INTROSPECTION - Les clés de succès de Soumia Malinbaum

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30/01/2025

INTROSPECTION du 30 janvier 2025

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00:00Soumya, j'ai eu un autre invité, il y a quelques semaines avant vous, qui disait

00:09que pour être un bon manager, il fallait avoir confiance en soi et avoir l'estime

00:14de soi.

00:15Est-ce que vous êtes d'accord avec ça ? Tout à fait d'accord.

00:18Oui ? Donc, vous avez confiance en vous, vous avez l'estime de vous ?

00:23Alors, la confiance, c'est plus une conséquence.

00:27En fait, moi, je doute beaucoup et donc je me prépare beaucoup, je travaille beaucoup.

00:33Parce qu'acquérir la confiance, ce n'est pas inné.

00:36On peut avoir été baigné dans un environnement familial où la confiance est en permanence,

00:43mais je mets au défi quelqu'un qui arrive avec son embarqué de confiance.

00:49La confiance, ça se construit.

00:50On constate qu'on a de la confiance, mais ce n'est pas quelque chose qu'on a.

00:54Et on fait des choses, on ose et on se prépare.

00:58Moi, j'ai beaucoup travaillé en fait pour avoir confiance en moi.

01:02Beaucoup travaillé sur vous ?

01:03Non, j'ai jamais été voir de psy par exemple et peut-être je le regrette maintenant, mais

01:09j'ai beaucoup travaillé, j'ai beaucoup été besogneuse, c'est-à-dire toujours

01:14le syndrome de la bonne élève, il faut toujours en faire plus, il faut être dans l'excellence.

01:20Non pas parce que j'étais une femme, si, mais j'avais le fameux double plafond de

01:24verre, une femme d'origine étrangère, en l'occurrence maghrébine.

01:29À l'époque où je suis arrivée dans le monde du travail, c'était dans un secteur

01:35où c'était plutôt des hommes et des ingénieurs, c'était très très difficile.

01:40Et donc, je n'ai pas eu confiance en moi et c'est pour ça que j'ai dû me travestir.

01:45Travestir, vous employez un mot fort.

01:49Oui, je le dis, parce que d'ailleurs je l'ai souvent dit, et c'est pour ça qu'aujourd'hui

01:52je ne veux plus qu'aucune femme ait besoin de cacher.

01:56C'est en vous retournant sur votre propre passé.

01:58Exactement, parce que quand j'ai créé ma boîte en 91, sous fond de guerre du golfe

02:03et avec un environnement informatique économique dans le monde de la tech où il n'y avait

02:09que des hommes, j'étais toujours habillée en noir, en costume gris, comme d'ailleurs

02:15aujourd'hui encore.

02:17J'ai longtemps refusé la couleur, donc après il y a des séquelles, et j'ai fait en sorte

02:25d'être le moins féminine possible.

02:28Parce qu'ils vous accueillent à 16h.

02:31Non, mais pour être crédible, il y avait un sujet de crédibilité.

02:35Vous êtes dirigeante dans les années 90 d'une boîte de la tech, vous allez répondre

02:40à un projet de data platform, de move to cloud, je vais utiliser les mots d'aujourd'hui,

02:45et vous avez en face de vous des directeurs informatiques.

02:48Encore aujourd'hui, il n'y a que deux femmes directrices informatiques du CAC 40, ça n'a

02:53pas beaucoup avancé.

02:54Là, il n'y avait que des hommes, des hommes en costume gris, et il fallait aller leur…

02:59Et aucun n'a tendu la main en disant « c'est quand même formidable d'avoir une femme,

03:05il faut l'aider, elle est courageuse, elle l'a.

03:08»

03:09Il y en a eu certains, il y avait aussi beaucoup de sexisme ordinaire, beaucoup.

03:13D'ailleurs, j'ai fait un TEDx à ce sujet, même quand je proposais des consultantes,

03:18à l'époque, on me disait « ah non, non, mais elle est belle, est-ce qu'elle est

03:21mignonne ? »

03:22Il y avait quand même ce sexisme décomplexé qui n'existe plus aujourd'hui, parce qu'on

03:29a des gardes fous, mais qui était une réalité, et qu'on entend encore parfois dans les

03:34entreprises ce sexisme un peu ordinaire, que Brigitte Grézy a bien démontré.

03:40Donc moi, cette période-là a été une période très difficile pour moi, parce que j'ai

03:43dû faire justement le déni de ce que j'étais.

03:47Et ça n'a pas duré longtemps, puisque dès que j'ai eu un peu des résultats économiques,

03:52dès que j'ai pu sortir la tête et ma personnalité, je n'ai plus négocié avec

04:03qui j'étais.

04:04– Vous êtes redevenue une femme.

