- 28/05/2025
GRAND DÉBAT / Budget 2026 : quelles marges de manoeuvre ?
« Le récap » par Bruno Donnet
En 2024, le déficit public en France s'élève à 168,6 milliards d'euros, soit 5,8 % du Produit Intérieur Brut. Ce déficit vient s'ajouter à une dette publique déjà conséquente, désormais estimée à 113,2 % du PIB, selon les derniers chiffres publiés par l'Insee. Des niveaux bien éloignés des critères de rigueur budgétaire fixés par l'Union européenne, qui prévoient un plafond de 3 % pour le déficit et de 60 % pour la dette. Face à cette situation jugée préoccupante, François Bayrou a commencé à préparer l'opinion publique à une période de rigueur. Le 27 mai 2025, il annonçait vouloir demander « un effort à tous les Français, le plus juste possible ». Le gouvernement a esquissé plusieurs pistes : suppression de l'abattement fiscal de 10 % sur les pensions des retraités, gel des dotations aux collectivités locales via une « année blanche », ou encore une hausse ciblée de la TVA. Autant de mesures qui divisent. À gauche, certains appellent à une hausse des prélèvements sur les plus riches, à l'image de la taxe dite « Zucman », qui imposerait à 2% les patrimoines supérieurs à 100 millions d'euros. À l'extrême droite, toute nouvelle imposition des retraités est jugée inacceptable. Dans ce contexte de fortes tensions politiques et d'urgence budgétaire, quelles solutions peuvent encore être envisagées face au mur de la dette ?
Invités :
- Frédéric Valletoux, député « Horizons et indépendants » de Seine-et-Marne, Président de la commission des affaires sociales,
- Christine Pirès Beaune, députée socialiste du Puy-de-Dôme,
- Charles Alloncle, député « Union des Droites pour la République » de l'Hérault.
GRAND ENTRETIEN / Najat Vallaud-Belkacem et Benjamin Michallet : penser l'immigration autrement...
Dans « Réfugiés, ce qu'on ne nous dit pas », l'économiste Benjamin Michallet et l'ancienne ministre Najat Vallaud-Belkacem déconstruisent les idées reçues sur les réfugiés en s'appuyant sur des données, des comparaisons internationales et des faits. Ils montrent que l'accueil de réfugiés n'entraîne pas une hausse de la criminalité ni un poids économique insupportable. Au contraire, une intégration réussie peut générer des bénéfices sociaux et fiscaux. Les auteurs dénoncent la manipulation populiste et médiatique, qui survalorise les peurs et invisibilise la solidarité réelle des citoyens. Ils appellent à un accès plus large aux données pour éclairer les politiques publiques. L'ouvrage défend une approche humaniste, fondée sur le droit et la responsabilité collective. La question de l'accueil des réfugiés peut-elle connaître un regain d'intérêt citoyen ?
Grands invités :
Les auteurs de « Réfugiés, ce qu'on ne nous dit pas » (Stock) :
- Najat Vallaud-Belkacem, Présidente de l'association « France Terre d'Asile », ancienne Ministre de l'éducation nationale et des droits des femmes,
- Benjamin Michallet, économiste, spécialiste des déplacés forcés et juge a
« Le récap » par Bruno Donnet
En 2024, le déficit public en France s'élève à 168,6 milliards d'euros, soit 5,8 % du Produit Intérieur Brut. Ce déficit vient s'ajouter à une dette publique déjà conséquente, désormais estimée à 113,2 % du PIB, selon les derniers chiffres publiés par l'Insee. Des niveaux bien éloignés des critères de rigueur budgétaire fixés par l'Union européenne, qui prévoient un plafond de 3 % pour le déficit et de 60 % pour la dette. Face à cette situation jugée préoccupante, François Bayrou a commencé à préparer l'opinion publique à une période de rigueur. Le 27 mai 2025, il annonçait vouloir demander « un effort à tous les Français, le plus juste possible ». Le gouvernement a esquissé plusieurs pistes : suppression de l'abattement fiscal de 10 % sur les pensions des retraités, gel des dotations aux collectivités locales via une « année blanche », ou encore une hausse ciblée de la TVA. Autant de mesures qui divisent. À gauche, certains appellent à une hausse des prélèvements sur les plus riches, à l'image de la taxe dite « Zucman », qui imposerait à 2% les patrimoines supérieurs à 100 millions d'euros. À l'extrême droite, toute nouvelle imposition des retraités est jugée inacceptable. Dans ce contexte de fortes tensions politiques et d'urgence budgétaire, quelles solutions peuvent encore être envisagées face au mur de la dette ?
Invités :
- Frédéric Valletoux, député « Horizons et indépendants » de Seine-et-Marne, Président de la commission des affaires sociales,
- Christine Pirès Beaune, députée socialiste du Puy-de-Dôme,
- Charles Alloncle, député « Union des Droites pour la République » de l'Hérault.
GRAND ENTRETIEN / Najat Vallaud-Belkacem et Benjamin Michallet : penser l'immigration autrement...
Dans « Réfugiés, ce qu'on ne nous dit pas », l'économiste Benjamin Michallet et l'ancienne ministre Najat Vallaud-Belkacem déconstruisent les idées reçues sur les réfugiés en s'appuyant sur des données, des comparaisons internationales et des faits. Ils montrent que l'accueil de réfugiés n'entraîne pas une hausse de la criminalité ni un poids économique insupportable. Au contraire, une intégration réussie peut générer des bénéfices sociaux et fiscaux. Les auteurs dénoncent la manipulation populiste et médiatique, qui survalorise les peurs et invisibilise la solidarité réelle des citoyens. Ils appellent à un accès plus large aux données pour éclairer les politiques publiques. L'ouvrage défend une approche humaniste, fondée sur le droit et la responsabilité collective. La question de l'accueil des réfugiés peut-elle connaître un regain d'intérêt citoyen ?
Grands invités :
Les auteurs de « Réfugiés, ce qu'on ne nous dit pas » (Stock) :
- Najat Vallaud-Belkacem, Présidente de l'association « France Terre d'Asile », ancienne Ministre de l'éducation nationale et des droits des femmes,
- Benjamin Michallet, économiste, spécialiste des déplacés forcés et juge a
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00:00Bonsoir à tous et bienvenue dans Savourgarde.
00:09Il prépare un plan, un plan pour faire face au mur de la dette.
00:12François Bayrou le présentera d'ici au 14 juillet, mais pour l'instant rien à l'horizon
00:17et du côté des députés, certains s'impatientent.
00:20Alors où trouver les 40 milliards manquants ? Quelles réformes faut-il mener ? Et les
00:24impôts, faut-il les augmenter ? On en débattra dans un instant avec nos invités.
00:29Ils en ont assez que les réfugiés soient assimilés à des migrants.
00:33Nous recevons ce soir Najat Vallaud-Belkacem et Benjamin Michalet pour cet ouvrage co-écrit
00:39à deux réfugiés, ce qu'on ne nous dit pas, un livre pour déconstruire les préjugés
00:44sur les réfugiés.
00:45Enfin, on évoquera cette loi pour réhabiliter Alfred Dreyfus.
00:49C'est notre grand angle ce soir, une loi pour l'élever au grade de général de brigade
00:53à titre posthume.
00:54Voilà pour le sommaire, vous savez tout, place au débat.
00:58Générique
01:10Un déficit de 5,8% du PIB, une dette qui dépasse les 113% du PIB, impossible de reculer.
01:21Il y a la pression des agences de notation, il y a les menaces de la Commission européenne,
01:25le moment de vérité est donc arrivé.
01:27Comment faire face à ce mur de la dette ?
01:29Et François Bayrou est-il l'homme de la situation ?
01:31Toutes ces questions, on va les poser à nos invités.
01:34Ce soir, je commence par vous Frédéric Valtoux, bonsoir.
01:36Bonsoir.
01:37Vous êtes député membre du groupe Horizon et vous présidez la Commission des affaires
01:40sociales, celle qui s'occupe donc du budget de la sécurité sociale, dont on va parler
01:44évidemment ce soir.
01:45Christine Pires Bonne, bonsoir.
01:47Bonsoir.
01:48Vous êtes député membre du groupe Socialiste et vous connaissez bien tous les enjeux de
01:50finances publiques puisque vous siégez depuis quelques années maintenant à la Commission
01:54des finances de l'Assemblée.
01:55Enfin, Charles Haloncle, bonsoir.
01:57Bonsoir.
01:58Vous siégez, vous, à la Commission des affaires économiques, vous êtes député du groupe
02:01UDR, le groupe créé et présidé par Eric Ciotti et vous êtes même le porte-parole
02:05du groupe, je crois.
02:06Absolument.
02:07On va commencer avec le récap de Bruno Donnet.
02:20Bonsoir Bruno.
02:21Bonsoir Clément, bonsoir à tous.
02:22Bonsoir.
02:23On commence par un mur qui n'en finit pas de s'élever.
02:25Le mur de la dette, Clément, la cour des comptes vient de lui consacrer un rapport
02:29et son premier président l'a dit très clairement avant-hier, la situation est désormais hors
02:34de contrôle.
02:35Il y a eu des dérapages ces dernières années, je l'ai dit, les années 2023-2024 ont été
02:39pour la France, en matière de finances publiques, des années noires.
02:42Alors pour mieux mesurer la profondeur du noir, je vous ai listé ici quelques chiffres.
02:47La France a aujourd'hui une dette publique de 3300 milliards d'euros, ça représente
02:53113% de notre PIB et ça fait de nous le troisième plus mauvais élève de la zone euro, juste
03:00derrière la Grèce et l'Italie.
03:02Notre déficit public, lui, a atteint 5,8% du PIB alors qu'il devrait être, comme chez
03:08la plupart de nos voisins européens, à moins de 3%.
03:11Le déficit de la sécurité sociale était de 10 milliards d'euros en 2023, il est monté
03:17à 15 milliards en 2024 et il dépassera les 25 milliards en 2028.
03:23Enfin, nous remboursons cette année 67 milliards d'euros pour financer notre dette publique,
03:30ce qui veut dire que le seul poste des intérêts de la dette dépasse aujourd'hui le budget
03:36consacré à l'éducation.
03:37Bref, il y a urgence, urgence à réagir.
03:41Donc, ce que je préconise, ce que la Cour préconise, c'est un plan maîtrisé, organisé,
03:48sérieux de réduction des déficits et de contrôle de la dépense.
03:51Alors Bruno, comment François Bayrou a-t-il reçu ce message ?
