Les députés examinent une proposition de loi visant à élever Alfred Dreyfus au rang de général de brigade à titre posthume. Le texte, à l'initiative du groupe "Ensemble pour la République", vise à promouvoir Alfred Dreyfus au grade de général de brigade, comme il aurait pu l'être de son vivant s'il n'avait pas été injustement condamné au bagne pour intelligence avec l'ennemi en 1894, avant d'être innocenté en 1906. Retrouvez les débats des députés.
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00:00:00Bonjour à tous.
00:00:08130 ans après, l'Assemblée nationale rend justice à Alfred Dreyfus.
00:00:13Cet officier français accusé à tort en 1894 d'avoir livré des documents à l'Allemagne.
00:00:19Il est condamné au bagne à perpétuité.
00:00:22L'erreur judiciaire sera réparée.
00:00:24Il est réintégré dans l'armée, mais sa progression militaire a été freinée.
00:00:28Aujourd'hui, une proposition de loi est examinée pour réhabiliter Alfred Dreyfus.
00:00:33La séance est ouverte.
00:00:34Madame la présidente de l'Assemblée nationale, merci de présider cette séance importante pour l'histoire parlementaire.
00:00:40Madame la ministre, monsieur le président de la commission nationale...
00:00:45Monsieur le président de la commission de la défense nationale, pardon, et des forces armées,
00:00:49honorable collègue député, chère famille Dreyfus également qui vous trouvez en tribune.
00:00:53Voilà que par le lent passage du temps, il est proposé à l'Assemblée nationale
00:00:58d'élever à titre posthume Alfred Dreyfus au grade de général de brigade.
00:01:05En tant que rapporteur, je remercie la commission qui a validé à l'unanimité
00:01:09cette proposition de loi déposée par Gabriel Attal,
00:01:14texte que je sais dans le cœur, attendu par plusieurs d'entre vous sur ces bancs.
00:01:19Je veux croire que nous mesurons toutes et tous le caractère particulier de ce débat.
00:01:27Par notre vote, la République va réparer une erreur,
00:01:32celle que l'officier Dreyfus dut subir en 1906,
00:01:35lors de l'adoption de la loi le réintégrant dans les cadres de l'armée,
00:01:39loi qui ne le réintégra pas au grade qui lui revenait de droit.
00:01:44Une erreur qui ne fut en rien anecdotique, puisqu'elle brisa pour de bon sa carrière militaire,
00:01:51alors que la justice venait tout juste de l'innocenté.
00:01:55Une erreur qui resta une blessure à l'honneur de ce soldat,
00:01:59dont l'armée était la vocation d'une vie.
00:02:03Alfred Dreyfus naît à Mulhouse en 1859.
00:02:07Il est un enfant de l'Alsace, cette si belle province du Rhin,
00:02:13où fut écrit notre hymne national,
00:02:16et qui donna à la Révolution puis à l'Empire tant de leurs généraux.
00:02:22Jeune garçon, il assiste à la défaite traumatisante de 1870.
00:02:27La famille de vieilles lignées alsaciennes-juives
00:02:30opte pour la nationalité française
00:02:33et doit quitter sa terre ancestrale.
00:02:38Élève brillant, il sort de polytechnique en s'engageant dans l'artillerie
00:02:41et réussit son admission à l'école supérieure de guerre.
00:02:45Il en obtient la mention très bien.
00:02:48Le brevet d'état-major est un classement excellent,
00:02:509e sur 81.
00:02:53Alfred Dreyfus a trouvé sa raison d'être.
00:02:55Servir la France par son glaive.
00:02:56Il veut servir l'armée, la glorieuse armée française,
00:03:02celle de Bouvines, de Recroix, de Valmy, d'Austerlitz.
00:03:07Cette armée, il en rêvait qu'il finirait par laver la débâcle de Sedan.
00:03:14Le jeune officier est remarqué pour son intelligence,
00:03:17son sérieux, son esprit méthodique,
00:03:19sa culture, une forme de discrétion également.
00:03:22Il est un pur produit du cartésianisme à la française
00:03:27et de la méritocratie républicaine.
00:03:30Ce jeune officier d'élite est promis aux plus belles perspectives.
00:03:35Soudain, en 1894,
00:03:40s'abat la terrible machination
00:03:42dans une société électrisée par le nationalisme,
00:03:46l'antisémitisme et la xénophobie.
00:03:52Lui,
00:03:53qui était d'abord un français,
00:03:56un officier français,
00:03:58la foule haineuse
00:03:59ne le voit plus qu'en juif.
00:04:02Ce sont les douze années
00:04:03de l'affaire bien connue.
00:04:06Le 12 juillet 1906,
00:04:07la cour de cassation,
00:04:08innocent Dreyfus,
00:04:10de l'accusation portée,
00:04:12rien ne reste debout,
00:04:13écrivent les juges.
00:04:14La vérité judiciaire est dite.
00:04:17Le lendemain 13 juillet,
00:04:19ici même,
00:04:20la Chambre des députés
00:04:21adopte un projet de loi
00:04:23portant réintégration
00:04:24dans les cadres de l'armée
00:04:25du capitaine breveté d'artillerie
00:04:27Alfred Dreyfus
00:04:28avec le grade de chef d'escadron,
00:04:31c'est-à-dire commandant.
00:04:33Or, c'est là,
00:04:35chers collègues,
00:04:36que se noue le problème.
00:04:38Il est réintégré
00:04:39en dessous
00:04:40du grade auquel
00:04:42il aurait pu prétendre.
00:04:43Il est encore
00:04:45pénalisé,
00:04:47amputé
00:04:48de cinq années
00:04:49d'avancement.
00:04:51Très vite,
00:04:51il remarque
00:04:52la maldonne.
00:04:53Il semble,
00:04:53selon les historiens,
00:04:55que celle-ci soit d'abord
00:04:56une erreur administrative,
00:04:58fruit d'un malentendu.
00:04:59On s'activait surtout
00:05:00pour obtenir
00:05:01la légion d'honneur
00:05:02à Dreyfus,
00:05:03qu'il reçut,
00:05:04d'ailleurs,
00:05:05dans une cérémonie émouvante
00:05:06à l'école militaire.
00:05:08On pensait
00:05:09qu'il ne continuerait pas
00:05:10sa carrière.
00:05:10Or Dreyfus
00:05:12veut
00:05:13toujours
00:05:14servir l'armée,
00:05:17malgré la forfaiture
00:05:18organisée contre lui
00:05:19par quelques chefs
00:05:20indignes.
00:05:21Songez bien,
00:05:22mesdames et messieurs,
00:05:23chers collègues,
00:05:24ce que nous dit
00:05:25cette volonté
00:05:26de continuer
00:05:26à servir
00:05:27du sens
00:05:28du devoir,
00:05:29du courage
00:05:30et de la générosité
00:05:32des sentiments
00:05:33de cet officier.
00:05:34« Quelle force d'âme,
00:05:37quel culte de l'armée
00:05:38il faut avoir aussi
00:05:39à l'issue
00:05:40d'une telle conspiration
00:05:42de vouloir
00:05:43enfiler l'uniforme. »
00:05:46Car c'était ça,
00:05:46Dreyfus,
00:05:48souvenez-vous,
00:05:49cet exemple
00:05:50de patriotisme
00:05:51qui s'est crié
00:05:52le matin d'hiver
00:05:54de son humiliante
00:05:55dégradation.
00:05:57« Vive la France,
00:05:59vive l'armée ! »
00:06:00criait-il.
00:06:00En 1906 et 1907,
00:06:03il s'active en coulisses
00:06:04pour tenter
00:06:04de corriger l'erreur.
00:06:06Il prépare même
00:06:07une proposition
00:06:07de loi rectificative,
00:06:09sans succès.
00:06:10Le gouvernement
00:06:10refuse à l'époque
00:06:12de rouvrir le dossier.
00:06:14Âgé de 46 ans,
00:06:15Dreyfus comprend
00:06:16qu'en raison
00:06:16des règles d'avancement
00:06:17et de limites d'âge,
00:06:19il ne deviendra
00:06:20jamais officier général.
00:06:22Sa carrière
00:06:22est terminée,
00:06:23il demande
00:06:24à contre-coeur
00:06:25sa mise à la retraite
00:06:27avec,
00:06:27je le cite,
00:06:29« une profonde tristesse
00:06:30mais aussi
00:06:31avec le sentiment
00:06:32très vif
00:06:33de remplir
00:06:34son devoir
00:06:35de dignité. »
00:06:38Fidèle
00:06:38à son armée,
00:06:40ce patriote
00:06:41demeure réserviste.
00:06:43Il est des premiers
00:06:43qui se réengagent
00:06:44en 1914.
00:06:46À la fin
00:06:46de la Grande Guerre,
00:06:47il est au front,
00:06:48au chemin des Dames
00:06:48et à Verdun.
00:06:50L'Alsace-Lorraine
00:06:51est libérée.
00:06:52En 1918,
00:06:53il est certes
00:06:54nommé lieutenant-colonel
00:06:55de réserve,
00:06:55là aussi,
00:06:56bien trop tardivement,
00:06:57cependant l'erreur
00:06:57de 1906.
00:06:58L'erreur originelle
00:07:00n'est pas corrigée.
00:07:01Un siècle durant,
00:07:02cette injustice
00:07:03fut peu à peu oubliée.
00:07:04Puis un président
00:07:05de la République
00:07:05en 2006,
00:07:07une ministre des Armées
00:07:08en 2019,
00:07:09évoquèrent explicitement
00:07:11la question.
00:07:12Un siècle après,
00:07:13un gouvernement
00:07:14pouvait-il encore
00:07:14la corriger ?
00:07:15Non,
00:07:16chers collègues.
00:07:17Il ne le pouvait plus
00:07:18par la voie réglementaire.
00:07:19En ce sens,
00:07:20j'insiste sur ce point.
00:07:22Le chef de l'État
00:07:23actuel a eu raison
00:07:24en 2021
00:07:25de rappeler
00:07:26que s'il considérait
00:07:27in pectoré
00:07:28que Dreyfus
00:07:29était général,
00:07:31il ne pouvait
00:07:31le nommer
00:07:31par décret
00:07:32et il renvoyait
00:07:33un dialogue
00:07:34avec les représentants
00:07:35du peuple français.
00:07:37J'ajoute
00:07:38que la voie législative
00:07:39s'impose en l'espèce
00:07:40puisque l'erreur
00:07:42de base
00:07:43se trouve
00:07:44dans la loi
00:07:44de 1906.
00:07:46La présente proposition
00:07:48de loi
00:07:48est individuelle
00:07:49et singulière.
00:07:50elle vise
00:07:51à réparer
00:07:52un cas individuel
00:07:53et singulier,
00:07:55hors normes
00:07:55et sans comparaison
00:07:56sous la République.
00:07:58Elle ne crée
00:07:58aucun précédent.
00:08:00Pourquoi agir alors ?
00:08:01se demandent certains.
00:08:02Je répondrai
00:08:03et pourquoi pas,
00:08:04chers collègues ?
00:08:05Pourquoi avoir
00:08:05tant attendu ?
00:08:07Pourquoi s'inventer
00:08:08sans cesse
00:08:09de nouvelles raisons
00:08:10de remettre
00:08:10à plus tard ?
00:08:12N'est-ce pas
00:08:13assez
00:08:13119 ans
00:08:14d'attente ?
00:08:16Mes chers collègues,
00:08:17il n'est jamais trop tard
00:08:18pour corriger
00:08:19par don
00:08:19une injustice.
00:08:20et réparer
00:08:21complètement
00:08:21l'honneur
00:08:22d'un homme.
00:08:23Oui,
00:08:23mesdames et messieurs,
00:08:24il est de notre devoir
00:08:25de le faire,
00:08:25de le faire maintenant.
00:08:27Il faut le faire
00:08:28non seulement
00:08:30pour Dreyfus
00:08:31mais aussi
00:08:32pour nous,
00:08:34pour la nation,
00:08:36pour la France
00:08:37de demain.
00:08:38Il faut le faire
00:08:39pour que la République
00:08:40demeure
00:08:40cette haute idée
00:08:42de l'égalité
00:08:43et de la justice.
00:08:45Alors que notre vieux pays
00:08:47est à nouveau traversé
00:08:48par des pulsions
00:08:48de haine,
00:08:49d'antisémitisme,
00:08:50de xénophobie,
00:08:50de complotisme,
00:08:52toutes ces maladies
00:08:53de la société
00:08:53qui font écho
00:08:55au climat de l'affaire.
00:08:56Il faut rester vigilant.
00:08:58Il faut rappeler Dreyfus.
00:09:01Il ne faut pas
00:09:02oublier Dreyfus.
00:09:03Ce héros républicain,
00:09:06symbole de résistance
00:09:07à l'oppression
00:09:07et à l'écrasement.
00:09:10Dreyfus n'est pas
00:09:10une vieille histoire.
00:09:12Dreyfus,
00:09:13c'est une sentinelle
00:09:14de la République.
00:09:16Dans les conditions
00:09:17cruelles de l'île du diable,
00:09:18il se bâtit
00:09:18pour sa survie
00:09:19et sa réhabilitation.
00:09:22Il fut le principal
00:09:23acteur de son histoire,
00:09:25aidé par
00:09:26d'illustres personnalités
00:09:28et des militaires aussi,
00:09:30car il y en avait
00:09:31qui crurent
00:09:32à son innocence
00:09:33et lui témoignèrent
00:09:34de la camaraderie.
00:09:36Mais c'est bien
00:09:37Dreyfus qui toujours
00:09:38refusa d'abdiquer
00:09:39et je crois
00:09:40que ce combat,
00:09:41c'est aussi
00:09:42grâce aux valeurs
00:09:44de l'armée
00:09:44qu'on lui avait inculquées
00:09:45qu'il put le mener.
00:09:48Dreyfus est un modèle
00:09:49de résistance
00:09:50et d'héroïsme
00:09:50pour la nation.
00:09:52Il est un exemple
00:09:53pour les jeunes générations.
00:09:55Un grand homme
00:09:55auquel la patrie
00:09:57peut se montrer reconnaissante.
00:10:01Mesdames et messieurs,
00:10:02en élevant
00:10:02au grade de général
00:10:03Alfred Dreyfus,
00:10:05la République aura
00:10:06réparé une erreur.
00:10:08Et ce faisant,
00:10:09la République
00:10:10continuera aussi
00:10:11et toujours
00:10:12de proclamer
00:10:13que ces lumières
00:10:14ce sont celles
00:10:16des droits de l'homme
00:10:17et du citoyen,
00:10:19d'une certaine idée
00:10:20de la vérité,
00:10:21d'une certaine idée
00:10:22du respect
00:10:23et d'une certaine idée
00:10:25de la dignité humaine.
00:10:27Merci beaucoup.
00:10:28Merci beaucoup
00:10:29Monsieur le rapporteur.
00:10:31Le texte examiné
00:10:33ne rouvre pas
00:10:34le dossier judiciaire.
00:10:35Mais il revient
00:10:36sur un aspect
00:10:37moins connu
00:10:37de l'affaire Dreyfus.
00:10:39Des années de calomnie
00:10:40et d'humiliation
00:10:41ont freiné
00:10:42la carrière militaire
00:10:43de l'officier.
00:10:44Les députés
00:10:45veulent donc
00:10:45parachever
00:10:46la réparation
00:10:47d'une injustice
00:10:48d'Etat.
