- 22/05/2025
GRAND DÉBAT / Entreprises : l'État est-il trop interventionniste ?
Lors de son audition au Sénat, Bernard Arnault, PDG de LVMH, a vivement critiqué l'État s'immisçant dans la gestion d'entreprises privées. Il a souligné que LVMH était « peut-être le groupe le plus patriote » en France, malgré sa production aux États-Unis. Bernard Arnault a dénoncé une surtaxe, la jugeant coûteuse pour LVMH et incitant à la délocalisation pour d'autres grands groupes. Il a aussi exprimé ses inquiétudes sur la négociation commerciale entre l'Union Européenne et les États-Unis, la jugeant « mal partie ». Ces déclarations répondent à l'appel d'Emmanuel Macron aux entreprises à être « patriotes » et suspendre leurs investissements américains face aux nouveaux droits de douane américains. D'autres grands patrons ont également réagi, comme Xavier Niel, qui s'oppose à une hausse de la fiscalité pour les plus riches. Les responsables politiques interfèrent-ils trop dans la sphère économique ?
Invités :
- Charles Rodwell, député « Ensemble Pour la République » des Yvelines, Président de la Commission d'enquête visant à lever les freins à la réindustrialisation de la France,
- Aurélie Trouvé, députée « La France Insoumise » de Seine-Saint-Denis, Présidente de la commission des affaires économiques,
- Philippe Trainar, économiste, professeur honoraire au CNAM, directeur de la fondation SCOR,
- Fanny Guinochet, journaliste économique à « La Tribune » et « France Info ».
GRAND ENTRETIEN / Yves Jeuland : Zelensky, le clown devenu chef de guerre
« L'Histoire est injuste, c'est vrai. Ce n'est pas nous qui avons commencé cette guerre. Ce n'est pas nous ! Mais c'est à nous d'y mettre fin. » Dès son discours d'investiture, le 20 mai 2019, Volodymyr Zelensky mesure pleinement la responsabilité qui lui incombe. Depuis l'annexion de la Crimée par les forces de Poutine en février 2014, il a saisi la nature des ambitions russes sur le territoire ukrainien. À l'époque de cette première invasion, Zelensky n'était encore qu'un humoriste et producteur de télévision, éloigné de la sphère politique. Pourtant, à la télévision, il appelait déjà Poutine à la paix : « Je suis prêt à me mettre à genoux devant vous, mais pitié, ne mettez pas à genoux notre peuple. » Ensuite, insensiblement, sa mue opère. De comédien incarnant un président dans la série « Serviteur du peuple » à partir de 2015, il est élu chef d'État, puis se transforme en chef de guerre. « Zelensky » retrace le parcours hors du commun de cet homme au destin singulier. Comment expliquer une telle trajectoire ?
Grand invité : Yves Jeuland, réalisateur, co-auteur du documentaire « Zelensky »
LA QUESTION QUI FÂCHE / Faut-il apprendre l'arabe à l'école ?
Invités :
- Hakim El Karoui, essayiste, Président du Club 21ème siècle, Fondateur de Volentia,
- Vincent Jeanbrun, député « Droite Républicaine » du Val-de-Marne.
Lors de son audition au Sénat, Bernard Arnault, PDG de LVMH, a vivement critiqué l'État s'immisçant dans la gestion d'entreprises privées. Il a souligné que LVMH était « peut-être le groupe le plus patriote » en France, malgré sa production aux États-Unis. Bernard Arnault a dénoncé une surtaxe, la jugeant coûteuse pour LVMH et incitant à la délocalisation pour d'autres grands groupes. Il a aussi exprimé ses inquiétudes sur la négociation commerciale entre l'Union Européenne et les États-Unis, la jugeant « mal partie ». Ces déclarations répondent à l'appel d'Emmanuel Macron aux entreprises à être « patriotes » et suspendre leurs investissements américains face aux nouveaux droits de douane américains. D'autres grands patrons ont également réagi, comme Xavier Niel, qui s'oppose à une hausse de la fiscalité pour les plus riches. Les responsables politiques interfèrent-ils trop dans la sphère économique ?
Invités :
- Charles Rodwell, député « Ensemble Pour la République » des Yvelines, Président de la Commission d'enquête visant à lever les freins à la réindustrialisation de la France,
- Aurélie Trouvé, députée « La France Insoumise » de Seine-Saint-Denis, Présidente de la commission des affaires économiques,
- Philippe Trainar, économiste, professeur honoraire au CNAM, directeur de la fondation SCOR,
- Fanny Guinochet, journaliste économique à « La Tribune » et « France Info ».
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« L'Histoire est injuste, c'est vrai. Ce n'est pas nous qui avons commencé cette guerre. Ce n'est pas nous ! Mais c'est à nous d'y mettre fin. » Dès son discours d'investiture, le 20 mai 2019, Volodymyr Zelensky mesure pleinement la responsabilité qui lui incombe. Depuis l'annexion de la Crimée par les forces de Poutine en février 2014, il a saisi la nature des ambitions russes sur le territoire ukrainien. À l'époque de cette première invasion, Zelensky n'était encore qu'un humoriste et producteur de télévision, éloigné de la sphère politique. Pourtant, à la télévision, il appelait déjà Poutine à la paix : « Je suis prêt à me mettre à genoux devant vous, mais pitié, ne mettez pas à genoux notre peuple. » Ensuite, insensiblement, sa mue opère. De comédien incarnant un président dans la série « Serviteur du peuple » à partir de 2015, il est élu chef d'État, puis se transforme en chef de guerre. « Zelensky » retrace le parcours hors du commun de cet homme au destin singulier. Comment expliquer une telle trajectoire ?
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LA QUESTION QUI FÂCHE / Faut-il apprendre l'arabe à l'école ?
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- Hakim El Karoui, essayiste, Président du Club 21ème siècle, Fondateur de Volentia,
- Vincent Jeanbrun, député « Droite Républicaine » du Val-de-Marne.
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NewsTranscription
00:00:00Générique
00:00:02...
00:00:05Bonsoir à tous et bienvenue dans Ça vous regarde.
00:00:08Au sommaire, ce soir, cette question,
00:00:10est-ce que l'Etat se mêle trop des affaires,
00:00:13des entreprises, comme l'affirme le patron d'LVMH,
00:00:16nouveau coup de gueule de Bernard Arnault ?
00:00:18Emmanuel Macron est-il dans son rôle
00:00:20quand il demande aux patrons d'être patriotes ?
00:00:23Et les grands patrons eux-mêmes ?
00:00:25Autant de questions dont on débattra avec nos invités.
00:00:28On accueillera ensuite le co-réalisateur
00:00:30d'un documentaire passionnant
00:00:32consacré à Zelensky, Yves Jelan sera notre invité.
00:00:35Il explore la mue de celui qui s'est transformé en chef de guerre
00:00:39après avoir été l'humoriste star de la télé russe et ukrainienne.
00:00:42Faut-il développer l'enseignement de l'arabe à l'école publique,
00:00:46comme le préconise le rapport consacré à l'antrisme
00:00:49des frères musulmans ?
00:00:50Ce sera le débat de la question qui fâche à la fin de l'émission.
00:00:54Voilà pour le sommaire.
00:00:56C'est parti pour ça, vous regardez.
00:00:58Générique
00:00:59...
00:01:09Ca devient presque une habitude,
00:01:10on guette désormais les punchlines de Bernard Arnault.
00:01:13Normal, quand on est la 6e fortune mondiale,
00:01:16mais a-t-il raison de dénoncer une intervention excessive
00:01:19de l'Etat dans la gestion des entreprises ?
00:01:21On en débat ce soir avec nos invités, Aurélie Trouvé, bonsoir.
00:01:25Vous présidez la commission des affaires économiques à l'Assemblée,
00:01:28vous êtes économiste et député membre du groupe La France insoumise.
00:01:32Face à vous, Charles Rodwell, bonsoir.
00:01:34Vous êtes député membre du groupe Ensemble pour la République
00:01:38et président en ce moment d'une commission d'enquête
00:01:41qui est consacrée aux freins à la réindustrialisation.
00:01:44Vous êtes le tenant d'une ligne plutôt libérale
00:01:46au sein du groupe Ensemble pour la République.
00:01:49Ca vous va ?
00:01:50Ca me va très bien.
00:01:51A vos côtés, Philippe Trénard, bonsoir.
00:01:53Vous êtes économiste, professeur honoraire
00:01:56de la Chaire Assurance du CNAM et membre du Cercle des économistes.
00:01:59Et enfin, Fanny Guinocher, bonsoir.
00:02:01Bonsoir.
00:02:02Vous êtes journaliste économique à La Tribune et à France Info
00:02:06et habituée du plateau de Savourgarde.
00:02:08Nos téléspectateurs vous connaissent bien.
00:02:10On commence avec le récap de Marco Pommier.
00:02:13Générique
00:02:14...
00:02:22Bonsoir, Marco.
00:02:23Bonsoir, Clément.
00:02:24Dans votre récap, vous revenez sur ce tacle de Bernard Arnault
00:02:28à Emmanuel Macron.
00:02:29De quoi tu te mêles ? C'est un peu le message de Bernard Arnault.
00:02:32A Emmanuel Macron, hier, lors de son grand oral au Sénat,
00:02:36devant une commission d'enquête sur les aides publiques
00:02:39aux grandes entreprises, le patron de LVMH a mis les pieds dans le plat.
00:02:43Je crois qu'il est très mauvais pour l'Etat
00:02:46de se mêler de la gestion des entreprises privées.
00:02:48En général, ça mène à la catastrophe.
00:02:53Une réponse à l'appel du président de la République
00:02:56au patriotisme économique début avril.
00:02:58Donald Trump agite la menace d'une hausse massive
00:03:01des droits de douane sur les produits européens
00:03:04importés aux Etats-Unis.
00:03:06Emmanuel Macron riposte en demandant aux patrons français
00:03:09de suspendre leurs investissements chez l'oncle Sam.
00:03:12Quel serait le message d'avoir des grands acteurs européens
00:03:16qui investissent des milliards d'euros
00:03:18dans l'économie américaine au moment où ils nous tapent ?
00:03:22Visiblement, ce mot d'ordre, Bernard Arnault
00:03:24n'a pas vraiment entendu, on va dire.
00:03:27Pourtant, Bernard Arnault affirme que son groupe
00:03:29est sûrement le plus patriote des entreprises du CAC 40
00:03:33en payant, notamment, vous le voyez,
00:03:354 milliards d'euros d'impôts en France l'année dernière,
00:03:38alors que notre pays représente 8 % du chiffre d'affaires de LVMH,
00:03:43mais aux Etats-Unis, c'est 25 %.
00:03:45Patriote, oui, mais il est aussi très proche de Donald Trump.
00:03:49Bernard Arnault et son fils se qualifiaient
00:03:51de très bons amis par le président américain lui-même.
00:03:54C'était débumé. Et puis, souvenez-vous,
00:03:56le milliardaire était même présent à son investiture.
