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  • 21/06/2025
Créée en octobre 1984, un an après la « Marche des beurs », l'association « SOS Racisme » a 40 ans. Une association symbolisée par un slogan « Touche pas à mon pote » et un visuel… une petite main, souvent jaune, que tous les jeunes épinglaient à leur veste pour montrer leur opposition aux actes et aux paroles racistes… Alors, quel est le bilan de ce combat ? Qu’en reste-t-il aujourd’hui ?La lutte antiraciste a-t-elle changé de nature et de forme ? Qu’est-il advenu du « vivre-ensemble » prôné dans ces années 1980 ? Rebecca Fitoussi et ses invités ouvrent le débat. Année de Production :

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Transcription
00:00« Touche pas à mon pote », un film de Florane d'Arsimol.
00:03« Touche pas à mon pote », ce slogan parle-t-il encore aux Français,
00:07même à ceux qui ont porté le pinz ?
00:09Ce combat contre le racisme a-t-il encore cette vigueur que l'on ressent
00:12dans le film que l'on vient de voir ?
00:14Pourquoi a-t-on l'impression que cette lutte ne fait plus vraiment,
00:18parfaitement consensus ?
00:19On va se poser toutes ces questions avec nos invités.
00:21Olivier Paco, bienvenue.
00:22Vous êtes sénateur LR de Loise, professeur agrégé d'histoire-géographie
00:26et membre du collège consultatif de la Commission du Fonds
00:29pour le développement de la vie associative.
00:31Dominique Soppo, bienvenue.
00:33Vous êtes président de SOS Racisme et professeur en lycée,
00:36mais aussi enseignant à Sciences Po.
00:37Hélène Geoffroy, bienvenue.
00:39Maire socialiste de Vaud-en-Velin, dans la banlieue lyonnaise,
00:42territoire de la marche pour l'égalité et contre le racisme,
00:45surnommée ensuite la marche des beurres,
00:48territoire des premières émeutes des quartiers,
00:49dans le contexte que l'on redécouvre, justement,
00:51dans ce film, contexte de racisme et de malaise dans les banlieues.
00:54Et puis, vous avez été secrétaire d'État chargé de la politique
00:57et de la ville sous le mandat de François Hollande.
00:59David Assouline, bienvenue à vous également.
01:01Historien, spécialiste de l'histoire de l'immigration,
01:04ancien sénateur socialiste et porte-parole du PS,
01:06vous avez vous-même participé à l'animation nationale
01:09de la marche contre le racisme pour l'égalité des droits
01:11et avez été fortement impliqué dans le mouvement
01:14Touche pas à mon pote, insufflé par SOS Racisme,
01:16aux côtés de Julien Drey et de Harlem Désir,
01:19évidemment, que l'on entend dans ce film.
01:20Merci beaucoup à tous les quatre d'être ici.
01:22Avant d'en venir aux enjeux actuels
01:24et à la transformation potentielle de la lutte contre le racisme,
01:27quelques mots de ce film qui retrace l'histoire
01:29de l'association SOS Racisme.
01:31On découvre des choses peut-être un peu méconnues.
01:34Les bisbilles avec le Parti Socialiste,
01:36l'opportunisme d'un François Mitterrand
01:37qui veut se faire réélire,
01:39la stratégie médiatique très bien ficelée
01:42des fondateurs de SOS Racisme.
01:44Dominique Sopo,
01:46ce que raconte ce film de SOS Racisme,
01:49est-ce que ça correspond à l'histoire
01:50que vous avez de l'association que vous présidez ?
01:52Oui, en partie, parce que c'est un angle très particulier,
01:56on va dire, et très Mitterrand, le PS, etc.
01:59C'est quand même, j'allais dire,
02:01pas forcément l'essentiel, si je puis dire,
02:03parce qu'avant tout, c'est un très puissant mouvement social.
02:07Et le fait est, je ne sais pas si on découvre
02:10des choses en particulier,
02:13notamment le fait que Mitterrand a pu être aidant
02:17à vue d'un œil favorable, ce mouvement.
02:21Souvent, d'ailleurs, les gens disent,
02:22on va vous révéler.
02:24Vous savez, quand François Mitterrand est mort,
02:25SOS Racisme a fait une affiche disant,
02:28merci de nous avoir tendu la main.
02:29Donc, il n'y a rien de très caché au demeurant,
02:32premièrement.
02:33Et deuxièmement, je trouve que c'est bien
02:35lorsque, au plus haut niveau de l'État,
02:39il y a des présidents qui s'intéressent à la jeunesse.
02:40Peut-être que ça devrait inspirer d'autres présidents
02:44de la République.
02:45Parce que je pense que François Mitterrand
02:47est sans doute le dernier président à avoir,
02:52alors dans un contexte particulier,
02:54la jeunesse avait un poids même démographique
02:55plus important au passage, il y a 40 ans,
02:59mais sans doute le dernier président à avoir,
03:01j'allais dire, senti quelque chose de la jeunesse
03:05et de s'être dit qu'il y avait sans doute
03:09quelque chose à en capter dans une dynamique politique.
03:13Vous savez, souvent, on parle de récupération,
03:16mais quand on s'engage, c'est aussi pour faire en sorte
03:19qu'y compris dans les institutions,
03:22il y ait quelque chose qui résonne
03:24et qui permette de modifier concrètement la vie des gens.
03:27Oui, d'ailleurs, le film est assez clair.
03:29Il donne l'impression que François Mitterrand
03:30a même senti le filon.
03:32Alors, je ne sais pas si on pouvait parler
03:33de récupération politique.
03:34Olivier Pacos, ça fait partie des souvenirs
03:35que vous avez aussi de la naissance de cette association
03:37dont on dit dans le film qu'elle est aussi
03:39une construction médiatique, on l'appelait SOS Showbiz.
03:42Alors, moi, je n'avais pas ça en tête, par exemple.
03:45Alors, moi, en 1984, j'avais 15 ans
03:48et comme beaucoup, j'ai eu une petite main bleue.
03:52Ah oui, vous l'aviez ?
03:53Elle était bleue, oui, tout à fait.
03:54En 84-85, je suis en classe de première
03:57au lycée Cassini à Clermont, dans l'Oise.
04:01Et effectivement, comme beaucoup de jeunes,
04:03j'ai été un petit peu enthousiastiné, embarqué.
04:07Alors, le film, je le trouve assez remarquable
04:08parce qu'il montre vraiment bien
04:09de la marge des beurres, 83, jusqu'à 88,
04:12génération Tonton, génération Mitterrand.
04:15Et il assume parfaitement, effectivement,
04:17cette filiation, quand même, politique.
04:20Alors, Arlème Désir le dit très bien.
04:21Il dit, nous étions une association apolitique,
04:25mais en fait, on venait tous de la LCR,
04:27de la Ligue communiste révolutionnaire.
04:29On voulait un petit peu...
04:30Tous des trotskistes, il dit.
04:31Mais oui, Laurence Rossignol le dit parfaitement.
04:34Mais on voulait quand même faire bouger les choses.
04:35Et le PS était un petit peu...
