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  • 28/05/2025
Un demi-siècle d’Apartheid en Afrique du Sud à travers les témoignages des survivants, mais aussi des responsables des crimes perpétrés. Du massacre de Sharpeville en mars 1960, à la libération de Nelson Mandela en février 1990, cette série documentaire met en lumière les enjeux d’une quête de justice inachevée en exposant la ségrégation raciale, les violences et les inégalités qui ont marqué ce chapitre des plus sombres de l’histoire de ce pays.

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00:00Mon frère Ahmed a été assassiné une semaine avant son 30e anniversaire, dans ce bâtiment.
00:18Nous étions engagés dans la lutte contre l'Apartheid.
00:22On se battait contre un ennemi extrêmement brutal.
00:31C'était le commissariat central. On l'appelait « la maison de l'horreur ».
00:39D'après la police, mon frère se serait jeté de cette fenêtre pendant un interrogatoire.
00:46Ni ma mère, ni personne de ma famille n'a jamais cru à cette version.
00:53C'était un meurtre maquillé en suicide.
00:57On savait que l'État l'avait tué. Mais comment accède-t-on à la vérité 45 ans après ?
01:14En 1994, Nelson Mandela devient le premier président noir d'Afrique du Sud
01:20et met en place la Commission Vérité et Réconciliation, la TRC, suivant ses initiales anglaises.
01:26Le nouvel État veut prouver au monde que les horreurs de l'Apartheid appartiennent désormais au passé.
01:32Mais 30 ans plus tard, les blessures restent ouvertes, les coupables se dérobent.
01:37Les gens comme moi, les tueurs, nous devons parler.
01:42Les crimes de l'Apartheid sont trop longtemps restés sous le tapis.
01:47Les victimes, elles, sont toujours en quête de vérité et de justice.
01:52Il fallait que ça tombe sur quelqu'un. Le destin m'a choisi.
01:57Des témoins ont accepté de raconter leur histoire et dévoilent le vrai visage de l'Apartheid.
02:05Il y a tellement de questions qui restent sans réponse.
02:09Notre pays ne pourra pas avancer tant que nous n'aurons pas fait toute la vérité sur l'Apartheid.
02:23L'Apartheid, l'éthique de l'État
02:27L'éthique de l'État
02:50En 1950, le gouvernement blanc d'Afrique du Sud adopte la loi sur l'enregistrement de la population.
02:57Tous les citoyens sont classés dans une des catégories de population suivante.
03:01Blanc, indien, métis ou noir.
03:05La couleur de peau détermine où on vit, où on travaille et avec qui on peut se marier.
03:20Nous avions une maison, une voiture, tout.
03:24On n'était pas de nous des gens meilleurs, mais on avait tout ce qu'on voulait.
03:31On était dans la catégorie des blancs.
03:35On était les privilégiés.
03:42Nous restions entre nous, c'était comme si les noirs n'existaient pas vraiment.
03:47On ne les voyait jamais conduire une voiture, par exemple.
03:51Je n'en ai pas cru mes yeux.
03:57Il y avait les bons, c'est-à-dire nous, les blancs, les privilégiés, et les autres, les méchants.
04:03C'était les communistes, comme on nous le répétait tout le temps.
04:07Le danger noir, comme ils disaient.
04:14J'étais dans la catégorie des personnes non-blanches, c'est-à-dire des noirs africains.
04:22On n'avait pas le droit d'interagir avec des blancs, sauf dans le cadre professionnel, avec notre patron.
04:28Mais il était interdit de se côtoyer en privé.
04:32La ségrégation touchait tous les domaines de la vie.
04:35Il y avait des espaces réservés aux blancs et d'autres réservés aux noirs.
04:39C'était comme ça, c'était normal.
04:42Quand on est enfant, on ne se rend pas compte que cela n'a rien de normal.
04:51Dans le système de l'apartheid, vous confrontez en permanence à votre couleur de peau et votre statut.
04:58On était dans la catégorie des indiens, c'est-à-dire surtout non-blancs, non-européens.
05:05Il était interdit de s'asseoir sur certains bancs ou d'aller dans certains parcs, parce qu'ils étaient réservés aux blancs.
05:12Dans les trains, il y avait une première classe réservée aux blancs et une seconde classe pour les Africains, les Indiens et les Métis.
05:21Dans notre quartier, il n'y avait pas de piscine, pas de cours de tennis.
05:26Mais quelques centaines de mètres plus loin, on voyait les enfants nager dans des piscines publiques et jouer au tennis.
05:38Je suis une enfant de l'apartheid.
05:41Nous vivions dans une banlieue ségrégée.
05:44Les seuls Noirs qu'on voyait y venaient pour travailler.
05:48Nous avions une employée de maison que je n'ai toujours connue que sous le nom de Grace.
05:55Un jour, il y a eu un incident.
05:59Grace a dit à ma mère « Vous me traitez comme de la merde noire ».
06:06Ma mère l'a virée.
06:08On ne l'a plus jamais revue.
06:14Je suis issue d'un mariage mixte.
06:16Ma mère était Métis et mon père était enregistré comme Indien.
06:21On avait un appartement en plein centre-ville, mais l'État nous a forcés à déménager dans une banlieue construite spécialement pour les Indiens.
06:30Les effets de ces déplacements étaient considérables.
06:34Pas seulement sur notre mobilité, mais aussi sur nos relations sociales.
06:40C'était un processus de déshumanisation.