00:03:59Face à la menace des taxes américaines,
00:04:02le cœur du patriote français penche plutôt vers les Etats-Unis.
00:04:07Il faut négocier, comme font, comme ont fait les Anglais.
00:04:11Il ne faut pas dire qu'on approuve ou qu'on désapprouve,
00:04:14il faut discuter. C'est le premier marché du monde.
00:04:17Et pour l'instant, cette négociation,
00:04:19je ne suis pas sûr qu'elle soit menée comme il faut,
00:04:22au niveau de l'Europe.
00:04:24On a beaucoup parlé de LVMH,
00:04:25mais c'est pas le seul groupe à faire bande à part.
00:04:28Non. Regardez cette photo, elle va arriver début mars.
00:04:31Rodolphe Saadé, le patron français de l'armateur CMA-CGM,
00:04:35se retrouve dans le bureau Oval
00:04:37pour signer un contrat juteux avec Donald Trump.
00:04:41Nous investissons 20 milliards de dollars
00:04:43dans le transport maritime et la logistique,
00:04:45ce qui signifie la création de 10 000 nouveaux emplois américains.
00:04:49Autre exemple, Clément Sanofi,
00:04:51le groupe pharmaceutique français,
00:04:54va investir 18 milliards d'euros
00:04:56sur les cinq prochaines années aux Etats-Unis.
00:04:59Pas de délocalisation de la production française,
00:05:02pour autant, affirme la direction du groupe.
00:05:04Mais ce qui choque à chaque fois,
00:05:06c'est que ces groupes français ont été soutenus par l'Etat.
00:05:09Crédit d'impôt, niche fiscale, subvention.
00:05:12Selon un rapport de France Stratégie,
00:05:14ces aides représenteraient entre 139 et 230 milliards d'euros
00:05:18chaque année.
00:05:19L'Etat se mêle des affaires des entreprises,
00:05:22mais il est aussi généreux.
00:05:24Merci beaucoup, Marco Pommier.
00:05:25C'était clair et complet.
00:05:27Je commence peut-être avec vous, Charles Rodwell.
00:05:30Vous soutenez la politique de l'offre d'Emmanuel Macron
00:05:33qu'il a déployée depuis 2017.
00:05:34Ca vous agace pas d'entendre Bernard Arnault
00:05:37balayer presque d'un revers de main tout ce qui a été fait
00:05:40pour les entreprises par le chef de l'Etat depuis 2017 ?
00:05:43On ne peut pas demander au patron de venir
00:05:45dans nos commissions d'enquête, donner leur point de vue
00:05:49et ensuite s'agacer du point de vue qu'ils expriment.
00:05:52Vous ne sentez pas une mise en cause
00:05:54de la politique économique menée par Emmanuel Macron ?
00:05:57Non, parce qu'il y a largement contribué,
00:05:59comme la plupart des patrons français,
00:06:01comme la plupart des entreprises françaises.
00:06:03Depuis sept ans, nous n'avons pas tout réussi,
00:06:06mais je suis fier de voir que nos entreprises,
00:06:09que les hommes et les femmes qui font en ont permis
00:06:11la création de 2,5 millions d'emplois
00:06:13dans notre pays depuis sept ans.
00:06:152,5 millions d'emplois, c'est pas juste un chiffre,
00:06:18c'est 2,5 millions de familles dont le père ou la mère
00:06:21ont retrouvé un emploi et ont pu tout simplement
00:06:23voir leur vie basculer pour le mieux.
00:06:25Quand je vois qu'il y a 300 usines qui ont ouvert
00:06:28en solde nette dans notre pays depuis sept ans...
00:06:31Vous faites le bilan de la politique d'Emmanuel Macron,
00:06:34mais quand il dit que l'Etat se mêle trop
00:06:36de la gestion des entreprises privées,
00:06:38vous ne sentez pas une mise en cause ?
00:06:40En temps de crise, il est normal que l'Etat vienne abonder,
00:06:43et l'Etat, c'est nos impôts.
00:06:45C'est le contribuable français qui,
00:06:47par le paiement de ses impôts, intervient dans l'économie
00:06:50pour répondre aux crises, comme la crise Covid
00:06:53ou la crise énergétique.
00:06:54La philosophie que nous défendons aussi,
00:06:56c'est que dans une période de croissance,
00:06:58l'Etat doit reculer.
00:07:00Or, cela fait maintenant près de 30 ans,
00:07:02voire 40 ans, que la place de la dépense publique
00:07:05et la place de l'Etat dans l'économie française
00:07:07est trop importante, selon nous,
00:07:09pour tout un tas de raisons.
00:07:11Je ne voudrais pas être trop long.
00:07:13C'est la raison pour laquelle j'entends le message
00:07:15des patrons d'entreprises,
00:07:17que l'Etat doit se mêler de ses affaires.
00:07:19Encore faudrait-il que les entreprises,
00:07:22à chaque moment de secousse, ne viennent pas toquer
00:07:24à la porte des collectivités ou de l'Etat
00:07:27pour demander une subvention, un peu d'aide.
00:07:29C'est tout l'enjeu, je crois, de leur activité et de la nôtre.
00:07:32C'est un débat philosophique important
00:07:34à l'Assemblée nationale.
00:07:36Aurélie Trouvé, comment vous vous positionnez ?
00:07:38Déjà, on peut se dire que la politique
00:07:40de l'offre du président Macron, excusez-moi,
00:07:43est d'une catastrophe, puisque tous les indicateurs économiques
00:07:46sont au rouge. La productivité du travail est en berne,
00:07:49les investissements productifs diminuent,
00:07:52c'est le cas en 2024, le taux de chômage réaugmente,
00:07:55et les créations d'emplois, c'était surtout
00:07:57de l'emploi très précaire, des apprentis
00:07:59et auto-entrepreneurs. Bref, vraiment,
00:08:02on n'est pas dans un moment du tout...
00:08:04On n'est pas là pour débattre du bilan d'Emmanuel Macron,
00:08:07mais du rapport entre les entreprises et l'Etat.
00:08:10Réalisez-nous avec plaisir sur ce sujet.
00:08:12J'y arrive. En fait, justement,
00:08:14la politique libérale, sur le plan économique du président Macron,
00:08:19est complètement à contretemps, c'est-à-dire qu'il faut
00:08:22absolument réintervenir dans l'économie,
00:08:24et d'ailleurs, les Allemands le font,
00:08:27ils ont prévu des centaines de milliards d'euros
00:08:29d'investissement, on voit bien que le président Trump
00:08:32intervient très fortement, mais même Joe Biden avant lui,
00:08:35il y a eu une politique très forte d'investissement.
00:08:38Et nous, en France...
00:08:39Je ne suis pas sûr que ce soit ce type de mesures
00:08:42que Bernard Arnault cible quand il dit que l'Etat s'ingère
00:08:45dans les affaires des entreprises.
00:08:47Bernard Arnault, c'est un intérêt privé.
00:08:50Il ne faut pas avoir de naïveté quand le président Macron dit
00:08:53qu'il faudrait que Bernard Arnault soit patriote,
00:08:56un PDG, une multinationale, et là, pour faire en sorte
00:08:59que la rentabilité des capitaux soit maximale,
00:09:02c'est à l'Etat, évidemment, d'aller réguler tout ça
00:09:04pour que les entreprises, son activité,
00:09:07se fassent aussi au bénéfice des salariés et de la société.
00:09:10Donc, évidemment, Bernard Arnault parle comme un PDG,
00:09:13mais sauf que l'Etat et nous, parlementaires,
00:09:15on agit pour l'intérêt général, et oui, heureusement que l'Etat,
00:09:19dans toute l'histoire et dans tous les pays du monde,
00:09:22intervient fortement en faveur de l'intérêt général.
00:09:25Quand Bernard Arnault dit cela,
00:09:27est-ce qu'il traduit un sentiment répandu
00:09:29chez les patrons français, grandes entreprises ou petites ?
00:09:32On le voyait dans votre sujet, un certain nombre de patrons,
00:09:35ces derniers mois, effectivement, s'autorisent à critiquer
00:09:39une politique qu'il y a pas si longtemps,
00:09:41ils avaient plutôt l'habitude de féliciter ou de valoriser.
00:09:44Donc, il y a une vraie rupture.
00:09:46La rupture, moi, je la note, finalement, à l'été dernier.
00:09:49La politique de l'offre,
00:09:52qui était perçue comme très pro-business
00:09:55et qui était appréciée par les chefs d'entreprise,
00:09:58elle a été, tout d'un coup, les chefs d'entreprise,
00:10:01les chefs d'entreprise ont changé leur fusil d'épaule
00:10:04quand Emmanuel Macron a fait la dissolution.
00:10:07Ca a vraiment marqué un coup net en disant,
00:10:09l'été dernier, mais qu'est-ce qu'il fait, le président ?
00:10:12On est déjà dans une période d'incertitude notoire.
00:10:16Il a déstabilisé l'écosystème.
00:10:18C'est vrai qu'à ce moment-là,
00:10:19on a vu les relations Etat-patron-entreprise
00:10:24changer. Avant, il y avait toujours
00:10:26des chefs d'entreprise qui se plaignaient
00:10:29du fait qu'il y ait trop de charges dans notre pays,
00:10:32mais c'était, regardez, tout ce que vous avez décrit,
00:10:35il y a quand même une politique de l'offre.
00:10:37Là, on a vu une vraie césure,
00:10:39une vraie césure entre le pouvoir politique
00:10:43et les patrons, sachant qu'au moment du Covid,
00:10:46ils étaient plutôt main dans la main.
00:10:48Souvenez-vous Bernard Arnault, ce même Bernard Arnault
00:10:51qui critique, il était allé chercher les masques,
00:10:54il avait transformé les usines en gel hydroalcoolique,
00:10:57ses usines de parfums pour les Français.
00:11:00Donc, il y avait une vraie coopération.
00:11:03Là, il y a effectivement une forme de divorce.
00:11:06Philippe Treynard, votre regard là-dessus.
00:11:08Je me pose une question.
00:11:10On parle de politique économique,
00:11:11ça fait partie des prérogatives d'un gouvernement.
00:11:14Où est la limite, pour vous,
00:11:16entre la politique économique et l'ingérence
00:11:18dans les affaires des entreprises ?
00:11:20Je parlerai pas d'ingérence,
00:11:22je parlerai plutôt d'interventionnisme.
00:11:24Je suis assez favorable, au fond,
00:11:26aux propos de Bernard Arnault,
00:11:28quand il dit que l'Etat s'ingère trop
00:11:30dans la gestion des entreprises.
00:11:32J'entends bien, gestion, n'est-ce pas ?
00:11:35Alors...
00:11:36Qu'est-ce qu'on veut dire par là ?
00:11:38Premier point, je trouve qu'il est normal,
00:11:40nous sommes dans un pays libéral,
00:11:42il est normal que différents points de vue s'expriment,
00:11:45dont celui du président appelant à la solidarité,
00:11:48et peut-être celui d'Arnault disant, je doute de la solution.
