bien la bleue aussi.
16:37Alors, comment ça se passe ?
16:38On essaie,
16:39je fais de mon mieux.
16:40On a de bons retours,
16:41tu sais.
16:42Oui, on a beaucoup
16:43de soutien.
16:45Déçu par les autres
16:45partis d'extrême droite,
16:47Fraser Hanning vient
16:48de lancer son propre
16:49mouvement nationaliste.
16:51Aujourd'hui,
16:51il espère remporter
16:52quelques sièges
16:53à l'Assemblée
16:53et au Sénat.
16:57Votez Fraser Hanning !
16:59Avec un programme clair,
17:01réduire drastiquement
17:02l'immigration
17:03et interdire définitivement
17:04l'entrée des musulmans
17:05dans le pays.
17:07Il n'y a pas un seul
17:09pays au monde
17:09qui a accueilli
17:10des musulmans
17:11et qui n'est pas défaillant
17:12aujourd'hui.
17:13Ou alors,
17:13ils sont eux-mêmes
17:14devenus un État musulman.
17:16Je ne pense pas
17:16que les Australiens
17:17veulent devenir
17:18une minorité
17:19dans leur propre pays.
17:20Moi, j'ose le dire
17:21et on me traite
17:22de raciste.
17:23S'ils veulent me traiter
17:23de raciste pour ça,
17:25aucun problème,
17:26ça me va très bien.
17:27Mais quelle est
17:28votre solution alors ?
17:29D'abord,
17:30interdire
17:30l'immigration musulmane.
17:32Ensuite,
17:32il faut les ficher
17:33parce qu'ils nous tuent
17:34en pleine rue.
17:36C'est comme avec
17:36n'importe quel autre
17:37criminel dangereux.
17:39Il faut savoir
17:39où ils sont.
17:41Sinon,
17:42de bons Australiens
17:43vont mourir
17:43et nous n'avons pas
17:45besoin de ça.
17:47Des propos haineux
17:48et diffamatoires,
17:50pénalement répréhensibles
17:51en France.
17:53Pourtant,
17:54dans toute l'histoire
17:54de l'Australie,
17:55seules 4 personnes
17:56ont trouvé la mort
17:57lors d'attaques terroristes
17:58islamistes.
17:59Mais le programme
18:00du sénateur
18:01séduit.
18:03Tu l'as pas tapé
18:04assez fort,
18:04cette tapette
18:05avec son oeuf ?
18:06Quel plaisir
18:08de vous voir.
18:09Comment tu t'appelles ?
18:10Jeffrey,
18:11la persistance
18:12gagne toujours
18:13face à la résistance.
18:14Alors,
18:14continuez comme ça.
18:16Compte sur moi,
18:16Jeff.
18:19Qu'est-ce qui vous plaît
18:20dans le programme
18:20de M. Hanning ?
18:22Avant tout,
18:23c'est ce qu'il propose
18:24sur l'immigration.
18:26Ensuite,
18:26c'est l'Australie
18:27d'abord.
18:28L'Australie peut aider
18:29le reste du monde,
18:30mais il faudrait commencer
18:31par s'occuper
18:32de nos problèmes.
18:33Et avec M. Hanning,
18:35c'est l'Australie
18:35et les Australiens
18:36d'abord.
18:37C'est pour ça
18:38que je le soutiens.
18:42Quelques jours plus tard,
18:43les résultats
18:44de l'élection
18:44tombent.
18:46Malheureusement
18:46pour Fraser Hanning,
18:48aucun de ses candidats
18:49n'a finalement été élu
18:50et il a lui aussi
18:51perdu son poste
18:52de sénateur.
18:53C'est finalement
18:54son ancien parti
18:55plus modéré
18:55qui a obtenu
18:56le siège
18:57qu'il convoitait.
18:59Depuis quelques années,
19:01les partis xénophobes
19:02se multiplient
19:03et progressent
19:03dans les urnes.
19:06Pour mieux comprendre
19:06le phénomène,
19:07nous avons rendez-vous
19:08avec l'un des plus fins
19:09observateurs
19:10de la politique australienne.
19:13Tim Supomazan
19:14est professeur
19:15à l'Université de Sydney.
19:16Il a aussi été
19:17haut commissaire
19:18aux discriminations raciales.
19:20Selon lui,
19:20le racisme d'aujourd'hui
19:21trouve ses sources
19:22dans l'histoire même
19:23du pays.
19:24Le problème du racisme
19:28en Australie
19:28a des racines historiques.
19:33Cela remonte
19:33à l'histoire
19:33de la colonisation
19:34par les Anglais.
19:38Il faut bien comprendre
19:39que lorsque l'Australie
19:40est devenue une nation
19:41en 1901,
19:43elle s'est définie
19:43comme une nation blanche.
19:48Ce n'est qu'à partir
19:49des années 70
19:50que l'Australie
19:51est devenue
19:51multiculturelle
19:52et multiraciale.
19:55Et d'ailleurs,
19:56c'est un véritable exemple
19:57en termes
19:58d'immigration réussie.
20:00Mais malheureusement,
20:01aujourd'hui,
20:02nous voyons ce rapport
20:03à la race ressurgir.
20:05Et de plus en plus
20:06d'acteurs politiques
20:07assument publiquement
20:08leurs idées racistes.
20:10C'est une tendance
20:11que nous n'avions pas observée
20:12depuis très longtemps.
20:13Ironie de l'histoire,
20:19ces idées xénophobes
20:20sont parfois défendues
20:21par des Australiens
20:21eux-mêmes issus
20:22de l'immigration.
20:26Melbourne,
20:26au sud du pays.
20:30Dans cette petite église
20:31de banlieue,
20:32la messe est dite
20:33par un pasteur
20:33d'origine sri-lankaise.
20:38Ici, on prie Dieu,
20:39entre autres pour qu'il
20:40protège les frontières
20:41du pays.
20:43Au lendemain des élections
21:02nationales,
21:03le pasteur Daniel Nilaya
21:05et ses fidèles
21:05sont sur un petit nuage.
21:08Le parti conservateur
21:09australien a remporté
21:10une large victoire
21:11et le nouveau chef
21:12du gouvernement
21:12est un fervent chrétien,
21:14partisan d'un contrôle
21:15strict de l'immigration.