06:51Nous étions des Noirs africains, tout en bas de la hiérarchie.
06:57Mes parents ont été relogés dans un township construit par l'État pour déplacer les Noirs en périphérie des villes.
07:05On habitait loin du centre et c'était un combat quotidien pour aller au travail et revenir le soir.
07:12Nous avons toujours été conscients de l'injustice du système, mais nous savions que la moindre contestation allait être violemment réprimée.
07:24Le système de l'apartheid est mis en place par les Africaneurs, une population blanche d'origine majoritairement néerlandaise,
07:31fière et très soudée depuis sa guerre d'indépendance sanglante menée contre l'Empire britannique.
07:45C'est sous la gouvernance de Hendrick Fairweather que l'Afrique du Sud quitte le Commonwealth britannique et devient une république.
07:52L'homme devient un héros pour tous les Africaneurs et pour sa famille.
07:58Hendrick Fairweather était mon grand-père. Il a été premier ministre de 1958 à 1966.
08:06Il avait grandi dans la culture Africaneur.
08:08C'est une identité très forte fondée sur les récits fondateurs d'un petit groupe de Blancs qui a obtenu sa liberté de haute lutte contre le puissant Empire britannique.
08:18Cette culture est un objet de fierté permanent.
08:21Les Africaneurs possédaient des organisations culturelles très influentes, comme la société secrète Broderbond.
08:27Elle rassemblait des personnes qui occupaient des postes de pouvoir et veillait à ce que les directeurs d'école et même les pasteurs soient toujours des fidèles de la cause Africaneur.
08:40L'église réformée néerlandaise a contribué de manière déterminante à développer l'idéologie d'une société fondée sur la séparation des groupes ethniques.
08:49Elle en a fourni la justification morale.
08:54On pouvait acheter des terres, posséder des biens immobiliers, accumuler des richesses.
08:59Nous avons accaparé 87% du territoire sud-africain et nous nous sommes servis de Dieu pour justifier nos actions.
09:19Mon grand-père a probablement été le principal artisan de cette idéologie.
09:25Il est l'architecte de l'apartheid.
09:38C'est lui qui a conceptualisé l'apartheid en ces termes.
09:41Il ne s'agit pas de dominer ni d'opprimer la majorité des sud-africains noirs.
09:46Nous voulons simplement permettre à chaque groupe ethnique de vivre sur son propre territoire.
10:00Regardez-le expliquer que son concept d'apartheid est mal compris.
10:04Il s'agit d'une politique de bon voisinage, avec ce sourire à la fin.
10:12La politique de ferveur suscite une opposition grandissante.
10:17Des organisations comme l'ANC, le Congrès National Africain, lancent un vaste mouvement de contestation.
10:25En mars 1960, un autre mouvement de libération, le Congrès Pan-Africain, le PAC, organise un rassemblement de masse à Charleville.
10:35Tsoanan Lapo agrandit avec les récits de ce jour fatidique.
10:40Les gens du PAC étaient des dissidents de l'ANC. Ils étaient plus fiers, plus rebelles, ils défiaient le système.
10:50Mes deux grands-mères ont participé à cette manifestation contre une loi qui obligeait tous les Noirs à avoir sur eux un passeport intérieur.
10:57Ce document restreignait notre liberté de circulation, et c'est ce que nous avons fait.
11:01Ce document restreignait notre liberté de circulation, et nous empêchait en fait de vivre normalement.
11:10L'État voulait contrôler tous nos mouvements, pour qu'on ne puisse pas aller là où il ne voulait pas de nous.
11:17Si je sortais de chez moi pour aller chez mon voisin sans mon passeport et que je croisais un policier zélé, je pouvais être emmené au poste, et même déporté vers un homeland.
11:29Ces lois étaient une manière de dire, vous nous appartenez, et nous vous utilisons selon nos besoins.
11:48Mes grands-mères m'ont dit qu'elles y sont allées parce que c'était un rassemblement pacifique.
11:54Personne n'avait d'armes.
11:59Nous avons mobilisé les gens parce que le passeport intérieur était un outil d'oppression.
12:05On chantait « Israël et tout maï bouillée Africa ». On chantait.
12:10On n'avait pas de pierres ni rien qui aurait pu servir comme arme.
12:17Un avion survolait la manifestation et prenait des photos.
12:23On était devant le poste de police.
12:24Les policiers sont sortis et nous ont ordonné de nous disperser et de rentrer chez nous.
12:30On a répondu, on ne partira pas, arrêtez-nous.
12:34On n'a pas nos passeports.
12:37Il y a eu un mouvement de foule, les gens poussaient contre la barrière.
12:42De l'autre côté, il y avait les policiers avec des pistolets paralysants.
12:54J'ai souvent entendu dire que la police avait paniqué.
12:59Elle a justifié sa réaction par le précédent de l'émeute de Kato Manor où il y avait eu des morts parmi les policiers.
13:06Donc à Sharpeville, ils étaient nerveux et ils ont tiré.
13:15Ils ont tiré sur la foule, en rafale.
13:20Ils tiraient dans le dos des gens qui essayaient de s'enfuir.
13:24Ça a été un massacre instantané.
13:35Des corps gisaient au sol.
13:37J'ai vu des gens ensanglantés.
13:42J'ai vu le cerveau d'un homme.
13:44Il lui avait tiré dans la tête.
13:49C'était horrible.
13:51J'avais 5 ans.
