- 31/05/2025
DB - 31-05-2025
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TVTranscription
00:00Musique
00:30Je m'en souviendrai de ce lundi-là.
00:40Yann venu me chercher comme jamais encore à la porte même du collège avec son camion,
00:44sa figure des jours de tempête, ses yeux qui exploraient mes silences.
00:49Je vais être contrainte de lui avouer ma rencontre avec sa mère
00:51et que nous avions parlé de lui, de l'exode.
00:55Yann avait bouconné.
00:56Pourquoi t'as-t-elle raconté tout ça ?
00:58Pour que tu me décides à revenir chez elle peut-être ?
01:00Eh bien, elle se fait drôlement des illusions.
01:03Sa voix tremblait de couleur.
01:04Boulogne était déjà loin derrière nous.
01:06Yann, furieux, conduisait de plus en plus vite.
01:09Soudain surgit devant nous un passage à niveau fermé.
01:17Vous pouvez m'ouvrir la barrière.
01:19Il ne reste que quelques minutes.
01:21C'est l'habitude.
01:22Mais il y arrive toujours cinq minutes après la tonnerie.
01:24En vous les jeunes, vous êtes toujours prêtés.
01:25Envie avec son époque.
01:27Merci.
01:28Merci.
01:58Ça va ?
02:11Qu'est-ce que...
02:12Ces engins de malheur...
02:15Ils sont même pas fichus de rester là où on les a mis.
02:17Ils sont même pas fichus de rester là où on les a mis.
02:19Ils sont même pas fichus de rester là où on les a mis.
02:20Ils ne savent pas.
02:21Je ne te la répare.
02:22Je te la répare.
02:23Allez.
02:24Allez...
02:28Vous laissez perdre du temps, comme ça.
02:31Allez, laissez perdre le temps comme ça.
03:01Non, c'est loin de Fofenberg.
03:04Je sais.
03:07Par où tu veux passer?
03:08Une petite promenade avec moi, j'espère que ça ne te ferait pas, non?
03:17Maintenant, tu vas me raconter ce qui s'est passé l'autre nuit dans la cour de la minoterie.
03:22Tu croyais peut-être y couper, mais je ne suis pas si bête.
03:25Oh, Yann, écoute, je suis fatiguée.
03:28Par exemple.
03:29Bon, bossy, tu crois que tu es un compagnon facile, toi, aujourd'hui?
03:34Puis, en plus, ce coup du passage à niveau...
03:36Ah, je crois qu'il te prenait pour une petite fille qui avait du grand bravo.
03:41Tu as eu peur, n'est-ce pas?
03:43Elles êtes bien toutes les mêmes.
03:45Il n'y avait pas de quoi.
03:47C'est ridicule.
03:54Enfin, tu ne vas pas pleurer.
03:56D'ailleurs, tu n'as pas l'air d'avoir de mouchoir.
04:00Tu veux que je te prête le mien?
04:01Non, merci.
04:03Je suis peut-être foussard des nerveuses, mais je n'ai pas l'habitude de planicher.
04:08Encore moins devant un garçon.
04:09Petite chèvre orgueilleuse.
04:10Tiens, le temps change.
04:13Hier, il pleuvait.
04:14Aujourd'hui, c'est de la brume.
04:18Mais si toi, tu ne pleures jamais.
04:21C'était dans une ville qui, l'autre soir, dans la cour de la minoterie, pleurait.
04:25Oui.
04:26Tu as raison.
04:28Je vais t'expliquer.
04:30Très bien.
04:31Bon, bien, l'autre soir, je vais parler à Guillaume de mon entrevue avec ta mère adoptive.
04:37Sans que nous l'ayons vue, Evil avait tout entendu.
04:41Puis elle a été bouleversée.
04:43Alors, elle a voulu venir t'en parler tout de suite.
04:46Mais moi, nous l'avons bêché.
04:47Pourquoi?
04:48Oh, tu as assez de soucis comme ça, sans qu'on vienne t'en rajouter à un autre à minuit.
04:54Très délicate attention de votre part.
04:57Tu ne me crois pas.
04:59Que je ne te crois pas, ça ne te regarde pas.
05:01Mais si.
05:03Tout ce que je sais, c'est que je veux en finir avec toutes ces histoires.
05:06Ces mystères, cette vie odieuse.
05:08J'en ai marre.
05:09Marre, tu entends, de votre tact, de votre discrétion et de votre charité pour moi.
05:14Est-ce que tu es mauvais, hein?
