Passer au playerPasser au contenu principalPasser au pied de page
  • 04/06/2025
Transcription
00:00Je suis heureux d'accueillir Frédéric Moura, qui est directeur littéraire côté Julliard,
00:07qui est entre autres l'éditeur et qui est un compagnon de route depuis longtemps,
00:13et qui est l'éditeur d'Abdelhataya, la dernière rentrée, et qui là est l'éditeur heureux.
00:19Deux très beaux livres en cette rentrée, on va commencer tambour battant avec un auteur
00:25qui a scellé quelque chose d'ailleurs, qui transcende même les questions de maison,
00:30les questions de littérature, et qui se fonde et dans l'amitié et dans la confiance.
00:34C'est ce qui s'est passé autour de David Diop, de la découverte de Frère d'Am,
00:39de cet échange initial devant ce manuscrit inouï qu'a été Frère d'Am,
00:44et devant son destin incroyable.
00:47Vous vous rappelez, Frère d'Am, c'est ce livre qu'on a tous découvert en entendant une voix,
00:52là une voix totalement nouvelle, et qui ensuite s'est fait une place de choix
00:58dans la rentrée de sa parution, il était sur toutes les listes, finaliste de tous les prix,
01:02et Goncourt des lycéens, et fait rare et même inédit,
01:06le premier International Booker Prize français, francophone, pour Frère d'Am.
01:11Il avait ensuite poursuivi avec La Porte du voyage sans retour,
01:17un grand succès autour de la figure de Michel Adanson et de son voyage en Afrique,
01:23et là il nous revient avec un livre vraiment immense,
01:26immense vraiment par sa force, par son ampleur, par son écriture.
01:31C'est rare d'être devant un classique, un classique non pas dans la poussière,
01:35mais un classique vivant, vibrant.
01:36Jursenard disait dans les mémoires d'Adrien à la fin, dans les carnets,
01:42elle dit faire du dedans ce que les archéologues au XIXe ont fait du dehors.
01:46Vous verrez, c'est ce que fait homo David Diop, et Frédéric va vous dire pourquoi.
01:53Bonjour à toutes et à tous, j'ai cinq minutes pour vous en parler.
01:57Donc, ni plus ni moins.
01:59Alors, merci Adrien, merci beaucoup.
02:01Adrien vous l'a dit, David Diop, c'est un grand écrivain,
02:06c'est un écrivain rare, c'est un écrivain tardif,
02:09il ne choisit pas ses sujets au hasard, il prend son temps,
02:15et il a pris le temps qu'il fallait pour nous donner,
02:19nous faire l'amitié de ce nouveau roman,
02:22Où s'adosse le ciel, c'est un grand roman.
02:24C'est un roman très complet, c'est un roman qui ne ressemble pas,
02:28c'est un roman qui nous embarque, qui nous embarque loin.
02:30Alors, en quelques mots, c'est l'histoire d'un griot.
02:35Vous savez toutes et tous ce qu'est un griot, c'est un conteur,
02:38c'est un passeur de paroles, c'est un gardien de la tradition.
02:42Il est le gardien d'une chaîne de paroles qui se transmet
02:44de génération en génération en Afrique, jusqu'à de lointains ancêtres.
02:49Ce griot, il s'appelle Bilal Sec, on le saisit en 1893 exactement,
02:54au moment où il rentre d'un pèlerinage à la Mecque, il est musulman,
02:59il est accompagné d'un ami, d'un ami d'enfance, qu'il trahira.
03:04Vous verrez pourquoi et comment.
03:06Et ce retour est tout de suite émaillé de péripéties,
03:10puisque la région, on est sur les bords de la mer Rouge,
03:13est en proie à une épidémie de choléra.
03:16Il se trouve que Bilal semble miraculeusement immunisé contre ce bacille.
03:27Et il y a un médecin français, intrigué, qui va essayer de percer les mystères de cette immunité.
03:33Il va demander un prélèvement sanguin.
03:38Le héros va, dans un premier temps, refuser.
03:40Mais surtout, on comprend très vite qu'il est ailleurs.
