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Pour conserver leur monopole sur certaines maladies, de grands laboratoires minimiseraient ou cacheraient aux autorités de santé une partie des résultats cliniques.
Fabriquée par le géant français Sanofi, la Depakine est efficace contre l’épilepsie, mais au centre d’un vaste scandale sanitaire en Europe. Aux États-Unis, certains laboratoires sont accusés d’avoir précipité des millions de patients dans l’addiction aux opioïdes, de puissants médicaments antidouleur. Dans un pays où les firmes pharmaceutiques déterminent le prix des médicaments, les élus, démocrates comme républicains, tentent de réguler le coût des nouveaux traitements. En vain.
Fabriquée par le géant français Sanofi, la Depakine est efficace contre l’épilepsie, mais au centre d’un vaste scandale sanitaire en Europe. Aux États-Unis, certains laboratoires sont accusés d’avoir précipité des millions de patients dans l’addiction aux opioïdes, de puissants médicaments antidouleur. Dans un pays où les firmes pharmaceutiques déterminent le prix des médicaments, les élus, démocrates comme républicains, tentent de réguler le coût des nouveaux traitements. En vain.
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00:00:30Martin Shkreli est un épiphénomène qui illustre la cassure d'un système,
00:00:48une financiarisation totale de l'écosystème du médicament.
00:00:53Plus riche et plus puissante que jamais, forte de ses réseaux d'influence,
00:00:58l'industrie pharmaceutique peut à elle seule décider des politiques de santé des gouvernements.
00:01:04Cette industrie a une puissance comparable à celle d'un État.
00:01:08L'industrie pharmaceutique est si riche et si puissante
00:01:12que son lobbying influence énormément le Congrès et aussi l'agence du médicament.
00:01:18Des laboratoires sont jugés responsables d'avoir longtemps caché les graves effets addictifs de leurs médicaments.
00:01:25Nous avons des lois strictes sur la responsabilité d'une entreprise lorsqu'elle a causé de tels dommages.
00:01:33Ils ont enfreint la loi.
00:01:36Alors que l'industrie bénéficie en grande partie de la recherche financée par des fonds publics,
00:01:41elle réussit ensuite à orienter les remboursements vers les médicaments les plus chers.
00:01:46« Aucun bon traitement ne peut se faire sans un partenaire de l'industrie pharmaceutique.
00:01:53Pourtant, le prix actuel est absolument indéfendable, selon moi.
00:01:58Le souci principal de l'industrie pharmaceutique est devenu la rentabilité.
00:02:03Leur souci, c'est l'actionnaire et non plus le malade.
00:02:06« C'est un modèle économique très cruel.
00:02:09Si vous ne pouvez pas payer, vous n'avez pas de traitement. »
00:02:14Et la bataille contre le Covid-19 qui fait rage semble exacerber l'appétit des laboratoires.
00:02:21Le nouveau paradigme de l'industrie pharmaceutique menace-t-il la longévité du plus beau système politique solidaire,
00:02:29la santé publique.
00:02:30Le Dara Prime est un médicament classé comme essentiel par l'Organisation mondiale de la santé.
00:02:56Il lutte notamment contre le paludisme et une grave infection causée par le VIH.
00:03:05Un financier américain trentenaire, Martin Screlly, gestionnaire d'un fonds d'investissement spéculatif dans la santé,
00:03:13a racheté les droits du médicament aux États-Unis
00:03:15et fait flamber son prix de 13,50 dollars à 750 dollars.
00:03:22Une augmentation du Dara Prime de 5000%.
00:03:25Combien de personnes sont mortes à cause de vous ?
00:03:45Vous dites que tout va bien pour vous.
00:03:47Mais qu'avez-vous vraiment fait pour les êtres humains sur cette planète ?
00:03:51En dehors des profits, ce modèle économique est détraqué.
00:03:55Voilà.
00:03:56Martin Screlly ne cède pas sur le prix de son médicament.
00:04:00Devant la presse financière, il vient tenter de défendre l'indéfendable.
00:04:07Merci d'être venu.
00:04:09Merci.
00:04:09Après vous ?
00:04:11Si vous pouviez remonter le temps de quelques mois, vous feriez les choses différemment ?
00:04:17J'aurais probablement augmenté le prix davantage.
00:04:20C'est ce que j'aurais fait.
00:04:24Pourquoi ?
00:04:25Dans la santé, l'évolution des prix a peu d'effet sur le niveau de la demande.
00:04:30J'aurais pu augmenter le prix et faire encore plus de profits, ce qui est mon objectif principal.
00:04:34Personne ne veut le dire, personne n'en est fier, mais nous vivons dans une société capitaliste avec des règles capitalistes.
00:04:41Et ce que veulent mes investisseurs, c'est que je fasse un maximum de profits.
00:04:45Pas que je fasse un minimum, ni la moitié, ni 70%. Ils veulent 100% de profits.
00:04:49Pourquoi ce médicament devrait coûter cher ?
00:04:53C'est le principe du capitalisme américain.
00:04:56À partir du moment où les patients ne souffrent pas, et on s'en assure, on fait des profits de façon responsable.
00:05:02Nous n'utilisons pas ces profits pour construire une bibliothèque à mon nom.
00:05:05Nous réinjectons les profits dans la recherche.
00:05:08Mais le prix des médicaments est censé être incitatif.
00:05:12Je ne sais pas, c'est un business. Nous devons faire le plus d'argent possible, mec.
00:05:16L'augmentation est immorale, mais parfaitement légale.
00:05:22Une commission du Congrès américain s'empare du scandale de l'augmentation incontrôlée du prix des médicaments
00:05:28et convoque Martin Screlly.
00:05:30Que dites-vous à cette femme, célibataire, enceinte, sans revenu, qui a peut-être le sida,
00:05:39et qui a besoin du daraprim pour survivre ?
00:05:43Que lui dites-vous quand elle doit faire un choix ?
00:05:47Sur les conseils de mon avocat, j'invoque le cinquième amendement, et je refuse respectueusement de répondre à votre question.
00:05:55Écoutez-moi.
00:05:56Je vous demande, non, je vous implore, d'utiliser toute l'influence qu'il vous reste
00:06:04pour pousser votre entreprise à baisser le prix de ces médicaments.
00:06:09Vous pouvez regarder ailleurs si vous le souhaitez, mais j'aimerais que vous puissiez voir le visage de ces gens
00:06:18qui ne peuvent pas se payer les médicaments dont ils ont besoin.
00:06:21Ce sont les contribuables qui payent une partie de ces traitements.
00:06:25Cela vous fait sourire, mais je suis très sérieux, monsieur.
00:06:27Je demande maintenant à la commission de bien vouloir excuser le témoin s'il n'y a pas d'objection.
00:06:37Nous faisons une pause le temps qu'on escorte M. Screlly.
00:06:46Avec son sourire narquois, Martin Screlly est surnommé l'homme le plus détesté des États-Unis.
00:06:52Quelques temps plus tard, il est arrêté par le FBI dans le cadre d'une affaire de fraude
00:07:01et de manipulation sur des fonds d'investissement.
00:07:04Il est condamné à 7 ans de prison ferme.
00:07:10Au-delà de son cas individuel, Martin Screlly devient l'incarnation des dérives de l'industrie pharmaceutique
00:07:17et l'incarnation de son cynisme.
00:07:19Le prix du Dara prime ne reviendra jamais à son niveau initial.
00:07:25Il y a des idiots utiles qui focalisent l'attention à travers des comportements
00:07:29qui sont effectivement totalement cyniques,
00:07:32mais qui sont bien utiles justement pour éviter de soulever la totalité du couvercle
00:07:36et de voir de quoi ces personnes sont-ils le nom,
00:07:39de quelle dérive d'un système ces personnes sont-ils le nom.
00:07:42Depuis 10 ans, le paysage de l'industrie du médicament a été considérablement transformé.
00:07:56Une poignée de firmes pharmaceutiques concentrent à elles seules
00:08:00la fabrication de la majeure partie des médicaments.
00:08:03Dans le top 5 mondial, le Suisse Novartis, 45 milliards de dollars de chiffre d'affaires annuel,
00:08:12après avoir racheté une kyrielle de laboratoires, détenteurs de brevets prometteurs dans le cancer et les maladies rares.
00:08:19Les deux géants américains, Pfizer et Johnson & Johnson,
00:08:27ont eux aussi racheté des dizaines de firmes concurrentes pour étendre leur marché.
00:08:34Toujours dans le top 5, Roche, l'autre industriel suisse qui a fait l'acquisition de 25 traitements concurrents.
00:08:42Et le géant français Sanofi, plus de 40 milliards de dollars de chiffre d'affaires annuel.
00:08:51Lui aussi a racheté une dizaine de laboratoires en Europe et en Amérique du Nord.
00:08:58Avec chacune 100 000 collaborateurs, ce sont ces multinationales,
00:09:03présentes sur le marché global, que l'on appelle communément les Big Pharma.
00:09:12Pour conserver leur monopole sur certaines maladies,
00:09:16de grands laboratoires sont accusés de minimiser ou de cacher aux autorités de santé
00:09:22une partie des résultats de leurs essais cliniques.
00:09:27Ainsi arrivent sur le marché des médicaments responsables de graves effets secondaires
00:09:32sur les malades qu'ils sont censés soigner.
00:09:35Comme le Mediator, des laboratoires Servier, retiré 30 ans après sa commercialisation
00:09:43et un scandale retentissant.
00:09:46Ou la Depakine, qui traite l'épilepsie, l'un des médicaments les plus vendus dans le monde depuis 50 ans.
00:09:55Fabriqué par le géant français Sanofi, ce médicament est efficace,
00:09:59mais au centre d'un vaste scandale sanitaire en Europe.
00:10:04Le traitement s'est révélé extrêmement dangereux chez la femme enceinte pour l'enfant à naître.
00:10:10Souvent, en fait, je compare ma maladie à une décharge électrique extrêmement violente,
00:10:18comme s'il y avait un court circuit dans une boîte électrique,
00:10:22et tout disjoncte.
00:10:24Et donc je perds connaissance, je convulse,
00:10:27et je me réveille plusieurs minutes, des fois plusieurs heures après,
00:10:30en ne sachant plus où je suis, ni qui m'entoure.
00:10:33C'est une maladie terrée parce qu'on se sent mourir, moi je l'appelle la petite mort.
00:10:37Alors, j'ai toujours peur d'y laisser ma peau, oui ça c'est clair.
00:10:42Donc pour moi, les médicaments sont indispensables, c'est pas une question en fait.
00:10:47Je sais que sans médicaments, je ne peux pas vivre, je ne serai pas là-devant.
00:10:53J'avais bien préparé ma grossesse, j'avais lu ce qu'il y avait marqué à l'époque dans la notice,
00:10:58« Consultez votre médecin ».
00:10:59Donc j'avais posé d'abord la question à mon médecin généraliste,
00:11:02« Est-ce que c'est contre-indiqué dans la grossesse ? »
00:11:04Non, non, pas du tout, il n'y a aucun souci.
00:11:06J'ai posé la question au gynécologue, même réponse.
00:11:09Au neurologue, même réponse.
00:11:13Et Nathan, quand ils l'ont sorti de mon ventre,
00:11:15il y avait une malformation urogénitale.
00:11:18Et là, j'ai dit, mais je ne comprends pas,
00:11:19il n'y a jamais eu cette malformation-là dans la famille, d'où ça vient ?
00:11:22Et on m'a dit, mais vous savez, ça existe, et puis point, voilà, c'est tout.
00:11:25Pourquoi vous vous posez des questions ?
00:11:27Et puis voilà, le temps a passé.
00:11:29Et puis Nathan, à l'âge de parler, il ne parlait pas.
00:11:32À l'âge de tenir assis, il ne tenait pas assis.
00:11:34Peu à peu, Marine Martin et son mari s'inquiètent.
00:11:40Ils filment leur fils Nathan, afin de documenter son retard pour les médecins.
00:11:47Anormalement calme, il ne sourit pas, il manque de tonicité,
00:11:52avec d'importants retards de langage et des troubles de la relation.
00:11:56Et puis donc très vite, j'ai compris qu'il y avait quelque chose qui ne se déroulait pas normalement.
00:12:02Donc le temps de demander un rendez-vous au spécialiste, au centre spécialiste,
00:12:06Nathan avait déjà deux ans et demi.
00:12:08Et là, on m'a dit, ben oui, madame, ce n'est pas un retard, c'est un trouble.
00:12:14Nathan souffre de lourdes séquelles neurologiques.
00:12:16Marine Martin se lance dans une vaste enquête sur les effets secondaires du médicament d'Hepaqine.
00:12:26Elle devient lanceuse d'alerte et porte plainte contre Sanofi
00:12:30pour faire reconnaître la responsabilité du laboratoire.
00:12:34Elle crée une association avec des milliers de victimes.
00:12:36En France, en Suisse, plusieurs procès individuels ainsi qu'une action de groupe sont en cours contre Sanofi.
00:12:46La firme est mise en examen pour tromperie aggravée, blessure et homicide involontaire.
00:12:52C'était aussi une manière pour moi de réparer les choses parce que la culpabilité, elle est gigantesque.
00:12:59Quand on ingurgite ce médicament quotidiennement,
00:13:02enfin moi c'était deux fois par jour, et qu'on empoisonne son bébé,
00:13:05enfin voilà, encore aujourd'hui ça reste difficile.
00:13:10Donc pour moi, ce travail de réparation, de dénoncer, etc.,
00:13:14la tromperie finalement de Sanofi, c'était indispensable.
00:13:20Je n'aurais pas pu me regarder en face.
00:13:21Il fallait que j'aide les autres familles, il fallait que je dénonce.
00:13:24Dépakine, les victimes reprochent au laboratoire
00:13:27de ne pas avoir informé suffisamment tôt
00:13:30des risques liés à la prise de ce médicament pendant la grossesse.
00:13:34La Dépakine cause deux types de problèmes.
