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Elles font leur grand retour là où on ne les attendait pas : les drogues psychédéliques intéressent désormais la médecine pour lutter contre la dépression et certaines addictions. Enquête.

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00:00...
00:00Elles font leur grand retour là où on ne les attendait pas.
00:08Les drogues psychédéliques intéressent désormais la médecine.
00:14Les psychédéliques ont sans aucun doute le potentiel de changer la vie de nombreux patients atteints de troubles psychiques.
00:22Rien de ce que j'ai vécu jusqu'à maintenant n'a bouleversé mon existence à ce point.
00:26Avant leur interdiction dans les années 1970, l'effet de ces substances avait déjà été étudié sur quelques 40 000 patients.
00:36Le LSD, mais aussi la psilocybine, issus de certains champignons, ont en effet une action particulière sur le cerveau.
00:44Les psychédéliques ont la capacité de tout chambouler. Hop !
00:49Et ils pourraient aussi être utiles en addictologie.
00:53C'est vraiment un espoir important parce qu'on n'a plus beaucoup de molécules comme ça dans le pipeline.
01:00Une vaste étude en cours observe l'effet des psychédéliques sur les dépressions graves.
01:08Une plongée dans l'inconnu.
01:12J'avoue que j'appréhende pas mal.
01:15A terme, il s'agit de trouver de nouveaux médicaments, mais surtout une nouvelle voie thérapeutique.
01:20On est à la veille d'un changement de paradigme pour la psychiatrie.
01:24Berlin, hôpital de la Charité.
01:53Dans le cadre d'une étude, on administre ici à des patients dépressifs de la psilocybine, une substance contenue dans les champignons hallucinogènes.
02:04Les participants sont préparés aux tripes qui les attend le lendemain.
02:07Vous m'entendez ?
02:12Oui.
02:12Je peux prendre votre attention ?
02:13Oui, pas de problème.
02:14Vous saurez que c'est fini quand je vous parlerai.
02:21D'accord.
02:23Je me sens bien là.
02:24Avec une cohorte de 144 participants, c'est l'une des plus grandes études en cours dans le monde sur ce sujet.
02:33Des essais antérieurs de plus petite envergure indiquent que les substances psychédéliques pourraient avoir une incidence sur la dépression.
02:39Il s'agit à présent de creuser cette piste.
02:44Demain, on vous demande simplement d'être là.
02:48Vous n'aurez rien à faire.
02:50Comme dit cette belle devise, vous êtes un être humain, pas un faire humain.
02:56Andreas est le participant numéro 24.
02:59Tout a commencé un peu avant qu'on perde notre fille.
03:06Ça faisait plus de cinq ans qu'on s'occupait d'elle, 24 heures sur 24.
03:10Elle ne pouvait ni bouger, ni parler.
03:15J'avais l'impression d'être derrière une paroi de verre,
03:18comme si je ne pouvais pas communiquer avec les autres.
03:22Ça m'a mis dans un état où j'étais incapable d'éprouver les sensations ou les sentiments
03:27qui donnaient un sens à ce que je faisais ou à ce que je vivais.
03:38Participant numéro 27, Klaus.
03:43J'ai vécu une enfance difficile, avec des maltraitances.
03:48Je me sentais toujours nul et pas digne d'être aimé.
03:51Mais le pire, c'était cette impression d'être coupé de mes sentiments.
03:55Ça et l'indifférence.
03:57Ce qui arrivait aux autres m'était complètement égal.
04:01S'ajoutait à cela la culpabilité, parce que tout ça n'était pas bien joli.
04:06C'est terrible de ne rien ressentir dans la vie, d'avancer comme un automate.
04:13Participant numéro 10, Hans Christian.
04:18Ce n'est pas possible, on ne peut pas rester comme ça.
04:21C'est peut-être une existence, mais ce n'est pas une vie.
04:25J'ai dit un jour à des amis, et je le pensais vraiment.
04:30Si on me promettait de faire disparaître ma dépression en m'amputant d'une jambe, je signerais tout de suite.
04:35Je ne réfléchirais même pas.
04:36La dépression, c'est comme un nuage gris qui envahit mon cerveau.
04:49Quand je suis au fond du trou, je passe quasi toutes mes journées au lit.
04:52Je ne réponds ni au téléphone, ni au message.
04:57Je me replie sur moi-même et je n'arrive à rien faire.
05:00D'ailleurs, je n'ai plus de force.
05:03Dans ces cas-là, je sais que ça ne va vraiment pas.
05:08L'étude se déroule sur deux sites.
05:11À l'Institut central de la santé mentale de Mannheim,
05:14les participants sont aussi à la veille d'une prise de substance.
05:18L'essai se déroule dans les locaux de la clinique.
05:20Mais pour optimiser les effets du trip,
05:23il est important que tout se déroule dans un cadre chaleureux et agréable.
05:32La substance place les patients dans un état de grande vulnérabilité.
05:37Leurs perceptions et leurs ressentis peuvent soudain prendre beaucoup plus d'importance.
05:42On veille donc à les installer dans une grande chambre, bien claire.
05:45Pour l'IA, ce serait une première.
05:54Cette étude me donne de l'espoir,
05:56tout en sachant que je ne dois pas en attendre trop.
06:01Ça ne donnera peut-être rien,
06:03et j'en ai conscience.
06:07Mais normalement, ça ne devrait pas aggraver les choses.
06:09Oui, j'avoue que j'appréhende pas mal.
06:16Après avoir testé sans succès de nombreux antidépresseurs,
06:19la jeune femme a accepté de participer à cette expérience,
06:22malgré son issue incertaine.
06:23Les psychédéliques ont la capacité de tout chambouler.
06:30Hop !
06:31C'est la raison pour laquelle on obtient de bons résultats
06:34sur les troubles liés à une forme de rigidité psychique,
06:39comme la dépression, l'anxiété ou les troubles obsessionnels compulsifs.
06:43Tout prend soudain une autre direction.
06:47Des pensées surgissent et ouvrent de nouveaux angles d'approche.
06:50A la fin, on peut espérer réorganiser les choses
06:55en une mosaïque plus jolie,
06:57en se débarrassant peut-être au passage de quelques blocages.
07:02Mais la phase décisive,
07:04c'est cette agitation qui se produit dans le cerveau.
07:11L'étude, menée sous la direction de Gerhard Gründer,
07:15a été élaborée conjointement par l'Institut de Mannheim,
07:18la Charité à Berlin et la Fondation MIND
07:21en faveur de la recherche psychédélique.
07:24Elle est financée par le ministère allemand de la Recherche.
07:29On estime à 280 millions le nombre de personnes
07:32dans le monde atteintes de dépression.
07:35Les antidépresseurs et les thérapies contribuent
07:37à soulager une bonne partie des souffrances,
07:40mais n'ont aucun effet sur plus d'un tiers des patients,
07:43soit au moins 90 millions d'individus.
07:45Les 144 participants à l'étude font partie de ce groupe.
07:50Ces 20 ou 30 dernières années,
07:53l'industrie pharmaceutique a investi des milliards
07:55pour mettre au point de nouveaux médicaments
07:57plus efficaces que les molécules antérieures.