21:19Bonjour à tous !
21:22Quelle journée magnifique !
21:24Allez, on applaudit bien fort !
21:26Alléluia !
21:27Jésus est parmi nous !
21:29Nous avons un premier ministre
21:31évangéliste !
21:32Homme d'église,
21:39le pasteur est avant tout
21:40un homme politique.
21:42Il dirige un parti
21:43qui défend une Australie
21:45chrétienne
21:45face au danger
21:46de ce qu'il dénonce
21:47comme une invasion musulmane.
21:51Aujourd'hui,
21:52partout en Europe,
21:54la chrétienté se meurt
21:55et l'islam progresse.
21:57Pourquoi ?
21:59Parce que les gens
21:59ne vont plus à l'église
22:00et les églises
22:02se transforment en mosquées.
22:03Partout en Europe,
22:04c'est la pagaille.
22:06Vous comprenez le message ?
22:08Il faut monter la garde
22:10car si vous ne surveillez pas
22:12l'ennemi,
22:13il prendra le contrôle
22:13de notre nation.
22:15L'ennemi de l'Occident
22:16est un pi.
22:16et il faut se défendre
22:20contre cette attaque.
22:23Agissons
22:23avant qu'il ne soit trop tard.
22:27Persécuté au Sri Lanka
22:28pour son appartenance
22:29à la minorité chrétienne,
22:31David Nilaya
22:32trouve refuge en Australie
22:33il y a 22 ans.
22:35Il y fonde une famille
22:36et devient rapidement
22:37un fervent nationaliste.
22:39S'il n'est pas contre
22:40la présence
22:41de différentes ethnies,
22:42il juge l'islam incompatible
22:44avec les valeurs
22:44de son pays d'adoption.
22:46Le pasteur
22:47est en pleine guerre
22:48de religion.
22:49Le monde est en conflit
22:51avec l'islam.
22:52Le gouvernement le sait
22:53mais c'est politiquement
22:55incorrect de le dire.
22:57Si on dit ce genre de choses,
22:58on se fait traiter de raciste.
23:00Mais ma couleur de peau
23:01est un avantage
23:02et c'est pour ça
23:03que j'ai créé
23:03un parti politique.
23:05Notre but,
23:06c'est d'attaquer
23:06ou plutôt de s'opposer
23:08au multiculturalisme
23:09et de garder l'Australie
23:11australienne.
23:15Le révérend a fait
23:16de sa couleur de peau
23:16l'étendard
23:17de sa parole décomplexée.
23:21Depuis le début
23:21des années 2000,
23:22il court les plateaux
23:23de télévision
23:24pour prêcher en boucle
23:25son message anti-islam.
23:28Nous avons le choix.
23:29Soit nous suivons
23:30le Coran et la charia
23:31et alors nous deviendrons
23:33des esclaves.
23:34Soit nous suivons
23:35la Bible
23:36et nous serons
23:36une société libre
23:37et démocratique.
23:38Tous les vrais musulmans
23:40sont des radicaux
23:41malheureusement.
23:42S'ils suivent le Coran,
23:43ce sont des radicaux.
23:45Malgré la virulence
23:46de ses propos
23:47et leur caractère diffamant,
23:49Daniel Nilaya
23:50ne manque pas de tribune.
23:52Ce jour-là,
23:53il est l'invité vedette
23:54d'une radio chrétienne.
23:56Vous ferez attention
23:57là en sortant.
23:59Sous le regard
24:00de ferventes admiratrices,
24:02c'est une fois encore
24:02les musulmans
24:03qui sont la cible
24:04de ces attaques.
24:04Bonjour à tous
24:08et bienvenue
24:08dans cet épisode
24:09de Wim Spont.
24:11Avec moi dans le studio
24:12aujourd'hui,
24:13un Australien
24:13très fier de l'être,
24:15le pasteur
24:15Daniel Nilaya.
24:16Bienvenue.
24:17Merci beaucoup.
24:18Je suis très heureux
24:18d'être ici.
24:20Beaucoup de groupes ethniques
24:21viennent s'installer
24:22en Australie
24:23et créent des sortes
24:24d'enclaves
24:24dans lesquelles
24:25ils vivent entre eux.
24:26Mais c'est surtout vrai
24:27avec les musulmans.
24:29Pourtant,
24:30ce n'est pas cela
24:30le multiculturalisme
24:32qu'on nous avait promis,
24:33non ?
24:34Je suis moi-même
24:35né au Sri Lanka
24:35et mon ethnie
24:36ne changera jamais.
24:38Mais je suis avant tout
24:39un Australien.
24:40Si tu n'aimes pas
24:41ce que tu vois ici,
24:42si tu penses
24:42que l'endroit
24:42d'où tu viens
24:43est mieux
24:43que l'endroit
24:44où tu t'installes,
24:45alors pour l'amour
24:45de Dieu,
24:46ferme-la,
24:47tire-toi
24:47et retourne
24:48dans ton pays.
24:49Je te conduirai
24:50moi-même
24:50à l'aéroport.
24:52Le pasteur
24:52ne s'en tient
24:53d'ailleurs pas
24:53qu'au discours.
24:55Avec les élus
24:55de son parti,
24:56il a déjà réussi
24:57à empêcher
24:57la construction
24:58de plusieurs mosquées
24:59en Australie.
24:59Chaque mosquée
25:02est un refuge
25:03potentiel
25:04pour le terrorisme.
25:05C'est triste
25:06à dire,
25:06mais c'est la vérité.
25:07Donc on s'oppose
25:08à leur construction.
25:11Nous n'avons
25:11franchement pas besoin
25:12de nouvelles mosquées
25:13en Australie.
25:16N'en déplaise
25:17au pasteur Nilaya
25:17et à ses propos haineux,
25:19l'Australie compte
25:20aujourd'hui
25:20plusieurs centaines
25:21de mosquées.
25:26C'est à Sydney
25:27qu'une grande partie
25:28des 600 000 musulmans
25:29d'Australie
25:29a élu domicile.
25:32Plus précisément
25:33dans le quartier
25:34de l'Akemba,
25:35en banlieue de la ville.
