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  • 30/05/2025
Mercredi 28 mai 2025, retrouvez Marion Ayadi (Associée, YARDS), Patrick Lingibé (Associé fondateur, JURISGUYANE) et Karim Soussi (Avocat Senior, CMS Francis Lefebvre) dans LEX INSIDE, une émission présentée par Arnaud Dumourier.

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Transcription
00:00Générique
00:30Bonjour, bienvenue dans Lexi Inside, l'émission qui donne du sens à l'actualité juridique.
00:36Du droit, du droit et rien que du droit.
00:39Au programme de ce numéro, on va parler de la présomption de démission avec Marion Ayadi, associée chez Yard.
00:47On parlera ensuite des rencontres territoriales de droit public avec Patrick Lingibé, avocat fondateur de Juris Guyane et membre du CNB.
00:56Et enfin, on parlera du risque douanier pour les importateurs avec Karim Soucy, avocat senior chez CMS Francis Lefebvre.
01:06Voilà pour les titres, Lexi Inside, c'est parti !
01:08On commence tout de suite sur Lexi Inside, on va parler présomption de démission avec mon invité Marion Ayadi, associée chez Yard.
01:27Marion Ayadi, bonjour.
01:28Bonjour Arnaud.
01:29Nous allons faire le point ensemble sur la présomption de démission, un dispositif qui existe depuis deux ans.
01:36Quel bilan faites-vous de ce dispositif, donc la présomption de démission ?
01:43Alors, il faut rappeler que ce dispositif, en fait, avait pour objectif de mettre fin aux abandons de postes un peu sauvages des salariés
01:52qui souhaitaient finalement quitter leur emploi sans en assumer la conséquence en démissionnant.
01:58Et finalement, il y avait une sorte d'injustice entre les salariés puisque les salariés qui abandonnaient leur poste finalement se voyaient licenciés pour faute grave
02:07par l'employeur qui, après les avoir mis en demeure de reprendre leur poste, ne pouvait guère faire autre chose que de les licencier pour faute grave.
02:14Et en étant licenciés, finalement, ils bénéficiaient du chômage.
02:18Donc, ils étaient à ce titre mieux traités qu'un salarié qui assumait son choix et démissionnait.
02:24Le but était donc de mettre fin à ces pratiques.
02:27Le bilan, deux ans après, puisqu'en fait, on commence à avoir un petit peu de recul,
02:33c'est que les employeurs se sont emparés un petit peu de ce dispositif, mais finalement pas tant que ça.
02:41Donc, c'est un bilan plutôt mitigé.
02:42Mitigé parce qu'il y avait en fait des zones d'incertitude dans la loi.
02:48La loi n'était pas très bien rédigée, il faut le reconnaître.
02:51Donc, par exemple, quand un salarié ne se présente plus à son poste,
02:56la loi sur la présomption de démission dit que l'employeur doit le mettre en demeure par lettre recommandée avec accusé de réception ou par lettre simple.
03:05Alors, comment est-ce que vous mettez en demeure un salarié qui a disparu ?
03:08Par lettre simple, remise en main propre.
03:11Ça paraît compliqué.
03:12Ça paraît un petit peu compliqué.
03:13Voilà.
03:14Donc, il y avait des incohérences dans le texte.
03:17Et puis ensuite, il y a eu un question-réponse publié par le ministère qui a semé le trouble,
03:23puisqu'en fait, le question-réponse disait que l'employeur qui constate l'absence de son salarié, l'abandon de poste,
03:32ne peut plus faire autrement que d'utiliser ce dispositif de la présomption de démission.
03:37C'est-à-dire qu'il ne pouvait plus avoir le choix d'éventuellement le licencier.
03:40Le ministère a retiré le question-réponse qui semait le trouble.
03:46Et puis, il y a eu ensuite un recours devant le Conseil d'État de plusieurs organisations syndicales qui visait à faire annuler le décret d'application de la loi.
03:54Ce qui fait que les employeurs étaient quand même assez frileux avec toutes ces incertitudes en se disant,
03:59« Est-ce que je peux l'utiliser ? Est-ce que je peux l'utiliser sans crainte et de façon sécurisée ? »
04:05Alors du coup, on a vu un peu le contexte de cette présomption de démission.