07:59La plupart de ces projets ont tourné court
08:04parce que les résultats obtenus n'étaient pas meilleurs
08:06que ceux des antidépresseurs existants.
08:11On a jeté énormément d'argent par les fenêtres.
08:14Il faut le dire, nous sommes en crise
08:22parce que nous n'arrivons plus à aider un grand nombre de patients,
08:26que ce soit avec la psychothérapie ou la pharmacothérapie.
08:30Alors dans le monde entier,
08:33on redécouvre l'effet de certains champignons et plantes psychoactifs
08:36qui modifient l'état de conscience.
08:38La DMT contenue dans les lianes,
08:41l'ibogaïne dans l'écorce d'une racine,
08:44la mescaline dans certains cactus,
08:46le LSD dans l'ergot de seigle
08:48et enfin la psilocybine dans les champignons magiques.
08:53Certaines substances qui déclenchent des hallucinations
08:55sont connues depuis la nuit des temps
08:57au sein de peuples indigènes,
08:59dans le cadre de rituels chamaniques.
09:03C'est le sujet d'études du microbiologiste Félix Bly.
09:11Les molécules aux effets psychoactifs appartiennent à des classes très variées
09:15et les scientifiques font sans arrêt des découvertes étonnantes
09:19sur de nouvelles plantes.
09:21Je suis sûr que les champignons nous réservent aussi de belles surprises.
09:25car ce sont des petits chimistes de génie.
09:37Avec un groupe de chercheurs de l'université d'Iéna,
09:41Félix Bly a mis en évidence
09:43le mécanisme de production de la psilocybine.
09:46Mais un mystère demeure.
09:48Pourquoi plus de 100 champignons sur la planète
09:50contiennent-ils une substance
09:52occasionnant des hallucinations aussi fortes ?
09:55L'organisme humain transforme la psilocybine en psilocine.
10:01C'est elle qui induit une modification de la perception et de l'état de conscience.
10:05La psilocybine est une molécule très simple.
10:22Le squelette de base est constitué d'un noyau indole,
10:25qu'on peut voir ici et là.
10:28C'est cette structure.
10:31Ce qui est intéressant,
10:33c'est qu'on retrouve ce noyau indole dans le LSD.
10:37Je l'ai entouré là.
10:40Il est présent aussi dans la psilocyne
10:42ou encore dans la sérotonine,
10:44un neurotransmetteur présent dans le corps humain.
10:46Avec tout ça, on comprend pourquoi toutes ces molécules
10:51vont se fixer sur les mêmes récepteurs.
10:54La psilocybine et le LSD sont des substances psychédéliques,
10:58un terme formé à partir du grec qui signifie
11:00révélateur de l'âme.
11:01À Zurich, une équipe de chercheurs
11:08de la clinique psychiatrique universitaire
11:10étudie comment les psychédéliques
11:12modifient la communication entre les zones cérébrales.
11:16Les neurotransmetteurs,
11:18qui font circuler les informations entre les neurones,
11:21jouent ici un rôle important.
11:24Grâce aux technologies d'imagerie médicale,
11:26Franz Follenweider et Catherine Preller
11:28étudient l'effet des psychédéliques sur le cerveau.
11:32Les premières études sont menées sur des volontaires sains.
11:38Quand on prend un psychédélique,
11:40il passe d'abord dans le sang,
11:42puis il est acheminé jusqu'au cerveau,
11:45où se trouvent des récepteurs et des neurotransmetteurs.
11:49Les récepteurs sont comparables à des serrures,
11:52dont les neurotransmetteurs seraient les clés.
11:55Dès qu'ils atteignent le cerveau,
11:57la psilocybine ou le LSD
11:59ouvre une serrure très particulière.
12:01À savoir, les récepteurs de la sérotonine 2A.
12:07Parfois surnommée l'hormone du bonheur,
12:10la sérotonine est un neurotransmetteur essentiel.
12:13Lorsqu'un psychédélique cible ces récepteurs,
12:16le cerveau est stimulé.
12:18Les neurones envoient alors des impulsions inhabituelles
12:21dans tous les sens.
12:23Cela crée des connexions entre des zones du cerveau
12:25qui, en temps normal, communiquent peu entre elles.
12:28Les psychédéliques agissent également sur le thalamus.
12:34Au quotidien, cette structure cérébrale
12:36nous protège d'un trop-plein de stimuli extérieurs
12:39et ne laisse passer que les informations importantes.
12:41Sous l'effet du LSD et de la psilocybine,
12:46le thalamus remplit moins efficacement sa fonction de filtre.
12:53Il laisse donc circuler un plus grand nombre d'informations
12:56dans le reste du cerveau,
12:58et notamment vers les zones sensorielles
13:00avec lesquelles il est bien connecté.
13:02Par exemple, celles qui contrôlent la vue,
13:06mais aussi la motricité ou le toucher,
13:08comme ici.
13:14Ces zones se mettent à communiquer entre elles
13:16plus intensément qu'à l'accoutumée.
13:20Voilà pourquoi la prise de psychédéliques
13:21entraîne souvent une exacerbation des perceptions,
13:25à la fois vis-à-vis de l'environnement
13:27et de la conscience de soi.
13:28Les consommateurs peuvent ainsi
13:33entendre les couleurs,
13:35croire qu'une forêt leur parle,
13:38avoir des hallucinations.
13:55Mais la médaille a son revers.
13:57Un bad trip peut déclencher des angoisses
14:00et tourner au film d'horreur
14:01en faisant remonter à la surface
14:03des souvenirs enfouis dans l'inconscient.
14:10Ne croyez pas que la prise de psychédéliques
14:14ne fait voir que des licornes roses.
14:18Il n'en est rien.
14:20Il faut affronter des idées noires,
14:22des souvenirs qui ressurgissent
14:23et des angoisses profondes.
14:25Cela dit, on ne peut pas qualifier
14:27de « bad trip »
14:28toutes ces réactions inconfortables.
14:32Une expérience difficile
14:33peut être une bonne occasion
14:34d'en apprendre plus sur soi-même
14:36et ses propres mécanismes internes.
14:38et aussi les propres mécanismes internes.
14:47Aujourd'hui,
14:49Andreas va expérimenter
14:50sa première prise de substance.
14:53Il a été bien préparé aux angoisses
14:54qui pourraient survenir
14:55lors de la séance.
14:57S'il tente ce saut dans l'inconnu,
14:59c'est parce qu'il pense avoir
15:00épuisé les autres pistes.
15:01« Après toutes ces années,
15:05j'ai fini par me résoudre
15:06à essayer autre chose
15:07que la psychothérapie
15:08ou les médicaments.
15:14Quand j'ai entendu parler
15:15de cette étude,
15:16je me suis dit que c'était l'occasion
15:18d'essayer quelque chose
15:20de complètement différent. »
15:24Les participants reçoivent
15:25deux doses de substances
15:27à six semaines d'intervalle.
15:29Elles sont administrées
15:30par Mikael Koslowski,
15:32coordinateur de l'étude.