25:38C'est là que se trouve
25:40la plus grande mosquée
25:40du pays.
25:42En ce mois de Ramadan,
25:43elle peut accueillir
25:44jusqu'à 10 000 fidèles
25:45par soir.
25:46Mais depuis peu,
25:47il prie dans la peur.
25:52Le 15 mars 2018,
25:54à Christchurch
25:55en Nouvelle-Zélande,
25:56le pays voisin.
25:58En pleine prière
25:58du vendredi,
25:59un suprémaciste australien
26:01entre dans une mosquée
26:02armée d'un fusil d'assaut
26:03et tire sur les fidèles.
26:09Des scènes d'horreur
26:10dans un pays
26:11habituellement calme.
26:13Bilan de l'attaque,
26:1451 morts
26:15et 49 blessés.
26:17A la mosquée de l'Akemba,
26:23c'est la fin de la prière
26:24du vendredi.
26:28Ahmad veille à la sécurité
26:30de chacun.
26:31Cet Australien d'origine
26:32libanaise dirige l'association
26:34qui gère le lieu de culte.
26:35Eh, salut,
26:37comment ça va ?
26:38Bien ?
26:39Vous avez prié ce soir ?
26:41C'est qui ton père ?
26:43Il est là ?
26:44Ok.
26:46Tu viens ici tous les soirs ?
26:47Ah, c'est bien.
26:49Ahmad appelle une partie
26:51de la classe politique australienne
26:52à arrêter la stigmatisation
26:54des musulmans.
26:54Nous espérons que les gens
26:58vont ouvrir les yeux
26:59et que ces discours de haine
27:01vont s'arrêter.
27:03Parce qu'on sait maintenant
27:04que cela peut conduire
27:05à des actes de violence.
27:08Ces gens utilisent
27:09cette rhétorique
27:10à des fins politiques.
27:11Mais malheureusement,
27:13tout ça va beaucoup trop loin.
27:18Face à la haine,
27:19certains musulmans
27:20ont décidé d'agir.
27:24À quelques kilomètres
27:27du centre-ville de Sydney,
27:28une association tente
27:29de s'attaquer aux clichés
27:30qui collent à la peau
27:31de la communauté.
27:36Lancée par Chouve,
27:37un Australien d'origine libanaise,
27:39cette initiative citoyenne
27:41vient en aide
27:41aux plus démunis.
27:44On va bientôt avoir
27:45assez de nourriture
27:46pour un an et demi.
27:48Chaque semaine,
27:49ces bénévoles distribuent
27:50de la nourriture
27:51à ceux qui en ont besoin,
27:52quelle que soit leur religion.
27:53Chouve a appelé
27:55son association
27:56Giving Back Australia
27:57pour rendre à l'Australie
27:59ce qu'elle lui a offert.
28:03Je suis né dans ce pays.
28:04Mes parents sont venus ici.
28:06Vous allez me faire pleurer.
28:09Mes parents sont arrivés
28:10dans les années 70.
28:12Ils sont venus
28:13d'un pays déchiré
28:14par la guerre.
28:16J'ai pu naître
28:17dans un hôpital gratuitement.
28:19Je suis allé
28:20dans une école publique
28:21gratuitement.
28:22J'ai eu mes enfants ici.
28:26L'Australie nous a tant donnés.
28:28Je voulais que moi
28:29et d'autres musulmans
28:30qui ont immigré ici
28:31donnent un retour
28:33à ce pays magnifique
28:34qu'est l'Australie.
28:38Comme les parents de Chouve,
28:40une grande partie
28:41des musulmans d'Australie
28:42est arrivée
28:42dans les années 70.
28:44Mais leur intégration
28:45reste difficile.
28:47Surtout pour ceux
28:47qui affichent leur croyance.
28:49Avec sa longue barbe
28:51et son chapeau de prière,
28:52chaque jour ou presque,
28:54Chouve est la cible
28:55d'insultes.
28:55On me dit souvent
29:00de retourner dans mon pays.
29:02Et ça, ça me fait bien rire.
29:04Parce que c'est ici, mon pays.
29:08Je suis né ici.
29:10Où veux-tu que j'aille ?
29:12Et quand on va faire les courses,
29:13on a souvent des remarques racistes
29:15du genre
29:16« Ne nous faites pas exploser, hein ! »
29:18« On nous traite de terroristes »
29:20ou « On m'appelle Oussama ».
29:22Avec mon association,
29:24on espère briser ces barrières
29:26et combattre l'islamophobie.
29:32La nourriture distribuée par Chouve
29:34est collectée dans les écoles du quartier
29:36et auprès de donateurs privés.
29:37Steve, on va donner les fruits et les légumes.
29:43C'est pour lui, sa femme et leur bébé.
29:45Lui, c'est Steve.
29:46Il travaille avec nous.
29:47Il est moche, mais il est sympa.
29:50Et dis-donc,
29:50tu t'es déjà vu dans un miroir, toi ?
29:52Steve est chrétien.
29:57Il est devenu bénévole
29:58pour l'association il y a un an.
30:00Avant, lui aussi avait des préjugés
30:02sur les musulmans.
30:05Moi, ça m'a ouvert les yeux.
30:07Avant, je pensais la même chose
30:09que beaucoup d'Australiens.
30:10Mais les gens ne comprennent pas
30:11que les musulmans
30:12ne sont pas tous extrémistes.
30:14La plupart d'entre eux
30:15sont des gens très bien.
30:17C'est comme chez nous, les chrétiens.
30:19Un espoir,
30:20un exemple de fraternité
30:22à opposer aux arguments violents
30:23d'une minorité raciste.
30:26L'attentat de Chris Church,
30:28perpétré par Brendan Tarrant,
30:30un suprémaciste blanc australien,
30:32a été unanimement condamné
30:33par tous les partis politiques du pays.
30:35L'opinion publique,
30:38sous le choc,
30:39a contraint les extrémistes
30:40les plus radicaux
30:41à se faire discrets.
30:45Nous avons rendez-vous à Melbourne
30:47avec un homme
30:48qui a fréquenté le terroriste.
30:50Tom Sewell est à la tête
30:51d'un groupuscule d'extrême droite,
30:53la LAD Society.