03:43Il est ailleurs parce qu'il psalmodit, en permanence, tous les jours,
03:48une autre histoire que la sienne propre,
03:51qui est cette histoire d'une parole immémoriale qui remonte à ses lointains ancêtres.
03:56Et ça, c'est le deuxième versant du roman.
03:59Et vous allez voir comment le roman va mêler deux histoires,
04:03donc celle de Bilal et de son voyage de retour au Sénégal, à Saint-Louis du Sénégal.
04:06Ça va être un long périple.
04:08Et cette autre histoire qu'il porte en lui, qu'il recèle,
04:11et qui est celle de ses ancêtres égyptiens.
04:14Et là, on est embarqué dans l'Égypte ancienne,
04:17troisième siècle avant Jésus-Christ à peu près.
04:20L'Égypte est sous domination des Ptolémées, les pharaons grecs.
04:24Mais il y a une partie de la haute prêtrise et du peuple égyptien qui fait sécession,
04:30embarquée par un prêtre qui s'appelle Unifer, grand prêtre d'Osiris,
04:36qui va embarquer une partie de ce peuple vers un voyage dans l'extrême Occident,
04:44au-delà, dans les confins du Sahara,
04:47en vue de fonder une ville où tous pourraient rendre librement leur culte
04:52et jouir et profiter de leurs racines et de leur culture égyptienne.
04:58Et donc, ces deux Odyssées vont être indissolublement mêlées.
05:02Et ça, c'est magnifique dans le livre.
05:04Vous allez voir cette remontée permanente de la mémoire,
05:06d'une mémoire ancestrale, archaïque.
05:09Et David Diop use magnifiquement de ce tour romanesque
05:12pour nous prendre et pour nous emporter.
05:14Alors, c'est un roman d'aventure.
05:16Ce n'est pas un roman historique, même s'il y a beaucoup d'histoires.
05:18C'est surtout un grand roman d'imaginaire,
05:20comme savent le faire les grands écrivains.
05:22C'est un roman sur l'origine.
05:24C'est un roman sur le passage, sur cette chaîne de parole.
05:28C'est un roman aussi sur la transmission.
05:30À un moment, au XIXe siècle, fin du XIXe siècle,
05:34l'écrit, tout régnant, a tendance, y compris en Afrique,
05:38à prendre le pas et à menacer toute cette tradition orale.
05:42Dans ce grand roman, l'Occident, je le précise, est un théâtre d'ombre.
05:45C'est un roman profondément désoccidentalisé.
05:49Ça, c'est le geste plus subreptiste de David Diop.
05:52Et c'est un très beau geste qui donne toute sa voix
05:54à ce rituel narratif, à cette grande tradition et à ses grandes voies.
05:58C'est un grand livre.
06:00J'espère qu'il vous embarquera autant qu'il nous a embarqués.
06:05Vous savez, il y a un président français qui s'était rendu en Afrique
06:08en lisant un discours que l'Afrique n'était pas encore entrée dans l'histoire.
06:11Bon, la réponse, elle était...
06:15Je ne suis pas sûr qu'il y avait besoin de réponse.
06:17Mais ce livre raconte aussi ce qu'est cette histoire.
06:20Et cette histoire, là, tu l'as dit, débarrassée aussi d'une partie de l'Occident
06:24qui, dans les premiers livres de David, était toujours présent.
06:27Là, se trouve vraiment en arrière-plan.
06:29Et se trouve en arrière-plan avec une question aussi au cœur.
06:32Qu'est-ce qui crée les grandes migrations ?
06:34Qu'est-ce qui crée les grands mouvements ?
06:35Et en partie, la réponse, là, est celle de la religion, du culte en péché.
06:42Frédéric l'a dit, c'est aussi une histoire d'homme-livre.
06:45Comme à la fin de Fahrenheit, où les hommes apprennent, comme ça,
06:48des livres par cœur et se les transmettent.
06:50C'est presque ce chemin-là.
06:52Et en parlant d'homme-livre, on va accueillir Rachid Benzine,
06:57qui est un homme-livre, mais qui est aussi l'auteur d'un livre,
07:01celui que l'on présente dans cette rentrée, qui parle précisément de cela.
