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Vendredi 18 juillet 2025, retrouvez Angélique Déruenne (Avocate fondatrice, CFD Law), Harold Huwart (Député de l'Eure-et-Loir) et Sonia Cissé (Associée, Linklaters) dans LEX INSIDE, une émission présentée par Arnaud Dumourier.
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00:00Générique
00:30Bonjour, bienvenue dans Lex Inside, l'émission qui donne du sens à l'actualité juridique.
00:36Du droit, du droit et rien que du droit.
00:38Au programme de ce numéro, on parlera devoir de vigilance et prestataire numérique
00:43avec mon invité Sonia Cissé, associée chez Linkletters.
00:47On parlera ensuite du forfait jour avec Angélique Desruen, avocate fondatrice de CFD Law.
00:53Et enfin, pour conclure cette émission, on parlera de la simplification du droit de l'urbanisme et du logement
00:59avec le député Harold Huvard.
01:02Voilà pour les titres Lex Inside, c'est parti !
01:14On débute tout de suite ce Lex Inside, on va parler devoir de vigilance et prestataire numérique
01:20avec mon invité Sonia Cissé, associée chez Linkletters.
01:24Sonia Cissé, bonjour.
01:26Bonjour.
01:26On va décrypter ensemble les nouvelles obligations imposées aux entreprises et aux prestataires numériques
01:32sur le fondement du devoir de vigilance.
01:35Pour commencer, quels sont les nouveaux critères d'identification et de gestion des risques
01:41imposés par la directive CS3D aux prestataires numériques ?
01:45Alors, la directive CS3D, elle s'applique pas seulement aux prestataires numériques,
01:50mais bien aux entreprises en fonction de leur chiffre d'affaires et de leur taille.
01:56Donc, typiquement, elle entre en application à compter du 24 juillet 2024.
02:02Elle est entrée en application, pardon, mais sa transposition va être graduée.
02:07Tout d'abord, elle va s'appliquer à compter de 2027 aux entreprises qui comportent plus de 5000 salariés
02:14et qui ont un chiffre d'affaires supérieur à 1,5 milliard.
02:18Puis, à compter de 2028, elle s'appliquera aux entreprises qui comportent plus de 3000 salariés
02:24et qui ont un chiffre d'affaires supérieur à 900 millions.
02:28Et enfin, en 2029, ce sera les entreprises qui comportent des salariés,
02:34qui comportent, pardon, plus de 1000 salariés et qui ont un chiffre d'affaires supérieur à 450 millions
02:40qui seront concernés. Et donc, cette directive, elle impose donc un devoir de vigilance.
02:49Alors, il n'est pas une numérique, autant que tel, il est beaucoup plus large que ça,
02:55puisqu'elle impose en fait un devoir d'évaluation et de prise en compte du risque
03:01qui a un impact négatif, réel ou potentiel, sur les droits humains et l'environnement.
03:08Et c'est comme ça qu'elle vient capturer les prestataires numériques,
03:12également les entreprises qui font appel à ces prestataires numériques,
03:15tout simplement parce que, à partir du moment où vous couvrez les droits humains
03:20et l'environnement, vous vous retournez directement vers vos prestataires numériques
03:25pour vous assurer qu'ils sont conformes aux standards du respect des droits de l'homme
03:30et de l'environnement.
03:32Vous regardez tout de suite vos technologies, et notamment celles qui sont considérées
03:36comme extrêmement énergivores. On pense tout de suite au data center
03:40et à l'intelligence artificielle, bien sûr.
03:43Et bien entendu, également à votre système d'information lui-même.
03:49Pourquoi ? Parce que qui dit respect des droits humains
03:52fait tout de suite penser au risque cyber, risque de cybersécurité.
03:58Pourquoi ? Parce que risque de cybersécurité dit souvent
04:01violation de données à caractère personnel, atteinte aux violations des droits
04:05des données à caractère personnel, fait penser tout de suite au respect de la vie privée,
04:10aux droits humains. Et c'est comme ça que cette directive vient capturer
04:14en fait l'espace numérique.
04:15Alors on va s'intéresser justement aux conséquences pour les prestataires numériques.
04:20Concrètement, les grandes entreprises doivent-elles désormais auditer juridiquement
04:25leurs fournisseurs cloud, SaaS ou data ?
04:29Alors, la réponse simple, c'est oui. Et c'est déjà le cas.