04:11Quels sont les avantages et les inconvénients pour bien comprendre les atouts du dispositif, tant pour côté employeur que côté salarié ?
04:18Alors clairement, côté salarié, il n'y a aucun avantage, puisque les salariés qui, avant, abandonnaient leur poste, se voyaient licenciés et bénéficiaient du chômage,
04:26aujourd'hui sont présumés démissionnaires et donc ne bénéficient plus du chômage.
04:31Sachant qu'avant, la loi, les salariés qui abandonnaient leur poste et se voyaient licenciés s'inscrivaient pour moitié à peu près au chômage,
04:40puisque les autres, en réalité, avaient déjà un autre poste.
04:43Pour l'employeur, il y a un vrai avantage, c'est que finalement, il peut enfin régler des situations évidentes,
04:50c'est-à-dire le salarié qui ne se présente plus, qui ne donne plus signe de vie, qui ne répond pas aux mises en demeure,
04:57et pour lequel, je devrais dire, il n'y avait pas finalement de situation litigeuse ou contentieuse.
05:04Un salarié qui conteste une affectation, qui conteste l'attribution d'une tâche,
05:09qui se dit harcelé par son supérieur hiérarchique et qui cesserait de venir,
05:14ou un salarié qui auparavant était malade et puis qui, à l'issue d'un arrêt maladie, ne revient pas.
05:21On peut se demander si on a intérêt à utiliser la présomption de démission
05:26parce qu'on est sur des situations où il peut y avoir une bonne raison, un motif légitime, comme le dit la loi,
05:33de ne pas reprendre le poste.
05:34Mais pour les situations claires d'abandon manifeste, de volonté de ne plus revenir dans l'entreprise,
05:40ça présente un vrai avantage pour l'employeur.
05:42Alors on va s'intéresser à la procédure.
05:45Quelles sont les erreurs à ne pas commettre dans cette procédure pour l'employeur de manière à sécuriser la procédure ?
05:51Alors déjà, la première erreur à ne pas commettre, c'est de l'utiliser pour des salariés qui ne sont pas employés en CDI.
05:57Donc un salarié qui est employé en CDD et qui ne se présente pas, on ne peut pas utiliser la présomption de démission.
06:03Pourquoi ?
06:03Parce que le contrat à durée déterminée ne peut pas se rompre par la démission.
06:08Ça n'est pas un mode de rupture qui est prévu par la loi.
06:10Donc il peut y avoir une rupture d'un commun accord, il peut y avoir une rupture pour faute grave.
06:15Et donc dans ce cas, en réalité, pour un abandon de poste pour un salarié qui est en CDD, il faut utiliser la rupture pour faute grave.
06:22Mais la démission n'est pas prévue par la loi.
06:24Donc la première erreur, c'est de l'utiliser pour un salarié qui sera en CDD.
06:27La présomption de démission ne vaut que pour les salariés employés en CDI.
06:30La deuxième erreur, ce serait de se précipiter.
06:34Alors certes, il faut agir vite, mais pas trop vite.
06:36C'est-à-dire que quand le salarié est absent, souvent le règlement intérieur ou la convention collective prévoit qu'il a un délai de 48 heures pour justifier de son absence.
06:47Il ne faut pas lui envoyer la mise en demeure, lui indiquant qu'il sera présumé démissionnaire s'il ne répond pas, dans ce délai de 48 heures.
06:57Il faut attendre la fin des 48 heures.
07:00Si le salarié n'a apporté aucun justificatif et n'a prévenu personne, à ce moment-là, il faut lui envoyer la mise en demeure
07:08qui lui indique que s'il ne répond pas sous 15 jours et s'il ne justifie pas de son absence, alors il sera présumé démissionnaire.
07:16Donc bien respecter ces délais.
07:18Exactement.
07:19En général, comment les salariés réagissent à une telle mise en demeure ?
07:24Alors soit ils ont déjà un autre poste et ils ne réagissent absolument pas, ils ne répondent pas.
07:29Et ils sont présumés démissionnaires, mais ça ne leur pose pas de difficulté puisqu'ils sont déjà embauchés ailleurs.
07:34Soit ils n'ont pas d'autre poste et éventuellement, il y a même une contestation sur le principe même de l'abandon de poste.