00:13:38Des malformations physiques, donc les enfants exposés in utero,
00:13:43développent dans 10% des cas des malformations physiques qui sont souvent très graves.
00:13:49Deuxième problème, des troubles neurodéveloppementaux.
00:13:53Des difficultés type autisme, du spectre de l'autisme, des difficultés d'apprentissage.
00:13:59Et ça, c'est 30 à 40% des enfants exposés.
00:14:02C'est énorme.
00:14:05Selon les autorités sanitaires, depuis la commercialisation du médicament en 1967,
00:14:11des dizaines de milliers d'enfants en Europe seraient atteints d'une malformation majeure
00:14:15ou de handicap mental.
00:14:17Vous avez un laboratoire qui ne joue pas le jeu de l'information
00:14:26et qui ne communique pas toutes les informations qu'il a aux autorités de santé.
00:14:32Et c'est un des éléments que nous avons découvert dans ce dossier.
00:14:35C'est Sanofi qui écrit à l'agence du médicament le 19 mai 2003.
00:14:422003, page 32 de ce document, le laboratoire écrit
00:14:48« Le risque d'un retard psychomoteur chez les enfants nés de mères épileptiques
00:14:53recevant un anti-épileptique a commencé à partir d'un petit nombre d'études rétrospectives. »
00:15:01Il est rapporté que des enfants nés de mères épileptiques traitées
00:15:04avaient un plus fort taux de retard psychomoteur que les autres.
00:15:10Alors, les victimes, quand elles lisent ça,
00:15:12elles découvrent que le laboratoire savait.
00:15:16Il ne sait pas complètement, il ne sait pas parfaitement,
00:15:19mais on sait que le laboratoire écrit en 2003 que depuis 1970, il est au courant.
00:15:27Et le laboratoire de nous répond « Oui, mais… »
00:15:30Le risque paraissait faible.
00:15:35Sanofi est l'un des principaux Big Pharma,
00:15:38le premier laboratoire français en termes de recherche et de développement de nouveaux médicaments,
00:15:43présent dans une centaine de pays dans le monde,
00:15:46avec comme slogan « Donner toute sa force à la vie ».
00:15:50Après des semaines de négociations, la direction accepte le principe de l'interview.
00:15:55Avec une condition, Sanofi refuse d'évoquer la procédure judiciaire en cours de Marine Martin
00:16:02et des associations de victimes en Europe.
00:16:04Depuis quand les responsables de Sanofi ont-ils connaissance d'effets secondaires graves sur le médicament d'hepakine ?
00:16:14Alors, pour bien répondre à votre question, d'hepakine, d'abord, est utilisé dans le traitement de l'épilepsie.
00:16:19Ça, c'est l'indication pour laquelle nous avons été autorisés à commercialiser ce médicament.
00:16:23Et l'épilepsie, c'est important de rappeler que c'est une condition grave.
00:16:27Et Sanofi a vraiment fait son travail de suivi rigoureux, d'informations rigoureuses
00:16:33auprès des autorités de santé et du corps médical, et des patients.
00:16:36Les autorités de santé disent qu'à l'époque, votre dossier n'était pas assez étayé.
00:16:40Vos alertes n'étaient pas assez argumentées.
00:16:43Je pense qu'on n'est pas flou, précisément.
00:16:47On rapporte toutes les informations que l'on a, que l'on a dans notre possession.
00:16:51L'Inspection Générale des Affaires Sociales a conduit une étude très sérieuse et très large sur ce dossier d'hepakine.
00:17:04La conclusion à laquelle elle aboutit, en 2016, c'est de dire qu'il était impossible,
00:17:10scientifiquement, compte tenu des données scientifiques de l'époque,
00:17:13de conclure à une corrélation directe de Valproat et des effets neurodéveloppementaux avant 2004.
00:17:19Et nous, nous saisissons les autorités de santé en 2003.
00:17:24Malgré tout, comment est-ce que vous expliquez que vous n'arrivez pas à convaincre les autorités de santé
00:17:29d'aller plus vite pour informer le corps médical et surtout les patientes qui seraient amenées à être enceintes ?
00:17:37La responsabilité de notre laboratoire, de devoir, c'est de s'assurer à tout moment
00:17:42que les informations que l'on récupère sur l'utilisation de ce produit,
00:17:46les cas de pharmacovigilance, l'évolution de la science, soient de façon constante transmises aux autorités de santé.
00:17:53Ça, c'est notre responsabilité.
00:17:54On le fait, comme je vous l'ai dit, de façon régulière, de façon systématique et de façon transparente.
00:18:01Alors que les preuves s'accumulent sur le lien entre le médicament d'hepakine
00:18:04et les graves troubles sur les enfants, il faudra encore attendre 11 ans pour que les patients soient alertés.
00:18:12En 2015, Sanofi s'accorde enfin avec l'Agence française de sécurité du médicament
00:18:18qui autorise les produits de santé.
00:18:20La notice de la dépakine est modifiée pour indiquer clairement les risques importants de malformation
00:18:28ou de problèmes de développement.
00:18:30Près de 50 ans après la mise sur le marché du médicament, malgré toutes les alertes.
00:18:37Cette notice donc arrive enfin en 2015 avec des termes extrêmement précis.
00:18:43Est-ce que ça vous embête de lire juste le premier paragraphe qui est très impressionnant ?
00:18:47Vous préférez que je le fasse moi ?
00:18:48Oui, allez-y.
00:18:48La notice du médicament de Sanofi est à présent très claire, dans toutes les langues.
00:18:54D'hepakine peut nuire gravement à l'enfant à naître s'il est pris pendant la grossesse.
00:19:00Les enfants exposés présentent un risque élevé de troubles graves du développement intellectuel et moteur
00:19:06et du comportement jusqu'à 30 à 40% des cas et ou de malformation pour environ 10% des cas.
00:19:15Et alors leur argumentaire c'est de dire ah mais l'État m'a donné l'autorisation de commercialisation du médicament donc c'est pas de ma faute.
00:19:23Je dis mais attendez dans le scandale du Dieselgate chez Volkswagen, on a autorisé, l'État a dû autoriser les voitures à circuler
00:19:30et c'est aux responsables à Volkswagen de payer pour la défectuosité et les mensonges de leur voiture, c'est pas à l'État.
00:19:41Enfin voilà c'est ridicule, c'est le producteur qui est responsable de son produit.
00:19:44Voilà bien sûr l'État a failli dans le dossier d'hepakine mais le principal responsable ça reste le producteur.
00:19:50Pour indemniser les milliers de victimes de la dépaquine en France, l'Assemblée nationale vote en 2016 un dispositif particulier.
00:19:59Madame la ministre, un amendement 1132 du gouvernement.
00:20:03C'est un amendement qui prévoit le chiffrage du dispositif d'indemnisation des victimes de la dépaquine.
00:20:10Le dispositif va être créé maintenant, il faudra le temps qu'il s'organise avant que les premières victimes ne puissent bénéficier d'indemnisation
00:20:20et c'est la raison pour laquelle nous inscrivons une somme de 10 millions d'euros.
00:20:25Je répète que pour les années suivantes, les sommes seront appelées à être beaucoup plus importantes.
00:20:32Mais Sanofi refuse d'alimenter le fonds d'indemnisation des familles.
00:20:36Le laboratoire ne s'estime ni responsable, ni coupable.
00:20:44Pourquoi Sanofi refuse de contribuer à l'indemnisation des victimes via ce dispositif qui a pourtant été voté à l'Assemblée nationale ?
00:20:53Alors bien sûr, la douleur des victimes, la douleur des patientes qui ont eu des enfants sous l'utilisation de valproate
00:21:00et des malformations et des troubles de développement.
00:21:06On comprend cette douleur et que je pense qu'il faut accompagner, évidemment qu'il faut accompagner ces familles-là.
00:21:14Nous demandons à ce que nos explications soient prises en compte et donc on se retourne auprès des tribunaux
00:21:21pour permettre d'exposer les raisons pour lesquelles nous pensons que la responsabilité n'est pas celle de Sanofi.
00:21:28Et donc pour bien vous comprendre, Sanofi ne souhaite pas indemniser les victimes, c'est à l'État de le faire.
00:21:32Et donc Sanofi souhaite avoir une instance dans laquelle on peut expliquer en toute transparence les efforts que nous avons mis en place,
00:21:41les procédures que nous avons mis en place pour s'assurer que ces informations soient bien transmises.
00:21:46Et qu'après, la juridiction décidera des responsabilités.
00:21:51Il faudra également deux ans de bataille pour que Marine Martin obtienne qu'un logo soit apposé sur les boîtes de dépakine comme sur les bouteilles d'alcool.
00:22:02Ça existe pour le tabac à l'alcool, je ne vois pas pourquoi ça n'existerait pas pour les médicaments.
00:22:09Et pour la dépakine, ce serait particulièrement indiqué.
00:22:12Mais là, ça a été dur, la négociation, j'ai bien négocié que ce soit en couleur.
00:22:15Donc tout ça, je l'ai fait inscrire dans la loi, la couleur, interdit de reproduire en noir et blanc, etc.
00:22:20Et donc, c'est comme ça que sont nés les pictogrammes sur les boîtes de médicaments.
00:22:25Et d'abord, le triangle pour la dépakine.
00:22:27Et puis après, on imposera véritablement le rond barré.
00:22:30Et c'est ce que j'ai fini par obtenir en 2017.
00:22:33Donc aujourd'hui, je suis très fière de mon pictogramme.
00:22:36Et je l'ai porté jusqu'en Europe, puisque au niveau de l'Agence Européenne du Médicament,
00:22:42on a fait imposer aussi cette signalétique.
00:22:45L'Agence Européenne du Médicament étudie notamment l'évolution des effets indésirables des médicaments sur les patients.
00:22:54Marine Martin réussit à être entendue par les experts de l'Agence.
00:23:15Donc ça, c'est une grande victoire.
00:23:36C'est quand même surprenant que ce soit à vous, directrice d'une association, d'imposer ce pictogramme.
00:23:43Comme je dis, si je ne le fais pas, personne ne va le faire.
00:23:45Les industriels, ils n'ont pas intérêt de voir fleurir des pictogrammes pour réduire la consommation.
00:23:49Comment réagit Sanofi ?
00:23:51Voilà, ils sont obligés de subir.
00:23:53Mais je pense que je sais, c'est des fois ce qui me réjouit un peu.
00:23:55C'est-à-dire que même si un jour je ne suis pas indemnisée pour mes enfants,
00:23:59je sais que je leur ai fait plus de tort avec ce pictogramme,
00:24:02en dénonçant un scandale sanitaire, en les associant à ce scandale,
00:24:06que tout l'argent qu'ils pourraient me donner.
00:24:07Ils m'ont méprisé, comme ils méprisent souvent les victimes,
00:24:10en disant, qui c'est cette femme du fin fond des Pyrénées-Orientales, là ?
00:24:14La puissance des laboratoires, elle est réelle.
00:24:17Et on ne peut pas du tout la contester.
00:24:20Elle est surtout fantasmée et utilisée, instrumentalisée par les laboratoires,
00:24:25contre les victimes, pour faire croire que les victimes ne pourront jamais gagner.
00:24:29Et l'histoire montre, au contraire, qu'on finit par y arriver.
00:24:33Alors on y arrive à un prix d'une énergie énorme,
00:24:38au prix de batailles terribles, mais on peut y arriver.
00:24:43Pour vendre toujours plus de médicaments,
00:24:46certains laboratoires minimisent considérablement les risques d'addiction à leur traitement.
00:24:53Un scandale majeur rappelle celui des fabricants de cigarettes.
00:24:59Dans les années 90, aux Etats-Unis,
00:25:01les grands industriels du tabac avaient menti,
00:25:04en affirmant que la nicotine n'était pas addictive.
00:25:09Je crois que la nicotine n'est pas addictive, oui.
00:25:12Je crois que la nicotine n'est pas addictive.
00:25:15Je crois que la nicotine n'est pas addictive.
00:25:19Ils savaient, mais l'avaient caché.
00:25:20Ils ont été condamnés à une amende record de 246 milliards de dollars.
00:25:29Aujourd'hui, certains laboratoires pharmaceutiques sont accusés d'avoir précipité des millions d'Américains
00:25:35dans l'addiction à de puissants médicaments antidouleurs, les opioïdes.
00:25:40Alors que les laboratoires connaissaient leurs graves effets addictifs,
00:25:44une crise sanitaire majeure frappe l'Amérique du Nord.
00:25:49Ils ont laissé le génie sortir de la lampe et ouvert la boîte de Pandore.
00:25:52Les firmes pharmaceutiques qui fabriquent les opioïdes
00:25:59disaient qu'ils étaient extrêmement efficaces,
00:26:02qu'ils n'étaient pas addictifs et qu'ils étaient sûrs.
00:26:05C'est addictif.
00:26:08Les laboratoires pharmaceutiques ont isolé la partie de l'opium qui est la plus addictive.
00:26:18Ils en ont fait des pilules, en masse,
00:26:20et elles se sont retrouvées dans toutes les armoires à pharmacie des Etats-Unis.
00:26:25Les laboratoires pharmaceutiques transmettent des informations aux médecins
00:26:29pour les convaincre d'exercer la médecine au mieux de leurs intérêts.
00:26:35Le problème, c'est que les médecins ne sont pas suffisamment armés pour déceler ces ruses.
00:26:44La médecine fondée sur les faits et la médecine d'excellence
00:26:48sont souvent bien plus influencés par les intérêts des entreprises pharmaceutiques
00:26:53que par la santé des patients.
00:26:57Nous faisons face à une distribution massive d'opium.
00:27:02Dérivés de l'opium,
00:27:04ces produits de synthèse sont 100 fois plus puissants que la morphine.
00:27:08Pendant des années,
00:27:09de nombreux médecins américains ont prescrit massivement ces antidouleurs,
00:27:13poussés par les laboratoires,
00:27:15mais aussi pour satisfaire leurs patients.