00:10:48Je voudrais
00:10:49que nous saluions
00:10:51la famille
00:10:52de Monsieur
00:10:53Alfred Dreyfus
00:10:54et ses descendants
00:10:55qui sont présents
00:10:56avec nous
00:10:57en séance
00:10:57aujourd'hui.
00:11:09Merci à vous.
00:11:10La parole est à présent
00:11:11à Madame Patricia Miralès,
00:11:13ministre déléguée
00:11:14chargée de la mémoire
00:11:15et des anciens combattants.
00:11:30Madame la Présidente,
00:11:32Monsieur le Président
00:11:32de la Commission
00:11:33de la Défense
00:11:34et des Forces armées,
00:11:35Monsieur le rapporteur,
00:11:36Mesdames et Messieurs
00:11:36les députés,
00:11:38je me permets moi aussi
00:11:39de saluer la famille
00:11:41d'Alfred Dreyfus
00:11:42présente dans l'hémicycle.
00:11:44Le moment
00:11:45qui nous réunit
00:11:46aujourd'hui
00:11:46à votre initiative
00:11:48est à la fois
00:11:49singulier et solennel.
00:11:51Il convoque
00:11:52un nom
00:11:53que l'histoire
00:11:53a élevé
00:11:54au rang de symbole
00:11:55Alfred Dreyfus,
00:11:57officier injustement
00:11:58condamné
00:11:59par un procès unique,
00:12:01homme d'honneur
00:12:02bafoué,
00:12:03détenu,
00:12:04enchaîné,
00:12:05les fers au pied
00:12:05sur l'île du diable,
00:12:07patriote blessé
00:12:08et pourtant
00:12:08resté fidèle
00:12:10à son pays,
00:12:11époux et père humilié,
00:12:13français admirable
00:12:14pourchassé
00:12:15parce que juif,
00:12:17alsacien
00:12:18et militaire
00:12:19moderniste.
00:12:20Si Alfred Dreyfus
00:12:22est un symbole,
00:12:23c'est aussi
00:12:23parce qu'il fut
00:12:24l'enjeu
00:12:24de ce moment
00:12:26fondateur
00:12:26de notre République,
00:12:28ce moment
00:12:28où elle a su reconnaître
00:12:30qu'elle avait failli
00:12:31à ses principes.
00:12:32Car Alfred Dreyfus
00:12:33est aussi
00:12:34cet homme d'honneur
00:12:35réhabilité
00:12:36par la Cour de Cassation
00:12:37le 12 juillet
00:12:381906,
00:12:40cet officier
00:12:40réintégré
00:12:41dans l'armée
00:12:42par les députés
00:12:43le lendemain même,
00:12:44ce soldat engagé
00:12:45qui reprend du service
00:12:46en 1914
00:12:47et à qui la France
00:12:49a rendu un hommage
00:12:50le promouvant
00:12:51au grade d'officier
00:12:52de la Légion d'honneur
00:12:53en 1919.
00:12:56Mais Alfred Dreyfus
00:12:57est également
00:12:58un symbole
00:12:59car la réhabilitation
00:13:00est intrinsèquement
00:13:01liée à une mobilisation
00:13:02de l'opinion publique
00:13:03qui a conforté
00:13:04la République.
00:13:05C'est Clémenceau
00:13:06qui ouvre son journal
00:13:08« L'Aurore »
00:13:09aux jacuzes de Zola
00:13:11qui annoncent
00:13:12la vérité en marche.
00:13:14C'est la République
00:13:15qui s'affirme
00:13:16contre tous les populismes
00:13:17de droite
00:13:18comme de gauche.
00:13:20Cependant,
00:13:21si la République
00:13:21a reconnu
00:13:22l'innocence
00:13:22du capitaine Dreyfus
00:13:24de l'accusation
00:13:25portée contre lui,
00:13:27rien ne reste debout.
00:13:28Écrivant la Cour de Cassation,
00:13:30la réparation offerte
00:13:31n'a pas été totale.
00:13:33Avec cette dignité
00:13:34qui le caractérisait,
00:13:36lui qui revendiquait
00:13:37ne jamais avoir demandé
00:13:39de faveur
00:13:39dans sa carrière,
00:13:41Alfred Dreyfus
00:13:42disait lui-même
00:13:43que les modalités
00:13:44de sa réintégration
00:13:45dans l'armée,
00:13:46sa nomination
00:13:47comme chef d'escadron
00:13:48avaient été injustes.
00:13:51Ce sentiment d'injustice
00:13:52conduisit Alfred Dreyfus
00:13:54avec au cœur
00:13:54de la morsure
00:13:56de la résignation
00:13:57a demandé sa mise
00:13:59à la retraite
00:14:00en 1907.
00:14:02Cette injustice
00:14:02de 1906
00:14:04s'explique en partie
00:14:05par les circonstances
00:14:06de l'époque.
00:14:08Examinant la proposition
00:14:09de loi déposée
00:14:10par le président Attal
00:14:11et éclairée
00:14:12par les analyses
00:14:13du rapporteur
00:14:14Sinzenstuhl,
00:14:16il nous est proposé
00:14:17de répondre
00:14:18à cette situation
00:14:19qui perdure
00:14:19depuis plus d'un siècle.
00:14:21Il ne peut s'agir
00:14:22de rouvrir
00:14:22tout le dossier
00:14:23de l'affaire Dreyfus
00:14:24ni sur le plan judiciaire
00:14:26ni sur le plan historique
00:14:30dont la vérité
00:14:31est désormais bien établie
00:14:32alors que le vote
00:14:34d'aujourd'hui
00:14:34ne doit pas conduire
00:14:35à une confusion.
00:14:37Celle où l'on oublierait
00:14:38que le Dreyfusisme victorieux
00:14:40n'est pas soluble
00:14:41dans les populismes étriqués
00:14:43qui excluent
00:14:44ou qui instrumentalisent.
00:14:46Il s'agit donc
00:14:47plus simplement
00:14:48mais peut-être aussi
00:14:50plus profondément
00:14:51de considérer
00:14:52la décision prise
00:14:53par les députés
00:14:54de 1906.
00:14:56A-t-elle suffisamment
00:14:57réparé ?
00:14:59A-t-elle suffisamment
00:15:00reconnu ?
00:15:01En matière de réparation,
00:15:03il faut avoir
00:15:03la sagesse
00:15:04de ne pas réparer,
00:15:05de ne réparer
00:15:06que les vivants.
00:15:07C'est donc bien
00:15:08le champ
00:15:08de la reconnaissance
00:15:09mémorielle
00:15:10et symbolique
00:15:10qui se situe
00:15:11dans notre discussion.
00:15:12D'autant que
00:15:13cette proposition de loi
00:15:14revêt une dimension
00:15:15singulière
00:15:16dans notre ordre
00:15:18constitutionnel
00:15:18où la nomination
00:15:19des officiers généraux
00:15:21relève du président
00:15:23de la République
00:15:23en vertu
00:15:24de l'article 13
00:15:25de notre constitution.
00:15:28Elle ne peut donc
00:15:29revêtir
00:15:29qu'un caractère
00:15:30exceptionnel
00:15:31parce que le cas
00:15:31d'Alfred Dreyfus
00:15:34est unique
00:15:35comme le sont
00:15:36les cicatrices
00:15:37de l'affaire.
00:15:38Cette proposition
00:15:39ne doit pas être
00:15:40un précédent
00:15:41pour questionner
00:15:42d'autres carrières.
00:15:44Le gouvernement
00:15:45salue cependant
00:15:46les travaux menés
00:15:47jusqu'à la séance
00:15:48d'aujourd'hui
00:15:49répondant
00:15:49à la mobilisation
00:15:51d'élus
00:15:51d'institutions
00:15:52de citoyens
00:15:53de la presse
00:15:54et du monde
00:15:54intellectuel.
00:15:56C'est cela aussi
00:15:56la grandeur républicaine
00:15:58savoir reconnaître
00:15:59l'histoire
00:16:00sans prétendre
00:16:01effacer
00:16:02la cicatrice
00:16:02du passé.
00:16:04Ensemble
00:16:04ici
00:16:05nous pouvons ainsi
00:16:06reconnaître
00:16:07le poids du geste
00:16:08que vous vous apprêtez
00:16:09à faire
00:16:09profondément
00:16:10significatif.
00:16:12Il est d'autant
00:16:12plus significatif
00:16:14que la proposition
00:16:14de loi
00:16:15prend un relief
00:16:15particulier
00:16:16au moment
00:16:17où les actes
00:16:18de haine antisémite
00:16:19connaissent
00:16:20une inquiétante
00:16:21progression.
00:16:23L'antisémitisme
00:16:24frappe encore
00:16:25jusqu'au cœur
00:16:26de notre démocratie
00:16:27dans nos rues
00:16:28dans nos monuments
00:16:29jusqu'à la personne
00:16:31de la présidente
00:16:32de l'Assemblée nationale.
00:16:33Je profite
00:16:34de cette occasion
00:16:35pour renouveler
00:16:36mon soutien
00:16:37à tous les parlementaires
00:16:39qui ont fait l'objet
00:16:39d'attaques antisémites
00:16:40ces derniers mois.
00:16:42Et cette haine
00:16:43doit être combattue
00:16:44résolument.
00:16:46Nous le savons
00:16:47Alfred Dreyfus
00:16:48ne fut pas seulement
00:16:49la victime
00:16:50d'un des plus grands
00:16:51scandales politico-judiciaires
00:16:52de notre histoire,
00:16:54il fut surtout
00:16:54le bouc émissaire
00:16:55désigné d'un antisémitisme
00:16:57qui ne se cachait pas
00:16:58comme il ne se cache plus
00:17:00désormais
00:17:00dans le trop large
00:17:02pan de notre société.
00:17:04Dès 1896,
00:17:06Bernard Lassard,
00:17:08le premier défenseur
00:17:09de Dreyfus
00:17:10dénonçait
00:17:10une atmosphère
00:17:11de haine
00:17:12et de soupçons.
00:17:14Votre initiative
00:17:15parlementaire contribue
00:17:16à lutter contre
00:17:17les miasmes
00:17:18de cette atmosphère
00:17:19délétère
00:17:20qui de nouveau
00:17:21s'immisce
00:17:21par chaque interstice
00:17:23qu'elle trouve
00:17:23dans notre corps social
00:17:25et l'empoisonne
00:17:26de sa haine.
00:17:27Nous devons
00:17:28collectivement
00:17:29aller plus loin
00:17:30encore
00:17:30pour la dissiper
00:17:31définitivement.
00:17:33Et l'exemple
00:17:34d'Alfred Dreyfus
00:17:35peut nous y aider
00:17:37pour porter haut
00:17:38les valeurs
00:17:38de la République
00:17:39contre ceux
00:17:40qui veulent les affaiblir.
00:17:42Dreyfus
00:17:43doit être un exemple
00:17:44pas un remords.
00:17:46Car oui,
00:17:46Dreyfus
00:17:47fut un exemple,
00:17:48un homme
00:17:49debout
00:17:50refusant
00:17:51le reniement
00:17:51fidèle
00:17:52à ses devoirs
00:17:53jusque dans
00:17:54l'isolement
00:17:54tragique
00:17:55de l'île
00:17:55du diable.
00:17:57Un officier
00:17:57en retraite
00:17:58qui revient
00:17:59servir la France
00:18:00dans la grande guerre
00:18:01alors même
00:18:02qu'il avait
00:18:03toutes les raisons
00:18:04de se retirer.
00:18:05Il se distingue
00:18:06avec honneur
00:18:07et courage
00:18:08participant
00:18:08notamment
00:18:09au combat
00:18:10du chemin
00:18:10des Dames
00:18:11et de Verdun
00:18:11avant d'être
00:18:12promu
00:18:13lieutenant-colonel
00:18:14en 1918.
00:18:16Il laisse
00:18:17un modèle
00:18:17d'héroïsme républicain
00:18:18et d'engagement
00:18:19au service
00:18:19de la France.
00:18:21Avec votre texte,
00:18:22mesdames et messieurs
00:18:23les députés,
00:18:24vous entendez porter
00:18:25haut la mémoire
00:18:26d'un patriote
00:18:27mais aussi
00:18:28et peut-être
00:18:29surtout la promesse
00:18:30d'une République
00:18:31qui ne cesse
00:18:32jamais
00:18:32de vouloir progresser
00:18:34pour la vérité
00:18:34et la justice
00:18:35contre l'arbitraire
00:18:37et l'antisémitisme.
00:18:38Car c'est bien
00:18:39de cette dignité
00:18:40que vous vous proposez
00:18:41de reconnaître
00:18:42aujourd'hui.
00:18:43Pour ce geste unique,
00:18:45le gouvernement
00:18:45s'en remet
00:18:46à la conscience
00:18:47de chacun
00:18:47ainsi qu'à sa sagesse.
00:18:50Je vous remercie.
00:18:51Merci beaucoup,
00:18:52Madame la Ministre.
00:18:55La parole est à présent
00:18:57à M. Jean-Michel Jacques,
00:18:58président de la Commission
00:18:59de la Défense nationale
00:19:00et des Forces armées.
00:19:01Merci Madame la Présidente,
00:19:11Madame la Ministre,
00:19:12mes chers collègues.
00:19:14Permettez-moi d'abord
00:19:15de remercier
00:19:15notre collègue
00:19:16le président Gabriel Attal
00:19:19pour cette proposition
00:19:20de loi.
00:19:21Merci également
00:19:22à notre rapporteur
00:19:23Charles Zinzenstuhl
00:19:25pour son travail
00:19:26qui a éclairé
00:19:26nos débats.
00:19:27Dès nos travaux
00:19:29en commission,
00:19:30vous nous avez permis
00:19:31de valoriser
00:19:32avec justesse
00:19:33Alfred Dreyfus,
00:19:35un citoyen
00:19:36profondément républicain
00:19:38et engagé
00:19:38qui voyait la France
00:19:40comme un pays
00:19:41de progrès,
00:19:43de justice
00:19:43et de liberté.
00:19:46Profondément patriote,
00:19:47Alfred Dreyfus
00:19:48avait fait le choix
00:19:49des armes.
00:19:52Héros de la Première Guerre
00:19:53mondiale,
00:19:53habité par l'esprit
00:19:54corps des officiers
00:19:55de l'armée française,
00:19:56il a combattu
00:19:58à Verdun
00:19:59au chemin des Dames
00:20:00et je veux
00:20:01le souligner
00:20:02ici
00:20:02ses qualités
00:20:05militaires
00:20:05qui ont été
00:20:06particulièrement
00:20:07reconnues.
00:20:09J'ai également
00:20:10une pensée
00:20:11pour le colonel
00:20:12Marie-Georges Picard
00:20:13à l'origine
00:20:14de la remise
00:20:14en question
00:20:15de la culpabilité
00:20:16d'Albert Dreyfus.
00:20:19Officier reconnu
00:20:20pour ses qualités,
00:20:21il fut l'un
00:20:22des pionniers
00:20:22du renseignement
00:20:23militaire français.
00:20:25élevé au grade
00:20:26de général
00:20:27de division,
00:20:28il fut également
00:20:29ministre de la guerre
00:20:30sous le premier
00:20:32gouvernement
00:20:32de Georges Clémenceau.
00:20:35Ces deux officiers
00:20:36de l'armée française
00:20:37incarnent
00:20:38les qualités
00:20:39et les valeurs
00:20:41de nos valeureux soldats.
00:20:44Ces qualités
00:20:44portent en elles
00:20:46la singularité
00:20:47du militaire français,
00:20:49c'est-à-dire
00:20:50le dévouement,
00:20:51l'esprit de sacrifice,
00:20:54le courage,
00:20:55les valeurs,
00:20:56l'honneur,
00:20:57la discipline,
00:20:59la loyauté
00:21:00et la fraternité.