04:37Il ne nous a pas forcément si bien accueillis que ça.
04:41François Mitterrand a senti, en bon Florentin,
04:44en bon Machiavel, ce qu'il pouvait en tirer.
04:46Et moi, je dois vous dire que je fais partie
04:48de ceux qui se sont un peu éloignés
04:51au bout de deux ans, de trois ans,
04:52parce que, d'un côté, il y avait cette lutte
04:54contre le racisme et pour l'égalité des droits.
04:57C'est vraiment clé.
04:58Et puis, et donc contre le FN,
05:00qui est vraiment très présent.
05:02Mais en même temps, on avait,
05:04avec François Mitterrand et D85,
05:07la mise en place de la proportionnelle,
05:09l'utilisation de l'ordre absolu.
05:13Je crois que c'est Grégoire Kaufmann
05:14qui utilise cette expression.
05:15Donc, d'un côté, on utilise la montée du FN.
05:19De l'autre, il y a une hypocrisie, si vous voulez,
05:23qui m'avait beaucoup gênée,
05:23que j'avais ressentie.
05:25Et vous étiez éloignée.
05:25Il y a quelque chose qu'on a aussi un petit peu oublié.
05:28C'est ce que rappelle aussi le film.
05:31C'est le racisme qui se manifestait très concrètement
05:33et très violemment dans la société française.
05:36Tous les deux ou trois jours, un crime raciste.
05:38Il ne fallait pas rentrer dans n'importe quel café
05:40quand on était d'origine étrangère.
05:41C'est ce que nous dit Malek Bouti dans le film.
05:43Comment vous l'avez ressenti en revoyant ces images,
05:45en réécoutant tout cela, Hélène Geoffroy ?
05:47C'est vrai que moi, j'ai vu la naissance de SOS Racisme
05:50d'un peu plus loin, d'une autre partie de l'histoire de France
05:53qui est celle des Outre-mer,
05:54puisque j'étais au lycée,
05:55à peu près dans les mêmes classes à ce moment-là, en 85.
06:00Et c'est vrai que c'était d'autres sujets
06:02qui travaillaient les sociétés des Outre-mer.
06:06Mais c'est vrai que j'ai été frappée
06:07en regardant ce film par deux choses.
06:10D'abord, son histoire liée effectivement
06:13à une partie de la gauche
06:15qui finalement est à la fois parti socialiste
06:19mais a envie d'être dans le mouvement social.
06:21Et la façon dont un parti politique est capable
06:24de transformer, c'est ce qu'il disait un peu Dominique Sopo,
06:27transformer une attente en combat politique.
06:30Et je pense que c'est le rôle aussi des partis politiques.
06:33Ce n'est pas instrumentaliser,
06:34c'est pouvoir se saisir d'un sujet
06:36et en faire des lois d'ailleurs qui en ont découlé.
06:39Et puis l'autre sujet qui est revenu effectivement
06:41en pleine face, c'est celui des crimes.
06:44Donc je n'étais pas à l'époque en banlieue,
06:46je n'y vivais pas.
06:48Où de nouveau, quand j'ai entendu les témoignages
06:51et puis nous avons eu, il n'y a pas longtemps,
06:54dans la banlieue lonaise,
06:55nous avons commémoré
06:56l'anniversaire de la marche
06:58pour l'égalité contre le racisme.
07:01Où de nouveau, il y a eu ces témoignages.
07:03Et c'est peut-être le sujet, à mon avis,
07:05le plus frappant, c'est de se dire
07:07qu'à un moment, dans l'histoire de notre pays,
07:09il y a eu des crimes qui ont pu passer inaperçus
07:12et il a fallu une marche pour les mettre en lumière
07:15et pour dire que ce n'est pas entendable
07:18et pour les qualifier.
07:19Ce qui est le deuxième élément fort de ce reportage.
07:22Si les crimes sont qualifiés,
07:24et je me souviens de cette expression qui dit
07:25que ce n'est pas un fait divers.
07:26C'est Alain M. Désir qui dit
07:27que ce n'est pas un fait divers,
07:30cette personne qui est tuée,
07:31c'est un crime qu'il faut qualifier,
07:33c'est un crime raciste.
07:34Et ça, à ce moment-là,
07:36je trouve que c'est une prise de conscience de la société
07:38qui est très forte et qui embarque beaucoup de monde.
07:41Et c'est le dernier aspect que je vous réévoquais.
07:43Ce qui m'a frappée, c'est la mobilisation importante.
07:46Moi, quand je suis arrivée ici pour faire mes études à Paris,
07:49j'ai eu l'occasion d'aller à un des concerts
07:51de ce racisme dont on parle.
07:53J'étais jeune étudiante,
07:54ce qu'on faisait,
07:55mais je n'ai pas mesuré d'où cela venait,
07:58est-ce que cela avait mobilisé.
07:59Et ce film m'a vraiment permis d'en prendre conscience en réalité.
08:03On découvre à quel point SOS Racisme a été une bouffée d'oxygène.
08:05C'est ça, exactement.
08:07Alors, la bouffée d'oxygène, elle vient avant.
08:10Parce que c'est un documentaire,
08:13ça ramasse avec quelques acteurs
08:15qui ont une parole politique
08:16et donc on a l'impression que c'est quelque chose
08:19d'organiser, de préparer
08:21ou de manipuler dans des petits cercles.
08:23Mais bien entendu,
08:25qu'il y a des militants politiques,
08:26qu'ils influencent, qu'ils peuvent organiser.
08:28Mais c'est d'abord,
08:30ça remonte à la marche pour l'égalité contre le racisme
08:32qu'on a qualifiée de marche des beurres
08:34et qui fait émerger
08:37quelque chose que la société française
08:38n'avait jamais vu ni regardé.
08:40Une génération
08:42dans les quartiers populaires,
08:45une génération issue de l'immigration
08:47et qui disait
08:49assez des crimes racistes
08:52à travers l'histoire
08:53de Toumi Djanda, etc.
08:55aux manguettes.
08:56Mais c'était vraiment
08:57leur émergence sur la scène politique.
09:00On est là,
09:01on est français,
09:02on veut l'égalité des droits.
09:03Et à ce moment-là,
09:04un petit groupe de jeunes
09:05que je connaissais, moi,
09:06de l'époque de la fac
09:07et qui, effectivement,
09:08était rentré au Parti Socialiste
09:10après avoir été comme moi,
09:12la LCR et ailleurs,
09:13ont cette petite main
09:14et la diffuse.
09:15Et elle s'arrache.
09:17Le SOS Racisme émerge
09:19parce que d'abord,
09:20c'est toute la jeunesse
09:21qui se sent concernée,
09:22plus cette génération
09:23qui a émergé
09:23et donc font un cadre
09:24beaucoup plus large.
09:26Et c'est pas, donc,
09:27l'histoire racontée
09:28par certains,
09:29SOS Racisme est venu,
09:31téléguidé par l'Elysée
09:33pour casser
09:33le mouvement des jeunes
09:35et le mouvement de l'Elysée.