04:33Ça ne vient pas de cette directive.
04:35Tout simplement parce que cette obligation d'audit, elle existait déjà,
04:40par exemple, dans le RGPD, donc le Règlement Général sur la Protection des Données,
04:45qui imposait dans son article 28 aux responsables du traitement,
04:49c'est-à-dire les entreprises qui décidaient des moyens et des finalités
04:53d'un traitement de données à caractère personnel, d'auditer leurs sous-traitants,
04:58c'est-à-dire les entreprises avec qui elles travaillent et qui suivent leurs instructions,
05:03de manière à s'assurer que ces entreprises respectaient bien le droit des données
05:06à caractère personnel.
05:07On avait également un autre texte, DORA, qui nous est arrivé le 17 janvier 2025,
05:12qui s'applique dans le secteur financier, donc aux grands acteurs du secteur financier,
05:17mais également à leurs prestataires informatiques et qui imposaient également
05:21ces obligations d'audit de manière à s'assurer d'une résilience opérationnelle.
05:26Et c'est intéressant puisque cette directive, finalement, CS3D,
05:30elle vient ajouter un nouveau socle d'audit à ces textes déjà existants.
05:35Donc la réponse est oui, il y avait cette obligation d'audit des sous-traitants,
05:38elle est aujourd'hui renforcée.
05:40Alors vous venez d'évoquer l'environnement juridique avec de nombreux textes.
05:44Comment la CS3D, la directive sur le devoir de vigilance,
05:49s'articule-t-elle avec l'ensemble des textes dans le secteur,
05:55vous l'avez dit, DORA et bien d'autres ?
05:58C'est une très bonne question parce que c'est un peu la question qu'on se pose
06:02quand on voit arriver encore un nouveau texte qui vient ajouter une surcouche
06:06de réglementation sur des règles qui sont déjà nombreuses.
06:10Tout simplement, il faut penser à une convergence numérique.
06:13La façon dont cette directive va s'imbriquer avec les autres textes existants,
06:18on a parlé de DORA, du RGPD, il y a Nice 2,
06:21et bien c'est simplement qu'elle vient les compléter.
06:23Donc en pratique, typiquement, j'ai parlé du RGPD, du droit d'audit,
06:28donc les organisations pouvaient auditer leurs sous-traitants
06:33pour s'assurer du respect du droit des données à caractère personnel.
06:36Avec la directive, il va y avoir maintenant cette obligation d'audit,
06:41mais qui va être beaucoup plus étendue.
06:42On va venir auditer tant le droit des données à caractère personnel
06:45que le respect des droits humains, que le respect de l'environnement.
06:51Sur DORA, c'est la même chose.
06:53Si vous êtes capturé à la fois par DORA parce que vous appartenez à ce secteur financier
06:58et vous êtes un prestataire IT qui opère dans le secteur financier
07:01et que vous tombez dans les seuils également de la directive CS3D,
07:07tout simplement, on va venir faire un audit au-delà de simplement la résilience opérationnelle.
07:13On va s'assurer également, encore une fois, du respect du droit d'humain
07:16et du respect de l'environnement au regard des technologies que vous utilisez.
07:22Donc c'est toujours se dire, cette directive, elle vient compléter,
07:25élargir un peu le champ d'audit ou les autres obligations de ces textes.
07:29D'accord. Donc on comprend avec cet environnement juridique
07:33que les entreprises s'exposent à des risques en cas de non-conformité de leurs prestataires.
07:38Quel type de sanctions ou de levier contentieux les entreprises risquent-elles
07:43en cas de faille de cybersécurité ou de non-conformité chez un prestataire numérique ?
07:49Alors la sanction, elle est de 5% du chiffre d'affaires mondial net de l'entreprise.
07:55Alors, bien sûr, elle est à apprécier au regard de la gravité de la violation, bien sûr,
08:01des mesures correctrices qui auraient été mises en place par l'entreprise
08:04et bien entendu des antécédents.
08:07Si c'est la première fois, ce n'est pas la même chose que si c'est la troisième fois.
08:10Il y a également, bien entendu, la responsabilité tout simplement civile
08:15puisque s'il y a un incident, par exemple un incident cyber,
08:20vous n'aviez pas mis en place les mesures correctrices nécessaires
08:23ou même les mesures de prévention de manière à prévenir ce risque.
