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L'ouvrage de Maître Ghislain Dubois "Né Français, mort Croate - Jean-Michel Nicolier, un Français à Vukovar" raconte le sacrifice d’un jeune français de 25 ans qui décida un jour de printemps 1991 de quitter sa ville natale de Vesoul, pour rejoindre le combat du peuple croate, pour sa liberté. Depuis le 20 novembre 1991, date de l’assassinat de Jean-Michel par ses bourreaux, sa maman, Lyliane Fournier, et son frère Paul, tels deux Antigone, mènent, aidés de leurs amis, la quête pour retrouver son corps afin de donner à Jean-Michel, mais aussi aux disparus croates de Vukovar, une digne sépulture. Ils ont chargé Me Ghislain Dubois, qui lui aussi a mis en Croatie, sa peau au bout de ses idées, d’être leur conseil, de les accompagner dans ce combat.
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00:00Générique
00:00Ravie de vous retrouver pour ce Zoom en hommage à un jeune homme,
00:11Jean-Michel Nicolier, notre invité, Guy Lindubois.
00:15Bonjour.
00:15Vous êtes l'avocat de sa maman, Liliane Fournier,
00:20qui consacre sa vie aujourd'hui à essayer de retrouver le corps de son fils,
00:27donc Jean-Michel Nicolier qui a été assassiné en Croatie le 20 novembre 1991
00:33à l'âge de 25 ans par des miliciens serbes lors de cette fameuse guerre de Yougoslavie.
00:40Vous avez écrit cet ouvrage, Né français mort croate.
00:45Jean-Michel Nicolier, un français mort à Vukovar.
00:48Vukovar, c'est le nom de cette ville martyr de Croatie
00:52qui a vu se déchaîner une violence épouvantable entre serbes et croates.
00:58Est-ce que vous pouvez, première question, Guy Lindubois, nous expliquer
01:02pourquoi ce jeune homme à 25 ans, un français, Jean-Michel Nicolier,
01:06décide de partir se battre en Croatie contre les serbes ?
01:10Quelles étaient ses motivations ?
01:12En fait, c'est avant tout aider les croates que combattent les serbes qui l'a motivé.
01:16Et pourquoi cette motivation ?
01:19Parce qu'il a suivi, comme tout le monde à l'époque, via les médias officiels,
01:25ce qui se passait en Croatie avant même le déclenchement de la guerre,
01:29puisqu'il y a eu comme pour une éruption volcanique des annonces.
01:34Et donc, on est au printemps 1991, et là, il commence à s'intéresser au sujet
01:45et voit que les croates, après avoir proposé une confédération, une association,
01:52plusieurs formules pour se détacher tout en restant dans une certaine forme de Yougoslavie,
01:58du pouvoir serbo-communiste, comme on l'appelait à l'époque, de Belgrade.
02:02Toutes ces tentatives pacifiques vont être rejetées par le pouvoir central de Belgrade
02:08et vont commencer les persécutions par l'armée fédérale et des milices serbes,
02:14des villes limitrophes des frontières naturelles entre la Serbie, le Kosovo,
02:20la Macédoine, la Bosnie-Herzégovine et la Croatie,
02:23où tout le monde va commencer un peu à s'agiter.
02:27La force sera utilisée par le pouvoir en place
02:30et Jean-Michel va considérer que c'est totalement injuste ce qui se passe.
02:36Ça se passe à deux heures d'avion de Paris.
02:40Il estime donc que, comme jeune européen, jeune français,
02:44il doit se rendre là-bas, d'abord pour témoigner, pour reprendre des informations
02:50et, s'il le faut, et c'est ce qu'il fera en définitive,
02:53se battre avec la résistance croate.
02:55– Alors, se battre avec la résistance croate, il avait, ce garçon, Jean-Michel Nicolier,
03:00fait auparavant son service militaire au 1er régiment parachutiste d'infanterie de marine de Bayonne.
03:07Donc, il savait, il connaissait le maniement des armes et comment se battre.