00:11:52Deuxièmement, la gestion, pour moi, c'est la gestion au quotidien,
00:11:55c'est comment on gère l'entreprise.
00:11:57Je crois que là, on fait allusion, probablement,
00:12:00à beaucoup de régulations,
00:12:02beaucoup trop de régulations en Europe,
00:12:04surtout qui n'ont pas fait l'objet d'une analyse pour avantage,
00:12:07qui n'est faite ni au niveau du Parlement européen,
00:12:10ni au niveau du Parlement français.
00:12:13Vous mettez en cause le travail de Vérité Trouvée et Charles-Andoué.
00:12:16Il y a un vrai problème.
00:12:18Il y a, par exemple, aux Etats-Unis,
00:12:20le CBO qui est un organisme qui va essayer de peser
00:12:23le pour et le contre économique de façon indépendante
00:12:26d'une mesure économique.
00:12:27Chez nous, ça ment, ça reste dans les débats politiques.
00:12:30Je crois que par rapport aux propos de Bernard Arnault,
00:12:35en revanche, là où je ne suis pas d'accord,
00:12:37c'est par rapport à l'appel d'Emmanuel Macron
00:12:41de dire, soyons solidaires.
00:12:43-"Soyons patriotes".
00:12:44-"Soyons patriotes", en un mot,
00:12:46soyons un peu solidaires face aux Etats-Unis.
00:12:49Nous sommes face à une administration
00:12:51qui nous a agressés, qui nous a insultés,
00:12:53n'est-ce pas ?
00:12:55Tous les mots sont possibles,
00:12:56sans aucun fondement, qui n'a aucun argument.
00:12:59Et effectivement, je pense, quelque part,
00:13:01nous devons, en tant que Français, être solidaires,
00:13:04même si, au fond, nous ne sommes pas d'accord avec le politique.
00:13:08Moi, je serai derrière Emmanuel Macron
00:13:10parce que je suis français.
00:13:12Et je pense que là, voyez-vous,
00:13:13c'était pas une question de gestion d'entreprise,
00:13:16c'est comment nous gérons, non point l'entreprise,
00:13:19mais notre relation avec les Etats-Unis
00:13:22et comment les Français constituent un front solidaire
00:13:26face à l'action américaine.
00:13:29-"Charles Rodwell", sur le patriotisme des grands patrons,
00:13:33à cela, Bernard Arnault répond ce que Marco Pommier disait,
00:13:36c'est-à-dire, moi, je paye 4 milliards d'euros par an
00:13:39pour financer l'Etat français.
00:13:41C'est une forme de patriotisme.
00:13:43J'investis 3,8 milliards d'euros en 2023 en France.
00:13:46Voilà, ça, c'est les chiffres qu'il a donnés hier au Sénat.
00:13:49Vous attendez plus de lui ?
00:13:52Moi, j'ai pris bien peu de grands patrons
00:13:54et d'entreprises de taille moyenne ou de petite taille
00:13:57en défaut de patriotisme.
00:13:59Quand vous êtes patron d'une entreprise
00:14:01qui, depuis 40 ans, a subi tous les boulets au pied au monde,
00:14:04les 35 heures, par exemple,
00:14:06ou l'explosion du coût du travail,
00:14:08ou l'effondrement de votre compétitivité,
00:14:10ou le fait de vivre dans un pays incapable de créer autant de richesses
00:14:14qu'une zone commerciale et économique comme celle des Etats-Unis,
00:14:18un chiffre, c'est que si le PIB de la zone euro
00:14:20et le PIB des Etats-Unis avaient été égaux
00:14:23au lendemain de la crise des subprimes,
00:14:25il y aurait 16 points d'écart.
00:14:27On est dans une zone économique qui crée moins de richesses
00:14:30que celle des Etats-Unis.
00:14:31Quand, malgré ça, vous continuez à créer des centaines de milliers
00:14:35d'emplois dans un pays comme la France,
00:14:37il n'y a pas plus patriotique.
00:14:39Ce que nous avons essayé de mettre en oeuvre depuis 2017,
00:14:42c'est de mener une politique économique
00:14:45à retrouver de la compétitivité au service de tous les Français.
00:14:48On n'a pas tout réussi, mais c'est l'exemple
00:14:50que madame donnait tout à l'heure.
00:14:52Lorsque, pendant la crise Covid, nous avons travaillé main dans la main,
00:14:56c'est parce que l'Etat et les entreprises,
00:14:59notamment les grandes entreprises, ont joué leur rôle,
00:15:02pour protéger les Français et pour relancer notre économie.
00:15:05Pour vous, dans ce bras de fer,
00:15:07Trump, Europe, sur les tarifs douaniers,
00:15:09il n'y a rien à attendre de Bernard Arnault.
00:15:12C'est normal qu'il se comporte comme il se comporte.
00:15:15Ou les autres.
00:15:16Sanofi...
00:15:17Est-ce que, par exemple, Bernard Arnault ou d'autres,
00:15:20Patrick Pouyanné,
00:15:21est-ce que vous voyez ces entreprises
00:15:23fermer toutes leurs activités en France
00:15:25pour délocaliser aux Etats-Unis ?
00:15:27En revanche, il faut trouver des solutions ensemble.
00:15:30Je propose une solution
00:15:32à la présidente de la Commission des affaires économiques.
00:15:35La proposition qu'on va faire dans notre commission d'enquête,
00:15:38c'est d'augmenter les taxes carbone aux frontières,
00:15:41européenne ou nationale, le fameux MACF,
00:15:43pour atteindre au produit fini,
00:15:45secteur industriel par secteur industriel,
00:15:47et toutes les recettes qu'on capte de cette taxe carbone,
00:15:50on la dédie à une chose,
00:15:52c'est la suppression des impôts de production.
00:15:54On taxe l'importateur américain ou chinois qui pollue
00:15:57pour importer en Europe ou en France,
00:15:59et on dédie 100 % des recettes
00:16:01à la baisse des impôts sur nos propres entreprises.
00:16:04C'est une solution pragmatique,
00:16:06qui sert à la fois les Français et à nos entreprises
00:16:09pour relancer la compétitivité en Europe
00:16:11et qui nous permet d'écarbonner.
00:16:13Sur cette question du patriotisme, vous l'avez évoqué,
00:16:16vous ne vous attendez rien de Bernard Arnault,
00:16:18c'est normal qu'il résonne en patron d'entreprise.
00:16:21Attention, en patron multinational,
00:16:23parce que je rappelle qu'il ne représente absolument pas
00:16:26le patron lambda en France.
00:16:29Je rappelle que 95 % des entreprises,
00:16:31c'est des TPE et des PME.
00:16:33C'est quand même la sixième plus grande fortune de France,
00:16:37ensuite, du monde, pardon.
00:16:39Ensuite, je rappelle aussi
00:16:41que Bernard Arnault profite fortement
00:16:44de l'Etat et de la puissance publique,
00:16:46295 millions d'euros d'aides publiques par an,
00:16:50mais il profite aussi du made in France
00:16:52et de toute l'image et de tout ce qui est fait en France
00:16:56pour qu'il y ait une formation de qualité
00:16:58et dont bénéficient ses salariés,
00:17:00des infrastructures...
00:17:023,8 milliards d'impôts en 2023, 4 milliards en 2024.
00:17:05Il profite de la France, ne serait-ce que le made in France.
00:17:08Voilà, il l'a construit sur une image de la France
00:17:11et donc, évidemment, qu'il profite
00:17:13de beaucoup de choses qui sont faites en France.
00:17:16Je le rappelle aussi, il fait tout pour éviter aussi l'impôt.
00:17:19Je rappelle qu'il a, je crois que c'est 33 filiales
00:17:23au Luxembourg, des dizaines de filiales
00:17:25dans les paradis fiscaux et judiciaires.
00:17:28Je ne voudrais pas mettre sur le même plan
00:17:30tous les patrons de France.
00:17:32On va avancer dans le débat.
00:17:34Dernière chose, sur la gestion, pour vous répondre,
00:17:36heureusement que l'Etat, parfois, se mêle de la gestion.
00:17:39Le Royaume-Uni vient de le faire en nationalisant
00:17:42le dernier haut fourneau en Angleterre.
00:17:44L'Italie l'a fait en nationalisant des hauts fourneaux
00:17:47et parfois les multinationales, et même souvent,
00:17:50en visant quand même principalement
00:17:52la rentabilité des capitaux,
00:17:54eh bien, elles baissent leurs investissements,
00:17:56leurs productions, leurs salaires
00:17:58et elles sabrent aussi la souveraineté,
00:18:01par exemple, industrielle d'un pays.
00:18:03Donc, fort heureusement, parfois, et même souvent,
00:18:05il faut intervenir, y compris dans la gestion.
00:18:08Fanny Guinocher, j'aimerais qu'on avance un peu
00:18:11et aller sur l'autre point qui est ressorti
00:18:13de l'audition de Bernard Arnault hier,
00:18:15cette façon qu'il a de donner son avis
00:18:17sur les négociations en cours entre l'Europe et les Etats-Unis
00:18:21sur les tarifs douaniers.
00:18:22Il faut négocier avec des concessions réciproques.
00:18:25Si on menace Donald Trump, on aura le résultat inverse.
00:18:28Là, c'est compliqué, parce qu'il sort de son rôle.
00:18:31Ceux qui négocient, ce sont les diplomates.
00:18:33Le risque, c'est d'être jugé parti.
00:18:35Ce qui est intéressant de voir,
00:18:37c'est que dans toutes ces prises de position,
00:18:40finalement, elles n'étaient pas autorisées, entre guillemets,
00:18:43auparavant. On ne les entendait pas,
00:18:45les patrons ne s'autorisaient pas à donner leur avis.
00:18:48C'est comme s'ils prenaient à partie l'opinion.
00:18:51Les commissions d'enquête se multipliant,
00:18:53il y en a eu plusieurs sur la réindustrialisation,
00:18:56il y en a une sur les aides publiques,
00:18:58ça donne du champ aux patrons qui ne sont pas trop encore
00:19:01dans les médias, mais quand même,
00:19:03avec la prise de parole, elle prend place.
00:19:05Alors, est-ce qu'elle prend place,
00:19:07parce que du côté des organisations
00:19:09qui sont censées les représenter,
00:19:11comme le MEDEF ou la CPME,
00:19:13est-ce que ces organisations sont en retrait ?
00:19:16Finalement, ce sont des figures...
00:19:18Tout le monde se souvient du MEDEF de Pierre Gattaz.
00:19:20Le MEDEF d'aujourd'hui, on l'entend moins.
00:19:23On l'entend moins, on entend des patrons
00:19:25qui, ad nominem, se présentent devant les Français
00:19:28pour donner leur avis.
00:19:29On le voyait très bien dans votre sujet,
00:19:32des patrons charismatiques,
00:19:33le patron de Total, Pouyanné, le patron de Safran,
00:19:36qui dit qu'il ne veut plus aller dans des villes
00:19:39où il y a des écolos, le patron de Michelin...