09:37Ça s'est pas passé comme ça,
09:38même s'il y avait
09:39des volontés
09:40d'influence
09:41et certainement
09:43par Mitterrand
09:44de vouloir
09:45avoir un pied
09:47dans la jeunesse.
09:47Ça, c'est clair.
09:48Il avait compris
09:49plus que d'autres,
09:50c'est vrai,
09:51que les mouvements
09:52de jeunesse
09:53étaient des mouvements
09:54porteurs
09:54et qu'on ne gagnait pas
09:55une présidentielle
09:56avec la jeunesse
09:58contre lui.
09:59Et Chirac a perdu
10:00la cause de ça.
10:01– On va essayer d'avancer
10:01un petit peu sur le présent,
10:02cette lutte contre le racisme,
10:04qu'est-ce qu'il en est ?
10:05Plus de 40 ans maintenant,
10:06après,
10:06touche pas à mon pote,
10:07est-ce qu'elle a changé
10:08de nature,
10:09de forme ?
10:10Pourquoi est-ce que ça
10:11semble plus vraiment
10:12consensuel ?
10:13Avant de vous poser
10:14toutes ces questions,
10:15je voudrais qu'on réécoute
10:15Laurence Rossignol,
10:16qui est une des cofondatrices
10:17de ce mouvement
10:18et qui est aujourd'hui
10:19sénatrice.
10:20– Ces débats-là,
10:22il y a 40 ans,
10:23et ces débats-là,
10:23aujourd'hui,
10:24sont totalement différents.
10:26Les questions religieuses
10:27étaient marginales,
10:29pour ne pas dire absentes,
10:30de notre vie politique,
10:32de notre vie quotidienne.
10:34De temps en temps,
10:35les Juifs et les Arabes
10:36s'engueulaient
10:36sur le conflit
10:36israélo-palestinien.
10:39Ça était récurrent.
10:40Et puis après,
10:40quand ils avaient fini
10:41de s'engueuler,
10:41on allait tous dîner ensemble.
10:43– Dominique Sopo,
10:44est-ce qu'elle a raison
10:45Laurence Rossignol ?
10:46Qu'est-ce qui s'est passé
10:47entre ce moment
10:48où on prône
10:49le vivre ensemble
10:50et aujourd'hui
10:51où les choses
10:51semblent avoir changé
10:53dans cette lutte
10:53contre le racisme ?
10:54– Alors,
10:55ça mêle plusieurs questions.
10:56Parce que,
10:57sur le côté consensuel,
10:58d'abord,
10:59je ferais quand même remarquer
11:00que dans la France
11:00des années 80,
11:01la lutte contre le racisme
11:03n'est pas si consensuelle
11:04que cela.
11:05Enfin,
11:05il y a quand même
11:05l'émergence
11:06du Front National,
11:08il y a des crimes racistes.
11:09Dans les rues,
11:10quand on est noir ou arabe,
11:11moi je me souviens
11:12quand j'étais jeune,
11:13le souvenir que j'ai,
11:15c'est attention
11:15quand on va dans les villes,
11:16il ne faut pas être
11:17dans les ruelles
11:17parce qu'on peut
11:18se faire casser la gueule.
11:19Donc,
11:20attention,
11:21il y a une dynamique
11:22qui est une dynamique
11:24de vivre ensemble
11:25que David Assouline
11:27a rappelée
11:28qui est extrêmement puissante
11:30mais il ne faut quand même
11:32pas se tromper.
11:33On est quand même
11:33dans les années 80
11:34même avec une droite
11:36très dure
11:37quand elle revient en pouvoir
11:38autour par exemple
11:39de la volonté…
11:39– Mais dans les décennies
11:40qui ont suivi,
11:41on peut dire que le combat
11:41contre le racisme
11:42était relativement consensuel.
11:43– De la volonté,
11:44par exemple,
11:45de remettre en cause
11:46le droit du sol.
11:48Disons qu'il y a
11:48une dynamique
11:49qui est une dynamique
11:50vers davantage
11:51de vivre ensemble
11:52où la lutte
11:53contre le racisme
11:54est plutôt
11:56au cœur
11:56de la cité
11:58et c'est plutôt
11:59au racisme
11:59de devoir s'expliquer
12:00de pourquoi
12:02ils le sont.
12:03On pourrait dire ça
12:03comme cela.
12:04Évidemment,
12:05les combats
12:06ne sont pas
12:06des combats linéaires.
12:08On voit bien
12:08qu'on est,
12:09pas qu'en France d'ailleurs
12:10au passage,
12:10dans une vague réactionnaire
12:12extrêmement puissante.
12:13– Et alors,
12:13ce que dit Laurence Rossignol
12:14sur ces questions religieuses
12:15qui seraient venues
12:15parasiter le combat
12:16contre le racisme ?
12:17Vous êtes d'accord ?
12:18– Disons qu'il y a
12:19une structuration
12:19du débat public
12:20qui fait sans doute
12:21beaucoup plus de place
12:22à la question
12:23des religions
12:24aujourd'hui,
12:25mais ce sont des questions
12:26qui étaient déjà
12:27de toute façon
12:28présentes.
12:29Ce n'est pas quelque chose
12:30de complètement…
12:31ce n'est pas quelque chose
12:32de complètement nouveau,
12:33même si effectivement
12:34on voit bien
12:35une structuration
12:36dans le débat public,
12:39parfois même
12:40des formes d'obsession,
12:41je dois dire,
12:42autour de la question
12:44religieuse.
12:46Donc, vous savez,
12:47les combats,
12:48ils sont toujours
12:49un peu les mêmes
12:50et aussi,
12:51il y a des évolutions
12:52où les choses,
12:52elles se réagencent.
12:54Bon, voilà.
12:55Et ce dont il faut
12:56avoir conscience,
12:57c'est que les combats,
12:57ce n'est pas linéaire.
12:59Et notamment,
12:59les combats pour l'égalité,
13:01ce n'est pas
13:01une sorte de long fleuve
13:02tranquille,
13:03ça avance.
13:04Parfois,
13:04il y a des gros backlashs,
13:05on le voit aussi
13:06dans le féminisme,
13:07par exemple,
13:07ce n'est pas propre
13:08à la question
13:09de l'antiracisme.
13:11Aujourd'hui,
13:12c'est sûr qu'on est
13:12dans des moments
13:13qui sont plutôt
13:14très compliqués,
13:15mais bon,
13:16on milite.
13:17Olivier Paco.
13:18Concernant l'affirmation
13:19de Laurence Rossignol
13:20sur le fait que
13:21le fait religieux
13:21a tout changé aujourd'hui,
13:23pour moi,
13:23le fait religieux,
13:24il apparaît très précisément
13:25en 1989,
13:27l'affaire du voile
13:28à Creil.
13:29Et là,
13:30pour moi,
13:31il y a eu aussi
13:31une fissure
13:32dans la position
13:33de SOS Racisme.
13:34SOS Racisme
13:35qui soutient
13:36la position
13:37des jeunes filles
13:38qui ne veulent pas
13:38enlever leur voile.