00:27:18J'ai saisi un tribunal fédéral
00:27:21pour qu'il ordonne au gouvernement fédéral
00:27:24de me remettre toutes les données possibles
00:27:27sur le volume de pilules.
00:27:31Le nombre de pilules est ahurissant.
00:27:34Le comté de ma ville natale, Huntington, en Virginie occidentale,
00:27:41compte 100 000 habitants.
00:27:4310 millions de comprimés y sont vendus chaque année depuis 10 ans.
00:27:49Les firmes ont promu agressivement ces opioïdes
00:27:53alors qu'ils connaissaient leurs effets addictifs.
00:27:55Plus de 100 personnes meurent chaque jour
00:28:00d'une overdose d'opioïdes aux Etats-Unis.
00:28:05Des victimes perdent connaissance sur la voie publique.
00:28:14Les pompiers et les services sociaux sont débordés
00:28:16par les arrêts cardiaques
00:28:17dus aux overdoses de médicaments opioïdes.
00:28:20Filmés par les secours ou la police,
00:28:27les malades sur ces images vont reprendre connaissance
00:28:30et s'en sortir.
00:28:32Ces séquences sont largement diffusées
00:28:34pour alerter la population
00:28:36sur les dangers de ces traitements.
00:28:41Le fléau atteint toutes les catégories sociales.
00:28:45Dans ma communauté,
00:28:51il n'y a pas une seule famille
00:28:52épargnée par cette tragédie.
00:28:55Dans certains Etats américains,
00:28:58l'usage disproportionné des médicaments opioïdes
00:29:00fait davantage de victimes
00:29:02que les accidents de la route
00:29:03et que les morts par homicide réunis.
00:29:07Pour les victimes et leurs familles,
00:29:10le temps est venu de demander des comptes
00:29:11à l'industrie pharmaceutique.
00:29:13Plus de 2000 procédures judiciaires
00:29:17sont en cours sur tout le territoire américain.
00:29:21Les fabricants ont une responsabilité.
00:29:25Si une entreprise fabrique une voiture
00:29:27dont les freins ne fonctionnent pas,
00:29:28pas uniquement sur une seule voiture,
00:29:30mais sur toutes les voitures,
00:29:32alors cette entreprise devra probablement
00:29:35en endosser la responsabilité.
00:29:37Nous avons des lois strictes
00:29:38sur la responsabilité d'une entreprise
00:29:40lorsqu'elle a causé de tels dommages.
00:29:43Les laboratoires ont enfreint la loi
00:29:45à de nombreuses reprises.
00:29:49De grands laboratoires sont poursuivis
00:29:51devant la justice.
00:29:53Purdue Pharma, Allergan, Johnson & Johnson.
00:29:55Dans le Midwest, l'Oklahoma est le premier état
00:30:02à porter plainte contre plusieurs laboratoires
00:30:05pour les ravages des opioïdes dans la population.
00:30:11Mike Hunter, l'avocat général de l'état d'Oklahoma,
00:30:15veut faire condamner le géant Johnson & Johnson
00:30:18à rembourser les frais de santé
00:30:20engagés par l'état pour soigner les victimes.
00:30:22Ce procès n'est pas anecdotique.
00:30:29Il s'agit des dommages
00:30:30que l'état va devoir payer pendant longtemps.
00:30:34L'industrie a présenté, commercialisé
00:30:36et propagé une fausse image des opioïdes.
00:30:39Ils ont fourni des produits
00:30:40à plusieurs laboratoires.
00:30:42Nos preuves montreront clairement
00:30:43et irréfutablement
00:30:44que ces entreprises ont collaboré ensemble
00:30:46et que Johnson & Johnson
00:30:49est dans cette affaire jusqu'au cou.
00:30:53Le procès vise précisément
00:30:55les pratiques marketing de Johnson & Johnson
00:30:58pour encourager les médecins
00:30:59à surprescrire ces analgésiques
00:31:02hautement addictifs.
00:31:04Bienvenue, asseyez-vous.
00:31:12Voici l'affaire de l'état d'Oklahoma.
00:31:16L'avocat général Mike Hunter
00:31:18contre Johnson & Johnson.
00:31:20Mon rôle en tant qu'officier
00:31:25en chef de l'État
00:31:26est de défendre les intérêts
00:31:28des 4 millions de citoyens
00:31:29qui vivent dans notre État.
00:31:33Je les représente aujourd'hui
00:31:34en tant qu'avocat
00:31:35pour vous présenter des preuves
00:31:36concernant la pire crise
00:31:38de santé publique d'origine humaine
00:31:39de notre pays
00:31:40et de notre État.
00:31:45L'épidémie de prescription d'opioïdes.
00:31:48Votre honneur,
00:31:49je n'ai qu'un seul mot à dire.
00:31:52Avidité.
00:31:55Votre honneur,
00:31:58rendre justice
00:31:58aux habitants de l'Oklahoma
00:32:00signifie que les accusés
00:32:02doivent réparer
00:32:03les terribles dégâts
00:32:04qu'ils ont causés
00:32:05dans notre État
00:32:06et cela,
00:32:08quel qu'en soit le prix.
00:32:13L'avocat général de l'État
00:32:14et son équipe
00:32:15ont scrupuleusement analysé
00:32:17les données internes
00:32:18du laboratoire
00:32:19Johnson & Johnson.
00:32:21Les livraisons ont augmenté
00:32:23et puis quelque chose
00:32:24s'est produit.
00:32:25Des gens ont commencé
00:32:26à mourir.
00:32:26Pourquoi ?
00:32:27Car si vous prescrivez
00:32:28trop d'opioïdes,
00:32:29des gens meurent.
00:32:30Johnson & Johnson
00:32:32connaissait cette information
00:32:33avant même
00:32:34la commercialisation
00:32:35de leurs médicaments
00:32:35ici dans l'Oklahoma.
00:32:37Si vous prescrivez
00:32:38trop d'opioïdes,
00:32:39des gens vont mourir.
00:32:40La parole est à la défense.
00:32:44Pour notre défense
00:32:47dans ce procès,
00:32:49nous n'allons nous moquer
00:32:51de personne.
00:32:52Nous disons que les faits
00:32:55sont têtus.
00:32:59Vous dites que nous avons
00:33:00trompé les gens
00:33:01en disant que les opioïdes
00:33:04sont rarement addictifs.
00:33:05Vous l'avez entendu.
00:33:12L'agence du médicament
00:33:14du gouvernement fédéral
00:33:15dit qu'ils causent
00:33:17rarement une addiction.
00:33:21Durant deux mois,
00:33:22vont se succéder
00:33:23des dizaines de témoins
00:33:25pour dénoncer
00:33:26les pratiques commerciales
00:33:27trompeuses du laboratoire.
00:33:30Pour la première fois,
00:33:32un juge a condamné
00:33:33l'une des entreprises
00:33:34les plus connues du monde
00:33:35Johnson & Johnson
00:33:37a payé plus d'un demi-milliard
00:33:39de dollars
00:33:39pour avoir mis en danger
00:33:41la santé et la sécurité
00:33:42de milliers d'habitants
00:33:44de l'Oklahoma.
00:33:45Cette décision déterminante
00:33:47pourrait avoir un impact
00:33:49sur de plus importants
00:33:50procès à venir.
00:33:52Le laboratoire Johnson & Johnson
00:33:54annonce immédiatement
00:33:56faire appel.
00:33:57Cette première victoire
00:33:59de l'État de l'Oklahoma
00:34:00crée un précédent majeur
00:34:02pour les 2000 procédures
00:34:03en cours aux États-Unis
00:34:05contre les laboratoires
00:34:06producteurs d'opioïdes.
00:34:11Les services sociaux
00:34:12estiment qu'il faudra 20 ans
00:34:15pour soigner les patients accros
00:34:16et résorber les effets
00:34:18de l'épidémie.
00:34:19Tous les laboratoires pharmaceutiques
00:34:31recherchent ce qu'ils appellent
00:34:32un blockbuster,
00:34:34un médicament
00:34:35qui soigne des maladies
00:34:36très répandues
00:34:37pour le distribuer
00:34:39sur le marché mondial.
00:34:40Pour préserver leur exclusivité,
00:34:46les laboratoires mettent au point
00:34:47de puissantes stratégies.
00:34:50C'est l'histoire
00:34:50d'un traitement révolutionnaire
00:34:53pour la DMLA,
00:34:55la dégénérescence maculaire
00:34:56liée à l'âge.
00:34:58Une maladie de l'œil
00:34:59gravement invalidante
00:35:01jusqu'à la cécité.
00:35:03Des millions de patients
00:35:04sont touchés dans le monde.
00:35:05C'est aussi l'histoire
00:35:08d'une compétition
00:35:09entre deux médicaments
00:35:11parfaitement équivalents,
00:35:13l'un coûtant
00:35:1440 fois plus cher
00:35:15que l'autre.
00:35:17Un intense lobbying
00:35:18a permis à Novartis
00:35:20d'imposer le médicament
00:35:21le plus cher
00:35:22face au traitement
00:35:23du laboratoire Roche.
00:35:27Quand on m'a annoncé
00:35:29le diagnostic de ma maladie,
00:35:31ça a été un choc.
00:35:32Je ne savais pas
00:35:33ce qui allait m'arriver.
00:35:34C'est une maladie effrayante.
00:35:37J'ai eu peur
00:35:37de devenir aveugle.
00:35:39Je suis infirmière
00:35:40à l'hôpital
00:35:40et j'ai remarqué
00:35:42que lorsque je préparais
00:35:43les comprimés
00:35:44des médicaments,
00:35:45je n'arrivais plus
00:35:46à lire les noms
00:35:46sur les boîtes.
00:35:48Cela devenait dangereux
00:35:49pour les patients.
00:35:50Je ne pouvais plus
00:35:51exercer mon métier.
00:35:53Je suis allée voir
00:35:54un ophtalmologue.
00:35:55Il a diagnostiqué
00:35:56une DMLA.
00:36:00Jusqu'en 2005,
00:36:01il n'y avait pas
00:36:02de traitement efficace,
00:36:03de nombreux patients
00:36:05perdaient la vue.
00:36:06Si en cachant
00:36:07l'un de vos yeux,
00:36:08vous voyez les lignes droites
00:36:09se déformer
00:36:10ou si une tâche
00:36:11assombrit progressivement
00:36:12le centre de votre vision,
00:36:14ce sont peut-être
00:36:15les symptômes
00:36:15d'une DMLA.
00:36:17Parlez-en vite
00:36:18à un ophtalmologiste.
00:36:19DMLA,
00:36:20n'attendez pas.
00:36:21Puis est arrivé
00:36:22ce nouveau médicament
00:36:23qui ralentit considérablement
00:36:25la progression
00:36:26de la maladie.
00:36:27un liquide
00:36:30directement injecté
00:36:31dans l'œil.
00:36:36On m'a fait
00:36:37des injections
00:36:38dans les yeux.
00:36:39Oui,
00:36:40dans les yeux.
00:36:44Au début,
00:36:44j'ai trouvé cela
00:36:45assez effrayant.
00:36:48Mais il faut dire
00:36:50que ces injections
00:36:51m'ont aidé.
00:36:51C'est une maladie chronique
00:36:59qui ne se soigne pas,
00:37:01malheureusement.
00:37:03Pour l'instant,
00:37:03je vais bien,
00:37:05mais cela pourrait
00:37:05empirer.
00:37:09Le nouveau médicament
00:37:10a été mis au point
00:37:11aux Etats-Unis.
00:37:13Il va révolutionner
00:37:14le traitement
00:37:14de la maladie.
00:37:16Plusieurs grands
00:37:17ophtalmologues
00:37:18lancent des essais cliniques
00:37:20sur des milliers
00:37:21de patients
00:37:21qu'ils n'arrivaient
00:37:22pas à soigner.
00:37:24C'est la première cause
00:37:26de ces cités permanentes
00:37:27chez les personnes
00:37:28de plus de 65 ans,
00:37:29voire la première maladie
00:37:31au monde.
00:37:34L'industrie pharmaceutique
00:37:37joue un rôle essentiel
00:37:38dans la recherche
00:37:38et le développement
00:37:39de nouveaux traitements.
00:37:41Les laboratoires
00:37:42investissent
00:37:42beaucoup de temps
00:37:43et d'argent.
00:37:45Néanmoins,
00:37:46ces entreprises
00:37:47sont à la recherche
00:37:48de profits.
00:37:50Leur objectif
00:37:51est de trouver
00:37:51ce qu'ils appellent
00:37:52le médicament
00:37:53blockbuster,
00:37:55un produit
00:37:55qu'ils pourront
00:37:56vendre massivement
00:37:57à une large population.
00:38:00C'est pour cette raison
00:38:00qu'il y a autant
00:38:01de recherches
00:38:02sur la DMLA.
00:38:03C'est une maladie
00:38:04très répandue.
00:38:11Ce premier traitement
00:38:13est développé
00:38:14par le laboratoire
00:38:15américain Genentech.
00:38:16Il porte le nom
00:38:20d'Avastin.
00:38:22Tout juste
00:38:23autorisé
00:38:23par les autorités
00:38:24de santé américaines,
00:38:26le médicament
00:38:27est officiellement
00:38:27utilisé
00:38:28pour soigner
00:38:29le cancer
00:38:29du côlon.
00:38:31Un professeur
00:38:32américain
00:38:33découvre
00:38:34un peu par hasard
00:38:35que ses propriétés
00:38:36retardent considérablement
00:38:38le développement
00:38:39de la DMLA
00:38:40et améliorent
00:38:41la vue.
00:38:41Phil Rosenfeld
00:38:45a commencé
00:38:46à expérimenter
00:38:47l'Avastin
00:38:48par voie intraveineuse
00:38:49pour le traitement
00:38:50de la DMLA.
00:38:53Le laboratoire
00:38:55pharmaceutique
00:38:56n'avait mené
00:38:56aucune étude
00:38:57sur ce sujet.