00:19:41On va le voir, vous l'avez vu,
00:19:43mais nos téléspectateurs ne l'ont pas encore vu.
00:19:46On voit bien que, là-dessus, les patrons s'autorisent ça.
00:19:49Mais ils s'autorisent ça aussi,
00:19:51parce que les Français sont demandeurs de ça.
00:19:53On a publié, dans La Tribune dimanche,
00:19:56il y a quelques jours, quelques semaines,
00:19:58un observatoire fait par Avas,
00:20:00qui dit que, pour les Français,
00:20:02les entreprises sont politiques.
00:20:03Vous avez quand même 78 % des Français
00:20:07qui pensent que les entreprises font de la politique.
00:20:10Vous avez 78 % d'entre eux qui pensent...
00:20:12Non, mais c'est quelque chose, je pense, d'assez nouveau.
00:20:15Vous avez 70 % des Français qui pensent
00:20:17qu'il existe des entreprises de droite ou de gauche.
00:20:20Donc, ça devient, en fait, un espace
00:20:23où des positions politiques s'affrontent
00:20:25encore plus qu'auparavant.
00:20:26Charles Rodoile fait de la politique,
00:20:28Bernard Arnault, quand il s'invite
00:20:30dans ses négociations entre l'Europe et les Etats-Unis,
00:20:33parce que l'enjeu n'est pas que économique-commercial,
00:20:36c'est aussi l'affirmation d'une Europe politique.
00:20:39La raison pour laquelle il s'y implique,
00:20:41c'est que les intérêts qu'il défend pour ses entreprises
00:20:45et pour notre pays, c'est l'intérêt
00:20:47de centaines de milliers de personnes
00:20:49qui travaillent en France.
00:20:50Je suis très heureux de voir qu'il y ait des patrons.
00:20:53On parle beaucoup de Bernard Arnault,
00:20:55de Jean-Pascal Trécoir, le patron de Schneider,
00:20:59quand vous prenez Florent Ménégault,
00:21:01le patron Michelin, quand vous prenez Olivier Andriès,
00:21:04qui s'exprimait dans notre commission d'enquête,
00:21:07qui intervient dans notre commission d'enquête
00:21:09au nom de Safran.
00:21:10Ces patrons ont des avis différents.
00:21:12Votre sujet va le montrer.
00:21:14Ils n'ont pas les mêmes avis sur...
00:21:16On va le regarder, parce que tout le monde en parle.
00:21:19L'idée, c'est d'élargir le débat.
00:21:20Ce que je voulais dire sur ce point,
00:21:22c'est que je trouve qu'il est très sain
00:21:25que les patrons prennent leur part dans le débat public
00:21:27au même titre que les syndicats, les associations,
00:21:30les associations en tout court, d'ailleurs,
00:21:32et que le reproche qu'ils nous ont fait
00:21:35d'interroger les patrons est assez illégitime,
00:21:37car les mêmes qui se plaignaient
00:21:39que le Parlement prenait des décisions hors-sol,
00:21:42alors que la vérité, c'est qu'on ne vit pas en vase-clos,
00:21:45on travaille jour et nuit avec des associations,
00:21:47mais les mêmes qui se plaignaient
00:21:49que le Parlement prenait des décisions en vase-clos
00:21:53Je trouve qu'il est très sain
00:21:55que ces chefs d'entreprise viennent s'exprimer publiquement
00:21:58pour exprimer leur point de vue très varié
00:22:00sur des questions structurantes pour la vie de notre pays
00:22:03et de notre économie.
00:22:05On va donc élargir le champ du débat,
00:22:07parce que Bernard Arnault, vous l'avez dit,
00:22:09n'est pas le seul grand patron à avoir fait entendre sa voix.
00:22:12D'autres ont poussé leur coup de gueule.
00:22:15On fait le point avec Stéphanie Despierres.
00:22:17Musique rythmée
00:22:21D'ordinaire, les grands patrons français sont très discrets.
00:22:24Pourtant, ces derniers mois, plusieurs figures du CAC 40
00:22:28ont poussé des coups de gueule.
00:22:30En décembre, lors d'un colloque sur l'électricité,
00:22:32le PDG de Total et l'ancien directeur d'EDF
00:22:36fustigent les lenteurs françaises.
00:22:38J'ai 500 développeurs énergie renouvelable en France
00:22:41qui arrivent à faire 300 à 400 mégawatts par an.
00:22:43Aux Etats-Unis, j'ai construit 2 gigawatts en un an.
00:22:46Je ne peux pas continuer à investir.
00:22:48C'est l'enfer d'investir en France pour des raisons réglementaires.
00:22:52Ce sont des délais administratifs incommensurables
00:22:55avec ce qu'on vit ailleurs.
00:22:56Il faut s'occuper de ça.
00:22:58Plan de réindustrialisation,
00:23:00commission d'enquête au Parlement,
00:23:02appel au patriotisme face aux droits de doigt d'Américains.
00:23:05En ce moment, les patrons de nos fleurons
00:23:07sont très sollicités par les politiques.
00:23:09Alors ils répliquent, parfois vertement,
00:23:12comme le directeur de Safran,
00:23:14aux députés qu'il interroge,
00:23:16sur les freins à la réindustrialisation.
00:23:18Pour moi, il n'est plus question, aujourd'hui,
00:23:21d'investir en France
00:23:24dans une ville qui est détenue par une majorité écologiste.
00:23:28C'est plus possible. Je ne le ferai pas.
00:23:32Si c'est pour se faire accueillir, quand on crée 500 emplois
00:23:36dans une région, si c'est pour se faire accueillir par des tomates,
00:23:40ce n'est pas la peine, je ne le ferai pas.
00:23:42Il y a les patrons qui parlent politique
00:23:44et il y a ceux qui sont tentés d'en faire, vraiment.
00:23:47En une du magazine Économique Challenge,
00:23:50le visage de Michel-Édouard Leclerc est une question,
00:23:53si c'était lui, à l'Elysée en 2027.
00:23:56Le roi des hypermarchés, homme très médiatique,
00:23:59laisse planer le doute sur une candidature à la présidentielle.
00:24:03Pourquoi pas, mais je me sens plus utile sur le terrain.
00:24:06Ce n'est pas forcément d'être candidat à quelque chose,
00:24:09c'est aussi d'accompagner des forces politiques,
00:24:12mais en tout cas de nourrir la vie politique où j'en ai envie.
00:24:15Selon un sondage commandé par l'hebdomadaire,
00:24:18les Français interrogés font plus confiance à Michel-Édouard Leclerc
00:24:21qu'à Jean-Luc Mélenchon ou Marine Le Pen
00:24:24pour faire des propositions efficaces pour le pays.
00:24:27Seul Édouard Philippe lui dame le pion.
00:24:29Philippe Treynard, on évoquera peut-être après
00:24:31le cas de Michel-Édouard Leclerc,
00:24:33mais tous ces coups de gueule de patrons,
00:24:36sortent-ils de leur rôle et font-ils de la politique
00:24:39ou c'est des choses qu'ils faisaient avant en coulisses
00:24:42et qui se jouent maintenant devant les Français ?
00:24:44Ca se joue plus maintenant devant les Français,
00:24:47mais c'est parce que la société française a changé
00:24:49et que les débats sont plus publics.
00:24:52Ils ont raison de souligner qu'il y a un problème
00:24:54et que ce problème pèse sur notre capacité à créer des emplois
00:24:58et à implanter des entreprises.
00:25:00Je crois qu'ils sont dans leur rôle...
00:25:02Ils sont légitimes.
00:25:03Ils sont légitimes de dire aux politiques
00:25:05que voilà les problèmes que nous rencontrons
00:25:08quand nous exerçons notre métier.
00:25:10Il est légitime qu'ils soient, à un moment donné,
00:25:13reviennent jusqu'à l'Assemblée nationale.
00:25:15Naturellement, dans des circonstances
00:25:17comme celles qu'on a vues,
00:25:19où on a un débat sur les droits de douane,
00:25:21il est légitime aussi que le politique
00:25:23se tourne vers les entreprises et leur dise
00:25:26qu'il y a gagné une négociation dont vous serez les gagnants.
00:25:30Mais, par exemple, il est absolument légitime
00:25:33que les entreprises, que Bernard Arnault,
00:25:35disent ce qu'il pense sur la façon de négocier
00:25:38les droits de douane.
00:25:39Est-ce qu'on va le suivre ?
00:25:41Mais qu'il donne son point de vue, c'est extrêmement important.
00:25:44Aurélie Trouvé, vous les accueillez comment,
00:25:47ces paroles de patrons qui pestent contre trop de réglementation,
00:25:50de normes, de contraintes ?
00:25:52D'abord, je veux dire que j'ai fait beaucoup d'auditions
00:25:55en tant que présidente de la Commission des affaires économiques
00:25:58avec mes collègues de patrons, évidemment, de grands groupes,
00:26:02parce que c'est important, évidemment,
00:26:04et ils font de la politique au sens de la vie de la cité,
00:26:07et c'est normal.
00:26:08Maintenant, évidemment,
00:26:10tous les patrons ne disent pas qu'il faut que l'Etat se retire.
00:26:13J'ai eu des représentants, par exemple,
00:26:16des dirigeants de Valeo ou d'autres grandes boîtes,
00:26:18qui disent qu'on a trop dérégulé,
00:26:21et le président Macron et ses gouvernements
00:26:23ont trop dérégulé, c'est ça qui a été dit, grosso modo.
00:26:27Il n'y a pas assez de protection aux frontières européennes,
00:26:30mais aussi d'intervention de la part de la France.
00:26:33Il y a ça aussi qui est dit.
00:26:34Ensuite, je rappelle aussi que...
00:26:36On entend ici Pouyanné, le PDG de Total,
00:26:39qui dit que j'ai construit ça à l'étranger.
00:26:41C'est pas lui qui l'a construit, c'est ses salariés.
00:26:44Je veux rappeler que la production de la richesse,
00:26:47la valeur ajoutée, c'est les salariés,
00:26:49c'est les travailleurs, c'est celui qui contribue
00:26:52directement et concrètement à produire de l'acier,
00:26:55si, par exemple, je pense aux salariés d'ArcelorMittal.
00:26:58Ce que je veux dire aussi,
00:27:00c'est que le point de vue des salariés est important
00:27:02et que, par ailleurs, moi, ce qui m'inquiète
00:27:05aujourd'hui dans ce pays, c'est que les dividendes
00:27:08sont de plus en plus importants.
00:27:09Il y a eu, je crois que c'est plus 30 % de dividendes...
00:27:13Pardon, plus 60 % de dividendes en cinq ans
00:27:15et les salaires ont diminué de 3 %.
00:27:17Comment ça se fait que ceux qui détiennent le capital
00:27:20gagnent de plus en plus et ceux qui travaillent
00:27:23gagnent de moins en moins ? Là, il y a un problème.