13:39Et je me souviens,
13:41c'est Gisèle Halimi
13:42qui va quitter
13:43SOS Racisme
13:44à ce moment-là
13:45à cause
13:45de la position
13:47majoritaire.
13:48Qui va beaucoup évoluer
13:49par la suite
13:50sur le sujet
13:50au demeurant.
13:51Mais bon.
13:51Mais à ce moment-là,
13:52il y a cette prise de position
13:53qui est un regret,
13:55d'ailleurs,
13:55vous l'avez dit.
13:55Ah ben non,
13:57moi je...
13:57Non.
13:58Parce qu'en fait,
13:59vous savez,
13:59c'est toujours facile
14:00de regarder les choses
14:01de façon rétrospective.
14:03À l'époque,
14:04ce que dit Harlem,
14:05c'est,
14:06il dit,
14:07le djinn sera plus fort
14:08que le voile.
14:09Et donc,
14:09en fait,
14:10il ne faut pas,
14:11comment dire,
14:13interdire les signes religieux.
14:15D'ailleurs,
14:15j'ai remarqué
14:16que la loi
14:17ne le permet pas,
14:18au passage.
14:19Puisque ça donne même...
14:20Non,
14:21certainement pas.
14:22Ça donne même lieu
14:22à des circulaires
14:23et ça donnera une loi
14:25en 2004.
14:29Donc,
14:29la loi...
14:31Parce qu'à ce moment-là,
14:31il n'y a pas un virage
14:32que ne prend pas SOS Racisme
14:33qu'il aurait dû prendre.
14:34Mais,
14:35c'est vrai,
14:35c'est encore...
14:36Et il y a Eileen Geoffroy
14:37aussi.
14:37La question rétrospective,
14:40comment dire,
14:40la lecture rétrospective
14:42est toujours une lecture
14:43un peu facile.
14:45SOS Racisme
14:45change de position
14:47quelques années plus tard,
14:48dans les années 90,
14:50notamment pour une raison
14:51très simple,
14:52c'est qu'on constate
14:54que dans une série
14:55de lycées,
14:56en fait,
14:57il y a des groupes
14:58qui font pression
14:59sur des jeunes filles
15:00en disant,
15:01il faut venir tester
15:02l'école.
15:03Ce n'est pas le cas
15:04de 89.
15:05Il faut venir tester
15:06l'école.
15:08Et donc,
15:09la question,
15:10c'est la liberté
15:11des filles
15:12qui ne veulent pas
15:13d'une certaine façon
15:15portée par la loi
15:15parce qu'elles sont
15:16mises sous pression.
15:17Et là,
15:17SOS Racisme
15:18prend la position
15:19de dire,
15:20il faut effectivement
15:21qu'il y ait un cadre
15:22qui protège
15:23ces jeunes filles
15:24parce qu'on voit bien
15:25qu'elles sont aussi
15:26soumises
15:27à des formes
15:28de pression
15:28qui ne sont pas
15:29acceptables.
15:30Hélène Geoffroy.
15:31Sur cet aspect-là
15:33et sur la question,
15:35la présence
15:36du fait religieux,
15:38évidemment,
15:39nous sommes à un moment
15:40dans notre pays
15:41dans lequel
15:41il y a
15:43des crimes
15:44ou des agressions
15:45antisémites
15:46ou anti-musulmans,
15:48anti-musulmans,
15:49on voit bien
15:50que c'est une réalité
15:51d'aujourd'hui.
15:53On voit
15:54les habitants
15:55se mobilisent un peu,
15:56les Français
15:56se mobilisent
15:57un peu partout,
15:58marchent,
15:59s'indignent.
16:00Oui,
16:00mais chacun
16:01de son côté.
16:01La question,
16:02c'est est-ce que le combat
16:03n'a pas été segmenté ?
16:04Et j'allais poursuivre
16:05en disant
16:05le grand sujet
16:06d'aujourd'hui,
16:07c'est est-ce qu'on mène
16:08les combats
16:08de façon séparée
16:09ou pas ?
16:10Je ne crois pas
16:11que la société
16:12dans son ensemble
16:13veuille les mener
16:14de façon séparée,
16:15sinon nous n'aurions pas
16:16vu l'existence
16:17d'un front républicain
16:18il y a un an.
16:20Alors qui veut
16:21séparer ces combats ?
16:22En revanche,
16:24il y a effectivement
16:27dans la société
16:28traversée
16:29de crispations identitaires
16:30qu'il ne faut pas nier
16:31où la question
16:32est en train
16:33de se poser
16:33est-ce qu'on peut
16:34vivre ensemble ou pas ?
16:35Je crois que la majorité
16:36des Français
16:37veut y répondre positivement.
16:39Il faut maintenant
16:39mener une bataille culturelle.
16:41La force des combats
16:42menés avec la marche
16:43pour l'égalité
16:44contre le racisme,
16:45puis par SOS Racisme,
16:47même s'ils se sont retrouvés,
16:48je l'ai vécu
16:49dans la banlieue
16:50de Vau-en-Velin,
16:51une forme
16:52d'accusation
16:54d'SOS Racisme
16:54d'avoir empêché
16:56cette marche
16:57de trouver
16:58toute son énergie,
17:00mais c'est ainsi
17:01que c'est vécu
17:01dans la banlieue
17:02en tout cas.
17:02Lyonnais a vécu
17:03cette histoire-là,
17:05c'est que la force
17:05a été à un moment
17:06de dire qu'une bataille
17:07culturelle était gagnée,
17:09ce qu'on a appelé
17:09après le politiquement
17:10correct,
17:11dont je regrette
17:12chaque jour
17:12qu'il n'existe plus
17:13malgré tout.
17:14C'est-à-dire qu'à un moment,
17:16une bataille culturelle
17:17a été menée en disant
17:18effectivement,
17:19être dans la détestation
17:20de l'autre
17:21et dans la recherche
17:21d'un bouc émissaire,
17:22c'est un sujet.
17:23Il faut donc maintenant
17:24que nous retrouvions
17:25un récit qui soit
17:26plus fédérateur.
17:27Et pour cela,
17:29il faut à la fois
17:30se dire
17:30qu'il y ait
17:31reconnaître les faits
17:33comme ça a été fait
17:34dans les années 80,
17:35c'est dire à un moment,
17:36il existe
17:37des actes,
17:38des agressions
17:39qui sont commises
17:40sur des questions
17:41de couleur de peau,
17:42de nom,
17:43de religion,
17:44d'appartenance réelle
17:45et supposée,
17:45comme dit la loi,
17:47à telle ou telle religion.
17:48Ça,
17:48c'est la première chose
17:49et ensuite,
17:50il faut que je finirai là-dessus,
17:52construire le récit fédérateur.
17:53C'est ce que,
17:54en tout cas...
17:54Mais il faut des gens
17:55pour ce récit fédérateur,
17:56il faut des gens
17:57pour avoir envie
17:57de converger.