30:55Surveillé de près
30:55par les services de renseignement,
30:57Tom préfère nous donner rendez-vous
30:58en pleine rue.
30:59Mais comme une provocation,
31:01il n'a pas choisi le lieu par hasard.
31:03Si vous regardez autour de vous,
31:09vous ne verrez pas beaucoup d'Australiens.
31:11Si vous aviez une maison
31:12avec votre famille,
31:14qu'est-ce que ça vous ferait
31:15si des gens vivaient au sous-sol ?
31:16Comme si c'était
31:17une sorte de colocation.
31:18Avant ma naissance,
31:20ce quartier était un quartier
31:21de travailleurs blancs.
31:22Et maintenant,
31:23comme vous pouvez le constater,
31:25nous sommes les seuls blancs
31:26dans tout le quartier.
31:27C'est la preuve que la colonisation
31:28est presque terminée.
31:29Depuis l'attentat de Christchurch,
31:32la LAD Society fait profil bas,
31:35car Tom avait tenté
31:36de recruter l'auteur de l'attaque.
31:38Il y a quelques années,
31:39j'ai eu des conversations
31:40avec lui sur Internet,
31:41car nous partagions
31:43les mêmes idées.
31:44Mais il n'a pas voulu nous rejoindre
31:46parce qu'il partait s'installer
31:47en Nouvelle-Zélande
31:48et on a perdu le contact.
31:50Le gouvernement considère
31:51que ce lien est suffisant
31:53pour nous traiter
31:53comme des terroristes.
31:54Alors en ce moment,
31:56nous sommes obligés
31:57de garder nos réunions
31:58et nos locaux secrets.
32:01C'est du sérieux.
32:03Ce n'est pas des conneries.
32:05Voici le lieu
32:05où se retrouve habituellement
32:06la LAD Society.
32:08Dans cette vidéo,
32:09l'organisation est présentée
32:10comme un banal club de sport privé
32:12exclusivement réservé aux hommes.
32:15En réalité,
32:15il s'agit d'une société secrète
32:17aux objectifs politiques.
32:18Claire.
32:19C'est une fraternité,
32:20c'est une communauté,
32:22c'est ce dont le pays a besoin.
32:23Son but ?
32:25Fonder une nouvelle nation blanche.
32:27Face à la peur
32:28du grand remplacement,
32:30Tom et son groupe rêvent
32:31d'un État exclusivement
32:32réservé aux Blancs.
32:33Nous voulons fonder
32:34un État ethnique,
32:36recréer l'Australie d'avant.
32:38Pour cela,
32:39nous devons nous organiser,
32:41avoir nos institutions parallèles,
32:42nos propres terres,
32:44car quand la guerre
32:45et l'instabilité seront là,
32:47nous serons prêts,
32:48nous serons protégés
32:49et tout sera en place
32:50pour créer une nouvelle nation.
32:51Une nation avec
32:53tout ce que cela implique ?
32:54Oui.
32:55Avec un gouvernement,
32:56une armée ?
32:57Oui, oui, bien sûr.
32:59Et s'ils essayent
33:00de s'en prendre à nous,
33:00on verra ce qui se passera.
33:02Qu'est-ce que vous voulez dire ?
33:03Vous verrez.
33:05On ne va pas abandonner
33:06comme l'ont fait
33:07les Blancs en Afrique du Sud.
33:08Ce sont nos terres.
33:12Le propos est déterminé,
33:13voire menaçant.
33:14A l'image de Tom,
33:17l'extrême droite australienne
33:18se radicalise.
33:20Elle rêve désormais
33:20d'un apartheid,
33:22un État fondé
33:22sur la ségrégation raciale.
33:26Si l'Australie
33:27n'a jamais basculé
33:27dans cet extrême,
33:29pendant des années,
33:30Blancs et aborigènes
33:30vivaient séparés.
33:33Depuis près de 200 ans,
33:35Redfern est le quartier
33:36aborigène de Sydney.
33:39Redfern a longtemps
33:40été un ghetto.
33:41A l'ombre de ses tours,
33:44la pauvreté,
33:44le crime et la drogue.
33:46Le lieu a aussi connu
33:47les violences policières
33:48et les émeutes.
33:5214 février 2004,
33:53les rues du quartier
33:54sont à feu et à sang.
33:57Plus tôt dans l'après-midi,
33:58un aborigène de 17 ans
33:59est mort empalé
34:00sur une barrière
34:01alors qu'il tentait
34:01de fuir la police à vélo.
34:06Pendant toute une nuit,
34:07ils vont en découdre
34:08avec les forces de l'ordre.
34:11Mais depuis quelques années,
34:13la situation s'améliore
34:14à Redfern,
34:15grâce notamment
34:16à Shane Phillips,
34:17un des leaders
34:18de la communauté.
34:20Trois fois par semaine,
34:22cet ancien boxeur
34:22réveille les jeunes
34:23du quartier,
34:24à 5 heures du matin.
34:25Salut !
34:26Salut !
34:27Ça va mon pote ?
34:33Ça va.
34:34Alors quoi de neuf ?
34:35Oh, rien de spécial.
34:36Son idée,
34:37leur imposer
34:38une discipline stricte
34:39pour les garder
34:40dans le droit chemin.
34:41Beaucoup de ces gamins
34:42ne se réveilleraient pas
34:43avant 7 heures
34:43ou même plus tard.
34:46Là, ils doivent se réveiller
34:46à 4 heures
34:47pour qu'on puisse
34:48les récupérer à 5.
34:50On veut leur enseigner
34:51la force de notre peuple,
34:52la discipline,
34:53la régularité,
34:54le mental,
34:55dès les petites heures
34:56du matin.
34:57Les programmes du gouvernement
34:58se concentrent
34:59sur nos problèmes.
35:00Nous,
35:01on se focalise
35:02sur nos forces.
35:03C'est cet esprit positif
35:04qu'on veut inculquer
35:06aux gamins.
35:06Direction,
35:11la salle de boxe.
35:19James,
35:19toi et moi.
35:22Allez, vas-y,
35:23des directs.
35:24Beaucoup des stagiaires
35:25du programme
35:26sont d'anciens délinquants.
35:27Allez, vas-y,
35:28deux bons coups,
35:29gauche, droite,
35:30vas-y.