00:27:25Là, on doit se mêler de la gestion des entreprises.
00:27:28Où vont les bénéfices ?
00:27:30Fanny Guinocher, ce débat,
00:27:31est-ce que les patrons vont trop loin ?
00:27:33Sortent-ils de leur rôle ? On les entend aussi parfois
00:27:36se plaindre que l'Etat n'ait pas forcément
00:27:39une vision stratégique à long terme ?
00:27:41Ils n'ont pas tort. Il y a quand même eu des ratés
00:27:44dans la gestion de l'Etat.
00:27:45On voit bien que certaines entreprises...
00:27:50Enfin, ils peuvent se dire
00:27:52qu'ils pourraient donner des cours de gestion.
00:27:54En même temps, c'est très difficile
00:27:56parce que, de l'autre côté, quand vous avez
00:27:59une politique, aujourd'hui, c'est pas une sinécure,
00:28:01je pense, vu les injonctions contradictoires.
00:28:04Donc, chacun, si ces deux mondes arrivent à se parler,
00:28:07tant mieux. Là, on voit que c'est difficile,
00:28:09que c'est un moment de crispation,
00:28:11mais à un moment ou un autre, ils reviennent toujours
00:28:14à demander l'aide de l'un ou de l'autre.
00:28:16Bernard Arnault était parmi les patrons
00:28:19qui, au moment des Gilets jaunes, disaient à Emmanuel Macron
00:28:22qu'il fallait lâcher sur le SMIC.
00:28:24De l'autre côté, vous avez le politique
00:28:27qui va demander aux patrons, dans certaines zones,
00:28:29de garder une usine ouverte,
00:28:31parce que, pour un bassin d'emploi,
00:28:33c'est important, quitte à avoir quelques pertes.
00:28:36Donc, vous voyez, ce sont deux mondes.
00:28:38Pour les Français, c'est difficile de se dire
00:28:40qu'on est toujours en opposition.
00:28:42Si on arrivait un peu à sortir de ça...
00:28:44Parce que, oui, les salariés de Total,
00:28:47ils contribuent à la richesse de l'entreprise Total,
00:28:49mais ils en bénéficient aussi.
00:28:51Ce ne sont pas les plus maltraités, les salariés de Total.
00:28:54Ils ont de l'intéressement,
00:28:56ils ont des salaires qui sont plus élevés,
00:28:59et, de l'autre côté, les patrons,
00:29:01ce sont aussi ceux qui prennent des risques,
00:29:03qui donnent un cap, qui, effectivement,
00:29:06souvent mouillent leurs limites.
00:29:08Quand vous parlez avec les patrons de PME,
00:29:10ils disent que ils prennent des risques.
00:29:12Donc, c'est vrai qu'on voit bien
00:29:14que chacun défend son point de vue.
00:29:16Si on arrivait un peu à...
00:29:18Ca manque un peu de dialogue, on va dire,
00:29:20le dialogue serein.
00:29:21Il y a une diminution de salaire de 3 % en cinq ans
00:29:24et une augmentation de dividendes de 60 %.
00:29:26C'est des chiffres.
00:29:28Il y a des chiffres aussi,
00:29:29mais quand vous regardez, par exemple, Total,
00:29:32les salaires sont plus élevés que la moyenne.
00:29:34Macroéconomiquement, il y a un problème.
00:29:36Charles Redouelle, votre mot là-dessus.
00:29:39On parle de Michel-Édouard Leclerc.
00:29:41Je n'ai pas les mêmes chiffres que Mme Tourvay,
00:29:43mais il est évident, par contre,
00:29:45que les dividendes ont plus augmenté que les salaires.
00:29:48Il y a des millions de Français
00:29:50qui sont actionnaires de leurs entreprises.
00:29:52Quand on parle de dividendes,
00:29:54ils sont aussi versés aux Français,
00:29:56quelle que soit leur catégorie socioprofessionnelle.
00:29:59La deuxième des choses, c'est que tout le monde touche un peu,
00:30:02mais on gagne beaucoup moins collectivement,
00:30:05notamment que les Etats-Unis.
00:30:06On a un modèle économique macroéconomique
00:30:09qui nous empêche de créer de la richesse
00:30:11à sa juste valeur en Europe et en France.
00:30:13La politique économique qu'on a essayée de mener
00:30:16depuis sept ans, avec son lot de succès,
00:30:18c'est de rattraper ce retard en matière macroéconomique,
00:30:21en matière de création de richesse,
00:30:23par rapport aux 30 années qu'on a passées
00:30:26où le déficit de création de richesse a été abyssal
00:30:28entre les Etats-Unis et l'Europe d'autre part,
00:30:31au service de nous tous.
00:30:32D'un mot, et après, on parle de Michel-Édouard Leclerc.
00:30:35C'est important, par rapport au sujet qu'on regardait au départ,
00:30:39par rapport à l'étranger.
00:30:40N'oublions pas que les dividendes ont grossi,
00:30:43tout simplement parce que nous avons un déficit commercial,
00:30:46c'est-à-dire que nous avons besoin de capitaux étrangers
00:30:51pour financer ce déficit,
00:30:52et que nous versons de plus en plus de dividendes à l'étranger.
00:30:56Premier point.
00:30:57Deuxième point, la structure de nos entreprises
00:30:59devient de plus en plus complexe.
00:31:01Il y a énormément de dividendes inter-entreprises.
00:31:04Donc le grossissement des dividendes
00:31:06ne signifie pas grossissement des dividendes
00:31:09qu'un Arnaud se met dans sa poche pour s'acheter des châteaux,
00:31:12je sais pas quoi, pas du tout.
00:31:14D'ailleurs, on a bien vu, dans la part, n'est-ce pas,
00:31:17des salaires dans la valeur ajoutée n'a pas diminué,
00:31:20n'est-ce pas ?
00:31:22Et ce qui a vraiment augmenté, c'est la part des impôts.
00:31:25D'un mot aux deux députés.
00:31:27Un grand patron candidat à la présidentielle en 2027,
00:31:30Michel-Édouard Leclerc, ou un autre, vous y croyez ?
00:31:33Il y a eu des patrons d'associations,
00:31:35il y a eu des patrons de syndicats,
00:31:37il y a eu des hommes et femmes politiques
00:31:39qui sont régulièrement cités pour être candidats.
00:31:42Pourquoi pas un patron ? Aurélie Trouvé ?
00:31:44On a déjà un président de la République
00:31:46qui fait une politique en faveur des grands patrons,
00:31:49donc je pense qu'il faut maintenant une alternative.
00:31:52Ce ne sera pas un grand patron qui fera l'alternative.
00:31:55Merci à tous les quatre d'être venus sur le plateau
00:31:58de Ça vous regarde.
00:31:59On reçoit à présent un documentariste
00:32:02qui aime entrer dans la vie de ses personnages,
00:32:04que ce soit des artistes ou des hommes politiques.
00:32:07L'humain, d'abord, pourrait être sa devise.
00:32:10Bonsoir, Yves Geland.
00:32:12Vous êtes le co-réalisateur d'un documentaire
00:32:15en deux parties qui est consacré à Zelensky,
00:32:17diffusé sur Arte, une plongée fascinante
00:32:19dans la vie de ce saletin-banque de la télé
00:32:22qui est devenu chef d'un pays en guerre.
00:32:24On voit cela avec Hélène Bonduelle.
00:32:26-"Si on vous invite, Yves Geland,
00:32:29c'est pour évoquer l'incroyable destin
00:32:31de l'homme qui a envahi nos écrans depuis trois ans
00:32:34et à qui vous consacrez un documentaire,
00:32:36Volodymyr Zelensky.
00:32:38De la scène à la guerre,
00:32:39un parcours qui mêle les souvenirs intimes
00:32:42et les sous-brosseaux de l'histoire."
00:32:44-"Démochka !" -"Chiva !"
00:32:46-"Tak ya paidu ?" -"Idi !"
00:32:47-"Zhova !"
00:32:48-"Davayte druzhit damami !
00:32:51Davayte druzhit damami !"
00:32:53-"Ces enfants du même quartier vont pendant plus de 20 ans
00:32:56monter ensemble sur les scènes d'Ukraine et d'ailleurs."
00:32:59-"Le Gvartal 95, du nom du quartier où ils ont grandi."
00:33:03-"Zdez byli
00:33:06pervoye koncerty na ete scenye..."
00:33:09-"L'histoire d'un gosse soviétique qui rêvait de paillettes
00:33:12et d'applaudissements.
00:33:13Votre film s'appuie sur des archives inédites,
00:33:16sur le témoignage du président ukrainien
00:33:19et celui de ses amis les plus proches."
00:33:23-"Notre première affiche.
00:33:27C'est comme ça qu'on s'est lancés dans tous ces projets.
00:33:30C'étaient des projets complètement fous.
00:33:33Personne ne croyait ça possible,
00:33:35mais lui, c'était un leader, un super chef,
00:33:38un homme plein d'idées,
00:33:40comme un brise-glace qui ouvre le chemin."
00:33:43-"La fiction et la réalité qui se mêlent
00:33:45avec sa série Serviteurs du peuple
00:33:47et l'incroyable annonce de sa candidature
00:33:50à la présidentielle bien réelle cette fois,
00:33:52en plein milieu d'un show télé."
00:33:54-"Moi, d'ailleurs, tout le monde me demande
00:33:56si je vais ou pas.
00:33:57Je vous promets quelque chose
00:33:59et je le fais immédiatement.
00:34:01Je vais au président de l'Ukraine."
00:34:03...
00:34:06-"Sitôt sa déclaration terminée,
00:34:08Zelensky remonte sur scène."
00:34:10-"Zelensky, du burlesco tragique,
00:34:13est le tournant, ce 24 février 2022,
00:34:16lorsque la guerre éclate,
00:34:18et cette image du président Zelensky
00:34:20qui refuse de quitter le palais présidentiel."
00:34:23-"Premier ministre Schlegel,
00:34:25tout.
00:34:26Podoliak, tout.
00:34:28Président, tout."
00:34:30-"Des scènes de spectacle,
00:34:32aux scènes de guerre,
00:34:34le pouvoir de l'image n'a jamais quitté le saltimbanque
00:34:37devenu président."
00:34:39Bonsoir, Yves Joland.
00:34:41Quand on revoit cette vidéo de Zelensky
00:34:43et de sa garde rapprochée en 2022 devant le palais présidentiel,
00:34:47on voit d'abord l'homme politique,
00:34:49et quand on a regardé votre documentaire,
00:34:51on voit aussi l'ancienne humoriste star de la télé
00:34:54qui connaît parfaitement le pouvoir de l'image.
00:34:56C'est aussi ça, Zelensky ?
00:34:58Oui, c'est une nouvelle génération d'hommes politiques
00:35:01qui sont presque en avance sur la France et l'Ukraine
00:35:04quand on voit son entourage.