05:15Moi, je suis ce que je suis.
05:18Elle ne te l'a donc pas dit, ma mère?
05:19Que je pouvais être mauvais comme la gale?
05:22Non, elle ne me l'a pas dit.
05:24D'ailleurs, ce n'est pas vrai.
05:26Tu n'es pas mauvais.
05:27Tu es seulement malheureux.
05:29Malheureux.
05:32Malheureux, oui.
05:33Et c'est pour ça que vous m'avez recueilli, n'est-ce pas?
05:35Parce que je suis malheureux.
05:37Oh, tais-toi, Yann.
05:38Tu exagères à la fin.
05:40Je te garantis que le capitaine n'aurait jamais ouvert de sa porte comme il l'a fait pour toi,
05:43uniquement par pitié ou par charité.
05:46Il s'est jugé, le capitaine.
05:49Ouais.
05:50Je ne veux plus qu'à m'en aller.
05:51Non.
05:57Si tu t'en vas,
05:58il n'y aura plus personne avec qui je pourrais me disputer.
06:02Alors, ça t'amuse de te disputer avec les garçons comme ça?
06:05Très bien.
06:07Ça n'a pas dû t'arriver trop souvent.
06:09Mais moi, ça ne m'amuse pas du tout.
06:10Je te demande pardon.
06:39Je n'aime pas me disputer avec toi, tu sais.
06:45Si tu savais
06:46comment tout a changé depuis ta venue,
06:51si tu t'en vas,
06:52plus rien ne sera comme avant.
06:53Je te crois, Fan.
07:10Merci.
07:12Merci.
07:12Oui, enfin, voilà où nous en sommes.
07:28Maintenant, on t'en sait autant que nous.
07:29Tu comprends, on avait besoin de toi, alors.
07:32Oui, oui.
07:33Oui, je vois, je vois, je vois.
07:34Et qu'est-ce que tu en penses?
07:35Qu'est-ce qu'on pouvait faire de plus?
07:36Jusqu'à présent, je n'allais pas juger urgent de vous le dire,
07:56mais maintenant, il est nécessaire que vous le sachiez.
07:59Ingvild est une enfant adoptée.
08:03Quoi?
08:04Enfin, qu'est-ce qui te fait penser, ça?
08:05Eh bien, après la disparition de leur petit Jeff,
08:09en juin 40,
08:10les Nielsen décidèrent de quitter Narvik pour Oslo.
08:13Et là, ils recueillirent un bébé de six mois.
08:16C'était la fille unique d'un jeune couple
08:17qui avait été arrêté par la police allemande,
08:20puis déporté et massacré.
08:21Et ce bébé, c'était Ingvild.
08:26Enfin, ces gens-là avaient bien de la famille,
08:27et le bébé pouvait...
08:28Je pense bien que les Nielsen s'en inquiétèrent,
08:31mais leurs recherches demeurèrent vaines.
08:34Et c'est alors qu'ils décidèrent d'adopter Ingvild.
08:39En 43, oui, en 43, ils retournèrent à Narvik.
08:44Le bébé avait alors trois ans et demi,
08:48le même âge que le petit Jeff lors de sa disparition.
08:50Enfin, mais qu'est-ce qui t'a expliqué tout ça ?
08:53Eh bien, leur beau-frère,
08:54qui était le seul à être dans la confidence,
08:58et à qui j'avais écrit pour lui exposer les raisons
09:00qui me poussaient à faire venir Ingvild en France.
09:02Les raisons, enfin, t'avais raison sérieuse
09:04de penser que Yann est l'enfant de Narvik ?
09:06Sérieux, sérieux, ça, je ne sais pas.
09:08Mais ce que je sais,
09:10c'est que la première fois que Jeff est venu au cadran solaire,
09:14d'instinct,
09:16j'ai songé aux gosses de Narvik.
09:18Et depuis, cette impression ne m'a pas quitté.
09:20Rappelez-vous,
09:23son embarras quand on lui parlait de sa famille,
09:24de son passé,
09:26et lors de l'arrivée d'Ingvild,
09:27cet élan de curiosité sauvage
09:29qu'il y avait, elle, un soir sur la route.
09:31Enfin, tu crois que ce sont des raisons
09:32de deviner en elle une sœur ?
09:34Non, je ne le crois pas,
09:35mais elle a porté avec elle
09:37les fascinations, les mirages
09:40d'un pays qui était peut-être aussi sa vraie patrie.
09:43Oui.