35:31Grâce à la boxe,
35:32Shane leur enseigne
35:33le respect
35:33et la rigueur.
35:34Il espère ainsi
35:35leur éviter un retour
35:36à la casse-prison.
35:39James vient tout juste
35:40d'intégrer le programme.
35:42Il y a encore une semaine,
35:43ce jeune homme de 21 ans
35:44purgeait une peine
35:45de deux ans pour vol.
35:51Il y a une bonne atmosphère ici.
35:54Les gens ne nous jugent pas
35:55pour ce qu'on a fait
35:56dans le passé.
35:56Et puis ça te donne
35:58un cadre,
35:59une routine.
36:01Ça te tient éloigné
36:02des problèmes de la rue.
36:04parce qu'avec tout
36:05ce qui se passe dehors,
36:06tu peux très vite déraper.
36:13Il y a quelques années,
36:14les violences
36:15entre les forces de l'ordre
36:16et les jeunes aborigènes
36:16étaient quotidiennes
36:17à Redfern.
36:19Alors,
36:19pour apaiser les tensions,
36:20Shane a proposé
36:21au chef de la police
36:22d'enfiler les gants.
36:26Andy et ses hommes
36:27viennent désormais
36:27s'entraîner chaque semaine
36:28avec les jeunes du quartier.
36:29Ça a eu un impact
36:33très positif.
36:35Ça a nettement
36:35amélioré nos relations.
36:38À mon époque,
36:39on se tapait dessus
36:40tout le temps.
36:41On avait une mauvaise image
36:42les uns des autres.
36:43Mais ce qu'on a vu ici,
36:45c'est qu'en travaillant ensemble,
36:46ça change tout.
36:47Ça marche.
36:48Si on investit du temps
36:49avec ses familles,
36:50ça peut avoir
36:51un impact énorme
36:52sur nous tous.
36:53En fait,
36:54ça marche dans les deux sens.
36:56De notre point de vue,
36:57si on a un problème
36:58avec un jeune,
36:58par exemple,
36:59on peut aller voir Shane.
37:00Il peut m'aider.
37:02Il peut nous ramener
37:03le gamin
37:03plutôt qu'on aille
37:04l'arrêter chez lui,
37:04qu'on lui court après.
37:06Depuis 10 ans,
37:07le taux de criminalité
37:08chez les jeunes aborigènes
37:09a chuté.
37:10Et ça,
37:10dans tous les types de crimes.
37:12Alors pour nous,
37:13c'est bénéfique.
37:16En seulement 10 ans,
37:18la criminalité
37:18a baissé de 70%
37:20à Redfern.
37:21Peu à peu,
37:22l'ancien ghetto
37:23de Sydney reprend vie.
37:28Si de nombreux aborigènes
37:30peinent à trouver
37:30une place dans la société,
37:32certains connaissent le succès.
37:35C'est le cas
37:35de Myriam Korowa.
37:37Fille d'une aborigène
37:38et d'un anglais,
37:40cette journaliste dynamique
37:41est une star du petit écran.
37:46Bonjour.
37:47Je vais avoir besoin
37:48d'un boîtier de micro.
37:50Tu peux prendre le mien ?
37:52Merci beaucoup.
37:54Myriam présente
37:54le journal télévisé
37:55de l'une des plus grandes
37:56chaînes australiennes,
37:57ABC.
37:59C'est tout bon ?
38:01Chaque week-end,
38:03son programme est regardé
38:04par plus d'un million
38:05d'Australiens.
38:09Bonjour et bienvenue
38:11sur ABC.
38:12Je suis Myriam Korowa.
38:13Un soldat thaïlandais
38:14a ouvert le feu
38:15dans la rue
38:15tuant au moins
38:1620 personnes.
38:18Myriam a commencé
38:19au bas de l'échelle.
38:20Elle a lentement
38:21gravé les échelons
38:22pour devenir
38:23la première aborigène
38:24à présenter
38:24ce prestigieux journal
38:26du week-end.
38:29Parfois,
38:29je me pince
38:30pour être sûre
38:30que je ne rêve pas,
38:31que je suis bien ici,
38:33à ce poste.
38:35Beaucoup de gens
38:36n'osent pas
38:36tenter leur chance.
38:38Alors,
38:38j'espère que ça aidera
38:39certaines personnes
38:40à comprendre
38:40que rien n'est impossible.
38:43La présentatrice
38:44a le triomphe modeste
38:45car les visages
38:46aborigènes
38:47sont très rares
38:47à la télévision.
38:49Craig,
38:49son réalisateur,
38:50travaille chez ABC
38:51depuis 20 ans.
38:53Il n'a que très rarement
38:54collaboré
38:54avec des natifs australiens.
38:57Il y a plus de diversité
38:59à la télévision
39:00aujourd'hui.
39:02Mais Myriam
39:03reste une exception.
39:06Ça s'améliore,
39:07notamment dans le milieu
39:08de l'information.
39:09Mais en ce qui concerne
39:13la fiction,
39:13par exemple,
39:14les programmes
39:15sont toujours
39:16largement dominés
39:17par l'Australie blanche.
39:20Myriam est aujourd'hui
39:21une journaliste reconnue,
39:22mais sa carrière
39:23a été un parcours
39:24du combattant.
39:27Si je n'avais pas persévéré
39:31malgré les discriminations
39:32à l'école,
39:33le harcèlement,
39:34le racisme,
39:35ce genre de choses,
39:37je n'aurais jamais
39:38terminé le lycée.
39:39Je ne serais pas allée
39:41à l'université.
39:43Et sans cela,
39:44mes possibilités
39:45de faire carrière
39:46auraient été
39:47vraiment très limitées.
39:49Malgré les embûches,
39:51la famille de Myriam
39:52l'a toujours encouragée
39:52à poursuivre ses rêves.
39:54Ce message,
39:56elle entend aujourd'hui
39:56le transmettre
39:57à son fils.
39:59Le lendemain,
40:00aux petites heures du matin,
40:02nous retrouvons
40:02la journaliste
40:03chez elle,
40:04dans la banlieue
40:05de Sydney.
40:06Tu veux quelque chose
40:07d'autre ?
40:07Oui ?