03:545 sur 5 Clément, c'est un de ses chevaux de bataille depuis Matus-Alem, il a donc annoncé
03:59hier matin qu'il souhaitait faire 40 milliards d'euros d'économie dès 2026 et prévenu
04:05que personne n'échapperait aux potions amères.
04:08Le gouvernement va proposer aux Français un plan de retour à l'équilibre des finances
04:15publiques et ce plan de retour à l'équilibre des finances publiques, il va demander un
04:20effort à tous les Français.
04:22Alors, problème, personne n'a véritablement compris qu'elle allait être maintenant la
04:26feuille de route du Premier ministre, personne et surtout pas vous Frédéric Veltoux, vous
04:30qui lui avez adressé une question un peu piège sur ce sujet, c'était cet après-midi.
04:35Quelle est la méthode et le calendrier de travail pour la préparation des budgets
04:382026 associant la représentation nationale ?
04:41Voilà, alors le piège c'était bien sûr cette petite précision associant la représentation
04:48nationale car pour l'instant François Bayrou n'a pas évoqué le Parlement, il s'est contenté
04:53de parler des Français, des Français qu'il aimerait bien consulter par référendum.
04:57Je cherche la prise de conscience des Français, ma certitude que j'ai exprimée 100 fois
05:05c'est que ce sont des problèmes si graves que si on veut les résoudre contre les Français
05:11sans s'occuper d'eux, en leur imposant par l'épreuve de force, on n'y arrivera pas.
05:15Alors le hic c'est que le Rassemblement National et la France Insoumise ont d'ores et déjà
05:20prévenu qu'ils censureraient le gouvernement si les mesures envisagées pour réduire la
05:25taille du mur et de la dette ne leur plaisaient pas.
05:28Avant de convaincre les Français, François Bayrou va donc devoir séduire les députés
05:33En politique, cher Clément, c'est comme dans le bâtiment, c'est au pied du mur qu'on voit le maçon.
05:37Merci à vous, Bruno Donnet.
05:39On va rester sur cette image du maçon, si vous voulez bien Frédéric Balthous.
05:42Le problème c'est que le maçon François Bayrou n'était pas censé se présenter seul au pied du mur.
05:47Il y avait cette idée de co-construire le budget avec les parlementaires.
05:50Et vous avez poussé une sorte de coup de gueule cet après-midi lors des questions au gouvernement.
05:55Quand allons-nous nous mettre au travail ?
05:57Vous vous posez cette question vous-même au gouvernement, vous êtes inquiet ?
06:02Coup de gueule, non. J'ai pris le Premier ministre au bout.
06:06Il nous a dit au moment du vote du PLFSS et du PLF 2025...
06:12Alors PLFSS, projet de loi de financement de la sécurité sociale ?
06:15En février dernier, puisqu'il y a eu le petit décalage lié à la motion de censure et au changement de gouvernement.
06:23Et donc il nous a dit en février que dès le vote passé, on allait se mettre autour de la table pour travailler à un budget 2026
06:34qui, parce qu'il était compliqué, parce qu'il y avait déjà une équation budgétaire complexe,
06:41alors elle est encore plus difficile avec les derniers chiffres de la Cour des comptes, au moins sur la partie sécurité sociale,
06:49mais bon bref, parce que la situation était compliquée, on allait y travailler tous ensemble.
06:53Vous n'avez rien vu venir pour l'instant ?
06:55Février passé, mars passé, avril passé, mai est en train de se passer, on arrive maintenant début juin,
07:01et je regrette que pour l'instant on n'ait pas du tout d'informations sur la manière dont on pourrait envisager,
07:09ou on pourrait apporter des idées, en tout cas on pourrait essayer d'anticiper une discussion budgétaire qui va être difficile,
07:17parce que l'équation budgétaire va être difficile.
07:18Amélie Monchalin a évoqué une réunion fin juin avec les parlementaires, les collectivités locales,
07:22c'est trop tard pour vous si les annonces sont faites début juillet ?
07:26Écoutez, moi je suis peut-être un peu simple ou simplet, mais on m'avait dit en février qu'on y travaillerait dès mars,
07:33je le redis, on est maintenant bientôt début juin, donc c'est dommage parce que c'est du temps perdu qu'on ne rattrapera pas,
07:39et c'est du temps perdu qui ne nous permettra pas de porter des réformes structurelles,
07:45parce que le sujet c'est évidemment des économies, mais il faut aussi changer parfois la voilure du fonctionnement des politiques publiques
07:54pour arriver à dégager des économies, ce n'est pas des économies pour les économies,
07:58et ce que moi je veux éviter, c'est ce qu'on a connu par le passé, c'est des coups de rabot qui effectivement sont d'autant plus difficiles à faire passer
08:05qu'on ne change pas la voilure de l'action publique.
08:08Christine Pires-Bonhamo de cette méthode promise par François Bayrou, et peut-être aussi un mot de cette réunion fin juin,
08:14si vous y participez, quelles seraient les deux mesures fortes que vous aimeriez porter devant le gouvernement ?
08:21Alors sur la méthode et sur le fait de concerter, on peut être d'accord, enfin je ne vois pas quel est le parlementaire qui dirait
08:27qu'on ne veut pas s'associer et travailler, c'est quand même le rôle des parlementaires que de travailler sur le budget,
08:35que ce soit celui de la Sécurité sociale ou de l'Etat.
08:38C'est pour ça que je ne crois pas du tout au référendum sur une telle...
08:42On va poser quoi comme question ? Est-ce que vous voulez payer plus d'impôts ? Ce n'est pas la peine, la réponse ça va être non.
08:46Est-ce que vous voulez garder votre modèle social ? La réponse ça va être oui.
08:49Référendum sur une trajectoire budgétaire peut-être ?
08:52Oublions tout ça, la concertation, la co-construction, pourquoi pas, nous on y était prêts,
08:59mais je rejoins totalement monsieur Valtho, mon collègue, parce qu'on est déjà beaucoup trop tard,
09:05on aurait dû se mettre autour de la table dès le mois de mars parce qu'on sait que le budget va être très compliqué à construire.
09:12C'est-à-dire que les choix se feront sans vous ?
09:14J'ai peur que les choix soient en train de se faire sans nous et qu'on amuse la galerie pour le dire,
09:20en créant des groupes de travail sur ambition transport, en créant la CFDT, la conférence de financement des collectivités territoriales,
09:27en créant des groupes de travail sur les finances publiques, enfin, on amuse la galerie.
09:32Deux mesures que vous aimeriez vous porter devant le gouvernement ? Deux mesures portées par l'EPS ?
09:37Alors, moi, je ne suis pas de celles qui disent qu'il ne faut pas faire d'économie, même au Parti Socialiste,
09:42et je pense que les économies, elles peuvent se faire notamment quand vous avez, par exemple,
09:49des dépenses fiscales documentées tant sur leur efficacité,
09:56c'est-à-dire que vous avez des dépenses fiscales qui sont documentées par la Cour des comptes,
10:00par le Comité d'analyse économique, par le Conseil des prélèvements obligatoires,
10:04et qui vous disent, voilà, cette niche fiscale-là...
10:06Des dépenses fiscales, pour les Français, crédit d'impôt, on peut dire ça ?
10:09En fait, c'est une aide, enfin, c'est un impôt qui n'est pas payé,
10:13donc une recette qui ne rentre pas dans les caisses de l'Etat ou de la Sécurité sociale.
10:17On a 467 niches fiscales, donc on en a beaucoup,
10:21et beaucoup sont, à mon avis, on vit au-dessus de nos moyens,
10:26et donc quand on a de la documentation que c'est prouvé que ça ne marche pas,
10:33moi je vais vous prendre un exemple, est-ce que les Français savent,
10:35parce qu'on peut dire les choses aux Français,
10:37est-ce que les Français savent qu'on donne 800 millions d'euros pour des travaux de jardinerie,
10:42pour couper votre haie, 800 millions d'euros,
10:45et qu'on n'est pas capable, à côté de ça, de donner un crédit d'impôt aux gens qui sont dans les EHPAD
10:50pour les aider à payer leur reste à charge ?
10:52Personne ne sait ça, mais on peut dire la vérité des choses aux Français.
10:55Charles Alloncle, je vous pose la même question,
10:57à la fois sur cette méthode qui a été proposée et la réalité,
11:00ce que vous constatez aujourd'hui, et deux mesures fortes que vous aimeriez porter.
11:04Je rejoins les propos de mes collègues, qu'ils ont pu expliquer précédemment.
11:09Le but de la représentation nationale, c'est d'être associé à ces débats,
11:13c'est un débat qui est extrêmement fondamental,
11:15c'est celui de la solvabilité de l'Etat,
11:17et c'est celui de la pérennité, au fond, de nos finances publiques.
11:21Un chiffre qui n'a pas été évoqué, mais je pense, pour restituer un peu le débat pour les Français,
11:25le coût de la dette, simplement le remboursement des intérêts, est en train...
11:29Ça a été évoqué par Bruno Donnet.
11:31Sur la trajectoire, on est à à peu près une soixantaine de milliards,
11:35ce qui correspond au deuxième budget de l'Etat après l'éducation nationale,
11:38et dans à peu près trois ou quatre ans, on sera à près de 110 milliards d'euros par an,
11:44et pour donner un ordre d'idée, c'est l'équivalent du budget de l'éducation nationale
11:47et du budget de la défense.
11:49Donc en fait, on est véritablement au pied du mur,
11:51et si on ne traite pas le problème à sa source,
11:53si on ne réduit pas la dépense publique,
11:55la trajectoire sera évidemment catastrophique.
11:57Alors qu'est-ce qu'on fait ?
11:59Une fois qu'on a posé le diagnostic, une fois que tous ces gens
12:01semblent découvrir l'ampleur de la faillite,
12:05on a à l'UDR expliqué un certain nombre de propositions,
12:09une trentaine, qui conduisent à une réduction des dépenses publiques de 120 milliards,
12:13parce que pour nous, ce n'est pas aux Français de faire des efforts...
12:16On va en retenir une ou deux, si vous le voulez bien, et rapidement, en quelques mots.
12:19Ce n'est pas aux Français de faire des efforts, comme peut l'expliquer François Bayrou,
12:21c'est avant tout à l'Etat de se serrer la ceinture,
12:23c'est aux collectivités territoriales de se rationaliser, de se réorganiser.
12:29C'est un certain nombre de dépenses que les Français n'approuvent plus aujourd'hui,
12:32comme les dépenses de développement, les 15 milliards qu'on peut donner
12:36à certains pays qui sont mieux lotis que nous,
12:38c'est les dépenses d'immigration.