13:54On était chez nous.
13:56On a vu des avions dans le ciel.
13:59Et on a voulu sortir pour les regarder.
14:02Mais ma mère nous a retenus.
14:09Mon frère a suivi un groupe qui se dirigeait vers le poste de police.
14:15Il avait 12 ans.
14:17Il avait 12 ans.
14:24Les tirs l'ont touché au cœur et sont ressortis dans le dos.
14:29Il était gravement blessé.
14:35Comment peut-on être aussi cruel ?
14:38Il avait 12 ans.
14:43On n'a pas pu l'amener à l'hôpital.
14:44Il est mort sur place.
14:54Après le massacre, il s'est mis à pleuvoir.
14:57Et la pluie a lavé le sang.
15:00On était le 21 mars.
15:04Tous les ans, il pleut le 21 mars.
15:08La mort de mon frère nous a dévastés.
15:11Et il y a eu un vide dans la maison.
15:15Il n'y avait plus de joie.
15:26On pensait toujours qu'il reviendrait un jour.
15:29Même aujourd'hui, quand j'y repense, c'est douloureux.
15:37J'ai mal ici, quand je parle de 1960.
15:48J'ai mal ici.
15:52J'ai mal ici.
15:55J'ai mal ici.
15:59Je sens quelque chose.
16:02Ça me fait mal.
16:10La police fait état de 69 morts.
16:13Mais les habitants de Sharpeville disent que le nombre de personnes
16:16qui ne sont pas revenues chez elles après le massacre était bien plus élevé.
16:23Dans les premiers bilans, il était question de 20 morts.
16:26Puis c'est passé à 50.
16:28Ça n'a pas arrêté de changer jusqu'à ce qu'ils se mettent d'accord sur 69.
16:36On a appelé le pasteur.
16:37On voulait enterrer nos morts.
16:40Quand on est arrivé à la morgue du commissariat de Sharpeville,
16:43on a vu les cadavres qui commençaient à se décomposer.
16:48Ils les avaient tous jetés en tas.
16:57Nous ne savons toujours pas combien de corps ont été inhumés au cimetière.
17:04Le plus douloureux arrive maintenant.
17:07Quand je vois ce que ça me fait alors que je ne l'ai pas vécu,
17:10j'imagine à peine ce qu'ont ressenti les personnes qui y étaient.
17:15Quand les cercueils sont arrivés le jour des funérailles,
17:18on a dit aux proches, là-dedans, il y a ta mère.
17:23Mais personne n'a pu voir les corps une dernière fois,
17:26comme le veut la tradition en Afrique.
17:33Mon frère a été enterré par la police.
17:37On n'est même pas sûr que ce soit lui dans la tombe,
17:42parce que c'est l'État qui s'est occupé de tout.
17:48Toutes les personnes qui ont été encerclées,
17:50toutes les personnes qui ont assisté aux événements vous diront
17:53que le nombre de 69 morts ne correspond pas à la réalité.
17:56Il y en a eu beaucoup plus.
17:59Nous attendons toujours les réponses à nos questions.
18:03La véritable histoire de Sharpeville doit être racontée.
18:07À Sharpeville, le monde découvre les horreurs de l'apartheid.
18:10Tandis que la communauté internationale condamne le massacre,
18:13le Premier ministre Fairweird félicite la police pour son action.
18:19Il faut que je fasse attention à moi quand j'en parle,
18:21tellement tout ce qui est associé à lui est douloureux.
18:26Je ne sais pas pourquoi, mais j'ai l'impression
18:29qu'il y a beaucoup d'espoir dans la communauté internationale.
18:33Je suis tombé sur une photo de mes grands-parents
18:35entourés de leurs petits-enfants.
18:37Sur ses genoux à lui, il y a un petit bébé en grenouillère jaune.
18:42J'ai compris que c'était moi, âgé de 6 mois.
18:46Sa pose est presque maternelle,
18:48ce qui ne correspond pas du tout à l'image qu'on peut avoir de lui.
18:56J'ai lu le journal intime de ma grand-mère.
18:58Ils étaient largement en faveur d'une répression dure
19:00parce qu'ils étaient obsédés par leur peur
19:02de perdre le contrôle de la situation.
19:05Ils soutenaient l'action de la police et de l'armée,
19:07y compris à Sharpeville.
19:18J'avais 12 ans.
19:20On a appelé les policiers,
19:22on a appelé les policiers,
19:24on a appelé les policiers,
19:27on a appris par la radio ce qui s'était passé.
19:30Mes trois frères partageaient une chambre
19:32et j'étais avec eux sur le lit quand la nouvelle a été annoncée.
19:36C'était la première fois que j'entendais
19:38que des manifestants pacifiques
19:40se faisaient tirer dessus et tuer
19:42en raison de leur couleur de peau.
19:46J'ai été bouleversé.
19:52Je pense que Sharpeville a été un moment charnière.
19:56On a compris ce jour-là
19:58que les moyens pacifiques ne mèneraient nulle part,
20:02qu'on n'obtiendrait pas la liberté
20:04en dialoguant avec le régime.
20:08Nelson Mandela, qui est déjà une personnalité
20:10de premier plan de l'ANC,
20:12écrit au premier ministre.
20:14Il lui demande de cesser les actes de répression brutale
20:17et de donner les mêmes droits à tous les Sud-Africains.
20:21Cette lettre n'a manifestement pas été prise au sérieux.