00:35:05Je sais pas si c'est de l'avance,
00:35:07c'est une autre manière de voir de la politique,
00:35:10même si ici aussi, on est très accro aux réseaux sociaux
00:35:13et que les hommes politiques s'en servent,
00:35:15mais lui, en tout cas, effectivement,
00:35:17c'est un saltimbanque devenu président
00:35:20sans même passer par la case homme politique.
00:35:22Il n'a pas été élu, il n'a même pas fait une campagne politique
00:35:26et il est passé directement de la Seine à la présidence.
00:35:29Tout ça vient de loin, peut-être,
00:35:31mais il n'a pas été député et autour de lui,
00:35:33les gens qui sont autour de lui,
00:35:35c'est des gens qui viennent de l'audiovisuel,
00:35:38du spectacle, c'est un showman jusqu'au bout.
00:35:40C'est un homme qui vient du monde de la culture,
00:35:43qui est allé vers la politique.
00:35:45C'est ça qui vous a convaincu d'aller sur ce projet
00:35:48avec Ariane Chemin et Elisa Vapnay.
00:35:50Vous êtes à trois sur ce travail.
00:35:52Oui, on a signé le film à trois
00:35:53et Ariane est venue me chercher
00:35:56et ça devait être, sans doute, en juin 2022,
00:36:00donc quelques mois après le déclenchement de la guerre,
00:36:03j'allais dire presque de la seconde guerre,
00:36:05puisque la guerre pour les Ukrainiens a commencé en 2014
00:36:08avec l'invasion du Donbass, l'annexion de la Crimée.
00:36:11J'avais été cette année-là au Festival de Cannes
00:36:14et j'avais vu Zelensky apparaître un mois plus tôt...
00:36:18Non, c'était l'année d'avant.
00:36:20Oui, je me trompe d'une année, mais en tout cas...
00:36:23Il s'est adressé à la salle du festival.
00:36:25Oui, c'est ça.
00:36:26Et quand Ariane est venue me proposer ce film,
00:36:29parce qu'elle avait fait toute une série
00:36:31pour Le Monde, Ariane Chemin,
00:36:33qui s'appelait Les cinq vies de Volodymyr Zelensky,
00:36:36elle a pensé, évidemment, à ma passion d'enfance,
00:36:38mes deux passions d'enfance,
00:36:40qui sont, vous le rappelez,
00:36:42les artistes et la politique,
00:36:43les hommes politiques et les artistes.
00:36:46Et Chaplin, que vous partagez avec Zelensky,
00:36:48cette passion pour Chaplin.
00:36:50Oui, avec beaucoup d'autres personnes.
00:36:52C'est dans le costume de Chaplin
00:36:54qu'il est devenu lauréat de Danse avec les stars.
00:36:56Exactement. Il y a eu plusieurs étapes,
00:36:59mais parmi les différentes étapes, il y a eu, effectivement,
00:37:02Charlot, qui fait partie de ces références,
00:37:05comme d'autres, puisqu'il nous a confié,
00:37:07comme lui, comme son copain d'enfance,
00:37:09que quand ils étaient gosses, ils se passaient en boucle
00:37:12les films de Louis de Funès et de Pierre Richard.
00:37:15J'ai découvert que Zelensky ne parlait pas l'ukrainien
00:37:18avant de se lancer dans la campagne présidentielle.
00:37:21On va voir comment, justement,
00:37:23lui-même a un peu mis en scène son apprentissage.
00:37:25Musique rythmée
00:37:28-"Volodya Zelensky est russophone.
00:37:30S'il veut devenir président de l'Ukraine,
00:37:33il doit maîtriser l'ukraïnais.
00:37:35Alors, il met en scène son apprentissage
00:37:38et invente un nouveau jeu, la langue et les muscles."
00:38:20On est en pleine campagne présidentielle
00:38:23et on a l'impression que ce qui était un point faible
00:38:25pour lui face à son adversaire Petro Poroshenko,
00:38:28il en fait finalement un atout, presque.
00:38:30C'est son sens formidable qu'il a de l'autodérision.
00:38:33Il parlait déjà un peu l'ukrainien, qu'il a appris à l'école.
00:38:36On a d'ailleurs filmé à Kriverix, sa ville natale,
00:38:39ses institutrices, les deux enseignantes,
00:38:41qui lui ont appris l'ukrainien, mais sa langue maternelle,
00:38:44c'est quand même le russe, et il avait de grosses difficultés
00:38:48quand même à parler l'ukrainien.
00:38:50Aujourd'hui, il ne parle plus qu'ukrainien,
00:38:52mais il dirait aujourd'hui que c'est sa langue maternelle,
00:38:55comme auto-persuasion, parce que c'est devenu politique.
00:38:59La langue, on le voit, est devenue une question politique
00:39:02et avec Ariane, on a demandé à chacun des hommes et des femmes
00:39:05que l'on a filmé de s'exprimer dans la langue de leur choix.
00:39:09Vous l'avez évoqué, mais votre documentaire
00:39:11montre l'enfance de Zelensky dans cette ville à Kriverix,
00:39:14c'est comme ça qu'on dit ?
00:39:16Une ville industrielle triste, humide,
00:39:18où on ne parlait que le russe.
00:39:20Zelensky, en fait, c'est plus l'enfant de l'Union soviétique
00:39:23qu'un enfant de l'Ukraine.
00:39:25Oui, on a du mal à l'imaginer,
00:39:27et quand on est tombé sur les photos,
00:39:29ces photos de classe,
00:39:31les photos où il, nous, son petit foulard rouge de pionnier,
00:39:34avec l'insigne de Lénine à la boutonnière,
00:39:38on le voit, d'ailleurs, c'est lui, ici,
00:39:41donc on peut l'apercevoir,
00:39:43c'est celui qui se tient, d'ailleurs,
00:39:46très souvent, sur les photos,
00:39:47et les photos de groupe, on voit,
00:39:49il y a vraiment le petit Volodymyr,
00:39:52qu'on appelait à l'époque, voilà, le voici,
00:39:54qu'on appelait Volodia, qu'on appelait Vova,
00:39:57et les autres, et il se tient au garde-à-vous.
00:39:59C'est facile de le dire après coup,
00:40:01mais on a l'impression qu'il y a lui et les autres.
00:40:04D'abord, il est le plus petit,
00:40:06et puis il a une sorte de détermination dans le regard,
00:40:09c'est devenu l'affiche de notre film,
00:40:11et là, oui, il a l'insigne de Lénine à la boutonnière,
00:40:14et donc, c'est un petit soviétique
00:40:16qui presque prête allégeance au Parti communiste,
00:40:21comme tous les gosses, à dire vrai, c'est la dernière génération.
00:40:24Là, il a 12 ans, et il devient membre des Pionniers,
00:40:27et petit à petit, très vite, l'année d'après,
00:40:30l'Ukraine devient indépendante, il dénoue son foulard,
00:40:33et il va vraiment avec satisfaction,
00:40:35même s'il dit, honnêtement, à cet âge-là,
00:40:37il était pas vraiment politice,
00:40:39et sa conscience politique sera très tardive.
00:40:42La grande richesse de votre documentaire,
00:40:44c'est les archives, un énorme travail sur les archives.
00:40:47C'est Elisa Vapnay qui les a...
00:40:49Elle s'en est occupée, elle est russophone,
00:40:51et donc, elle a pu retrouver, notamment,
00:40:54dans cette émission, le fameux KVN,
00:40:57et c'est des heures et des heures...
00:40:59C'est une sorte d'interville du rire,
00:41:01mais qui rassemblait tous les pays de l'ex-URSS
00:41:04après la chute de l'URSS.
00:41:05C'est entre l'interville et l'Eurovision,
00:41:08c'est un énorme télécroché
00:41:11où on va tester ce qui va servir beaucoup
00:41:13à Zelensky, on trouve des traces de cette formation,
00:41:16qui va être, pour lui, un ascenseur social,
00:41:18qui est, finalement, le sens de la répartie,
00:41:22c'est la tête et les jambes, aussi,
00:41:24et puis c'est savoir danser, savoir faire rire.
00:41:27Je crois que ça s'appelle
00:41:29le Club des Joyeux Débrouillards,
00:41:30le KVN.
00:41:32On y voit l'homme de spectacle,
00:41:34l'humoriste, la star de la télé,
00:41:35puis on voit dans votre documentaire
00:41:38la mue de Zelensky.
00:41:39On va regarder sa première prise de parole politique,
00:41:42c'était en 2014, juste avant ce que vous avez appelé
00:41:44la première guerre d'Ukraine.
00:41:46Ce jour-là, Zelensky quitte son costume d'humoriste
00:41:49et il s'adresse directement à Vladimir Poutine.
00:42:09Ce jour-là, il parle en russe,
00:42:11et il se dit prêt à supplier Vladimir Poutine à genoux
00:42:14de ne pas s'en prendre aux frères ukrainiens.
00:42:16Il ne comprend pas, on est très loin du Zelensky d'aujourd'hui.
00:42:39En Ukraine.
00:42:40Voilà.
00:42:41Donc, il est dans une position de pacification,
00:42:44et le fait qu'il dise
00:42:45qu'il est prêt à s'agenouiller devant Poutine
00:42:48pour que le peuple ne soit pas à genoux,
00:42:50lui sera reproché lorsqu'il sera vraiment candidat.
00:42:53Il ne pense pas une seconde être candidat à la présidence,
00:42:56il n'a pas ça en tête,
00:42:57et ça lui sera reproché par Poroshenko
00:42:59en lui disant qu'il s'agenouille devant Poutine.
00:43:02Donc, il a une position, oui,
00:43:04d'essayer...
00:43:05Ca a toujours été ça, même pendant sa campagne,
00:43:07de faire en sorte que le sang ne coule pas.
00:43:11Et d'ailleurs, lorsqu'il fera son discours comme président,
00:43:15son discours d'invastiture, il dira
00:43:18que je vous ai fait rire jusqu'à maintenant,
00:43:21et j'espère ne pas vous faire pleurer.
00:43:23-"Je ferai tout pour ne pas vous faire pleurer."
00:43:26-"Hélas, l'avenir en décidera autrement."
00:43:29Vous montrez aussi ce moment important
00:43:31dans sa bascule, justement, vers la politique,
00:43:34c'est quand il prend conscience qu'il est populaire,
00:43:37et qu'il est populaire auprès des soldats ukrainiens.
00:43:40En 2014, il se rend sur le front, dans le Donbass,
00:43:43il va rencontrer les troupes ukrainiennes.
00:43:45C'est un moment important ?
00:43:47Oui, je pense. En tout cas, on l'a interrogé là-dessus,
00:43:50on l'a vu en fin août, et il dit que pour lui,
00:43:52c'est un moment important, parce qu'il voit la guerre de loin,
00:43:56jusqu'à maintenant, ça ne l'intéresse pas,
00:43:58les questions militaires, il n'a jamais eu rien à faire
00:44:01de ça jusqu'à maintenant.
00:44:03Il a peur de la vue du sang.
00:44:04Il n'a pas voulu faire son service militaire.