00:38:59C'est donc
00:38:59ce professeur
00:39:00et un docteur
00:39:01en pharmacie
00:39:01qui ont décidé
00:39:02de travailler
00:39:03tous les deux
00:39:04jusqu'à obtenir
00:39:05le dosage
00:39:05d'Avastin
00:39:06idéal
00:39:06à injecter
00:39:07dans l'œil.
00:39:08Le traitement
00:39:12fonctionne
00:39:13parfaitement.
00:39:17Le professeur
00:39:18Rosenfeld
00:39:18présente
00:39:19ses résultats
00:39:20lors de la conférence
00:39:21annuelle
00:39:21d'ophtalmologie.
00:39:26Nous n'avions
00:39:28jamais vu
00:39:28de tels résultats.
00:39:30Tous les spécialistes
00:39:31de la rétine
00:39:31étaient à cette conférence.
00:39:33On est tombés
00:39:33de nos chaises.
00:39:35Pour la première fois,
00:39:36nous constations
00:39:36une amélioration
00:39:37de l'acuité visuelle
00:39:38alors qu'avec
00:39:39tous les traitements
00:39:40précédents,
00:39:41la vision déclinait
00:39:42après un an.
00:39:46Et comme
00:39:47l'Avastin
00:39:48est destiné
00:39:50à traiter
00:39:51le cancer,
00:39:53il est très bon marché.
00:39:55Pendant les 6
00:39:56à 12 premiers mois,
00:39:57tous les médecins
00:39:58dans le monde
00:39:58utilisaient l'Avastin
00:39:59pour traiter ses patients
00:40:00jusqu'à l'arrivée
00:40:01de l'Ucentis.
00:40:04Simultanément,
00:40:05le même laboratoire
00:40:06américain Genentech
00:40:07qui fabrique Avastin
00:40:09pour le cancer,
00:40:10développe avec ses chercheurs
00:40:12en ophtalmologie
00:40:13un nouveau médicament
00:40:14spécialement dédié
00:40:16à la DMLA,
00:40:18le Lusantis.
00:40:18Toutes les études
00:40:29démontrent que
00:40:30les deux traitements
00:40:31sont absolument similaires.
00:40:33Mais le nouveau
00:40:34traitement Lusantis
00:40:35est beaucoup,
00:40:37beaucoup plus cher.
00:40:38une injection d'Avastin
00:40:39une injection d'Avastin
00:40:40revient à environ
00:40:4150 dollars.
00:40:43Puis le Lusantis
00:40:44arrive sur le marché
00:40:45et chaque dose
00:40:46injectée dans l'œil
00:40:47coûte 2000 dollars.
00:40:50Dans le même temps,
00:40:51en France,
00:40:52des pharmaciens
00:40:53dans les hôpitaux
00:40:54s'intéressent eux aussi
00:40:55au traitement
00:40:56pour l'œil
00:40:57avec ce médicament
00:40:58initialement utilisé
00:41:00pour le cancer.
00:41:01Aux Etats-Unis,
00:41:03les premières publications
00:41:05apparaissent
00:41:05montrant que
00:41:07des injections
00:41:08dans l'œil
00:41:09d'Avastin
00:41:10faisaient
00:41:12des miracles
00:41:13et donc nous avons
00:41:14très vite proposé
00:41:15cette injection
00:41:17aux ophtalmologistes.
00:41:19Le médicament
00:41:20Avastin
00:41:21pour le cancer
00:41:22est dosé en flacons.
00:41:24Pour être injecté
00:41:24dans l'œil,
00:41:25les pharmaciens
00:41:26le reconditionnent
00:41:27avec une plus faible dose
00:41:29dans des seringues.
00:41:31On va partir
00:41:32d'un flacon
00:41:33de 16 millilitres,
00:41:35donc c'est quand même
00:41:35un petit flacon
00:41:36dans lequel
00:41:37on va aller prélever
00:41:38les différentes seringues
00:41:40pour faire un lot
00:41:41de par exemple
00:41:4250 seringues
00:41:44destinées
00:41:44à l'injection
00:41:45ophtalmologique.
00:41:51C'est un reconditionnement
00:41:53d'une forme injectable
00:41:54en flacon
00:41:55en une forme seringue.
00:42:01Ce qui est important,
00:42:04c'est vraiment
00:42:04d'avoir toutes les assurances
00:42:06pour la stérilité
00:42:07de cette préparation
00:42:08avant de la délivrer
00:42:09au médecin
00:42:10qui va l'injecter
00:42:10au patient,
00:42:11donc à l'ophtalmologue.
00:42:12Il faut absolument
00:42:12que la seringue
00:42:14qu'on prépare
00:42:14soit stérile.
00:42:15Ça nous a permis
00:42:20de réaliser
00:42:21des seringues
00:42:22à un coût
00:42:22de l'ordre
00:42:24de 50 euros
00:42:25parce qu'il faut
00:42:26évidemment compter
00:42:27les coûts de personnel,
00:42:29le coût des contrôles,
00:42:30l'amortissement
00:42:32des locaux
00:42:32et du matériel.
00:42:34On était donc
00:42:3520 fois moins coûteux
00:42:37que le prix
00:42:38à l'époque
00:42:39du Lucentis
00:42:40qui était aux alentours
00:42:41de 1 000 euros
00:42:42la seringue.
00:42:42Le nouveau traitement
00:42:45pour l'œil Lucentis
00:42:47en Europe
00:42:47est cher
00:42:48mais tout de même
00:42:50deux fois moins cher
00:42:51qu'aux Etats-Unis
00:42:51où les prix
00:42:52ne sont pas encadrés.
00:42:55C'est le laboratoire
00:42:57suisse Novartis
00:42:58qui le commercialise.
00:43:00Le traitement Avastin
00:43:01est vendu
00:43:02par l'autre
00:43:03grand laboratoire suisse
00:43:04Roche
00:43:05qui a racheté
00:43:06l'américain Genentech.
00:43:10Les laboratoires
00:43:11Novartis
00:43:12et Roche
00:43:13notamment Roche
00:43:14surtout
00:43:14n'aiment pas
00:43:17tellement
00:43:17qu'on utilise
00:43:19leurs médicaments
00:43:20qui vendent
00:43:21dans des indications
00:43:22précises
00:43:22n'aiment pas du tout
00:43:23que nous derrière
00:43:25on les utilise
00:43:26pour d'autres
00:43:27types d'indications
00:43:29oui qu'on en fasse
00:43:30un autre usage
00:43:31en fait
00:43:31que celui
00:43:32qui était destiné
00:43:32initialement.
00:43:34Les trois firmes
00:43:35la firme américaine
00:43:36et les deux firmes suisses
00:43:38se sont partagées
00:43:39le monde
00:43:40en quelque sorte
00:43:40dans le cadre
00:43:41d'un Yalta
00:43:41pharmaceutique.
00:43:44Roche
00:43:44s'occupe
00:43:45d'Avastin
00:43:46en particulier
00:43:47en Europe
00:43:48et Novartis
00:43:49occupe
00:43:50avec Lucentis
00:43:51l'ensemble
00:43:51du marché
00:43:52de l'ophtalmologie
00:43:53et ces trois firmes
00:43:55ont au total
00:43:55un chiffre d'affaires
00:43:56pour l'ensemble
00:43:57des indications
00:43:58que ce soit
00:43:59la cancérologie
00:44:00ou l'ophtalmologie
00:44:01qui oscillent
00:44:02d'une année
00:44:03à l'autre
00:44:03entre 10
00:44:04et 12 milliards
00:44:05de dollars.
00:44:08Novartis
00:44:08et Roche
00:44:09vont ainsi
00:44:10s'organiser
00:44:11pour ne pas
00:44:12laisser les médecins
00:44:12utiliser l'Avastin
00:44:14dans l'œil
00:44:14mais les convaincre
00:44:16d'injecter
00:44:17le Lucentis.
00:44:20Est-ce que vous avez
00:44:21reçu ici
00:44:22dans ce service
00:44:22la visite
00:44:23des laboratoires
00:44:24Novartis
00:44:25ou des laboratoires Roche
00:44:26au moment où vous
00:44:27vous étiez vraiment...
00:44:28A ce sujet-là ?
00:44:29Absolument.
00:44:29Ils sont venus
00:44:30directement nous parler
00:44:31pour nous dire
00:44:32qu'ils ne comprenaient pas
00:44:33pourquoi on utilisait
00:44:35l'Avastin
00:44:36médicament indiqué
00:44:38en cancérologie
00:44:39pour faire des préparations
00:44:40pour l'ophtalmologie.
00:44:42J'ai eu
00:44:42un rendez-vous
00:44:43effectivement
00:44:44avec le
00:44:45directeur général
00:44:47du laboratoire
00:44:48Novartis
00:44:49qui est venu me voir
00:44:51à l'Hôtel Dieu
00:44:51pour me demander
00:44:52pour quelle raison
00:44:53j'insistais
00:44:54tant à faire
00:44:55ces seringues
00:44:57d'Avastin
00:44:58alors que
00:44:58Lucentis
00:44:59avait une autorisation
00:45:00de mise sur le marché
00:45:01donc je lui ai
00:45:02expliqué
00:45:03mes motivations
00:45:04qui sont des motivations
00:45:05de services publics
00:45:07de services aux patients
00:45:09d'économie
00:45:10également
00:45:10de la santé.
00:45:12Le contenu
00:45:12de la conversation
00:45:13était essentiellement
00:45:16orienté
00:45:17sur la mise
00:45:17en danger
00:45:18des patients.
00:45:19La difficulté
00:45:20me disait-il
00:45:21était que
00:45:22vous n'êtes pas
00:45:24dans l'autorisation
00:45:25de mise sur le marché
00:45:26et
00:45:27nous avons
00:45:28une conversation
00:45:29courtoise
00:45:30et nous
00:45:32nous sommes
00:45:32quittés
00:45:32sur la base
00:45:33de
00:45:34vous restez
00:45:34sur votre position
00:45:36tant pis
00:45:37pour vous
00:45:37me disait-il
00:45:38et puis
00:45:38vous restez
00:45:40sur la vôtre
00:45:41probablement
00:45:42tant mieux
00:45:42pour vous
00:45:43mais
00:45:43voilà
00:45:45on s'en tient là.
00:45:46Vous avez pris ça
00:45:47pour une forme
00:45:47de pression
00:45:48de Novartis ?
00:45:50Si c'était
00:45:51une pression
00:45:51c'était une pression
00:45:53qui n'était pas
00:45:54sortie de menace.
00:45:55Toutes les études
00:46:00internationales
00:46:00démontrant
00:46:01la parfaite
00:46:02équivalence
00:46:03entre les deux
00:46:03traitements
00:46:04les pharmaciens
00:46:05hospitaliers
00:46:06privilégient
00:46:07logiquement
00:46:08le traitement
00:46:09le moins cher.
00:46:12Annuellement
00:46:12nous avions
00:46:13une activité
00:46:14de l'ordre
00:46:14de 2000 injections
00:46:152000 injections
00:46:17qui permettaient
00:46:18au fond
00:46:18à l'assurance maladie
00:46:19de faire une économie
00:46:21de l'ordre
00:46:21de 2 millions
00:46:22d'euros.
00:46:24Et 2 millions
00:46:24d'euros
00:46:25c'est un chiffre
00:46:26qu'il faut avoir
00:46:27en tête
00:46:28pour se rendre
00:46:29compte
00:46:30que chaque année
00:46:30on pouvait
00:46:32en gros
00:46:32créer 50 emplois
00:46:34dans l'hôpital
00:46:3550 emplois
00:46:36d'infirmières
00:46:36et 50 emplois
00:46:38d'infirmières
00:46:39dans un hôpital
00:46:40c'est pas négligeable.
00:46:42Les deux laboratoires
00:46:44Roche
00:46:44et Novartis
00:46:45lancent une longue
00:46:46procédure juridique
00:46:48contre l'état français.
00:46:50La manœuvre
00:46:50n'aboutira pas.
00:46:52Le médicament
00:46:53Avastin pour l'œil
00:46:54est finalement
00:46:55autorisé en France.
00:46:57Mais trop tard.
00:47:00La difficulté
00:47:02aujourd'hui
00:47:02pour le système
00:47:03de santé
00:47:03c'est d'avoir
00:47:04mis en place
00:47:05un ensemble
00:47:06qui est tellement
00:47:07complexe
00:47:08à gérer
00:47:09pour les
00:47:10ophtalmologistes
00:47:12qu'au fond
00:47:13tout le monde
00:47:14a abandonné.
00:47:15Ainsi,
00:47:18la quasi-totalité
00:47:19des patients
00:47:20traités
00:47:20pour la DMLA
00:47:21reçoit
00:47:23une injection
00:47:23des produits
00:47:24les plus coûteux
00:47:25dont celui
00:47:26de Novartis.
00:47:32En Italie,
00:47:33les deux groupes
00:47:34Roche
00:47:35et Novartis
00:47:36ont été condamnés
00:47:37à une amende
00:47:37record
00:47:38de 180 millions
00:47:39d'euros
00:47:40pour entente
00:47:41illicite
00:47:41sur le prix
00:47:42de ces deux
00:47:43médicaments.
00:47:44En France,
00:47:46une procédure
00:47:46de l'autorité
00:47:47de la concurrence
00:47:48est en cours
00:47:48contre les deux
00:47:49laboratoires.
00:47:50Certains membres
00:47:55de la communauté
00:47:56ophtalmologique
00:47:56apprécient vraiment
00:47:58le Lucentis.
00:47:58C'est un bon médicament.
00:48:02J'ai le plus grand
00:48:03respect pour le rôle
00:48:04que joue l'industrie
00:48:04pharmaceutique
00:48:05dans notre domaine.
00:48:07Aucun bon traitement
00:48:08ne peut se faire
00:48:09sans un partenaire
00:48:10de l'industrie
00:48:10pharmaceutique.