07:05Dans le chaos, dans la barbarie, qu'est-ce qui est peut-être la plus radicale des révolutions,
07:11la plus radicale des oppositions au désastre ?
07:15C'est peut-être le geste de lire, c'est peut-être celui de ne pas ajouter du malheur au monde,
07:19comme dit la formule. Et c'est ce qu'a voulu faire Rachid Benzine,
07:24qui est un auteur chéri pour nous, qui le voilà présent.
07:35Rachid Benzine, qui est un auteur de sciences humaines,
07:41que j'ai rencontré d'abord par les sciences humaines.
07:43Et vous le savez, un de ces auteurs, de penseurs,
07:47qui ont, dès le début, pensé le dialogue interreligieux,
07:50avec un livre important, qui était, et combien important de nos jours,
07:55qui s'appelait « Des mille et une façons d'être juif ou musulman »,
07:58qu'il avait co-écrit avec Delphine Orvilleur.
08:01Rachid, depuis, a porté une carrière romanesque et théâtrale,
08:04avec grand succès, et j'ai eu la chance de pouvoir l'accompagner de livre en livre.
08:08Je ne vais pas vous rappeler les livres, vous les connaissez.
08:09Le dernier en date, et peut-être celui qui vous a conquis le plus,
08:13c'était « Les silences des pères ».
08:14Et il nous revient avec son geste, peut-être le plus politique,
08:18sa réaction depuis le 7 octobre, même si ce livre se place avant le 7 octobre,
08:23et à travers la figure d'un libraire, et d'un libraire à Gaza.
08:27Je te passe la parole, sans question,
08:31mais pour que tu nous parles de ce personnage, de ce photographe,
08:34et de celui qui rencontre ce libraire.
08:36Oui, en tout cas, c'est le roman le plus politique, au bon sens du terme,
08:42c'est-à-dire une proposition d'une écriture pour le monde que nous traversons,
08:47qui est d'abord un monde d'effondrement.
08:50Et face à l'impuissance à laquelle nous nous retrouvons aujourd'hui,
08:54tous, face à ce qui se passe à Gaza, mais aussi ailleurs,
08:58on peut se poser la question, qu'est-ce que peut la littérature face à la question des bombes,
09:01face à cet effondrement des êtres humains,
09:03face à cette question de la déshumanisation,
09:06et même face à cette question de l'empathie,
09:08dont Simone Veil appelle ça la question de l'attention.
09:12C'est-à-dire comment faire l'idée de l'attention,
09:15c'est-à-dire être capable, à un moment, de pouvoir se déplacer,
09:18déplacer sa souffrance, déplacer ses représentations,
09:20pour être en capacité, quelque part, de pouvoir écouter.
09:25Et effectivement, le roman commence d'abord par l'idée d'un photographe
09:29qui doit prendre des photos de ce qui se passe à Gaza.
09:32Et tout d'abord, il va prendre pour cette photo,
09:35et il voit un libraire, un vieux libraire, en train de lire,
09:39alors qu'il y a un effondrement, il y a des bombes,
09:41il fait un des gestes les plus radicals ou radicaux que je trouve,
09:44qui est d'abord de continuer à lire.
09:48Comme, je dirais, Giono, avec l'homme qui plantait, je dirais, des arbres,
09:52c'est ce même écho, en tout cas, c'est ce même dispositif,
09:55et on a ce photographe français.
09:57Au moment où il a envie de prendre cette photo,
09:58il y a son ombre qui se déplace sur un livre,
10:01et l'autre lui dit, mais avant de prendre une photo,
10:03derrière un visage, il y a toute une histoire.
10:05Est-ce que vous êtes capables d'entendre cette histoire-là ?
10:08Et donc commence une espèce d'odyssée palestinienne,
10:11de cet homme, depuis 1948 jusqu'à maintenant,
10:15c'est-à-dire, ça s'arrête en janvier 2025,
10:17où on a à voir l'histoire intime de cet homme,
10:19de ce vieux libraire.
10:20Et chaque, je dirais, chaque chapitre correspond,
10:25ou est en écho, avec un grand livre de la littérature mondiale.