08:27Vous pouvez tout à fait avoir des individus qui se retournent vers vous
08:31en tant qu'entreprise pour manquement à vos obligations,
08:35y compris au regard de cette directive.
08:38C'était déjà le cas puisque le RGPD le permettait.
08:42Les actions de groupe, on le voit aujourd'hui,
08:44commencent à devenir de plus en plus nombreuses en Europe et également en France.
08:50Mais aujourd'hui, avec cette directive, il faut tout à fait anticiper
08:54que les actions de groupe ou individuel vont s'accélérer
08:59pour retenir la responsabilité des entreprises qui auraient manqué à leurs obligations.
09:04Alors, il faut anticiper et vous dites, il faut essayer de prévenir,
09:07d'éviter ces risques.
09:09Est-ce que vous avez des bonnes pratiques à recommander aux entreprises ?
09:13Bien sûr, toujours.
09:14Alors, parmi les bonnes pratiques, la toute première, bien sûr,
09:18c'est de cartographier les risques.
09:20Il est important déjà de comprendre comment les différentes réglementations fonctionnent,
09:25comment elles s'appliquent à vous et quels risques elles font peser
09:27sur votre organisation et vos activités.
09:30Une fois que vous avez cartographié vos risques,
09:32vous regardez vos prestataires,
09:34bien sûr, vous en faites une liste exhaustive
09:37et vous vous assurez que dans les contrats que vous avez mis en place
09:41avec ces prestataires, il y a des obligations renforcées,
09:45que vous avez évidemment un droit d'audit plus étendu que ce que vous aviez initialement
09:50puisque j'anticipe qu'il ne concernait que l'IT.
09:53Aujourd'hui, vous étendez votre droit d'audit également au respect des droits humains,
09:58bien entendu, et au respect de l'environnement.
10:00Vous vous assurez que ces obligations sont clairement énoncées dans le contrat
10:05et puis, bien entendu, et là, c'est un peu difficile sur le marché français
10:10parce qu'on le fait finalement très peu,
10:13mais il faut auditer concrètement.
10:16C'est-à-dire, soit vous vous rendez sur site dans les locaux de votre prestataire,
10:20soit à minima, vous lui demandez de vous remonter la documentation attestant de sa conformité.
10:26Et puis, en définitive, bien sûr, vous tracez tout ça.
10:30Il vous faut de la documentation qui démontrera que vous avez suivi
10:34et mis en place ce devoir de vigilance numérique.
10:37On va conclure là-dessus. Merci Sonia Cissé.
10:39Je rappelle que vous êtes associée chez Linkletters.
10:41Merci beaucoup, Arnaud.
10:43Tout de suite, l'émission continue.
10:44On va parler droit social et un zoom sur les forfaits jours.
10:48On poursuit cette émission et on va parler du forfaits jours
11:03avec mon invitée Angélique Desruennes, avocate fondatrice de CFD L'O.
11:07Angélique Desruennes, bonjour.
11:09Bonjour Arnaud.
11:10On va décrypter ensemble les conditions et les enjeux du forfaits jours.
11:14Pour commencer, quelles sont les conditions de validité d'une convention forfaits jours ?
11:20Le forfaits jours, c'est vraiment un outil singulier qui existe en France,
11:24qui n'a pas son pendant en Europe,
11:25qui permet une super flexibilité pour les employeurs
11:28puisqu'il permet aux employeurs de décompter le temps de travail des salariés,
11:33non pas à l'heure, mais en jour sur l'année.
11:35Les conditions de validité que vous me demandez,
11:37elles ont été rappelées par la Cour de cassation récemment,
11:40dans un arrêt d'octobre 2024, le 2 octobre 2024.
11:43Donc je vais vous les reprendre.
11:45Il s'agit en fait d'un suivi effectif et régulier du temps de travail,
11:51enfin des journées travaillées et non travaillées,
11:55des temps de repos quotidiens et hebdomadaires.
11:59Il s'agit aussi d'un suivi effectif et régulier de la charge de travail du salarié
12:04à ne pas confondre avec la troisième condition qui est l'entretien annuel,
12:09voire bim, annuel ou plus,
12:10parce qu'on a de la jurisprudence où maintenant ils viennent dire que ce n'est plus assez un ou deux par an.
12:15Et en plus, il va falloir pouvoir prouver que le manager a pu remédier à tout dérapage
12:21et a pu faire un suivi concret et que le salarié a un droit d'alerte.