00:48:14Pourtant,
00:48:14selon moi,
00:48:15surtout lorsqu'il existe
00:48:16un autre produit
00:48:17disruptif
00:48:18à 50 dollars,
00:48:19tout aussi efficace,
00:48:20le prix actuel
00:48:23est absolument
00:48:23indéfendable.
00:48:27On estime
00:48:29que les Etats-Unis
00:48:29économiseraient
00:48:303 milliards de dollars
00:48:31chaque année
00:48:32en utilisant
00:48:33Avastin
00:48:33à la place
00:48:34de Lucentis.
00:48:37La situation
00:48:38française
00:48:38est différente.
00:48:39Les patients
00:48:40doivent acheter
00:48:41eux-mêmes
00:48:41les seringues
00:48:42de Lucentis
00:48:43dans une pharmacie.
00:48:45Et c'est la sécurité
00:48:46sociale
00:48:46qui rembourse
00:48:47l'intégralité
00:48:48du prix.
00:48:48Les hôpitaux
00:48:50aujourd'hui
00:48:51ne voient pas
00:48:53sur leur budget
00:48:55le coût
00:48:56de l'utilisation
00:48:57de ces seringues
00:48:58de Lucentis
00:48:59puisque ce sont
00:49:00des malades
00:49:01qui achètent en ville
00:49:02la seringue
00:49:03et qui viennent
00:49:04se la faire injecter
00:49:05à l'hôpital.
00:49:06La seule douleur
00:49:07en quelque sorte
00:49:08ressentie,
00:49:09c'est pour l'assurance maladie.
00:49:11Entre 750 millions
00:49:12millions et un milliard
00:49:15d'euros
00:49:15seront dépensés
00:49:16en 2019
00:49:17pour ce médicament.
00:49:19Pourquoi
00:49:19les autorités
00:49:20de santé
00:49:20n'imposent-elles pas
00:49:21à Roche
00:49:22de fabriquer
00:49:23des seringues
00:49:24d'Avastin
00:49:25pour soigner
00:49:25la DML ?
00:49:26Il faudra
00:49:28leur demander.
00:49:29L'industrie pharmaceutique
00:49:33est maîtresse
00:49:33de son destin.
00:49:35Laboratoire Roche,
00:49:37Laboratoire Novartis,
00:49:38ce sont des industriels
00:49:40qui sont implantés
00:49:43dans un pays ami
00:49:44et voisin,
00:49:45la Suisse,
00:49:46mais qui n'est
00:49:46ni la France
00:49:48ni l'Union européenne.
00:49:49C'est-à-dire que
00:49:51cette industrie
00:49:51pharmaceutique suisse
00:49:53qui est remarquable
00:49:54du point de vue
00:49:55de sa capacité
00:49:57à innover,
00:49:58à produire
00:49:58des médicaments
00:49:59utiles à la santé.
00:50:01Cette industrie
00:50:01a une puissance
00:50:03comparable
00:50:04à celle
00:50:05d'un État.
00:50:07Et donc,
00:50:08la France
00:50:09est parfaitement
00:50:10inopérante
00:50:10à modifier
00:50:12telle ou telle
00:50:12décision
00:50:13de ce type
00:50:14d'industriel.
00:50:16Selon la réglementation,
00:50:18l'Agence française
00:50:19du médicament
00:50:20ne peut pas contraindre
00:50:21le laboratoire Roche
00:50:23à fabriquer
00:50:24des seringues
00:50:24d'Avastin
00:50:25pour le traitement
00:50:26de la DML ?
00:50:27En dépit de deux mois
00:50:30de négociation,
00:50:31la multinationale Roche
00:50:33refuse l'interview.
00:50:35Son service juridique
00:50:36nous écrit
00:50:37qu'ils ne souhaitent
00:50:38ni prendre la parole
00:50:39ni être filmés
00:50:40sur ce sujet,
00:50:41mais qu'ils sont disposés
00:50:43à répondre
00:50:44par écrit aux questions.
00:50:46Pourquoi le laboratoire
00:50:48ne fabrique donc pas
00:50:49de seringue d'Avastin
00:50:50pour le traitement
00:50:51de la DML ?
00:50:53Réponse.
00:50:54Roche développe
00:50:55des médicaments
00:50:56uniquement
00:50:57pour des besoins
00:50:57médicaux non couverts
00:50:59par des médicaments
00:51:00existants,
00:51:01là où il n'existe
00:51:02pas d'alternative
00:51:03thérapeutique.
00:51:07Roche refuse donc.
00:51:09Et les pouvoirs publics
00:51:10sont bien impuissants.
00:51:13Le lobbying
00:51:13a payé.
00:51:15Le traitement
00:51:15le moins cher
00:51:16est très peu utilisé.
00:51:17Le grand vainqueur
00:51:20est le laboratoire
00:51:21Novartis,
00:51:23qui par ailleurs
00:51:23détient 33,33%
00:51:26du laboratoire Roche.
00:51:35Aux Etats-Unis,
00:51:36le prix des médicaments
00:51:37est totalement libre.
00:51:39Dès l'accord de mise
00:51:40sur le marché
00:51:40par la FDA,
00:51:42l'Agence américaine
00:51:43du médicament,
00:51:44les firmes pharmaceutiques
00:51:45imposent leur prix.
00:51:48Les élus,
00:51:50démocrates comme républicains,
00:51:52ne cessent de tenter
00:51:53d'imposer aux industriels
00:51:54une baisse des coûts
00:51:56des nouveaux traitements.
00:51:57En vain.
00:52:00Un médicament,
00:52:02à lui seul,
00:52:03a bouleversé
00:52:04l'économie de la santé.
00:52:06Un traitement
00:52:06hors de prix
00:52:07qui a lancé
00:52:08une nouvelle course
00:52:09au profit
00:52:09entre les plus grands
00:52:10laboratoires pharmaceutiques.
00:52:12C'est une découverte américaine
00:52:18majeure,
00:52:19un nouveau traitement
00:52:20contre l'hépatite C.
00:52:22Il permet de guérir
00:52:23cette grave maladie du foie,
00:52:25à l'issue,
00:52:26souvent fatale,
00:52:27en éradiquant le virus.
00:52:31En 2014,
00:52:33arrive sur le marché américain
00:52:34le Sovaldi
00:52:35de Gilead,
00:52:37le 10e laboratoire mondial.
00:52:39prix du traitement
00:52:40de 3 mois,
00:52:4284 000 dollars.
00:52:44Chaque comprimé
00:52:45revient à 1 000 dollars.
00:52:49Le Sovaldi
00:52:50est le premier traitement
00:52:51qui permet
00:52:52de vraiment guérir
00:52:53de l'hépatite C.
00:52:55En 3 mois,
00:52:57le virus a disparu.
00:52:59Il est fabriqué
00:53:00par un grand laboratoire
00:53:01pharmaceutique,
00:53:04Gilead.
00:53:06Mais Gilead
00:53:08n'a absolument pas
00:53:09participé aux recherches
00:53:10qui ont permis
00:53:11de découvrir le Sovaldi.
00:53:14Gilead a acheté
00:53:16Pharmacet
00:53:17dans le but
00:53:18d'acquérir le Sovaldi.
00:53:22Les laboratoires
00:53:23se concentrent
00:53:24sur les maladies
00:53:24les plus graves
00:53:25qui n'affectent pas
00:53:26tant de gens
00:53:27que ceux-là,
00:53:28mais où il est question
00:53:29de vie ou de mort.
00:53:31Ainsi,
00:53:32ils peuvent facturer
00:53:33autant qu'ils le veulent,
00:53:35soit 84 000 dollars.
00:53:37selon leurs rapports
00:53:39annuels,
00:53:40les ventes
00:53:41de Gilead
00:53:42se sont élevées
00:53:43à 32,5 milliards
00:53:45de dollars,
00:53:46dont 55%
00:53:49de pur profit.
00:53:55Le médicament américain
00:53:56arrive sur le marché
00:53:57européen
00:53:58à un prix
00:53:59moitié moins cher.
00:54:02Le Sovaldi
00:54:03est vendu
00:54:0442 000 euros
00:54:06le traitement.
00:54:07Ce prix,
00:54:08toujours exorbitant,
00:54:10crée une forte inquiétude
00:54:11chez les patients.
00:54:12C'est une maladie
00:54:14silencieuse,
00:54:15complètement silencieuse,
00:54:17qu'on ne voit pas,
00:54:18on ne s'en doute pas.
00:54:19Si vous n'êtes pas
00:54:19vraiment malade,
00:54:20vous vous sentez
00:54:20quand même pas trop mal,
00:54:21c'est le cas.
00:54:23Parce que le problème
00:54:24de cette maladie,
00:54:24c'est qu'elle s'attaque
00:54:25au foie.
00:54:27Le système immunitaire,
00:54:28pour pouvoir virer
00:54:29le virus,
00:54:30il détruit les hépatocytes
00:54:32qui sont les minuscules
00:54:33cellules du foie.
00:54:33et vous pouvez avoir
00:54:35un cancer
00:54:36ou finir
00:54:37en encéphalopathie hépatique.
00:54:40Est-ce que vous vous souvenez
00:54:41la première fois
00:54:42quand vous avez entendu
00:54:43parler du traitement
00:54:44Sovaldi aux Etats-Unis ?
00:54:46On avait des contacts
00:54:47avec le labo.
00:54:47Ils ont commencé
00:54:48à prendre des contacts
00:54:49en disant,
00:54:50vous allez voir,
00:54:50on va avoir un traitement
00:54:51dans quelques semaines.
00:54:53Ça va être le truc démon.
00:54:56Vous allez guérir.
00:54:57Vous êtes l'un des premiers
00:54:58patients traités en France.
00:55:00Est-ce que ce médicament
00:55:01vous a sauvé la vie ?
00:55:02Bien sûr.
00:55:03Est-ce que c'est un traitement
00:55:04qui vous a coûté cher ?
00:55:05Moralement.
00:55:07Mais pas pécuniairement.
00:55:08C'est la Sécu qui paye.
00:55:10Il était remboursé
00:55:10par la Sécurité sociale.
00:55:11Moralement, pourquoi ?
00:55:13Parce que c'est inadmissible.
00:55:15Tout le monde voulait
00:55:16le traitement, c'est sûr.
00:55:17Il y avait beaucoup de gens
00:55:18qui savaient en même temps
00:55:20qu'on était en train
00:55:21de se battre pour.
00:55:23Pour que le prix baisse.
00:55:24Oui.
00:55:29L'ONG Médecins du Monde
00:55:31lance une campagne d'alerte
00:55:32sur le prix exorbitant.
00:55:36En France,
00:55:37230 000 malades
00:55:38sont concernés.
00:55:40À 42 000 euros,
00:55:41le traitement
00:55:42contre l'hépatite C
00:55:43est l'un des médicaments
00:55:44les plus chers
00:55:45pour l'assurance maladie.
00:55:47On peut dire
00:55:49merci à Gilead
00:55:50d'avoir commercialisé
00:55:51le Sovaldi
00:55:53parce qu'ils ont révélé
00:55:55au grand public
00:55:57qu'aujourd'hui,
00:55:59un médicament
00:55:59n'était pas vendu
00:56:02au prix auquel
00:56:03il devrait être vendu.
00:56:05Ça reflète la nécessité
00:56:07pour Gilead
00:56:08de se refaire
00:56:09d'une opération financière
00:56:10qui a été énorme.
00:56:11Comme il a dépensé
00:56:1210 milliards,
00:56:14il est obligé
00:56:14de le vendre cher.
00:56:14À ce prix-là,
00:56:17même les pays
00:56:18les plus riches
00:56:18sont confrontés
00:56:19à la barrière financière.
00:56:21Le Sovaldi
00:56:22est hors de prix.
00:56:23J'apprends que l'hépatite C
00:56:27va pouvoir être traité.
00:56:30Qu'un traitement
00:56:31est arrivé sur le marché
00:56:32qui coûte très cher
00:56:34mais qui soigne
00:56:35en 12 semaines
00:56:36et qui guérit
00:56:37des femmes,
00:56:38des hommes
00:56:39qui jusque-là
00:56:39étaient
00:56:40dans leur très grande majorité
00:56:42condamnés
00:56:43par l'hépatite C.
00:56:45Gilead
00:56:45est dans une position
00:56:47de force relative.
00:56:48il est seul,
00:56:50il a un traitement
00:56:51qui guérit.
00:56:52Une négociation
00:56:53assez,
00:56:55comment dire,
00:56:57robuste,
00:56:59tendue,
00:57:00va s'inscrire
00:57:01dans le temps.
00:57:02Aujourd'hui,
00:57:03on estime
00:57:04que les prix
00:57:04ont baissé
00:57:05de plus de la moitié.
00:57:07Sous la pression,
00:57:09le laboratoire américain
00:57:10baisse le prix
00:57:10du traitement
00:57:11de 3 mois
00:57:12du Sovaldi
00:57:12en France
00:57:13de 42 000 euros
00:57:14à 24 000 euros.
00:57:17Une commission
00:57:18d'enquête
00:57:18du Sénat américain
00:57:19permet de découvrir
00:57:20la stratégie commerciale
00:57:22confidentielle
00:57:23du laboratoire.
00:57:24Nous avons eu accès
00:57:25à des milliers
00:57:26de pages
00:57:27de documents internes
00:57:28à Gilead.
00:57:29On voit
00:57:30dans les réunions
00:57:31de la direction
00:57:33de Gilead
00:57:34les hypothèses
00:57:35de commercialisation
00:57:36qui sont testées
00:57:37et en particulier
00:57:38les hypothèses
00:57:39de prix
00:57:39où jamais
00:57:40n'est fait mention
00:57:42les coûts réels
00:57:44dépensés
00:57:45en matière
00:57:46de recherche
00:57:46et développement
00:57:47de production
00:57:48et de commercialisation.