15:34« Il s'agit soit d'une capsule
15:36de psilocybine,
15:37soit d'un placebo.
15:39Nous-mêmes,
15:39nous ne savons pas
15:39ce qu'elle contient
15:40quand nous la recevons.
15:41Ah, le voilà !
15:43La capsule arrive de la pharmacie
15:45où elle était sous clé.
15:47Bonjour.
15:52Comment ça va ?
15:53On vous a tout expliqué ?
15:55Comment vous vous sentez ?
15:57Un peu stressé,
15:58mais on a longuement parlé
16:00et je me sens rassuré.
16:03Et puis,
16:04je suis entre de bonnes mains.
16:07Je vous souhaite
16:07une bonne séance alors.
16:09On débriefera après.
16:13À plus tard.
16:15L'étude est organisée
16:16de façon à ce que
16:17chaque participant
16:18soit assuré de recevoir
16:19une dose élevée de psilocybine
16:21au cours d'une des deux séances.
16:23En général,
16:24il s'agit de patients
16:25qui ont déjà essayé
16:26beaucoup de traitements.
16:28La plupart ont déjà pris
16:29plus d'une dizaine
16:30de substances différentes
16:31dans leur vie.
16:33Alors,
16:33ils fondent de grands espoirs
16:34sur cette étude.
16:37Plusieurs nous ont déjà dit
16:38« Vous êtes ma dernière chance ».
16:41Le lendemain,
16:48Andréas est redescendu
16:50de son trip.
16:54Au plus fort,
16:56c'était comme un voyage
16:57dans l'espace.
16:59Je me déplaçais
17:00dans des dimensions inconnues.
17:02Avec l'aide des thérapeutes,
17:07il fait le bilan
17:08de cette expérience extrême.
17:14Ce qui m'a le plus marqué hier,
17:17c'est le changement brusque
17:18de perspective.
17:19J'ai ressenti soudain
17:23cette impression
17:24d'enfermement
17:25qui était celle
17:26de mon enfant
17:27emprisonné
17:28dans sa maladie.
17:30Sauf que là,
17:31c'était moi
17:32qui étais piégé,
17:33comme si j'avais toujours
17:34grandi dans cette réalité,
17:36dans cet univers.
17:37Cette sensation
17:40d'emprisonnement
17:41m'a submergé d'un coup.
17:45Grâce à cette expérience,
17:47Andréas voit désormais
17:48sa vie sous un jour nouveau.
17:51La redécouverte
17:51de sentiments oubliés
17:52ou refoulés
17:53peut enclencher
17:54un processus de guérison.
17:57Bien souvent,
17:58les patients dépressifs
17:59regardent leur vie
18:00à travers un trou de serrure.
18:02Ces séances
18:03leur permettent
18:03d'élargir la focale.
18:05Elles ouvrent
18:06d'autres façons
18:06de voir les choses.
18:07Elles mettent en relation
18:08de nouvelles idées
18:09et permettent
18:10de nouvelles interprétations.
18:12C'est une petite révélation
18:13qui, à terme,
18:13portera ses fruits.
18:15Pas besoin
18:16d'un grand feu d'artifice
18:17ou de tout un cinéma.
18:18Ce sont parfois
18:19les choses les plus modestes
18:20qui produisent
18:21de grands effets.
18:22Comme un galet
18:23jeté à la surface de l'eau
18:24dont les ondes circulaires
18:28se propagent
18:28dans tout le lac.
18:36Lors de sa première séance,
18:39Lia a également vécu
18:41un trip à la psilocybine.
18:43Le lendemain,
18:44sa mère vient la chercher.
18:53Alors, ce voyage,
18:54c'était très bien.
18:58Je suis contente.
18:59Comment tu te sens ?
19:09Bien, merci.
19:10Un peu fatiguée.
19:12J'espère que tu t'es pas inquiétée.
19:15Non.
19:17Tu t'es bien entourée.
19:20Très bien entourée.
19:21Merci beaucoup.
19:22La jeune femme
19:25reverra ses thérapeutes
19:26dans quelques jours
19:27pour faire le point
19:28sur cette expérience.
19:33Allez-y doucement
19:34ces jours-ci.
19:35Prenez soin de vous.
19:36Et on se revoit
19:37la semaine prochaine.
19:39Merci beaucoup.
19:41Moi aussi,
19:41je vous remercie.
19:42Je suis si contente.
19:44Oui.
19:45C'était une très bonne expérience.
19:47Tu as l'air en forme.
19:49Pleine de vitalité.
19:52Oui, je suis épuisée,
19:56mais je me sens vraiment bien.
20:01J'ai éprouvé des émotions
20:03très fortes
20:04et ça m'a plu.
20:07Ces larmes,
20:08ou plutôt ce chagrin,
20:11avaient quelque chose
20:11de magnifique
20:12sur le moment.
20:15Avant, je n'avais pas accès
20:17à tout ça.
20:19Pas accès à moi-même
20:20comme je l'ai senti hier.
20:22C'est comme si une barrière
20:26avait cédé
20:26entre moi
20:27et moi-même.
20:36Pour le psychiatre
20:37qui dirige l'étude,
20:38ces expériences très intenses
20:40sont aussi une nouveauté.
20:41C'est l'étude la plus importante
20:48que j'ai conduite,
20:49mais aussi la plus chargée
20:50en émotions.
20:52Les séances de thérapie
20:53que je mène avec ces patients
20:55sont plus poignantes
20:56que tout ce que j'ai connu
20:57auparavant dans ma carrière.
21:00Ces processus interpersonnels
21:02nous changent aussi,
21:03nous, les thérapeutes.
21:03sont plus poignantes.
21:06Chez Klaus,
21:07la psilocybine
21:08a provoqué
21:09une expérience
21:09de type mystique.
21:11Des études antérieures
21:12indiquent que ce type
21:13d'événement
21:14a souvent un effet
21:15positif sur l'humeur.
21:16J'ai fait une expérience divine.
21:23C'est-à-dire que j'ai vu
21:24cet être qui nous a créés
21:26et conçus.
21:28Il était très différent
21:29de ce que j'imaginais.
21:31Je suis la puissance
21:32qui a créé toute chose.
21:34Tu ne peux pas,
21:35tu ne pourras jamais concevoir
21:36ce que je suis.
21:37C'est pourquoi je me présente
21:39à toi sous une apparence
21:40familière.
21:41Un grillon,
21:42une pierre,
21:43un aigle ou autre chose.
21:45parce qu'on ne peut
21:46de toute façon
21:47pas se le représenter.
21:51C'était une figure
21:52à la fois masculine,
21:54féminine et neutre.
21:56Et en même temps,
21:57rien de tout ça.
21:59Ça m'a bouleversé.
22:02Au Mexique,
22:03les Mazatecs
22:04ont surnommé
22:05« chair des dieux »
22:06les champignons hallucinogènes
22:07consommés traditionnellement
22:09lors de rituels chamaniques.
22:11Comment ces champignons
22:12sud-américains
22:13se sont-ils fait une place
22:14dans la médecine occidentale ?
22:16Pour le savoir,
22:19direction le Muséum national
22:21d'histoire naturelle
22:22à Paris.