12:25Cet arrêt de Cour de casses, il est important parce qu'en fait, il vient nous dire,
12:29il faut ça, c'est sur le papier,
12:31mais en plus, il faut un suivi concret, il faut que ce soit appliqué dans les faits.
12:35C'est vrai que pendant très longtemps, en fait, on a eu des entreprises qui avaient la clause qui allait bien,
12:40mais par contre, on faisait juste signer le salarié, la clause et un petit document
12:45où ils notaient ses jours ou signaient ses jours tous les jours.
12:48Et puis, une petite case à l'entretien annuel, on mettait charge de travail en bas ou rien.
12:52Et puis, on pensait que c'était bon.
12:53Ça ne marche plus aujourd'hui.
12:55La Cour de cassation est de plus en plus à scrutiner tous les détails concrets, en fait, du suivi du forfait jour.
13:02Alors, on a vu les conditions de validité d'une convention au forfait jour.
13:07Quels sont les salariés qui sont concernés par ce type de convention ?
13:10Alors, principalement, mais pas seulement les cadres, ce qu'on dit souvent, les cadres autonomes,
13:15mais attention, il peut y avoir des cadres qui ne sont pas soumis au forfait jour.
13:19Et il peut y avoir aussi des salariés non cadres qui peuvent être soumis au forfait jour.
13:25C'est cette notion d'autonomie dans l'organisation de l'emploi du temps qui est importante.
13:29Donc, il est clair qu'un salarié qui a des horaires fixes ne peut pas être assujetti au forfait jour.
13:35Et cette notion d'horaires fixes, c'est important de la prendre au sens large.
13:40Il y a des arrêts qui viennent dire que lorsque c'est des horaires prédéterminés,
13:45notamment avec un planning collectif pour une catégorie de salariés, ça ne marche pas.
13:49Et notamment, par exemple, on a beaucoup d'entreprises qui ont des plages d'horaires d'arrivée et de sortie
13:54en laissant un petit delta, ça ne marche pas non plus pour les cadres.
13:58Souvent, en fait, j'explique à mes clients, c'est assez grossier et vulgaire,
14:01mais je dis toujours que c'est le cas du salarié qui va aller jouer au golf en journée.
14:05Alors, non, vous ne pourrez pas sanctionner votre salarié sur le fait du non-respect du temps de travail
14:10sur ce point s'il est enfant fait jour.
14:12Par contre, il y a des limites.
14:14Tout ça, encore, ça repose sur la bonne foi, cette notion que j'aime beaucoup.
14:18C'est quoi les limites ?
14:20Alors, par exemple, un salarié, donc c'est la jurisprudence, c'est concret,
14:23un salarié qui va toutes les semaines aller jouer au golf sur son temps de travail.
14:27Au bout d'un moment, l'employeur va en avoir ras-le-bol, il va le licencier.
14:31Et là, il a été licencié sur le manquement à son obligation de loyauté
14:35et non-respect du lien de subordination.
14:37Ça a été validé.
14:38Dans un deuxième cas, c'était une assistante d'un vétérinaire.
14:42Elle venait se cacher derrière son forfait jour pour dire
14:46« Je ne suis pas obligée de respecter les jours de présence que vous demandez ».
14:50Mais en même temps, il y avait des rendez-vous clients.
14:52Donc, on avait des rendez-vous clients et elle, elle n'était pas là.
14:54Ça, ça ne marche pas non plus.
14:55C'est vraiment cette notion de bonne foi, de loyauté qui reste très importante.
15:00Et si on est en CDD, on peut quand même conclure une convention de forfait jour ?
15:05Oui, bien sûr.
15:06En fait, le forfait jour n'a rien à voir avec la temporalité du contrat.
15:09En fait, ce sont les mêmes conditions.
15:11Elles ne sont pas assouplies.
15:12Vraiment, ce qui est important ici, ce n'est pas tant la durée du contrat
15:16que le suivi de la charge de travail du salarié.
15:18Alors, vous évoquez justement le suivi de la charge de travail du salarié.
15:22Concrètement, comment l'employeur peut-il faire pour suivre la charge de travail ?
15:26Alors, ce qui est vraiment important ici, c'est que moi, je viens de toujours dire
15:29« Voilà, le forfait jour, c'est un super outil. »
15:32C'est comme un… on va donner un exemple aussi encore un petit peu gros,
15:35mais c'est comme un avion à un long courrier.