17:57Et donc,
17:58on doit décrire la société
17:59et je pense qu'il faut
18:00que notre première étape
18:02et je m'arrêterai là-dessus
18:03et développer éventuellement,
18:05en tout cas,
18:05moi,
18:05ce que je porte avec conviction,
18:07c'est qu'il faut d'abord
18:07dire la France que nous sommes
18:09et c'est pour ça
18:09que je suis convaincue
18:10qu'il faut que nous acceptions
18:11d'être une France métissée
18:13avec des histoires
18:14et des multiples
18:15mais qui avec un destin commun
18:17et c'est parce que
18:18nous aurons un récit
18:19qui nous fédère
18:20que nous serons en capacité
18:21de porter les combats ensemble.
18:23Mais c'est l'enjeu
18:23devant nous des combats,
18:25c'est qu'on les fasse
18:25bien ensemble
18:27et pas de façon segmentée.
18:28Et pour être ensemble,
18:29il faut qu'il y ait des gens
18:29qui aient envie d'être ensemble.
18:30Est-ce que c'est le cas ?
18:31Oui,
18:31c'est la société a envie
18:32d'être ensemble.
18:33Et la société,
18:34oui.
18:34Je pense qu'il y a,
18:36au contraire,
18:37pas au contraire
18:38de ce que dit
18:39Laurence Rossignol
18:41parce qu'elle compare,
18:43elle parle du fait religieux
18:44qui n'était pas aussi présent.
18:46Mais la problématique
18:47était la même.
18:49Je veux quand même
18:51qu'on sache
18:51que les débats
18:53que l'on avait
18:53ressemblent énormément
18:56à ce qui aujourd'hui fracture
18:57avec pas les mêmes
18:58rapports de force
18:59parce que les choses
18:59ont basculé.
19:01Mais c'était quoi le débat ?
19:02Quand je vous ai raconté
19:03sur quoi naît SOS Racisme
19:06et sur quelle impasse
19:07du mouvement
19:07pour l'égalité, etc.,
19:09qui était né,
19:10c'était déjà ce débat.
19:12entre ceux qui ont dit
19:13à un moment donné
19:14« Bon, non, tout ça,
19:16le rassemblement,
19:19l'universalité, etc. »
19:22Non, c'est nous.
19:24Et un repli communautaire
19:26assumé
19:26qui n'était pas
19:27formalisé comme religieux
19:29mais qui était
19:31« Nous, les Arabes,
19:32ou machin, etc. »
19:33Qui excluait l'antisémitisme,
19:35vous voulez dire ?
19:35Non, non, non,
19:36je ne parle pas de ça.
19:37Je parle que le mouvement
19:38de la marche des beurres, etc.,
19:40certains ont théorisé
19:42le fait de s'organiser
19:45de façon…
19:46Les jeunes Arabes,
19:47par exemple,
19:48il y avait même
19:48des associations
19:49qui s'appelaient comme ça,
19:50en disant
19:51« Personne ne peut parler
19:52à notre place,
19:52d'abord organisons-nous ».
19:54Donc, les mouvements,
19:55disons, plus larges
19:57et sur l'égalité
20:00et donc qui rassemblaient
20:00tous ceux qui voulaient
20:01l'égalité
20:02sont caduques.
20:03D'abord, organisons-nous.
20:04Donc, c'est sur cet impasse-là,
20:07les mêmes ont cultivé
20:09que SOS Racisme
20:10est venu les balayer,
20:12les attaquer, etc.
20:13Et cette histoire
20:13a été racontée
20:14dans les banlieues.
20:15Je ne suis pas d'accord
20:16parce que j'étais là
20:17et j'étais un peu au milieu.
20:18Moi, je jouais un peu
20:19le casque bleu.
20:20Je disais
20:20« Cette marche,
20:21c'est extraordinaire
20:22ce qu'elle a fait émerger.
20:23Il y a SOS Racisme
20:24et il faut trouver
20:25les convergences.
20:26On avait même imaginé
20:27une marche
20:27où les deux se rejoignent,
20:28etc. »
20:29Bon, donc,
20:30ce débat avait lieu.
20:31Deuxième débat,
20:32les mêmes
20:33qui disaient
20:34ce répli communautaire
20:35disaient SOS Racisme
20:37c'est les sionnistes
20:38parce que déjà
20:41SOS Racisme
20:42avait intégré
20:43l'Union des étudiants
20:44juifs de France
20:45en leur sein
20:46et était sur un discours
20:48de fraternité
20:49juif-musulman
20:50et était
20:52une espèce de plateforme.
20:53– Ça ne plaisait pas
20:53à tout le monde, quoi.
20:54– C'est intéressant,
20:54vous êtes en train de nous dire
20:55que rien de nouveau
20:56sous le soleil aujourd'hui.
20:57– À l'époque,
20:57ils disaient ça,
20:58sauf que ce n'était pas
20:59le discours dominant.
21:00Maintenant,
21:01ça a pris une place
21:02en mettant la religion
21:03à la place d'Arabes,
21:05par exemple,
21:05ça devient
21:06les musulmans
21:07et de l'autre côté,
21:10l'ampleur
21:10de ce qui se passe
21:11au Moyen-Orient
21:12fait que
21:13c'est plus…
21:14mais ça existait
21:16et c'était déjà là.
21:17– Olivier Pacou.
21:18– Moi, j'ai envie aussi
21:19de poser une question.
21:21Quel est le bilan
21:22de SOS Racisme ?
21:24– C'est intéressant,
21:24c'est la question
21:25que j'allais poser.
21:26– 1985,
21:28SOS Racisme
21:29est au zénith,
21:30c'est peut-être sa naissance,
21:31mais ils sont déjà
21:31au zénith.
21:31immédiatement,
21:33le FN à l'époque
21:34est à 10%.
21:35Aujourd'hui,
21:37je ne vais pas dire
21:38que SOS Racisme
21:38est aux oubliettes,
21:39mais a quand même
21:40un peu pâli
21:41et le RN
21:42est à plus de 30%.
21:44n'est-ce pas
21:45un échec patent ?
21:48Alors qu'on n'a jamais pensé…
21:48– Je vais évidemment
21:49vous laisser répondre.
21:50– Je donne des chiffres
21:52que personne ne peut contester.
21:54Après, moi,
21:54j'ai mon explication
21:55que je peux vous donner
21:56pourquoi
21:56la lutte antiraciste,
21:59entre guillemets,
22:00a échoué.
22:02Je pense qu'elle a échoué
22:03parce qu'elle s'est dévoyée
22:04et qu'aujourd'hui,
22:06l'antiracisme
22:07est vraiment
22:08beaucoup plus
22:08qu'en 1985,
22:10paradoxalement,
22:10avec quand même
22:11le rôle de mi-temps,
22:12beaucoup plus
22:13instrumentalisé politiquement.
22:16Et depuis quelques années,
22:17et notamment
22:18avec la France insoumise,
22:20on a une captation
22:22de l'antiracisme
22:23qui fait surréagir
22:26de façon identitaire
22:27beaucoup d'électeurs
22:28qui vont aller se réfugier,
22:29entre guillemets,
22:30dans le vote RN.
22:32Pourquoi ?
22:33On a l'impression
22:34que le racisme
22:35ne touche
22:35qu'une catégorie
22:36de la population.