22:24Pendant ses études,
22:25l'historien des sciences
22:26Vincent Verrouste
22:27est tombé par hasard
22:28sur les archives
22:29du mycologue français
22:30Roger Heim,
22:31ancien directeur du musée.
22:33Des bobines de films oubliés,
22:36des enregistrements,
22:37et même un trésor.
22:42Des champignons
22:44rapportés par le scientifique
22:46de ces expéditions
22:47hautes en couleurs.
22:51Au moment où ils ont découvert
22:53les champignons
22:54hallucinogènes du Mexique,
22:55c'était quand même
22:55une découverte sensationnelle
22:57rien que parce qu'on redécouvrait
22:59des usages
23:01qui semblaient disparus
23:03depuis des siècles.
23:07En 1956,
23:09Roger Heim se rend
23:10dans une petite ville
23:11des montagnes de Loaxaca
23:12au Mexique,
23:13Huautla de Riménès.
23:15Il est accompagné
23:16d'un couple de chercheurs
23:17atypiques,
23:18Valentina
23:19et Robert Gordon-Wasson.
23:20Trois ans plus tôt,
23:24ces derniers ont assisté
23:25à des rituels
23:26à base de champignons
23:27divinatoires
23:27dirigés par une chamane,
23:29Maria Sabina.
23:37Roger Heim est à son tour
23:38témoin d'une cérémonie
23:40et goûte lui-même
23:41la chair des dieux.
23:43Jamais il ne se défra
23:44de la fascination
23:45que lui a inspiré
23:46cet épisode.
23:48Il se met en quête
23:49de champignons
23:49aux alentours,
23:50et en rapporte
23:51quelques spécimens
23:52en France.
23:58De retour aux Etats-Unis,
24:00Valentina et Gordon-Wasson
24:01vont faire connaître,
24:03grâce à leur publication,
24:04les champignons
24:05hallucinogènes
24:06au grand public.
24:08Roger Heim,
24:09de son côté,
24:10se concentre
24:10sur la recherche à Paris.
24:12Il veut savoir
24:13quelle est la substance
24:14responsable
24:15de cet effet psychotrope.
24:17Voyant que ses travaux
24:18piétinent,
24:19il demande de l'aide
24:20à un chimiste suisse.
24:23Albert Hoffman
24:23s'est fait connaître
24:24par ses études
24:25sur l'ergot de seigle,
24:26un champignon vénéneux
24:28à partir duquel
24:29il a réussi
24:29à synthétiser
24:30l'acide lysergique
24:31diéthylamide,
24:33ou LSD.
24:33Ensemble,
24:36les deux hommes
24:36identifient la molécule
24:37psychoactive
24:38des champignons
24:39mexicains,
24:40la psilocybine.
24:42Son potentiel médical
24:43n'échappe pas
24:44à Roger Heim
24:45et Albert Hoffman
24:46se lance dans la production
24:47de psilocybine
24:48de synthèse.
24:49« Ils se réjouissent
24:52d'avoir identifié
24:53le principe actif,
24:54absolument,
24:55et Roger Heim
24:56s'arrange
24:56pour que dès que
24:57le principe actif
24:59est synthétisé,
25:01pour qu'il soit testé
25:02à l'hôpital Saint-Anne
25:04en psychiatrie.
25:07Et c'est donc en France
25:08que pour la première fois,
25:09on a mené des essais cliniques
25:10avec la psilocybine
25:12à l'hôpital. »
25:15Au cours des années 1950 et 1960,
25:17des psychédéliques
25:18sont administrés
25:19à quelques 40 000 patients
25:21dans le monde
25:21et étudiés de près.
25:22« Dans les années 1950 et 1960,
25:23des psychédéliques
25:24sont administrés
25:25à quelques 40 000 patients
25:29dans le monde
25:29et étudiés de près. »
25:35« Dans les années 1950 et 1960,
25:44le LSD devient
25:45la substance emblématique
25:47des milieux hippies
25:48à la recherche
25:49d'états de conscience modifiés.
25:51D'autres psychédéliques
25:52gagnent en popularité.
25:54C'est l'époque
25:55où la jeunesse américaine
25:56manifeste contre l'ordre établi
25:58et la guerre au Vietnam.
25:59Aux yeux du président Nixon,
26:01la drogue devient
26:02l'ennemi public numéro un.
26:04Il fait interdire
26:05les psychédéliques
26:06et toute recherche
26:07à leur sujet,
26:08malgré de premiers résultats
26:09encourageants.
26:10Non seulement on a jeté
26:13le bébé avec l'eau du bain,
26:15mais on a carrément
26:15brûlé la baignoire.
26:17C'est fou de voir
26:19comme on a mis sous le tapis
26:21des approches thérapeutiques
26:22intéressantes et prometteuses
26:23et qu'on a même fait en sorte
26:27qu'elles tombent
26:27dans l'oubli.
26:32Quand j'ai commencé
26:33mes études de médecine,
26:34les manuels décrivaient
26:36le LSD et la psilocybine
26:38comme des poisons
26:38très dangereux,
26:40à la fois du point de vue
26:41du risque de psychose
26:42et de la toxicologie.
26:45Il ne mentionnait même pas
26:47les tentatives
26:48d'utilisation thérapeutique
26:49de ces substances.
26:53Cette interdiction
26:54va également occulter
26:55les recherches
26:56de Hans Karl Leuner,
26:58psychiatre
26:58et psychothérapeute allemand.
27:01Une dérogation
27:01lui permet jusqu'en 1986
27:03de traiter des patients
27:05avec de faibles doses
27:06de LSD et de psilocybine.
27:09Il contribue ainsi
27:10à créer la thérapie psycholithique.
27:14Son assistant d'alors,
27:15le psychiatre Torsten Passy,
27:17poursuit aujourd'hui
27:18ses recherches
27:19sur les psychédéliques.
27:21Il a relaté dans ses écrits
27:22la méthode mise au point
27:23par Hans Karl Leuner.
27:27Ça nous a permis
27:28d'approfondir le travail thérapeutique
27:30tout en essayant
27:31de l'accélérer.
27:32A l'époque,
27:34nous voulions surtout
27:35aider les patients
27:36très repliés sur eux-mêmes,
27:37qui n'arrivaient pas
27:38à s'ouvrir
27:39en raison de leur passé traumatique.
27:43Ils avaient besoin
27:43de cette stimulation pharmacologique
27:45pour faire émerger
27:47des choses
27:47de leur inconscient
27:48ou d'ailleurs.
27:52Ils pouvaient ainsi
27:52se détendre un peu intérieurement
27:54et se montrer réceptifs
27:56au processus psychothérapeutique.
27:58Aujourd'hui,
28:08plusieurs études sur ces effets
28:10sont en cours
28:11dans différents pays.
28:12En Suisse,
28:13des autorisations exceptionnelles
28:15sont accordées au compte-gouttes
28:17pour les thérapies psycholithiques.
28:18Premier psychiatre helvète
28:23à bénéficier
28:24de ce régime spécial.