12:40Au coût de l'immigration, près de 60 milliards,
12:42il y a un certain nombre de postes de dépenses qu'il est urgent de réformer
12:45pour sauver les finances publiques.
12:47Vous le disiez, vous ne voulez pas de coups de rabot,
12:49je crois que François Bayrou non plus, c'est pour ça qu'il a demandé à chaque ministère
12:52de lui présenter une remise à plat des dépenses publiques, mission par mission.
12:56Tout cela, on l'imagine, c'est pour engager une réforme de l'Etat.
13:00Quelles sont les pistes à explorer, selon vous, dans cette direction d'une réforme de l'Etat ?
13:06Il y en a beaucoup, mais pardon, sur la méthode,
13:08je vais peut-être vous paraître un peu sévère.
13:11Demandez à ceux qui doivent se réformer de trouver eux-mêmes des pistes
13:16pour savoir si c'est plutôt le petit doigt droit ou je ne sais pas quelle partie
13:23qu'il faut se couper pour faire des économies.
13:25On va arriver...
13:26Ça ne marchera pas ?
13:27Ça ne marchera pas.
13:28Et c'est dommage que, vous voyez, dans ce dialogue avec le Parlement,
13:32les choses ne soient pas faites comme lui-même avait dit qu'elles pourraient se faire.
13:36Parce qu'effectivement, c'est bien de demander aux ministères
13:39de trouver eux-mêmes des sources d'économies,
13:41mais pour savoir ce que ça va donner, pour anticiper ou sentir ce que ça va donner,
13:48on va arriver à des économies de queue de cerise.
13:51Et vous, vous les voyez où, les pistes d'économies ?
13:55Le problème, c'est qu'on va arriver à l'été pour un budget qui doit être remis en septembre.
13:59Donc, les réformes de structure, on ne pourra plus les faire.
14:02Parce que, finalement, ce qu'on ne prépare pas en février, mars, avril,
14:05ce qu'on ne vote pas dans la loi de manière à ce que ça soit mis en oeuvre
14:08à partir du 1er janvier prochain, ça sera trop tard pour le faire.
14:11Et donc, finalement, on va continuer à travailler à voileurs identiques.
14:15C'est ce que je disais.
14:16Je vais prendre un exemple.
14:17On sait que dans notre système de santé, il y a à peu près 20 % de dépenses inutiles,
14:23qui sont des dépenses qui sont des redondances,
14:27qui sont des examens qu'on refait, etc.
14:30Mais à l'arrivée, ça fait des milliards.
14:32Et donc, il faudrait simplement que l'assurance maladie soit missionnée
14:36pour faire une chasse, mais terrible,
14:38parce qu'aujourd'hui, elle a les moyens,
14:40c'est elle qui est la tour de contrôle des dépenses de santé,
14:43elle a les moyens, effectivement, d'arriver à rationaliser un peu ces dépenses de santé.
14:48Mais pour ça, il ne faut pas s'y prendre au dernier moment,
14:50parce qu'on ne peut plus rien faire.
14:52Alors, moi, j'aimerais bien passer en revue quelques propositions
14:56qui ont été lancées comme cela, notamment par des ministres,
14:59peut-être sous forme de ballon d'essai,
15:01et puis vous me répondez oui, non, et pourquoi.
15:03Il y a eu l'idée de supprimer l'abattement fiscal de 10 % sur le revenu des retraités,
15:08là-dessus, Christine Pires-Bonne, par exemple.
15:10Alors, moi, je ne suis pas d'accord avec cette proposition.
15:13Je pense que ce n'est pas une bonne façon que de dire
15:18qu'on va prendre les retraités.
15:19Ça veut dire quoi, un retraité ?
15:20Quel est le point commun entre un retraité qui gagne 1 000 euros de retraite
15:23et celui qui gagne 10 000 euros ?
15:25Donc, moi, je dis...
15:26Parce que ça, ça ne concerne que ceux qui payent l'impôt sur le revenu, on est d'accord.
15:29Oui, on est bien d'accord.
15:30Moi, je dis que les retraités qui gagnent, effectivement,
15:34des retraites très importantes pourraient être mis à contribution,
15:38comme les très hauts revenus,
15:39comme les grandes entreprises qui ont distribué des dividendes.
15:42On a atteint...
15:43C'est bien simple, dans ce pays, il y a quand même un problème.
15:45L'année dernière, si on prend 2024, on a atteint deux pics.
15:49Un pic de dividendes jamais atteints,
15:5198 milliards pour les entreprises du CAC 40,
15:5498 milliards.
15:55Un autre pic jamais atteint, c'est celui du nombre de pauvres.
15:59On a plus de 9 millions de Français qui sont sous le seuil de pauvreté.
16:03Et de la dépense publique, troisième pic.
16:05Donc, j'en ai...
16:06Je prends ces deux-là.
16:07Parce que...
16:08Pour vous, c'est du côté des versements de dividendes aux actionnaires
16:11qu'il faut aller...
16:12Je pense qu'il faut rééquilibrer.
16:13D'une façon générale, je pense qu'il faut rééquilibrer
16:15les recettes qui pèsent sur le travail,
16:18sur les revenus,
16:20et celles qui pèsent sur le capital.
16:22Il faut vraiment qu'on ait un rééquilibrage,
16:24parce que la balance, elle penche, malheureusement.
16:26Oui, le travail ne paye pas assez.
16:28Je peux être d'accord avec François Bayrou
16:30quand il dit que le travail ne paye plus.
16:32Ou avec M. Fouché, quand il le dit.
16:35Je suis d'accord, il faut une fiche de paye
16:37avec un net beaucoup plus important.
16:39Après, je pense qu'il faut mettre à contribution ceux qui le peuvent.
16:42Et quand il dit qu'on va mettre à contribution tout le monde,
16:45je dis que ce n'est pas possible.
16:46Les 9 millions de pauvres, vous ne pouvez pas les mettre à contribution.
16:49A l'année dernière, on était d'accord pour indexer...
16:52Il y a eu un débat sur l'indexation des retraites
16:55pour l'année 2025.
16:57On était...
16:58Sur un gel partiel ?
17:00Sur un gel partiel pour au moins les retraites les plus importantes.
17:02On aurait pu très bien dire que les retraites les plus importantes,
17:05à partir du moment où elles avaient augmenté de 4 % l'année précédente,
17:08ou plus de 4 % l'année précédente,
17:10on pouvait avoir une allée blanche pour les fortes retraites,
17:12pas les petites retraites.
17:13Mais distinguer, vous voyez, les petites retraites
17:16des retraités qui, effectivement, ont une certaine aisance.
17:18Charles Alloncle, c'est 10 % d'abattement sur les retraites.
17:22Il y a eu d'autres... Je vous en cite d'autres.
17:24Supprimer ou fusionner un tiers des agences et des opérateurs de l'Etat.
17:27Imposer une année blanche aux collectivités locales,
17:30visiblement, c'est sur la table, ça fait partie du débat.
17:33Une année blanche, ça veut dire qu'on ne revalorise pas
17:36les dépenses des collectivités locales au rythme de l'inflation.
17:40Sur tous ces points, vous prenez quoi ?
17:42Ce qui est intéressant, c'est que dans le cadre
17:44du projet de loi de simplification dont on a débattu,
17:46dont on est en train de débattre en ce moment dans l'hémicycle,
17:49j'avais proposé de déposer un amendement
17:51pour supprimer et fusionner un tiers
17:53de ces 1 200 agences et autorités
17:55qui nous coûtent à peu près 100 milliards chaque année
17:57et qui emploient 400 000 fonctionnaires,
17:59parfois en doublant avec certaines compétences de l'Etat.
18:01Vous en dégagez quelles économies ?
18:03Au prémice, on en dégage à peu près, je vous le dis,
18:06si on en réduit un tiers, on peut en dégager
18:08à peu près 20 ou 30 milliards,
18:10mais il faut plutôt être conservateur dans les chiffres.
18:12Vous êtes d'accord, autour de cette table, sur ces chiffres,
18:14vous avez les mêmes, vous avez travaillé...
18:16Mais c'est des chiffres qui ont été rendus
18:18par un certain nombre d'agences,
18:20d'organismes tout à fait publics,
18:22ce n'est pas des chiffres partisans.
18:24Ce qui est intéressant d'observer, c'est qu'au début des débats,
18:26le gouvernement s'est prononcé contre,
18:28et à la fin des débats, Mme Améline Monchalin
18:30nous a expliqué qu'elle allait procéder
18:32à cette fusion d'un tiers de ces autorités.
18:35Au-delà de ça, pour répondre à votre question,
18:37nous, à l'UDR, et je pense aussi
18:39au Rassemblement national, puisqu'on est dans une démarche
18:41d'alliance à l'aube de la préparation de ce budget,
18:43tout ce qui contribuera à
18:45alourdir le fardeau fiscal
18:47sur les Français, sur les entreprises,
18:49ce sera pour nous une ligne rouge,
18:51parce qu'on est dans le pays le plus fiscalisé
18:53du monde.
18:55Il y a un troisième pic que vous avez oublié de citer,
18:57et je suis d'accord avec vous sur les constats,
18:59on n'a jamais eu autant de 102 000 silles fixes,
19:01par exemple, dans les rues, mais on est le pays
19:03qui avons le taux de dépense publique
19:05par rapport au PIB le plus élevé.
19:07Donc, ça montre une chose, c'est que
19:09notre efficacité publique
19:11est totalement dysfonctionnelle, donc il y a un énorme
19:13travail à faire sur la réforme de l'Etat,
19:15sur la suppression de cet arrêt au page de comités,
19:17d'agences qui interviennent en doublon,
19:19sur ce millefeuille territorial
19:21qui coûte chaque année à peu près
19:23une dizaine de milliards d'euros.
19:25Avant de serrer la ceinture des retraités,
19:27avant de demander des efforts
19:29aux travailleurs pour qui le travail ne paye plus,
19:31et c'est bien le problème,
19:33tout le coeur du mal français,
19:35réduisons d'abord le train de vie de l'Etat,
19:37il y a des dizaines de milliards
19:39qu'on peut économiser avant d'aller s'adresser aux retraités,
19:41avant d'aller s'adresser à ceux qui travaillent,
19:43et ceux qui ont mérité leur pension de retraite.
19:45Un mot peut-être sur cette année blanche
19:47qui serait sur la table
19:49pour les collectivités locales, Christine Pires-Bonne,
19:51l'Etat peut se permettre de faire ça
19:53sans se l'appliquer à lui-même, vous pensez ?