22:36– Juste un bémol.
22:37Quand même,
22:38en 2002,
22:40quand le Rassemblement National
22:41est au deuxième tour
22:41de la présidentielle,
22:42la France insoumise
22:43n'existe pas.
22:44Et donc,
22:45cette montée
22:45n'est pas que liée,
22:47qu'elle puisse être alimentée,
22:49développée, machin.
22:50– Ça s'est accéléré.
22:51– Oui, mais enfin…
22:52– On est passé de 20
22:52à plus de 30 %,
22:54sans compter reconquête
22:55en deux, trois ans.
22:55– Tout le monde
22:55va avoir la parole,
22:56ne vous inquiétez pas.
22:57– Ce qui est toujours
22:57très intéressant
22:58sur la question de racisme,
22:59y compris de la part
22:59de responsables politiques,
23:00qui sont quand même
23:01au cœur du pouvoir,
23:01je tiens à le faire remarquer,
23:03c'est comment ils se dédouanent
23:04de leur propre responsabilité.
23:06Parce que la montée
23:08du Rassemblement National,
23:09vous croyez que c'est
23:10qu'un problème
23:10pour SOS Racisme ?
23:12C'est un problème peut-être
23:13pour les partis politiques,
23:14avant tout,
23:15qui, depuis des années,
23:18pour certains d'entre eux,
23:19en tout cas,
23:19disent vouloir lutter
23:21contre le Rassemblement National
23:23ou le Front National.
23:24Parce que je pourrais
23:25vous poser la question,
23:26c'est peut-être aussi
23:26votre échec à vous,
23:27comment dire,
23:28et aux différents partis politiques.
23:31Donc c'est toujours intéressant
23:32comme ça de se dédouaner.
23:33– On fait trop porter
23:34de responsabilité à SOS Racisme,
23:36vous pensez ?
23:36– Vous savez,
23:37SOS Racisme,
23:38c'est une association
23:40qui a le budget
23:40d'une MJC.
23:42Et ça,
23:42SOS Racisme.
23:44Franchement…
23:44– Maison de la jeunesse
23:45et de la culture,
23:46pour ceux qui lignent.
23:47– Oui, franchement,
23:49avec…
23:50– Non mais franchement,
23:52avec, comment dire,
23:53avec une telle force
23:54de frappe financière,
23:55je trouve qu'on est
23:56diablement efficace.
23:57Le deuxième élément,
23:59c'est que,
24:00quand on regarde
24:00l'évolution
24:01de la société française,
24:02si on pose aujourd'hui
24:03la question aux Français
24:05sur est-ce que vous considérez
24:06que des personnes
24:07de telle ou telle origine
24:08sont des Français
24:09comme les autres.
24:10Le nombre de réponses positives
24:11n'a jamais été aussi élevé.
24:13Ça, c'est aussi une évolution
24:15qui est une évolution majeure.
24:17Même le nombre de Français
24:18qui pensent
24:19qu'il y a trop d'étrangers
24:20en France,
24:21c'est plus faible aujourd'hui
24:22qu'à la fin des années 80.
24:23– Donc, le bilan
24:24n'est pas si négatif que ça.
24:25– Attendez,
24:26je termine.
24:27Par ailleurs,
24:28il y a d'autres dynamiques.
24:30Il y a aussi le fait
24:31que même quand on regarde
24:32aujourd'hui à la télévision,
24:35dans le monde de la culture,
24:36des émergences,
24:37comment dire,
24:38qui n'existaient pas du tout
24:39auparavant.
24:40Donc, il faut quand même
24:40se rendre compte
24:41que la société,
24:43fort heureusement aussi,
24:44elle a évolué.
24:45– Est-ce qu'on peut dire
24:47la même chose
24:47pour ce qui concerne
24:48l'antisémitisme ?
24:50– C'est-à-dire ?
24:50– Vous dites que ça régresse,
24:52que la société a fait
24:53beaucoup de progrès.
24:53– Non, mais…
24:54– Concernant l'antisémitisme,
24:57l'échec est là.
24:58– Mais par ailleurs,
24:59mais bien évidemment,
25:00comment dire,
25:01on a vu,
25:02comment dire,
25:02y compris le crime
25:03d'Ilan Halimi en 2006,
25:06les attentats contre
25:07– On a des chiffres,
25:081570 actes antisémites
25:10ont été recensés
25:11en France en 2024.
25:12– Mais tout à fait.
25:13– Non, mais donc là,
25:13que les bilans, alors…
25:14– C'est ce que je disais
25:14sur le fait que,
25:16comment dire,
25:17les luttes pour l'égalité,
25:19les luttes pour le vivre ensemble
25:20ne sont pas des luttes linéaires
25:22et que précisément,
25:24la question,
25:24c'est aussi
25:25les espaces
25:26qui sont laissés
25:27à des paroles
25:28du ensemble,
25:30du vivre ensemble,
25:31de…
25:32parce qu'on ne peut pas
25:33être d'un côté
25:33entre ceux,
25:34parce que c'est comme ça
25:35au cours juif,
25:35c'est structuré,
25:36ceux qui vont dire
25:38« Regardez-nous comment
25:39on est contre l'antisémitisme
25:40et on est les meilleurs amis
25:41des juifs »
25:42avec quand même
25:42toute une série
25:43de propos passablement racistes
25:45qui peuvent passer
25:45par derrière
25:46et à contrario,
25:47des personnes
25:48qui vont se présenter
25:49comme les meilleurs amis
25:50des Arabes
25:50et des musulmans
25:51avec des saloperies
25:53dans le discours
25:54qui sont antisémites.
25:55SOS racisme,
25:56évidemment,
25:57ça n'est pas ça
25:58et peut-être
25:59qu'il serait bien
26:00de redécouvrir
26:01que les combats,
26:02on les mène
26:03en disant
26:04que « touche pas à mon pote,
26:06on est là aussi
26:07pour les autres »
26:07et ce que l'on veut
26:08pour soi,
26:09eh bien on le veut
26:10pour les autres,
26:10sinon on est dans
26:11des fractures,
26:12on est dans des divisions
26:13et on est dans des haines
26:14qui peuvent se monter
26:15en miroir.
26:17Hélène Geoffroy.
26:17Il y a deux récits
26:19qui s'affrontent aussi
26:20en ce moment,
26:21évidemment,
26:22dans notre pays
26:23et puis à ce que
26:24nous y vivons.
26:25Moi, je suis maire
26:26d'une ville populaire,
26:27je fais des mariages
26:28comme tous les maires
26:29et je vois la société
26:31se transformer
26:31en profondeur,
26:32c'est-à-dire
26:33des mariages
26:34entre des personnes
26:35issues d'histoires différentes
26:36et ce qui est nouveau,
26:37vous savez,
26:38sur les 20 années
26:39qui se sont écoulées,
26:40c'est que les familles
26:41sont là aussi
26:42parce qu'autrefois,
26:43vous venez à voir
26:43des mariages
26:45entre deux personnes
26:46venues d'histoires
26:47familiales,
26:48d'origine des parents
26:49ou des grands-parents
26:50différentes
26:50et les familles
26:51ne venaient pas.