03:11– Tout à fait, il ne part pas en illuminé à l'aventure.
03:13Ce n'est d'ailleurs pas un militant politique, je dirais, c'est un jeune idéaliste…
03:19– Patriote.
03:19– Patriote, catholique.
03:21– Patriote, catholique.
03:22D'ailleurs, il recevra un chapelet du pape Jean-Paul II
03:25qui est sur la photo du livre autour de son cou
03:28et il mourra avec, avant qu'il ne soit arraché, évidemment, par ses geôliers,
03:33mais on en parlera plus tard.
03:34Et Jean-Michel, effectivement, va s'engager à l'armée,
03:38encore une fois par idéal pour servir son pays, se rendre utile.
03:42– Malheureusement, en chute, en parachute, il se cassera une jambe
03:46et il sera donc réformé.
03:48– Alors, est-ce que vous pouvez nous expliquer les causes de cette guerre
03:54entre Serbes et Croates dont les combats commencent en septembre 91 ?
04:00– Je vous en ai déjà dit un petit mot, à savoir qu'il faut repartir à la guerre de 14-18.
04:06À l'issue de la guerre de 14-18, les Serbes étaient dans notre camp
04:10et singulièrement avec les Russes et les Anglais.
04:13Et pour les remercier d'avoir contribué à la victoire contre l'Empire allemand
04:17et l'Empire austro-hongrois, on va leur donner l'actuel,
04:20enfin l'actuel au moment où Jean-Michel y arrive,
04:22– Yougoslavie.
04:23– Qui s'appelle le royaume des Serbes et des Croates unis.
04:27Dirigé par une famille royale serbe d'une main de fer et une église orthodoxe serbe
04:35qui ne connaît pas, contrairement à l'église catholique,
04:38la séparation entre le spirituel et le temporel.
04:42L'un travaillant pour l'autre et avec l'autre et de concert avec
04:46pour maintenir la domination et de l'église orthodoxe et de la nation serbe
04:53sur ce pays qui est une forme de mosaïque.
04:56J'en ai cité déjà quelques composantes.
04:58– Oui, vous citez bien également l'intention du pouvoir serbe
05:03de créer cette grande Serbie et parmi les causes également cette hostilité,
05:10voire vous parlez de haine de l'église orthodoxe à l'égard de la catholicité.
05:15– C'est ce que m'a expliqué Mgr Stankovic, le président de Caritas à Zagreb
05:21lorsque je viens avec 7 camions de 22 tonnes de nourriture, de médicaments, etc.
05:27chacun à destination des déplacés croates.
05:30il va m'expliquer que non seulement il y a la négation ethnique
05:36pour autant qu'on puisse parler d'ethnies différentes entre serbes et croates
05:40de la part des serbes, mais il y a la négation de la spécificité religieuse.
05:45On va le voir en Bosnie avec les musulmans,
05:48mais on le voit d'abord et avant tout en Croatie
05:50puisque la guerre éclate d'abord en Croatie
05:52pour s'achever en quelque sorte en Bosnie et au Kosovo bien plus tard.
05:57– Vous soulignez également la collaboration de l'église orthodoxe
06:01avec le pouvoir socialiste, donc Yougoslave, la Yougoslavie,
06:07qui était une puissance communiste.
06:09– C'est un peu la dernière armée rouge d'Europe à cette époque-là.
06:11– Oui, qui était une des armées les plus puissantes d'Europe.
06:15– Les serbes, vous citez ce cas de serbes qui s'en seraient pris à des églises,
06:20décapitant une statue de la Vierge.
06:24Côté serbe, on voit aussi les croates comme des oustachies sanguinaires.
06:29Alors, est-ce que les croates sont des victimes
06:32ou alors est-ce qu'il y a eu de part et d'autre des agressions, des outrances ?
06:37– Effectivement, la guerre, la guerre c'est la guerre,
06:40donc il n'y a pas des anges et des démons d'enquêté.