19:55L'Etat doit d'abord recréer la confiance
19:57entre les élus locaux
19:59et l'Etat, sinon
20:01il n'y arrivera pas.
20:03Il n'y a rien sans confiance,
20:05et l'échec, jusqu'à présent,
20:07avec le dialogue avec les collectivités
20:09territoriales, il est là.
20:11Les collectivités territoriales, je pense
20:13qu'elles sont prêtes à prendre leur part de l'effort
20:15comme tous les autres,
20:17à condition, encore une fois,
20:19que ce soit un effort qui est juste.
20:21On demande plus à ceux qui peuvent,
20:23on demande moins à ceux...
20:25Entre communes,
20:27entre départements, entre régions,
20:29vous savez très bien qu'ils ne sont pas tous
20:31dans la même situation. Aujourd'hui,
20:33les collectivités les plus en difficulté,
20:35ce sont les départements, mais il y a des départements
20:37qui vont très bien, il y a des régions qui vont mieux que d'autres,
20:39il y a des communes qui vont mieux que d'autres,
20:41donc ça demande à faire de la dentelle
20:43et pas de coups de rabot
20:45comme ça a pu être fait par le passé.
20:47Un mot peut-être de ce qu'on voit dans l'actualité
20:49aujourd'hui, la mobilisation des chauffeurs
20:51de taxi, avec ces économies
20:53qui sont voulues sur le transport
20:55sanitaire, on parle de 100 à 150
20:57millions d'euros d'économies,
20:59vous voyez la mobilisation des chauffeurs
21:01de taxi, vous voyez
21:03l'intergiversation du gouvernement,
21:05ça vous inspire quoi quand on sait
21:07qu'il va falloir dégager 40 milliards d'économies ?
21:09Écoutez, c'est une dépense,
21:11les transports sanitaires qui ont augmenté de 40 %
21:13en 3-4 ans. Il y a un sujet.
21:15Il y a un sujet.
21:17Vous voyez les difficultés que François Bayrou a imposées,
21:19etc., et que, effectivement,
21:21il y a peut-être plus de kilomètres à faire
21:23pour aller se faire soigner,
21:25et encore. Enfin, il y a
21:27un sujet structurel. Ça veut dire que
21:29le modèle de financement des taxis
21:31sur le plan sanitaire,
21:33la part sanitaire de l'activité
21:35des taxis est à revoir.
21:37On ne peut pas constater
21:39une évolution à ce point-là.
21:41Après, je ne sais pas
21:43ce qui se dit dans les discussions.
21:45Si on commence à avoir la main qui tremble pour
21:47150 millions, qu'est-ce que ça va être quand les
21:4940 milliards, il va falloir poser
21:51quelques dizaines de milliards d'euros
21:53d'économies. Je pense qu'il ne faut pas avoir
21:55la main qui tremble. Je ne suis pas dans
21:57les discussions, je ne veux pas jeter d'huile sur le feu,
21:59mais je pense que personne ne peut
22:01défendre une dépense qui augmente
22:03de 40 %
22:05en trois ans, alors que,
22:07sincèrement, je ne suis pas sûr que ça se justifie
22:09sur le plan sanitaire.
22:11Vous voulez intervenir ?
22:13J'ai cru que vous faisiez un signe.
22:15Non, pas du tout, pardon.
22:17On va peut-être prendre ce débat sur le budget
22:19de la Sécurité sociale sous un angle plus global
22:21avec le rapport de la Cour des Comptes qui a été
22:23remis en début de semaine,
22:25rapport alarmiste.
22:27Pierre Moscovici craint une crise de liquidité,
22:29ça veut dire quoi, concrètement ?
22:31La crise de liquidité,
22:33c'est la difficulté pour l'ACOS,
22:35l'agence de l'Etat qui emprunte
22:37aussi sur les marchés financiers,
22:39de ne plus pouvoir emprunter
22:41les sommes
22:43nécessaires à l'équilibre,
22:45même pas l'équilibre, car notre système est déséquilibré,
22:47mais au financement des dépenses
22:49sociales, donc des prestations,
22:51que ce soit...
22:53Une banqueroute, on n'en est pas là.
22:55Mais disons qu'on arrive à des niveaux
22:57qui doivent nous interroger. Il y a un problème
22:59de soutenabilité de la dette sociale.
23:01On ne peut pas non plus faire grossir
23:03la dette sociale et faire dépendre la Sécurité sociale
23:05d'argent
23:07qu'on va chercher sur les marchés financiers.
23:09Il avance plusieurs leviers
23:11pour réduire la déficit de la Sécurité sociale
23:13et notamment agir sur les allégements
23:15de cotisations sociales. Elles ont atteint
23:17plus de 77 milliards d'euros en 2023.
23:19Il faut mieux les calibrer.
23:21Il y a des économies à faire
23:23de ce côté-là, des nouvelles recettes
23:25à récupérer.
23:27C'est comme les niches fiscales de tout à l'heure.
23:29C'est-à-dire
23:31qu'il y a peut-être des choses à réétudier
23:33dont l'efficacité économique
23:35est à réinterroger.
23:37Est-ce que sur les près de 80 milliards,
23:39ce sont 17 milliards d'euros
23:41des générations de cotisations sociales,
23:43tout concourt
23:45à la compétitivité
23:47de l'économie française ?
23:49Est-ce qu'il n'y a pas des exonérations
23:51qui ont été décidées il y a quelques années
23:53qui sont peut-être aujourd'hui moins nécessaires ?
23:55Est-ce qu'il n'y a pas à sortir de certaines d'entre elles ?
23:57Vous êtes prête ?
23:59Allez-vous dans ce sens-là ?
24:01Absolument.
24:03Les niches sociales
24:05pèsent 77 milliards d'euros.
24:07Là aussi,
24:09on vit au-dessus de nos moyens.
24:11Le problème
24:13de la dette et du déficit,
24:15ce n'est pas qu'une question de dépenses publiques,
24:17c'est d'abord et avant tout une question de recettes.
24:19Quand vous diminuez les recettes,
24:21un enfant de 3 ans peut comprendre,
24:23quand vous diminuez les recettes
24:25de l'Etat ou de la sécurité sociale,
24:27si vous avez le même niveau
24:29de dépenses, déjà le même niveau,
24:31vous creusez le déficit.
24:33Si, en plus, vous avez des dépenses qui augmentent,
24:35vous le creusez d'autant plus.
24:37C'est un peu touché à l'ADN de la politique économique
24:39d'Emmanuel Macron depuis 2017,
24:41la politique de l'offre.
24:43Je pense que le niveau de la dette est tel
24:45qu'on ne doit pas avoir de tabou.
24:47Il y a des questions qu'il faut se reposer.
24:49Il ne doit pas y avoir de dogme.
24:51Réinterroger l'efficacité économique
24:53de ces près de 80 milliards d'euros
24:55d'exonération de cotisations sociales,
24:57ce n'est pas un gros mot.
24:59Pour moi, c'est un gros mot,
25:01parce qu'on est dans le pays
25:03où le travail ne paye plus.
25:05Pour vous donner une petite comparaison,
25:07à l'époque de nos grands-parents
25:09dans les Trente Glorieuses,
25:11le niveau de vie quand on travaillait
25:13et qu'on était salarié progressait
25:15de 5 % par an.
25:17Aujourd'hui, c'est un peu moins de 1 %,
25:19c'est 0,8 % par an.
25:21Pour doubler son niveau de vie,
25:23en travaillant, il mettait à peu près 15 ans.
25:25Aujourd'hui, c'est 85 ans
25:27pour doubler son niveau de vie.
25:29Aujourd'hui, en France,
25:31c'est une exception culturelle dont on se défend.
25:33Le travail ne paye plus,
25:35ce qui fait que beaucoup d'entre nous
25:37nous disent qu'ils n'ont aucun intérêt
25:39à aller travailler.
25:41Il y a une piste.
25:43Ce n'est pas parce qu'on donne
25:45des exonérations sociales aux entreprises
25:47que ça permettra du pouvoir d'emploi.
25:49Gardons-nous fort.
25:51Il y a une piste.
25:53J'ai une piste à vous proposer
25:55pour améliorer la rémunération des salariés.
25:57La TVA sociale.
25:59Ce chantier a été mis dans le débat public
26:01par d'abord Emmanuel Macron,
26:03puis François Bayrou.
26:05L'objectif officiellement n'est pas
26:07de remplir les caisses de l'Etat.
26:09On voit les explications
26:11de Baptiste Garguil-Chartier.
26:37Mais concrètement, de quoi s'agit-il ?
26:39Augmenter le taux de la TVA pour affecter
26:41ses recettes au budget de la Sécurité sociale
26:43en contrepartie d'une baisse
26:45des cotisations patronales et salariales.
26:47Mesure jugée
26:49peu pertinente par certains économistes.
26:51Le redressement des comptes publics
26:53va demander des efforts,
26:55jouer avec des transfers fiscaux
26:57à ce moment-là,
26:59sachant que le gain de compétitivité
27:01est quand même assez discutable.
27:03Ce n'est pas comme ça qu'on va réindustrialiser la France.
27:05C'est pas forcément le bon moment.
27:07Selon les dernières études,
27:09une hausse d'un point sur tous les taux
27:11pourrait générer 13 milliards d'euros.
27:13Concernant les produits de première nécessité,
27:15ces derniers pourraient être exemptés
27:17de cette hausse.
27:19Pour que ce soit plus juste
27:21et que ça n'affecte pas les populations,
27:23les catégories sociales les plus pauvres,
27:25on peut essayer de faire baisser
27:27la TVA des produits de première nécessité,
27:29ce qui est déjà le cas.
27:31Mais on peut étendre ce panel d'articles
27:33sur les produits.
27:35A l'Assemblée, les oppositions font de cette mesure
27:37une ligne rouge, mais le Premier ministre
27:39l'a rappelé, l'a balayé pour l'heure
27:41dans le camp des partenaires sociaux.
27:43Frédéric Walter, en quelques mots,
27:45pour, contre la TVA sociale,
27:47et pour faire quoi, concrètement ?
27:49Est-ce que c'est pour améliorer la compétitivité
27:51des entreprises ou pour améliorer
27:53le net sur la fiche de paye des salariés
27:55pour faire en sorte que le travail paye mieux ?
27:57Très vite. Il n'y a plus de questions taboues.
27:59Le sujet de la TVA sociale, il faut la regarder de près.
28:01C'est un mandat politique très clair.
28:03Ce n'est pas maintenant, dans une Assemblée éclatée,
28:05dans un quinquennat qui est plutôt
28:07en train de se terminer, à deux ans
28:09des élections présidentielles.