15:38Ça marche, mais il faut que l'employeur puisse avoir des outils de pilotage
15:41et qu'il puisse l'utiliser.
15:43L'employeur va se mettre à bord.
15:44Donc, en fait, par exemple, il va faire un suivi périodique
15:48avec des points périodiques sur la charge de travail.
15:51Il va pouvoir notamment dire « Voilà, l'entreprise est fermée à certains moments. »
15:57Les emails dont les envois vont être décalés à certaines périodes le matin ou le soir.
16:03Il y a notamment aussi ce droit à la déconnexion qui est important,
16:06que l'employeur doit mettre en œuvre.
16:08Il existe quand même depuis 2016 et qui va permettre de réguler, en fait,
16:12ou d'essayer de distinguer cette charge entre le travail et la vie perso,
16:19qui est de plus en plus difficile à distinguer.
16:21Et notamment quand les cadres sont en télétravail, c'est encore plus dur.
16:24Et donc, je dis toujours, la trilogie, c'est effectivement suivi,
16:27suivi régulier, pas suivi une fois par an, comme je l'ai dit tout à l'heure.
16:32Pourquoi c'est important, un suivi régulier ?
16:33Parce que c'est là-dessus que la cour de cassation se base principalement en ce moment
16:37pour sanctionner, parce que souvent, les employeurs font juste le point
16:41une fois par an lors de l'entretien annuel.
16:44Et ça, franchement, ça ne marche plus.
16:45Ça ne marche vraiment plus du tout.
16:47Donc, c'est vraiment important que le manager, peut-être une fois par mois,
16:50une fois tous les deux mois, regarde, aille voir et dise,
16:53ben voilà, là on voit que tu as travaillé beaucoup,
16:55tu n'as pas pris tes jours de repos, qu'est-ce qui se passe, etc.
16:58Il y a vraiment un dialogue qui doit pouvoir s'instaurer
17:00et bien sûr qu'il soit documenté en cas de contentieux.
17:03Alors, vous évoquez les jours de repos,
17:05vous avez parlé aussi du droit à la déconnexion.
17:08Concrètement, quels sont les droits des salariés ?
17:10Alors, les droits des salariés, c'est 11 heures de repos quotidien,
17:14donc tous les jours.
17:15Et ensuite, il y a également ce droit au repos hebdomadaire de 35 heures.
17:19C'est une journée plus 11.
17:21Et ensuite, est-ce que je parle de la jurisprudence européenne maintenant ?
17:27La jurisprudence européenne vient dire que le salarié doit pouvoir avoir droit
17:33à un temps de travail journalier raisonnable.
17:36Et c'est là où le bas blesse, parce que s'il n'y a pas ce suivi régulier,
17:39la jurisprudence européenne va venir en relais du juge national
17:43et va venir sanctionner.
17:45En fait, c'est vrai qu'il faut savoir que le forfait jour,
17:47c'est un super outil de flexibilité,
17:49mais quand ça crache, ça fait mal.
17:51Et c'est vrai que souvent, quand je sens que les clients,
17:55les entreprises ne vont pas pouvoir respecter ce suivi journalier,
17:59je préfère leur proposer en fait une clause,
18:02la plus traditionnelle clause 39 heures ou 35 heures,
18:05parce que vraiment, quand le forfait jour tombe,
18:08ça fait très très mal.
18:10Et c'est quoi les sanctions en cas de non-respect du cadre légal
18:13que vous avez décrit ?
18:14Alors les sanctions, c'est que le forfait jour est nul,
18:17le forfait tombe.
18:18Donc ça veut dire qu'on retombe sur le droit commun,
18:21enfin les 35 heures.
18:22Donc avec toutes les heures sub qui vont à la clé,
18:24sur trois ans.
18:25Donc on arrive parfois à des sommes qui sont colossales.
18:29Et on a aussi donc forcément tout ce qui va dériver,
18:33parce que c'est une obligation de sécurité de l'employeur,
18:35l'obligation de suivi.
18:37Donc de fait, le salarié va demander des dommages à intérêt
18:41pour ce non-suivi pour atteinte à l'obligation de sécurité,
18:45des dommages à intérêt pour potentiel burn-out, etc.
18:48Et des dommages à intérêt pour d'autres.
18:51Par exemple, il y a aussi souvent,
18:53ils vont demander du travail dissimulé,
18:55parce que ça veut dire qu'il était à 35 heures,
18:57que les heures n'ont pas été déclarées sur le bulletin de paix, etc.