00:21:03Alors,
00:21:04mes amis,
00:21:06mes chers collègues,
00:21:08votons cette loi
00:21:09et honneur
00:21:11à Alfred Dreyfus
00:21:12et vive
00:21:13l'armée française,
00:21:15vive la République
00:21:16et vive la France.
00:21:17L'affaire Dreyfus
00:21:20divise profondément
00:21:21la France.
00:21:22Dreyfusard
00:21:22et anti-Dreyfusard
00:21:23s'affrontent
00:21:24pendant plus de dix ans.
00:21:25Émile Zola
00:21:26publie son célèbre
00:21:27J'accuse
00:21:28mettant en cause
00:21:29l'état-major
00:21:30sur fond d'antisémitisme.
00:21:32Aujourd'hui,
00:21:33dans l'hémicycle,
00:21:33la voix de l'écrivain
00:21:34résonne.
00:21:36Madame la ministre,
00:21:37Monsieur le rapporteur,
00:21:37chère famille Dreyfus,
00:21:39chers collègues,
00:21:41le jour où
00:21:41contre un homme
00:21:42un crime se commet,
00:21:44le jour où
00:21:44il se commet
00:21:44par la main
00:21:45de la bourgeoisie
00:21:46mais où le prolétarien
00:21:47en intervenant
00:21:47pourrait empêcher
00:21:48ce crime,
00:21:49ce n'est plus
00:21:49la bourgeoisie seule
00:21:50qui en est responsable,
00:21:52c'est le prolétariat
00:21:52lui-même,
00:21:53c'est lui qui,
00:21:54en n'arrêtant pas
00:21:55la main du bourreau
00:21:55prêt à frapper,
00:21:57devient le complice
00:21:57du bourreau.
00:21:58Et alors,
00:21:59ce n'est plus
00:21:59la tâche qui voile,
00:22:00qui flétrit
00:22:01le soleil capitaliste
00:22:02déclinant,
00:22:03c'est la tâche
00:22:04qui vient flétrir
00:22:05le soleil socialiste
00:22:06levant.
00:22:07Ce sont les mots
00:22:08de Jean Jaurès
00:22:08en 1898.
00:22:10Quatre ans après
00:22:11la première condamnation
00:22:12d'Alfred Dreyfus,
00:22:13trois ans après son transfert
00:22:15à l'île du Diable.
00:22:17Condamné par deux fois
00:22:18à la place d'un autre
00:22:19pour un crime de trahison
00:22:20au profit d'une nation
00:22:21étrangère
00:22:21à la suite d'un procès
00:22:22biaisé
00:22:23et sur la fois
00:22:24de documents falsifiés
00:22:25avec l'approbation
00:22:27de l'état-major
00:22:27de l'armée française,
00:22:29Alfred Dreyfus
00:22:30aura vécu l'enfer
00:22:31de la déportation
00:22:31au Bagne
00:22:32pendant cinq années
00:22:33et souffert
00:22:34de la calomnie
00:22:35et du déshonneur.
00:22:37Il aura fallu
00:22:38l'engagement sans faille
00:22:39de ses proches,
00:22:40en particulier
00:22:41de son frère Mathieu,
00:22:42ainsi que de personnalités
00:22:43politiques
00:22:44et intellectuelles
00:22:46pour permettre
00:22:46de sortir
00:22:47l'affaire Dreyfus
00:22:49de l'oubli
00:22:49où Alfred
00:22:50avait été exilé.
00:22:53Si notre histoire
00:22:54est tachée de honte,
00:22:55l'honneur du monde ouvrier
00:22:56et de certains
00:22:57de ces intellectuels
00:22:58est d'avoir su
00:22:59se reprendre
00:23:00à l'image de Jaurès
00:23:02pour retournant
00:23:03de l'histoire
00:23:03être du bon côté
00:23:04celui
00:23:05de l'universalisme.
00:23:08Dans le même temps,
00:23:09une partie du monde
00:23:10politique et intellectuel
00:23:11appuyée par les nervis
00:23:12de l'action française
00:23:13se cachait
00:23:14derrière la défense
00:23:15de l'armée
00:23:15pour épancher
00:23:16dans leurs journaux
00:23:17leur haine des Juifs.
00:23:19Il faudra attendre
00:23:201899
00:23:21pour que Dreyfus
00:23:22soit gracié,
00:23:22bien que toujours
00:23:23officiellement coupable.
00:23:25Et ce premier pas
00:23:26dans la réhabilitation
00:23:27et dans la reconnaissance
00:23:28de son innocence
00:23:28est le fruit
00:23:29de la mobilisation
00:23:30des républicains,
00:23:31de tous les républicains
00:23:32socialistes
00:23:33et intellectuels
00:23:34de l'époque,
00:23:34dont notamment
00:23:35Émile Zola.
00:23:36Sept ans plus tard,
00:23:38Alfred Dreyfus
00:23:39sera enfin reconnu
00:23:40pleinement innocent
00:23:41puis réintégré
00:23:42partiellement
00:23:43dans l'armée.
00:23:45Cependant,
00:23:45ces années d'emprisonnement
00:23:46ne seront pas
00:23:48prises en compte
00:23:48dans la reconsidération
00:23:50de sa situation
00:23:51et toute perspective
00:23:52de carrière
00:23:52sera ainsi brisée.
00:23:54La proposition de loi
00:23:55que nous examinons
00:23:56aujourd'hui
00:23:56vise à réparer
00:23:57pleinement
00:23:58les droits
00:23:59d'Alfred Dreyfus
00:24:00en lui conférant
00:24:01de manière posthume
00:24:02le grade
00:24:03de général
00:24:03de brigade.
00:24:05Il s'agit là
00:24:05d'un texte
00:24:06qui honore
00:24:07la représentation
00:24:08nationale
00:24:08en reconnaissant
00:24:10la faute
00:24:10de l'État
00:24:10et de l'armée
00:24:11dans ce scandale
00:24:12tragique et odieux
00:24:13que fut
00:24:13l'affaire Dreyfus.
00:24:15Oui,
00:24:15l'affaire Dreyfus
00:24:16est un scandale
00:24:16qui tâche
00:24:17l'histoire
00:24:17de notre République,
00:24:19de notre armée
00:24:20et de notre nation.
00:24:22Elle nous rappelle
00:24:22que les discriminations
00:24:23et la haine
00:24:24peuvent à tout moment
00:24:25porter atteinte
00:24:26à l'intégrité
00:24:27de notre société
00:24:28aux valeurs
00:24:28d'égalité,
00:24:29de liberté
00:24:30et de fraternité
00:24:32qui la fonde.
00:24:34Cependant,
00:24:35la reconnaissance
00:24:36de la République
00:24:37ne peut se limiter
00:24:38à une déclaration
00:24:39d'attention.
00:24:41Ce vote
00:24:42invite
00:24:42la représentation
00:24:43nationale
00:24:44à expurger
00:24:45les dernières scories
00:24:46de l'affaire Dreyfus
00:24:46qui persistent
00:24:48depuis plus de 120 ans
00:24:49après les faits.
00:24:51Nous ne pouvons plus
00:24:52accepter que des rues
00:24:53et des places
00:24:54honorent encore
00:24:55la mémoire
00:24:56de ceux
00:24:56qui ont sali
00:24:57le nom de Dreyfus.
00:24:58A Paris,
00:24:59dans le premier arrondissement,
00:25:01une place
00:25:01porte le nom
00:25:02de l'écrivain
00:25:03Maurice Barès,
00:25:04lui qui a affirmé
00:25:04dans ses tirades
00:25:05antisémites
00:25:06que Dreyfus
00:25:06avait été capable
00:25:07de trahir
00:25:08en raison de sa race
00:25:09ou encore
00:25:10que Zola
00:25:10était Dreyfusard
00:25:12parce qu'il n'était
00:25:12pas français.
00:25:14Au sein même
00:25:14de notre assemblée,
00:25:15dans le salon Pujol,
00:25:17se trouve
00:25:18une statue
00:25:18d'Albert Demain.
00:25:20Demain fut général
00:25:21et député,
00:25:22partisan de la restauration
00:25:23monarchique,
00:25:24puis boulangiste
00:25:24avant d'être militant
00:25:25assumé du camp
00:25:26anti-Dreyfus.
00:25:28Soutien de Dreyfus,
00:25:29le député socialiste
00:25:31Francis Présensé,
00:25:32cofondateur
00:25:32de la Ligue des droits
00:25:33de l'homme,
00:25:34chevalier de l'ordre
00:25:35de la Légion d'honneur,
00:25:36a été radié
00:25:36le 8 novembre
00:25:371898
00:25:39pour atteinte
00:25:40à l'honneur
00:25:40après avoir
00:25:41communiqué
00:25:41à la presse
00:25:42sans soutien
00:25:43à Émile Zola,
00:25:44suspendu de son titre
00:25:45et affirmant
00:25:46qu'il se répugnerait
00:25:47de continuer
00:25:48à orner
00:25:48la boutonnière
00:25:49d'un petit morceau
00:25:50de ruban rouge
00:25:51devenu apparemment
00:25:52le symbole
00:25:52du mépris
00:25:53de la légalité
00:25:53et de la violation
00:25:55des principes
00:25:55de 1789.
00:25:58Puisse la postérité
00:25:59lui rendre
00:25:59les honneurs dus.
00:26:01Ce vote nous oblige,
00:26:03il nous oblige
00:26:03à regarder en face
00:26:04notre histoire,
00:26:06à la réinterroger
00:26:07sans enjolivement
00:26:08pour réussir
00:26:09à dépasser
00:26:10le roman national.
00:26:12Chers collègues,
00:26:13nous,
00:26:14députés communistes
00:26:15et progressistes
00:26:15ultramarins,
00:26:16sommes convaincus
00:26:17que la République
00:26:18doit réparer
00:26:19ses erreurs
00:26:20en reconnaissant
00:26:21ses victimes
00:26:21et en ce sens,
00:26:23nous voterons
00:26:24ce texte
00:26:24sans aucune réserve.
00:26:26Je vous remercie.
00:26:27Merci beaucoup,
00:26:28Monsieur le député.
00:26:30La parole est à présent
00:26:31à Monsieur Maxime Michelet
00:26:33pour le groupe UDR.
00:26:43Madame la Présidente,
00:26:45Monsieur le Président
00:26:45de la Commission,
00:26:46Monsieur le rapporteur,
00:26:47Madame la Ministre,
00:26:49chers collègues,
00:26:49membres de la famille
00:26:50Dreyfus.
00:26:51Plus cette affaire est finie,
00:26:53plus il est évident
00:26:54qu'elle ne finira jamais.
00:26:55En écrivant ces mots
00:26:56en 1910,
00:26:58Charles Péguy
00:26:58n'imaginait sans doute pas
00:26:59que l'affaire Dreyfus
00:27:00reviendrait occuper
00:27:01notre Assemblée
00:27:02en 2025.
00:27:03Et certains de nos compatriotes
00:27:05s'interrogeront sans doute
00:27:06sur ce débat
00:27:06aux échos à la chronique,
00:27:08que d'aucuns accuseront
00:27:09d'être dictés
00:27:09par des arrières-pensées,
00:27:11que d'autres trouveront
00:27:11à contretemps
00:27:12des urgences.
00:27:13Pourtant,
00:27:14la cause étant grande,
00:27:16les arrières-pensées
00:27:16éventuelles
00:27:17ne méritent pas
00:27:18qu'on s'y attarde.
00:27:19Et la cause étant juste,
00:27:21elle ne saurait être
00:27:22à contretemps,
00:27:23car la France
00:27:23ne perd jamais son temps
00:27:24à se souvenir.
00:27:26Une nation sans mémoire
00:27:27est en effet
00:27:27une nation sans avenir.
00:27:29Et s'ils peuvent paraître
00:27:30parfois déroutants,
00:27:32les gestes mémoriels
00:27:33sont essentiels
00:27:33pour que la mémoire
00:27:35demeure vivante,
00:27:36pour qu'elle ne se dégrade pas
00:27:38en politique de circonstances,
00:27:40mais demeure une mystique.
00:27:41Élever Alfred Dreyfus
00:27:43au grade de général
00:27:44de brigade
00:27:45n'apportera rien
00:27:46à celui qui repose
00:27:48au cimetière
00:27:48du Montparnasse.
00:27:50Mais les gestes mémoriels
00:27:51ne sont pas en réalité
00:27:52pour les morts,
00:27:53ils sont pour les vivants.
00:27:55En disant ce qu'ils furent,
00:27:56nous disons ce que nous sommes
00:27:57et ce que nous aspirons
00:27:57à être encore.
00:27:59En élevant Alfred Dreyfus
00:28:00au grade de général
00:28:01de brigade,
00:28:02nous réaffirmons
00:28:03le combat de la France
00:28:04contre l'arbitraire,
00:28:05contre l'injustice,
00:28:07en réparant la dernière
00:28:08humiliation
00:28:08qui lui fut infligée,
00:28:10en corrigeant un manquement
00:28:11commis par nos prédécesseurs
00:28:12dans cet hémicycle même.
00:28:15Polytechnicien,
00:28:16élève de l'école de guerre,
00:28:17officier remarqué,
00:28:18remarquable,
00:28:19Alfred Dreyfus
00:28:20aurait dû connaître
00:28:21une carrière
00:28:21à la hauteur de ses talents.
00:28:23Mais en 1894,
00:28:24une indigne conspiration
00:28:25vint briser son épée.
00:28:27Car il fallait trouver
00:28:28un traître.
00:28:29L'état-major avait cherché
00:28:30et trouvé un officier juif
00:28:32qu'on abandonna
00:28:33aux violences
00:28:33de l'antisémitisme.
00:28:35Il fallut
00:28:35la détermination héroïque.
00:28:38Au premier rang
00:28:38de Lucie
00:28:39et Mathieu Dreyfus,
00:28:40son épouse
00:28:41et son frère,
00:28:42du lieutenant-colonel Picard,
00:28:43du vice-président du Sénat,
00:28:44chère Orkessner,
00:28:45et bien sûr
00:28:46d'Émile Zola
00:28:46et de tant d'autres
00:28:47pour que la vérité
00:28:48finisse par surgir.
00:28:50De la détermination.
00:28:52Il en fallut également
00:28:53à Alfred Dreyfus
00:28:54lui-même
00:28:54pour survivre
00:28:55à cinq années
00:28:56de martyrs
00:28:57sur l'île du Diable,
00:28:58cet infernal rocher
00:28:59sur lequel il refusa
00:29:01de mourir coupable
00:29:02d'un crime
00:29:03qu'il n'avait pas commis.
00:29:05Il fallut attendre
00:29:061906
00:29:07pour que son innocence
00:29:08fût définitivement
00:29:09affirmée par la cour
00:29:10de cassation.
00:29:11Le lendemain,
00:29:1213 juillet,
00:29:13la Chambre des députés
00:29:14et le Sénat
00:29:14le réintégraient
00:29:16dans l'armée.
00:29:17Mais plutôt que de clore
00:29:18l'affaire,
00:29:18cette réintégration
00:29:19vint réparer l'injustice
00:29:21par une nouvelle iniquité
00:29:22en ne le réintégrant pas
00:29:24au grade
00:29:25auquel il avait droit
00:29:25en regard de son ancienneté.