00:57:49Dans cette présentation
00:57:51interne de Gilead,
00:57:52l'équipe commerciale
00:57:53recommande
00:57:54un prix de lancement
00:57:55entre 80 000
00:57:56et 85 000 dollars
00:57:57et de ne pas se soucier
00:57:59du scandale
00:58:00qui pourrait apparaître
00:58:01dans la presse.
00:58:03La seule question,
00:58:04c'est comment je peux
00:58:05gagner le maximum
00:58:05pour dégager
00:58:07des marches financières
00:58:07qui sont très fortes
00:58:08pour rembourser
00:58:09mon opération financière
00:58:10et passer à la suivante.
00:58:12il n'y a plus
00:58:13aucune considération
00:58:14de santé publique.
00:58:17Marisol Touraine
00:58:18dirige à présent
00:58:19United,
00:58:20rattachée à l'Organisation
00:58:21mondiale de la santé,
00:58:23en charge de négocier
00:58:24avec les grands laboratoires
00:58:25des baisses de prix
00:58:27importantes
00:58:28pour soigner
00:58:28les patients
00:58:29dans les pays du Sud.
00:58:3271 millions
00:58:33de malades
00:58:33sont atteints
00:58:34du virus
00:58:35de l'hépatite C.
00:58:36La baisse de prix
00:58:38est extrêmement importante
00:58:40et elle se fait
00:58:41à travers
00:58:42la mise en place
00:58:43de génériques
00:58:44et la garantie
00:58:46en quelque sorte
00:58:47pour le laboratoire
00:58:48que nous lui ouvrons
00:58:50des marchés importants
00:58:51plutôt que de vendre
00:58:52peu très cher,
00:58:54nous leur proposons
00:58:55de vendre beaucoup
00:58:57à un prix plus bas.
00:58:59Nous avons remporté
00:59:00une victoire
00:59:00en permettant
00:59:02que les traitements
00:59:02soient accessibles
00:59:03à un prix raisonnable.
00:59:07Ainsi,
00:59:08le traitement
00:59:09contre l'hépatite C
00:59:10fabriqué par le laboratoire
00:59:12de médicaments génériques
00:59:13Mylan
00:59:13coûte moins de 80 dollars
00:59:15uniquement dans les pays
00:59:17en voie de développement.
00:59:19Dans les pays du Nord,
00:59:21il est toujours facturé
00:59:22plusieurs dizaines
00:59:23de milliers d'euros.
00:59:33Le prix des médicaments
00:59:36ne reflète plus
00:59:37leur cours réel
00:59:38de recherche
00:59:38mais la puissance financière
00:59:41de quelques grandes firmes
00:59:42lancées dans une course
00:59:44au profit
00:59:44démesurées.
00:59:47Avec l'apparition
00:59:47de nouvelles thérapies géniques
00:59:49traitant certains cancers
00:59:51ou des maladies rares,
00:59:53les prix augmentent encore
00:59:54pour atteindre
00:59:55plusieurs centaines
00:59:56de milliers d'euros.
00:59:59Tous les grands laboratoires
01:00:00sont dans la course
01:00:01de ces nouveaux traitements
01:00:02qui sauvent des vies
01:00:04mais à quel prix ?
01:00:08J'avais 18 ans.
01:00:20J'ai eu des symptômes
01:00:21avec des douleurs osseuses.
01:00:25On m'a fait des analyses
01:00:26et là on m'a appris
01:00:26que j'avais une leucémie.
01:00:29Là, il y a deux problématiques.
01:00:30c'est par rapport à moi
01:00:33qu'est-ce que je fais
01:00:35parce qu'il y a tout
01:00:35qui se met en pause,
01:00:37en stand-by
01:00:38et après il y a aussi
01:00:40l'entourage
01:00:40et les proches à gérer
01:00:41parce que ça impacte
01:00:43toute une famille au final.
01:00:45Et le plus dur aussi,
01:00:46c'est quand ça vous arrive à vous,
01:00:48vous êtes acteur
01:00:50de ce qui se passe
01:00:50alors que vous ne pouvez rien
01:00:52faire pour vos proches
01:00:53et que vos proches
01:00:53ne peuvent rien faire pour vous.
01:00:59On m'a expliqué
01:01:00qu'il y avait un traitement
01:01:02qui était nouveau
01:01:04qui potentiellement
01:01:05avait beaucoup moins
01:01:06d'effets secondaires
01:01:07que les traitements
01:01:08qui se font normalement.
01:01:12Ils m'ont prélevé du sang.
01:01:14Dans ce sang,
01:01:14ils ont récupéré
01:01:15ce qu'on appelle
01:01:15les cellules souches.
01:01:17Je les ai envoyées
01:01:17à un laboratoire.
01:01:19Ils m'ont fait une chimiothérapie
01:01:20qui préparait mon corps
01:01:21à recevoir ces carticelles.
01:01:24Et ensuite,
01:01:24ils m'ont injecté les cellules.
01:01:26C'est une perfusion.
01:01:27Ils vont mettre
01:01:28la poche de sang
01:01:28avec les cellules
01:01:29qui sont modifiées.
01:01:31Et voilà, c'est fait.
01:01:32Aujourd'hui,
01:01:32les résultats sont bons.
01:01:35Je suis en rémission.
01:01:37Et pour l'instant,
01:01:39tout va bien.
01:01:42Cette nouvelle thérapie génique
01:01:43contre le cancer
01:01:44est notamment commercialisée
01:01:46par le laboratoire suisse Novartis
01:01:48pour le traitement
01:01:49de la leucémie.
01:01:51Son nom,
01:01:52Kimraya.
01:01:53Son prix,
01:01:54320 000 euros par patient.
01:01:57Est-ce que c'est un traitement
01:01:58qui vous a coûté cher ?
01:02:00Alors,
01:02:01ce n'est pas un traitement
01:02:01qui m'a coûté cher du tout.
01:02:03Ça a été pris en charge
01:02:04complètement
01:02:05par la sécurité sociale.
01:02:06Et ça,
01:02:07c'est quand même
01:02:07quelque chose de fantastique.
01:02:09Parce que
01:02:10c'est quelque chose...
01:02:12Bon, non,
01:02:13peut-être qu'on aurait pu,
01:02:13mais ça aurait un impact
01:02:16sur toute la famille.
01:02:16Parce que moi,
01:02:17bien évidemment,
01:02:17je ne pouvais pas me...
01:02:18Je ne pouvais pas me...
01:02:19m'offrir,
01:02:20je ne vais pas m'offrir
01:02:21ce traitement,
01:02:22mais ça aurait eu un impact
01:02:23sur toute la famille.
01:02:24Et c'est vrai que c'est...
01:02:25Et on se rend compte
01:02:25de cette chance,
01:02:26surtout quand,
01:02:27à l'époque,
01:02:28j'étais étudiant
01:02:28et on regarde
01:02:30pour aller travailler
01:02:31à l'étranger,
01:02:32etc.
01:02:33À l'étranger,
01:02:34si j'étais tombé malade,
01:02:35ça aurait été
01:02:35complètement différent.
01:02:36j'aurais peut-être pas pu
01:02:39ou j'aurais dû passer
01:02:40par des assurances.
01:02:41En France,
01:02:41on a le luxe
01:02:43de pouvoir
01:02:43être certain
01:02:44d'avoir le meilleur
01:02:45traitement
01:02:45sans avoir
01:02:46ces problématiques
01:02:46d'argent à gérer.
01:02:48Donc non,
01:02:48ça ne m'a rien coûté.
01:02:52Le traitement
01:02:53a été découvert
01:02:54par une équipe
01:02:54de chercheurs
01:02:55de l'université
01:02:56de Pennsylvanie
01:02:57aux Etats-Unis
01:02:57grâce à des fonds publics.
01:02:59Puis,
01:03:00avec sa puissance financière,
01:03:02Novartis
01:03:03est devenu
01:03:03co-détenteur
01:03:04du brevet.
01:03:06Jean-Paul Vernon
01:03:07est professeur
01:03:08d'hématologie,
01:03:10spécialiste réputé
01:03:11des cancers du sang.
01:03:15Il y a une vraie technique
01:03:16à mettre en place.
01:03:18Avec une thérapie génique,
01:03:20on introduit un gène
01:03:21qui va permettre
01:03:23à ces lymphocytes T
01:03:25de cibler
01:03:27les cellules malades
01:03:29et qui va permettre
01:03:31de les détruire.
01:03:32C'est un système
01:03:33extrêmement intéressant,
01:03:35mais aucune justification
01:03:37que ces produits
01:03:38soient payés
01:03:39350 000 euros.
01:03:41Si, en France,
01:03:42des structures publiques
01:03:43faisaient ça,
01:03:44ça coûterait probablement
01:03:4630 ou 40 000 euros,
01:03:48mais pas 350 000 euros.
01:03:54Bien entendu,
01:03:56l'industrie pharmaceutique
01:03:57est aux aguets.
01:03:58Elle fait son travail.
01:03:59et elle regarde.
01:04:00Elle dit,
01:04:00mais là,
01:04:00c'est extrêmement intéressant.
01:04:02Donc,
01:04:02la recherche,
01:04:03d'une certaine façon,
01:04:04n'est plus faite
01:04:05par l'industrie pharmaceutique.
01:04:06Le travail lui est mâché
01:04:08par la recherche publique.
01:04:10Les industriels pharmaceutiques
01:04:13ne font plus d'innovation
01:04:15ou quasiment plus.
01:04:17Toutes les innovations
01:04:19viennent de la recherche publique.
01:04:21Les industries ont décidé
01:04:24de déménager leurs bureaux
01:04:25à côté de ces instituts de recherche
01:04:27et de leur verser des royalties
01:04:29dans le but de tirer profit
01:04:31des médicaments
01:04:32qui les intéressaient.
01:04:33sont entourés par les grandes sociétés pharmaceutiques
01:04:41et par des petites start-up.
01:04:43Souvent,
01:04:47lorsque les laboratoires universitaires
01:04:49font une nouvelle découverte,
01:04:51ils lancent une start-up.
01:04:54Si les industries pharmaceutiques
01:04:55y voient un investissement intéressant,
01:04:58alors ils n'ont qu'à traverser la rue
01:05:00pour acheter l'exclusivité
01:05:01des brevets de cette start-up,
01:05:04voire acheter la petite entreprise elle-même.
01:05:07L'industrie pharmaceutique,
01:05:16à l'époque,
01:05:17ce que j'appelle la belle époque,
01:05:18c'est-à-dire il y a 30-40 ans,
01:05:21travaillait énormément.
01:05:22Le boulot était difficile.
01:05:24Et paradoxalement,
01:05:26alors que la recherche coûtait cher,
01:05:28faite par l'industrie,
01:05:30que le développement de ces molécules
01:05:31jusqu'à la mise sur marché
01:05:33était extrêmement long,
01:05:34eh bien ces molécules sortaient
01:05:36à des prix que je qualifierais
01:05:39de raisonnables.
01:05:40Et puis, bien entendu,
01:05:41une petite gratification
01:05:42pour les actionnaires,
01:05:433, 4, 5 % du chiffre d'affaires.
01:05:46Et là, on vit une époque
01:05:48de folie totale.
01:05:49Son souci n'est plus le malade,
01:05:51c'est son actionnaire.
01:05:53Il faut que l'actionnaire gagne beaucoup.
01:05:55Voilà la raison pour laquelle
01:05:57le prix de ces médicaments
01:05:58est totalement injustifié.
01:06:01Nous faisons face
01:06:03à un changement majeur
01:06:04qui est dangereux.
01:06:06terrible.
01:06:09Au lieu de s'intéresser exclusivement
01:06:11ou presque au volume du marché,
01:06:13la seule chose qui compte aujourd'hui
01:06:15pour les laboratoires,
01:06:17c'est le prix.
01:06:20Ils ont acheté un médicament
01:06:22qui soigne des maladies très graves,
01:06:24telles que les sclérose en plaques
01:06:26ou le cancer.
01:06:29Des maladies très graves.
01:06:31Et ils sont prêts
01:06:33à payer des sommes faramineuses
01:06:35pour acheter un traitement,
01:06:36puis augmenter le prix
01:06:39jusqu'à ce qu'il atteigne
01:06:41des centaines de milliers
01:06:42de dollars par an.
01:06:45C'est un modèle économique
01:06:46très cruel.
01:06:48Si vous ne pouvez pas payer,
01:06:49vous n'avez pas le traitement.
01:06:51Ce qui se passe
01:06:52dans le cancer aujourd'hui,
01:06:54nous sommes sur des prix
01:06:55qui sont à 300 000,
01:06:56400 000 euros.
01:06:57Et le nombre de personnes
01:06:59malades du cancer,
01:07:01c'est 1 800 000 personnes
01:07:04dans notre pays.
01:07:05Avec 400 000 nouveaux cas
01:07:07de cancer par an.
01:07:08Je ne vois pas comment
01:07:09nous allons être capables
01:07:11à l'avenir
01:07:12de soigner plus de 1,5 million
01:07:15de personnes
01:07:15avec des échelles de prix
01:07:17qui sont à 300 000 euros.
01:07:18Il y a tout un argumentaire
01:07:24qui est fait autour
01:07:24de la valeur thérapeutique,
01:07:26autour de la valeur
01:07:28pour la vie
01:07:28de ces médicaments,
01:07:30qui est bien savamment entretenu
01:07:32à travers des leaders d'opinion,
01:07:34qui est entretenu
01:07:35auprès des pouvoirs publics
01:07:36et qui consiste à dire
01:07:37que le médicament,
01:07:38puisqu'il guérit,
01:07:39doit changer de nature
01:07:40et doit avoir un prix
01:07:41qui est très élevé.
01:07:42C'est ça le prix de la vie.
01:07:43C'est uniquement du marketing.
01:07:44Plus c'est guéri,
01:07:46plus c'est cher.
01:07:48Le problème,
01:07:50c'est que chaque pays
01:07:51défend ses multinationales.