19:00Donc la liste est longue et c'est interminable.
19:04Et franchement, les tribunaux sont très, très soucieux
19:07de faire respecter ça.
19:08En fait, c'est vrai que le forfait jour manque d'applications concrètes.
19:12Il manque encore aujourd'hui d'applications pratiques.
19:14Donc les tribunaux veulent vraiment réguler ça en frappant fort.
19:16Donc ils sanctionnent de manière très forte.
19:19Oui, tout à fait.
19:21Et vous pensez que c'est une tendance de fond pour conclure ?
19:24Oui, tout à fait.
19:25Et je pense que par rapport à cet arrêt du d'octobre 2024 dont j'ai fait état,
19:31il faut savoir vraiment, ce forfait jour,
19:33il n'existe pas dans d'autres pays européens.
19:34C'est vraiment une spécificité française.
19:37Donc c'est un super outil.
19:40Pas d'horaire, pas d'heure fixe, pas d'heure su.
19:43C'est vraiment intéressant.
19:45Mais il ne faut plus que ça reste lettre morte,
19:47que ce soit juste sur le papier.
19:48Parce que vraiment, les tribunaux,
19:49qu'ils soient français ou européens en relais,
19:52viennent vraiment sanctionner si on n'a pas pris garde,
19:55si on s'est dit, bon voilà,
19:57on lui met le forfait jour et puis terminé.
19:59Et puis on le laisse et puis il prend son document,
20:01il va coucher ses jours.
20:02Ça ne marche plus.
20:03Et c'est vraiment une très grosse bombe à retardement sinon.
20:05Bon, on va conclure là-dessus.
20:07Merci Angélique Desruen.
20:08Je rappelle que vous êtes avocate, fondatrice de CFD L'eau.
20:12Merci Arnaud.
20:12Tout de suite, on enchaîne.
20:13On va parler simplification du droit de l'urbanisme.
20:16On poursuit ce Lex Insight.
20:27On va parler de simplification du droit de l'urbanisme et du logement
20:31avec le député Harold Uvar, député de la 3e circonscription de l'Eure-et-Loire.
20:37Harold Uvar, bonjour.
20:38Bonjour.
20:38Alors, on parlait avec vous de la proposition de loi sur la simplification du droit de l'urbanisme et du logement
20:44dont vous étiez le rapporteur à l'Assemblée nationale
20:47qui a été adoptée en CMP le 3 juillet dernier
20:51pour bien comprendre quelle était l'ambition de ce texte.
20:55L'ambition, c'était de répondre à une forme de désarroi
20:58qui est celle des maires que j'ai partagé pendant très longtemps
21:01et des professionnels de l'immobilier, du bâtiment
21:04face à un code de l'urbanisme qui a triplé en volume en 20 ans
21:10et face à des procédures qu'aujourd'hui nous ne sommes plus capables de gérer
21:14mais donc avec un nombre de projets abandonnés qui est considérable.
21:18Donc, dans le peu de temps qu'on avait dans la discussion
21:22puisque c'était une niche parlementaire que j'ai négociée avec mon groupe parlementaire
21:27le groupe des indépendants
21:28l'idée c'était de faire passer un certain nombre de dérogations
21:31de simplification pour gagner du temps et économiser aussi de l'argent
21:36des études et des procédures inutiles
21:38sans dégrader le niveau de protection qu'on doit à nos paysages, à l'environnement
21:42et tout ce qui fait quand même qu'on est attaché à la qualité de l'urbanisme en France.
21:47Donc, il y avait une question d'équilibre
21:49mais le ressort premier s'est nourri de toute l'expérience que j'avais comme maire
21:53face à des ralentissements, des lenteurs
21:58ou des procédures absurdes qui n'étaient plus justifiables.
22:00Et des délais extrêmement longs ?
22:02Des délais longs, alors on pourrait en rajouter dans les exemples
22:05mais moi, je n'ai pas voulu le faire parce qu'on se lamente déjà beaucoup
22:10sur l'état de la complexité administrative en France.
22:14Moi, j'ai voulu apporter des solutions concrètes
22:15qui permettent de répondre à la nécessité qu'on a aujourd'hui
22:19de construire plus rapidement un certain nombre de logements.