00:29:28Dans une lettre
00:29:28adressée au désormais
00:29:29chef d'escadron Dreyfus,
00:29:31la veuve d'Émile Zola
00:29:32pouvait ainsi écrire
00:29:33« Alfred Dreyfus
00:29:35reste victime.
00:29:37Après la preuve
00:29:37de son innocence,
00:29:38preuve irréfutable,
00:29:40demeure un crime
00:29:40à son actif
00:29:41qui sera la stupéfaction
00:29:43dans les temps futurs. »
00:29:44La proposition de loi
00:29:45dont nous sommes saisis
00:29:46aujourd'hui
00:29:46vient réparer
00:29:48cette injustice
00:29:48et répondre
00:29:49à cette stupéfaction.
00:29:51Faute d'avoir obtenu
00:29:52gain de cause,
00:29:53Alfred Dreyfus
00:29:54s'était retiré
00:29:54de l'armée
00:29:55en 1907.
00:29:56Rappelé aux armes
00:29:57par la Grande Guerre,
00:29:58il obtint par le feu
00:29:59ce qu'on lui avait refusé
00:30:00par la loi
00:30:01et devint
00:30:02lieutenant-colonel
00:30:03en 1918.
00:30:04S'il avait été
00:30:05équitablement réintégré,
00:30:06sa carrière
00:30:07se serait achevée
00:30:08au grade de général
00:30:08de brigade,
00:30:09au sein d'une armée
00:30:10à laquelle il était
00:30:11resté fidèle
00:30:12malgré les épreuves subies.
00:30:14Car malgré
00:30:14l'étrange défaite morale
00:30:15d'une partie
00:30:16de l'état-major,
00:30:17égarée dans la condamnation
00:30:18d'un innocent,
00:30:20et car le déshonneur
00:30:21de certains
00:30:21ne serait engagé
00:30:22l'honneur de tous,
00:30:24cette armée
00:30:24n'en demeurait pas moins
00:30:25l'armée de la France,
00:30:27l'armée qui défendit
00:30:28la patrie,
00:30:29au prix du sang,
00:30:30à Verdun,
00:30:31au chemin des dames,
00:30:32avec Dreyfus
00:30:33dans ses rangs.
00:30:34Le groupe UDR
00:30:35votera donc
00:30:35en faveur
00:30:36de la reconstitution
00:30:37posthume
00:30:38de la carrière militaire
00:30:38d'Alfred Dreyfus,
00:30:40réparation mémorielle
00:30:41que notre président
00:30:42Éric Ciotti
00:30:42avait lui-même proposé
00:30:44en 2019
00:30:44et en 2023.
00:30:46En reconstituant
00:30:47enfin la carrière
00:30:48de ce patriote français,
00:30:50nous saluons
00:30:50le service du pays
00:30:51qui fut le sien,
00:30:52le courage
00:30:53dont il fit preuve
00:30:53face à l'adversité
00:30:55et les valeurs
00:30:56que son combat
00:30:56va inscrire
00:30:57dans la mémoire nationale.
00:30:59Un combat pour la justice,
00:31:00le droit
00:31:00et la liberté.
00:31:02Mais un combat également
00:31:03contre les horreurs
00:31:04de l'antisémitisme
00:31:05qui doit nous inspirer
00:31:06aujourd'hui encore
00:31:07alors que l'antisémitisme
00:31:09relève résolument
00:31:10la tête
00:31:10portée non plus
00:31:11par les épigones
00:31:12de Drummond
00:31:13ou de Maurras
00:31:13mais par l'islamisme politique.
00:31:16Le véritable hommage
00:31:17à Alfred Dreyfus
00:31:18ne résidera jamais
00:31:19ni dans un grade
00:31:20ni dans une statue
00:31:21mais dans une mémoire vivante
00:31:23nous portant
00:31:24à ne jamais tolérer
00:31:25ni les brutalités
00:31:26de l'arbitraire
00:31:27ni les violences
00:31:28de l'intolérance.
00:31:29Alors au moment
00:31:30de saluer la mémoire
00:31:31du capitaine Dreyfus
00:31:32bientôt général
00:31:33ayons une pensée
00:31:34pour tous les innocents
00:31:35humiliés
00:31:36qui tout autour
00:31:36de la terre
00:31:37sont écrasés
00:31:38par la conspiration
00:31:39de l'arbitraire
00:31:40au premier rang
00:31:41desquels
00:31:41notre compatriote
00:31:42Boilem Sansal.
00:31:44Je vous remercie.
00:31:45Merci beaucoup
00:31:46Monsieur le député.
00:31:48La parole est à présent
00:31:49à Monsieur Thierry Tesson
00:31:50pour le Rassemblement National.
00:31:52Madame la Présidente
00:32:05comme l'a rappelé
00:32:06le rapporteur
00:32:08Zitian Stuhl
00:32:09l'affaire Dreyfus
00:32:10constitue un tournant
00:32:11majeur
00:32:12dans notre mémoire
00:32:12collective
00:32:13le moment
00:32:14d'une profonde
00:32:15crise de régime
00:32:16vécue
00:32:17par ses nombreux
00:32:17ennemis
00:32:18comme une occasion
00:32:19de le détruire.
00:32:20Cette mise à l'épreuve
00:32:22de la jeune république
00:32:23a pris le visage
00:32:24d'un capitaine
00:32:24d'artillerie
00:32:25Alfred Dreyfus
00:32:27injustement accusé
00:32:27d'espionnage
00:32:28au bénéfice
00:32:29de l'Allemagne.
00:32:31Ni sa qualité
00:32:32d'optant
00:32:32de 1811
00:32:33ni ses brillants
00:32:35états de service
00:32:36ni son patriotisme
00:32:37avéré
00:32:38n'empêchèrent
00:32:39ses accusateurs
00:32:40de ne voir qu'un trait
00:32:41justifiant les soupçons
00:32:42il était juif.
00:32:44Du conseil de guerre
00:32:46de décembre 1894
00:32:47à la réhabilitation
00:32:49de juillet 1906
00:32:50retenant entre ces deux dates
00:32:52pour ce qu'il nous enseigne
00:32:53le procès dit de Rennes
00:32:55de septembre 1899.
00:32:59C'est après une intense campagne
00:33:01tandis que le condamné
00:33:03est à l'isolement
00:33:03au large de courroux
00:33:04sur l'île du Diable
00:33:05que la Cour de cassation
00:33:07décide un nouveau jugement.
00:33:10Cette victoire
00:33:10est celle de ceux
00:33:11qu'on appelle depuis
00:33:11les Dreyfusards.
00:33:14Bernard Lazare,
00:33:14Jean Jaurès,
00:33:16Georges Clemenceau,
00:33:17Émile Zola
00:33:17et tant d'autres
00:33:18mais aussi celle
00:33:20de ses proches
00:33:21Lucie, son épouse
00:33:22et Mathieu, son frère.
00:33:24Outre l'atmosphère tendue
00:33:26presque de haine
00:33:27dans et hors
00:33:29de la salle des fêtes
00:33:30du lycée
00:33:30où se déroule
00:33:31ce nouveau procès,
00:33:33rien n'exprime mieux
00:33:34l'arbitraire
00:33:35que le verdict absurde
00:33:36qui tombe après
00:33:37un mois de débat
00:33:38sur Alfred Dreyfus.
00:33:41Il est condamné
00:33:42pour haute trahison,
00:33:43c'est un crime,
00:33:44mais ne reçoit
00:33:45si j'ose dire
00:33:46que dix ans
00:33:46de détention
00:33:47au titre
00:33:48de circonstances
00:33:49atténuantes.
00:33:51Cette décision
00:33:52est le point haut,
00:33:54la dernière tentative
00:33:55d'un système
00:33:56qui,
00:33:57pour éviter
00:33:57de se déjuger,
00:33:59pour prétendument
00:34:00ne pas porter atteinte
00:34:01à l'honneur
00:34:02de l'armée,
00:34:03préfère s'enfoncer
00:34:04dans l'erreur.
00:34:06Un éminent Dreyfusard
00:34:08la résume ainsi,
00:34:09Dreyfus a été condamné
00:34:10par une caste
00:34:11de sachants innocents
00:34:12pour sauver
00:34:14des généraux coupables.
00:34:16Il faudra ensuite,
00:34:18après la grâce présidentielle
00:34:19qui le libère aussitôt,
00:34:21à la suite
00:34:21de ce fiasco judiciaire,
00:34:23près de six années
00:34:24pour que soit
00:34:25sans réserve
00:34:25en juillet 1906,
00:34:27reconnu son innocence.
00:34:30Dans une certaine mesure,
00:34:32la loi aujourd'hui
00:34:32soumise à l'Assemblée
00:34:33représente une conclusion
00:34:35que cette décision
00:34:36aurait dû rendre possible.
00:34:39convenait en effet
00:34:40qu'une erreur d'État
00:34:42de ses dimensions
00:34:43reçoive réparation.
00:34:47Ainsi que la carrière
00:34:48du capitaine Dreyfus
00:34:49soit rétablie
00:34:49dans sa logique initiale,
00:34:52celle d'un polytechnicien,
00:34:54breveté d'État-major,
00:34:56dont les états de service
00:34:57devaient l'amener
00:34:57au grade de général de brigade,
00:34:59terme de la carrière
00:35:00de la plupart
00:35:01de ses camarades.
00:35:03En juillet 1906,
00:35:05il ne bénéficie
00:35:06d'aucune rétroactivité,
00:35:07alors qu'il est capitaine
00:35:08depuis 17 ans.
00:35:11Il n'est pas non plus,
00:35:12compte tenu de l'injustice
00:35:13sans exemple
00:35:14qu'il vient de subir,
00:35:17au nom de la raison d'État.
00:35:20A ce titre,
00:35:21il faut comparer son sort
00:35:22à celui réservé
00:35:22au même moment
00:35:23au lieutenant-colonel Picard.
00:35:26Si ce dernier a eu à souffrir
00:35:27d'une réforme,
00:35:28et même de la prison,
00:35:30en conséquence de ses efforts
00:35:31pour faire éclater la vérité,
00:35:33sa réhabilitation
00:35:34a été tout autre.
00:35:36Sautant une étape,
00:35:37il est promu général de brigade
00:35:38et sera même
00:35:39peu de temps après
00:35:40ministre de la guerre
00:35:41dans le gouvernement,
00:35:42Clémenceau.
00:35:44Chef d'escadron,
00:35:45plutôt que lieutenant-colonel
00:35:46comme il aurait dû l'être,
00:35:48il était dès lors impossible
00:35:49pour Alfred Dreyfus
00:35:50d'accéder au général A
00:35:51qui devait couronner
00:35:52sa carrière d'officier.
00:35:55La conclusion s'impose.
00:35:57S'il n'y est pas parvenu,
00:35:58c'est parce qu'il a été accusé
00:36:00d'un crime
00:36:00qu'il n'a pas commis.
00:36:01Ce qui précède
00:36:03suffira à justifier
00:36:05cette promotion posthume.
00:36:07Mais il y a aussi
00:36:07la force du symbole
00:36:09qu'elle apporte au présent.
00:36:11D'abord,
00:36:12le réveil de la mémoire nationale
00:36:13à un moment,
00:36:15plus d'un siècle
00:36:15après les faits,
00:36:17où, comme l'appelait
00:36:17Augustin Thierry,
00:36:19l'interruption des souvenirs
00:36:20peut exercer
00:36:21son puissant pouvoir d'oubli.
00:36:24Il est utile
00:36:25que soit rappelé
00:36:26aux générations nouvelles
00:36:27ce moment où
00:36:27la République a vacillé,
00:36:29soumise aux préjugés
00:36:30aux passions les plus extrêmes.
00:36:32Il est encore plus essentiel
00:36:34que soit célébrée
00:36:34sa capacité de résistance
00:36:36dès l'instant
00:36:37où le refus
00:36:38de l'arbitraire
00:36:39s'incarne dans l'ensemble
00:36:41du corps social.
00:36:43Enfin,
00:36:44dans un contexte actuel
00:36:45inquiétant,
00:36:46quand les façades
00:36:47des synagogues
00:36:48sont maculées
00:36:48de peinture verte,
00:36:50cette réparation
00:36:51posthume rappellent
00:36:51à toute la nation
00:36:52l'urgence de la défense
00:36:53de ses principes fondateurs.
00:36:56Si cette proposition
00:36:57de loi
00:36:58doit être soutenue,
00:36:59c'est pour rappeler
00:37:00à l'opinion
00:37:01et surtout
00:37:01à notre jeunesse
00:37:02que l'antisémitisme
00:37:04est comme une hydre
00:37:05qui peut sans cesse
00:37:06renaître
00:37:07sous des traits nouveaux
00:37:08mais tout autant
00:37:09dangereux.
00:37:11En élevant
00:37:12Alfred Dreyfus
00:37:13au grade de général
00:37:13de brigade,
00:37:15nous ne rendons pas seulement
00:37:16hommage à un homme,
00:37:17nous protégeons
00:37:18ainsi l'avenir
00:37:19de la France.
00:37:21C'est pourquoi
00:37:21je vous invite,
00:37:23Mesdames et Messieurs,
00:37:23à adopter sans réserve
00:37:24cette proposition
00:37:25de loi.
00:37:26Je vous remercie.
00:37:28Merci beaucoup,
00:37:29Monsieur le député.
00:37:30La parole est à présent
00:37:31à Monsieur Sylvain Maillard
00:37:34pour le groupe
00:37:34Ensemble pour la République.
00:37:44Merci.
00:37:48Madame la Présidente,
00:37:55Madame la Ministre,
00:37:57Monsieur le Président
00:37:58de la Commission
00:37:59de la Défense,
00:38:01Monsieur le rapporteur,
00:38:03chers collègues,
00:38:04chère famille Dreyfus.
00:38:06Aujourd'hui,
00:38:06nous examinons
00:38:07une proposition de loi
00:38:08déposée par Gabriel Attal
00:38:09qui vise à réparer
00:38:11une injustice
00:38:11de plus d'un siècle.
00:38:14Celle subie
00:38:14par Alfred Dreyfus
00:38:16à son retour du bagne,
00:38:17et qui enraya
00:38:18irrémédiablement
00:38:19sa carrière d'officier
00:38:20en ne compatibilisant
00:38:22pas les années
00:38:23qu'il avait passées
00:38:24sur l'île du diable,
00:38:26le privant ainsi
00:38:27du grade
00:38:28de général de brigade
00:38:29qui aurait dû,
00:38:30au regard de sa formation
00:38:31et de ses états
00:38:32de service,
00:38:33lui revenir.
00:38:35Ainsi,
00:38:36à l'infamie
00:38:36qui s'abattit sur lui
00:38:37pendant des années
00:38:38en étant accusé
00:38:39de trahison
00:38:40sur la base
00:38:41de préjugés antisémites
00:38:43et de documents
00:38:43falsifiés,
00:38:44s'ajouta
00:38:45l'injustice
00:38:46de voir
00:38:46irrémédiablement
00:38:48sa carrière
00:38:49militaire
00:38:50compromise
00:38:51pour une affaire
00:38:52dont il était
00:38:52pourtant
00:38:53la principale victime.
00:38:56Dreyfus lui-même
00:38:57pointa d'ailleurs
00:38:58de son vivant
00:38:59cette inégalité
00:39:00de traitement
00:39:00injustifiable
00:39:01en demandant
00:39:02qu'il y soit mis fin
00:39:03sans succès.