10:30Pour montrer, justement, que, par exemple,
10:32quand il y a le passage, en tout cas la discussion avec Hamlet,
10:37jouer Hamlet à Gaza, ça n'a pas du tout le même sens
10:39que de jouer aujourd'hui Hamlet au Châtelet.
10:41Il y a aussi l'auteur Mahmoud Darwish.
10:47Il y a aussi, je vous laisserai vraiment découvrir d'autres auteurs,
10:51mais on a à la fois l'histoire d'amour de cet homme pour les livres,
10:55les tragédies palestiniennes en écho,
10:58et en même temps ces tragédies intimes,
11:00et les pertes, et les amours, et les enfants.
11:02Donc c'est vraiment cette question que peut la littérature
11:06face à un monde qui s'effondrait.
11:09Et donc j'ai essayé d'apporter cette contribution.
11:12Alors ça commence par une citation de Simone Veil,
11:15dans une lettre qu'elle envoie à un prêtre,
11:17sur justement cette idée de l'attention.
11:21Et elle dit, seul un être prédestiné,
11:24qui a été capable de traverser toute une nuit,
11:27c'est-à-dire ce désespoir auquel nous assistons,
11:30seul cet homme-là, qui a connu le malheur,
11:32est capable à un moment de poser cette question à l'autre.
11:36Quel est donc ton tourment ?
11:39Et donc on va écouter ce tourment et cet homme,
11:42qui malgré, je dirais, tout l'effondrement,
11:46croit encore dans le pouvoir des mots,
11:48comme un espace d'humanisation.
11:52La littérature n'arrête pas le monde,
11:54mais elle permet que la déshumanisation
11:55n'est pas le dernier mot.
11:57Voilà.
12:00Merci.
12:07Merci beaucoup à Rachid Benzine.
12:09C'est un livre vraiment magnifique,
12:13qui choisit la forme aussi du conte, de la fable.
12:17Il a cité Jean Giono et l'homme qui plantaient des arbres.
12:20C'est aussi ça, le pouvoir des fables,
12:23c'est de devenir inoubliable avec une figure qui est celle,
12:26je le disais, d'un passeur de livres,
12:28mais aussi d'un passeur de mémoire.
12:30Et tout comme Les Silences des Pères avait choisi,
12:33par son titre, de travailler par l'ellipse
12:36pour faire entendre ce silence,
12:38là, vous le verrez, dès le début,
12:40il adresse au lecteur et le tue qui désigne le narrateur,
12:44vous le verrez, nous force et nous provoque à l'empathie,
12:47et à l'empathie que seule la littérature peut proposer,
12:51au-delà de ces vues qui sont les seules vues
12:54qu'on nous propose de l'actualité,
12:56des vues de drones,
12:58des vues qui ne sont pas à hauteur d'homme.
13:00Et ça, c'est ce que nous offre Rachid.
13:01Merci à lui.
13:02Il en parle mieux que moi.
13:03Non.
13:04Merci à bientôt.
13:05À bientôt.
13:10Et maintenant, on va accueillir
13:11Sarah Chid, si elle est arrivée,
13:14pour un livre, là aussi, magnifique, aimé.
13:20Le livre de Rachid, on l'entend déjà,
13:23il y a des échos très forts autour de ce livre,
13:25des premières lectures,
13:26et le livre de Sarah, c'est aussi le cas.
13:30On a déjà des retours de lecture très, très grands.
13:34On sent quelque chose qui est autour de l'œuvre de Sarah
13:40que Frédéric publie depuis Les Enténébrés.
13:45Peut-être, c'est son livre,
13:46et là, Frédéric nous dira juste un mot d'introduction.
13:49Le plus accompli est celui qui fait le pas,
13:51la liaison entre son œuvre,
13:55on pourrait dire, semi-autobiographique,
13:57en tout cas,
13:58et qu'on a lu à travers Saturne,
14:01mais aussi de cette volonté de roman
14:04qu'on avait trouvé dans Les Enténébrés
14:05et dans Les Alchimies récemment,
14:07finaliste du Prix de l'Académie.