28:11Par contre, sa loi est un sujet
28:13de manière à ce que celui qui l'emportera
28:15ait un mandat clair sur le financement
28:17du système social.
28:19Comment on finance et on pérennise
28:21ce système social ? La TVA sociale peut être
28:23un sujet, mais pour ça...
28:25C'est une tireuse bonne.
28:27Totalement contre. La TVA sociale,
28:29qui porte très mal son nom, c'est l'impôt
28:31le plus régressif. Je me suis amusée à faire un calcul.
28:33Vous gagnez 1400 euros net,
28:35vous achetez 300 euros pour de l'alimentation,
28:37vous avez 150 euros d'électricité
28:39et 200 euros pour du carburant.
28:41Vous payez 74 euros de TVA.
28:43Vous prenez un salaire de 3000 euros,
28:45vous paierez 74 euros de TVA.
28:47La même chose. Dans un cas,
28:49c'est 5 % de votre salaire,
28:51dans l'autre, c'est 2,4 %.
28:53C'est l'impôt le plus injuste
28:55qui soit, donc totalement contre.
28:57Nous, notre ligne rouge est claire.
28:59On s'opposera à toute hausse
29:01d'impôts ou de taxes supplémentaires.
29:03La TVA sociale en est une.
29:05Je rejoins un peu les arguments
29:07qui ont été cités. Un, c'est un effet
29:09inflationniste, parce que le jour où vous augmentez
29:11la TVA, derrière, vous allez augmenter
29:13nécessairement les prix. Deux, ça pèse
29:15sur les plus modestes, puisqu'on sait que la proportion
29:17liée à la consommation chez les plus modestes
29:19est plus importante que
29:21chez les personnes plus aisées.
29:23Après, ça profite surtout à des pays
29:25qui ont une capacité
29:27exportatrice, notamment l'Allemagne,
29:29plutôt qu'une demande intérieure
29:31plutôt que la France, qui est bien plus forte.
29:33Donc, on voit que c'est une solution
29:35de fiscalité alourdie,
29:37qui ne correspond pas à la France et qui serait, je pense,
29:39néfaste, notamment pour les plus précaires.
29:41On nous dit qu'il y a les produits
29:43de première nécessité, l'alimentation, c'est un taux de 5,5,
29:45on n'y touche pas, d'accord ?
29:47Mais l'électricité, sur la consommation d'électricité,
29:49c'est pas 5,5, c'est 20 %.
29:51Sur les transports, sur le carburant, c'est pas 5,5,
29:53c'est 20 %, donc,
29:55c'est vraiment une mesure antisociale.
29:57D'un mot, François Bayrou,
29:59est-il l'homme de la situation pour
30:01mettre en place ce budget, ces 40 milliards d'euros d'économie,
30:03ou est-ce que vous préfériez
30:05une motion de censure avant l'été,
30:07changer de Premier ministre pour
30:09repartir de zéro sur ce budget ?
30:11Alors, moi,
30:13pour diverses raisons que j'ai pas le temps
30:15de développer ici, je pense que
30:17François Bayrou n'est pas l'homme de la situation
30:19et qu'on gagnerait un remaniement.
30:21Un remaniement, j'ai bien dit un remaniement,
30:23c'est-à-dire un autre Premier ministre.
30:25Mais pas un autre gouvernement, forcément.
30:27On repartirait pas de zéro.
30:29Pas forcément un autre gouvernement,
30:31parce qu'on est dans des périodes,
30:33quand vous avez une censure, vous avez aussi
30:35des conséquences sur l'économie.
30:37Charles Allonc, vous ?
30:39A l'évidence, je pense que c'est absolument pas l'homme de la situation.
30:41Quand je l'entends dire aux Français
30:43avec une forme de morgue qui m'est insupportable,
30:45qu'il est temps que les Français fassent des efforts,
30:47alors que ça fait des décennies
30:49que les Français se serrent la ceinture
30:51plutôt que de réaliser des réformes structurelles,
30:53du train de vie de l'Etat,
30:55du millefeuille territorial, de la simplification normative,
30:57en fait, je me dis que cet homme
30:59qui est à Matignon est parfaitement déconnecté,
31:01n'a rien compris aux réalités budgétaires
31:03et qu'il est temps qu'il ouvre un peu les yeux.
31:05Et quand je vois, en plus,
31:07que les dépenses publiques
31:09continuent d'augmenter en 2025,
31:11elles auront augmenté de 40 milliards.
31:13Et pourtant, il y a certains groupes,
31:15notamment à gauche, qui veulent nous expliquer
31:17qu'on est dans une cure austéritaire,
31:19que la France connaît une sorte de serrage de ceinture
31:21qui est insupportable.
31:23Tout ça pour dire que je pense qu'il est temps
31:25de changer de Premier ministre, de revenir aux urnes.
31:27Le référendum peut être un bon outil,
31:29mais la dissolution me paraît indispensable.
31:31Y a des questions qui se posent ouvertement
31:33dans votre propre camp
31:35sur François Bayrou, sur le rythme auquel
31:37il avance, sur les dossiers.
31:39Certains s'agacent, ils ont l'impression que ça n'avance pas.
31:43La question que j'ai posée cet après-midi
31:45sur ce qu'elle veut dire...
31:47Disons que par gros temps,
31:49il faut vraiment que le capitaine
31:51soit quelqu'un qui tienne fermement la barre.
31:53Et c'est pas suffisamment le cas
31:55pour vous aujourd'hui ?
31:57En tout cas, il y a un bon gouvernement,
31:59et je pense qu'il faut quelqu'un qui tienne
32:01fermement la barre, parce que ça secoue,
32:03et les chiffres qu'on évoque depuis tout à l'heure
32:05montrent qu'effectivement, la situation
32:07est délicate.
32:09Merci à tous les trois d'être venus débattre
32:11de ces enjeux budgétaires sur le plateau
32:13de Savourgarde.
32:15On les croise dans nos villes, sans rien connaître
32:17de leurs histoires, de leur parcours,
32:19des risques qu'ils ont pris pour rejoindre notre territoire.
32:21On va s'intéresser à présent
32:23aux réfugiés, avec nos deux invités,
32:25Najat Vallaud-Belkacem et Benjamin Michelet.
32:27Bonsoir à tous les deux.
32:29Vous êtes engagés chacun, à votre façon,
32:31dans l'accueil des réfugiés,
32:33et vous leur consacrez un livre,
32:35ce qu'on ne nous dit pas,
32:37les explications d'Hélène Bonduelle.
32:40Si on vous invite, Najat Vallaud-Belkacem
32:42et Benjamin Michelet,
32:44c'est pour évoquer avec vous
32:46la situation des réfugiés,
32:48à travers ce livre que vous avez co-écrit,
32:50Réfugiés, ce qu'on ne nous dit pas.
32:52À l'heure où l'Europe
32:54réforme sa politique migratoire...
32:56Je me félicite qu'en matière, par exemple,
32:58de directive retour,
33:00qui va devenir le règlement retour,
33:02enfin, on pourra éloigner
33:04de façon forcée
33:06un certain nombre d'étrangers qui n'ont plus rien à faire
33:08et à voir sur notre territoire.
33:10Vous, la présidente
33:12de France Terre d'Asile,
33:14et l'économiste spécialiste des déplacés,
33:16vous dénoncez d'emblée
33:18des confusions volontairement entretenues,
33:20dites-vous, entre l'asile
33:22et l'immigration.
33:24C'est trop facile, comme on le fait depuis de nombreuses années,
33:26de tout mélanger dans un même sac,
33:28les étudiants internationaux, les travailleurs étrangers,
33:30les couples mixtes,
33:32les demandeurs d'asile.
33:34Ça fait des très gros chiffres,
33:36des images uniques
33:38du pauvre air en hayon,
33:40à gare, sur un bateau de fortune,
33:42sur le point de faire naufrage.
33:44Et on dit que ce sont des migrants
33:46et les chiffres sont trop importants.
33:48Et vous les rappelez, les chiffres, justement.
33:50L'Europe accorde en moyenne la moitié
33:52des demandes d'asile en première instance.
33:54La France, 30%,
33:56quand l'Allemagne en accorde 60%.
33:58Vous entendez également
34:00démonter les préjugés sur les dépenses
34:02publiques liées aux demandeurs d'asile.
34:04Les réfugiés, écrivez-vous,
34:06coûtent plus qu'ils ne rapportent
34:08à la société française
34:10seulement lorsqu'ils ne sont pas intégrés
34:12économiquement.
34:14Alors dites-vous pourquoi ne pas lever
34:16les barrières à l'entrée dans la vie active.
34:18À vous, maintenant,
34:20de nous développer vos différentes pistes
34:22pour y parvenir.
34:24Bonsoir, Najat Vallaud-Belkacem.
34:26Je rappelle que vous êtes, entre autres,
34:28présidente de France Terre d'Asile.
34:30Et bonsoir, Benjamin Michelet.
34:32Vous êtes économiste spécialiste
34:34des déplacés forcés, c'est-à-dire
34:36les personnes qui vont sur les routes
34:38de la migration.
34:40Ils sont déplacés de force,
34:42contrairement à la migration choisie
34:44ou la migration volontaire.
34:46Et vous êtes juge-assesseur
34:48à la Cour nationale du droit d'asile.
34:50Absolument.
34:52Pourquoi avez-vous écrit ce livre ?
34:54Qui veut répondre à cette question ?
34:56Je peux commencer
34:58et Benjamin complétera.
35:00On a écrit ce livre à deux
35:02parce qu'on partageait un même constat.
35:04C'est celui de la grande confusion
35:06qui règne dès qu'on parle
35:08des politiques migratoires en France
35:10et un peu en Europe aussi, évidemment.
35:12On a l'impression
35:14qu'on fait exprès.
35:16Les populistes en particulier,
35:18les hostiles à l'immigration,
35:20font exprès de tout mélanger.
35:22Ça donne un sentiment de submersion,
35:24de choses qu'on ne maîtrise pas,
35:26alors qu'il y a deux sujets très distincts
35:28et qu'on essaie de reclarifier dans le livre.
35:30C'est-à-dire que l'asile, vous insistez,
35:32ne fait pas partie
35:34de la politique migratoire.
35:36Absolument. La politique migratoire,
35:38en quelque sorte,
35:40l'Etat
35:42est tout à fait légitime
35:44à considérer son intérêt,
35:46ses besoins,
35:48et donc à réguler cette politique migratoire,
35:50à dire que j'ai besoin de plus d'étudiants étrangers,
35:52de moins de travailleurs
35:54qualifiés dans tel domaine, etc.