07:43Et dans ce cas, ils répondent.
07:45Alors ils répondent en général en prévenant l'entreprise ou en envoyant un mail pour expliquer leur position.
07:53Ce qui ne veut pas dire qu'ils adressent un justificatif.
07:55Ça veut dire qu'ils adressent une explication, mais pas forcément un justificatif.
08:00Et là, il y a un vrai risque pour l'employeur, c'est-à-dire que le salarié qui va être absent pendant les 15 jours de la mise en demeure,
08:09mais qui reprend son poste et qui dit « voilà, j'ai été absent pour telle et telle raison »,
08:13mais qui n'apporte pas particulièrement le justificatif, par exemple, il n'apporte pas un certificat médical,
08:18il ne faut surtout pas le traiter en salarié présumé démissionnaire, puisqu'il a repris son poste.
08:24Il faut peut-être traiter l'absence comme une absence injustifiée.
08:29C'est encore autre chose, c'est différent et ça répond à un autre régime que la présomption d'émission.
08:34Un salarié qui est en absence injustifiée, vous le sanctionnez.
08:37Et vous le sanctionnez soit par un avertissement, soit par une sanction plus lourde,
08:40qui peut être un licenciement, mais certainement pas en le présumant démissionnaire.
08:43Donc attention, soyez vigilant, employeur, quand vous êtes face à de telles situations,
08:49à bien analyser justement la situation.
08:52Si on se place côté salarié, quel recours les salariés ont justement dans le cas où on dit que c'est une présomption d'émission ?
09:01Et lui, le salarié, il apporte des éléments pour dire que non, sans justement aller jusqu'à justifier la décision,
09:08mais expliquer son absence.
09:10Alors, s'il le fait dans le délai de 15 jours, qui lui est imparti pour répondre à la mise en demeure,
09:16eh bien, en principe, l'employeur doit en tenir compte, et on le verra avec les quelques décisions de jurisprudence,
09:23que l'employeur a tout intérêt à prendre en compte les motifs qui sont invoqués pendant ce délai de 15 jours.
09:28S'il le fait après le délai de 15 jours, le contrat sera rompu,
09:33et son recours, ce sera de saisir le conseil de prud'homme.
09:37C'est une procédure accélérée, c'est-à-dire qu'on ne passe pas par la phase préalable de conciliation,
09:43on va directement devant le bureau de jugement. Théoriquement, le code du travail dit dans un délai d'un mois,
09:48mais très honnêtement, compte tenu de l'engorgement des conseils de prud'homme,
09:51on est plutôt sur 4-5 mois.
09:54Mais on est quand même sur une procédure accélérée, le salarié saisit le conseil de prud'homme
09:58et fait valoir ses arguments, et éventuellement ses justificatifs, devant le conseil de prud'homme.
10:03D'accord. Vous avez évoqué la jurisprudence, qu'est-ce qu'elle dit récemment sur cette présomption de l'émission ?
10:08Alors, on commence à avoir les premières décisions des juges du fond sur le sujet.
10:11On a d'abord eu une décision importante du conseil d'État en décembre 2024,
10:18qui a rejeté les recours qui visaient à faire annuler le décret,
10:22donc annuler tout le dispositif de présomption de démission.
10:25Donc là, on sait que le dispositif est bien en vigueur, il est confirmé,
10:29et donc les employeurs peuvent l'utiliser.
10:31Et puis depuis, on a donc quelques décisions de conseil de prud'homme,
10:35et une décision de la cour d'appel de Paris.
10:37Alors la cour d'appel de Paris, ça c'était une décision importante et qui était attendue,
10:40c'est une décision du 6 mars 2025, puisqu'elle portait sur l'application du dispositif aux salariés protégés.
10:48Puisque comme vous le savez, les élus du CSE, les délégués syndicaux,
10:52lorsque leur contrat est rompu à l'initiative de l'employeur,
10:57l'autorisation de l'inspecteur du travail est nécessaire.
11:00L'employeur ne peut pas rompre seul le contrat d'un salarié protégé.
11:03Et rapidement, la décision, qu'est-ce qu'elle dit ?
11:05La décision nous dit que, dans le cas d'une présomption de démission d'un salarié protégé,
11:10il faut néanmoins solliciter l'autorisation de l'inspecteur du travail.