14:10Voilà.
14:11Aimé, on n'en ressort pas indemne,
14:13mais on en ressort aussi plutôt bien.
14:16C'est ton livre le plus éouvert
14:20et le plus peut-être réconcilié.
14:22Je vais laisser parler Sarah.
14:27Juste vous dire,
14:28rares sont les écrivains qui savent
14:31faire un grand roman d'amour,
14:36et c'est le cas de ce roman-ci.
14:38Sarah, le thème amoureux est omniprésent
14:41dans ton œuvre romanesque.
14:44Adrien l'a dit,
14:45on avait publié en 2019
14:47Les Enténébrés,
14:49alors qui était une histoire d'amour,
14:50mais qui était une histoire d'amour sombre,
14:54marquée du saut de l'infidélité,
14:56de l'adultère,
14:58de la double vie,
14:59et celui-ci, aimé,
15:00là c'est tout le contraire.
15:02C'est une ligne droite,
15:04mais c'est une ligne brisée aussi,
15:07magnifique,
15:08qui explore sur une vie entière
15:12le lien entre deux êtres,
15:14entre un homme et une femme.
15:16On les saisit dans l'enfance
15:19et on ne va plus les lâcher
15:20durant près d'un demi-siècle.
15:23Sarah, c'est ça ?
15:25Oui, tout à fait.
15:26Bonjour à toutes et à tous.
15:27J'avais envie d'écrire
15:29une grande histoire d'amour.
15:32Une histoire d'amour
15:33qui prend toute une vie
15:34pour se réaliser.
15:36Et comme elle prend toute une vie
15:37pour se réaliser,
15:39elle prend racine dans l'enfance.
15:41On est en Suisse,
15:42en 1984,
15:43dans la banlieue de Genève.
15:45Une petite fille, Margot,
15:48lors d'un week-end de fêtes,
15:53se jette dans le lac,
15:55sous les yeux de son camarade de classe
15:57qui à ce moment-là la connaît à peine,
15:59Alexis, qui a le même âge.
16:02Entre les deux enfants
16:03va naître dès lors
16:05une complicité vibrante
16:07puisque Margot va être sauvée
16:09de la noyade
16:11par le père d'Alexis
16:12qui va se jeter à l'eau
16:14pour sauver la petite fille.
16:16Dès lors,
16:17on va suivre le récit
16:18de toutes leurs amitiés.
16:21Et on va s'apercevoir très vite
16:23qu'ils ont deux enfances
16:24extrêmement différentes.
16:26Lui, très bon élève,
16:28parent aimant,
16:30stable, équilibré,
16:31la mère pharmacienne,
16:33le père chercheur,
16:34vous savez,
16:34dans un de ses grands
16:35laboratoires pharmaceutiques
16:36suisse,
16:37elle, c'est complètement
16:38une autre chose.
16:39Elle a débarqué de France
16:41du jour au lendemain
16:42parce que sa mère,
16:43une femme à la beauté
16:45stupéfiante,
16:45une certaine Ève,
16:47a suivi du jour au lendemain
16:49un homme suisse,
16:50directeur d'un club sportif.
16:53Ce qui se passe derrière
16:53les murs du chalet
16:55où vit Margot,
16:57nul ne le sait.
16:57Le lecteur va le découvrir
16:59progressivement.
16:59Toujours est-il que du jour
17:00au lendemain,
17:02Margot va disparaître.
17:04On apprend qu'elle est rentrée
17:06en France.
17:08On pressent qu'il y a
17:09quelque chose de terrible.
17:11Le lecteur le sait,
17:12Alexis, lui,
17:13ne le sait pas.
17:14Et dès lors,
17:14comme on l'a dit,
17:15on va suivre nos deux personnages
17:17qui vont être séparés
17:18pendant plus de 40 ans
17:19dans leur traversée.
17:22Adolescence d'Alexis,
17:24premier de la classe,
17:25petit génie en maths,
17:27ligne droite,
17:28adolescence de Margot,
17:29l'adolescence d'une fille
17:31tourmentée
17:31dans les années 90.