35:56Tout ça est complètement légitime.
35:58En revanche, il est une spécificité
36:00aux droits d'asile, les demandeurs d'asile,
36:02les déplacés forcés, qui est que
36:04depuis des décennies,
36:06presque des siècles, en réalité,
36:08s'est construit progressivement un droit protecteur
36:10pour éviter que des gens qui fuient
36:12un chez-eux invivable du fait de la persécution
36:14ou des conflits ne soient laissés
36:16à la porte et puissent au moins
36:18voir leurs demandes instruites.
36:20On va peut-être repartir de la base,
36:22pour aider les gens à bien comprendre
36:24le distinguo. C'est quoi un demandeur d'asile ?
36:26Quelles sont les conditions pour obtenir
36:28le statut de réfugié ? Quelles sont aussi
36:30les obligations pour un Etat quand il a
36:32une personne qui remplit ses conditions
36:34face à lui ?
36:36Et on parle de combien de personnes
36:38en France aujourd'hui ?
36:40C'est une très bonne question. En France,
36:42à l'heure actuelle, en 2024, les derniers chiffres
36:44consolidés qu'on a, c'est à peu près 130 000 demandes
36:46qui ont été introduites.
36:48C'est des demandeurs d'asile.
36:50C'est des personnes qui introduisent
36:52une demande auprès d'un Etat
36:54qui est capable d'avoir une politique d'asile
36:56afin de se voir reconnaître
36:58une forme de protection internationale.
37:00Dans ces protections internationales,
37:02on a le statut de réfugié
37:04et puis on a la protection subsidiaire
37:06qui est une autre forme de protection
37:08qui existe au sein de l'Union européenne.
37:10Concrètement,
37:12ce processus-là, il se fait en...
37:14Il y a une première étape, une étape administrative.
37:16Là, c'est l'administration,
37:18en l'occurrence l'OFPRA,
37:20qui va, avec un certain nombre
37:22de grands professionnels
37:24qui sont à l'intérieur de cet office-là,
37:26regarder si les critères de la Convention de Genève
37:28et sa transcription en droit sont
37:30effectivement respectés.
37:32En quelques mots, ces critères, c'est quoi exactement ?
37:34Il y en a plusieurs.
37:36Les grands critères de la Convention de Genève
37:38et son protocole, c'est l'idée
37:40qu'on est persécutés
37:42pour plusieurs motifs.
37:44Des questions d'opinion politique,
37:46l'appartenance
37:48à un certain groupe ethnique,
37:52le... Qu'est-ce que j'ai dit ?
37:54Les considérations religieuses.
37:56Les considérations religieuses et puis
37:58il y en a un autre qui...
38:00L'idée, c'est que la personne n'est plus
38:02en sécurité dans son propre pays.
38:04Le point principal, c'est l'idée qu'on ne peut pas
38:06se réclamer de la protection de son pays.
38:08C'est un aspect absolument fondamental.
38:10Vous comparez la façon dont les médias
38:12et la classe politique ont réagi à l'afflux
38:14de réfugiés syriens, d'un côté,
38:16l'afflux de réfugiés ukrainiens,
38:18d'un côté, on a parlé de crise des réfugiés,
38:20de l'autre, on a accueilli les réfugiés ukrainiens
38:22sans trop se poser de questions.
38:24Est-ce que ça veut dire que l'universalité
38:26des droits humains ne va plus de soi
38:28aujourd'hui dans notre société ?
38:30En fait, si vous voulez,
38:32la question qu'on nous pose souvent,
38:34c'est pourquoi vous sortez ce livre ?
38:36On le sort maintenant parce qu'on est 10 ans
38:38après la crise des réfugiés syriens,
38:40en tout cas ce qu'on a appelé ça,
38:42c'était en 2015, et l'Europe a eu le sentiment
38:44d'être totalement submergée à la fin des fins,
38:4610 ans après, on se rend compte
38:48de quoi ? J'espère que le grand public se rend compte
38:50déjà de la légitimité des Syriens
38:52qui fuyaient, puisque grâce à l'ouverture
38:54des prisons de Bachar al-Assad,
38:56on découvre les salles de torture, de détention,
38:58donc en fait, oui, c'était ça qu'ils fuyaient,
39:00et donc la maltraitance qui leur a été
39:02réservée quand même toutes ces années,
39:04elle paraît plus si évidente que ça,
39:06et puis on se rend compte aussi que finalement,
39:08c'était quoi, un million et demi de Syriens
39:10qui ont été accueillis dans l'Union européenne,
39:12en fait, cet affolement, ce populisme,
39:14et quelques années plus tard,
39:16donc, à l'occasion de la guerre en Ukraine,
39:18on a accueilli 4 millions d'Ukrainiens,
39:20mais comme les hommes politiques
39:22ne se sont pas empressés
39:24d'exploiter le truc, en parlant de crise,
39:26en disant que c'était trop,
39:28en fait, on les a bien accueillis,
39:30les Ukrainiens, on a mis en place
39:32ce qu'on appelle la directive protection,
39:34donc un texte de l'Union européenne
39:36qui permet de leur ouvrir
39:38tout un tas de possibilités,
39:40y compris d'être formés, de travailler,
39:42de voir leurs enfants inscrits à l'école,
39:44d'être soignés,
39:46en leur posant beaucoup moins de difficultés
39:48qu'on ne pose habituellement aux autres réfugiés
39:50ou demandeurs d'asile,
39:52et donc, en fait, ce que dit le livre,
39:54c'est qu'on prend le citoyen, un témoin,
39:56on lui dit, voilà, de quoi juger par vous-même,
39:58on est capable de faire les choses bien.
40:00Vous évoquez tous les points de crispation
40:02dans l'opinion publique qui sont liés
40:04à l'accueil des réfugiés, ce que coûte leur accueil,
40:06le poids des aides sociales,
40:08la question de savoir si les réfugiés font concurrence
40:10ou pas aux travailleurs français,
40:12et puis tout l'enjeu de leur intégration.
40:14Vous avez le sentiment que sur tous ces sujets,
40:16il y a des contre-vérités qui sont véhiculées
40:18par les médias,
40:20pas seulement par la classe politique.
40:22Comment vous voyez les choses ?
40:24Si je peux commencer sur ce sujet-là,
40:26je pense qu'on avait un constat également partagé,
40:28mais qui est vrai également sur l'immigration en général.
40:30C'est qu'il y a des vérités scientifiques actuellement
40:32sur le sujet.
40:34La recherche scientifique a plusieurs décennies
40:36sur la question de l'immigration,
40:38et elle est très peu mobilisée lorsqu'on essaie
40:40de construire une politique migratoire
40:42ou lorsqu'on essaie de mettre en place
40:44une nouvelle loi immigration.
40:46On retrouve assez peu, en réalité, les travaux qui sont faits.
40:48Par ailleurs, on évalue assez peu,
40:50alors même que normalement, on devrait évaluer
40:52nos politiques migratoires avant de les réformer.
40:54Tout ça relève du ressenti ?
40:56Relève de...
40:58C'est-à-dire sur la partie de...
41:00Tout ce qui se passe dans l'opinion publique.
41:02Alors, nous, ce qu'on dit,
41:04c'est qu'à partir du moment où les personnes ont des ressentis,
41:06il faut recevoir cette information-là
41:08et puis il faut traiter avec.
41:10Ce qu'on pense, c'est qu'en réalité,
41:12quand on regarde les enquêtes scientifiques
41:14qui sont réalisées dans les règles de l'art,
41:16on ne perçoit pas un sentiment
41:18anti-migration en France.
41:20C'est quelque chose
41:22qu'à priori, on n'arrive pas à détecter.
41:24Alors, on remarque effectivement
41:26que la question de l'immigration est assez haute
41:28dans les préoccupations des Français,
41:30mais on a beaucoup d'hétérogénéité
41:32politique des différents répondants.
41:34Par ailleurs, on relève
41:36quelques incohérences.
41:38En se fondant sur le dernier sondage IPSOS
41:40sur le sujet, ce qu'on constatait,
41:42par exemple, c'était que la question de l'immigration
41:44était très haute dans les préoccupations
41:46des électeurs, du rassemblement national
41:48notamment, mais par ailleurs,
41:50la préoccupation vis-à-vis de la stabilité internationale
41:52des conflits était très basse.
41:54C'est intéressant de noter cette rupture dans la compréhension
41:56des mécanismes.
41:58Qu'est-ce qui va entraîner que demain, on a plus
42:00de demandeurs d'asile ? Qu'est-ce qui va entraîner
42:02que demain, notre système d'asile va être
42:04davantage sollicité ?
42:06Pardon, je complète simplement ça.
42:08C'est d'ailleurs en ça que
42:10la position des
42:12hostiles à l'immigration
42:14qui sont généralement les mêmes
42:16qui sont hostiles à l'aide publique au développement,
42:18à la coopération internationale,
42:20à la lutte contre le changement climatique,
42:22cette position est complètement inepte
42:24d'incohérence parce que, en fait,
42:26si vous ne voulez pas voir arriver davantage
42:28de demandeurs d'asile sur votre territoire,
42:30eh bien, il faut œuvrer à créer
42:32les conditions de la stabilité ailleurs
42:34plutôt que de permettre
42:36que se constitue le terreau
42:38de conflits futurs et donc de persécutions
42:40et donc de gens qui fuient chez eux.
42:42Or, l'aide publique au développement,
42:44par exemple, eh bien, elle stabilise
42:46les pays les plus vulnérables, elle évite
42:48ce retour des conflits. La coopération
42:50internationale, elle permettrait,
42:52y compris, de mieux gérer la question des réfugiés
42:54parce qu'en fait, ça n'est qu'à l'échelle
42:56internationale qu'on serait en capacité
42:58de dire, bah, en fait,
43:00tel demandeur d'asile qui fuit
43:02la Syrie, par exemple, en fait,
43:04foncièrement, il a plutôt
43:06envie d'être dans un pays près de chez lui
43:08que d'aller jusqu'au bout du monde en Europe
43:10parce que près de chez lui, il pourra
43:12retourner voir ses proches si besoin, etc.
43:14Donc, en fait, la question, c'est
43:16comment est-ce que la communauté internationale
43:18aide, y compris les pays près des zones
43:20de conflits, à accueillir
43:22avec un soutien économique,
43:24en aidant, y compris la population locale
43:26pour ne pas donner l'impression d'une concurrence
43:28entre les réfugiés et la population locale ?
43:30Il y a plein de choses à imaginer, mais qui ne passent
43:32que par la coopération internationale
43:34et le sérieux quant aux questions de solidarité.