00:39:06Ainsi,
00:39:07en conférant
00:39:07au soldat
00:39:08Alfred Dreyfus
00:39:09le rang
00:39:09de général
00:39:10de brigade,
00:39:11cette proposition
00:39:12de loi entend revenir
00:39:13sur l'écueil
00:39:14qui fonda
00:39:14cette inégalité
00:39:16de traitement
00:39:17au sein
00:39:18de la loi
00:39:18de réhabilitation
00:39:19du 12 juillet
00:39:211906.
00:39:23En accomplissant
00:39:23ce geste,
00:39:24notre hémicycle
00:39:25s'inscrit
00:39:26dans la longue
00:39:26tradition
00:39:27de notre République
00:39:28qui s'est toujours
00:39:29efforcée
00:39:30face à l'histoire
00:39:31de reconnaître
00:39:32les torts
00:39:33faits à ses citoyens
00:39:34lorsqu'elle leur en causait
00:39:36et d'honorer
00:39:37ceux d'entre eux
00:39:38qui par leur dévouement
00:39:39ou leur action
00:39:40l'ont servi
00:39:41ou honoré
00:39:42en faisant vivre
00:39:43ses valeurs.
00:39:45Alfred Dreyfus,
00:39:47par son sens
00:39:47de l'honneur,
00:39:48sa fidélité
00:39:49aux valeurs
00:39:50militaires
00:39:50et républicaines,
00:39:52son abnégation
00:39:53à laver son nom
00:39:54et à faire reconnaître
00:39:55sa loyauté constante
00:39:56envers sa patrie,
00:39:58a indéniablement
00:39:59fait vivre
00:39:59les valeurs
00:40:00de notre République.
00:40:03J'entends
00:40:03les craintes
00:40:04qui s'expriment
00:40:05sur certains
00:40:05de ses bancs
00:40:06au sujet
00:40:07d'une récupération
00:40:08politique
00:40:08de l'affaire Dreyfus.
00:40:10Alors,
00:40:11pour éviter ce risque,
00:40:12prenons cette proposition
00:40:13de loi pour ce qu'elle est,
00:40:15la correction
00:40:15d'un tort historique
00:40:17fait à Alfred Dreyfus
00:40:18sur ces mêmes bancs.
00:40:20Il ne s'agit pas
00:40:21ici
00:40:21de rouvrir
00:40:23les blessures
00:40:23du passé
00:40:24ou de le travestir
00:40:25en usant
00:40:28de cette mémoire
00:40:29à des fins polémiques
00:40:30ou bassement
00:40:31politiciennes.
00:40:33Il s'agit ici
00:40:33d'accomplir
00:40:35l'objectif
00:40:35que s'était assigné
00:40:36dans son principe
00:40:38la loi de 1906.
00:40:40Finir
00:40:40l'affaire
00:40:41Dreyfus
00:40:41par le haut
00:40:42en honorant
00:40:43les états de service
00:40:44d'un officier français
00:40:45droit et intègre.
00:40:47Un officier
00:40:48qui n'hésita pas
00:40:49à 55 ans
00:40:50à reprendre
00:40:51l'uniforme
00:40:52pour défendre
00:40:53sa patrie
00:40:53lors de la première
00:40:54guerre mondiale,
00:40:55malgré toutes les souffrances
00:40:56qu'il avait pu
00:40:57endurer
00:40:57à son service.
00:40:59Voter ce texte
00:41:00ne fera bien sûr
00:41:01pas baisser,
00:41:03encore moins disparaître,
00:41:04l'antisémitisme
00:41:05ni les préjugés
00:41:06ignobles
00:41:07qui,
00:41:08aujourd'hui comme hier,
00:41:09sont colportés
00:41:10par cette haine.
00:41:11A commencer
00:41:12par l'accusation
00:41:13ignoble
00:41:14d'un supposé manque
00:41:15de patriotisme
00:41:16chez nos concitoyens juifs.
00:41:18Un préjugé
00:41:18qui continue de fleurir,
00:41:20on a pu le regretter
00:41:21jusque dans cet hémicycle.
00:41:23Voter ce texte
00:41:25ne rachètera
00:41:25ni les mots
00:41:26ni les actions
00:41:27que nous avons pu voir
00:41:28ces dernières décennies
00:41:29comme dans un passé
00:41:30plus récent
00:41:31et qui heurte
00:41:32nos valeurs
00:41:33de vivre ensemble.
00:41:35Voter ce texte
00:41:36ce n'est pas refaire
00:41:37l'histoire de l'affaire
00:41:38ni effacer
00:41:39la tâche indélébile
00:41:40qu'elle a laissée
00:41:41sur notre histoire nationale
00:41:42et qui nous oblige.
00:41:44Nous oblige
00:41:45à toujours plus
00:41:46de constance,
00:41:47à toujours plus
00:41:47de recul critique,
00:41:49à toujours plus
00:41:49d'attachement
00:41:50aux faits
00:41:51pour faire vivre
00:41:52nos valeurs républicaines.
00:41:54Non,
00:41:55nous n'effacerons pas
00:41:55le passé
00:41:56en votant cette proposition
00:41:57de loi.
00:41:58Nous le regarderons
00:41:59en face
00:41:59avec gravité
00:42:00et courage
00:42:01pour mieux ancrer
00:42:02l'idéal républicain
00:42:04dans le présent.
00:42:06Aussi,
00:42:07si notre groupe
00:42:08Renaissance
00:42:08votera bien entendu
00:42:09cette proposition
00:42:10de loi,
00:42:11j'invite également
00:42:12l'ensemble des groupes
00:42:13à voter
00:42:13en faveur
00:42:14de son adoption
00:42:15afin que nous puissions
00:42:17ensemble
00:42:18rendre vivants
00:42:20ces quelques mots
00:42:20qui sont porteurs
00:42:22tellement de sens
00:42:22pour la mémoire
00:42:23d'un homme
00:42:24comme pour notre
00:42:25mémoire collective.
00:42:26la nation française
00:42:28est prise de justice
00:42:30et qui n'oublie pas
00:42:31élève
00:42:31à titre posthume
00:42:33Alfred Dreyfus
00:42:34au grade
00:42:35de général de brigade.
00:42:36Je vous remercie.
00:42:37Merci beaucoup
00:42:38monsieur le député.
00:42:43La parole est à présent
00:42:44monsieur Gabriel Amard
00:42:46pour le groupe
00:42:46La France Insoumise.
00:42:47Madame la Présidente,
00:43:08monsieur le Président
00:43:08de la Commission,
00:43:10monsieur le rapporteur,
00:43:11collègues,
00:43:13il y a des noms
00:43:14qui brûlent dans la nuit
00:43:16comme des veilleuses
00:43:17de justice.
00:43:19Le nom de Dreyfus
00:43:20est de cela.
00:43:22Et dans ce nom,
00:43:24c'est tout un siècle
00:43:25qui vacille encore.
00:43:28Un siècle de trahison froide,
00:43:31de procès aux regards tordus,
00:43:34de silence militaire,
00:43:35de lâcheté en uniforme.
00:43:39C'est un crime,
00:43:40disait Zola,
00:43:42d'égarer l'opinion,
00:43:44d'utiliser pour une besogne
00:43:46de mort,
00:43:47cette opinion
00:43:48qu'on a pervertie
00:43:49jusqu'à la faire délirer.
00:43:54Et l'on fit délirer la République.
00:43:57On l'avait dit de mensonges,
00:43:59en larmes de haine.
00:44:01Un homme,
00:44:02un seul,
00:44:03fut jeté au bagne,
00:44:05non pour ses actes,
00:44:06mais pour ce qu'il était.
00:44:09Un juif,
00:44:10un soldat,
00:44:12un bouc émissaire.
00:44:12Ils savaient et ils ont signé
00:44:16sur un parchemin de haine
00:44:17leur forfait de justice.
00:44:20Le sabre a tranché la vérité,
00:44:22mais la plume,
00:44:24la plume d'un Zola,
00:44:26d'un Jaurès,
00:44:27a résisté.
00:44:29Et Jaurès, lui,
00:44:30voyait plus loin,
00:44:31plus haut,
00:44:32plus vrai.
00:44:32Si Dreyfus
00:44:34est illégalement condamné,
00:44:38il n'est plus qu'un homme nu,
00:44:40l'humanité elle-même
00:44:42au plus haut degré
00:44:43de misère
00:44:43et de désespoir,
00:44:45le témoin vivant
00:44:47d'un mensonge militaire,
00:44:49de la lâcheté politique,
00:44:51des crimes de l'autorité.
00:44:54Alors nous,
00:44:54aujourd'hui,
00:44:56dans cette Assemblée,
00:44:58nous disons
00:44:59que le temps est venu.
00:45:01non pas seulement
00:45:03d'honorer une mémoire,
00:45:06mais de réparer une injustice.
00:45:09Le grade de général
00:45:10à titre posthume
00:45:11n'est pas un symbole.
00:45:14C'est une exigence.
00:45:17Mais tandis que nous levons ce nom,
00:45:20d'autres s'en emparent
00:45:21sans honte.
00:45:23Et voilà
00:45:23que celles et ceux
00:45:25qui ricanent à l'ombre
00:45:26des croix gammées numériques,
00:45:28ceux qui veillent
00:45:29sur les étagères de la haine
00:45:31diffusent un poison lent
00:45:33pour la République,
00:45:35ceux-là même
00:45:36lèvent aujourd'hui la main
00:45:38comme s'ils avaient été
00:45:40Dreyfusard.
00:45:41Non !
00:45:43Dans ma famille,
00:45:44on descend des Dreyfusards,
00:45:46pas dans la vôtre !
00:45:47Car ce combat-là
00:45:49ne supporte pas,
00:45:52ne se porte pas
00:45:53comme un costume
00:45:54à la tribune.
00:45:55Il se vit,
00:45:55il s'incarne
00:45:57dans chaque prise de parole
00:45:58contre la haine,
00:45:59dans chaque refus
00:46:00d'accepter l'exclusion,
00:46:02dans chaque main tendue
00:46:03à l'opprimé.
00:46:05Ne vous servez pas
00:46:07de l'antisémitisme
00:46:08comme d'un javelot politicien.
00:46:10Il n'est pas votre cause,
00:46:12il est notre serment.
00:46:14Et ce serment,
00:46:16nous le renouvelons.
00:46:18Car l'antisémitisme
00:46:19n'est pas mort.
00:46:20Mais il n'est pas seul.
00:46:25L'islamophobie
00:46:26ronge les plateaux
00:46:28et les lois.
00:46:29Le racisme,
00:46:30l'homophobie,
00:46:31la haine des pauvres
00:46:32s'installent
00:46:33comme des meubles
00:46:34dans la maison commune.
00:46:36Ils repeuplent
00:46:37la République
00:46:37de ces vieux fantômes,
00:46:39divisés pour régner
00:46:40comme en 1894,
00:46:43opposés,
00:46:43le patriote
00:46:44à l'étranger,
00:46:45le bon français,
00:46:45à l'indésirable,
00:46:47la République,
00:46:48à ses enfants.
00:46:49Et dans cette nuit,
00:46:51toujours le même brouillard,
00:46:53toujours cette peur
00:46:54qui veut gouverner,
00:46:55toujours ce pouvoir
00:46:56qui se garde
00:46:57en éteignant les lumières.
00:46:59Alors nous disons,
00:47:01plus jamais,
00:47:02plus jamais l'homme broyé
00:47:03dans la machine de l'État,
00:47:05plus jamais l'uniforme
00:47:06contre la justice,
00:47:08plus jamais le silence
00:47:09contre le droit.
00:47:11Chaque être humain,
00:47:12chaque être humain
00:47:15est un feu fragile
00:47:16et nous sommes là
00:47:17pour l'empêcher,
00:47:19pour empêcher
00:47:20qu'on les éteigne
00:47:21un à un,
00:47:22nom par nom,
00:47:23souffle par souffle
00:47:25et dans l'ombre,
00:47:26toujours,
00:47:27le nom de Dreyfus,
00:47:29une lumière
00:47:30que nous n'éteindrons pas.
00:47:32Votons cet acte,
00:47:34c'est un acte
00:47:35de mémoire
00:47:35et de conscience.
00:47:36Je vous remercie,
00:47:39monsieur le député.
00:47:42La parole est à présent
00:47:43à monsieur Aurélien Rousseau
00:47:45pour le groupe socialiste
00:47:46et apparenté.
00:47:56Madame la présidente,
00:47:57madame la ministre,
00:47:59monsieur le président de la commission,
00:48:01monsieur le rapporteur,
00:48:02mes chers collègues,
00:48:03au nom de ce que la République
00:48:05a fait subir au capitaine
00:48:06Alfred Dreyfus,
00:48:07à sa femme,
00:48:08à son frère,
00:48:09à ses défenseurs,
00:48:11aux Juifs de France,
00:48:12au nom aussi
00:48:13de la violence
00:48:14qu'a subie
00:48:15Alfred Dreyfus
00:48:16après la révision
00:48:17de son procès
00:48:18et l'établissement
00:48:19définitif
00:48:19de son innocence,
00:48:21quand l'institution militaire,
00:48:23pourtant dirigée
00:48:24par l'héroïque
00:48:24général Piccard,
00:48:26n'a su que le réintégrer
00:48:27au grade
00:48:28de chef d'escadron.
00:48:29Au nom
00:48:30de tous les messages
00:48:31terrifiants
00:48:32que nous recevons
00:48:32les uns et les autres
00:48:33depuis quelques jours
00:48:34pour continuer
00:48:35à nous dire
00:48:36qu'il n'y a pas
00:48:36de fumée sans feu
00:48:37et que sans doute
00:48:38Dreyfus avait quand même
00:48:40quelque chose
00:48:40à se reprocher,
00:48:42c'est au nom
00:48:42de tout cela,
00:48:44évidemment,
00:48:45que le groupe socialiste
00:48:45et apparenté
00:48:46s'associe
00:48:47à cette proposition
00:48:48de loi
00:48:48et la soutient.
00:48:50Alfred Dreyfus
00:48:51restera
00:48:51ce capitaine
00:48:53dégradé
00:48:53au sabre brisé
00:48:54dont la statue
00:48:56n'a pu rejoindre
00:48:57il y a 40 ans
00:48:58la cour
00:48:58de l'école militaire
00:48:59et qui attend
00:49:00comme échoué
00:49:01boulevard Raspail
00:49:02de rejoindre
00:49:03un lieu plus symbolique.
00:49:05Et c'est au nom
00:49:05du caractère
00:49:06totalement inédit
00:49:07de l'antidréfusisme
00:49:09dans notre histoire
00:49:09que cette mesure
00:49:11a tellement de sens
00:49:12car l'affaire Dreyfus
00:49:14n'est pas un soubresaut,
00:49:16elle est comme
00:49:16un élément
00:49:17tellurique
00:49:18de notre histoire nationale.
00:49:20Il ne s'agit pas
00:49:21aujourd'hui
00:49:21d'ouvrir un droit,
00:49:23de créer un précédent
00:49:24car l'affaire Dreyfus
00:49:25n'a pas de précédent,
00:49:27aucun,
00:49:28que ce soit clair,
00:49:29que ce soit gravé ici.
00:49:30Elle est un poison lent,
00:49:32celui de l'antisémitisme,
00:49:33celui de la recherche
00:49:34de l'ennemi
00:49:35de l'intérieur
00:49:36qui reste depuis
00:49:37si longtemps
00:49:37la matrice
00:49:38de l'extrême droite
00:49:39française.
00:49:40Avec notre vote,
00:49:41nous solderons
00:49:42sans doute
00:49:43l'humiliation
00:49:44de la cour
00:49:44de l'école militaire,
00:49:46l'écrasement
00:49:47par l'institution
00:49:48de l'officier subalterne
00:49:49pourtant promis
00:49:50un bel avenir.