22:23Il y a quand même 4 millions de ménages qui attendent un logement en France
22:27dont 2,8 millions dans le logement social.
22:30Ce sont des chiffres qu'on n'a pas connus depuis 1948
22:33depuis la crise du logement de l'après-guerre
22:35après les destructions de la Seconde Guerre mondiale.
22:38Donc, il y a un moment donné, il fallait aussi tirer la sonnette d'alarme.
22:41Et donc, en l'absence d'une grande réforme de l'urbanisme
22:45que le gouvernement aurait dû porter,
22:48l'idée c'était de porter des solutions concrètes
22:50et c'est ce qu'on a essayé et réussi pour l'instant à faire.
22:53Alors, on va essayer d'aller plus loin justement
22:54et de voir quelles solutions concrètes vous apportez.
22:58Concrètement, ce texte, il apporte quoi
23:01en termes de simplification du droit de l'urbanisme et du logement ?
23:05Alors, je pense que le premier sujet auquel on s'est attelé,
23:08c'est la question des plans locaux d'urbanisme
23:10qui sont très lourds à remettre en œuvre
23:14où on est forcé souvent de les modifier,
23:18de les réviser avec une procédure complète
23:20qui peut prendre un an ou deux
23:21alors que ce document a déjà fait l'objet
23:26de la même procédure quelques mois auparavant.
23:28Donc, l'idée c'est qu'on a restreint
23:30la procédure lourde des révisions
23:32aux seules modifications, aux seuls projets
23:36qui peuvent impacter les grands documents d'orientation
23:38comme le plan d'aménagement, ce qu'on appelle le PADD.
23:42Pour tout le reste, aujourd'hui, maintenant,
23:44on passe du coup en modification simplifiée,
23:46c'est-à-dire sans enquête publique.
23:48Donc, il y a mise à disposition du document en mairie,
23:53mais il n'y a pas l'enquête publique officielle.
23:56Et surtout, on peut du coup gagner,
23:59alors sans doute, au minimum six mois ou huit mois.
24:03Et puis, dans certains cas,
24:04quand on fait la liste de toutes les procédures
24:06qu'on a au fur et à mesure de l'examen au Sénat
24:08et à l'Assemblée réussies à rendre facultatives,
24:12on peut gagner parfois même jusqu'à trois, quatre ans.
24:14Ah oui, ce qui est considérable.
24:16Notamment sur les projets complexes,
24:18les reconversions de friches commerciales,
24:20les reconversions de friches urbaines,
24:22où on a un enchevêtrement de normes
24:25qui fait qu'on n'arrive plus aujourd'hui
24:27à faire sortir ces dossiers-là.
24:29Et ce qui est extrêmement pénalisant
24:30pour les agglomérations notamment.
24:32Est-ce qu'il y a d'autres améliorations notables
24:35qu'on peut citer ?
24:36Alors, on pourrait citer toutes les dérogations
24:39qui sont accordées au maire
24:40par rapport aux règles d'urbanisme
24:43quand il s'agit de pouvoir construire des logements
24:45notamment dans les zones tendues
24:47qui sont très, très attendues.
24:49Puisqu'il n'y a pas d'autre moyen en réalité
24:50d'accélérer que de dire
24:52que sur un sujet très concret,
24:54le maire doit pouvoir déroger.
24:56Donc, on a rajouté un très grand nombre de cas
24:59dans ce cas-là, de façon à pouvoir redonner
25:03de la souplesse et éviter des procédures de révision
25:07ou de modifications qui sont beaucoup plus lourdes.
25:10On a évidemment également travaillé
25:13au-delà des plans locaux d'urbanisme
25:15sur les SCOT,
25:17qui sont aussi d'autres documents
25:19qui sont arrivés au fur et à mesure de l'histoire
25:21et qui se sont surajoutés aux autres
25:23de façon à pouvoir gagner du temps dans leur révision.
25:27Bref, toute une collection
25:28de dispositions
25:29où les maires
25:32et les professionnels de l'immobilier,
25:34quelle que soit la taille de leur projet
25:35et quelle que soit la nature du territoire
25:37où ils agissent, urbain ou rural,
25:39normalement, pourront essayer de compenser
25:41l'effet ravageur
25:42de la surimposition
25:44des réglementations
25:46qu'on vit depuis au moins 20 ans minimum.