40:08Ok.
40:08Divorcée,
40:12elle élève seule
40:12Yuin,
40:13son garçon
40:14de 6 ans.
40:18Aucune maison
40:19australienne
40:19ne serait complète
40:20sans
40:21ceci,
40:22notre fameuse
40:25patate à tartiner
40:26salée.
40:26Si vous voulez
40:29que vos enfants
40:29soient grands
40:30et forts
40:31et intelligents,
40:33c'est ça
40:34qu'il vous faut.
40:36Comme Myriam,
40:37Yuin a grandi
40:38entre deux cultures.
40:40Je peux avoir un pied ?
40:42Oui, celui que tu veux.
40:43Alors,
40:43je choisis celui-là.
40:45Son père
40:45est un Australien blanc,
40:47descendant
40:47des premiers colons
40:48européens.
40:48Il sait qu'il est
40:53aborigène,
40:54mais il voit cela
40:56avec ses yeux
40:57d'enfant.
41:00L'année dernière,
41:01on lui a posé
41:01la question
41:02et il a répondu
41:03« Oui,
41:04je suis aborigène
41:05et mon père
41:05l'est aussi.
41:07En fait,
41:07le père de Yuin
41:08a des origines allemandes
41:09et irlandaises
41:10et il a les yeux bleus.
41:11Je trouve ça mignon
41:12que Yuin
41:13n'associe pas cela
41:13avec une apparence
41:14particulière. »
41:16Myriam, elle,
41:17a grandi
41:17dans les années 70,
41:19une époque
41:20où les couples mixtes
41:21étaient rares en Australie.
41:23Pendant longtemps,
41:24elle a eu du mal
41:24à définir
41:25sa propre identité.
41:26« Là, c'est ma mère,
41:29ma sœur et moi.
41:31Et la petite fille,
41:33là, c'est ma mère.
41:37Pendant longtemps,
41:38j'ai eu beaucoup de mal
41:39avec l'idée
41:40de ne pas être acceptée
41:41par la société dominante.
41:43Mais d'un autre côté,
41:45suis-je vraiment aborigène ?
41:46J'ai reçu
41:47une éducation supérieure.
41:49J'ai été à l'université,
41:50je travaille dans les médias.
41:52Je ne vis pas
41:53dans une communauté
41:54aborigène.
41:55En fait,
41:56je ne colle pas
41:57à l'image typique
41:57de l'aborigène.
42:00Mais avec le temps,
42:03j'ai fini par réaliser
42:04qu'on pouvait être
42:05aborigène
42:06et tout le reste aussi.
42:09Tic-tac, tic-tac.
42:11Combien de sacs
42:12on doit prendre ce matin ?
42:13Un millier.
42:14Mille sacs aujourd'hui ?
42:16Comme chaque matin,
42:18avant de se rendre au travail,
42:20Myriam dépose Yuin
42:21à l'école.
42:25Au revoir.
42:27Mais aujourd'hui,
42:28la journaliste
42:29ne présente pas le JT.
42:31Elle est en reportage.
42:32Sujet du jour,
42:33la nouvelle pièce de théâtre
42:34d'une grande compagnie australienne.
42:38Il y a deux caméramans
42:39avec moi.
42:39Au début de sa carrière,
42:42Myriam était exclusivement
42:44cantonnée
42:44aux actualités indigènes.
42:47J'ai beaucoup travaillé
42:50pour des émissions
42:51sur les aborigènes
42:52parce qu'on considère
42:53que je connais mieux
42:54le sujet.
42:56Mais vous savez,
42:58je peux couvrir
42:58d'autres sujets
42:59comme le premier homme
43:02sur la lune,
43:03non, par exemple ?
43:04Ou pourquoi pas,
43:06comme aujourd'hui,
43:07la dernière pièce de théâtre
43:08de la compagnie de Sydney ?
43:10Forte de sa réussite,
43:14Myriam espère aujourd'hui
43:15être un exemple
43:16pour les jeunes aborigènes.
43:18Et la journaliste
43:19a confiance en l'avenir.
43:23Nous, les aborigènes,
43:25nous avons de gros problèmes
43:27d'inégalités économiques.
43:29Il y a beaucoup
43:30trop de gens en prison.
43:33Nous avons un des taux
43:33de suicide les plus élevés
43:35au monde chez les jeunes.
43:36Cela montre qu'il y a
43:37quelque chose
43:38qui ne tourne pas
43:38vraiment rond.
43:40Mais j'ai de l'espoir.
43:42Ma vie est déjà
43:43bien différente
43:43de celle de ma mère
43:44et de ma grand-mère.
43:46Je peux avoir des rêves,
43:47atteindre mes objectifs
43:49et ce sera encore mieux
43:50pour mon fils.
43:50Donc oui,
43:51j'ai de l'espoir.
43:55Si Myriam a réussi,
43:57c'est aussi parce
43:57qu'elle a grandi à Sydney,
43:59une grande métropole
44:00pleine d'opportunités.
44:03Mais plus on s'éloigne
44:04des grandes villes,
44:05plus les chances
44:06de réussite s'amenuisent.
44:09C'est notamment le cas
44:10à l'extrême nord du pays.
44:13À plus de 4000 km de Sydney,
44:15au-delà du bouche australien
44:16et de ses plaines sauvages,
44:20Darwin.
44:23Capitale de son état,
44:24la ville est le point
44:25de chute d'aborigènes
44:26venu des campagnes.
44:29Souvent sans travail
44:29ni logement,
44:31ils sont des centaines
44:31à vivre dans la rue.
44:38Pour leur venir en aide,
44:39une organisation indigène
44:41patrouille en centre-ville,
44:43la Larrakia Nation,
44:44du nom de la plus grande
44:45tribu de la région.
44:47Comme chaque jour,
44:49Kyle et son partenaire
44:50font leur tournée.
44:56Il y a beaucoup de gens
44:57qui viennent de communautés
44:58isolées
44:58et ils se retrouvent bloqués
45:00ici.
45:02Ou bien ils viennent ici
45:02pour des raisons personnelles
45:04et...
45:05Ah, ça, c'est pour nous.
45:11Salut.
45:12Ça va, mon frère ?
45:12Ça va, et toi ?