11:14Et c'est un apport assez important,
11:16et vigilance et prudence pour les employeurs qui souhaitent utiliser le dispositif
11:21pour les salariés protégés également.
11:23On va conclure là-dessus.
11:24Merci Marion Ayadi.
11:25Je rappelle que vous êtes associée au sein du cabinet Yard.
11:28Merci à vous.
11:29Tout de suite, l'émission continue.
11:31On va parler des rencontres territoriales de droit public.
11:44On poursuit ce Lex Insider.
11:45On va parler des rencontres territoriales de droit public
11:48avec mon invité Patrick Lingibé,
11:51avocat fondateur de Juris Guyane et membre du CNB.
11:55Patrick Lingibé, bonjour.
11:57Bonjour Arnaud.
11:57Les rencontres territoriales du droit public se dérouleront à Bordeaux le 11 juin prochain.
12:04C'est un rendez-vous incontournable pour les publicistes.
12:07On va en parler ensemble.
12:08Tout d'abord, pourquoi ces rencontres ?
12:11Quelle est la genèse de ces rencontres du droit public ?
12:15Ces rencontres territoriales du droit public ?
12:18Et quels sont les objectifs ?
12:19Alors, les rencontres territoriales du droit public sont nées d'une idée
12:25que j'ai portée en 2023 qui était la nécessité de redynamiser le droit public dans les territoires.
12:33L'idée, c'était, autour d'une thématique donnée sur un territoire porté par un barreau,
12:40associé au Conseil national des barreaux et à la Conférence des bâtonniers,
12:44de discuter, de réunir des acteurs, les avocats, les juges administratifs, les universitaires,
12:50pour discuter du sujet et faire des propositions.
12:57L'an passé, d'ailleurs, les rencontres se sont tenues à Montpellier
13:00et portaient sur l'intelligence artificielle et la liberté publique.
13:05Ce que les prochaines rencontres porteront sur état de droit et normes.
13:09Alors, pourquoi justement ce thème, état de droit et normes ?
13:14Alors, ça vient du constat qu'aujourd'hui, notre société démocratique,
13:22donc stylée dans l'état de droit, a un problème normatif d'excès de normes
13:31qui, effectivement, conclut à son illisibilité.
13:35Donc, l'idée, c'est effectivement de faire les...
13:40Sachant réfléchir là-dessus, effectivement, et sortir des propositions.
13:47D'ailleurs, avec le dispositif mis en place pour ces rencontres,
13:52on a un grand témoin de très grande qualité,
13:55qui est Jean-Denis Cambruxelles,
13:57qui est l'auteur, d'ailleurs, d'un ouvrage que tout le monde peut lire.
14:00C'est, effectivement, les normes à l'assaut de la démocratie.
14:06Et il interviendra comme grand témoin
14:07avant, effectivement, les débats des trois tables randes.
14:11Alors, justement, vous évoquez un peu le programme.
14:14Quels vont être les temps forts de ces rencontres ?
14:16Alors, les temps forts, outre les cours de haute personnalité,
14:21notamment, effectivement, la bâtonnière et le vice-bâtonnier qui nous reçoit,
14:26ça sera, effectivement, l'intervention de Jean-Denis Cambruxelles
14:31pendant à peu près une heure, une heure trente,
14:33où il va, effectivement, faire ses constats, de par son expérience.
14:38Et ensuite, nous lancerons, effectivement, trois tables rondes.
14:42La première va, effectivement, concerner l'élaboration de la norme.
14:49La deuxième, l'efficacité.
14:52Et la troisième, effectivement, quelle perspective pour améliorer cette norme,
14:57en l'occurrence, la rendre plus compréhensible, plus utile, donc plus efficace.
15:03Alors, on a vu le programme avec les temps forts.
15:06Qu'est-ce que vous attendez de ces rencontres ?
15:09Alors, comme c'est la réunion de sachants dans le droit public,
15:17ce que nous attendons, c'est qu'à travers, parce que,
15:21essentiellement, comme c'est porté essentiellement pour les avocats,
15:23nous sommes des prescripteurs de conseils.
15:25Et dans la prescription de conseils, nous cherchons la simplification,
15:30l'efficacité.