43:36Alors, vous évoquez aussi dans votre livre
43:38la figure du migrant criminel.
43:40C'est le terme que vous employez.
43:42Cette association qui est souvent
43:44faite dans une partie de l'opinion publique
43:46entre la délinquance et l'immigration.
43:50Emmanuel Macron, fin 2022,
43:52a déclaré que quand on regarde aujourd'hui
43:54la délinquance à Paris, on ne peut pas
43:56ne pas voir que la moitié des faits
43:58de délinquance qu'on observe viennent de personnes
44:00qui sont des étrangers, soit en situation
44:02irrégulière, soit en attente de titres.
44:04Ces chiffres avancés
44:06par le président de la République,
44:08ils sont vrais ? Ils sont faux ?
44:10Et s'ils sont faux, comment est-ce que vous expliquez
44:12qu'ils tiennent ce genre de propos ?
44:14C'est un très bon point d'entrée,
44:16je pense. Dans l'ouvrage, nous,
44:18on défend notamment l'idée que
44:20les demandes d'asile et les réfugiés
44:22ne sont pas plus criminels
44:24que le reste de la population.
44:26Il y a beaucoup d'études sur le sujet
44:28qui montrent que quand les personnes se déplacent,
44:30ça ne fait pas augmenter la criminalité.
44:32En Turquie, c'est un très bon cas d'étude.
44:34Ce qu'on observe, c'est qu'en réalité,
44:36le nombre de crimes par habitant a tendance à baisser
44:38assez mécaniquement
44:40lorsqu'on a des grands déplacements de personnes.
44:42Sur ces sujets-là,
44:44c'est assez intéressant. Ce qu'on a envie d'avoir,
44:46c'est d'avoir accès aux données
44:48et d'avoir accès à la ventilation
44:50de ces données.
44:52Vous n'y avez pas accès ?
44:54La ventilation des données du ministère de l'Intérieur,
44:56ce sont des données assez difficiles à obtenir.
44:58De manière générale, on a besoin,
45:00du côté de la recherche, d'avoir accès
45:02à une donnée qui a une grande granularité
45:04pour être capable de mettre en oeuvre
45:06des recherches avancées sur le sujet.
45:08Sans remettre en cause les déclarations
45:10du président de la République sur ce sujet-là,
45:12ce qu'on a envie de voir, c'est les données
45:14avec un niveau de granularité suffisant
45:16pour constater quels sont les crimes
45:18et les délits véritables qui sont annoncés.
45:20En général, on a une surreprésentation
45:22des étrangers dans les délits
45:24qui relèvent des questions administratives.
45:26C'est assez mécanique, en réalité,
45:28parce que c'est ceux qui font le plus souvent
45:30face aux problématiques
45:32de l'administration elle-même.
45:34Donc, ce n'est pas
45:36les attaques aux biens ou aux personnes ?
45:38Non, c'est l'irrégularité
45:40de la présence sur le territoire.
45:42C'est ce qu'on appelle des délits, en l'occurrence.
45:44Donc, en fait,
45:46vous savez, une chose nous a frappées,
45:48c'est qu'on a été obligés,
45:50et j'espère que c'est l'intérêt du livre,
45:52d'aller chercher de la recherche
45:54sur tous ces sujets, toutes ces angoisses
45:56qui se posent aux citoyens,
45:58partout dans le monde,
46:00à défaut de la voir chez nous.
46:02Nous, malheureusement, en France,
46:04nous sommes très mal lotis,
46:06non pas parce que nous n'aurions pas
46:08de chercheurs de qualité,
46:10mais ils ont, ces chercheurs,
46:12des ministères, et notamment du ministère de l'Intérieur,
46:14qui est quand même le principal concerné
46:16par ces questions migratoires,
46:18qui est très très faible, très contraint,
46:20et qui ne permet pas, en fait,
46:22juste de venir répondre de façon très claire
46:24aux questions que se posent les gens.
46:26Et je compléterais juste là-dessus,
46:28c'est que si on a accès à ces données-là
46:30et qu'on constate effectivement
46:32qu'on a des problèmes de sécurité,
46:34je pense qu'on est tout à fait d'accord
46:36pour dire qu'il faut mettre en face
46:38une politique publique.
46:40Vous avez le sentiment que la gauche
46:42ne mène plus ce combat aujourd'hui ?
46:44Pas suffisamment ?
46:46Non, mais de toute façon,
46:48il s'est passé quelque chose
46:50depuis bien une quinzaine d'années,
46:52et c'est vrai qu'il y a eu un acmé
46:54de l'afflux des Syriens en Europe
46:56il y a dix ans de cela,
46:58et on continue à en percevoir les effets.
47:00Donc, ce qui s'est passé depuis toutes ces années,
47:02c'est quand même un durcissement
47:04du vocabulaire sur la question
47:06des migrants de manière générale.
47:08Singulièrement des demandeurs d'asile
47:10et des réfugiés,
47:12qui est extrêmement problématique
47:14et qui a y compris intimidé
47:16les forces humanistes,
47:18les forces de gauche.
47:20C'est-à-dire que du côté de l'extrême-droite,
47:22les choses étaient déjà très claires,
47:24du côté de la droite qui appartenait
47:26à l'arc républicain,
47:28on aurait pu s'attendre à ce qu'elle résiste,
47:30en fait, elle s'est laissée tenter
47:32à son tour par la facilité
47:34de ce discours anti-migrants,
47:36contre, on trouve que, grosso modo,
47:38ils attendent régulièrement d'être sur la défensive
47:40pour parler d'immigration,
47:42alors qu'ils pourraient la positiver
47:44spontanément et ainsi créer un contre-récit.
47:46Je ne peux pas vous avoir face à moi
47:48sans poser une ou deux questions politiques.
47:50Vous avez encore votre carte UPS ou pas ?
47:52Oui.
47:54Vous avez voté lors du Congrès ?
47:56Pour qui votre mari Boris Vallaud
47:58était candidat, il arriva en troisième position ?
48:00Certains estiment
48:02que c'est un échec.
48:04Vous réagissez comment ?
48:06Je ne vois pas du tout les choses comme ça.
48:08C'est un premier pas vers un autre horizon plus lointain ?
48:10Je trouve, très honnêtement,
48:12que la dynamique qui a été créée en deux mois à peine
48:14autour de cette motion-là
48:16est assez exceptionnelle
48:18et qu'elle est très rafraîchissante.
48:20J'ose espérer qu'elle va impacter
48:22durablement la suite
48:24de cette formation politique.
48:26Si je vous dis, et si c'était lui ?
48:28Vous répondez ?
48:30Que je ne suis pas journaliste
48:32pour la titraille.
48:34Vous pensez revenir en politique un jour ?
48:36Ou c'est une page tournée pour vous ?
48:38On verra.
48:40En tout cas, je suis très heureuse
48:42de ce que je réalise en ce moment.
48:44Je pense vraiment que,
48:46par rapport aux rôles des formations politiques
48:48qui ne sont pas toujours là où on les attend
48:50ou suffisamment,
48:52il y a besoin que dans la société civile,
48:54on fasse une forme de politique,
48:56c'est-à-dire de combat pour l'intérêt général
48:58et le bien commun.
49:00Votre regard sur la gauche,
49:02divisée, fracturée,
49:04des crispations, des difficultés à s'adresser
49:06à l'électorat populaire, comment vous voyez tout ça ?
49:10Je pense qu'on n'aura pas suffisamment
49:12de temps pour vraiment faire le point,
49:14mais je dirais que, globalement,
49:16les partis politiques me semblent assez dépassés.
49:18Soit ils tombent
49:20dans la facilité,
49:22c'est ce qu'on constate beaucoup, malheureusement,
49:24à la droite, ce que j'évoquais tout à l'heure,
49:26la paresse intellectuelle
49:28de prendre simplement les sondages
49:30et se demander ce qui, potentiellement,
49:32angoisse les Français
49:34et tiens de forcer le trait là-dessus.
49:36Mais ailleurs,
49:38j'ai le sentiment qu'en fait,
49:40vu la façon dont fonctionne
49:42le monde politique aujourd'hui,
49:44notamment ce parlementarisme
49:46où tout va très vite,
49:48où tout est clash et débat
49:50trop polarisant,
49:52eh bien,
49:54on manque de temps pour réfléchir
49:56à la tendance du moment
49:58et la société,
50:00qui est en mutation profonde.
50:02Je trouve que les partis devraient
50:04davantage travailler avec la société civile.
50:06Merci à tous les deux. Je rappelle le titre
50:08de votre livre, ce qu'on ne nous dit pas,
50:10paru chez Stock.
50:12C'est l'heure de notre Grand Angle.
50:22Notre Grand Angle est consacré ce soir
50:24à cette initiative parlementaire
50:26pour réhabiliter Alfred Dreyfus,
50:28le réhabiliter militairement.
50:30Bonsoir, Charles Zitzenstuhl.
50:32Vous êtes le rapporteur d'une proposition de loi
50:34examinée en commission à l'Assemblée.
50:36Il s'agit d'élever Dreyfus au grade
50:38de général de brigade.
50:40Et bonsoir, Christian Vigouroux.
50:42Vous connaissez parfaitement l'affaire Dreyfus
50:44puisque vous avez écrit la biographie
50:46d'un des héros Dreyfusards de cette affaire,
50:48Georges Piccard.
50:50On va d'abord voir de quoi on parle
50:52avec Dario Borgogno.
50:56Aujourd'hui, au sein de la commission
50:58de la Défense, il était question
51:00de réparer une injustice centenaire.
51:02La PPL examinée ce matin
51:04ne rouvre pas le dossier judiciaire
51:06l'innocence de Dreyfus
51:08ayant été établie.
51:10Elle revient sur un événement
51:12moins connu de l'affaire Dreyfus.
51:14L'affaire Dreyfus,
51:16dossier marquant de l'histoire française.
51:18Un capitaine d'artillerie est accusé
51:20en 1894 d'avoir livré
51:22des secrets d'Etat à l'ennemi, l'Empire allemand.
51:24Après un procès ultra-médiatisé,
51:26Alfred Dreyfus est condamné
51:28au bagne, ici, sur l'île du Diable
51:30en Guyane. Pendant 12 ans,
51:32l'affaire déchire la France.
51:34Pour les Dreyfusards, sa condamnation
51:36est due à ses origines juives.
51:38Émile Zola publie son célèbre j'accuse,
51:40mettant en cause l'état-major,
51:42accusé d'antisémitisme et d'avoir persisté
51:44dans leur erreur judiciaire.