06:43La seule chose qu'on doit retenir, c'est que l'agressé c'est le croate,
06:49l'agresseur c'est le serbe.
06:51Pour revenir à la première phase de la question,
06:54l'église serbe comme en Russie est une émanation du pouvoir politique,
06:59ne vit qu'avec l'accord de ce pouvoir politique totalitaire, puisque communiste,
07:05et donc est infiltré par définition comme l'archevêque de Moscou,
07:10le patriarche, pardon, de Moscou, était au sein de l'église orthodoxe russe,
07:15le chef du KGB, le représentant du KGB à la grande époque de l'URSS.
07:20Eh bien, c'était la même chose.
07:22Et il y a évidemment des conflits ancestraux entre la religion catholique romaine,
07:30entre Rome et les héritiers de Byzance, qui remontent au temps des croisades, etc.
07:34Donc il y a différentes strates de lecture cumulatives pour expliquer cette explosion
07:41et cette volonté des croates et des slovènes dans un premier temps,
07:44de se couper de ce pouvoir orthodoxe, non catholique et communiste,
07:49alors qu'eux étaient pour, plutôt ayant participé à l'Empire austro-hongrois,
07:54une politique de libre-échange au sens de démocratie économique et de démocratie politique.
07:59– Ce jeune homme, Jean-Michel Nicolier, je le disais tout à l'heure,
08:03a donc été assassiné le 20 novembre 1991 dans la ville croate de Vukovar
08:08par des miliciens serbes.
08:10Est-ce que vous pouvez revenir sur les circonstances de sa mort ?
08:14– Donc Jean-Michel arrive à Zagreb avec sa bite et son couteau,
08:20c'est-à-dire qu'il ne parle ni croate ni anglais, aucune organisation autour de lui,
08:25ni en France qu'il aurait envoyé là-bas, ni en Croatie pour le recevoir,
08:29et tombe par hasard à la gare de Zagreb sur deux jeunes croates de son âge
08:34qui, eux aussi, venant d'un autre coin de Croatie,
08:39veulent s'engager dans la résistance croate.
08:41Il est embarqué dans un premier temps à Karlovak,
08:45qui est au sud par rapport à Vukovar,
08:48et en octobre 1991, il va partir pour Vukovar,
08:55qui est une petite ville, mais qui a la particularité d'être en bordure du Danube,
09:01c'est-à-dire une ville frontière,
09:04même si à l'époque il n'y avait pas encore l'explosion officielle de la Jugoslavie,
09:07entre la Croatie et la Serbie.
09:09Les Serbes, quand ils envahissent la Croatie,
09:14ne s'attendent absolument pas à ce que les Croates résistent,
09:20parce que l'aviation, la marine, l'armée étaient aux mains du pouvoir central.
09:25Les Croates, au départ, s'ils n'allaient pas piquer des armes dans un commissariat,
09:29avaient des fusils de chasse,
09:31enfin, ce qu'un particulier peut avoir comme arme.
09:34Et donc, les Serbes ont été totalement surpris,
09:36et donc révoltés de la résistance inattendue et extraordinaire,
09:42de Vukovar, presque deux mois,
09:45avec, encore une fois, des moyens très réduits.
09:48On attaquait les tanks serbes avec des cocktails Molotov, quoi.
09:51Bon, au début, si on ne récupérait pas sur le dos de l'ennemi,
09:55un bazooka ou un lance-roquette.
09:57Et donc, Jean-Michel va être assigné avec 54 camarades du Hauss,
10:04qui s'appellent la force de défense croate,
10:08dans un des quartiers les plus sensibles à l'extérieur de la ville,
10:12pour le tenir.
10:14Ils vont loger dans une ancienne pizzeria,
10:17à 50 mètres de la ligne de front,
10:19c'est-à-dire, je mange, je fais dodo,
10:20on sort lait et on va se battre immédiatement,
10:22on fait rebelote le lendemain, etc., etc.
10:24Finalement, il va être atteint par un tir de roquette
10:28et emmené à l'hôpital de la ville.
