Elisabeth Lévy - "Mort du petit Emile : Emballement médiatique !" - Vidéo Dailymotion

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Transcript

00:00Le Grand Matin Sud Radio, 7h-9h, Jean-Jacques Bourdin.

00:04Elisabeth Lévy, si nous parlions de l'affaire du petit Émile, de l'enquête sur la mort du petit Émile.

00:15Et en réalité, cher Jean-Jacques, j'aurais envie de vous répondre, si nous n'en parlions pas,

00:19pour la bonne raison qu'en réalité, on ne sait rien, on ne sait rien,

00:23et je ne sais d'ailleurs pas pourquoi le procureur a cru bon d'annoncer Urbi et Torbi,

00:27non seulement la garde à vue des grands-parents, mais aussi le motif de cette garde à vue,

00:32donc suspicion d'homicide volontaire et re...

00:35Ce sont les faits ! C'est la transparence des faits !

00:37Eh bien je pense, je vais vous dire pourquoi je pense que ce n'est pas une bonne idée,

00:40parce que la réalité c'est que nous ne savons toujours rien,

00:43et que c'est le meilleur moyen, nous ne savons pas s'ils sont incriminés directement,

00:47nous ne savons rien du tout, ils sont présumés innocents,

00:50et que c'est le meilleur moyen de nourrir le moulin à rumeurs,

00:53et de lancer quand même le barnum médiatique qui n'a pas manqué.

00:56J'ai fait un petit tour de nos concurrents ce matin,

00:59eh bien on voit que des dizaines de journalistes ont déjà fondu,

01:03ou vont fondre sur les malheureuses communes de la Bouilladis et le Petit Hameau du Auvergnet.

01:09Non, la Bouilladis c'est une ville de 6 000 habitants, c'est le Auvergnet.

01:12Oui, et le Petit Hameau du Auvergnet, c'est le bourg de la Bouilladis, on dirait.

01:17C'est 6 000 habitants.

01:19Et les habitants sont invités devant chaque micro, chaque caméra, à donner leurs hypothèses,

01:24on voit des camps se former, ils sont pour ou contre les grands-parents, je vous assure que je l'ai entendu.

01:28On dissèque les petites manies de chacun, et chacun sort ses bouts d'enquête,

01:33spécule sur le van ou sur d'autres éléments.

01:36Les experts en meurtre d'enfants sont convoqués,

01:39et je vous l'avais bien dit que c'était la famille, triomphe également.

01:43Bien sûr, il ne nous manque que Marguerite Duras,

01:46c'est un juge écrasé par la pression médiatique,

01:48pour qu'on se refasse un sinistre remake de l'affaire Grégory.

01:53Bien, dès qu'il y a malheureusement un fait,

01:56dans les médias, on commente avant de s'attarder aux faits, avant d'expliquer et d'analyser.

02:00Ça, c'est une pratique, effectivement absolument désagréable.

02:04Alors, que faire ? Ne pas en parler ?

02:06Dans un monde idéal où la vérité serait, Jean-Jacques, notre seule et unique boussole à tous,

02:12et bien on se concentre sur la vérité,

02:14on se concentre sur la vérité,

02:16on se concentre sur la vérité,

02:18on se concentre sur la vérité,

02:1910 secondes, et c'est terminé.

02:21On n'a rien d'autre à dire, mais,

02:23évidemment, ça ne se passe pas comme ça,

02:25et il ne faut pas jeter la pierre, et nous participons,

02:27je participe évidemment aux phénomènes que je décris,

02:30j'essaye simplement de l'analyser.

02:37La clientèle, comme dit affectueusement mon ami Golnadel,

02:41et ce public veut savoir, il veut savoir malheureusement en temps réel,

02:45et s'il n'en parle pas, s'il n'en parle pas,

02:47il ira bien sûr ailleurs,

02:49chercher, acheter sa dose d'émotions,

02:51sa dose de...

02:54Alors évidemment, nous sommes tous fascinés

02:57parce que c'est un fait divers au sens strict,

03:03pas de pays hostile à un criminel...

03:09C'est un acte à la fois singulier,

03:11c'est-à-dire complètement même hors normes,

03:13évidemment, que de tuer un enfant,

03:15si le meurtre est confirmé,

03:17si l'acte criminel est confirmé,

03:21mais c'est aussi un acte universel,

03:23et ça nous permet dans le fond, en réfléchissant,

03:25ce n'est pas juste nos mauvais instincts,

03:27ou notre voyeurisme,

03:28c'est parce que ça nous permet aussi

03:30de nous approcher de la question du mal,

03:32comme en quelque sorte le fait un grand roman.

03:35Alors bien sûr, on peut quand même, Jean-Jacques,

03:37apprendre collectivement de nos erreurs.

03:39Vous vous rappelez qu'à l'éponge, et on en a parlé hier,

03:41parce que vous étiez, je crois, à RTL à l'époque ?

03:45Oui, j'ai vécu de près l'affaire d'Utti Grégory.

03:49Vous l'avez vécu de près,

03:51et à l'éponge, vous vous rappelez qu'il a eu mort d'homme,

03:53comment s'appelait-il ? Bernard Laroche.

03:57Alors je comprends, je comprends le besoin de comprendre,

03:59je comprends la fascination et l'effroi,

04:01je les partage évidemment,

04:03mais si nous sommes tous drogués

04:05à l'information et à l'information continue,

04:07et bien la responsabilité des dealers que nous sommes,

04:11c'est de ne pas vendre une marchandise frelatée,

04:14donc d'y aller mollo-mollo sur les doses.