26:52Maintenant,
26:52elles sont là.
26:53Donc, il y a ce mouvement
26:54en profondeur
26:55dans la société française
26:56qui doit être
26:57une source d'espoir
26:57et dans le même temps,
26:59parce qu'effectivement,
27:00il y a des familles politiques
27:01ou des réflexions politiques
27:03qui essentialisent
27:04les Français,
27:05vous avez des forces
27:06de régression
27:06qui sont à l'œuvre,
27:08celles qui rêvent
27:09d'une France éternelle
27:10qui était monocolore,
27:12blanche, chrétienne
27:13et qui n'a en réalité
27:14jamais existé,
27:16ne serait-ce qu'avec
27:17la présence des Outre-mer
27:18et puis une autre histoire
27:20qui est en train
27:20de prendre de la force
27:21qui essentialise
27:22et ramène tout le monde
27:23à une couleur de peau
27:24ou à une religion
27:26et qui fait comme si
27:27c'était la seule identité
27:29de quelqu'un.
27:30Et donc,
27:30il y a au milieu
27:31des Français
27:31de toutes histoires
27:32complètement perdus
27:33et qui sont nostalgiques,
27:35mais qui n'ont pas
27:36d'ailleurs existé.
27:37Et donc,
27:37aujourd'hui,
27:38le rôle des partis politiques,
27:41de seuls et ceux
27:41qui veulent réduire
27:43et en tout cas
27:43réparer les fractures
27:44de la société,
27:45c'est de commencer
27:46par dire la vérité
27:47de notre histoire,
27:49l'histoire de la France
27:50compliquée,
27:50coloniale,
27:51etc.,
27:52mais aussi l'histoire
27:52de ses résistances.
27:54Celle-là,
27:54il faut qu'on la partage
27:55et je vous assure
27:56quand je fais cela
27:57sur ma ville
27:58avec des histoires
28:00venues du monde entier,
28:01eh bien,
28:02cela parle
28:02parce qu'au fond,
28:03les gens,
28:04ils ont envie
28:05de l'espoir
28:05que porte la République
28:06et de ce qu'à un moment
28:08incarnait,
28:08soit ce racisme.
28:09C'est ça,
28:10je crois,
28:10le fil conducteur
28:11de notre pays
28:12et autour de ça,
28:13il y a ceux
28:14qui vivent des fractures
28:15qu'ils sont en train
28:16d'alimenter,
28:16vous avez raison,
28:17avec la progression
28:18des actes antisémites
28:19que personne ne peut nier,
28:21avec, là,
28:22récemment,
28:23un crime contre
28:23quelqu'un
28:25qui est confession musulmane
28:27ou contre l'étranger
28:27ou l'étranger
28:28où c'était à la fois
28:29le musulman,
28:30l'étranger,
28:31enfin,
28:31qui résumait plein de choses
28:32en même temps.
28:33On est dans ce moment-là
28:34sur un moment
28:36de bascule
28:37et donc la question
28:38n'est pas de faire
28:38le bilan de l'essai
28:39ce racisme
28:39qui tout seul
28:40ne peut pas réussir
28:41ni son procès
28:41ni son bilan.
28:42Il ne peut pas tout seul
28:43résoudre.
28:44Ça, c'est de se dire
28:44à un moment
28:45les partis politiques
28:46et les citoyens,
28:48qu'est-ce qu'ils veulent dire
28:48de cette société-là ?
28:50Et parce que le temps file,
28:51je suis désolée,
28:51je vais vous demander
28:52à tous un petit mot
28:53de conclusion.
28:54Damien Dastouline.
28:55Oui, si on veut être optimiste,
28:56moi, je dirais que
28:57peut-être qu'on est au moment
29:01où le mort saisit le vif,
29:03c'est-à-dire que nous sommes
29:04dans une transformation.
29:07Vous savez,
29:07on disait le modèle
29:08anglo-saxon,
29:09il visibilise
29:11les communautés,
29:12il les respecte plus,
29:13il y avait plus
29:13de Pakistanais
29:15au Parlement,
29:16etc.,
29:16alors qu'en France,
29:17c'était même pas envisageable
29:18de voir quelqu'un
29:20issu de l'immigration,
29:21notamment maghrébine.
29:23Bon.
29:24Et puis,
29:26en réalité,
29:27le système
29:28communautariste
29:29anglo-saxon,
29:30c'est qu'il y a
29:31moins de mélange,
29:32chacun vit
29:33de façon séparée.
29:34Dans son couloir.
29:35bien sûr,
29:36et que la France,
29:37on ne se rend pas compte,
29:38mais ce modèle français
29:39avec la laïcité
29:41a fait que c'est le modèle
29:43où on se mélange le plus,
29:45c'est-à-dire les mariages
29:45mires,
29:46je l'avais constaté
29:46quand j'étais élu municipal aussi,
29:49et c'est des chiffres,
29:50c'est-à-dire que là,
29:51ce n'est pas seulement
29:51notre expérience de vécu,
29:52c'est comme ça.
29:53Donc,
29:54il y a une France métissée
29:56qui émerge.
29:57Et dans ce moment-là
29:58où la France se transforme
30:00en profondeur,
30:01nous,
30:02on milite pour le vif,
30:03c'est-à-dire pour que le vif
30:04l'emporte
30:04et qu'on accepte
30:06de vivre ensemble
30:06en n'oubliant rien
30:09du passé,
30:10de ce qu'on apporte,
30:11en ne mettant pas sa valise
30:12à l'entrée de la Porte France
30:13pour rentrer,
30:14on rentre avec sa valise,
30:16on se mélange
30:16dans la même famille,
30:17dans la même maison,
30:18mais on a
30:19ses ancêtres,
30:21son patrimoine culturel
30:22et qui vient enrichir
30:23l'ensemble.
30:24J'espère,
30:25même si en ce moment,
30:27on peut avoir des raisons
30:29d'être désespérés,
30:29j'espère que
30:30c'est ça qui va triompher.
30:32En tous les cas,
30:32si il n'y avait pas
30:33SOS Racisme,
30:35on pourrait se dire
30:35qu'il n'y aura plus personne
30:36pour résister
30:37et pour préparer ce moment.
30:39Espoir et optimisme,
30:40Dominique Sopo ?
30:40Quand on milite,
30:41c'est parce qu'on pense
30:42qu'on va gagner.
30:43Sinon,
30:43il ne faut pas militer.
30:44Il faut regarder Netflix
30:45ou Public Sénat
30:46et rester devant son canapé.
30:49Ce n'est pas la même chose,
30:50j'entends bien.
30:50Mais en tout cas,
30:52par rapport à ce que l'on a vu,
30:53ce qui est très frappant
30:55à SOS Racisme aujourd'hui,
30:56c'est d'abord,
30:57c'est un mouvement de jeunesse.
30:59Moi, je suis très vieux
30:59dans SOS Racisme.
31:00C'est vraiment un mouvement
31:01où il y a beaucoup de jeunes.