28:26Peter Gasser
28:27a d'abord utilisé
28:28le LSD
28:28pour soulager
28:29de leurs angoisses
28:30des patients cancéreux.
28:32Aujourd'hui,
28:32il applique ce traitement
28:33à d'autres cas.
28:35Une poignée de psychiatres
28:36et de psychothérapeutes
28:37en Suisse
28:38lui ont emboîté le pas.
28:39Les psychédéliques
28:47sont connus
28:47pour inhiber
28:48certains mécanismes
28:49mentaux de défense.
28:51Ils peuvent ainsi
28:51révéler des traumatismes
28:53profondément enfouis.
28:55C'est la substance
28:56qui mène la danse.
28:57Moi,
28:58je ne suis qu'un auxiliaire.
29:00Si je vois un patient
29:01en difficulté
29:01ou en souffrance,
29:03je vais vers lui
29:04et je lui prends la main
29:05ou je lui tiens la tête
29:06ou les pieds
29:07selon le cas.
29:08Je lui demande
29:09si ça va.
29:11En fonction de la situation,
29:12j'essaie de lui apporter
29:13le soutien nécessaire
29:14pour traverser
29:14ce moment difficile.
29:17Pendant des années,
29:18Andreas a souffert
29:19d'un trouble obsessionnel
29:21compulsif
29:21qui le poussait
29:22à se laver
29:23en permanence.
29:24Aucun traitement
29:25médicamenteux
29:26ou psychothérapeutique
29:27ne parvenait
29:28à le soulager
29:29et son toque
29:30ne faisait qu'empirer.
29:32Quand on est obligé
29:33de passer deux heures
29:34par jour à se laver,
29:35ça fait beaucoup
29:36de temps perdu.
29:36Et puis c'était
29:38une obsession permanente
29:39au quotidien.
29:41Qu'est-ce que je touche ?
29:43Est-ce que c'est sale ?
29:45Il ne restait plus
29:47de place dans ma tête
29:48pour passer du bon temps
29:48et profiter de la vie.
29:50Le toque occupait
29:51vraiment toute mon existence.
29:52J'étais au fond du trou.
30:01Je pensais sérieusement
30:02à mettre fin à mes jours.
30:06Pour Andreas,
30:07la psychothérapie
30:08assistée par Psychédélique
30:10est le traitement
30:10de la dernière chance.
30:12Mais ses effets
30:13ne sont pas immédiats.
30:14la psychothérapie est un chemin.
30:21Et même quand on travaille
30:22avec ces substances,
30:24cela reste avant tout
30:25un processus en devenir.
30:26Ça permet parfois
30:28d'aller plus vite
30:29et d'approfondir
30:30certaines choses.
30:31Mais il faut tout de même
30:32du temps pour passer
30:33par les différentes étapes.
30:36C'est pourquoi il est
30:37parfois nécessaire
30:37de s'y reprendre
30:38à plusieurs fois
30:39quand on aborde
30:40les événements traumatisants
30:41et de s'en approcher
30:42progressivement.
30:45N'oublions pas
30:46que si les patients
30:47refoulent
30:47et oublient
30:48leur traumatisme,
30:50c'est avant tout
30:50parce que ce sont
30:51pour eux
30:51des événements
30:52extrêmement douloureux,
30:53voire insoutenables.
30:59Il a fallu à Andreas
31:00quatre séances
31:01avec prise de LSD
31:02pour que la source
31:04présumée de sa souffrance
31:05remonte à la surface.
31:07Depuis,
31:08il peut aborder
31:09le problème en thérapie.
31:11Ça a été comme une gifle.
31:18J'ai fait « Oh ! »
31:19J'étais sous le choc.
31:21Je me suis souvenu
31:22qu'à 15 ans,
31:23j'avais été drogué
31:24et sans doute violé
31:24et brutalisé
31:25au cours d'une nuit.
31:28J'étais là, bien sûr,
31:30mais j'avais complètement
31:32occulté et refoulé
31:33ce souvenir.
31:37Si tout ça m'était revenu
31:39lors de mon premier trip,
31:39je ne sais pas
31:41ce que j'aurais pu
31:41m'infliger.
31:44C'est comme si
31:45les séances précédentes
31:46m'avaient préparé
31:47à affronter ça.
31:51Maintenant,
31:52j'ai retrouvé
31:53un quotidien agréable
31:54et une vie
31:55que j'ai envie de vivre.
31:59Dans le cadre
31:59de l'étude allemande,
32:01les participants
32:01font l'objet
32:02d'un suivi
32:02psychothérapeutique
32:03pendant trois mois
32:04et se soumettent
32:05à plusieurs examens.
32:07Deux entretiens complémentaires
32:08ont lieu au bout
32:09de six mois
32:09puis d'un an.
32:12Lia,
32:13Hans-Christian
32:13et Andreas
32:14ont tous les trois
32:15déjà reçu
32:16une dose importante
32:16de psilocybine.
32:19Je suis passée
32:20en un temps record
32:21d'une impasse
32:22à une amélioration
32:23très nette
32:23de ma situation.
32:28Maintenant,
32:28j'arrive à faire
32:29des choses pour moi,
32:30des choses que je reportais
32:31depuis longtemps.
32:38Forcément,
32:38je me demande
32:38ce que ça donnera
32:39cet hiver.
32:41Qu'est-ce qui se passera
32:41quand je me retrouverai
32:42à nouveau
32:43dans une situation
32:43pénible pour moi ?
32:46Est-ce que ce sera
32:47plus facile ?
32:48Est-ce que je vais
32:49replonger en dépression
32:50dans quelques mois ?
32:53Ce n'est pas exclu.
32:54j'ai encore beaucoup
32:57de mal à gérer
32:57mon énergie.
33:00Je consigne les choses
33:01au jour le jour
33:02pour avoir
33:02une base objective.
33:05Je note ce que j'appelle
33:06ma durée de concentration
33:07qui recouvre un peu tout.
33:10La douche,
33:11les courses,
33:12le repassage,
33:12etc.
33:14Toutes les tâches
33:15pour lesquelles mon cerveau
33:16doit se mettre en marche.
33:19Et je suis déjà content
33:19si j'arrive à quatre heures
33:20d'attention cumulées
33:21dans la journée.
33:22J'ai noté un changement.
33:26Maintenant,
33:27je me demande,
33:28comme le formulent
33:29les objectifs de l'étude,
33:30si ce changement
33:31va durer
33:32et si oui,
33:34combien de temps ?
33:35En ce qui me concerne,
33:39je ne peux pas encore répondre.
33:44Ce n'est pas parce
33:45qu'un patient vit
33:46une expérience psychédélique
33:47qu'il va en intégrer
33:49les effets
33:49et en voir les conséquences.
33:51C'est un chemin
33:52semé de revers,
33:54de déceptions
33:55et d'obstacles.
33:57Il faut souvent
33:57s'y reprendre
33:58à plusieurs fois
33:58et ça demande
34:00de la force,
34:00de la détermination
34:01et du travail.
34:05Les équipes
34:06de Mannheim
34:06et de Berlin
34:07font régulièrement
34:08le point ensemble
34:09sur leurs observations.