15:32Et la simplification est dans l'efficacité.
15:33Donc, c'est, effectivement, à la suite de ça, de ces rencontres,
15:39effectivement, de sortir des propositions qui vont améliorer la qualité,
15:43en fait, de la norme, et donc du droit,
15:46et l'efficacité au sein de notre État de droit et de société démocratique.
15:51Alors, justement, vous avez fait le constat de l'inflation normative.
15:56Quels sont, selon vous, les principaux défis face à cette multiplication des normes ?
16:03Alors, d'abord, je dirais que l'objectif de ces rencontres essentiels,
16:11si on devait le résumer, c'est quoi ?
16:13C'est passer d'une culture de la quantité normative
16:17à une culture de la qualité normative.
16:21Trop de normes tue la norme.
16:24La deuxième, c'est la simplicité.
16:26Une norme trop complexe est inefficace.
16:31Parce qu'il faut rappeler que tout système juridique,
16:34tout système normatif a pour essence, aussi, pour objectif,
16:39de convaincre des non-juristes, en l'occurrence.
16:41C'est-à-dire que le citoyen lambda, ça doit être clair pour lui.
16:45Et ce n'est pas le cas.
16:46Donc, à partir de ces constats, de ces objectifs,
16:51c'est-à-dire comment on arrive ?
16:52Notamment, alors, il y a plusieurs possibilités.
16:57Donc, je vois un, c'est surtout, effectivement,
17:01mieux encadrer la production de la norme
17:04pour que les personnes puissent voir de visu comment ça se fait.
17:12parce qu'une norme qu'on s'approprie
17:14est une confiance légitime vers les institutions.
17:18Parce que c'est ça, la problématique.
17:19Pourquoi on fait ce débat ?
17:21C'est parce qu'on voit très bien qu'il y a un décalage
17:23entre la confiance des institutions et le citoyen.
17:25De plus en plus, il y a un fossé.
17:26Fossé parce que les citoyens ne comprennent pas,
17:28parce qu'ils considèrent que l'état de droit,
17:31souvent, c'est ce que portent certains, d'ailleurs,
17:35en disant que l'état de droit est un handicap,
17:37alors que l'état de droit, effectivement,
17:38est un élément protecteur des garanties des personnes.
17:41Alors, comment mieux faire comprendre une norme
17:43et mieux la faire accepter, surtout ?
17:45Donc, c'est aussi donner de la sécurité juridique pour les citoyens ?
17:49Oui, nécessaire.
17:50C'est-à-dire rendre les textes plus lisibles, compréhensibles,
17:54c'est apporter de la sécurité juridique ?
17:56Oui, absolument.
17:57L'objectif d'une norme, c'est d'abord être sécure.
18:01C'est d'abord apporter, effectivement, une sécurité.
18:05Et pourquoi ?
18:06Parce que la sécurité juridique inclut quoi ?
18:09La confiance citoyenne.
18:11Si on ne l'a pas, une norme, effectivement, qui n'est pas comprise
18:14et qui devient insécure et, en fait, elle est rejetée par le citoyen.
18:19Voilà.
18:20Et dans ce contexte, quel rôle a le juge administratif ?
18:24Alors, le juge administratif, on peut parler du juge administratif,
18:29mais le juge constitutionnel aussi.
18:30C'est le contrôle, d'une part, effectivement, de la lisibilité de la norme.
18:35Parce que, enfin, le juge administratif a un contrôle là-dessus.
18:38Puisqu'il dit, notamment, il l'a dit dans certaines décisions,
18:42je pense à celle de KPMG, sur, effectivement, la clarté,
18:46la sécurité de la norme.
18:47Il faut qu'elle soit bien compréhensible,
18:49parce qu'une norme non compréhensible,
18:51nécessairement, effectivement, est inefficace.
18:55Donc, par contre, il a des outils pour le faire.
18:58Par contre, ce qu'on assiste aujourd'hui,
18:59et je pense que les juges administratifs présents le diront,
19:03c'est que, effectivement,
19:04le droit devient de plus en plus complexe,
19:06puisque, en fait, on produit une norme sur norme,
19:10effectivement, jusqu'à rendre illisible la norme.
19:11Mais surtout, de moyens, en l'occurrence.