20:29Même s'il l'avait lue,
20:31mon grand-père n'aurait jamais répondu à ses demandes.
20:34Il savait que si les Blancs abandonnaient le pouvoir
20:37ou qu'ils accordaient le même droit
20:39de participation politique à toutes les populations,
20:42il n'aurait plus de prise sur l'avenir.
20:44Sa plus haute mission était de protéger
20:46les intérêts des Africaneurs par tous les moyens.
20:51En Europe, vous pouvez obtenir la paix
20:53seulement en séparant les nations.
20:56En Afrique du Sud, vous pouvez obtenir la paix
20:59seulement en séparant les nations.
21:02Vous imaginez si mon grand-père avait été plus ouvert d'esprit,
21:05plus à l'écoute,
21:07la souffrance qui aurait été épargnée à ce pays ?
21:12L'ANC avait toujours été une organisation non violente,
21:17convaincue que le combat pacifique
21:19déboucherait forcément sur la liberté.
21:23La décision de passer à la lutte armée
21:25n'a donc pas été prise à la légère.
21:28Mais il n'y avait pas d'autre choix.
21:50Tous ceux qui critiquaient vraiment le système
21:53étaient réduits au silence ou marginalisés.
21:56Les leaders de l'ANC étaient tous emprisonnés à Robben Island.
22:00Le parti communiste était interdit.
22:02Le régime savait s'y prendre pour étouffer les oppositions.
22:19...
22:43La radio était tout le temps allumée chez nous.
22:46Et c'est comme ça qu'on a appris le verdict.
22:50On était soulagés parce qu'il n'avait pas été condamné à mort.
22:55Parce que tant qu'il y a de la vie, il y a de l'espoir.
23:04J'étais maintenant convaincu qu'on ne pouvait plus continuer à vivre comme ça.
23:09Il fallait prendre les armes pour combattre l'apartheid.
23:14En 1961, Nelson Mandela a créé la branche armée de l'ANC.
23:19Um Kanto Wesi Zwei, littéralement Faire de l'Ance de la Nation,
23:22connu sous les initiales MK.
23:26Ses membres sont envoyés à l'étranger
23:28où ils sont formés au maniement des armes et aux opérations clandestines.
23:33Mon frère Ahmed avait 8 ans de plus que moi.
23:36Il était parti à Londres pour suivre un entraînement militaire
23:39avec le mouvement de résistance.
23:43Ahmed était une personne adorable.
23:45Il avait beaucoup d'empathie pour les gens pauvres.
23:48Ce n'était pas quelqu'un qui jouait les durs,
23:50mais il était courageux.
23:53Ahmed trouvait que j'étais un bon à rien,
23:55mal élevé qui ne faisait que des bêtises.
23:57Alors il m'a fait venir à Londres.
24:01J'ai suivi un entraînement d'un mois environ.
24:04Un des membres fondateurs du MK était un expert en explosifs.
24:08Et il m'a appris à fabriquer ce qu'on appelait des bombes à tracts.
24:14Quand le dispositif explose,
24:16les tracts sont propulsés dans le ciel et dispersés.
24:20J'ai appris à fabriquer ces bombes avant de retourner en Afrique du Sud.
24:31Alors que le MK multiplie les actes de sabotage et les attentats,
24:35la répression se fait encore plus brutale.
24:38La police est sommée d'étouffées toutes formes de contestations.
24:47Mon père était policier et c'était un raciste pur et dur.
24:52Un jour, on marchait dans la rue,
24:54mon père ici, mon frère là et moi derrière.
24:58Quand on croisait des Noirs,
25:00mon père leur donnait un coup de pied dans les chevilles.
25:03Comme pour leur dire « Qu'est-ce que tu fiches là ? »
25:05« Dégage ! »
25:07« Je ne savais plus où me mettre. »
25:09« Comment peut-on être aussi méchant ? »
25:11En rentrant, je l'ai défié et je lui ai demandé pourquoi il faisait ça.
25:16Il m'a répondu « Ce ne sont pas tes oignons, va dans ta chambre. »
25:22Et pour que je comprenne qu'il ne fallait pas poser ce genre de questions,
25:25il m'a flanqué une rouste.
25:30Il m'a beaucoup battu, parfois jusqu'au sang.
25:33Il était extrêmement agressif, très auto-centré.
25:39Je pense que son travail de policier
25:41lui permettait de laisser libre cours à cette agressivité.
25:46Sous l'apartheid, les policiers pouvaient se lâcher.
25:50C'était comme un jeu pour eux.
25:55Nous avons fait des recherches,
25:57nous avons fait des recherches,
25:59nous avons fait des recherches,
26:02mon frère m'a montré les titres des journaux.
26:06Je ne comprenais pas ce qui se passait.
26:11Tout ce qu'on savait, c'est que mon père avait des problèmes
26:14à cause d'un homme qui s'était jeté par la fenêtre.
26:18Mais à la maison, il ne parlait jamais de son travail.
26:21Jamais.
26:25C'était une époque difficile.
26:28La politique du régime était de plus en plus brutale.
26:31Particulièrement envers les militants politiques.
26:35Après mon séjour en Europe,
26:37je suis revenu vivre dans notre petit appartement de Johannesburg.
26:42Ahmed et moi, on était de retour dans l'apartheid.
26:49On participait à des actions clandestines,
26:51on faisait exploser nos bombes à tract
26:53pour tester jusqu'où on pouvait aller.