17:33Une fille qui,
17:35dès lors,
17:36va trouver son salut
17:37dans la littérature.
17:39Ensuite,
17:40Alexis,
17:41le parcours classique,
17:43petit génie en maths,
17:44les grandes écoles,
17:46il rentre à Polytechnique,
17:48il va rentrer ensuite
17:49dans un grand cabinet de conseil,
17:50il va se marier,
17:51la route est toute droite.
17:53Pour Margot,
17:53ça va être complètement
17:54autre chose.
17:55Elle va avoir mille vies,
17:56elle va être baby-sitter,
17:58elle va travailler
17:59dans une galerie d'art,
18:00elle va même être hôtesse
18:02sur des salons automobiles
18:03et puis un jour,
18:04elle va se jeter
18:05dans l'écriture
18:06dans laquelle elle va trouver
18:06son salut
18:07après une enfance dramatique.
18:11Alexis,
18:12ensuite,
18:12on part aux Etats-Unis
18:14et lui,
18:15il se retrouve
18:16partenaire
18:17dans un grand cabinet de conseil
18:19et ça va être sa chute
18:21parce qu'il va être
18:23en proie à un scandale,
18:24ça vous dit peut-être
18:25quelque chose.
18:27Le cabinet de conseil
18:29pour lequel il travaille
18:30a pour client
18:32un laboratoire pharmaceutique
18:34qui produit
18:35un opioïde antidouleur.
18:37Vous savez,
18:38par exemple,
18:38si on a des douleurs
18:38de dos chroniques,
18:40etc.,
18:40il y a certains médicaments
18:41qu'on peut prendre
18:42sauf que ces médicaments
18:43sont très addictifs
18:44et donc cet opioïde
18:46va totalement ravager
18:47l'Amérique.
18:48Alexis va chuter
18:49et c'est le moment
18:50où Margot,
18:51elle,
18:52va commencer
18:53à s'élever
18:53modestement
18:55mais courageusement
18:56par le biais
18:57de la littérature
18:57et c'est à ce point
18:58d'intersection
18:59que complètement
19:00par hasard
19:01ils vont se croiser
19:03dans un lieu improbable
19:04s'il en est,
19:05un supermarché.
19:06Qu'est-ce que vous faites
19:07si vous avez 50 ans
19:09et puis tout à coup,
19:10un jour,
19:11vous croisez
19:12votre amour d'enfance,
19:13le premier amour,
19:15après les mariages,
19:16les divorces,
19:17les chagrins,
19:17les deuils,
19:18etc.
19:19Et bien c'est ça
19:20que j'ai voulu explorer
19:21dans la deuxième partie
19:22du livre.
19:23On va voir comment
19:23ces deux-là
19:24vont s'arranger.
19:24Donc comme Frédéric l'a dit,
19:26ils sont absolument
19:27libres à ce moment-là
19:28mais ce n'est pas
19:29parce qu'on est libre,
19:30ce n'est pas parce
19:30qu'on n'est plus marié
19:31qu'on n'a pas
19:32des inhibitions,
19:33des empêchements.
19:34Est-ce qu'à 50 ans,
19:35comme Alexis,
19:36après avoir vécu
19:37tant de douleurs,
19:38tant de déceptions
19:39professionnelles,
19:41est-ce qu'on a vraiment
19:42envie qu'on a déjà
19:43des enfants qui grandissent
19:44loin, qu'on ne voit plus ?
19:45Est-ce qu'on a vraiment
19:45envie de s'engager
19:47dans une nouvelle vie
19:48avec une femme
19:48qui pourtant a été
19:49le grand amour d'enfance ?
19:51Est-ce qu'on a envie
19:52de le faire
19:52alors qu'on a un père
19:56de charcot ?
19:57Donc là,
19:57c'est toute la question
19:58des aidants,
19:59vous voyez.
19:59Qu'est-ce qui se passe ?
20:00Pour moi,
20:01c'est vraiment un problème
20:02majeur de notre temps.
20:04Qu'est-ce qui se passe
20:05quand on a la cinquantaine
20:06et qu'on a un parent malade ?