10:31Il va être là pendant 20 jours,
10:34jusqu'à la chute de Vukovar, le 18 novembre 1991,
10:39et l'entrée des miliciens serbes,
10:42mais encadrés par des soldats officiels
10:44et des officiers de carrière de l'armée serbe.
10:49Il ne faut pas dédouaner le pouvoir serbe officiel
10:51de l'époque dans cette affaire.
10:53Ils vont prendre possession de l'hôpital du Brovny,
10:58qui est une ruine en surface,
11:00et dont les blocs opératoires,
11:03les salles d'accouchement, les chambres,
11:05tout ça dans un micmac incroyable,
11:07survit dans les caves de l'hôpital.
11:10Donc vous imaginez la cohue,
11:13les allers-retours, etc.,
11:14parce qu'on le nourrit de l'extérieur,
11:17sous les bombes et les tirs des serbes.
11:20Il va rester là 20 jours jusqu'à ce que les serbes
11:23prennent possession de l'hôpital.
11:26Et le 20, ils embarquent 200, comme vous l'avez dit,
11:31264 hommes, enfants et femmes,
11:35à bord d'autocars,
11:36en trompant au passage le Suisse délégué par l'ONU
11:42pour les réfugiés, les déplacés et les prisonniers de guerre,
11:45en lui bloquant, au sens propre du terme, l'accès à l'hôpital,
11:48pour ne pas qu'il voit ce qui s'y passe.
11:50Il arrivera trop tard, tout sera vidé,
11:53et on embarque...
11:53– Parce qu'un accord avait été signé,
11:55vous l'expliquez dans l'ouvrage,
11:56entre la résistance croate et les serbes
11:59sur le traitement des malades et des blessés.
12:01– Tout à fait, les serbes s'étant engagés
12:03à traiter tout cela,
12:04conformément aux conventions internationales de Genève,
12:07en l'occurrence, pour les prisonniers de guerre
12:10et les déplacés.
12:11L'hypocrisie est absolue,
12:13et le cynisme aussi,
12:14puisqu'ils vont non seulement être déportés de l'hôpital,
12:18mais emmenés en définitive à 4 km au sud
12:21de Vukovar,
12:23dans une ferme style Kofkos communiste,
12:27donc une énorme étendue,
12:28beaucoup de barraquements, à Cochon.
12:32– La ferme Dovkara.
12:33– Voilà, exactement.
12:34Et dans ce hangar, dans la nuit du 20 novembre,
12:38tous les gens qui n'auront pas un serbe
12:42qu'ils avaient connu, parce qu'il faut vous rendre compte
12:44que les Croates de Vukovar étaient emmenés aussi
12:47par des serbes de Vukovar,
12:49tout ça a été mélangé de quartier en quartier,
12:51qui avaient rejoint l'armée officielle serbe
12:54contre la révolution indépendantiste croate,
12:58pour utiliser des mots forts,
13:01qu'on utiliserait maintenant.
13:03Et donc, il y en a certains qui connaissaient
13:05leurs bourreaux,
13:06et certains bourreaux qui, par définition,
13:08et vice-versa, connaissaient leurs futures victimes.
13:11– Oui, donc sept personnes se sont échappées
13:14ou ont été épargnées par les serbes.
13:15– Exactement.
13:16Et c'est eux qui ont pu témoigner
13:18à la justice croate
13:20et devant la juge d'instruction de Paris,
13:23qui est en charge du dossier,
13:25à la suite de la plainte de mes clients,
13:27et qui vont raconter l'un qui a sauté
13:29hors de la charrette d'un tracteur
13:33qui les emmenait dans une fosse commune
13:35que les serbes avaient creusée la veille,
13:38à 900 mètres du hangar,
13:40et par groupe de dix,
13:41ils vont être liquidés au bord du trou,
13:44et l'un va pouvoir sauter,
13:46un deuxième aussi,
13:47et puis il y en a trois ou quatre
13:48qui vont être épargnés par leurs gardiens.