19:14Parce que le défi, aujourd'hui, c'est, effectivement,
19:16quels moyens qu'on met pour contrôler un excès de normes
19:20qui, sans cesse, devient de plus en plus complexe.
19:23Qu'est-ce qu'il faudrait comme moyens ?
19:25Ah ben, je veux dire, augmenter les effectifs,
19:27ça, c'est évident, parce que, même s'il y a l'intelligence artificielle,
19:30même s'il y a des outils,
19:31ce ne sont que des outils, effectivement, aidants, en l'occurrence.
19:34Celui qui pense doit rester le juge administratif,
19:37le juge constitutionnel, en tout d'état de cause.
19:39On va conclure là-dessus.
19:41Merci, Patrick Linge-Jibé.
19:43Merci, Ardo.
19:43Je rappelle que vous êtes associé fondateur de Juris Guillaume
19:46et également membre du CNB.
19:48Merci.
19:49Tout de suite, l'émission continue.
19:51On va parler comment anticiper le risque douanier.
20:05Comment anticiper les risques douaniers pour les importateurs ?
20:09On en parle tout de suite avec mon invité, Karim Soucy, avocat senior chez CMS, Francis Lefebvre.
20:15Karim Soucy, bonjour.
20:16Bonjour, Arnaud.
20:17Nous allons décrypter ensemble les enjeux du risque douanier pour les importateurs.
20:22Tout d'abord, est-ce que c'est une question incontournable pour les entreprises ?
20:27Eh bien, vous avez raison, Arnaud.
20:29C'est bien un sujet incontournable pour les entreprises qui a été mis en lumière,
20:33il faut le reconnaître par cette actualité marquante,
20:36sur la hausse soudaine des droits de douane US et des répliques dans l'Union européenne,
20:41dont tout le monde parle depuis plusieurs mois.
20:43Mais en réalité, lorsque l'on regarde le sujet de plus près,
20:46on comprend qu'il a toujours été omniprésent.
20:48« Regardons-nous, vous apportez un costume, des lunettes, une tablette. »
20:53Nécessairement, ce type de produit ou de marchandise ont pu faire l'objet d'une importation
20:58et donc ont été à un moment ou un autre sujets au risque douanier.
21:02Pourquoi ?
21:03Parce que les entreprises doivent communiquer au stade de l'importation
21:07des informations fiables à l'administration des douanes.
21:10Parmi ces informations figurent principalement le triptyque du droit douanier,
21:13à savoir l'espèce, c'est-à-dire le type de marchandise que vous importez,
21:17la valeur, le prix payé ou à payer pour importer,
21:20et enfin l'origine, c'est-à-dire le pays de fabrication.
21:23Or, ces informations vont impacter non seulement le montant du prix de la marchandise que vous importez,
21:29mais également les droits et taxes afférent à cette importation
21:32et être source de contrôle et donc potentiellement de sanctions par l'administration douanière.
21:38Mais le risque douanier, ce n'est pas que ça,
21:40et c'est là que le contexte actuel l'a rendu incontournable.
21:45Avec la hausse des droits de douane, notamment américaine,
21:48s'ensuit pour les opérateurs une hausse des prix de revente du produit
21:52et donc une répercussion de cette hausse des droits de douane
21:55et parfois des pèses des marges, etc.
21:58Et le risque douanier qui pèse sur ces opérateurs,
22:02c'est donc aussi d'être en mesure de pouvoir s'interroger sur la possibilité,
22:06de revoir le prix ou composant du prix,
22:08de revoir la chaîne d'approvisionnement, le sourcing,
22:11de revoir également la chaîne de distribution.
22:14Et le tout sans que cela n'entraîne de contrôle ou du moins de sanctions.
22:19C'est également ça, le risque douanier.
22:21Et on constate aujourd'hui dans la pratique que les entreprises réalisent,
22:24bien souvent par la force des choses,
22:26que le risque douanier devient un véritable sujet stratégique pour l'entreprise,
22:30voire incontournable au même titre que la fiscalité.
22:33Alors le risque douanier est un sujet stratégique
22:36et on va voir que dans ce contexte,
22:38le contrat est un outil clé pour limiter le risque douanier.
22:41Concrètement, pourquoi limiter le risque douanier par le contrat
22:45et quels sont les risques qui pèsent à l'importation et à l'exportation ?