26:56Ahmed Timol était enseignant et membre du parti communiste.
27:04Mon père le connaissait assez bien.
27:07C'était une figure importante,
27:09très active dans l'organisation et la mobilisation des étudiants.
27:16Il était en voiture avec un collègue
27:18quand la police les a arrêtés.
27:21Ils ont fouillé le véhicule
27:23et ont trouvé des documents et des pamphlets compromettants.
27:28Pendant qu'Ahmed Timol est interrogé,
27:31les services de la sécurité intérieure épluchent ses contacts
27:34et multiplient les descentes,
27:36comme chez les parents de Yasmine Souka,
27:38qui assistent à la fouille de l'appartement.
27:43Le nom de mon père figurait sur la liste des personnes
27:46auxquelles Ahmed Timol envoyait des pamphlets.
27:54Le lendemain matin de l'arrestation,
27:56des agents de la sécurité intérieure et la carrure imposante
27:59ont débarqué chez nous
28:01pour chercher des écrits subversifs, comme ils disaient.
28:05Quand ils sont repartis,
28:07notre appartement ressemblait à un champ de bataille.
28:10Ce qui m'a le plus choquée, c'était l'état de mon père.
28:14Je l'avais toujours admiré pour sa force et son courage,
28:17mais c'était comme s'il avait été réduit à néant.
28:19C'est à ce moment-là que j'ai réellement pris conscience
28:22du pouvoir des Blancs.
28:27Il était 8 heures du matin.
28:29Je dormais encore.
28:31Je me suis réveillé encerclé par six agents de la sécurité intérieure
28:34qui m'ont emmené au poste.
28:39L'interrogatoire a commencé.
28:41J'ai nié avoir suivi un entraînement militaire.
28:44J'y résistais tant que j'ai pu.
28:46Je devais me tenir debout sur une brique
28:49en tenant au-dessus de moi, les bras tendus,
28:52deux annuaires téléphoniques.
28:55Dès que je flanchais, ils me frappaient et me jetaient à terre.
28:58Puis je devais me relever et reprendre ma position.
29:03Dans ces moments-là, tu ne penses plus à rien
29:05sauf à survivre et à supporter la torture.
29:12Un type est rentré dans l'appartement.
29:14Un type est rentré dans la pièce et m'a lancé
29:17« Mohamed, mauvaise nouvelle, ton frère est mort ».
29:22Ils m'ont dit qu'il s'était jeté par la fenêtre
29:25alors qu'il était interrogé par la sécurité intérieure.
29:29J'étais sous le choc, mais est-ce que je pouvais les croire ?
29:32Je ne leur faisais pas confiance.
29:36On m'a reconduit au commissariat central.
29:40Sur le chemin, j'ai vu la une d'un journal
29:43accroché à un poteau électrique.
29:46Le titre disait « Chute mortelle ».
29:52Il s'agissait sans doute d'Ahmed.
30:00Apparemment, les policiers étaient occupés à interroger des suspects
30:03quand un homme qu'ils avaient installé dans une pièce
30:06serait passé en courant devant mon père
30:08pour se jeter par une grande fenêtre.
30:12Et c'est comme ça qu'il serait mort.
30:16La question que je me suis toujours posée,
30:18c'est qu'est-ce que mon père faisait là-bas ?
30:21Quel était son rôle ?
30:23Est-ce qu'il a fait quelque chose à cet homme ?
30:31Ils m'ont relâché.
30:34Quand je suis rentré à la maison,
30:36ma mère m'a dit qu'un policier en uniforme
30:39avait annoncé la mort d'Ahmed.
30:42L'enquête avait conclu à un suicide.
30:48Nous étions dévastés.
30:50Personne de la famille ne croyait à cette histoire.
30:57Ahmed Timole aurait soi-disant sauté du dixième étage.
31:01D'après ce que nous savions,
31:03il avait été si gravement torturé
31:05qu'il n'aurait même pas eu la force
31:07de sauter sur le rebord pour sauter.
31:12Son cadavre a été déposé à la mosquée de Johannesburg
31:15pour être lavé.
31:18Beaucoup de gens ont pu voir son corps couvert d'hématomes,
31:21son visage tuméfié et ses yeux révulsés.
31:24C'était terrifiant.
31:29C'était un crime complètement maquillé.
31:32Les policiers étaient d'une arrogance,
31:34tellement sûrs d'eux.
31:36Les Indiens ne savent pas voler.
31:38C'était la blague qui circulait chez eux.
31:40Ils se couvraient mutuellement.
31:46Je n'ai jamais cru à la version officielle.
31:48Je me méfiais de tout ce que les journaux écrivaient.
31:51Je savais que c'était un crime maquillé.
31:53Je savais que les policiers étaient protégés.
31:57Dès que j'ai eu mon bac, j'ai quitté la maison.
32:02J'ai pris mon sac, mis quelques affaires dedans
32:04et je me suis volatilisée.
32:07Sans aucun regret.
32:29En 1996, le gouvernement de Mandela
32:32met en place la Commission Vérité et Réconciliation,
32:35présidée par l'archevêque Desmond Tutu.
32:37La TRC promet la reconnaissance aux victimes
32:39et l'amnistie aux coupables
32:41qui livreront une confession détaillée de leurs crimes.
32:51Pendant 25 ans, la mort d'Armet Timol
32:53a été classée comme étant un suicide.