25:49Alors, la proposition de loi
25:51a évolué au fil du débat parlementaire
25:53et des amendements
25:54portés par l'Assemblée nationale
25:56et le Sénat. En définitive,
25:58êtes-vous satisfait du texte
26:00tel qu'il a été voté en CMP ?
26:03Oui, parce que je crois que la démonstration a été faite
26:05que quand l'objectif est clair,
26:07c'est-à-dire faire la chasse aux procédures inutiles
26:10sans dégrader le niveau de protection
26:13qu'on doit à nos paysages,
26:14eh bien, il y a en réalité,
26:17sur ce sujet-là, comme sur d'autres,
26:19à l'Assemblée nationale,
26:20un consensus et une majorité possible.
26:22Et donc, en l'occurrence,
26:23on a réussi à à la fois
26:26obtenir le vote d'une partie importante
26:28de la gauche,
26:29je pense notamment aux socialistes,
26:31et aller jusqu'à englober
26:33l'ensemble du spectre politique.
26:36Et donc, dans un moment
26:37où l'Assemblée nationale apparaît bloquée
26:39et où on nous dit qu'il est impossible
26:40de faire des réformes...
26:42Là, c'est un sujet qui fait conscience.
26:43Sur un sujet qui est absolument vital
26:45pour notre pays,
26:45puisque on crève
26:48de l'incapacité que nous avons
26:53à maîtriser la conséquence
26:54de nos législations.
26:55La démonstration est faite chaque jour
26:57que nous ne maîtrisons plus
26:58les conséquences de ce que nous votons
26:59en tant que législateurs.
27:02Et donc là, on a quand même
27:02une prise de conscience
27:04et un signal clair
27:07que sur ce sujet-là,
27:08comme sur d'autres,
27:09on est capable de dialoguer
27:11entre les groupes
27:12et puis de trouver
27:12des points de convergence
27:14qui conviennent à la fois
27:15aux élus locaux
27:16et puis aux professionnels du bâtiment.
27:18Est-ce qu'on aurait pu aller
27:19encore plus loin ?
27:20Donc, il y a un satisfait site
27:22de manière globale,
27:24mais est-ce qu'on aurait pu aller
27:25encore plus loin, selon vous ?
27:27Ou vous êtes allé au...
27:28Alors, je pense qu'on pouvait
27:29de toute façon aller beaucoup plus loin,
27:30mais il aurait fallu avoir
27:31beaucoup plus de temps pour discuter.
27:33Là, on a une sorte d'embouteillage
27:35de l'agenda,
27:36de l'ordre du jour du Parlement.
27:37Et puis, normalement,
27:38ce type de réforme
27:39aurait dû être porté
27:40par le gouvernement
27:40dans le cadre d'un projet de loi
27:42qui aurait dû embrasser
27:44la totalité des sujets.
27:46Et donc...
27:47Mais là, ce n'était pas possible
27:48compte tenu de la composition
27:50de l'Assemblée.
27:51Il fallait faire un choix
27:51et on a fait le choix
27:52d'agir là où il nous semblait
27:55que c'était le plus important.
27:56Donc, les permis d'aménager,
27:59les plans locaux d'urbanisme,
28:02les schémas, les SCOT,
28:03l'ensemble du raccourcissement
28:07des procédures de permis de construire.
28:09On a aussi, grâce au Sénat,
28:11fini par raccourcir le délai de recours gracieux,
28:15le rendre non suspensif, par exemple,
28:17limiter l'intérêt à agir
28:18d'un certain nombre de citoyens
28:22qui utilisent des procédures
28:23comme prétexte pour négocier
28:25auprès des promoteurs
28:26des avantages personnels et autres.
28:28On a remis de l'ordre au regard
28:30de toutes les dérives qu'on voit
28:33dans l'application concrète
28:34de ces dispositions.
28:35On va conclure là-dessus.
28:37Merci Harold Huvar.
28:38Je rappelle que vous êtes député
28:39de la troisième circonscription
28:41de l'Eure-et-Loire.
28:42Merci à vous.
28:43C'est le moment de conclure
28:44cette émission.
28:45C'est la fin aussi de la saison
28:47de Lex Inside sur Bsmart4Chain.
28:49Je voudrais remercier Fabien
28:51à la réalisation,
28:52Stéphanie qui prépare les émissions
28:54avec moi.
28:55Et je vous retrouve en septembre prochain,
28:57toujours sur Bsmart4Chain.
28:59Restez curieux et informés
29:00et bel été à vous.
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