13:50Mais ils auront vu les horreurs,
13:52avant l'assassinat proprement parlé,
13:54les horreurs qui se seront passées dans le hangar,
13:57puisque pendant des heures,
13:58par groupe de quelques-uns,
14:00les serbes vont venir choper
14:02l'un ou l'autre des détenus
14:04pour le passer à tabac,
14:05ce sera le cas de Jean-Michel,
14:07qui va être exécuté d'une balle dans la nuque,
14:09pratiquement inconscient.
14:11– Après avoir été tabassé…
14:12– Il était tabassé avec des fils électriques,
14:14avec des morceaux de table,
14:16enfin tout ce qui leur passait sous la main,
14:18des coups de pieds évidemment,
14:19et une femme va être violée par…
14:21enceinte va être violée par 20 de ses gardiens.
14:25Et tout ça se passe devant tout le monde.
14:27Vous imaginez les scènes d'horreur
14:31auxquelles ils ont assisté
14:32avant d'être purement et simplement assassinés.
14:35– Vous citez les propos
14:37de l'ancien Premier ministre britannique
14:39Margaret Thatcher,
14:40qui a considéré la ville de Vukovar
14:43comme le symbole de l'épouvantable cruauté
14:46des agresseurs,
14:47de l'incroyable courage de ses défenseurs
14:49et de la faiblesse du monde
14:50qui a permis la tragédie de se produire.
14:53Comment se fait-il que,
14:55entre guillemets,
14:56la communauté internationale
14:57ne se soit pas mobilisée
14:59pour empêcher ce massacre ?
15:01– Le premier pays à avoir réagi,
15:04c'est l'Allemagne,
15:05puisqu'elle a reconnu l'indépendance
15:07de la Croatie avant tout le monde.
15:10Mais elle a un rôle historique sur place
15:12puisqu'elle s'estime aussi,
15:14et elle estime que les Croates sont
15:15des anciens citoyens de l'Empire austro-hongrois,
15:19donc un peu des amis des Germains.
15:21Et donc, elle a été sensibilisée.
15:24Et puis, il y avait sans doute aussi des arrières,
15:25ne nous cachons pas,
15:27des arrières pensées politiques et économiques,
15:31un accès à l'Adriatique, etc.
15:33Bon, soit.
15:34Mais l'Allemagne va, elle, bouger tout de suite.
15:36Elle va même fournir des tentes pour Caritas Catholica,
15:40pour les réfugiés,
15:41des uniformes et des costumes divers
15:45pour les résistants croates,
15:47pour l'armée croate qui se constitue petit à petit
15:49au fil du temps.
15:52Mais c'est vrai que globalement,
15:53quand on voit ce qui s'est passé en Bosnie,
15:56où là, les bosniaques musulmans ont bénéficié,
16:00entre guillemets, de bombardements de l'OTAN,
16:03américains, anglais, français,
16:06de troupes internationales d'interposition.
16:08En Croatie, vous l'avez lu,
16:10on va envoyer un groupe d'interposition de l'OTAN.
16:15Pardon, de l'ONU.
16:17Mais sa singularité sera de figer les territoires
16:22qui auront été occupés avant par les serbes.
16:25Et donc, ils vont être, malgré eux,
16:27ou certains, avec leur consentement,
16:29s'agissant des casques bleus russes
16:32ou de certaines républiques africaines pro-serbes,
16:36de conserves avec les serbes
16:39pour qu'ils conservent, effectivement,
16:41les territoires conquis.
16:42– Donc, 264 personnes assassinées,
16:46ce jour-là, de 20 novembre 1991.
16:50Il s'agit, à l'époque, du plus grand crime
16:53contre l'humanité des 50 dernières années.
16:56Vous le disiez tout à l'heure,
16:57des prisonniers de guerre entre 16 et 77 ans.
17:01Comment la justice serbe a-t-elle traité ce massacre
17:05après la fin de la guerre ?