00:44:06Il a échappé au service militaire,
00:44:08ce qui va lui être reproché par son adversaire
00:44:11pendant la campagne présidentielle.
00:44:13Et donc, tout d'un coup, il se retrouve, oui,
00:44:16à quelques kilomètres ou centaines de mètres du front,
00:44:19au Donbass, et il rencontre, oui, ses hommes et ses femmes,
00:44:22et il voit combien, avant même la série Serviteurs du peuple,
00:44:25le fait qu'il soit tous les soirs, le samedi,
00:44:28à faire ses shows avec sa bande de chréliriques,
00:44:31ses joyeux copains du Quartal 95,
00:44:33il mesure sa popularité.
00:44:34Et à ce moment-là...
00:44:35Il y a des soldats qui lui disent
00:44:37que s'il se présente, ils votent pour lui.
00:44:40L'élection est encore loin et il n'y pense pas vraiment.
00:44:43Mais rétrospectivement, ça nous a quand même interpellés
00:44:46que, notamment, Yuri Tira,
00:44:47qui l'accompagne ce jour-là, un des témoins du film,
00:44:50puisqu'on a tous les gens qui ont jalonné sa vie
00:44:53de l'enfance jusqu'à la présidence,
00:44:55se rappellent très bien de ce moment-là
00:44:57où des soldats lui disent de se présenter.
00:44:59Peut-être qu'il y a eu une chose qui a germé,
00:45:02on ne le saura pas vraiment.
00:45:03Dans la foulée, peu de temps après,
00:45:06il se lance dans cette série Serviteurs du peuple.
00:45:08Il n'est pas encore, à ce moment-là,
00:45:10un instrument électoral, qu'il deviendra
00:45:13lors de la troisième saison.
00:45:14Il y incarne un Ukrainien un peu lambda,
00:45:17qui se retrouve propulsé à la présidence de l'Ukraine.
00:45:21Serviteurs du peuple, ce sera ensuite, d'ailleurs,
00:45:24le nom de son parti, quand il se lancera.
00:45:26Tout est lié.
00:45:27C'est incroyable. Quand on réfléchit
00:45:29que ses copains, qui jouent le rôle de ses copains,
00:45:32sont dans la série...
00:45:33-"Ces copains d'enfance sont dans sa troupe."
00:45:36Il joue le rôle des copains d'enfance ensuite dans la série.
00:45:41Celui qui est le scénariste de la série,
00:45:43aujourd'hui, devient la plume du président.
00:45:46Le nom de son quartier, Kvartal 95,
00:45:49va devenir le nom de sa troupe.
00:45:51Tout est entremêlé.
00:45:52Il en joue de manière assez brillante, finalement.
00:45:57On va écouter un moment très fort dans votre documentaire.
00:46:00C'est une d'entre elles qui fait partie de votre troupe.
00:46:04Olena, on l'écoute et on en parle après.
00:46:07...
00:46:11Au départ, c'était une série comique.
00:46:13...
00:46:16Et ça s'est transformé en cauchemar.
00:46:18Et ceux qui disent maintenant que ça faisait partie d'un plan,
00:46:23cette série et toute la campagne électorale,
00:46:26non, rien n'était prévu.
00:46:28...
00:46:32Ca s'est fait comme ça.
00:46:36C'est devenu la vraie vie et nous sommes sortis du scénario.
00:46:40Ces larmes et ces phrases, elles sont terribles.
00:46:43On sent presque une pointe de regret.
00:46:46Comment vous les interprétez ?
00:46:48Oui, on lui a montré beaucoup d'images,
00:46:51notamment des jours heureux et de la série.
00:46:54Ca donne le sentiment que tout est parti
00:46:57d'une sorte de blague à la coluche qui a mal tourné,
00:47:00en tout cas qu'elle le vit comme ça.
00:47:02Oui, et il faut savoir le moment où on la filme.
00:47:04Une demi-heure avant, on a eu une alerte
00:47:07et il y a eu l'alarme qui a sonné.
00:47:10Il fallait descendre aux abris.
00:47:12Elle est très présente dans leur vie.
00:47:14Maintenant, c'est...
00:47:16Evidemment, il y a quelque chose qui leur a échappé
00:47:19et il n'est pas question de la guerre dans cette série.
00:47:22Ca n'était pas dans le scénario, elle le dit,
00:47:24mais par une séquence, que je vous laisse découvrir,
00:47:27qui clôture presque ces deux épisodes,
00:47:30et où on voit qu'il y a déjà quelque chose de prémonitoire
00:47:35qui était un rêve dans le film
00:47:37et qui devient aujourd'hui un vrai cauchemar.
00:47:40Un mot de la place de ses amis dans son entourage,
00:47:42dans sa vie, vous l'avez dit,
00:47:44mais on le voit dans votre documentaire,
00:47:46son chef de cabinet et celui qui écrit ses discours aujourd'hui,
00:47:50ils l'ont accompagné avant cette période de sa vie.
00:47:53Lui, c'est pas le chef de cabinet, c'est la plume du président.
00:47:56Derrière, André Yerma, numéro 2 de la présidence,
00:47:59le chef directeur de cabinet,
00:48:01et qui, lui, travaillait déjà pour le Quartal 95,
00:48:03c'est un ancien producteur, il a produit des films de gangsters,
00:48:07et cet homme-là était l'avocat de...
00:48:10-...de la boîte de production.
00:48:12Ils viennent tous de ce milieu-là, effectivement.
00:48:15L'amitié, c'est important.
00:48:16On lui reproche même, d'ailleurs,
00:48:18de ne s'entourer que d'un tout petit cercle de très proches,
00:48:22qui sont souvent des gens de Créviric,
00:48:24des gens qui l'ont accompagné déjà dans le milieu du spectacle,
00:48:28des shows, de l'audiovisuel,
00:48:29et qui sont souvent toujours les mêmes à qui il fait confiance
00:48:33et qui ne sait pas élargir trop vraiment son entourage.
00:48:36Un mot, quand même, de Lamu en chef de guerre,
00:48:38parce que quand il parle, les premières années de son mandat,
00:48:42on sent qu'il se sentait pas à sa place,
00:48:44et en fait, il était fait pour devenir chef de guerre,
00:48:47parce que c'est là qu'il se révèle.
00:48:49Personne ne pouvait l'imaginer, c'est ce qui est passionnant,
00:48:52c'est pour ça qu'on s'est lancé dans cette entreprise.
00:48:55Personne ne pouvait imaginer qu'il se révélerait.
00:48:58C'est ça, la mutation de cet homme,
00:49:01cette transformation qu'on raconte,
00:49:03depuis son enfance jusqu'à la présidence,
00:49:06c'est vraiment le février 2022 qui va tout changer,
00:49:08qui va tout changer dans les paroles,
00:49:11qui va tout changer même dans le physique.
00:49:13Regardez-le.
00:49:14On dit qu'il s'est laissé pousser la barbe,
00:49:16il s'est laissé pousser les muscles.
00:49:19Comme c'est un acteur, il a réussi à trouver une autre manière
00:49:22de s'habiller, très longtemps en couleur militaire,
00:49:25et depuis peu, il est en noir,
00:49:27et c'est là qu'il va se révéler.
00:49:29Comme président, il a, d'une certaine façon,
00:49:31déçu entre 2019 et 2022.
00:49:32Merci, Yves Jelan, d'être venu nous voir.
00:49:35Je rappelle le titre de ce documentaire,
00:49:37qui est en deux parties à voir sur Arte en replay.
00:49:40Zelenski, merci à vous.
00:49:42C'est l'heure de la question qui fâche, à présent.
00:49:47Générique
00:49:49...
00:49:56Merci à vous de nous accueillir pour cette question
00:49:59qui fâche, Vincent Jeanbrun.
00:50:01Vous êtes député, ancien maire de la île-et-Rose,
00:50:05député du groupe de la droite républicaine.
00:50:07Face à vous, Hakim El Karoui.
00:50:10Bonsoir.
00:50:11Vous êtes essayiste, président du Club 21e siècle
00:50:14et fondateur du cabinet de conseil Volensia.
00:50:16La question qui fâche, aujourd'hui,
00:50:18faut-il développer l'enseignement de l'arabe
00:50:21dans les écoles publiques ?
00:50:22C'est ce que préconise le rapport sur l'antrisme des frères musulmans.
00:50:26On va commencer par une mise en perspective de ce débat
00:50:29avec Clément Perrouat.
00:50:31Notre question qui fâche nous est inspirée, ce soir,
00:50:34par le rapport sur les frères musulmans
00:50:36et l'islamisme politique en France.
00:50:38Ils préconisent, notamment,
00:50:40de renforcer l'apprentissage de l'arabe à l'école.
00:50:43Les chiffres à ce sujet sont éloquents.
00:50:46En 2023, dans les lycées français,
00:50:48seuls 3 356 élèves apprenaient cette langue.
00:50:52En 2024, seuls 7 postes sur 1 271 en langue vivante
00:50:56ont été ouverts à l'arabe au CAPES, le concours des enseignants.
00:51:00Alors qu'on estime à 5 millions
00:51:02le nombre de personnes d'origine arabe en France,
00:51:05cette langue est clairement sous-enseignée.
00:51:07Elle semble souffrir de certains préjugés.
00:51:10La langue, vous savez, c'est ce qui véhicule la culture,
00:51:14l'imaginaire.
00:51:16Donc la langue arabe, c'est la langue de l'islam,
00:51:19c'est la langue des Maghrebans,
00:51:21c'est la violence,
00:51:25tout ce qui est véhiculé actuellement.
00:51:30Le rapport pointe une problématique.
00:51:33Le manque d'enseignement de l'arabe dans le cadre scolaire
00:51:36laisse la porte ouverte à un apprentissage dans d'autres cadres,
00:51:39notamment les mosquées.
00:51:40La langue s'apprend alors en même temps que le Coran
00:51:43et les cours deviennent autant religieux que linguistiques.
00:51:46Un phénomène dénoncé par plusieurs responsables politiques,
00:51:50à commencer par le président de la République, c'était en 2020.
00:51:53Et il faut, sur ce sujet,
00:51:55sortir de l'hypocrisie dans laquelle nous sommes.
00:51:59Quand nous ne l'enseignons pas à l'école ou dans un péril scolaire
00:52:01qui est compatible avec les lois de la République,
00:52:03nous acceptons qu'il y ait plus de 60 000 jeunes aujourd'hui
00:52:06qui vont l'apprendre dans des associations
00:52:08qui leur proposent, pour le pire.
00:52:12D'autres politiques en responsabilité
00:52:14ont voulu développer l'arabe,
00:52:15comme Jean-Michel Blanquer, Gérald Darmanin
00:52:18ou plus anciennement Najat Vallaud-Belkacem
00:52:20et Nicolas Sarkozy.
00:52:22Mais ces annonces sont restées au stade des intentions.
00:52:25Ils faisaient face à une forte opposition politique.
00:52:27Alors, notre question qui fâche est la suivante.