32:56Sa famille espère désormais apprendre
32:58toute la vérité sur les causes de sa mort.
33:02Il a fallu convaincre ma mère.
33:05Cela a été difficile, mais elle est venue
33:07et elle a pu dire tout ce qu'elle avait sur le cœur.
33:10Ça a eu un effet thérapeutique, je pense.
33:12Elle a parlé, parlé, et Tutu a pleuré.
33:33Les coupables ont refusé de se présenter devant la Commission.
33:37Aucune personne impliquée n'est venue témoigner.
33:40Ni Rodriguez, ni les autres, alors qu'ils étaient nombreux.
33:45Ils n'ont manifesté aucun remords.
33:48À l'issue des audiences,
33:50la TRC décide de transmettre le dossier au ministère public
33:53chargé de poursuivre les investigations
33:55pour une éventuelle mise en examen.
33:57La famille est soulagée.
34:02L'affaire est maintenant entre les mains du parquet.
34:04Le procureur va mener l'enquête.
34:06Voilà ce qu'on nous a dit, comme à beaucoup d'autres.
34:11Mais il ne s'est rien passé.
34:13Absolument rien.
34:17Je ne veux pas parler de trahison,
34:19mais l'État aurait dû faire plus.
34:22L'avocate des droits humains Yasmine Souka
34:24siégeait à la TRC.
34:26Elle est choquée par l'inaction de la justice
34:28dans l'affaire Ahmed Timole.
34:30Ce n'était pas simplement scandaleux.
34:32C'était une violation des droits des victimes.
34:36Ces gens étaient au front.
34:38Ils étaient en première ligne du combat pour la liberté.
34:41Et leurs familles l'ont payé du sacrifice ultime.
34:48On était convaincus que l'État avait tué mon frère.
34:51Mais comment accéder à la vérité ?
34:53Il faut que ça passe par un processus juridique.
34:57Ça a été une longue bataille,
35:00qui a duré près de 15 ans.
35:05En 2017, ils ont finalement réouvert le dossier.
35:11Après des années passées à rassembler des preuves et faire pression,
35:14la famille a réussi à convaincre la justice de relancer l'enquête.
35:26Mais il y a un problème de taille.
35:29Un seul coupable était toujours en vie,
35:31le policier Rodriguez.
35:34Mais le parquet prétendait être dans l'incapacité de le retrouver
35:37pour lui signifier sa mise en examen.
35:56Le policier est un activiste de la police, Ahmed Timol.
35:59Il est mort il y a plus de 45 ans.
36:02Un ancien policier apartheid, João Rodrigues,
36:05a été impliqué dans la torture de Timol en 1971.
36:09Rodrigues était le dernier homme à voir Timol en vie
36:12avant sa mort à la station de police de John Foster,
36:15comme elle était connue à l'époque.
36:17Une enquête de 1972 a déclaré que Timol a sauté à sa mort.
36:22J'étais en train de m'affairer dans la cuisine
36:24de la télévision qu'il n'arrivait pas à retrouver mon père.
36:27J'étais sidérée.
36:31Je pensais qu'il l'avait déjà arrêté.
36:34Comment pouvait-il ne pas le retrouver ?
36:36Ça ressemblait à un stratagème particulièrement grossier.
36:41J'ai dit à mon mari qu'il fallait qu'on se renseigne
36:43pour savoir qui travaillait sur ce dossier.
36:47On a posté des messages sur les réseaux sociaux,
36:50on a envoyé des e-mails, et on a fini par comprendre.
36:53Ils avaient mal orthographié son nom.
36:56Ce qui figurait sur sa carte de police
36:58était une transcription en africain, Rodorigues.
37:02Et les gens qui le connaissaient l'appelaient Yann,
37:05alors que l'orthographe correcte était Joao Rodrigues.
37:09Tout le monde se trompait, y compris les journaux.
37:12J'ai immédiatement contacté la famille
37:14pour leur donner le nom correct.
37:18Personne n'arrivait à localiser Rodrigues.
37:21Jusqu'à ce que sa fille contacte mon neveu.
37:25Je sais où il est, c'est mon père.
37:29Elle a trahi son propre père.
37:31C'est un geste extrêmement fort.
37:34Grâce aux informations fournies par Tilana,
37:37la police met enfin la main sur Rodrigues.
37:44Quelle satisfaction de pouvoir leur dire
37:46c'est lui et il habite là.
37:48Ça m'a fait un bien fou.
37:52Elle a été extrêmement courageuse.
37:55Il fallait oser se manifester et dire
37:57cet homme est un monstre et je sais où il est.
38:00Ce n'est pas rien.
38:03Sans elle, l'affaire aurait été classée,
38:05alors que c'était une des premières affaires de ce type
38:08et qu'elle avait donc une importance considérable pour le pays.
38:16Je me suis même fait un tatouage pour m'en souvenir.
38:19Ma famille va péter un plomb en voyant ça.
38:22Je me suis fait tatouer « Soyons courageux » et la date.
38:50Le procès a été traumatisant.
38:52Quand j'ai revu ce vieil homme qui était mon père,
38:55je me suis dit « Regarde-le, il est pitoyable ».
39:20Même au tribunal, il n'a pas dit la vérité.
39:23Il n'a pas raconté ce qui s'est vraiment passé.
39:27Rien du tout.
39:29C'était tout lui.
39:31Un homme qui garde le silence.
39:42Il a légèrement tremblé,
39:44mais il n'a pas dévié du récit officiel.