17:07– Mais ça fait des années que la Serbie tape à la porte
17:11de l'Union européenne et que l'Union européenne
17:14lui soumet un cahier, j'allais dire pas de doléance,
17:18mais plutôt une charte à respecter.
17:21Et dans cette charte, il y avait le traitement à réserver
17:25aux assassins, à leurs complices de l'époque.
17:29Et la Serbie, il faut le reconnaître,
17:31fait le minimum, minimorum en la matière,
17:34puisqu'elle va condamner quelques officiers supérieurs
17:37ou sous-officiers, notamment pour ce massacre,
17:41mais en tant que tel, il ne fera pas l'objet, lui,
17:43de procédure, ni à La Haye, ni à Belgrade.
17:45Mais il se fait que les assassins de Vukovar
17:50ont commis des actes ailleurs.
17:52Et donc, ils vont être poursuivis par la justice serbe,
17:56mais à minima, l'assassin revendiqué de Jean-Michel,
18:01qui a un surnom Stuka, revendiqué…
18:04– Qui s'appelle Spazogé Patkovic.
18:06– Voilà.
18:07Lui sera, participera à ces procès,
18:11mais tenez-vous bien, comme témoin assisté.
18:14– C'est-à-dire qu'il n'encourra aucune peine.
18:16– Il sera protégé des factos,
18:18et on me dit qu'il est protégé, c'est un fait,
18:24l'histoire judiciaire le montre,
18:27mais qu'il aurait même, cette protection,
18:29aurait même comme origine le fait qu'il ait été réquisitionné,
18:33récupéré par les services de renseignement serbes.
18:37– D'accord.
18:38– Et les quelques responsables condamnés
18:41ne purgeront pas dans les prisons de Belgrade
18:45la moitié de leur peine.
18:46– Vous travaillez, maître Guylain Dubois,
18:51auprès des autorités de Belgrade
18:54pour qu'elle dévoile à la mère de Jean-Michel
18:57l'endroit où repose le corps de son fils.
19:01Où en est-on aujourd'hui ?
19:03La question qu'on peut se poser,
19:07c'est pourquoi les autorités de Belgrade tardent-elles autant ?
19:11Mais d'abord, c'est réouvrir dans leur esprit
19:14de nouvelles… enfin, réouvrir les plaies anciennes
19:18avec la découverte peut-être de massacres inconnus à ce jour
19:23via des charniers inconnus.
19:25Donc, la porte ouverte à des familles,
19:29voire à l'État croate,
19:31de réclamations pénales, pécuniaires, etc.,
19:34qui peut embêter les autorités actuelles serbes.
19:38Il y a la protection assurée, je disais notamment,
19:42au fameux Stuka, l'assassin présumé,
19:45puisqu'il n'est pas encore condamné,
19:46mais revendiqué, même s'il est présumé, de Jean-Michel.
19:52Qu'est-ce qu'il peut dire ?
19:53Qu'est-ce qu'il sait qui pourrait gêner aussi
19:56les autorités serbes actuellement ?
19:58Qu'est-ce qu'on sait qui vit librement en Serbie
20:01sous une fausse identité aujourd'hui ?
20:03– Exactement, exactement.
20:05– Alors, votre cliente Liliane Fournier,
20:08elle dépose plainte en 2016 avec le frère de Jean-Michel, Paul,
20:13avec Constitution de Parti Civil en 2021.
20:16Le Président de la République a promis de mettre tout en œuvre
20:20pour retrouver le corps de Jean-Michel
20:23et faire juger les coupables.
20:25En préparant cette émission, vous me disiez
20:27que vous avez reçu un courrier de la Présidence de la République.
20:31– Il y a trois jours de la Présidence de la République
20:33où M. Macron me fait dire, enfin me fait écrire,
20:38qu'il a avisé l'actuel ministre de l'Intérieur
20:41et l'actuel ministre d'Affaires étrangères européennes
20:43de la République de se pencher sur le dossier
20:48et de voir les suites des démarches
20:51que lui-même aurait entreprises
20:52pour que, enfin, Mme Nicolier Fournier puisse,
21:00elle a 80 ans, mourir à côté de son fils,
21:03c'est son vœu le plus cher.