00:52:30Faut-il développer l'arabe à l'école ?
00:52:33A. Caroui, vous plaidez depuis des années
00:52:35pour l'enseignement de l'arabe dans les écoles publiques.
00:52:37Je crois que vous aviez évalué, dans un rapport en 2017,
00:52:40qu'il y a environ 6 millions de personnes en France
00:52:43qui sont d'origine arabe, on va dire,
00:52:45pour la plupart français,
00:52:47et face à cela, on a eu l'an dernier
00:52:50sept postes qui ont été ouverts au CAPES d'arabe,
00:52:53sept postes sur 1 271 pour l'ensemble des langues vivantes.
00:52:57Comment vous expliquez un tel écart ?
00:52:59Parce que, comme l'a démontré votre reportage,
00:53:02il y a des discours politiques sur ce sujet.
00:53:05Je pense que quand on parle à des dirigeants
00:53:08et qu'on essaye de leur expliquer, on réussit à les convaincre,
00:53:11la mise en oeuvre n'a jamais suivi, pour plusieurs raisons.
00:53:15La première, c'est que l'éducation nationale
00:53:17n'est pas très à l'aise.
00:53:19Elle vit avec le mythe de l'assimilation,
00:53:21mais déjà de l'assimilation des provinces, du patois.
00:53:25On n'en est pas encore sortis, vous pensez ?
00:53:27On en est en plein.
00:53:28Après, il y a toujours des polémiques politiques,
00:53:31pour dire que ça va créer du communautarisme,
00:53:33alors qu'enseigner l'arabe,
00:53:35d'abord, face à la montée de l'islamisme,
00:53:38c'est une façon d'avoir les enfants à l'école
00:53:40et pas à la mosquée,
00:53:41c'est un produit d'appel.
00:53:43C'est ce qu'il dit dans ce rapport sur l'entrisme des frères musulmans.
00:53:47Et plus profondément, l'islamisme des jeunes,
00:53:50c'est très largement une recherche d'identité,
00:53:52dans un contexte où ils ont perdu le lien
00:53:54avec la culture d'origine.
00:53:56La religion qu'on leur sert,
00:53:57qui est sur les réseaux sociaux plus que dans les mosquées,
00:54:01c'est une sorte de pré-taportée idéologique
00:54:03pré-taportée de comportement.
00:54:05En fait, enseigner l'arabe, c'est pas enseigner la religion.
00:54:08C'est comme on enseigne l'anglais,
00:54:10on apprend une langue, mais aussi une histoire,
00:54:13une culture, une tradition.
00:54:15C'est une façon de reconnecter à une réalité,
00:54:17de casser les fantasmes,
00:54:19et c'est une façon très utile de lutter contre l'emprise islamiste.
00:54:22Vincent Jambrin, vous n'êtes pas favorable
00:54:25à l'enseignement de l'arabe dans les écoles publiques.
00:54:28Quel problème soulève-t-il ?
00:54:29C'est pas tout à fait ma position.
00:54:31Le groupe de la droite républicaine
00:54:33défend l'idée qu'il faut prioriser les choses.
00:54:36Donc, d'abord, ayons une école qui apprend le français,
00:54:39et qui l'apprend bien,
00:54:40et après, on peut s'ouvrir à d'autres langues.
00:54:43Mais on s'ouvre déjà à d'autres langues.
00:54:45J'ai été très heureux que l'école de la République
00:54:48m'ait permis de nouer avec la culture,
00:54:50qui était celle de mes grands-parents,
00:54:52avec cette langue qui est un outil formidable,
00:54:55et on n'a pas eu besoin de mêler l'italien
00:54:58à une religion pour me l'apprendre.
00:55:01Donc, sur le principe, évidemment qu'il faut plutôt
00:55:05pouvoir permettre dans un cadre républicain.
00:55:08La difficulté et la critique qui a souvent été portée,
00:55:11c'est que ça existe déjà, l'enseignement de l'arabe,
00:55:14comme d'autres langues, à l'école, et cela, dès le primaire.
00:55:17On propose une heure et demie de cours en plus par semaine
00:55:20dans nos écoles, mais qui le fait ?
00:55:22Souvent, des professeurs qui sont, et c'est des conventions qui datent,
00:55:26d'origine du Maroc, de la Tunisie, d'Algérie,
00:55:29et c'est là où la question se pose,
00:55:31puisqu'ils sont censés être encadrés par les lois de la République,
00:55:34notamment la laïcité, les valeurs de la République,
00:55:37l'égalité hommes-femmes.
00:55:39Or, qu'est-ce qui se passe ?
00:55:40Aujourd'hui, on a découvert qu'on n'avait personne
00:55:43qui contrôlait ce qui se passait dans ces cours.
00:55:46Par rapport à ces arguments-là.
00:55:48On parle de deux choses différentes.
00:55:50L'enseignement de l'arabe, c'est une langue vivante 3,
00:55:53en général, à partir de la seconde.
00:55:55Ce dont vous parlez, c'est le système des ELCO,
00:55:57les Langues et Cultures d'Origine, qui date des années 75,
00:56:01où il y avait des accords avec des pays qui étaient des pays
00:56:04d'émigration, avec l'idée que les enfants, les parents,
00:56:07allaient rentrer dans le pays, et qu'il fallait leur apprendre
00:56:10la langue et la culture d'origine.
00:56:12Effectivement, des Etats envoient des instituteurs,
00:56:15parce que c'est en primaire, moi, je l'ai fait,
00:56:18donc je peux en témoigner,
00:56:19c'est des instituteurs qui sont très sélectionnés.
00:56:22Là où il y a un sujet, c'est peut-être les Turcs.
00:56:25Les Turcs, il y a une dimension politique
00:56:27dans tout ce que fait l'Etat turc pour contrôler les Franco-Turcs.
00:56:31Mais on parle de deux choses.
00:56:33On peut être contre les ELCO, qui ne marchent pas,
00:56:35pour une raison simple, c'est que l'arabe qui est enseigné,
00:56:39c'est un arabe classique, qui n'est absolument pas parlé
00:56:42et qui n'a pas d'usage.
00:56:43Moi, ce pour quoi je plaide, c'est pas celui-là.
00:56:46C'est l'arabe à l'école,
00:56:48par des professeurs, des enseignants de l'école publique,
00:56:51français, certifiés, agrégés, et le maître...
00:56:54Là-dessus, c'est pas une question qui fâche,
00:56:56je peux être d'accord avec vous.
00:56:58L'école de la République, elle s'enrichit
00:57:01d'avoir ses enfants et ses élèves qui apprennent un maximum de langues.
00:57:05En plus, vous aviez raison de le dire,
00:57:07le reportage le disait bien, il y a une logique
00:57:09de retrouver ses racines et d'avoir des outils
00:57:12pour mieux comprendre un certain nombre de choses.
00:57:15Par exemple, quand on a fouillé les archives,
00:57:17on a vu qu'Anne-Marie Gennevard s'était opposée,
00:57:20par exemple, en 2016, à Najat Vallaud-Belkacem,
00:57:23quand elle a voulu développer l'enseignement.
00:57:25-...parce qu'on parlait de l'enseignement en primaire
00:57:28à l'époque de Najat Vallaud-Belkacem.
00:57:30Le défi, c'est de ne pas attendre le collège.
00:57:33Là-dessus, on a un enjeu, parce que je vois les gamins
00:57:36qui vont fréquenter, vous disiez, produits d'appel des mosquées,
00:57:39et quand c'est une mosquée, j'allais dire,
00:57:42pignon sur rue, sans problème, c'est libre à chacun
00:57:45d'aller, évidemment, la fréquenter,
00:57:47mais de fait, vous avez des parents qui se disent
00:57:49qu'il faut absolument que mes enfants apprennent
00:57:52l'apprentissage de mon pays d'origine,
00:57:54et ils le mettent dans un espace religieux
00:57:56sans forcément être en demande de l'apprentissage religieux.
00:58:00C'est surtout aux primaires qu'il faut se poser la question,
00:58:03parce que, bien souvent, quand les gamins arrivent au collège,
00:58:06c'est déjà trop tard, et c'est là où,
00:58:08quand ils ont fréquenté des lieux de culte,
00:58:11il peut y avoir de l'endoctrinement.
00:58:13Je suis pas du tout en désaccord.
00:58:15Après, il n'y a pas de professeur de l'école de la République
00:58:18en primaire, d'abord, parce qu'il n'y en a pas...
00:58:21Il n'y en a quasiment pas pour apprendre l'anglais,
00:58:24et donc, l'arabe, le nombre de postes qu'il y a,
00:58:26il est quasiment... Il est très limité.
00:58:29Dernière chose, peut-être.
00:58:30Aujourd'hui, avec l'évolution des choses,
00:58:33il y a tellement plus d'enseignement de l'arabe
00:58:35à l'école publique que les parents ne le demandent plus.
00:58:38Donc, on a des profs avec des classes
00:58:40qui sont vides ou quasiment vides.
00:58:42Il y a un réflexe de se tourner peut-être davantage
00:58:45vers les écoles coraniques pour apprendre l'arabe.
00:58:48Les écoles coraniques, oui, enfin, disons, les mosquées,
00:58:51et il y a une concurrence, et les gestionnaires des mosquées,
00:58:54parce que c'est un produit d'appel et une source de revenus,
00:58:57expliquent aux familles qu'il ne faut pas apprendre l'arabe
00:59:00à l'école. La réalité, c'est qu'on apprend
00:59:03beaucoup mieux l'arabe à l'école qu'à la mosquée.
00:59:06D'un mot, pour conclure,
00:59:07votre groupe a déposé, lui aussi, des propositions
00:59:10en réaction à ce rapport sur l'antrisme des frères musulmans.
00:59:13D'un mot, ça consiste en quoi ?
00:59:15D'un autre côté, proposer une proposition de loi
00:59:18pour créer un nouveau délit,
00:59:20pour faire en sorte que la République,
00:59:22qui est attaquée, puisse se défendre mieux,
00:59:24et c'est-à-dire condamner tout propos,
00:59:27discours, contenu antirépublicain.
00:59:30C'est-à-dire des propos qui viendraient faire
00:59:33une sorte de classement entre ceux qui seraient
00:59:36des suprémacistes, parce que, pratiquant la bonne religion,
00:59:39et les autres, on parle bien d'extrémistes,
00:59:41et c'est fondamental que cette proposition soit proposée.
00:59:44Ce sera inscrit à l'ordre du jour ?
00:59:46Pour l'instant, elle a été déposée aujourd'hui.
00:59:49On a proposé à tous les députés de l'hémicycle de la voter.
00:59:52On suivra ça. Merci beaucoup.
00:59:54Ceux qui sont les ennemis de la République.
00:59:56Merci à vous deux d'être venus. C'est fini pour ce soir.
01:00:00Merci à vous pour votre fidélité. Bonne soirée sur SCP.
01:00:03SOUS-TITRAGE REINCARNÉ
01:00:05Générique
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