22:49Vous savez Arnaud, dans la pratique,
22:51on constate qu'il n'y a que trop peu de clauses douanières dans les contrats.
22:56Prenons un cas concret.
22:57Vous êtes un portateur de chaussures que vous revendez en France ou dans l'Union Européenne.
23:02Vous importez vos chaussures puisque vous avez contractualisé à l'an.
23:07Vous avez un accord plutôt avec un fournisseur qui se situe en Thaïlande
23:10et qui vous fournit des factures de vente dans lesquelles il est indiqué « made in Thaïlande ».
23:15Donc vous avez l'origine Thaïlande sur le produit.
23:17Manque de chance lorsque vous importez ces marchandises,
23:21les marchandises en réalité sont d'origine Chine.
23:23L'administration des douanes contrôle et derrière,
23:26vous pouvez faire l'objet d'un contrôle et de potentielles sanctions.
23:31Comment se protéger sur la base d'une seule facture ?
23:33Pouvez-vous limiter votre responsabilité douanière ?
23:35Pouvez-vous engager la responsabilité de votre fournisseur ?
23:40Eh bien, c'est délicat sur la base d'une simple facture.
23:42C'est précisément pour anticiper ce type de risque dans les relations avec les fournisseurs originaires de pays tiers
23:49qu'il devient essentiel d'insérer au contrat de vente des clauses en lien avec la matière douanière.
23:55Ces clauses vont permettre de définir le niveau de précision des informations
23:59que le fournisseur va devoir vous communiquer pour que vous puissiez derrière effectuer l'importation des marchandises
24:05ou les vérifications en tout cas de ces informations pour l'importation,
24:08de répartir les coûts liés à la livraison et derrière l'importation des marchandises,
24:14notamment via les incotermes, mais aussi et surtout pour limiter les risques de sanctions liés à l'importation,
24:21notamment les redressements ou pénalités.
24:24Et donc, quelles pourraient être ces sanctions ?
24:26Si l'on reprend notre exemple de ces marchandises originaires de Chine et non de Thailand que vous importez dans l'Union européenne,
24:32les risques sont de différentes natures.
24:34Premièrement, le risque sur le plan commercial.
24:36L'administration des douanes va pouvoir, dans le cadre de son contrôle,
24:39bloquer tout colis ou conteneur contenant vos marchandises
24:43et dans l'attente de l'issue de son contrôle de vérification sur l'origine de ces marchandises,
24:48eh bien cela va entraîner nécessairement des conséquences sur la revente de ces marchandises,
24:53donc sur votre activité commerciale.
24:55Et sur le plan de la responsabilité, il faut savoir qu'en France,
24:58toutes les infractions, en tout cas tous les manquements à la législation douanière
25:02sont des infractions pénales qui peuvent être sanctionnées par des contraventions ou des délits.
25:08Et donc le risque, outre le redressement des droits et taxes et des pénalités en jeu,
25:12va aussi porter sur la sanction pénale contre l'importateur,
25:16notamment risque d'amende, pénalité, risque aussi de saisie.
25:21Et donc, vous l'aurez compris, le contrat est un outil indispensable aujourd'hui
25:25pour pouvoir limiter ou en tout cas maîtriser ce risque.
25:28Alors justement, le contrat permet d'anticiper ce risque.
25:33Est-ce que c'est vraiment possible d'anticiper le risque douanier ?
25:37Et comment faire face à une augmentation soudaine des droits de douane,
25:41comme vous l'avez signalé tout à l'heure dans ce contexte international qu'on connaît ?
25:46Eh bien, le droit de douane, ou plutôt le droit de douanier, est par nature une matière technique
25:50et en constante évolution, notamment sous l'effet des politiques commerciales.
25:54La preuve en est le cas actuel de la hausse des droits de douane US,
25:57mais également des répliques dans l'Union européenne.
25:59Eh bien, partons de cet exemple.
26:01Comment peut-on faire face à une augmentation soudaine des droits de douane dans l'Union européenne ?
26:06Eh bien, plusieurs outils sont à disposition des importateurs.
26:10Le premier, la pratique des contrats.