39:47Le détenu s'est jeté par la fenêtre.
39:50Il est resté loyal envers ses supérieurs.
40:12Le verdict est historique.
40:14Le juge déclare qu'Armet Timol a bien été assassiné
40:17et préconise de poursuivre Rodriguez pour meurtre.
40:23Ce verdict a été une délivrance incommensurable.
40:28C'est ce qu'il y avait de plus important pour nous.
40:34Il était enfin officiellement déclaré qu'Armet Timol ne s'était pas suicidé,
40:40qu'il avait été sauvagement torturé
40:42et jeté du haut de l'immeuble.
40:49Le tribunal a ordonné au parquet d'inculper Rodriguez, ce qu'il a fait.
40:54Rodriguez a fait valoir ses droits.
40:56Il a fait appel sur appel.
41:02Ça a pris du temps.
41:05Et finalement, il est mort avant d'avoir pu être jugé.
41:09Ça a été un coup dur pour la famille.
41:13Le processus s'est transformé en farce.
41:16L'affaire a été différée, différée encore et encore,
41:19jusqu'à ce qu'il décède de mort naturelle.
41:31Un deuil inachevé.
41:35C'était désolant pour la mère de Timol.
41:38Elle était si belle.
41:40Et je crois qu'elle était prête à pardonner.
41:43Et elle était prête à le faire à condition de savoir tout simplement.
41:48Elle est morte sans avoir su exactement ce qui était arrivé à son fils.
42:00Malgré les années qui ont passé,
42:02la quête de vérité reste un chemin de croix pour les victimes de l'apartheid.
42:06À Sharpeville, Suanan Lapo mobilise les habitants
42:09qui demandent à ce que l'État enquête sur le nombre réel des victimes du massacre.
42:14Ici, personne ne croit au nombre officiel de 69 morts.
42:19Pour ces hommes et ces femmes,
42:21le passé non résolu continue de résonner au présent.
42:30Il y a un rituel lorsque nous enterrons une personne.
42:34Nous devons voir le corps.
42:36Il faut qu'un membre de la famille lave une dernière fois la personne décédée d'une mort violente.
42:42C'est pour empêcher que la malédiction persiste.
42:49C'est parce que ces rituels n'ont pas été accomplis à l'époque du massacre
42:53que notre ville est ce qu'elle est aujourd'hui.
42:57Un lieu où le sang ne cesse d'être versé.
43:01Quand ce ne sont pas des attaques au couteau, ce sont des fusillades.
43:10Le passé m'a rattrapée le jour où mon frère a été tué à Sharpeville.
43:17C'était il y a 20 ans.
43:23Mon frère a été tué à proximité du cimetière.
43:27Il s'était embrouillé avec un type
43:30et cette dispute s'est terminée par un tir mortel.
43:35Dans le dos.
43:38C'est-à-dire de la même manière que les victimes du massacre de Sharpeville ont été abattues.
43:44Le seul moyen de mettre fin à cette malédiction, c'est de faire toute la vérité sur ce qui s'est passé.
43:51Pour comptabiliser le nombre réel de victimes,
43:54Suanan Lapo va solliciter l'aide de deux chercheurs américains.
44:03J'ai été mise en contact avec Bill et Nancy.
44:07Ils sont venus rencontrer les habitants qui avaient toujours affirmé qu'il y avait eu plus de morts,
44:11mais personne ne les avait jamais écoutés.
44:13Bill et Nancy ont donc milonné dans les archives.
44:19Le voyage que nous avons fait en 2018 nous a ouvert les yeux
44:23et nous a poussé à faire des recherches sur Sharpeville.
44:29Ces gens savaient qu'il y avait eu plus de victimes, mais n'avaient jamais pu le prouver.
44:35Nous effectuons des recherches sur l'Afrique du Sud depuis 40 ou 50 ans
44:39et nous pouvions les aider en accédant aux documents conservés aux archives nationales.
44:44Pendant l'apartheid, et particulièrement dans les années 70 et 80,
44:48les archives qui concernaient Sharpeville n'étaient pas consultables.
44:52La police en refusait systématiquement l'accès
44:54et il est aussi probable que les gens pensaient qu'elles avaient été détruites.
45:01Près de 65 ans après les faits, nous avons été les premiers à consulter ces documents de police
45:06et nous avons fait des découvertes considérables.
45:11Une de nos premières trouvailles était une liste avec les noms de toutes les personnes
45:15qui avaient été blessées ce jour-là.
45:18Beaucoup sont mortes ensuite.
45:20C'était un vrai document administratif établi par la police
45:23qui listait le nom, l'adresse et la profession de chacun.
45:30Cette liste était la clé, tout y était.
45:33Et comme l'a dit Bill, c'était un document officiel qui datait de l'époque des événements.
45:38Ce qui veut dire que la police savait.
45:45On voit la plaie d'entrée dans le dos et la plaie de sortie.
45:49Ce qui montre le travail méticuleux de la police.
45:54Nous avons trouvé des dossiers individuels avec les comptes rendus d'autopsie
45:58ou les comptes rendus médicaux pour les blessés.
46:01Nous avons fait des copies de tout.
46:06D'après nos calculs, il y a eu au moins 91 morts et au moins 238 blessés.
46:12C'est au minimum un tiers de plus que les chiffres officiels.