20:08Comment est-ce qu'on va
20:09s'en occuper au quotidien ?
20:10Comment est-ce que ça
20:11nous prend toute la vie ?
20:12Margot,
20:13c'est complètement autre chose.
20:15Elle est célibataire
20:16et très heureuse de l'être
20:17quand elle rencontre Alexis.
20:19Je voulais vraiment raconter ça.
20:20Le célibat d'une femme
20:21de 50 ans
20:22qui vit avec ses rides,
20:25sa solitude,
20:26son chat,
20:26sa fille une semaine sur deux
20:28et qui s'en trouve bien,
20:29qui s'en trouve heureuse
20:31parce que c'est un choix.
20:33Et alors,
20:34est-ce qu'elle a vraiment envie
20:36de recommencer tout un truc
20:37avec son premier amour ou pas ?
20:39On va les suivre,
20:40on va découvrir
20:41comment ils s'en sortent
20:43ou pas.
20:44Et puis,
20:45le roman,
20:45effectivement,
20:46s'achève
20:47quand ils ont 80 ans.
20:49Pour moi,
20:49c'était très important.
20:51Vous voyez,
20:51c'est mon premier roman
20:52linéaire,
20:53c'est-à-dire qu'on les saisit
20:54dans l'enfance.
20:56Fin du roman,
20:58ils ont 80 ans.
21:00Et puis aussi,
21:01je voulais vous le dire
21:01pour celles et ceux
21:02d'entre vous
21:03qui ont peut-être déjà lu
21:04certains de mes livres
21:05précédents,
21:06c'est mon premier livre
21:07avec une fin heureuse.
21:09Voilà.
21:10Et je suis très contente
21:12de vous le dire.
21:14C'est une fin
21:15résolument heureuse.
21:16C'est un livre
21:16que j'ai voulu
21:18heureux,
21:19apaisé,
21:20réconcilié.
21:22Et que j'espère
21:23qu'il vous apportera
21:24beaucoup de plaisir
21:25à la lecture,
21:26autant de plaisir que moi
21:27j'ai eu à l'écrire.
21:29Je vous remercie
21:29pour votre attention.
21:30Merci, Sarah.
21:38Et ce sera une parution
21:39heureuse.
21:40On se le promet.
21:42Merci beaucoup.
21:43C'est un livre
21:44magnifique
21:45sur la grâce
21:47des secondes chances.
21:49Et voilà,
21:50je pense que ça nous parle
21:50à tous
21:51et à toutes.
21:53Frédéric,
21:53on va en parler
21:55en trois minutes.
21:56Julliard,
21:57c'est une maison
21:58qui,
21:58dans son ADN,
21:59depuis toujours,
22:00depuis sa naissance,
22:01a la découverte
22:02du premier roman
22:03au cœur
22:03et qui sait
22:04les faire découvrir.
22:06Je ne vous citerai pas
22:07tous les auteurs
22:07qui ont été découverts
22:08par la maison Julliard
22:09et qui ont ensuite
22:11marqué la littérature.
22:13Sacha Georges,
22:13c'est notre seul
22:14premier roman.
22:15C'est aussi le seul
22:15premier roman
22:16entre les deux maisons.
22:18Et on ne place pas
22:20un premier roman
22:20pour le placer.
22:21c'est parce qu'on doit
22:22être pleinement convaincu.
22:23Et là,
22:24on l'est.
22:24Et c'est un livre
22:25qui va vous poser
22:26beaucoup de questions,
22:27qui va percuter
22:28et qui va laisser
22:30un profond questionnement
22:35à beaucoup de lecteurs.
22:37C'est physiquement
22:38de Sacha Georges
22:38et c'est son éditeur,
22:39Frédéric,
22:39qui va vous en parler.
22:41Merci, Adrien.
22:41Je vais vous en parler
22:43très brièvement
22:43parce que c'est un livre,
22:45tu l'as dit,
22:46qui nous a saisi
22:47par ses qualités
22:48d'écriture.
22:49Ça nous a sauté
22:50aux yeux
22:51dès les premières pages.
22:54Mais je ne voudrais pas
22:54gâcher le livre
22:56en vous en parlant trop.