04:05– J'ai toujours été une femme, mais…

04:07– Non, mais j'avais pas mis de moustache.

04:10– On se comprend.

04:11Non, non, mais vous avez cessé de mettre le code vestimentaire.

04:16– Oui, mais il est resté malgré tout, parce qu'il y a des codes vestimentaires

04:20dans le business, et dans la crédibilité.

04:23– Vous êtes féminine, vous vous maquillez, vous avez les cheveux longs.

04:26– Oui, bien sûr, évidemment.

04:27Mais j'ai eu cette même démarche aussi, un peu d'appréhension, quand j'ai rejoint

04:31le premier board, mon premier conseil d'administration, où il y a des codes, il y a des codes culturels,

04:37il y a des codes de prise de parole.

04:39Et donc, là, je n'ai pas changé de personnalité, pas du tout, mais j'ai d'abord essayé

04:44de comprendre les codes.

04:45En fait, le vrai sujet, c'est la compréhension.

04:47– Et on ne vous prépare pas à ça avant, parce que je sais que vous êtes dans des

04:49conseils d'administration prestigieux, où vous avez étudié.

04:52– Non, mais ce qu'il faut, c'est d'abord, on peut casser les codes, on peut arriver

04:55et casser la porte, mais on peut aussi mettre un pied dans la porte, rester, comprendre

05:01ce qui se passe et faire bouger ce qu'il y a à l'intérieur, mais plutôt avec une

05:05approche de main tendue.

05:08Je ne suis pas pour retourner la table, parce que je pense que c'est compliqué, y compris

05:12pour les femmes aujourd'hui, il faut aller faire de la pédagogie, il faut que les hommes

05:16soient des mentors, comprennent l'enjeu que représentent les femmes, on n'est pas

05:20là à vouloir prendre leur place, on est là pour être avec eux, en même temps, travailler

05:25ensemble.

05:26Et voilà, c'est pour ça que mon engagement aurait pu être un engagement uniquement associatif,

05:33parce que j'ai toujours été très animée par l'intérêt général, j'aurais pu ne

05:36jamais rentrer dans le monde économique et rejoindre une organisation non-gouvernementale

05:41qui était mon projet au départ, parce que j'ai appris à aimer mon métier et je n'ai

05:46pas eu une passion, ma passion, je n'ai pas pu la révéler, parce que j'aurais voulu

05:50plutôt travailler aux Nations Unies et travailler pour le bien public, mais en travaillant,

05:57j'ai continué parallèlement à m'engager, parce que j'ai trouvé que dans le monde

06:02économique, j'avançais plus sur mes engagements que de rester en dehors de l'entreprise pour

06:08militer sur ces engagements.

06:10Vous voyez, il y a deux manières, on peut militer en dehors, on peut militer à l'intérieur,

06:15et moi, j'ai toujours milité à l'intérieur, mais avec les codes de l'intérieur.

06:20Et il y a eu des grandes victoires, du coup, avec ces postures ?

06:24Il y a eu des très grandes victoires, oui, il y a eu des très grandes victoires sur

06:28les sujets des femmes dans la tech, aujourd'hui à la chambre de commerce, j'ai quand même

06:36dû proposer, mon directeur général, quand je lui ai dit je vais faire un programme dédié

06:41aux femmes, il m'a dit, mais Soumya, tu ne te rends pas compte, tu ne vas pas faire un

06:44programme genré pour l'entrepreneuriat, parce qu'on a un grand programme qui s'appelle

06:485 jours pour entreprendre, où les hommes et les femmes viennent, et il m'a dit, mais

06:52j'ai dit, si, si, je vais faire un programme, mais pas d'une semaine, d'un an, pour les

06:56femmes, uniquement pour les femmes.

06:58C'est formidable.

06:59Alors, cette énergie, parce que vous parliez beaucoup d'énergie tout à l'heure, où est-ce

07:03que vous allez la chercher ? Parce qu'il y a bien des matins où vous êtes fatiguée

07:06avec ces journées de 22 heures, non ?

07:08Dans le sommeil, justement.

07:09Dans le sommeil, récupération.

07:10J'adore dormir.

07:11Moi, si je perds un jour le sommeil, je perds mon énergie, j'ai besoin de dormir, j'adore

07:18dormir, c'est vraiment quelque chose.

07:20C'est là où vous vous ressourcez.

07:21Oui, je me ressource, et puis ma famille, mes enfants, ma petite-fille maintenant, mes

07:27proches, ma sœur, ma mère.

07:29On va dire que c'est l'amour.

07:31C'est l'amour et c'est la famille, oui.

07:34Le socle.

07:35Le socle.

07:36On va faire, sur cette très belle parole, on va faire une nouvelle pause et se retrouver

07:40tout de suite après.

07:41A tout de suite.

07:42Somia.

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