26:13Il convient de se demander si le contrat permet de prendre en considération
26:17cette hausse des droits de douane par la stipulation,
26:20notamment de clauses liées à l'imprévision ou clauses de leur type,
26:23qui permettent de renégocier le contrat,
26:25c'est-à-dire que le contrat va faire loger d'une discussion à postérieure,
26:30donc après sa conclusion, et donc nécessite de trouver un accord sur le sujet.
26:34Mais il peut en outre prévu une clause de révision de prix,
26:36qui peut être automatique, et donc qui est déterminée au stade de la négociation du contrat,
26:42sur la base d'indices ou de plafonds,
26:44et qui, lorsque cet événement soudain de hausse des droits de douane intervient,
26:47eh bien, va permettre à l'un des co-contractants
26:50de solliciter une baisse du prix des marchandises achetées
26:54en raison de cette hausse des droits de douane,
26:57dans la limite, effectivement, du cadre qui aura été délimité par le contrat.
27:01Donc, en définitive, il est possible d'envisager,
27:03de définir contractuellement les contours, si vous voulez,
27:06d'une soudaine hausse des droits de douane,
27:08bien que la clause ne portera pas en tant que telle sur la hausse des droits de douane.
27:12Et d'ailleurs, l'occasion est idéale aujourd'hui pour les opérateurs
27:16de revoir leurs contrats, et notamment leurs pratiques contractuelles,
27:19lorsqu'ils achètent des marchandises auprès de fournisseurs dans des pays tiers.
27:23Attention tout de même à l'efficacité de telles clauses.
27:26Rappelons-le, vous êtes dans un contexte international,
27:28quid du droit applicable, de la juridiction, du lieu de situation du fournisseur.
27:33À côté du contrat, vous avez ce qu'on appelle les incotermes,
27:36qui ont des incidences puisqu'ils répartissent les obligations à la charge de l'acheteur,
27:40mais également du vendeur dans le cadre d'une relation,
27:44dans le cadre d'une fourniture d'un bien,
27:46un flux de marchandises à l'international.
27:49Reprenons l'exemple de la marchandise qui est expédiée d'un fournisseur thaïlandais.
27:55Et si le fournisseur thaïlandais vous vend une marchandise en DDP,
27:59avec l'incoterm DDP, d'utilité du delivery paid,
28:01c'est ce fournisseur thaïlandais qui va être en charge des formalités douanières à l'importation dans l'Union,
28:07et donc c'est lui qui va supporter la hausse des droits de douane.
28:11Et enfin, dernier élément qui est indispensable,
28:15quid de l'intégration de la fonction douanière au cœur de la stratégie des entreprises.
28:21Et ce sujet est essentiel aujourd'hui, puisque cela suppose certes un investissement des entreprises,
28:26mais un investissement qui est indispensable,
28:28puisqu'il va permettre de mettre en place des outils de veille réglementaire,
28:31de cartographie des flux, de mettre en place des procédures internes,
28:34que ce soit la pratique des contrats, mais également des audits douaniers,
28:37pour s'assurer une certaine souplesse de la chaîne logistique ou d'approvisionnement.
28:40Est-ce qu'il faut revoir la façon dont on prévoit le design ou la recherche et développement ?
28:49Est-ce qu'il faut délocaliser ? Est-ce qu'il faut vendre dans un pays plutôt que dans l'autre ?
28:52Etc. Etc. Donc ce sont des sujets qu'il faut étudier.
28:56Et sur ce dernier point, nous on a constaté dans la pratique, en tant que praticien du droit,
29:02que c'est un point qui a bien trop souvent été négligé par le passé.
29:05Mais aujourd'hui, on observe un certain intérêt des opérateurs
29:09qui investissent de plus en plus dans leur politique douanière,
29:13puisqu'ils constatent que le sujet douane prend une dimension toute autre
29:16et devient un outil de compliance.
29:18On va conclure là-dessus. Merci Karim Soucy.
29:21Je rappelle que vous êtes avocat senior chez CMS Francis Lefebvre.
29:26Merci à toutes et à tous pour votre fidélité.
29:28C'est le moment de conclure cette émission.
29:30Restez curieux et informés.
29:32A très bientôt sur Bsmart for Change.
29:33Sous-titrage Société Radio-Canada
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29:41Sous-titrage Société Radio-Canada

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