01:07:54La France défend Sanofi,
01:07:56les Américains défendent Pfizer
01:07:59et toutes les grosses boîtes américaines,
01:08:02la Suisse défend Novartis et Roche.
01:08:06C'est extrêmement difficile
01:08:07d'arriver à une attitude consensuelle
01:08:10pour que les prix diminuent
01:08:11et que les prix deviennent raisonnables.
01:08:18Pourquoi il n'y a pas aujourd'hui
01:08:21de coopération entre les pays
01:08:23pour avoir des prix raisonnables ?
01:08:25Lorsque moi,
01:08:26j'avais tenté de convaincre
01:08:29mon collègue allemand,
01:08:31je l'avais senti intéressée
01:08:35intellectuellement,
01:08:36mais au fond préoccupée aussi
01:08:38par la situation
01:08:40de son industrie pharmaceutique.
01:08:43Et c'est vrai que l'industrie pharmaceutique
01:08:45allemande est puissante.
01:08:47L'honnêteté est de dire
01:08:48qu'aujourd'hui,
01:08:50ni la France ni l'Allemagne
01:08:51ne le souhaitent,
01:08:52ou en tout cas ne vont loin
01:08:53dans cette direction-là,
01:08:55ce que je trouve dommage.
01:09:00Deux mois de négociations
01:09:01avec la multinationale Novartis
01:09:03aboutissent aussi
01:09:04à un refus d'interview
01:09:06et l'envoi d'un simple communiqué.
01:09:11Nous fixons le prix
01:09:12de nos traitements
01:09:12en fonction de leur efficacité
01:09:14pour les patients,
01:09:16des systèmes de santé
01:09:17et de la société.
01:09:18Nous prenons en compte
01:09:19le niveau des revenus,
01:09:21les contraintes locales
01:09:22et les réalités économiques
01:09:24en faisant en sorte
01:09:25de conserver la viabilité
01:09:27de notre activité.
01:09:30Novartis nous précise,
01:09:32comme ses représentants
01:09:33l'expliquent aux décideurs politiques,
01:09:36que ce nouveau traitement
01:09:37contre le cancer
01:09:38en une seule prise
01:09:39est à comparer
01:09:40à un traitement
01:09:42à prendre à vie.
01:09:43A la fin 2019,
01:09:46le laboratoire
01:09:47a consenti
01:09:48une légère baisse
01:09:49en France.
01:09:50Le Kimraya
01:09:51est passé
01:09:52de 320 000 euros
01:09:53à 297 666 euros.
01:10:05L'industrie pharmaceutique
01:10:06est devenue
01:10:07l'un des plus puissants
01:10:08lobbies économiques.
01:10:09Elle peut compter
01:10:11sur le soutien
01:10:11des médecins
01:10:12les plus influents.
01:10:14En Europe,
01:10:15des lois interdisent
01:10:16pourtant les cadeaux
01:10:17directement aux professionnels
01:10:18de santé.
01:10:19Les médecins
01:10:20et les entreprises pharmaceutiques
01:10:21doivent déclarer
01:10:22leur lien d'intérêt financier.
01:10:26Seulement,
01:10:27le système de régulation
01:10:28est basé en grande partie
01:10:30sur le volontariat
01:10:31de l'industrie.
01:10:32La transparence
01:10:33est limitée
01:10:34et la majorité
01:10:35des médecins
01:10:35refusent encore
01:10:37de communiquer
01:10:37la partie
01:10:38de leurs revenus
01:10:39payés par les laboratoires.
01:10:42En Allemagne,
01:10:43seul un médecin
01:10:44sur cinq
01:10:44ayant perçu
01:10:45de l'argent
01:10:46de l'industrie
01:10:46accepte que son nom
01:10:48et les montants
01:10:49soient publiés.
01:10:51Les données chiffrées
01:10:52des firmes
01:10:52devraient être transparentes.
01:10:54Pourtant,
01:10:55elles sont difficilement
01:10:56accessibles
01:10:57ou inexploitables.
01:11:00Un intense lobbying
01:11:02de l'industrie
01:11:03empêche le vote
01:11:04de loi
01:11:04qui rendrait
01:11:05la publication
01:11:06de ces rémunérations
01:11:07obligatoires
01:11:08pour prévenir
01:11:09efficacement
01:11:10les conflits d'intérêts.
01:11:14J'enquête
01:11:15sur l'industrie
01:11:16pharmaceutique
01:11:17depuis 15 ans.
01:11:19Je m'intéresse
01:11:19principalement
01:11:20à la corruption
01:11:21dans le système
01:11:21de soins de santé.
01:11:23Et la situation
01:11:24perdure.
01:11:26Les entreprises
01:11:26pharmaceutiques
01:11:27continuent de tenter
01:11:28de payer les médecins
01:11:29pour qu'ils prescrivent
01:11:30leurs médicaments
01:11:30avec tout type
01:11:31de cadeaux,
01:11:32des voyages
01:11:33ou tout simplement
01:11:34avec des versements
01:11:34d'argent.
01:11:37C'est un problème
01:11:37majeur
01:11:38dans toute l'Europe
01:11:39qui est trop peu
01:11:39dénoncé.
01:11:42La transparence
01:11:42proclamée
01:11:43par les laboratoires
01:11:44pharmaceutiques
01:11:44est une pseudo-transparence
01:11:46car ils ne publient pas
01:11:47la liste intégrale
01:11:48des noms des médecins
01:11:49qu'ils rémunèrent.
01:11:51Ils publient seulement
01:11:51le nom des médecins
01:11:52qui ont donné leur accord
01:11:53et en général
01:11:55très peu donnent leur accord.
01:11:58Les médecins
01:11:58reçoivent des avantages
01:11:59de l'industrie
01:12:00pour intervenir
01:12:01dans des congrès scientifiques
01:12:02ou pour donner
01:12:03des cours
01:12:03de formation
01:12:04continue.
01:12:05En Allemagne,
01:12:06près de 65 000 médecins
01:12:07reçoivent de l'argent
01:12:08ou des dons.
01:12:11Marcus Grill
01:12:11a dirigé
01:12:12une vaste enquête
01:12:13pour le site
01:12:14d'investigation corrective
01:12:15et le grand hebdomadaire
01:12:17d'Herspiegel.
01:12:18Un an de travail
01:12:19pour mettre en ligne
01:12:20une base de données
01:12:21indépendante
01:12:22pour permettre
01:12:23à tous les citoyens
01:12:24de rechercher
01:12:25précisément
01:12:26les informations
01:12:27sur leurs médecins.
01:12:28Les laboratoires
01:12:31ont rendu
01:12:32les choses
01:12:32très compliquées.
01:12:34Certains,
01:12:34par exemple,
01:12:35mettent en ligne
01:12:35sur leur site
01:12:36des pages
01:12:37qui sont en fait
01:12:37des images.
01:12:40Il est alors
01:12:40très fastidieux
01:12:41de recopier
01:12:42les données
01:12:42à partir de ces fichiers,
01:12:44même avec des programmes
01:12:45de collecte
01:12:46de données.
01:12:48Certains laboratoires
01:12:49signalent sur leur site web
01:12:50qu'il est interdit
01:12:50de recopier leurs données.
01:12:52C'est tout de même
01:12:54surprenant
01:12:54quand vous êtes censé
01:12:55montrer que vous êtes
01:12:56transparent.
01:12:56on a découvert
01:12:58qu'ils ne prenaient
01:12:58pas la transparence
01:12:59au sérieux.
01:13:00Par exemple,
01:13:01le laboratoire allemand
01:13:02Grunenthal
01:13:02a interdit
01:13:03l'utilisation
01:13:04de ces données publiques.
01:13:07Ils nous ont interdit
01:13:08de collecter
01:13:08et de publier
01:13:09dans notre base
01:13:10de données
01:13:10les rémunérations
01:13:11qu'ils avaient
01:13:12pourtant mises en ligne.
01:13:15Nous n'en avons pas
01:13:16tenu compte
01:13:17et nous avons intégré
01:13:18toutes leurs données
01:13:18dans notre base.
01:13:20Plus de 100 médecins
01:13:21ont porté plainte
01:13:22contre nos médias,
01:13:23le site corrective
01:13:24et le Spiegel.
01:13:26Ces médecins
01:13:29ont mandaté
01:13:30le même cabinet
01:13:30d'avocats
01:13:31mais ils ont échoué
01:13:33devant tous les tribunaux
01:13:35à faire interdit
01:13:36à notre base
01:13:37de données.
01:13:40Après des mois
01:13:40de travail
01:13:41et de recoupement,
01:13:42la base de données
01:13:43est mise en ligne,
01:13:44accessible gratuitement.
01:13:47En haut de la liste,
01:13:48parmi les médecins
01:13:49qui touchent
01:13:49le plus d'argent
01:13:50de l'industrie,
01:13:51un professeur
01:13:52de neurologie
01:13:53à l'université
01:13:54de Duisburg-Essen.
01:13:57Au total,
01:13:58il a touché
01:13:59de différents laboratoires
01:14:00200 000 euros
01:14:02en 2015,
01:14:04la même somme
01:14:04en 2016.
01:14:09Le professeur
01:14:10Hans-Christoph Diner
01:14:11est un membre éminent
01:14:13de la société allemande
01:14:14de neurologie
01:14:15et donne de nombreuses
01:14:17conférences
01:14:18rémunérées chaque année.
01:14:19Je me suis retrouvé
01:14:21en haut de la liste
01:14:22en Allemagne.
01:14:23Mais le journaliste
01:14:24du Spiegel
01:14:24n'a pas dit
01:14:25que je lui ai montré
01:14:26mes relevés.
01:14:28Le 29 décembre
01:14:29de chaque année,
01:14:30j'ai transféré
01:14:31tout cet argent
01:14:32sur le compte
01:14:32de mon centre de recherche
01:14:33sur les troubles
01:14:34de la migraine
01:14:35et des vertiges.
01:14:37Pas un euro
01:14:38de ces 300 000 euros
01:14:39n'est resté dans ma poche.
01:14:41Tout a été réinvesti
01:14:42dans la recherche.
01:14:43Cette affaire
01:14:45m'a beaucoup affecté.
01:14:46Si on réinvestit
01:14:48les revenus
01:14:48de l'industrie pharmaceutique
01:14:49dans la recherche,
01:14:50je n'y vois
01:14:51aucun problème éthique.
01:14:54Mais bien sûr
01:14:55qu'il s'agit
01:14:56d'un avantage financier
01:14:57pour ce professeur.
01:14:59S'il reçoit
01:14:59je ne sais combien
01:15:00de milliers d'euros
01:15:00de l'industrie pharmaceutique
01:15:02pour engager un assistant
01:15:03ou engager un médecin
01:15:04pour un projet de recherche,
01:15:06bien sûr que c'est
01:15:07un conflit d'intérêts.
01:15:09Ce n'est pas parce
01:15:09qu'on ne prend pas
01:15:10l'argent directement
01:15:11pour s'acheter une voiture,
01:15:12une Porsche par exemple,
01:15:13qu'il n'y a pas
01:15:14de conflit d'intérêts.
01:15:15Cela reste un problème.
01:15:19De nombreux confrères médecins
01:15:20m'ont dit
01:15:20qu'ils avaient peur
01:15:21après la publication
01:15:22par le Spiegel
01:15:23des montants
01:15:24que j'ai reçus.
01:15:26Ils m'ont dit
01:15:27je ne veux pas être
01:15:28mis au pilori
01:15:29dans le journal local
01:15:30là où j'habite
01:15:31parce qu'on m'a payé
01:15:33un billet de train
01:15:33pour me rendre
01:15:34à un congrès.
01:15:38En Allemagne,
01:15:39un mouvement encore mineur
01:15:41mais grandissant
01:15:42prend forme
01:15:42chez les médecins
01:15:43qui refusent l'argent
01:15:44et les cadeaux
01:15:45de l'industrie pharmaceutique.
01:15:48Parmi les participants
01:15:49au congrès de neurologie
01:15:50à Stuttgart,
01:15:52certains médecins
01:15:52ont rejoint
01:15:53le mouvement
01:15:54Medzis,
01:15:55abréviation
01:15:56pour Je paye
01:15:57ma propre nourriture.
01:15:59Un mouvement
01:16:00inspiré du projet
01:16:01américain
01:16:01No Free Lunch,
01:16:03pas de déjeuner gratuit.
01:16:04Pour nous,
01:16:06les repas sont un symbole.
01:16:08Les laboratoires
01:16:08pharmaceutiques
01:16:09offrent aussi
01:16:10des voyages,
01:16:11paient les frais
01:16:12pour participer
01:16:13à des congrès,
01:16:14ils financent
01:16:15l'écriture
01:16:15de publications
01:16:16scientifiques.
01:16:17Nous,
01:16:17nous voulons nous passer
01:16:18de tous les dons
01:16:19de l'industrie.
01:16:20C'est pour cela
01:16:20que vous avez apporté
01:16:21votre propre sandwich
01:16:22au congrès ?
01:16:23Oui, c'est pour cela.
01:16:26Je n'ai jamais accepté
01:16:27un déjeuner
01:16:28de l'industrie pharmaceutique.
01:16:29Je n'ai jamais accepté
01:16:30une invitation
01:16:31à dîner de l'industrie.
01:16:33Il y a quelques années,
01:16:34je me suis senti
01:16:34de plus en plus mal à l'aise.
01:16:36J'ai vu à quel point
01:16:37l'industrie pharmaceutique
01:16:38influence les médecins,
01:16:40influence la pensée médicale.
01:16:42C'est pourquoi
01:16:42j'ai rejoint
01:16:43ce groupe de médecins
01:16:44qui existait
01:16:45depuis quelques temps.
01:16:46Medzis.
01:16:47Je paye
01:16:48ma propre nourriture.
01:16:50Ce sont des médecins
01:16:50de différentes spécialités
01:16:51qui veulent garder
01:16:52un oeil critique
01:16:53sur l'industrie
01:16:54et repousser son influence.