09:43Enfin, depuis des mois que Yann est ici,
09:46tu ne lui en as jamais parlé.
09:47Pourquoi ?
09:48D'abord, parce qu'il ne m'a rien demandé.
09:53Et puis,
09:54admets que je vais lui raconter l'histoire
09:56du garçon de Narvik
09:58et que cette histoire ne le concerne pas.
10:00Hein ?
10:01Tu vois d'ici le gâchis.
10:02Au fait,
10:05tu as bien dit avoir confié
10:07le petit Jeff à la Croix-Rouge.
10:09Hum ?
10:10À Brest,
10:10tu as une infirmière de service.
10:12Comment était-elle ?
10:14Tu sais, autant qu'il m'en souvient,
10:15c'était une femme
10:16qui devait avoir la cinquantaine.
10:17Elle était forte, solide,
10:19comme une femme des Flandres.
10:20Oui, alors 50 ans, 40.
10:23Maintenant, elle doit avoir 66 ans.
10:25Ça ne peut pas être Madame aux Flandres.
10:28Non, mais enfin, tu sais, Fanny,
10:29le petit Jeff est peut-être passé
10:30entre les mains de plusieurs infirmières
10:32de Brest jusqu'à Tours.
10:34Oui, c'est juste.
10:36Enfin, tout de même,
10:37deux enfants abandonnés
10:38le même mois de juin
10:39et l'un recueilli à Tours
10:40et l'autre à Brest.
10:42C'est quand même une drôle d'histoire, non ?
10:44Tu sais, Guillaume,
10:46en juin 40,
10:47il y a eu des centaines,
10:49des centaines d'enfants
10:50perdus sur toutes les routes de France.
10:54Enfin,
10:55voilà ce que je tenais absolument
10:57à vous dire,
10:59car je crois que maintenant
10:59nous sommes très, très près
11:01de la vérité.
11:04Allez, bonne nuit, ma chérie.
11:05Mais, mais les épinards.
11:07Hum, quoi ?
11:07Les épinards.
11:09Ah, les épinards.
11:09On les mangera demain.
11:10On les passera au four
11:11avec des œufs durs, j'adore ça.
11:13Hein ?
11:14Je m'efforçais de crâner
11:16devant Guillaume,
11:16mais un mur s'était dressé
11:17devant mon cœur.
11:19Si Yann était finalement
11:20Jeff Nissen,
11:22Ingvild, enfant adopté,
11:23ne serait sa sorte
11:24que par le nom.
11:25Rien ne les empêcherait plus tard
11:27de s'aimer,
11:28de se marier,
11:29d'être heureux ensemble.
11:42Mais quoi ?
11:43Chut.
11:43Qu'est-ce qu'il y a ?
11:44Cherche pas à comprendre,
11:45lève-toi.
11:46Non, c'est jeudi aujourd'hui.
11:47Mais tais-toi,
11:48tu vas réveiller une ville.
11:48Allez, lève-toi.
11:49Mais pourquoi il faut
11:58que je me lève ?
11:59Chut.
12:05Yann !
12:06Chut.
12:14Tu t'en vas ?
12:15Oui, avec toi.
12:16Avec moi ?
12:17Vous l'excuser, mon vieux
12:18le matin de bonne heure,
12:19elle est un peu sourde.
12:20Bonjour, Rémi.
12:21Qu'est-ce qu'il y a ?
12:22Écoute, je prends ça sur moi.
12:24Direction Amiens.
12:25Amiens ?
12:26Oui, oui,
12:26vous y serez tous les deux
12:27dans l'après-midi.
12:28Vous dormirez chez Mme Offlange
12:29et retour ici demain, d'accord ?
12:32On m'a parlé un peu
12:33tous les deux,
12:33Yann et moi.
12:35Et certaines réactions
12:36de sa mère lui sont revenues
12:37un peu floues.
12:39Alors je pense qu'à Amiens,
12:40dans la maison
12:40de sa mère adoptive,
12:42il y verra plus clair.
12:43Et Yann m'a demandé
12:44si l'un de nous deux
12:44ne pouvait pas l'accompagner.
12:45Mais pourquoi moi ?
12:47Et pourquoi pas toi ?
12:49Allez, tu vas prendre un café
12:50pendant qu'il se prépare ?
12:51Oui, d'accord, merci.
12:53Allez, va te laver.
12:55Allez !
12:56Et surtout,
12:57réveille pas grand-père, hein ?
12:59Non.
12:59Allez, dépêche-toi.
13:11Allez, bonne route.
13:12Oui.
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