21:05C'est le combat d'Antigone contre Crayon,
21:08c'est le combat permanent dans toute l'histoire de l'humanité
21:11pour retrouver la sépulture d'un proche
21:16ou en tout cas le proche pour lui donner une sépulture digne
21:19et en l'occurrence chrétienne.
21:20– Il n'est pour l'instant pas question de quelconque pression
21:24du gouvernement français pour inciter Belgrade
21:28à dévoiler l'endroit où est le corps de Jean-Michel Fournier.
21:31– Là, je ne suis pas dans le secret des dieux,
21:34l'avocat ne peut pas vous répondre à cet égard.
21:36La seule chose que je peux souligner,
21:38c'est le travail admirable de la juge d'instruction spécialisée
21:42en matière de crimes contre l'humanité, de terrorisme, etc.
21:45au palais de justice de Paris
21:49et qui s'est déjà rendu à plusieurs reprises
21:52et compte encore le faire,
21:54aussi bien en Croatie qu'en Serbie,
21:57voire même ailleurs,
21:58puisqu'il y a des complices, des assassins ou des témoins
22:01qui se sont réfugiés, qui en Norvège,
22:05qui au Canada, etc.
22:06et je pense qu'elle ne désespère pas d'aller les interroger.
22:11– Donc Jean-Michel est mort depuis plusieurs décennies,
22:16maintenant comment est-il perçu auprès des Croates,
22:20auprès de la population ?
22:21– Écoutez, je peux témoigner personnellement
22:24de l'incroyable aura, attachement, esprit de reconnaissance
22:29de la population croate à l'égard de Jean-Michel,
22:34qui s'appelle le français, c'est comme ça qu'il l'appelle,
22:36le français de Vukovar,
22:38parce que ce que je ne vous ai pas dit et qui est fondamental,
22:40c'est que quand les Serbes prennent Vukovar,
22:43ses amis qui quittent Vukovar, avec lesquels il a combattu,
22:47ceux qui ne sont pas morts au combat,
22:49viennent le trouver à l'hôpital et lui disent
22:51écoute Jean-Michel, viens avec nous,
22:54ils vont massacrer tout le monde.
22:56Et Jean-Michel a cette phrase incroyable
22:58qu'il répétera à des journalistes français
23:00arrivés là par hasard,
23:01avant la prise de l'hôpital par les Serbes,
23:03je suis venu pour le meilleur et pour le pire.
23:06Il a tenu parole, c'est le moins qu'on puisse dire.
23:08Et donc, il est adulé, littéralement,
23:11à Vukovar, il y a un pont qui porte son nom,
23:14sa statue à côté du pont.
23:16Si vous avez suivi, cette année,
23:18au mois de mars, sauf erreur,
23:20le match France-Croatie à Split,
23:23il y avait un tifo,
23:24mais qui prenait toute la tribune
23:26du public croate,
23:28à la mémoire et à l'effigie de Jean-Michel.
23:30Et sa maman et son frère,
23:31quand on se promène dans les rues,
23:33quand ils sont reconnus,
23:34ils ont droit à des baisers sur la main
23:36et il ne faut pas longtemps
23:38pour que les gens pleurent à leur vue.
23:41– Et l'État croate,
23:42vous l'expliquez,
23:43a même remis une médaille à titre posthume
23:45à Jean-Michel en 2011.
23:47Maître Guylain Dubois,
23:49vous signez cet ouvrage.
23:51En hommage à ce héros,
23:53né français, mort croate,
23:54Jean-Michel né collier,
23:55un français à Vukovar
23:57sur la boutique de TV Liberté.
23:59Merci à vous-même.
24:00– Merci beaucoup.
24:00– Sous-titrage Société Radio-Canada
24:02– Sous-titrage Société Radio-Canada
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