34:11pour la prochaine étude,
34:18il faudrait augmenter
34:18la fréquence
34:19d'administration
34:20et la durée
34:23du traitement.
34:28Il faut aussi
34:28plus de séances
34:29de psychothérapie,
34:30plus d'intégration.
34:32S'il est possible
34:35d'envisager
34:35plusieurs prises
34:36de psychédéliques
34:37dans le cadre
34:37d'un traitement,
34:39c'est aussi
34:39parce qu'il ne crée
34:40pas d'accoutumance.
34:42Ces substances
34:43ne provoquent pas
34:44de dépendance physique,
34:45ce qui tient
34:45à plusieurs choses.
34:47D'abord,
34:48l'effet de récompense
34:49via la stimulation
34:50du système
34:51de la dopamine,
34:53qui est très fortement
34:53déclenchée
34:54par d'autres produits,
34:55n'existe pas
34:56avec les psychédéliques.
34:57Ensuite,
35:00il y a un élément
35:00psychologique.
35:02Un trip
35:02est très éprouvant
35:04pour la plupart des gens,
35:05comme des montagnes russes.
35:11Autrement dit,
35:12on n'a pas envie
35:13de revivre ça
35:14tous les jours.
35:16Troisième facteur,
35:17les psychédéliques
35:18saturent les récepteurs
35:19de la sérotonine,
35:21qui ont alors
35:21tendance à refluer.
35:24Si l'on prend
35:24de la psilocybine
35:25deux jours de suite,
35:26la seconde prise
35:28n'aura pratiquement
35:28aucun effet.
35:31En quelque sorte,
35:32l'organisme
35:33nous protège
35:33en nous empêchant
35:34d'abuser
35:35de ces substances.
35:40Une étude
35:41conduite
35:41par David Nutt,
35:43ancien conseiller
35:43du gouvernement britannique
35:44en matière de drogue,
35:46a établi
35:47que les psychédéliques
35:48se situaient très bas
35:48sur l'échelle
35:49de dangerosité
35:50des drogues.
35:51C'est l'alcool
35:52qui se place
35:52en tête du classement,
35:54compte tenu
35:54de ses effets nocifs
35:55pour le consommateur
35:56et pour son entourage.
36:02Avec 3 millions
36:03de victimes par an,
36:05il est la cause
36:05de plus de 5%
36:06des décès
36:07dans le monde.
36:10Chercheur en addictologie,
36:12Michael Nassila
36:13milite depuis longtemps
36:14pour un renforcement
36:15des avertissements sanitaires
36:17sur les bouteilles.
36:17Mais le lobby
36:20des producteurs
36:20d'alcool
36:21résiste.
36:22Pourtant,
36:23la consommation
36:24d'alcool
36:24est à l'origine
36:25de nombreuses maladies.
36:28Principalement,
36:29c'est les cancers.
36:30Ensuite,
36:31c'est les maladies
36:31cardiovasculaires,
36:34notamment l'hypertension
36:35ou l'accident
36:36vasculaire cérébral
36:37hémorragique,
36:39les maladies du foie
36:40et puis,
36:40bien évidemment,
36:41l'addiction,
36:42puisque l'alcool
36:42est une drogue.
36:43C'est dur, finalement.
36:43La psilocybine
36:46pourrait-elle avoir
36:47un effet bénéfique
36:48dans les cas
36:48de dépendance
36:49à l'alcool ?
36:51C'est ce qu'étudie
36:52Michael Nassila
36:53avec d'autres instituts
36:54de recherche européens.
36:56Catherine Preller
36:57est responsable
36:58de la branche suisse
36:59de l'étude.
37:00Dans ce cadre,
37:0160 participants
37:02sont traités
37:03à la psilocybine.
37:06Il se passe
37:07beaucoup de choses
37:08dans le cerveau
37:09d'un alcoolo dépendant.
37:11Et malgré nos efforts,
37:12nous ne comprenons
37:13encore pas tout.
37:15Mais on sait
37:15qu'une consommation
37:16répétée d'alcool
37:17modifie le cerveau
37:18parce qu'il s'y adapte.
37:22À mesure que le circuit
37:23de la récompense
37:24s'active,
37:25l'alcool acquiert
37:26de plus en plus
37:27d'importance.
37:29C'est d'ailleurs
37:29la raison pour laquelle
37:30les patients
37:31risquent toujours
37:32de rechuter.
37:39Sous la direction
37:40de Michael Nassila,
37:41des chercheurs
37:42de l'université
37:43de Picardie
37:44à Amiens
37:44étudient l'effet
37:45de la psilocybine
37:46sur les rats.
37:48Ici,
37:49les rongeurs
37:49peuvent obtenir
37:50de l'alcool
37:51en actionnant
37:51un interrupteur.
37:53Très vite,
37:54ils se mettent
37:54à appuyer dessus
37:55de plus en plus souvent
37:56et à boire
37:57de plus en plus.
37:58dans un deuxième temps,
38:10on administre
38:11de la psilocybine
38:12aux animaux
38:12avant de réitérer
38:13l'expérience.
38:15Leur comportement
38:15change du tout au tout.
38:16L'injection de psilocybine
38:27diminue la consommation
38:28d'alcool.
38:29Le plus fascinant,
38:30c'est que non seulement
38:32la psilocybine joue
38:33sur la consommation
38:34d'alcool,
38:35mais il va jouer aussi
38:35sur d'autres mécanismes
38:38comme le contrôle
38:40de la consommation
38:41d'alcool
38:42ou le fait
38:43que la consommation
38:44d'alcool
38:44devienne inflexible,
38:45un automatisme.
38:47On passe en mode automatique
38:48qu'on consomme
38:49l'alcool
38:51sans avoir du tout
38:52le contrôle
38:53de la consommation
38:54et la psilocybine
38:55pourrait redonner
38:56du contrôle
38:56et faire en sorte
38:58ainsi qu'on consomme
38:58moins d'alcool.
39:02Ces premiers résultats
39:03méritent d'être approfondis.
39:06En collaboration
39:07avec l'Institut du cerveau
39:08à Paris
39:09et sous la houlette
39:10de Luc Mallet,
39:11psychiatre et chercheur
39:12en neurosciences,
39:13une vaste étude
39:14sur la dépendance
39:15à l'alcool
39:15a été lancée.
39:17Elle s'inscrit
39:18dans le prolongement
39:18des travaux
39:19menés dans les années 1960.
39:22Dans ce cadre,
39:23plus de 200 patients
39:24sont traités au LSD.
39:25Aujourd'hui,
39:26nous disposons
39:27d'outils en neurosciences
39:28pour les étudier
39:29de façon beaucoup plus précise
39:31que dans le passé.
39:32Donc en fait,
39:32c'est comme si on redécouvrait
39:33une planète
39:35ou un univers
39:36où on a de plein
39:37d'autres outils
39:37pour comprendre
39:38beaucoup plus en avance
39:39ce qui se passe
39:40et je pense que c'est ça
39:41qui est très excitant
39:42pour les chercheurs.
39:43pour des gens comme nous
39:43d'aller vers ça.
