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Aujourd’hui, dans le monde, la recherche est pilotée par des appels à projets lancés par des agences nationales comme l’Agence Nationale de la Recherche (l’ANR) en France. Ce mode de financement oriente les recherches sur celles ayant des applications à court terme, au détriment de la recherche fondamentale. [...]

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00:00Aujourd'hui, dans le monde, la recherche est pilotée par des appels à projets lancés par
00:14des agences nationales comme l'Agence Nationale de la Recherche, l'ANR en France. Ce mode de
00:20financement oriente les recherches sur celles ayant des applications à court terme, au détriment de
00:26la recherche fondamentale. La pandémie récente a illustré les conséquences de cette myopie.
00:32En 2002, l'apparition du SARS-CoV incite l'Union Européenne à lancer des programmes de recherche
00:39sur les coronas. L'équipe du professeur Canard obtient des premiers résultats en 2004. Mais,
00:45aussi bien en Europe qu'en France, dès 2006, les financements sont coupés à cause de la crise
00:52financière de 2008 et du fait que le SARS-CoV n'engendra pas de pandémie. La recherche sur
00:58les coronavirus n'est plus d'actualité, donc elle n'est plus financée, et il faudra le SARS-CoV-2
01:04pour qu'elle le soit. On conçoit que s'il est nécessaire que des catastrophes se produisent,
01:09pour que des recherches se fassent, nous nous préparons à un monde bien angoissant.
01:14Léo Sillard était un grand physicien, un des théoriciens du projet Manhattan, dans le cadre
01:21duquel il a, avec Enrico Fermi, créé la première réaction nucléaire en chaîne. Et s'il a incité
01:27Einstein à écrire à Roosevelt pour lui demander de construire une bombe atomique avant l'Allemagne
01:33nazie, il a toujours été un pacifiste militant, partisan d'une utilisation seulement dissuasive de
01:39la bombe. C'est pourquoi, après Hiroshima et Nagasaki, il a créé en 1946, encore avec Einstein,
01:47un comité d'urgence des scientifiques qui lutte contre les armes nucléaires, ce qui lui vaudra
01:53le prix Nobel de la paix en 1962. Il savait donc de quoi il parlait quand il s'interrogeait sur les
01:59conséquences du progrès scientifique. Dans une nouvelle de science-fiction écrite en 1961,
02:05la fondation Mark Gable. Il explique comment faire si on voulait retarder le progrès scientifique.
02:12Il suffirait de créer une fondation, distribuant des subventions aux chercheurs,
02:18ceux-ci devant la convaincre du bien fondé de leurs demandes. Pour ce faire, on organiserait 10
02:25comités, composés chacun de 12 savants les plus actifs dans leur domaine, chargés d'examiner ces
02:31demandes. Ainsi, les meilleurs savants seraient enlevés à leur laboratoire et passeraient leur
02:37temps dans les comités à étudier les demandes de subventions. Puis les scientifiques rechercheraient
02:43à résoudre des problèmes qui leur permettraient presque certainement d'arriver à des résultats
02:48publiables. Pendant quelques années, la production scientifique augmenterait beaucoup. Mais en ne
02:54recherchant que l'évident, la science serait bientôt tarie. Elle deviendrait quelque chose
03:00comme un jeu de société. Certains sujets seraient considérés comme intéressants, d'autres non. Il
03:06y aurait des modes. Ceux qui suivraient la mode recevraient des subventions, les autres non. Ils
03:11apprendraient tous bien vite à suivre la mode. Ainsi, en 1961, Léo Szilard nous décrit très précisément
03:20le mode d'organisation qui serait nécessaire pour vider la recherche de toute potentialité
03:26d'innovation et qui ressemble trait pour trait à celui de notre ANR et de ses semblables.
03:32Par nature, on ne peut pas décider à l'avance les résultats d'une recherche. Beaucoup d'entre
03:38elles sont vouées à l'échec. Mais la piloter pour des motifs économiques décidés par des
03:43bureaucrates, fustit le même chercheur, ne peut que conduire aux effets énoncés par Léo Szilard.
03:50La fin du progrès scientifique.

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