22:58Quelques mots.
23:00C'est l'histoire
23:00d'un homme,
23:02en apparence,
23:02c'est l'histoire
23:03d'un jeune homme,
23:04d'un jeune homme anonyme,
23:06lambda,
23:07provincial,
23:08il est de Rennes.
23:08Il vit avec sa mère
23:10et sa jeune sœur
23:12qui est lycéenne,
23:13qui est un peu plus jeune
23:13que lui,
23:14qui s'appelle Lala.
23:15Lui, il s'appelle D.
23:16On comprendra plus tard,
23:17on apprendra plus tard
23:18quand il a été,
23:19il s'appelle Dorian.
23:20Et il va monter à Paris.
23:21Il va monter à Paris
23:22parce qu'il est temps
23:24qu'il trouve du travail
23:26et qu'il trace sa voix.
23:29Il va s'installer
23:30en colocation
23:30avec une copine de lycée
23:34qui est très gagnée
23:35à la cause féministe,
23:37qui fréquente beaucoup
23:38les milieux théoriques,
23:40féministes de la capitale.
23:42Et il semble,
23:44on a l'impression,
23:46qu'il va se convertir
23:47à toutes ces idées.
23:49En tout cas,
23:49que ça va l'amener
23:51à se poser des questions
23:52sur l'homme qu'il est.
23:57Bon, sauf que,
23:59et j'en dirai pas beaucoup plus,
24:00sauf que ce garçon
24:02n'est pas celui
24:05qu'il paraît être.
24:07C'est un type clivé.
24:10Et le roman va nous amener
24:12petit à petit,
24:13par dévoilements successifs,
24:14c'est des dévoilements durs,
24:17à dévoiler la part
24:20beaucoup plus sombre
24:21de sa personnalité.
24:24Je vous dirais juste
24:25que cette part plus sombre
24:27et très sombre
24:27est liée au rapport
24:30qu'il entretient
24:32avec sa jeune sœur,
24:33au regard qu'il porte sur elle.
24:35Et ça,
24:35vous le découvrirez aussi.
24:37Donc, c'est un roman fort.
24:38Ce n'est pas un roman
24:39dont on sort indemne.
24:40C'est un roman
24:41qui est construit
24:41autour de deux scènes
24:42très percutantes,
24:43très dures,
24:44qu'on ne voit pas venir.
24:45Nous, ça a été un peu
24:46un choc
24:47quand on les a lus.
24:50C'est un roman
24:50sur les violences
24:51faites aux femmes,
24:53notamment en milieu
24:53intrafamilial.
24:55C'est très réussi.
24:57Et comme l'a dit Adrien,
24:57ça pose tout un tas
24:59de questions
24:59et les bonnes questions.
25:00Donc, je vous en recommande
25:01chaudement la lecture
25:03et la découverte.
25:04Merci beaucoup.
25:08Ça pose de très bonnes questions
25:11et c'est par l'écriture
25:12et par le questionnement.
25:13Ce qui peut être vraiment
25:14un roman pour une génération,
25:16vous le verrez.
25:17On pense aussi à David Lopez
25:19par certains aspects,
25:20mais ça s'en écarte
25:21par le questionnement
25:23et la thématique sous-jacente
25:24qui vient irriguer tout le roman.
25:26Je m'arrête là.
25:27C'est une rentrée
25:28qu'on a voulu très complète,
25:29très construite,
25:30avec des enjeux forts,
25:32des auteurs
25:32qui nous étaient attachés,
25:34auxquels nous étions attachés,
25:35qui racontent cette fidélité
25:38dont on a tous,
25:40qu'on sait tous,
25:41heureusement,
25:42au cœur de nos métiers,
25:43la relation qu'on porte
25:44aux livres et aux auteurs.
25:46Et c'est ça,
25:46la rentrée, Juliard,
25:47et la rentrée
25:48des éditions du Sous-Sol.
25:49Donc, merci de votre accueil
25:50et de vos lectures.
25:51Merci.
25:53Sous-titrage Société Radio-Canada
25:54...

Recommandations