01:16:57Ce congrès de neurologie
01:16:58a été sponsorisé
01:17:00par l'industrie
01:17:00à hauteur de 3 millions d'euros.
01:17:02En plus des 200 conférences
01:17:04scientifiques officielles,
01:17:05les labos ont sponsorisé
01:17:07directement 35 présentations.
01:17:10Dans ces conférences scientifiques
01:17:12de l'industrie pharmaceutique,
01:17:14il y a toujours
01:17:14un message publicitaire.
01:17:16Ces conférences sont présentées
01:17:18sous une forme scientifique
01:17:19et il y a certainement
01:17:20beaucoup d'informations utiles.
01:17:22mais en fin de compte,
01:17:24il s'agit avant tout
01:17:24de recommander
01:17:25le produit du laboratoire
01:17:26qui sponsorise
01:17:27la conférence,
01:17:29de dire qu'il est efficace.
01:17:30Seuls les résultats
01:17:31positifs sont présentés.
01:17:33Les effets secondaires
01:17:34sont rarement examinés
01:17:36en détail.
01:17:37En général,
01:17:38le médicament
01:17:38s'en sort toujours bien
01:17:40à la fin.
01:17:42L'organisation de ce congrès
01:17:45est rendue possible
01:17:46grâce à ce parrainage.
01:17:47Cela permet de fixer
01:17:50les frais de participation
01:17:51à un niveau très bas
01:17:52pour permettre aux jeunes médecins
01:17:54et aussi aux scientifiques
01:17:55d'y assister du début
01:17:57à la fin
01:17:57et d'apprendre
01:17:58beaucoup de choses.
01:18:01En contrepartie,
01:18:02nous permettons naturellement
01:18:03à l'industrie
01:18:04de monter leur stand
01:18:05dans le hall
01:18:05qui leur est dédié
01:18:06et d'organiser
01:18:07ces conférences
01:18:08de l'industrie
01:18:09que nous suivons
01:18:09de très près
01:18:10d'un point de vue réglementaire
01:18:12sur le choix des orateurs
01:18:13et le contenu.
01:18:15Nous devons toujours
01:18:17trouver des compromis
01:18:18entre les deux intérêts.
01:18:20Ne l'oubliez pas,
01:18:21l'industrie
01:18:22est notre partenaire.
01:18:24Nous ne pouvons développer
01:18:24de nouvelles thérapies
01:18:25tout seuls.
01:18:27La recherche
01:18:27sur les nouvelles thérapies
01:18:28ne peut se faire
01:18:29qu'en partenariat
01:18:30avec l'industrie.
01:18:32Ces études sont toujours
01:18:33menées par des neurologues
01:18:34universitaires,
01:18:35comme moi,
01:18:36en collaboration
01:18:37avec l'industrie.
01:18:38C'est la nature humaine.
01:18:43Nous nous sentons
01:18:43obligés
01:18:44envers celui
01:18:44qui nous donne
01:18:45quelque chose.
01:18:48C'est le principe
01:18:49de réciprocité.
01:18:51Je ne mords pas
01:18:52la main
01:18:52qui me nourrit.
01:18:55C'est une illusion.
01:18:57C'est ce que l'on appelle
01:18:57l'illusion
01:18:58de la résistance,
01:19:00que nous ne sommes
01:19:00pas influençables,
01:19:02mais nous le sommes tous.
01:19:04Moi aussi,
01:19:04je suis corruptible.
01:19:05Ce congrès
01:19:10ne serait pas
01:19:10si cher à organiser
01:19:11s'il perdait
01:19:12le soutien
01:19:13de l'industrie.
01:19:14On devrait juste
01:19:14se passer
01:19:15de quelques prestations.
01:19:17Le grand congrès
01:19:18de l'Association
01:19:19américaine
01:19:19de psychiatrie
01:19:20se passe désormais
01:19:21du sponsoring
01:19:22de l'industrie.
01:19:23Et ce n'est pas
01:19:24le seul.
01:19:34La crise mondiale
01:19:35du Covid-19
01:19:36révèle une nouvelle fois
01:19:37l'appétit
01:19:38des grands laboratoires.
01:19:40Pendant la pandémie,
01:19:41les affaires continuent.
01:19:44En ce début
01:19:44du mois de mars 2020,
01:19:46tous les Big Pharma
01:19:47annoncent se lancer
01:19:48dans la course
01:19:49à un traitement
01:19:50et à un vaccin
01:19:51contre le virus.
01:19:52Qui trouvera
01:19:53le premier ?
01:19:56Alors que la pandémie
01:19:58n'a pas encore
01:19:59atteint les Etats-Unis,
01:20:01la Maison-Blanche
01:20:02convoque les géants
01:20:03mondiaux
01:20:03du médicament.
01:20:11Le président Trump
01:20:12a réuni
01:20:13les représentants
01:20:14de Big Pharma.
01:20:15Il y a aussi
01:20:34le géant français
01:20:35Sanofi.
01:20:3670 vaccins.
01:20:3770 vaccins
01:20:39pour 100 ans.
01:20:41Vous avez
01:20:41les plus grandes
01:20:41entreprises
01:20:42du monde
01:20:42qui se sentent
01:20:43autour de la table.
01:20:43Johnson & Johnson
01:20:45et Pfizer
01:20:45et toutes les entreprises
01:20:46de Gilead.
01:20:47Vous avez
01:20:48toutes ces grandes
01:20:49entreprises.
01:20:49Gilead.
01:20:50Gilead, c'est le laboratoire
01:20:51américain
01:20:52qui a notamment
01:20:52fait fortune
01:20:53avec le brevet
01:20:54du traitement
01:20:55contre l'hépatite C.
01:20:57Son président
01:20:57vient présenter
01:20:58un traitement
01:20:59prometteur
01:21:00contre le Covid-19
01:21:01en cours
01:21:02de tests cliniques
01:21:03avec des patients
01:21:04aux Etats-Unis,
01:21:05en Europe
01:21:06et en Chine.
01:21:07L'information est arrivée
01:21:25que Gilead
01:21:26avait une molécule
01:21:27qui avait été
01:21:28initialement envisagée
01:21:29pour traiter
01:21:29la crise d'Ebola
01:21:31et finalement
01:21:32ça n'avait pas abouti
01:21:34donc elle était restée
01:21:35gentiment dans son placard
01:21:36elle s'appelle le remdesivir
01:21:37c'est un médicament antiviral.
01:21:39Gilead a compris
01:21:40qu'il y avait
01:21:40une opportunité
01:21:41d'utiliser sa molécule
01:21:43sur le Covid-19.
01:21:45La première chose
01:21:46qu'il a faite
01:21:46peut-être même
01:21:47avant de lancer
01:21:47des essais cliniques
01:21:48c'est de déposer
01:21:49le brevet
01:21:50dans près de 70 pays.
01:21:53Le traitement
01:21:54n'est pas encore homologué.
01:21:57Les recherches
01:21:57ont démarré
01:21:58il y a 10 ans
01:21:59et pour cela
01:22:00Gilead a déjà
01:22:01largement bénéficié
01:22:02de fonds publics américains
01:22:0379 millions de dollars
01:22:06pour les études cliniques
01:22:07dans plusieurs universités.
01:22:11Dès le début
01:22:12de la pandémie
01:22:13Covid-19
01:22:14Gilead
01:22:15s'est empressé
01:22:16de demander
01:22:17un statut particulier
01:22:18à l'agence américaine
01:22:19du médicament
01:22:20pour opportunément
01:22:24profiter
01:22:25d'une disposition
01:22:26de la loi américaine
01:22:27sur les médicaments
01:22:28orphelins.
01:22:29Un médicament
01:22:32orphelin
01:22:33c'est un médicament
01:22:34qui traite
01:22:35une pathologie
01:22:35concernant
01:22:36une part infime
01:22:37de la population
01:22:38d'où son nom
01:22:39aux Etats-Unis
01:22:40c'est quand il y a
01:22:40moins de 200 000 personnes
01:22:42qui sont concernées.
01:22:46C'est la loi.
01:22:48Les laboratoires
01:22:49sont incités
01:22:49à lancer des recherches
01:22:50pour des maladies
01:22:51qui touchent
01:22:52moins de 200 000 personnes
01:22:53aux Etats-Unis.
01:22:54Nous sommes
01:22:57le 23 mars 2020
01:22:59360 000 personnes
01:23:01sont déjà touchées
01:23:02par le virus
01:23:03dans le monde
01:23:03mais à cette date
01:23:05moins de 40 000
01:23:06américains
01:23:07sont affectés.
01:23:10L'agence du médicament
01:23:11accorde
01:23:12automatiquement
01:23:13le statut
01:23:14qui confère
01:23:15au laboratoire Gilead
01:23:16un monopole
01:23:17pour 7 ans.
01:23:20Ce statut
01:23:21il offre
01:23:21des exclusivités
01:23:22plus importantes
01:23:23un accès
01:23:24accéléré
01:23:24sur le marché
01:23:25une obtention
01:23:26de l'autorisation
01:23:27de mise sur le marché
01:23:28qui est plus rapide.
01:23:29En plus
01:23:29des 20 années
01:23:30de brevet
01:23:31s'ajoutent
01:23:32ce qu'on appelle
01:23:33des exclusivités
01:23:34de marché
01:23:34qui fait que
01:23:35même si un générique
01:23:36est autorisé
01:23:38il ne pourra pas
01:23:39être commercialisé
01:23:40dans le pays
01:23:40qui a accordé
01:23:41l'exclusivité
01:23:42de marché.
01:23:44S'ajoute aussi
01:23:45un important
01:23:46avantage fiscal.
01:23:50La puissante
01:23:51association
01:23:51de consommateurs
01:23:52publics
01:23:53citizens
01:23:53révèle le scandale.
01:23:56Gilead
01:23:57a déposé
01:23:57une demande
01:23:58pour le statut
01:23:58de maladie orpheline
01:23:59quand il y avait
01:24:00moins de 200 000
01:24:01cas de Covid-19
01:24:02identifiés
01:24:03aux Etats-Unis.
01:24:04Manifestement
01:24:04ils savaient
01:24:05que le nombre
01:24:06de malades
01:24:06allait augmenter.
01:24:07C'est pour ça
01:24:08qu'ils sont restés
01:24:08sous le radar.
01:24:11Le sénateur
01:24:12Bernie Sanders
01:24:12demande au président
01:24:14Trump
01:24:14d'annuler
01:24:15l'autorisation.
01:24:16Il écrit
01:24:16C'est de la folie
01:24:18que l'administration
01:24:19Trump accorde
01:24:20à Gilead
01:24:20un monopole
01:24:21de 7 ans
01:24:22sur un traitement
01:24:23potentiel
01:24:23du coronavirus.
01:24:25Il y a une telle
01:24:25levée de bouclier
01:24:26qu'ils y ont renoncé
01:24:2748 heures après.
01:24:29Non,
01:24:29on ne donne pas
01:24:29un statut
01:24:30de médicament orphelin
01:24:31un médicament
01:24:31qui est censé
01:24:33traiter une épidémie
01:24:33qui est mondiale.
01:24:35Là,
01:24:35c'est le dévoiement
01:24:36de la propriété
01:24:37intellectuelle,
01:24:38le dévoiement
01:24:39des principes
01:24:39mêmes
01:24:39de la propriété
01:24:40intellectuelle
01:24:41avec des brevets
01:24:41qui ne sont pas
01:24:42mérités.
01:24:43Dans un effort
01:24:46de contrition,
01:24:47le président
01:24:48de Gilead
01:24:48annonce
01:24:49que son groupe
01:24:50offre le REM des Sivirs
01:24:52à de nombreux
01:24:52laboratoires publics
01:24:54dans le monde
01:24:54pour poursuivre
01:24:55les recherches
01:24:56et tester
01:24:57le traitement
01:24:58sur des malades
01:24:59sévères
01:25:00du Covid-19.
01:25:04Pour autant,
01:25:05Gilead
01:25:06poursuit son lobbying
01:25:07pour obtenir
01:25:08une autorisation
01:25:09de mise
01:25:09sur le marché
01:25:10rapide.
01:25:13L'agence du médicament
01:25:42est en quelque sorte
01:25:44salarié
01:25:44de l'industrie.
01:25:46Les labos
01:25:48paient des frais
01:25:49de service
01:25:50à la branche
01:25:50de la FDA
01:25:51qui délivre
01:25:52les autorisations
01:25:53des médicaments.
01:25:55Donc,
01:25:56cette branche
01:25:56de la FDA
01:25:57est dépendante
01:25:59des entreprises
01:25:59qu'elle est censée
01:26:01réguler.
01:26:03Les laboratoires
01:26:04apprécient
01:26:05beaucoup.
01:26:07La branche
01:26:07de la FDA
01:26:08qui évalue
01:26:09leurs médicaments
01:26:09est extrêmement
01:26:10conciliante
01:26:11étant donné
01:26:12qu'ils la financent.
01:26:16C'est un conflit
01:26:17d'intérêts
01:26:17flagrant.
01:26:19Le système
01:26:20doit être
01:26:21financé
01:26:22correctement
01:26:22pour éviter
01:26:23tout conflit
01:26:24d'intérêts.
01:26:26Le 1er mai
01:26:272020,
01:26:28le président
01:26:29Trump reçoit
01:26:29à nouveau
01:26:30le PDG
01:26:31de Gilead
01:26:31pour annoncer
01:26:32l'autorisation
01:26:33en urgence
01:26:34du remdesivir
01:26:35aux Etats-Unis.
01:26:36Les cours
01:26:53de bourse
01:26:54des Big Pharma
01:26:54réagissent
01:26:55avec une ultra-sensibilité
01:26:57aux publications
01:26:57liées aux thérapies
01:26:59contre le Covid-19.
01:27:00dans l'attente
01:27:02du blockbuster
01:27:03mondial
01:27:03qui positionnera
01:27:05un laboratoire
01:27:06loin devant
01:27:07les autres.
01:27:07Le 1er mai
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