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  • il y a 3 jours
🎙️ Quel rapport les journalistes et producteurs de Radio France entretiennent-ils avec la langue française ? Yaël Goosz
, Journaliste politique sur France Inter, nous parle de son rapport à la langue.

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Transcription
00:00Je garde précieusement des lettres écrites, des courriers et aussi des courriels, des mails.
00:12Les messages des auditeurs et auditrices sont forcément inspirants
00:15parce qu'on fait de la radio pour parler à quelqu'un, pour réveiller quelqu'un
00:19ou l'intéresser pendant qu'il fait autre chose.
00:20Donc on a envie qu'il y ait du répondant et du retour derrière.
00:24Alors moi je suis effaré aussi par la violence de certains messages,
00:28certaines réactions sous forme d'insultes, assez régulièrement, il faut le dire,
00:32de la part de gens qui n'ont même pas écouté ce que vous avez dit
00:35ou qui réinterprètent de manière raccourcie des choses que vous n'avez même pas dites à l'antenne.
00:40Je garde précieusement des lettres écrites, des courriers et aussi des courriels, des mails intéressants
00:48sur lesquels on sait qu'on peut échanger, qui donnent aussi du courage
00:52quand il y a un peu de doute quand on fait ce métier et que je garde précieusement dans un tiroir.
00:58Défendre le français, maîtriser la langue, la parler le mieux possible,
01:05oui c'est un incontournable bien sûr, mais il ne faut pas oublier que c'est un exercice oral.
01:12Donc c'est aussi de la conversation, ça veut dire qu'on peut avoir travaillé un sujet longtemps,
01:16plusieurs heures, l'avoir digéré.
01:18Après le défi du journaliste radio, c'est de le transmettre avec des mots simples,
01:23pas simplistes, mais des mots simples qui font qu'à la fin les choses auront été éclairantes pour celui qui vous écoute.
01:29Donc maîtrise de la langue bien sûr, mais en restant à portée de tout le monde,
01:33il suffit parfois d'un mot savant pour faire l'intéressant,
01:37qui ferait que derrière l'audition elle est coupée, la compréhension elle est ratée
01:43et la personne qui vous écoute ne vous suit pas jusqu'au bout de la chronique ou de votre intervention.
01:51Il y a des mots qui ne sont pas forcément interdits,
01:53mais qui m'agacent moi-même, qui sont devenus urtiquants, le mot séquence.
01:57Dans le journalisme politique, vous avez souvent ça, ce commentaire,
02:00dans la séquence régalienne actuellement, où le Premier ministre dit que, etc.
02:05Ce mot séquence est devenu un mot passe-partout et qui m'agace.
02:09Après, il y a aussi le « par contre » qui n'existe pas en langue française,
02:13c'est « en revanche ». On dit « en revanche ».
02:15Et ça, j'entends des fois « par contre » pour dire « mais », M-A-I-S,
02:19et ça, ça m'agace prodigieusement.
02:20Une expression que j'utilise parfois et qui n'est absolument pas française non plus,
02:26et je me suis fait reprendre plusieurs fois,
02:28« tout pendant que ». Non, ça n'existe pas, « tout pendant que ».
02:31C'est « pendant que » ou « tant que », mais « tout pendant que », ça n'existe pas.
02:34Et je me suis fait reprendre plusieurs fois.
02:36J'ai un tic de langage, mais je me soigne,
02:41c'est lié à ma chronique chez Fabienne Synthès à 18h15,
02:46« La question politique du jour », « question dit réponse ».
02:49Et donc, on a instauré un gimmick, une formule en fin de chronique qui est
02:52« et pour répondre à votre question, Fabienne » ou « et je vous réponds, Fabienne ».
02:57Et en fait, c'est un peu lourd à la longue,
02:59il faudrait trouver autre chose de plus fluide.
03:00C'est devenu un gimmick un peu usant.
03:02J'aime beaucoup le mot « polarisation ».
03:07Je l'utilise parce que je trouve qu'il reflète énormément
03:10l'époque dans laquelle on vit aujourd'hui,
03:13où les opinions ont tendance à se trancher trop fort,
03:18trop vite, à se radicaliser au mépris de la nuance.
03:21Et donc, polarisation, cette idée qu'il y a des pôles,
03:23un plus et un moins, qui peuvent plus se rejoindre,
03:25alors qu'il faut lutter contre ça,
03:26je trouve que ça décrit très bien l'ambiance actuelle du débat public.
03:33Moi, j'ai passé un an au Canada dans mes plus jeunes années étudiantes,
03:38comme c'est-à-dire dans une radio.
03:40J'essaie de lutter contre, parce que je sais qu'il y a aujourd'hui
03:42dans le monde des francophones qui se battent contre les anglicismes.
03:45Et pourtant, il y en a qui sont devenus absolument incontournables.
03:47Moi, je ne sais pas dire autre chose que « meeting », un meeting politique.
03:51Vous avez en ce moment le backlash écologique, le retour de bâton.
03:54Alors, j'essaie de dire « retour de bâton » ou « vague inverse »,
03:57mais c'est pareil, le backlash est rentré dans le langage courant.
04:01Puis il y a des mots que je n'arrive pas à éviter.
04:02« Casting », une primaire de casting.
04:04Le casting politique, le casting du gouvernement,
04:06ça aussi, ça ne devrait pas exister.
04:08Et pourtant, c'est vraiment rentré dans le langage courant.
04:12Ça m'évoque l'enfance.
04:14Ça m'évoque ma chambre à coucher sous la couette,
04:18dans le noir, à une heure où je ne devrais plus faire autre chose que dormir.
04:22Écouter au casque ou sur mon radiocassette des spectacles dramatiques.
04:26On appelle ça les feuilletons de France Culture, en stéréo,
04:30comme si j'étais au théâtre.
04:32Et la stéréo, c'est magique quand on découvre et qu'on a 8, 9 ans,
04:35comme ça, dans le noir et qu'on s'y croit.
04:37On se croit dans la salle de spectacle.
04:39La radio, ça évoque ça pour moi.
04:42Il y a deux noms qui me viennent naturellement à l'esprit.
04:46Robert Arnaud, qui est disparu aujourd'hui,
04:49qui était un grand journaliste et raconteur de France Inter.
04:54Histoire possible et impossible.
04:56Et c'était pour moi la fusion de tout ce que j'aimais dans la radio,
04:58à savoir l'histoire, le récit, la mise en onde,
05:03le son, la fiction, le documentaire.
05:07J'ai beaucoup aimé écouter ça.
05:08Et puis, contemporain, que j'adore, Philippe Collin.
05:11Moi, je reste totalement bluffé de son podcast,
05:15sa série de podcasts sur Léon Blum,
05:17dont j'ai vraiment appris une biographie inédite.
05:22J'ignorais tout ce qu'il avait pu faire,
05:24cette figure de front populaire, mais bien autre chose.
05:26C'était remarquable.
05:27Et Philippe Collin fait de l'histoire à la radio de manière remarquable.
05:30Sous-titrage Société Radio-Canada

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