00:49:52Mais le sujet
00:49:52n'est pas,
00:49:53n'est plus
00:49:54celui de la confrontation
00:49:55des armées
00:49:56avec leur histoire.
00:49:57Cela reste celui
00:49:59de la confrontation
00:50:00de la nation
00:50:01avec son histoire.
00:50:03Alors,
00:50:04en aura-t-on fini
00:50:05avec l'affaire Dreyfus ?
00:50:06Non,
00:50:07car nous n'avons pas fini
00:50:08avec la haine antisémite
00:50:10qui,
00:50:10telle l'hydre,
00:50:11revient en permanence
00:50:12sous d'autres formes.
00:50:13Alors,
00:50:14est-ce qu'après l'adoption
00:50:15de cette proposition de loi,
00:50:17le dossier
00:50:17d'Alphère Dreyfus
00:50:18sera clos ?
00:50:19Philippe Collin,
00:50:21dans sa remarquable série,
00:50:23souligne
00:50:23l'héroïsme civique
00:50:25de Dreyfus,
00:50:26cet héroïsme
00:50:27qui a permis
00:50:27de faire triompher
00:50:28les valeurs républicaines,
00:50:29justice,
00:50:30vérité,
00:50:31égalité devant la loi.
00:50:33Sa foi républicaine
00:50:34était justifiée
00:50:36car la République
00:50:36a tenu.
00:50:38Car,
00:50:39c'est cette vieille image
00:50:40d'un homme plus petit
00:50:41que sa propre histoire
00:50:42qu'il faut aujourd'hui
00:50:43remettre en cause.
00:50:44Un homme passif,
00:50:46spectateur,
00:50:46c'est ce qu'il y a encore
00:50:4725 ans,
00:50:48on nous apprenait
00:50:48dans nos études d'histoire.
00:50:50Mais l'histoire avance.
00:50:52La seule lecture
00:50:53de la correspondance
00:50:54de Dreyfus
00:50:54avec son admirable femme Lucie
00:50:56montre qu'il est tout sauf
00:50:58inconscient
00:50:59de ce qu'il représente.
00:51:01Écrire,
00:51:02c'est résister.
00:51:03Je vis d'espoir,
00:51:04ma bonne chérie.
00:51:05Je vis dans la conviction
00:51:06qu'il est impossible
00:51:07que la vérité
00:51:08ne se fasse pas jour,
00:51:10que mon innocence
00:51:10ne soit pas reconnue
00:51:11et proclamée
00:51:12par cette chère France,
00:51:14ma patrie,
00:51:14à laquelle j'ai toujours apporté
00:51:16tout le concours
00:51:17de mon intelligence
00:51:18et de mes forces,
00:51:19à laquelle j'aurais voulu
00:51:20consacrer tout mon sang.
00:51:22Je cite
00:51:23une lettre à Lucie.
00:51:25Mais si vous me permettez
00:51:26cette hypothèse,
00:51:26Dreyfus aimait trop
00:51:27la République
00:51:28pour la mettre
00:51:29encore plus à l'épreuve.
00:51:31Quand il est enfin
00:51:31réhabilité en 1906,
00:51:33Dreyfus ne cherche pas
00:51:34la revanche.
00:51:36Ce n'est pas un ombre brisé
00:51:37qui est réhabilité
00:51:38dans la cour d'honneur
00:51:38de l'école militaire,
00:51:39ses quatre pauvres galons
00:51:41de chefs d'escadron
00:51:42et sa croix
00:51:43de la Légion d'honneur
00:51:44rouge éclatante
00:51:45sur les brans de bourg noir
00:51:46de son uniforme.
00:51:47C'est un homme rayonnant,
00:51:49épanoui,
00:51:50les photographies
00:51:50de l'époque en témoignent.
00:51:53Il reprend du service
00:51:54dans l'armée
00:51:54qu'il a trahi
00:51:55pour servir
00:51:56lors de la Première Guerre mondiale
00:51:57comme chef d'escadron
00:51:58d'artillerie de réserve.
00:52:00C'est sur le champ de bataille
00:52:01qu'il gagne son cinquième galon
00:52:03de lieutenant-colonel.
00:52:05Non,
00:52:06Dreyfus ne fut pas
00:52:07un petit homme
00:52:07balotté par la grande histoire.
00:52:09Il fut un homme
00:52:10à la hauteur
00:52:10de cette grande histoire.
00:52:11Il fut un grand homme,
00:52:13un grand homme
00:52:13modeste et droit,
00:52:15déterminé
00:52:15et habité
00:52:16par une certaine idée
00:52:17de la République française.
00:52:19Un grand homme
00:52:20dont le nom
00:52:21a été prononcé
00:52:22tout au long du siècle
00:52:23jusque dans la bouche haineuse
00:52:24de Maurras
00:52:25à l'issue de son procès.
00:52:27Et aux grands hommes,
00:52:28la patrie doit savoir
00:52:29être reconnaissante.
00:52:31C'est pourquoi
00:52:31avec le groupe socialiste
00:52:33et apparenté,
00:52:33nous pensons que c'est au Panthéon
00:52:34que ce capitaine
00:52:35général Dreyfus
00:52:37et sa femme
00:52:38devraient être accueillis
00:52:39ils ont été
00:52:41des combattants
00:52:42de la République.
00:52:43Il a choisi
00:52:44de vivre
00:52:44et de garder
00:52:45la tête haute
00:52:46comme notre pays
00:52:47dans ce siècle
00:52:48de tourments.
00:52:49Un dernier mot
00:52:50en écho
00:52:50à des positions
00:52:51qui ont été exprimées
00:52:52ces jours-ci.
00:52:54Pourquoi ?
00:52:55L'affaire n'est-elle
00:52:56pas close ?
00:52:56Ne s'agit-il pas là
00:52:57que de frénésie mémorielle
00:52:58à laquelle notre nation
00:52:59cède parfois ?
00:53:01Car la République
00:53:02a gagné.
00:53:03Mais ces maîtres mots
00:53:04universalisme,
00:53:05république,
00:53:06confiance dans les institutions,
00:53:08ces maîtres mots,
00:53:09résonnent particulièrement
00:53:11aujourd'hui.
00:53:12Tout indique que
00:53:13si nous ne les défendons pas
00:53:15nous pourrions revivre
00:53:16une telle affaire
00:53:17dans la volonté
00:53:18de désigner des coupables,
00:53:19de renvoyer les citoyens
00:53:21à tel ou tel
00:53:21de leur appartenance.
00:53:23Le doute
00:53:23sur l'efficacité
00:53:24et la force
00:53:24de notre démocratie
00:53:26sont présents
00:53:27chaque jour
00:53:27sur ces bancs
00:53:28même.
00:53:29Alors,
00:53:30en entrant au Panthéon,
00:53:31Dreyfus ne sera définitivement
00:53:32plus un remords,
00:53:34ce sera enfin un exemple,
00:53:36ce sera surtout
00:53:36un vivant symbole
00:53:37de ce à quoi nous croyons
00:53:38le plus,
00:53:40une république forte,
00:53:41sociale,
00:53:42juste
00:53:42et émancipatrice.
00:53:43Merci.
00:53:45Merci beaucoup,
00:53:46mon cher collègue.
00:53:48La parole est à présent
00:53:49à M. Julien Dive
00:53:50pour le groupe
00:53:51droite républicaine.
00:53:52Madame la Présidente,
00:54:01Madame la Ministre,
00:54:02Monsieur le rapporteur,
00:54:03chers collègues,
00:54:04le nom d'Alfred Réfus
00:54:06ravive l'une des pages
00:54:07les plus douloureuses
00:54:08mais aussi les plus fondatrices
00:54:10de notre histoire républicaine.
00:54:12La République a pu,
00:54:13a su,
00:54:14réparer et convoquer
00:54:15au-delà des passions
00:54:16une exigence de justice
00:54:17et de vérité.
00:54:19Cette proposition de loi
00:54:20déposée par le président
00:54:21Gabriel Attal
00:54:22vise à élever
00:54:23au titre posthume
00:54:24le lieutenant-colonel
00:54:25Alfred Dreyfus
00:54:26au grade de général de brigade.
00:54:28Elle s'inscrit donc
00:54:29dans une démarche de reconnaissance
00:54:30à la hauteur du destin brisé
00:54:31d'un homme dont l'honneur
00:54:32fut injustement bafoué.
00:54:34Notre rapporteur
00:54:35a parfaitement rappelé
00:54:36les tenants
00:54:37et le contexte
00:54:37de l'affaire Dreyfus,
00:54:38je n'y reviendrai pas.
00:54:39Je rappellerai simplement
00:54:40que cette affaire
00:54:41à la fois judiciaire
00:54:42et politique
00:54:43a profondément marqué
00:54:44la France
00:54:45entre 1894 et 1906,
00:54:48divisant la société
00:54:48et les institutions
00:54:49et jusqu'aux familles
00:54:50partagées entre Dreyfus
00:54:52Dreyfusard et anti-Dreyfusard.
00:54:53Elle a mis en lumière
00:54:54les questions de corruption
00:54:55au sein de l'institution,
00:54:57y compris militaire,
00:54:58ainsi que les tensions
00:54:59antisémites de l'époque.
00:55:01Mais elle demeure aussi
00:55:02le symbole
00:55:03d'un sursaut républicain,
00:55:04d'une quête
00:55:05opiniâtre de vérité,
00:55:06de justice
00:55:07et d'un moment fondateur
00:55:08de notre conscience démocratique.
00:55:10Chacun sait ici
00:55:11comment commence cette affaire.
00:55:13L'accusation d'espionnage
00:55:14visant Alfred Dreyfus,
00:55:15brillant capitaine d'artillerie,
00:55:17Alsacien de confession juive,
00:55:19dont les états de service
00:55:20étaient irréprochables.
00:55:21Il fut injustement accusé
00:55:23de trahison au profit
00:55:24de l'Allemagne,
00:55:25à leur puissance occupante
00:55:26en Alsace-Moselle.
00:55:27Il est rapidement jugé,
00:55:29condamné à la déportation
00:55:30à l'île du Diable en Guyane,
00:55:32sur la base de preuves
00:55:33qui plus tard se révéleront
00:55:34totalement facilifiées.
00:55:35Les rebondissements
00:55:36de cette affaire
00:55:37ont émaillé les débuts
00:55:37du XXe siècle
00:55:38dans notre pays.
00:55:39Les doutes sur l'enquête,
00:55:40les prises de position
00:55:41d'un Zola ou d'un Peggy,
00:55:43le réexamen du procès
00:55:44qui le condamne à nouveau
00:55:45avant qu'il ne soit disculpé
00:55:46et réintégré dans l'armée
00:55:47en 1906.
00:55:48Rien n'aura été épargné
00:55:50à cet homme courageux,
00:55:51patriote, sincère,
00:55:52mesuré, tenace,
00:55:53épris de progrès
00:55:54et de liberté
00:55:55et soucieux des siens.
00:55:57Jusqu'au fond de son cachot
00:55:58de l'île du Diable,
00:55:59il demeurera fidèle
00:55:59à la République,
00:56:00à la justice,
00:56:01à la France.
00:56:02Réintégré donc en 1906,
00:56:04Alfred Dreyfus démissionna
00:56:06un an plus tard
00:56:07avant de reprendre du service
00:56:08pendant la Grande Guerre
00:56:09en tant qu'officier de réserve.
00:56:11Il combattit à Verdun
00:56:11au chemin des Dames
00:56:12dans l'Aisne,
00:56:13sur ses terres ensanglantées
00:56:15devenues symbole
00:56:16de notre histoire nationale.
00:56:17Il fut nommé lieutenant-colonel
00:56:19en 1918
00:56:19et pourtant,
00:56:20dans notre mémoire collective,
00:56:22il demeure figé
00:56:23au grade de capitaine.
00:56:24Celui qu'il portait
00:56:25au moment où l'injustice
00:56:27s'est abattue sur lui.
00:56:28A la lumière de son parcours,
00:56:30de ses états de service
00:56:30et de son rang de sortie
00:56:32à l'école de guerre
00:56:33en 1892,
00:56:349e sur 81,
00:56:36nul ne peut contester
00:56:37qu'Alfred Dreyfus
00:56:38aurait accédé
00:56:39en temps normal
00:56:39au plus haut grade.
00:56:41Comme le souligne
00:56:42avec justesse
00:56:43la proposition de loi,
00:56:44cinq années de déportation
00:56:45et d'humiliation
00:56:46ont irrébéniablement
00:56:47freiné sa carrière militaire.
00:56:49Telle est donc
00:56:50la portée de ce texte,
00:56:51réparer symboliquement
00:56:52ce que l'injustice
00:56:53a entravé
00:56:54et rendre à Alfred Dreyfus
00:56:56la reconnaissance
00:56:56que son engagement
00:56:57et sa loyauté
00:56:58envers la France
00:56:59appelaient naturellement.
00:57:00Pour notre groupe
00:57:01de la droite républicaine,
00:57:03l'armée est le pilier
00:57:03de la nation,
00:57:04le rempart de nos libertés.
00:57:06Ce geste n'est pas
00:57:07une remise en cause
00:57:07de nos armées,
00:57:08c'est un acte de fidélité
00:57:09à leurs valeurs profondes,
00:57:11le courage,
00:57:11la justice,
00:57:12la loyauté.
00:57:13Si nous élevons
00:57:14Alfred Dreyfus
00:57:15au grade de général
00:57:16de brigade,
00:57:16ce n'est pas pour effacer
00:57:17l'histoire,
00:57:18ni juger le passé
00:57:19avec les yeux du présent,
00:57:20mais plutôt pour rendre
00:57:21à un homme
00:57:21ce que la justice
00:57:22lui avait promis.
00:57:23Et c'est aussi
00:57:24rappeler que l'honneur
00:57:25ne se prescrit pas.
00:57:28Nous saluons donc
00:57:29un combat exemplaire
00:57:30pour la vérité,
00:57:31un combat qui transcende
00:57:32les époques
00:57:33et qui,
00:57:33plus d'un siècle après,
00:57:34continue de nous rappeler
00:57:36ce que signifie
00:57:37la fidélité
00:57:37aux principes républicains.
00:57:39Il ne s'agit pas
00:57:40d'instrumentaliser
00:57:41une mémoire,
00:57:42encore moins de raviver
00:57:42les querelles.
00:57:43Il s'agit d'assumer
00:57:44lucidement une part
00:57:46de notre histoire
00:57:46avec ce qu'elle a
00:57:47de plus douloureux,
00:57:48mais aussi de plus fondateur.
00:57:50Dès lors,
00:57:51chercher à opposer
00:57:52des lectures concurrentes
00:57:53de l'affaire Dreyfus,
00:57:54à en faire un levier
00:57:55de polémique
00:57:55ou un prétexte
00:57:56à des postures
00:57:57serait trahir
00:57:58le sens même
00:57:59de ce moment.
00:58:00Car la mémoire
00:58:01appelle le respect
00:58:02et non l'appropriation.
00:58:04J'entends, bien sûr,
00:58:06les inquiétudes
00:58:06exprimées par certains
00:58:07de nos collègues.
00:58:09Ils redoutent
00:58:09que cette initiative
00:58:10ne serve pas
00:58:11à ricocher
00:58:11des arrières-pensées politiques
00:58:13ou des règlements
00:58:13de comptes contemporains.
00:58:15Je respecte
00:58:16leur vigilance,
00:58:17mais je crois
00:58:17que l'erreur serait
00:58:18de céder à cette crainte
00:58:19au point de renoncer
00:58:19à parler.