45:13Ça va, merci.
45:15Vous êtes qui ?
45:15On est à Larrakia Nation.
45:18Tout va bien ?
45:19T'es dans la rue aujourd'hui ?
45:21Tu veux aller en désintox ?
45:22Ou en refuge ?
45:23Tu peux y passer la nuit.
45:26Je sais pas.
45:27T'as pas 3,50$ plutôt ?
45:28Non, non, j'ai pas d'argent
45:30sur moi, mais on va revenir
45:31te chercher en bus,
45:32ça sera plus facile
45:33avec ta jambe.
45:35Face à l'ampleur du problème,
45:37la Larrakia Nation est débordée.
45:40L'organisation ne peut offrir
45:41qu'une aide d'urgence
45:42et n'a pas les moyens
45:43de loger tous les sans-abri
45:44de la ville.
45:46On n'a pas de famille,
45:48on n'a pas de maison,
45:49on dort dans l'herbe.
45:50Oui, c'est vrai.
45:52Oui, c'est vrai.
45:55On vit comme ça
45:57depuis des années
45:58et des années.
45:59C'est comme ça
46:00qu'on vit à Darwin.
46:03Bon, allez,
46:04essayez quand même
46:04de passer une bonne journée.
46:05Prenez soin de vous.
46:07Ouais, toi aussi.
46:08Ici, c'est Palmerston,
46:09à Darwin.
46:10Le fait qu'on soit aborigènes,
46:17ça aide.
46:18On fait plus d'efforts pour eux.
46:22On essaye de faire
46:23ce que les autres ne font pas.
46:25C'est assez triste, tout ça.
46:28Mais je suis content
46:29qu'on ait des services
46:30qui essayent d'aider ces gens.
46:37À la tombée du jour,
46:39Kyle et son partenaire
46:40rentrent à la base.
46:43Au petit matin,
46:45une autre équipe
46:45de la Larraka
46:46prend le relais.
46:47Sa mission,
46:49récupérer ceux
46:49qui ont passé la nuit
46:50en garde à vue
46:51et les ramener en lieu sûr.
47:00Oui, bonjour,
47:01c'est la patrouille de nuit
47:02de la Larraka Nation.
47:05Dès qu'on s'est occupé
47:06des autres,
47:08on va venir te chercher.
47:10Surtout,
47:11tu ne bouges pas
47:12de là où tu es,
47:13d'accord ?
47:13Cela fait 20 ans
47:16que Gavin est confronté
47:17à la misère de la rue.
47:20Au fil du temps,
47:21il a vu la situation
47:22de sa communauté
47:23se dégrader.
47:26Il y a toutes ces sales drogues
47:27qui sont arrivées,
47:28comme les méta-amphétamines.
47:29beaucoup de gens
47:31en prennent
47:32et après,
47:33ça devient très compliqué
47:34de retrouver une vie normale
47:35une fois qu'il y a touché.
47:40Il y a aussi
47:41beaucoup plus de gamins
47:42dans les rues.
47:45Il y en a qui étaient
47:46dans des foyers,
47:47les services sociaux
47:47s'occupaient d'eux,
47:49mais ils se sont enfuis
47:50et après,
47:51ils se retrouvent à la rue.
47:52La plupart du temps,
47:57les gardés à vue
47:58sont arrêtés
47:58pour consommation
47:59de drogues
47:59ou d'alcool
48:00sur la voie publique.
48:02Comme chaque jour
48:03ou presque,
48:04ils sont tous aborigènes.
48:07Allez,
48:07on est prêts à décoller.
48:09À Darwin,
48:10la police a la réputation
48:11de cibler
48:11les premiers Australiens.
48:17La police,
48:18ils nous arrêtent,
48:19nous,
48:19les aborigènes.
48:20On finit tous au poste.
48:22Et le lendemain,
48:23tu peux même
48:24te retrouver en prison.
48:25C'est ça,
48:26la vie à Darwin, quoi.
48:30Drogue,
48:31alcool,
48:32misère.
48:32Allez,
48:33bonne journée.
48:34Prenez soin de vous.
48:35Et toi,
48:35tu fais gaffe à toi.
48:36À Darwin,
48:37de nombreux aborigènes
48:38vivent comme perdus
48:39entre deux mondes.
48:41Comme s'ils étaient incapables
48:42de se conformer
48:43aux normes dictées
48:44par les Blancs
48:45depuis 200 ans.
48:49C'est le chapitre
48:50le plus sombre
48:50de l'histoire de l'Australie.
48:52Au XIXe siècle,
48:54les colons anglais
48:54ont tenté
48:55d'éradiquer
48:55la race aborigène.
48:58D'abord par les armes,
49:00puis en organisant
49:01le métissage.
49:02Pendant des décennies,
49:04le pouvoir en place
49:04a tenté
49:05de blanchir
49:05la population noire.
49:08Autre mesure,
49:10les enfants aborigènes
49:10pouvaient être arrachés
49:11de force à leurs parents.
49:13Placés dans des couvents
49:14ou des familles d'accueil,
49:16ces enfants devaient alors
49:17apprendre à vivre
49:17comme de bons petits blancs.
49:18Une pratique qui a perduré
49:21jusqu'au début des années 70.
49:24Plus de 100 000 enfants
49:25auraient été victimes
49:26de cette politique.
49:28On les appelle
49:28les générations volées.
49:33Aujourd'hui,
49:34l'histoire se répète.
49:38Des centaines de personnes
49:39manifestent dans les rues
49:40de Sydney.
49:41Ils protestent
49:42contre ce qu'ils appellent
49:43la nouvelle génération volée.
49:50Actuellement,
49:51un enfant aborigène
49:52a dix fois plus de risque
49:53d'être retiré de sa famille
49:54par les services sociaux.
49:56Et dans la moitié des cas,
49:58ils sont placés
49:58loin de leur communauté,
50:00dans des institutions
50:00ou des familles blanches.
50:03Elles-mêmes victimes
50:04de ces retraits forcés,
50:06Hazel Collins
50:06est l'organisatrice
50:07de la manifestation.
50:08Cette grand-mère,
50:10métisse aborigène,
50:11se bat contre ce qu'elle
50:12considère comme un génocide
50:14culturel.