31:03Le vivre ensemble,
31:04vous y croyez ?
31:04Le vivre ensemble,
31:05j'y crois d'autant plus
31:06que ça a été dit.
31:07C'est quand même aussi
31:08des mouvements très puissants
31:09dans la société.
31:10Les Français ont quand même
31:11davantage envie de vivre ensemble
31:13plutôt que de faire
31:14des guerres civiles.
31:15Et enfin,
31:16je tiens à dire
31:17que ce qui est très important,
31:19notamment pour les gens
31:20qui nous écoutent
31:21et notamment les jeunes
31:22qui nous écoutent,
31:23c'est de toujours se dire
31:24qu'il ne faut pas être
31:26ni dans l'aigreur
31:27parce que, soi-disant,
31:29les combats ne serviraient à rien.
31:30L'aigreur,
31:31elles ne mènent nulle part.
31:32Ça, c'est le premier élément.
31:33Deuxième élément,
31:34ne jamais se laisser enfermer
31:36dans des identités repliées.
31:39Nous, à SOS Racisme,
31:40les gens qui militent chez nous
31:41sont des gens
31:42qui sont de toutes les origines
31:44mais qui, en fait,
31:45sont très fluides
31:45dans leurs identités.
31:47Et en fait,
31:48c'est « touche pas mon pote »
31:49parce que l'autre,
31:50il est toujours un pote.
31:51Et on est là
31:52pour soi
31:53quand on milite aussi
31:54mais on est là aussi
31:55pour l'autre
31:56parce que c'est ça
31:57notre modèle de société.
31:58Et en tout cas,
31:58on en est extrêmement fiers.
32:01Et vraiment,
32:02quand on regarde
32:03le bilan de SOS Racisme,
32:04quand moi,
32:04je regarde l'histoire
32:05de mon association,
32:06je suis très fier
32:07de cette association
32:09et je suis très fier
32:11qu'il y ait eu des générations
32:12entières de jeunes
32:13qui se soient impliqués
32:15et qui aient donné
32:16de leur temps,
32:16de leur jeunesse justement
32:17pour faire progresser
32:18l'égalité.
32:19Et le combat continue.
32:20Olivier Paco.
32:21Écoutez,
32:22pour qu'effectivement,
32:23le combat contre le racisme
32:25l'emporte,
32:26il faut aussi,
32:27à mon avis,
32:28cesser de noircir
32:29certains tableaux
32:30et par exemple,
32:31d'insister sur le fait
32:32qu'il y aurait
32:33un racisme systémique
32:34en France.
32:35Non.
32:35Il faut positiver.
32:37Tout ne n'est pas parfait,
32:38évidemment,
32:39mais arrêtez d'insister
32:41sur ce racisme systémique
32:42qui est un mythe
32:43et qui fait beaucoup de mal,
32:45entre guillemets,
32:45à l'antiracisme.
32:47Beaucoup de gens,
32:48je vis dans un département,
32:49six députés sur sept
32:50sont RN.
32:51Six députés sur sept
32:52sont RN.
32:52Leurs électeurs
32:53ne sont pas des fachos.
32:54Il y a un espèce
32:55de repli identitaire
32:57qui est le synonyme
32:59d'un malaise en fait,
33:00qui équivaut à un malaise
33:01chez ces gens-là.
33:02Mais ce ne sont pas
33:03des racistes.
33:04Moi, je les croise
33:05quasi quotidiennement.
33:06Il peut y en avoir
33:07quelques-uns,
33:08mais non, justement,
33:09c'est ça la grosse erreur
33:11de SOS Raciste,
33:12c'est d'avoir voulu dire
33:13vous êtes électeur RN,
33:15donc vous êtes des racistes.
33:16Pas du tout.
33:16Ce n'est pas le fait.
33:16On va laisser le mot
33:18de la fin à Hélène Geoffroy
33:19et vous en parlerez hors plateau.
33:20On nie pas la réalité
33:21non plus quand même.
33:22Hélène Geoffroy.
33:22Je pense qu'il faut dire
33:23les choses qu'elles le sont
33:26parce que les Français
33:27savent la réalité,
33:29on est tous dans nos fonctions,
33:31on s'en rend bien compte.
33:33Personne n'a dit qu'il y avait...
33:34En tout cas, moi,
33:34je n'ai jamais dit
33:35qu'il y avait de racisme
33:35systémique en France.
33:38Je dis au contraire
33:39que la France aura permis,
33:41par son modèle,
33:41et c'est ce que rappelait
33:42David Assouline,
33:43de permettre à toutes
33:45les strates de la société
33:46d'avoir des personnes
33:48qui viennent de toutes
33:48les histoires de France.
33:50C'est ça la réalité
33:50de la société telle
33:51qu'elle est aujourd'hui,
33:53que ce soit,
33:54on pourrait le dire pour tous,
33:55les institutions,
33:56les grandes entreprises,
33:58la santé.
33:59et dans le même temps,
34:01comme nous sommes
34:01dans un moment
34:02où le pays est en proie
34:04à une crise
34:04qui n'est pas qu'identitaire,
34:05qui est sociale,
34:06qui est environnementale,
34:07où des jeunes se demandent
34:08même s'ils ont un avenir,
34:09ils en sont à se demander
34:10s'ils vont faire des enfants.
34:11Jamais aucune civilisation
34:13ne s'est posé la question
34:14de savoir
34:15si elle allait faire des enfants.
34:16Et donc,
34:16on est dans ce moment
34:17de réflexion si profond
34:19et si difficile,
34:20alors on revient
34:22à des choses très premières.
34:24Mon village,
34:25mon clan,
34:26ma famille.
34:27Ma communauté.
34:27Ma communauté.
34:28Et c'est de ça
34:29dont on doit sortir.
34:30Et c'est pour cela
34:31qu'on doit donner
34:31des perspectives
34:32qui sont plus globales.
34:34Et je dis qu'elles sont déjà là
34:35et c'est là
34:36qui est mon message d'espoir.
34:37C'est qu'elles sont déjà là
34:38dans la société,
34:39à nous,
34:40les responsables politiques
34:41et les responsables associatifs,
34:43de les faire émerger
34:44et de donner des raisons
34:45d'espérer
34:46parce qu'elles existent
34:47et de combattre
34:48les prêcheurs de haine,
34:50ceux qui veulent nous séparer
34:51parce que je n'ai jamais dit
34:52qu'ils n'existaient pas.
34:53En revanche,
34:54la société a les ressources
34:56pour les combattre
34:56et nous devons avoir
34:57cet optimisme-là.
34:58Et on s'arrêtera
34:59sur cet optimisme.
35:00Merci beaucoup
35:00à tous les quatre
35:01d'avoir participé
35:01à cette échange,
35:02émission et documentaire
35:04à retrouver en replay
35:04sur notre plateforme
35:05publicsena.fr.
35:06À très vite.
35:07Merci beaucoup.
35:20Sous-titrage Société Radio-Canada
35:21Sous-titrage Société Radio-Canada
35:22Sous-titrage Société Radio-Canada
35:23Sous-titrage Société Radio-Canada

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