04:17Oui, c'est peut-être vrai sur le petit Grégory,

04:19c'est malheureusement vrai aussi pour tant d'autres sujets

04:22où on a cette manie aujourd'hui de supputer,

04:25de commenter, alors qu'on devrait rester sur les faits,

04:28je suis totalement d'accord,

04:29les expliquer et les analyser.

04:31C'est ce qu'on a essayé de faire d'ailleurs avec Jacques Dallais.

04:33Il y a un normalement particulier, me semble-t-il,

04:35à ce type d'affaires ?

04:37Il y a véritablement là...

04:39Oui, dès que c'est un fait divers, évidemment,

04:42ça c'est sûr, crapuleux,

04:44dès que c'est...

04:47Enfin bon, il y a plein de sujets comme ça qui suscitent

04:50des mobilisations de personnes d'ailleurs

04:54qui parlent de sujets qu'ils ne connaissent pas,

04:57enfin bon, ça c'est un autre débat.

04:59Ce que vous décrivez, Elisabeth Lévy,

05:01et vous mettez le doigt là où ça fait mal,

05:03surtout pour les médias,

05:05existe depuis que les journaux existent,

05:07nous sommes d'accord,

05:08ce n'est pas propre à l'affaire Grégory

05:10ou aujourd'hui l'affaire du petit Émile.

05:12J'ai juste une question à vous poser,

05:14vous dites quoi ce matin ?

05:16Il faut faire attention ?

05:18Il ne faut pas en parler ?

05:20Je vous rappelle que des instructions judiciaires,

05:23hors les affaires de crimes d'enfants,

05:25des instructions judiciaires sont étalées aujourd'hui

05:28pleine page dans la presse,

05:30on se demande d'où ça sort,

05:31et ce qui permet d'incriminer telle ou telle personnalité

05:33avant même que les juges

05:35n'ébouclaient leurs propres instructions.

05:37Qu'est-ce qu'il faut dire aujourd'hui ?

05:39Il faudrait que la presse ne parle plus des affaires au cou.

05:42Comme vous l'avez remarqué, je n'ai pas...

05:44Et ce que vous dites est très juste,

05:46ça n'existe,

05:48et on va oublier les passions tristes

05:50des uns et des autres,

05:51que parce que les gens se passionnent.

05:53Nous sommes en démocratie,

05:55les gens se passionnent.

05:56Donc, quelle est la clé de résolution

05:58de ce que vous décrivez ?

05:59C'est quoi ? C'est que les médias se réfrègnent ?

06:01Je vous rappelle que les médias sont un marché.

06:04Non mais je peux vous répondre,

06:06parce qu'à chaque fois vous rajoutez une question.

06:09Alors, je vous réponds.

06:11Comme vous l'avez remarqué,

06:13je me suis bien gardé de donner une recette,

06:16et ni, encore une fois,

06:18de m'exclure de ce phénomène,

06:20à la fois comme consommateur

06:22et comme dealer,

06:23puisque j'ai employé cette métaphore.

06:26Non, la seule chose qu'on peut un tout petit peu faire,

06:29évidemment qu'on ne va pas ne pas en parler,

06:31la seule chose qu'on peut faire,

06:33c'est ce que fait Jean-Jacques,

06:34c'est-à-dire essayer d'éviter les spéculations

06:38de partir dans des spéculations

06:41qui n'ont absolument aucun fondement.

06:44Peut-être qu'il ne faut pas non plus

06:46en faire des tonnes et des tonnes,

06:48parce que, je veux dire,

06:49il n'y a pas de raison d'ouvrir un JT

06:51tout le temps, trois fois dans la journée là-dessus,

06:53si t'as pas une info nouvelle.

06:55Si t'as pas une info nouvelle.

06:57Des chaînes d'info continue.

06:59Des réseaux sociaux,

07:00et des chaînes à info continue.

07:02Mais vous avez raison,

07:04il faut nourrir le molloc.

07:06Il faut nourrir le molloc.

07:07Donc je dis,

07:08ça dépend de notre propre sens des responsabilités,

07:11c'est pas tout ou rien.

07:13Il y a une façon d'en parler,

07:15on n'est pas obligé,

07:17je veux dire, d'aller chercher des gens

07:19qui vont nous dire,

07:20c'est le grand-père, c'est la grand-mère,

07:21c'est l'oncle, c'est le plus os, c'est la tante.

07:22Rappelez-vous BFM avec l'affaire Palmade.

07:24Ça veut dire quoi ?

07:25Qu'il faut éviter d'aller interviewer

07:27M. Michu à la Bouilladis ?

07:29Ou alors que si vous voyez ça,

07:30vous changez de chaîne ?

07:31Quelle est la clé de résolution ?

07:33Mais non, justement, je ne change pas de chaîne.

07:35Écoutez, c'est juste une question de discernement.

07:38C'est pas de ne pas l'interviewer.

07:40J'entends bien, je suis d'accord avec vous.

07:41Mais quelle est la clé de résolution ?

07:42Quelqu'un peut vous dire des choses intéressantes

07:44sur la vie dans ses communes.

07:45En revanche,

07:46si vous voulez quelqu'un qui va vous dire

07:48d'un temps péremptoire

07:49moi je sais que c'est machin X ou Y,

07:51ça n'est pas intéressant pour votre public.

07:54Bien, il est 8h23,

07:56vous êtes sur l'antenne de Sud Radio.

07:58A tout de suite.

Elisabeth Lévy - "Mort du petit Emile : Emballement médiatique !"

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