39:44Et puis c'est un espoir
39:45d'une action thérapeutique
39:48et puis un espoir
39:49qui s'accompagne
39:51justement dans la pratique.
39:53Donc c'est passionnant
39:54parce qu'il y a des aspects
39:55très neurobiologiques,
39:57très fondamentaux,
39:57mais des aspects
39:58de pratique psychothérapeutique
40:00et aussi des aspects sociaux
40:02de la reconfiguration
40:03de qu'est-ce que signifie
40:05la réintroduction
40:06de ces substances.
40:06Le grand public
40:08s'intéresse lui aussi
40:09aux psychédéliques.
40:11Les congrès internationaux,
40:13comme la conférence
40:13Insight à Berlin,
40:15attirent de plus en plus
40:16de profanes
40:17aux côtés des spécialistes.
40:20Les investisseurs,
40:21eux aussi,
40:22ont flairé
40:23un marché lucratif.
40:24Au milieu de cet engouement,
40:26il est important
40:26de ne pas perdre de vue
40:27les risques et les dangers
40:28inhérents à ces substances.
40:30Les membres
40:31de la fondation Mind
40:33y veillent.
40:37Il ne faut pas oublier
40:38que les psychédéliques
40:39ont aussi des effets délétères.
40:41Dans certains cas,
40:43ils peuvent déclencher
40:43des troubles anxieux
40:44ou des crises de panique.
40:46Et même si c'est assez rare,
40:48ils peuvent entraîner
40:49une altération
40:49de la perception.
40:53Il faut en parler
40:54sans tabou.
40:56Les utilisateurs
40:57doivent bien sûr
40:57être au courant.
40:58mais il faut que la société
41:01toute entière
41:01ait conscience
41:02de ces risques.
41:04Ce qui nous manque,
41:06c'est une campagne
41:07d'informations claires
41:08au sujet des psychédéliques.
41:11Comme toujours,
41:11le grand public
41:12entend parler
41:13de ce qui fait le buzz,
41:14soit les nouvelles alarmistes,
41:16soit les attentes excessives
41:17vis-à-vis des psychédéliques.
41:21Il faut diffuser
41:22des informations scientifiques
41:23sur les possibilités
41:25ainsi que les limites
41:26de ces substances.
41:28de ces psychédéliques.
41:30Beaucoup de sujets
41:31en bonne santé
41:32tolèrent bien
41:32les psychédéliques,
41:33même hors surveillance médicale.
41:36Mais selon
41:36les prédispositions
41:37de chacun,
41:38ils peuvent déclencher
41:39chez certains
41:40des psychoses,
41:41comme la schizophrénie.
41:47L'hôpital de la Charité
41:49à Berlin
41:49a mis en place
41:50une consultation
41:51dédiée aux substances
41:53psychédéliques.
41:54Les patients
41:54sont reçus
41:55par le psychiatre
41:56Tomislav Majic,
41:57qui participe
41:58par ailleurs
41:59à l'étude
41:59sur la dépression.
42:02On peut prendre
42:03une substance
42:04et en ressentir
42:05les effets
42:05plusieurs mois après,
42:06parfois un an plus tard.
42:10Je trouve ça fascinant.
42:11ça permet de nourrir
42:14de grands espoirs.
42:17On trouvera peut-être
42:18un jour
42:18un traitement
42:20qui n'obligera pas
42:21à prendre
42:21un médicament
42:22au quotidien.
42:25On dit souvent
42:26que les psychédéliques
42:28sont plus efficaces
42:29que les antidépresseurs.
42:31À force,
42:32ça peut donner envie
42:32à certaines personnes
42:33d'essayer par elles-mêmes.
42:35Et comme ces substances
42:36ne sont pas disponibles
42:37légalement sur ordonnance,
42:39ces gens risquent
42:41de vouloir
42:41s'en procurer
42:42par leurs propres moyens,
42:44ce qui est souvent risqué.
42:47Avec d'autres confrères,
42:49le microbiologiste
42:50Félix Bly
42:50a mis au point
42:51en 2020
42:52des kits de tests
42:53permettant
42:54de vérifier
42:54la concentration
42:55et la composition
42:56d'une drogue
42:56avant consommation.
42:58Ils ont été utilisés
42:59dans le cadre
43:00d'un projet pilote
43:01d'aide aux toxicomanes
43:02en Thuringe.
43:04Roxana Preuss
43:05a elle aussi
43:06contribué à ce programme.
43:07Le gros problème,
43:09c'est que les gens
43:11obtiennent ces substances
43:12illégalement,
43:13donc hors de tout contrôle.
43:15La plupart des urgences
43:16ou des accidents
43:17liés à la drogue
43:17viennent du fait
43:18que les consommateurs
43:19ne connaissent pas
43:20la composition précise
43:21ou la concentration
43:22de substances actives
43:23de ce qu'ils ont pris.
43:27Impossible également
43:28de déterminer
43:29à vue d'œil
43:29la teneur en psilocybine
43:31des champignons
43:32hallucinogènes.
43:33La quantité contenue
43:34dans le psilocybe
43:35cubensis,
43:36par exemple,
43:37n'est pas la même
43:38que celle des variétés
43:39vendues légalement
43:40sous l'appellation
43:41truffe magique
43:42aux Pays-Bas.
43:44On constate
43:45une grosse différence
43:46de dosage
43:46entre les deux.
43:48Même s'ils contiennent
43:49tous les deux
43:49la substance active,
43:51il y en a trois fois plus
43:51dans le cubensis
43:52que dans la truffe.
43:57C'est aussi pour cela
43:58que la recherche scientifique
43:59utilise des molécules
44:00de synthèse.
44:02Les psychédéliques
44:03présentent un certain potentiel
44:04dans le traitement
44:05de la dépression.
44:06Mais on ignore encore
44:08quelles sont
44:08les modifications cérébrales
44:10qui conduisent
44:10à ces améliorations.
44:15On étudie les effets neuronaux
44:17et les changements
44:18d'activité dans le cerveau.
44:21C'est un point de départ
44:23pour comprendre
44:23les mécanismes antidépresseurs
44:25de la psilocybine.
44:26La région cruciale
44:29en la matière
44:30est celle de l'hippocampe
44:31qui traite les informations
44:33et contribue
44:34à la formation
44:34des souvenirs.
44:38En cas de dépression,
44:40l'hippocampe a tendance
44:41à s'atrophier.
44:43On veut savoir
44:44si l'administration
44:45de psilocybine
44:46permet ou non
44:46d'inverser ce phénomène
44:48ou si elle induit
44:50d'autres variations
44:50de taille.
44:56La plasticité neuronale
44:58est également
44:58au cœur des recherches.
45:02La neuroplasticité,
45:04c'est ce qui permet
45:05aux patients
45:05d'apprendre facilement
45:06de nouvelles choses
45:07et d'en oublier
45:08de plus anciennes.
45:10Ça peut permettre
45:10des avancées
45:11du côté de la psychothérapie,
45:13dans la mesure
45:14où le patient
45:14se voit lui-même
45:15sous un jour nouveau
45:16et considère
45:17le monde autrement.