51:46Au fil des années, l'innocence du capitaine
51:48sera prouvée, il sera réhabilité
51:50en 1906, mais des années
51:52de calomnie et d'humiliation
51:54ont ralenti sa carrière militaire.
51:56Le texte déposé par Gabriel Attal
51:58veut lui décerner à titre posthume
52:00le grade de général,
52:02une idée soutenue par tous les groupes à l'Assemblée.
52:04Dreyfus a été
52:06pénalisé dans sa carrière,
52:08a quitté l'armée
52:10prématurément, et n'a
52:12jamais obtenu le grade de général
52:14qu'il aurait légitimement
52:16pu atteindre. En élevant Alfred Dreyfus
52:18au grade de général de brigade, nous le rendons
52:20pas seulement hommage à un homme,
52:22nous rendons aussi à la France son honneur.
52:24La proposition de loi ainsi modifiée
52:26est adoptée à l'unanimité.
52:28La proposition
52:30de loi devrait être aussi adoptée
52:32à l'unanimité le 2 juin dans
52:34l'hémicycle, et certains réclament
52:36déjà la panthéonisation d'Alfred Dreyfus.
52:38Charles-Hitzenstuhl,
52:40une question peut-être plus personnelle au début,
52:42pourquoi est-ce que vous êtes saisi de ce sujet,
52:44pour vous ? Alors, le texte
52:46a été déposé par Gabriel Vattal,
52:48il a souhaité qu'un autre
52:50député de son groupe
52:52soit rapporteur, il m'a proposé
52:54de le faire, j'ai accepté,
52:56peut-être est-ce parce que je suis
52:58alsacien,
53:00en tout cas, moi, à titre personnel,
53:02je connaissais
53:04le problème du grade
53:06depuis longtemps, je connais
53:08l'affaire Dreyfus, c'est vrai que moi, c'est
53:10un point qui, pour moi, restait une injustice
53:12qu'il fallait réparer, c'est peut-être ça
53:14l'origine du fait que Gabriel Vattal
53:16m'ait proposé de le faire. Et quel sens il faut donner
53:18à cette proposition de loi ?
53:20Pourquoi maintenant, j'ai envie de dire ?
53:22C'est ce contexte aujourd'hui qui...
53:24La question, c'est surtout pourquoi
53:26ça n'a pas été fait avant ? Parce que,
53:28comme vous le rappelez dans le reportage,
53:30en 1906,
53:32il est innocenté, la vérité
53:34juridique, la vérité historique est
53:36dite par la Cour de cassation, il y a le lendemain
53:38une séance à la Chambre des députés
53:40où une loi spécifique à Alfred Dreyfus
53:42et à Picard,
53:44également deux lois qui sont
53:46votées, et en fait,
53:48Dreyfus est réintégré
53:50au grade minimal auquel
53:52il aurait pu prétendre, et ça, ça va le
53:54pénaliser, puis il va se rendre compte
53:56en fait de cette erreur, et pendant
53:58des mois, il va essayer de le faire réparer,
54:00le gouvernement à l'époque refuse, et puis ensuite...
54:02C'est-à-dire que la question s'est posée à l'époque ?
54:04La question se pose en 1906,
54:06en 1907, et puis ensuite, le gouvernement
54:08à l'époque refuse, et puis,
54:10pendant plus d'un siècle, en réalité,
54:12on n'en a plus vraiment parlé, cela revient depuis
54:14quelques années, donc là, on va le corriger, lundi 2 juin.
54:16Christian Vigouroux, cette loi,
54:18elle est nécessaire ? Selon vous, elle est utile
54:20aujourd'hui ?
54:22Pour quelqu'un qui n'aime pas l'injustice,
54:24et j'espère qu'il y a beaucoup de Français dans ce cas,
54:28Dreyfus a vécu l'injustice
54:30de l'injustice. Normalement,
54:32il devait mourir trois fois. La première fois,
54:34quand on l'a poussé au suicide, au moment
54:36où il a été interpellé. La deuxième fois,
54:38les conditions pénitentiaires en Guyane,
54:40à l'époque, le trajet devait le laisser
54:42pantelant.
54:44Et la troisième fois, au tir de
54:46pistolet, en 1908, il a pris
54:48une balle par
54:50un assassin qui a été acquitté.
54:52Donc, ça fait beaucoup pour un seul homme.
54:54Et il a été courageux,
54:56Dreyfus. On le présente quelques fois
54:58comme quelqu'un de discret, de fallot.
55:00C'est absolument pas ma vision.
55:02Beaucoup de gens n'auraient pas tenu
55:04par rapport à ce qu'il a fait.
55:06Mais comme le colonel Picard, qui a contribué
55:08à prouver son innocence, ce sont deux
55:10officiers qui croyaient à l'armée.
55:12Donc, ils n'ont jamais fait de manifestation hostile.
55:14Il s'est toujours tenu
55:16dans les règles de l'armée, mais en cherchant
55:18toujours la vérité
55:20et la réhabilitation
55:22qui était son droit. Donc, aujourd'hui,
55:24que la République reconnaisse
55:26qu'on doit reconstituer sa carrière
55:28pleinement, comme ça a été fait pour Picard,
55:30je n'y vois que
55:32un acte de justice.
55:34Cette proposition de loi m'a fait découvrir
55:36que non seulement Dreyfus n'a pas
55:38quitté l'armée après sa réhabilitation,
55:40mais il s'est engagé
55:42pendant la Première Guerre mondiale,
55:44il a fait le chemin des dames, il était
55:46réserviste et il s'est engagé.
55:48Ca participe aussi de la réhabilitation
55:50de la personnalité Dreyfus.
55:52Comme ça vient d'être dit par M. Vigoureau,
55:54qui a souvent été dépeint de façon
55:56négative, en réalité,
55:58Dreyfus était un officier
56:00brillant, un officier
56:02très patriote, un officier
56:04très attaché à l'armée malgré
56:06ce qu'il a subi. Il demande
56:08sa mise en retraite en 1907, voyant
56:10qu'il ne peut plus progresser, mais il reste
56:12réserviste. En 1914,
56:14quand la guerre reprend
56:16avec l'Allemagne, il se réengage
56:18et pendant quatre ans, il est engagé
56:20et à la fin de la guerre, il est au front
56:22en Lorraine.
56:23Certains s'interrogent sur la constitutionnalité
56:25de votre loi, sur le fait de passer par la loi
56:27pour élever un militaire
56:29au grade de général. Est-ce que ça ne relève pas
56:31du président de la République en Conseil des ministres ?
56:33C'est ce qu'on lit dans l'article 13 de la constitution.
56:35Justement, non. Nous avons fait
56:37un travail juridique approfondi.
56:39On ne peut pas régler ça de manière
56:41réglementaire. Le gouvernement, ni le président
56:43ne peut agir par décret.
56:45Il n'y a que la loi qui peut procéder
56:47à cette élévation au grade de général
56:49à titre posthume, parce qu'il y a une loi
56:51en 1906 qui répare
56:53avec erreur la carrière
56:55et parce que les dispositions actuelles
56:57ne le permettent pas.
56:59Le Parlement a toute autorité pour le faire
57:01et a seule autorité pour le faire.
57:03On peut faire une loi sur un cas particulier ?
57:05La loi est générale,
57:07mais sous la Ve République, il y a quelques
57:09cas de loi individuelle.
57:11Ce sera un cas en plus.
57:13Ca a déjà existé par le passé.
57:15Vous êtes professeur de droit public.
57:17Vous confirmez cette analyse ?
57:19C'est une question délicate.
57:21La loi est faite... Il y a deux questions.
57:23Le caractère particulier
57:25sur Dreyfus
57:27et le caractère
57:29de questionnement
57:31sur les conséquences.
57:33Une loi est faite pour changer le droit.
57:35Qu'est-ce que ça change ?
57:37Dreyfus est mort, il n'y aura pas de conséquences financières.
57:39Je crois quand même
57:41que c'est quelque chose de juste
57:43puisqu'on modifie une loi existante,
57:45deux lois de 1906,
57:47pour Picard et pour Dreyfus.
57:49On ne fait que modifier une loi
57:51qui existe et d'autre part,
57:53il y a une tradition juridique
57:55en France, par un arrêt du Conseil d'Etat de 1925,
57:57qui exige,
57:59quand il y a eu des évictions illégales,
58:01la reconstitution pleine et entière
58:03de la carrière du fonctionnaire
58:05ou du militaire écarté.
58:07Là, nous sommes dans quelque chose qui est nécessairement
58:09rétroactif, puisque la personne
58:11a disparu, et
58:13d'autre part, qui modifie une loi.
58:15Donc, nous sommes dans
58:17un cas qui peut paraître exceptionnel
58:19et trouver un chemin, malgré
58:21le principe de la compétence de l'exécutif
58:23pour octroyer le graphe de général.
58:25Un mot de la famille d'Alfred Dreyfus,
58:27de ses descendants.
58:29Vous avez travaillé un peu avec eux.
58:31Vous savez comment ils ont vécu
58:33votre initiative ?
58:35Pour la famille, c'est un point important.
58:37C'est aussi un point important pour Dreyfus.
58:39On le retrouve dans ses écrits, ses lettres,
58:41ses carnets de 1906 et 1907.
58:43J'ai eu la chance de rencontrer Charles Dreyfus,
58:45qui a pas loin de 100 ans maintenant,
58:47qui est un petit-fils
58:49d'Alfred Dreyfus, qui a connu
58:51Dreyfus quand il était enfant.
58:53Il y a d'autres descendants qui seront présents
58:55lundi dans l'hémicycle, parce que c'est
58:57très important pour la famille
58:59et les amis, les soutiens,
59:01les spécialistes de Dreyfus.
59:03Au plan juridique, on ne fait pas une mesure rétroactive
59:05comme ça sans être certain
59:07que la personne disparue le voulait.
59:09Je ne serais pas pour la loi s'il y avait
59:11un doute. Il n'y a pas
59:13de doute dans ses mémoires.
59:15Dreyfus a dit que sa carrière
59:17a été reconstituée de manière partielle.
59:19Merci à tous les deux d'être venus nous expliquer
59:21les enjeux de cette loi qui sera débattue
59:23lundi prochain, 2 juin,
59:25dans l'hémicycle. C'est terminé
59:27pour aujourd'hui. On fait une pause de quelques jours.
59:29On se retrouve la semaine prochaine.
59:31Bonne soirée à tous.
Recommandations
1:25:52
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À suivre
1:26:14
0:45
1:30
1:19
0:23