00:58:21Sécher le débat
00:58:21au motif
00:58:22d'un éventuel détournement
00:58:23de l'examen du texte,
00:58:24c'est paradoxalement
00:58:25sans faire complice.
00:58:26Je crois au contraire
00:58:27qu'il faut regarder
00:58:28cette proposition de loi
00:58:29pour ce qu'elle est,
00:58:30un geste républicain,
00:58:32historique
00:58:32et de reconnaissance,
00:58:33rien de plus,
00:58:34rien de moins.
00:58:36Le général de Gaulle
00:58:37avait eu cette formule
00:58:38simple et puissante
00:58:39« Dreyfus,
00:58:41un officier français ».
00:58:42Tout est dit.
00:58:43Ce sont ces mots
00:58:44qui doivent guider notre vote.
00:58:46À ce titre,
00:58:46il doit donc accéder
00:58:47au grade
00:58:48que sa vie au service
00:58:49de la France
00:58:49lui permettait d'obtenir.
00:58:51Pour l'honneur d'un homme,
00:58:52pour la reconnaissance
00:58:52de notre nation,
00:58:53nous voterons donc
00:58:54cette proposition de loi.
00:58:56Je vous remercie,
00:58:57monsieur le député.
00:58:58La parole est à présent
00:58:59à madame Sophie Taillé-Pollion
00:59:01pour le groupe Écologiste et Social.
00:59:03Applaudissements.
00:59:12Madame la Présidente,
00:59:22Madame la Ministre,
00:59:24Mesdames et Messieurs,
00:59:25les descendants et descendantes
00:59:26d'Alfred Dreyfus,
00:59:27Le 5 janvier 1895 à 9h,
00:59:31le capitaine Alfred Dreyfus
00:59:33est dégradé,
00:59:34son sabre brisé,
00:59:35ses galons arrachés.
00:59:38Durant cette humiliation publique,
00:59:39devant une foule
00:59:40d'où s'échappent
00:59:41les cris de « mort aux Juifs »
00:59:42à « mort Judas »,
00:59:44il ne cesse de clamer
00:59:45son innocence.
00:59:46Lui, le patriote,
00:59:48le soldat loyal,
00:59:49marqué par la guerre
00:59:50de 1870,
00:59:52est accusé à tort
00:59:53et condamné au bagne,
00:59:55à perpétuité
00:59:55et à la dégradation militaire
00:59:57pour intelligence
00:59:58avec l'ennemi.
01:00:00L'état-major ne dispose
01:00:01d'aucune preuve
01:00:02de sa culpabilité.
01:00:04Qu'à cela ne tienne,
01:00:04le Conseil de guerre
01:00:05est convoqué à huit clous
01:00:06et un faux dossier
01:00:07monté de toute pièce.
01:00:09Lui, le polytechnicien brillant,
01:00:11devient le coupable idéal,
01:00:12le symbole du traître,
01:00:13de l'ennemi de l'intérieur,
01:00:15selon la pensée antisémite
01:00:16à l'œuvre dans la société.
01:00:19Face à l'ampleur
01:00:20que prend l'affaire
01:00:20dans l'opinion
01:00:21et grâce à la mobilisation
01:00:22de ses soutiens,
01:00:24ce jugement est finalement cassé
01:00:25et un nouveau Conseil de guerre
01:00:27convoqué.
01:00:28Condamné à nouveau,
01:00:30il est gracié
01:00:30par le président de la République.
01:00:33L'affaire est étouffée,
01:00:34mais Dreyfus,
01:00:35toujours coupable.
01:00:36Il faudra attendre 1906
01:00:38pour qu'il soit réhabilité
01:00:40et réintégré dans l'armée,
01:00:41mais son avancement
01:00:43est retardé de cinq ans,
01:00:44retard de carrière
01:00:45qui l'empêche
01:00:46d'atteindre le grade de général
01:00:47comme une injustice de plus.
01:00:50Aujourd'hui,
01:00:50nous nous apprêtons
01:00:51à parachever une réparation
01:00:53jusqu'ici incomplète
01:00:54en élevant Alfred Dreyfus
01:00:56au grade de général de brigade.
01:00:58C'est le sens
01:00:59de cette proposition de loi
01:01:00que de reconnaître
01:01:01la valeur du soldat,
01:01:03de l'homme,
01:01:03là où de nombreux Français
01:01:04à l'époque
01:01:05n'ont vu que le juif,
01:01:07dès lors suspect à leurs yeux,
01:01:08de n'être pas véritablement
01:01:10Français et patriote
01:01:11et jugé incapable
01:01:12de servir son pays.
01:01:14Mais quelle leçon
01:01:15tirée de l'affaire Dreyfus ?
01:01:17Qu'est-ce qui a rendu possible
01:01:18dans cette République française
01:01:20qui avait la première
01:01:20considérée les Juifs
01:01:22comme des citoyens
01:01:23à part entière ?
01:01:24Qu'est-ce qui a rendu possible
01:01:25cette injustice
01:01:26aussi profonde ?
01:01:29Tout d'abord,
01:01:29un antisémitisme ancien,
01:01:31profond.
01:01:32Qu'en est-il aujourd'hui ?
01:01:34Les actes antisémites
01:01:35ont bondi
01:01:35de 260% en 2024
01:01:37par rapport à 2022.
01:01:39L'antisémitisme
01:01:40est bien réel.
01:01:42Pour nombre de nos compatriotes
01:01:43au quotidien,
01:01:44il ne doit
01:01:45jamais être relativisé.
01:01:47Ce week-end,
01:01:48nous en avons encore
01:01:49été les témoins sidérés
01:01:50en apprenant
01:01:51les dégradations
01:01:52à caractère antisémite
01:01:53sur des synagogues
01:01:54de Paris
01:01:54et le mémorial
01:01:55de la Shoah.
01:01:57Comment ne pas voir
01:01:58un parallèle
01:01:59entre la presse
01:02:00anti-dréfusarde
01:02:01qui attisait
01:02:02la haine antisémite
01:02:03hier,
01:02:04provoquant des groupes
01:02:05d'extrême droite
01:02:06à l'agression physique
01:02:07et les médias
01:02:08bologarisés d'aujourd'hui
01:02:09qui enchaînent
01:02:10les condamnations
01:02:11pour incitation à la haine,
01:02:13concourant ainsi
01:02:13à la hausse
01:02:14des discriminations
01:02:15racistes
01:02:16dans notre pays.
01:02:17Pas plus tard qu'hier,
01:02:18deux étrangers
01:02:19ont été agressés
01:02:19dans le Var,
01:02:20l'un d'entre eux
01:02:21tué
01:02:21par un voisin
01:02:24qui a ouvertement
01:02:24revendiqué
01:02:25le caractère raciste
01:02:26de ses actes.
01:02:28Les contempteurs
01:02:29de Dreyfus
01:02:29voyaient en lui
01:02:30un ennemi de l'intérieur,
01:02:32étranger au corps social,
01:02:33qui ne serait jamais
01:02:34pleinement français
01:02:35et patriote.
01:02:36Cette rhétorique
01:02:37nauséabonde,
01:02:38caractéristique
01:02:39de l'extrême droite,
01:02:40se glisse aujourd'hui
01:02:41dans certains tweets
01:02:42quand très récemment
01:02:44un collègue député
01:02:44a été accusé
01:02:45d'entrisme
01:02:46par une responsable politique
01:02:48du bloc central
01:02:49ou quand nos compatriotes
01:02:51musulmans
01:02:52ou perçus comme tels
01:02:53sont de fait suspectés
01:02:54de ne pas être
01:02:55assez français.
01:02:57La haine raciste
01:02:58n'est pas
01:02:58l'apanage du passé.
01:03:01Condamné à la suite
01:03:02d'un simulacre
01:03:03de procès,
01:03:03Alfred Dreyfus
01:03:04a été victime
01:03:05d'une justice
01:03:06aux ordres,
01:03:07d'un système judiciaire
01:03:08qui n'avait pas
01:03:09pour objectif
01:03:09premier la recherche
01:03:11de la vérité
01:03:11y compris
01:03:12quand la culpabilité
01:03:13d'Estérasie
01:03:14est apparue au grand jour
01:03:15mais bien
01:03:16la défense
01:03:17des intérêts
01:03:17de l'armée.
01:03:19C'est pourquoi
01:03:19nous ne sommes guère étonnés
01:03:20de voir l'extrême droite
01:03:21contemporaine
01:03:22chercher à fragiliser
01:03:23constamment
01:03:23l'indépendance
01:03:24de la justice.
01:03:26Aux Etats-Unis,
01:03:27Donald Trump
01:03:27mène un combat
01:03:28permanent contre les juges.
01:03:29Il n'y a pas de république,
01:03:30il n'y a pas de justice
01:03:32sans l'indépendance
01:03:33des juges
01:03:34de la justice.
01:03:36Elle est un rempart
01:03:37qu'il faut protéger.
01:03:39Par l'adoption
01:03:43de cette proposition
01:03:44de loi,
01:03:44nous rappelons
01:03:45que le combat
01:03:45contre l'arbitraire,
01:03:46la haine
01:03:47et la discrimination
01:03:48est toujours d'actualité.
01:03:50Nous inscrivons nos pas
01:03:51dans ceux
01:03:52des Dreyfusards
01:03:52de l'époque,
01:03:53militantes et militants
01:03:54acharnés à la recherche
01:03:55de la vérité
01:03:56pour la justice
01:03:56et l'égalité
01:03:57des individus
01:03:58devant la loi.
01:03:59Notre vote
01:03:59se veut également
01:04:00en résonance
01:04:01avec les combats actuels
01:04:02quand des Français
01:04:03sont soupçonnés
01:04:04de ne pas assez
01:04:04aimer leur pays
01:04:05ou d'être des ennemis
01:04:06de la France
01:04:07en raison de leur appartenance
01:04:08réelle ou supposée
01:04:09à une religion
01:04:10ou à une ethnie.
01:04:13Cette proposition
01:04:13de loi,
01:04:15nous la voterons
01:04:15bien sûr,
01:04:17avec conviction,
01:04:19mais elle est faible
01:04:20à réparer
01:04:21à elle seule
01:04:22toutes les dérives
01:04:23passées et présentes
01:04:24qui font tant de mal
01:04:25à notre démocratie.
01:04:26Merci beaucoup
01:04:32Madame la députée.
01:04:33La parole est à présent
01:04:34à Monsieur Jérémy Patrier-Laitus
01:04:36pour le groupe
01:04:37Horizon et Indépendant.
01:04:47Merci Madame la Présidente,
01:04:52Madame la Ministre,
01:04:53Monsieur le Président,
01:04:55Monsieur le rapporteur,
01:04:56Mesdames et Messieurs,
01:04:57les membres de la famille
01:04:58du capitaine Dreyfus,
01:04:59chers collègues,
01:05:01Capitaine,
01:05:02l'œuvre n'est point finie.
01:05:04Il faut que votre innocence
01:05:06hautement reconnue
01:05:07sauve la France,
01:05:08notre pauvre et grand pays,
01:05:10du désastre moral
01:05:11où elle a failli disparaître.
01:05:14Quand l'innocent se lèvera,
01:05:16la France redeviendra
01:05:17la terre de l'équité
01:05:18et de la bonté.
01:05:206 juillet 1899,
01:05:23Émile Zola écrit
01:05:24à Alfred Dreyfus,
01:05:25« Le capitaine vient de rentrer
01:05:27de sa déportation au diable,
01:05:29cette île rugueuse du bout du monde,
01:05:31dépendance du bagne de Cayenne,
01:05:33où il fut reclus pendant 1517 jours. »
01:05:366 juillet 1899,
01:05:38Zola écrit à Alfred Dreyfus,
01:05:40qui est encore le lépreux de la France,
01:05:42le traître,
01:05:43le coupable haï par une partie du pays
01:05:45et qui croupit désormais
01:05:47dans la prison militaire de Rennes.
01:05:496 juillet 1899,
01:05:52Émile Zola écrit à Alfred Dreyfus
01:05:54pour continuer le combat,
01:05:55combat pour faire éclater au grand jour
01:05:57l'innocence du capitaine,
01:05:59combat pour sauver la France
01:06:00du désastre moral.
01:06:01Mes chers collègues,
01:06:03le 6 juillet 1899,
01:06:05Zola écrit à Alfred Dreyfus,
01:06:07« Et la France est toujours fracturée,
01:06:09divisée en son cœur. »
01:06:11La France des Dreyfusards est prise de justice,
01:06:13d'égalité et de vérité,
01:06:15s'oppose à la France nationaliste,
01:06:17idéologue et antisémite des Dreyfusards.
01:06:21Chacun choisit son camp,
01:06:22jusque dans les murs de notre Assemblée.
01:06:25Oui, mes chers collègues,
01:06:26de l'injuste arrestation du capitaine
01:06:28en octobre 1894,
01:06:30jusqu'au vote de sa réintégration
01:06:32dans l'armée en juillet 1906,
01:06:34notre Assemblée se fait l'écho
01:06:35de débats violents,
01:06:37d'une intensité inouïe.
01:06:39Ici même, dans cet hémicycle,
01:06:41les voix de Jaurès, d'Henri Brisson,
01:06:43de Raymond Poincaré, de René Valdez-Crousseau
01:06:45s'élèvent comme une lumière dans l'obscurité
01:06:47et lient leur destin à celui d'un homme
01:06:50injustement accusé.
01:06:52La séance du 13 juillet 1906
01:06:54marque un tournant.
01:06:56Après la lecture du rapport du député de la Seine,
01:06:59le président de séance met au vote
01:07:00l'article unique,
01:07:02qui prévoit que le capitaine Dattiri Dreyfus
01:07:04est promu chef d'escadron.
01:07:06Le scrutin sera sans appel,
01:07:07la Chambre des députés adoptera
01:07:09la réhabilitation de Dreyfus.
01:07:11Alors que mon prédécesseur Henri Chéron,
01:07:14député du Calvados comme tant d'autres,
01:07:15dénonce ce crime,
01:07:17comme le plus odieux de tous ceux
01:07:18qui aient été tentés contre la conscience humaine,
01:07:21à l'extrême droite,
01:07:21des voix s'élèvent contre cette réhabilitation.
01:07:24Des députés obstinément et volontairement aveugles
01:07:26qui exigent que l'affaire Dreyfus
01:07:28reste du domaine judiciaire,
01:07:31quand d'autres à gauche
01:07:32avaient appelé à sa condamnation à mort.
01:07:34A l'inverse,
01:07:37d'autres voix considèrent alors
01:07:38qu'il faut aller plus loin.
01:07:39C'est ce que demande à la tribune
01:07:41et sous les applaudissements Francis de Précencé
01:07:43qui souhaitent que la Chambre
01:07:44vote des représailles
01:07:46contre les chefs militaires
01:07:47responsables des malheurs de Dreyfus
01:07:49et de Picard.
01:07:51Finalement,
01:07:52des accusations contre Alfred Dreyfus,
01:07:54il ne restera rien,
01:07:55sinon le courage d'un homme
01:07:57dont on a voulu l'alentissement
01:07:58et qui resta debout,
01:08:00droit, digne.
01:08:01Aujourd'hui, mes chers collègues,
01:08:03cette proposition de loi est essentielle
01:08:04pour achever l'œuvre de justice
01:08:06qu'ont engagé nos prédécesseurs
01:08:08et la réhabilitation d'un homme
01:08:10qui a servi la France sous les drapeaux
01:08:12avec patriotisme,
01:08:13honneur et dévouement.