45:20En Allemagne,
45:22l'étude est encore
45:23en cours.
45:24Mais en Suisse,
45:25l'équipe de Catherine Preller
45:26a terminé un essai
45:28portant sur 60 sujets
45:29qui compare l'effet
45:30de la psilocybine
45:32à celui d'un placebo.
45:36La grande question
45:40au cœur de l'étude
45:41était de savoir
45:43si la prise de psilocybine
45:45pouvait atténuer
45:47la gravité
45:47des symptômes dépressifs.
45:49Cette hypothèse
45:51est clairement vérifiée.
45:53Le groupe traité
45:54à la psilocybine
45:55présente un recul
45:56des symptômes
45:57plus prononcé
45:58que la cohorte placebo.
46:01Les nombreuses données
46:02recueillies
46:02confirment les observations
46:04issues d'autres études
46:05de moindre envergure.
46:08Grâce à la psilocybine,
46:10les patients se remettent
46:11notamment à éprouver
46:12des sentiments
46:13et des émotions.
46:14Les résultats
46:21sont vraiment encourageants.
46:25Les sujets
46:26qui ont reçu
46:26de la psilocybine
46:27ont tendance
46:29à apprécier différemment
46:31leurs émotions
46:31et à moins
46:33les réprimer.
46:33pour un psychothérapeute
46:37c'est très intéressant
46:40et très pertinent
46:41d'un point de vue clinique.
46:46Laissez libre cours
46:47à ses affects.
46:48Hans Christian
46:49n'y parvenait plus
46:50depuis 20 ans
46:51malgré de multiples traitements
46:53et de longs séjours
46:54à l'hôpital.
46:56Lors de sa prise
46:56de psilocybine,
46:58il a senti
46:58ses résistances intérieures
47:00se lever.
47:05J'avais l'impression
47:06d'être complètement
47:08livré à moi-même.
47:10Comme si on avait
47:11empilé tous les moments
47:12où je m'étais senti seul
47:13pour former une montagne
47:15qui représentait
47:16la somme
47:17de toutes les souffrances
47:18d'une vie.
47:19C'était une douleur
47:20crue et brutale.
47:22Pourtant,
47:22j'ai tenu le coup.
47:25Grâce à la substance,
47:26j'ai surmonté
47:26ce moment très éprouvant.
47:30Maintenant,
47:35j'espère pouvoir
47:36mieux supporter
47:37les sentiments désagréables,
47:38y compris les plus intenses.
47:40Ça voudrait dire
47:40que je suis sur la voie
47:41de la guérison.
47:47Huit mois se sont écoulés
47:48depuis que l'IA
47:49a reçu de la psilocybine.
47:51Elle a pu reprendre
47:52ses études à plein temps
47:53après plusieurs années
47:54en pointillées
47:55à cause de ses rechutes
47:57dépressives.
48:00« Ça va beaucoup mieux.
48:04J'ai l'impression
48:05de pouvoir mieux
48:06utiliser mon cerveau.
48:09J'ai réussi
48:09mes derniers examens
48:10sans être
48:11complètement angoissée.
48:14D'habitude,
48:14je vomissais
48:15avant les épreuves.
48:17C'était l'enfer.
48:20Là,
48:21je n'ai eu
48:21pratiquement
48:22aucune appréhension.
48:23c'était
48:24un énorme changement.
48:29Trois mois
48:30après sa prise
48:31de substance,
48:32Andrea
48:32s'en perçoit
48:33les bénéfices,
48:34mais s'interroge
48:35beaucoup.
48:36« L'effet
48:38est réel
48:38et je le sens
48:39encore.
48:41Mon problème
48:42maintenant,
48:43c'est d'intégrer
48:44cette nouveauté
48:45à mon quotidien.
48:46parce que concrètement,
48:50le monde
48:50qui m'entoure,
48:51lui,
48:51n'a pas changé.
48:57Il y a par exemple
48:58des choses
48:59très problématiques
49:00que je ne veux plus
49:01ou que je ne peux
49:02plus accepter.
49:04C'est comme
49:05si je me rendais
49:06soudain compte
49:06qu'il fallait
49:07que quelque chose
49:07change
49:08à long terme.
49:09En l'absence
49:21de résultats
49:21complets,
49:22il est trop tôt
49:23pour tirer
49:23des conclusions
49:24définitives.
49:30L'effet
49:31des psychédéliques
49:31varie fortement
49:32d'un sujet
49:33à l'autre.
49:34Chez certains,
49:34il est minime.
49:36Pour beaucoup,
49:36il apporte
49:37une amélioration
49:38notable.
49:39Klaus,
49:42l'un des sujets,
49:44a vécu
49:44une expérience
49:45à laquelle
49:45il ne s'attendait pas.
49:51Après la première séance,
49:52je me suis endormi.
49:55Un sommeil profond
49:56et sans rêve.
49:58Au réveil,
49:59j'ai eu la certitude
50:00d'être guéri.
50:02Mes problèmes
50:02avaient disparu
50:03après 20 ans d'errance.
50:05C'était formidable
50:06et extrêmement réjouissant.
50:08J'en suis très reconnaissant.
50:10Le cas de Klaus
50:11est atypique,
50:13même au sein de l'étude.
50:14Mais pour les patients
50:15qui y sont réceptifs,
50:16les psychédéliques
50:17présentent un avantage.
50:19Contrairement aux antidépresseurs,
50:21il n'est pas nécessaire
50:21de les prendre au quotidien,
50:23ni sans doute
50:24toute la vie.
50:26Notre but ultime
50:27est de catalyser
50:28un processus
50:29qui permettrait
50:30de guérir les gens
50:31en stimulant
50:32leur résilience
50:33et leur force intérieure.
50:34de façon à ce qu'un malade
50:38qui traverse
50:39un épisode dépressif
50:40recouvre la santé.
50:44Encouragés par les résultats
50:46obtenus
50:46chez certains patients,
50:48de nombreux dépressifs
50:49demandent aujourd'hui
50:49à bénéficier
50:50d'un traitement
50:51par psychédélique.
50:52Des voix s'élèvent
51:00pour demander
51:00une autorisation
51:01de mise sur le marché
51:02accélérée.
51:04Mais pour cela,
51:06il faut d'abord
51:07réaliser d'autres études
51:08portant au moins
51:09sur un millier
51:10de participants
51:10afin de confirmer
51:12les premiers essais.
51:16Les psychédéliques
51:17ont sans aucun doute
51:18le potentiel
51:19de changer la vie
51:19de nombreux patients
51:20atteints de troubles psychiques.
51:22mais il faut prendre
51:25le temps
51:26de faire les choses
51:27dans les règles.
51:29Le but est d'élaborer
51:30un traitement
51:30sur des bases scientifiques
51:31qui pourra être appliqué
51:33sérieusement
51:34et en toute sécurité.
51:35et d'élaborer
51:37un traitement
51:37et d'élaborer
51:38un traitement
51:39et d'élaborer
51:40un traitement
51:40sur des bases scientifiques.
51:43Sous-titrage Société Radio-Canada

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