46:19Ces documents prouvent qu'il y a eu, ce jour-là,
46:22bien plus de morts que ce que la police a affirmé
46:25et que ce qui a été répété depuis.
46:31Tout ça parce que Henrik Fairweather en avait décidé un signe.
46:37Une question se pose dès lors.
46:39Qu'est-il arrivé au corps de ces victimes supplémentaires ?
46:43Nous avons identifié les personnes,
46:45mais nous ne savons pas ce qui s'est passé avec leurs dépouilles.
46:51Ce qui inquiète notamment les habitants de Chartresville,
46:54c'est l'éventualité que des cercueils puissent contenir plusieurs corps.
47:03On sait que sous l'Apartheid,
47:05les autorités déposaient régulièrement plusieurs corps dans un même cercueil
47:09ou dans une même tombe.
47:15Tellement de questions restent sans réponse.
47:22Il est essentiel d'établir le nombre exact de victimes.
47:28Les habitants de Chartresville vivent dans les mêmes maisons que leurs ancêtres.
47:32Ils passent tous les jours devant le poste de police qui n'a pas déménagé.
47:36Pour eux, l'histoire reste très vivante.
47:39Ils veulent que le passé soit reconnu et résolu.
47:47Désormais en possession d'épreuves,
47:49Tsoana a pris contact avec une unité spécialement chargée
47:52de la recherche des personnes disparues sous l'Apartheid.
47:56Elle a été créée par Madeleine Fullard
47:58sur recommandation de la Commission Vérité et Réconciliation.
48:02Elle travaille sous l'autorité du Parlement.
48:04Elle travaille sous l'autorité du parquet.
48:09Nous nous intéressons principalement aux personnes disparues
48:13ou dont le destin est inconnu.
48:16J'ai sauté de joie quand j'ai appris que vous viendriez.
48:18C'est un pas de plus vers la vérité.
48:21J'espère que les corps seront retrouvés.
48:24Comme vous l'avez indiqué,
48:26il reste beaucoup d'inconnus à résoudre
48:28pour aider les familles et les communautés à faire leur deuil.
48:32Selon une rumeur, il existerait dans le cimetière
48:35des fosses peu profondes qui contiendraient des corps.
48:39Elles ne sont évidemment pas répertoriées.
48:42Les dépouilles auraient été déchargées par un camion.
48:45Si c'est vrai, cela expliquerait que le destin
48:48d'un certain nombre de victimes soit inconnu.
48:52Nous essayons toujours de partir de données très concrètes.
48:56On pourrait choisir de travailler sur un ou deux noms
48:58et voir où ça nous mène.
49:01On va avoir 26 corps à rechercher.
49:04Vous avez une liste de 26 noms ? C'est incroyable.
49:07Oui, c'est énorme.
49:09Oui, il ne s'agit plus d'une ou deux personnes là.
49:11C'est un nombre considérable.
49:15D'après les recherches de Bill et Nancy,
49:17la liste compte 91 personnes décédées.
49:21Mais depuis, nous l'avons élargie à 95
49:24parce qu'ils ont découvert d'autres noms.
49:32Le problème, c'est que quand on creuse dans un cimetière,
49:35on trouve forcément des corps.
49:37Ce serait bien d'avoir des cartes.
49:39John, tu passes en premier ?
49:46Les 69 sont enterrés ici ?
49:49Oui, c'est le site funéraire.
49:57Les témoins de Bill et Nancy
50:00Entre 69 et 91, il y a une différence énorme.
50:04Que leur est-il arrivé ?
50:06Où sont-ils enterrés ?
50:08Repose en paix, ça ne veut rien dire dans ce lieu.
50:10Nous devons corriger le mal qui a été fait.
50:14Ça fait beaucoup de tombes et beaucoup d'informations d'un coup.
50:19Où est-ce qu'on peut commencer ?
50:21Il faut absolument enquêter sur les 20, 25 ou 26 victimes supplémentaires
50:26et déterminer leur lieu d'inhumation.
50:29Vous nous avez immensément aidés
50:31avec tout ce que vous nous avez dit sur ces victimes supplémentaires.
50:36Il est très important qu'elles soient enfin reconnues et comptabilisées.
50:42À l'issue de cette première visite,
50:44Madeleine Fuller d'a accepté de revenir avec son équipe
50:47pour mener le travail d'exhumation,
50:49dans l'espoir de découvrir les victimes supplémentaires.
50:52Nous devons retrouver les corps manquants.
50:55Pour moi, c'est le seul moyen de changer concrètement
50:57la vie des habitants de Sharpeville.
51:03Nous devons dissiper tous les mensonges de l'Apartheid.
51:23L'explosion les a soufflés tous les quatre.
51:25Ils voulaient les éliminer.
51:28Je me sentais condamné.
51:30Pour la première fois, j'étais impliqué dans un meurtre.
51:35On est dans un lieu, c'est une maison,
51:37on ne peut pas venir ici.
51:40On se dit qu'on est dans un endroit ou on est dans un lieu indépendant.
51:44On peut pas venir ici.
51:48On n'a pas le droit de venir ici.
51:50On était un escadron de la mort, on chassait les terroristes, on n'avait aucun respect
51:56pour la vie, pour rien.
51:57On a perdu nos frères, ils étaient si jeunes, on leur a volé leur avenir.
52:04Je vais parler aux avocats, le juge a dit non.
52:09Chaque fois qu'on vient à l'audience, c'est à journée, à quoi ça sert ? Je suis dégoûté.

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