01:08:15Un homme qui aimait tant la France
01:08:17mais qui a été attaqué
01:08:18parce qu'il était juif.
01:08:20Le juif Dreyfus,
01:08:21dira-t-on,
01:08:22traite par fatalité
01:08:23et caricaturé dans les rues de Paris
01:08:25quand les mêmes antisémites
01:08:27canderont,
01:08:28mort aux juifs,
01:08:29à mort le traite,
01:08:30à mort Judas.
01:08:32Alors que la bête immonde
01:08:34de l'antisémitisme
01:08:35renaît dans notre pays,
01:08:37que les actes antisémites explosent,
01:08:39que les murs du mémorial de la Shoah
01:08:41ont été souillés encore ce week-end,
01:08:43cette proposition de loi est essentielle
01:08:45car elle nous rappelle
01:08:46que le combat du capitaine Dreyfus,
01:08:48le combat contre l'antisémitisme
01:08:50fléau qui pourut notre société,
01:08:52n'est pas achevé.
01:08:54Cette proposition de loi est essentielle
01:08:57car comme le soulignait
01:08:58le président Chirac,
01:09:00la réhabilitation de Dreyfus,
01:09:01c'est la victoire de la République,
01:09:03c'est la victoire de la France,
01:09:04c'est la victoire de l'unité de la France.
01:09:07Je n'ai demandé aucune faveur
01:09:09dans ma carrière.
01:09:10Je n'ai demandé que la justice
01:09:12se justifiait Dreyfus.
01:09:15Alors aujourd'hui,
01:09:15mes chers collègues,
01:09:16nous n'accordons pas une faveur
01:09:17au capitaine Dreyfus.
01:09:18Nous faisons œuvre de justice.
01:09:21Nous réparons la République
01:09:22là où elle a failli par antisémitisme.
01:09:24A la foule des Français
01:09:25qui criaient
01:09:27« Vive Dreyfus,
01:09:28vive la France ! »
01:09:29le jour où il fut décoré
01:09:30de la Légion d'honneur,
01:09:31le capitaine répondit
01:09:33« Vive la vérité,
01:09:34vive la République ! »
01:09:35Près de 120 ans plus tard,
01:09:37dans cet hémicycle,
01:09:38nous mettons nos pas
01:09:39dans ceux qui s'indignèrent
01:09:40et combatturent
01:09:41pour l'honneur d'un homme,
01:09:42pour la vérité,
01:09:43pour la République.
01:09:44Alors,
01:09:45mes chers collègues,
01:09:46je forme le vœu
01:09:46que nous votions
01:09:47à l'unanimité
01:09:48et loin des polémiques politiciennes
01:09:50en faveur de l'élévation
01:09:51de Ralf-Fedréfus
01:09:52au grade général de brigade
01:09:53à titre posthume.
01:09:54Avec mes collègues
01:09:55du groupe Horizon,
01:09:56nous voterons en faveur
01:09:57de cette proposition de loi
01:09:58avec la détermination,
01:10:00la conviction
01:10:01qu'exige le combat
01:10:02pour l'honneur d'un homme,
01:10:03pour le triomphe
01:10:04de nos valeurs républicaines.
01:10:05Je vous remercie.
01:10:05Merci beaucoup,
01:10:07monsieur le député.
01:10:08Je vous indique
01:10:09que sur le vote
01:10:10de l'article unique,
01:10:11je suis saisie
01:10:12d'une demande
01:10:12de scrutin public
01:10:13du groupe Ensemble
01:10:14pour la République
01:10:14que je fais annoncer
01:10:15dans l'enceinte
01:10:16de l'Assemblée nationale.
01:10:18Et je donne la parole
01:10:19à monsieur David Habib,
01:10:21député du groupe
01:10:22Liberté indépendant
01:10:23Outre-mer et Territoire.
01:10:29Madame la Présidente,
01:10:31Madame la Ministre,
01:10:33monsieur le Président,
01:10:34Monsieur le Rapporteur,
01:10:37soyons sincères,
01:10:39nous avons le sentiment
01:10:40que notre pays
01:10:40est divisé comme jamais,
01:10:42que ses valeurs
01:10:43sont malmenées.
01:10:45Pas un jour
01:10:45sans que soient rapportées
01:10:47des faits d'antisémitisme
01:10:49et de racisme.
01:10:51Pas un jour
01:10:51sans que nous sentions
01:10:53que ce qui fait l'unité,
01:10:55ce qui fait la force
01:10:57de la France
01:10:57est ainsi mise à mal.
01:11:01Comme si nous n'avions
01:11:02pas d'histoire,
01:11:03comme si nous n'avions
01:11:04pas de souvenirs.
01:11:06Dans ces moments,
01:11:07même si ce n'est pas suffisant,
01:11:09dans ces moments,
01:11:09il faut se raccrocher
01:11:10à ce qui fait
01:11:11notre patrimoine.
01:11:13Et l'affaire Dreyfus
01:11:14parce qu'elle a donné
01:11:15à notre République
01:11:17ce qui fait
01:11:18ce corpus collectif
01:11:21est l'un de ces instants fondateurs
01:11:24qui devrait lier notre nation
01:11:27tout entière.
01:11:29Au-delà du fait personnel,
01:11:31cette élévation au grade général
01:11:33nous donne l'occasion
01:11:35unanimement
01:11:36de dire pardon
01:11:38à Alfred Dreyfus
01:11:39et de nous raccrocher
01:11:41au combat des Dreyfusards,
01:11:44de ces justes
01:11:45qui se sont levés
01:11:46et qui ont défendu la vérité.
01:11:48Nous nous souvenons
01:11:50que la République
01:11:51que nous voulons
01:11:51et que nous aimons
01:11:52est née du combat
01:11:54justement de ces Dreyfusards,
01:11:56cette République
01:11:57issue
01:11:57de ces justes
01:11:59qui défendurent Dreyfus
01:12:00et qui ont rappelé
01:12:01que tous les Français
01:12:03sont égaux
01:12:04et doivent être jugés
01:12:06sur leurs actes
01:12:07et pas sur des préjugés.
01:12:09C'est la vérité
01:12:10qui l'emporte
01:12:11sur le mensonge.
01:12:12C'est la justice
01:12:13qui est promise
01:12:14à tous
01:12:15sans distinction.
01:12:17C'est le courage
01:12:17qui gagne
01:12:18face à l'indignité
01:12:20et à la couardise.
01:12:22Ces justes
01:12:23ce sont
01:12:23Lucie Dreyfus,
01:12:25bien sûr,
01:12:26mais aussi
01:12:27Jean Jaurès,
01:12:28Lucien R,
01:12:29Marguerite Durand,
01:12:30Émile Zola
01:12:31et celui
01:12:32qui a inspiré
01:12:33le j'accuse
01:12:34de Zola,
01:12:35Bernard Lazare,
01:12:37ce journaliste
01:12:37juif, socialiste,
01:12:39sioniste
01:12:39et dont la statue
01:12:40a été profanée
01:12:42pendant la Seconde Guerre mondiale
01:12:44à Nîmes.
01:12:45Avec ce nez
01:12:46qu'on a extirpé
01:12:47de la statue
01:12:48pour l'envoyer
01:12:49à Maurras
01:12:49comme une sorte
01:12:50de trophée
01:12:51que les pétainistes
01:12:52adressaient
01:12:53à l'écrivain.
01:12:55C'est juste
01:12:56on fait
01:12:57notre République moderne
01:12:58et Madame la Ministre,
01:12:59puisque je dispose
01:13:01encore de quelques secondes
01:13:02et que j'évoque
01:13:03Bernard Lazare,
01:13:04je crois savoir
01:13:04que sa statue
01:13:06n'est pas
01:13:07mériterait
01:13:08une réhabilitation
01:13:09là au sens premier
01:13:10du terme
01:13:11et je crois
01:13:12qu'il serait
01:13:13de bonne alloi
01:13:14que le gouvernement
01:13:15et les élus locaux
01:13:16puissent
01:13:17s'y interroger.
01:13:19Ils nous ont
01:13:20logués,
01:13:21c'est juste
01:13:22nous enlégués
01:13:22un refus
01:13:23du racisme,
01:13:23de l'antisémitisme.
01:13:25Ils nous demandent
01:13:26de dénoncer
01:13:27les propos scandaleux
01:13:28de tel ou tel élu,
01:13:31cette peinture
01:13:32sur les murs
01:13:32du musée
01:13:33de la Shoah
01:13:33ou ce crime
01:13:34abominable
01:13:35commis ce week-end
01:13:36dans le Var.
01:13:37C'est juste
01:13:38nous demande
01:13:40d'être à la hauteur
01:13:41du message
01:13:42qu'il y a un siècle
01:13:44à traverser
01:13:45notre pays.
01:13:46C'est maintenant
01:13:46qu'il nous faut réparer,
01:13:48certes,
01:13:48la carrière
01:13:48d'Alfred Dreyfus,
01:13:50mais c'est maintenant
01:13:50qu'il nous faut
01:13:51nous incliner
01:13:52devant
01:13:53ces faiblesses
01:13:56multiples
01:13:56qui sont commises
01:13:58dans le pays
01:13:58et qui méritent
01:13:59au contraire
01:14:00que nous puissions
01:14:00nous élever collectivement
01:14:02pour dénoncer
01:14:03et l'antisémitisme
01:14:04et le ratisme.
01:14:05C'est maintenant
01:14:05qu'il faut aussi
01:14:06réétudier
01:14:07l'affaire Dreyfus
01:14:08à l'école.
01:14:09C'est maintenant
01:14:10qu'il nous faut
01:14:10avoir sur cette question
01:14:12le plus grand effort
01:14:14pour nous permettre
01:14:15d'être à la hauteur
01:14:16de ce qui a été
01:14:17l'un des combats
01:14:18de la République.
01:14:20Et comme je souhaite
01:14:21être optimiste
01:14:23et que je veux rappeler
01:14:24ce que j'avais dit
01:14:25en commission
01:14:25où j'avais cité
01:14:27Emmanuel Lévinas,
01:14:28philosophe,
01:14:29juif,
01:14:30français,
01:14:30qui avait rapporté
01:14:32les propos
01:14:33de son grand-père
01:14:35lituanien
01:14:35qui avait gagné
01:14:36la France,
01:14:38Emmanuel Lévinas
01:14:39a dit
01:14:39un pays
01:14:40qui se déchire
01:14:41pour sauver
01:14:42l'honneur
01:14:43d'un petit officier
01:14:44juif,
01:14:45c'est un pays
01:14:46où il faut
01:14:46rapidement aller.
01:14:48C'est ça la France.
01:14:49La France,
01:14:50c'est ce pays
01:14:51où nous devons
01:14:52ensemble
01:14:53aller
01:14:58et c'est vers ce pays
01:14:59qui ne fait fi
01:15:01de ces différences,
01:15:02qui rappelle
01:15:03que tous les Français
01:15:04sont égaux,
01:15:05que notre pays
01:15:06doit unanimement
01:15:08exprimer sa volonté.
01:15:09Je remercie
01:15:10le groupe
01:15:11qui est à l'initiative
01:15:12de cette proposition
01:15:13de loi
01:15:13et le groupe
01:15:14qui votera
01:15:15à l'unanimité.
01:15:16Merci beaucoup
01:15:17mon cher collègue.
01:15:20La discussion générale
01:15:21est close.
01:15:22j'appelle dans le texte
01:15:24de la commission
01:15:24l'article unique
01:15:25de la proposition
01:15:26de loi.
01:15:26Il n'y a pas
01:15:27d'amendement
01:15:28donc je vais mettre
01:15:28au texte,
01:15:29au vote
01:15:30directement
01:15:31la proposition
01:15:31de loi
01:15:31qui fait l'objet
01:15:32d'un scrutin public.
01:15:34Je vous demande
01:15:34de bien vouloir
01:15:35regagner vos places.
01:15:37Alors j'attends
01:15:38que le dernier orateur
01:15:40regagne sa place.
01:15:45C'est bon ?
01:15:46Monsieur le Président Coquerel,
01:15:48tout le monde
01:15:48est en place ?
01:15:49Le scrutin est ouvert.
01:15:57Le scrutin est clos.
01:16:05Votons 197,
01:16:07exprimé 197,
01:16:08majorité 99,
01:16:10pour 197,
01:16:11contre 0.
01:16:12l'Assemblée nationale
01:16:14a adopté
01:16:14à l'unanimité.
01:16:15Bravo à vous.
01:16:16Merci.
01:16:46Merci beaucoup.
01:16:56Je vais suspendre
01:16:56la séance
01:16:57pour 5 minutes.
01:16:58Pardon ?
01:16:59Monsieur le rapporteur ?
01:16:59Oui.
01:17:00Ah, excusez-moi.
01:17:01Monsieur le rapporteur
01:17:01veut dire un petit mot.
01:17:03Merci.
01:17:04Merci Madame la Présidente,
01:17:05chers collègues.
01:17:06Très rapidement,
01:17:07je voulais,
01:17:08comme rapporteur
01:17:09dont la mission
01:17:09s'arrête maintenant,
01:17:11vous remercier
01:17:12toutes et tous,
01:17:13chers collègues,
01:17:14quels que soient
01:17:15vos parcours
01:17:15et vos philosophies politiques
01:17:16pour ce vote
01:17:18unanime
01:17:19de la représentation nationale
01:17:20qui restera
01:17:21dans l'histoire
01:17:22de notre pays.
01:17:25Je voulais également
01:17:26appeler
01:17:27nos collègues
01:17:27sénateurs,
01:17:28l'autre chambre,
01:17:29à se saisir
01:17:30rapidement
01:17:31de ce texte.
01:17:32Je sais qu'il y a eu
01:17:33des initiatives,
01:17:34notamment du côté
01:17:35du groupe socialiste
01:17:36du Sénat,
01:17:37pour bien terminer
01:17:38et terminer,
01:17:39je l'espère,
01:17:39rapidement
01:17:40le travail.
01:17:41Enfin,
01:17:42je voulais vous dire,
01:17:43chers collègues
01:17:44et également
01:17:44chère famille Dreyfus
01:17:46qui êtes en tribune,
01:17:48que je crois profondément
01:17:49que malgré les vicissitudes
01:17:51de notre pays
01:17:52actuellement,
01:17:53malgré les tiraillements,
01:17:55la République est grande
01:17:56quand elle sait s'élever
01:17:57au niveau de l'histoire,
01:17:59quand elle sait s'élever
01:18:00au-delà
01:18:01et au-dessus
01:18:02des contingences politiques,
01:18:04quand elle est capable
01:18:05aussi de réparer
01:18:06ses erreurs
01:18:07et quand elle regarde,
01:18:09cela a été dit,
01:18:09quand elle regarde
01:18:10notre République,
01:18:11son histoire en face.
01:18:13Vive la République,
01:18:14vive la France !
01:18:15Monsieur le rapporteur,
01:18:17la séance est suspendue.
01:18:19Voté,
01:18:19mais avec des réserves,
01:18:21puisque les élus du Modem
01:18:22ont alerté
01:18:23contre une possible
01:18:24instrumentalisation
01:18:25de certains partis
01:18:26visant le Rassemblement
01:18:27National
01:18:28et la France Insoumise.
01:18:29Ils ont refusé
01:18:30de prendre part au débat.
01:18:32La séance est levée.
01:18:33A très bientôt
01:18:33sur LCP.
01:18:34Sous-titrage Société Radio-Canada
01:18:40Sous-titrage Société Radio-Canada
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