50:15Et pour se faire entendre,
50:17elle a choisi de le clamer
50:17sous les fenêtres
50:18du Parlement régional.
50:22Il y a des personnes blanches
50:24dans ces bureaux,
50:26assis derrière nous,
50:29qui nous dictent à nous,
50:30les autochtones,
50:31ce qui est mieux pour nous,
50:33comment nous devons vivre.
50:35Alors à eux, je dis,
50:37allez vous faire foutre.
50:38Ils n'ont pas réussi
50:44à exterminer
50:45tous les aborigènes.
50:46Alors maintenant,
50:47ils essaient de nous faire
50:48disparaître à travers
50:49nos enfants,
50:51en éradiquant notre culture,
50:53en effaçant notre héritage
50:54et en leur apprenant
50:56à être quelque chose
50:57qu'ils ne sont pas.
50:58comme des milliers
51:06d'autres familles aborigènes,
51:08Hazel Collins a été séparé
51:10de ses petits-enfants.
51:12Pendant des années,
51:13Ryan a été placé
51:14dans plusieurs familles blanches.
51:15C'est comme si vous étiez
51:18kidnappés par un inconnu.
51:20Ma mère me donnait
51:21tout ce dont j'avais besoin.
51:22J'étais heureux
51:23jusqu'à ce qu'ils m'enlèvent.
51:25Ils sont venus,
51:26ils m'ont séparé des miens
51:27et mon miche
51:28est de parfaits étrangers.
51:30Je n'avais même pas
51:31de chaussures au pied
51:31quand on m'a pris.
51:33C'était circulé,
51:34il n'y a rien à voir.
51:34C'est très dur pour eux
51:41parce qu'ils ne grandissent pas
51:42comme des aborigènes.
51:46Nous, nous éduquons
51:48différemment.
51:50Ce n'est pas juste
51:51un papa et une maman,
51:53c'est toute une communauté.
51:56Ces enfants grandissent
51:57en perdant leur identité,
51:59ils ne savent pas
52:00à qui ils sont affiliés,
52:01d'où ils viennent.
52:03Ce sont des identités
52:04entières qui sont volées.
52:11En seulement 10 ans,
52:13le nombre d'enfants
52:13aborigènes placés
52:14a été multiplié par 2.
52:16Ils sont désormais
52:17plus de 18 000
52:18à travers le pays.
52:21Pour tenter
52:22de mieux comprendre
52:22la réalité
52:23qui se cache derrière
52:24ces chiffres,
52:25nous avons rendez-vous
52:25avec une mère,
52:27séparée de ses enfants
52:27depuis 6 ans.
52:29Elle vit dans ce quartier
52:30résidentiel calme,
52:31non loin de Newcastle.
52:34nous n'avons pas le droit
52:35de montrer son visage
52:36car la loi australienne
52:37nous l'interdit.
52:39Révéler son identité
52:40permettrait d'identifier
52:41ses enfants
52:42et c'est illégal.
52:44Nous l'appellerons
52:44Cathy.
52:44C'est une photo
52:51de mon plus jeune fils.
52:52Il devait avoir
52:532 ans là.
52:54Ça c'est quand
52:55il était bébé.
52:56Elle, c'est une de mes filles
52:57quand elle vivait avec moi
52:58et là, c'est mon autre fille.
53:01Cette photo a été prise
53:02la dernière fois
53:03que j'ai vu mes enfants.
53:05Ça me rend triste
53:06parce que ma fille
53:06est heureuse sur cette photo.
53:08C'est le dernier souvenir
53:09que j'ai de tous ensemble.
53:11Et je sais
53:11qu'ils étaient heureux.
53:12Ils ont toujours été
53:13heureux de me voir.
53:16Mère de 5 enfants,
53:18Cathy s'en est vue
53:18retirer la garde
53:19parce qu'elle consommait
53:20de la drogue.
53:216 ans plus tard,
53:23elle a retrouvé
53:23une vie normale,
53:24un emploi et une maison.
53:26Pourtant,
53:27on lui interdit toujours
53:28le moindre contact
53:29avec ses enfants.
53:31Mes enfants
53:33vivent à 20 minutes
53:35de chez moi.
53:36Je sais où ils vivent.
53:37Je sais dans quelle école
53:38ils vont.
53:39Mais le système
53:40ne me laisse pas les voir.
53:42On ne me laisse même
53:42pas leur parler
53:43au téléphone.
53:44J'ai été complètement
53:45bannie de leur vie,
53:46complètement.
53:47Leur famille d'accueil
53:48les ont convaincus
53:49que je suis une menace
53:50pour eux.
53:51C'est l'image
53:52que mes enfants ont de moi.
53:54Alors que je suis investie
53:55dans la protection
53:56de l'enfance,
53:56que je suis une travailleuse sociale,
53:59j'ai vraiment intégralement
54:00changé ma vie
54:01et ça n'a fait
54:02aucune différence.
54:08Comme beaucoup
54:09de mères aborigènes
54:09dans son cas,
54:11Cathy a elle-même
54:11été retirée de sa famille
54:12lorsqu'elle était enfant.
54:17Nous étions neuf frères et sœurs
54:19et on a tous été placés
54:21et séparés.
54:23On a tous fini
54:24avec des problèmes
54:24d'addiction
54:25ou des problèmes
54:26avec la justice.
54:27À leur tour,
54:28nos enfants aussi
54:28sont retirés,
54:29donc le cycle
54:30n'est pas brisé.
54:33Ces politiques
54:34ont porté différents noms,
54:35mais ce sont les mêmes pratiques
54:38génocidaires
54:39de génération en génération.
54:40Nous n'avons aucun pouvoir
54:42de décision dans ce pays.
54:44Nous sommes à la merci
54:45de ces institutions
54:46qui exploitent nos droits.
54:50Cathy pourrait bientôt
54:51perdre définitivement
54:52ses enfants.
54:54Les familles dans lesquelles
54:54ils sont placés
54:55ont lancé des démarches
54:56pour les adopter.
54:56Une loi,
54:58récemment votée,
54:59les autorise à le faire
55:00au terme de cinq ans
55:01de garde,
55:02sans que Cathy
55:03n'ait son mot à dire.

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