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  • 29/05/2025
Dans son édito du 29/05/2025, Mathieu Bock-Côté revient sur [thématique de l'édito]

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Transcription
00:00Pas besoin de pousser beaucoup, en fait.
00:02Ce n'est que mon opinion, comme vous le noterez.
00:04Mais oui, assurément, c'est une reconquête des libertés et de la démocratie.
00:07Mais prenons un autre terme pour nommer ce qui s'est passé.
00:11Nous sommes devant une jacquerie qui, dans les circonstances, a fonctionné.
00:15J'entends que c'est une révolte des petits, une révolte du petit peuple.
00:18Alors, je note que le petit peuple ne se révolte que s'il a un chef, en général,
00:22pour être capable de fixer l'action ou un mouvement qu'il organise.
00:24Or, Alexandre Jardin, qui, je crois, je ne pense pas le vexer en disant
00:28qu'il se cherche un destin politique depuis quelques années.
00:30– Il avait lancé un mouvement.
00:32– Je crois qu'il en a un.
00:33Et là, il y en a un.
00:34Donc, il se voit comme chef des gueux.
00:36Et le chef des gueux a été capable, dans les circonstances,
00:39de faire plier les autorités, donc de renverser.
00:43Alors, ce qui est intéressant avec le sociétal et l'écologique,
00:46c'est qu'on nous dit toujours que c'est inévitable.
00:47Une fois qu'une loi est votée, on ne peut plus jamais revenir sur ça.
00:50Eh bien, il disait, à un instant, cette liberté qui nous avait été confisquée,
00:52la liberté des plus modestes de se déplacer,
00:55qu'on traitait comme des malpropres, des édentés,
00:58malodorants qui osaient se présenter dans de vieilles bagnoles en ville,
01:01eh bien, désolé, cette loi ne passera pas.
01:04Et dès lors, Alexandre Jardin était capable de porter cette révolte.
01:07Il faut y voir, je crois, le signe d'une révolte
01:11qui dépasse la seule question des ZFE contre l'écologisme autoritaire.
01:15L'écologisme autoritaire qui n'est pas le souci de l'environnement,
01:18mais qui est l'instrumentalisation de la cause de l'environnement
01:21pour imposer une société de plus en plus autoritaire,
01:23de moins en moins libre,
01:24et qui est portée presque par une vision religieuse nouvelle
01:28qui a peu à voir avec les religions traditionnelles de l'Europe
01:31ou même de l'Occident,
01:32mais une religion nouvelle qui est la religion de Gaïa.
01:35Alors, le point de départ, en fait,
01:36c'est une religion nouvelle avec l'homme qui est de trop sur Terre.
01:39L'homme est ce parasite de trop sur Terre
01:41qu'on doit neutraliser autant que possible.
01:44Et quel est le nouveau nom du péché de ce point de vue ?
01:47C'est l'empreinte carbone.
01:49Calculez, aujourd'hui, vous devez vous excuser autant que possible,
01:51vous devez vous repentir pour votre empreinte carbone
01:53qui est l'autre nom de votre empreinte toxique sur cette planète.
01:56Et pour, justement, vous libérer de cela,
01:58il faut créer une société qui va rétrécir le domaine des libertés
02:02pour permettre, dans une société,
02:03une forme de reverdir le monde dans leur esprit,
02:07une société toujours plus verte.
02:08Alors, qu'est-ce qu'il faut faire ?
02:10On avait ces LFE qu'on pourrait appeler une forme de version écolo du pass sanitaire.
02:15C'est-à-dire le pass sanitaire appliqué aux écolos.
02:17Donc, si vous avez le bon pass, vous avez le droit d'entrer en ville.
02:19Si vous n'avez pas le bon pass, désolé, vous n'êtes pas les bienvenus.
02:22Restez chez vous, les gueux.
02:24Autre chose, parce que les mesures sont vastes.
02:27On le voit, je donne des mesures qui existent dans différents pays occidentaux.
02:29L'inspection des déchets.
02:31On est quand même dans un monde où on paie des gens avec l'argent public
02:34pour fouiller dans vos déchets, dans vos poubelles,
02:37pour vérifier si vous faites un tri adéquat.
02:39C'est quand même assez original.
02:41Donc, des inspecteurs de vidanges, des inspecteurs de déchets.
02:45De la même manière, il y a l'ambition du contrôle des voyages en avion.
02:48Rappelez-vous cette proposition de Jean-Marc Jean-Covici
02:50qui disait « 4 voyages en avion par vie ».
02:52Je pose toujours la question,
02:53quelle sera l'administration centrale mondialisée
02:55qui gérera le droit des uns des autres de voyager ?
02:59Le contrôle des voitures, on vient de le dire.
03:02La restriction des droits à la maison individuelle.
03:05L'hostilité au nom de la concentration urbaine aujourd'hui,
03:07au nom de la forte, de la densification urbaine.
03:10L'idée qu'on doit limiter la maison individuelle.
03:12Et pourquoi pas développer la colocation,
03:14mais pas à l'âge de 17 ans.
03:15La colocation généralisée,
03:17parce que la maison individuelle serait l'autre nom d'une forme d'égoïsme
03:19qui empêcherait la société d'être solidaire.
03:21Eh bien, on s'inquiète de cela aussi.
03:24La volonté de restreindre le contrôle de la nourriture.
03:26Alors ça, c'est très particulier.
03:28Sacrifier les traditions alimentaires de nos pays
03:29pour embrasser non seulement le véganisme, qui est déjà original,
03:32mais penser même à cette espèce de viande artificielle en laboratoire
03:34que l'on promeut en disant « c'est presque aussi bon,
03:37c'est même meilleur que la vraie viande ».
03:38Pourquoi vous préférez pas ça ?
03:40De la même manière, je dirais qu'il y a une forme de conception du monde religieuse
03:43avec cette volonté pour l'homme de s'effacer,
03:47de se dissoudre dans le vivant.
03:48C'est Gaïa.
03:49Donc l'homme est une partie du vivant
03:51qui ne doit pas empiéter,
03:52qui ne doit pas coloniser le monde.
03:54Quand on doit se dissoudre dans le vivant,
03:56il y a quelque chose de très religieux là-dedans.
03:58Et demain, moi ce que je redoute,
03:59c'est qu'au nom de la lutte contre le réchauffement climatique,
04:01plus largement,
04:01nous basculions dans le confinement climatique.
04:04Ça, je pense que c'est à l'horizon de l'esprit des écolos.
04:06Au moment de la pandémie, rappelez-vous ce que disaient certains écolos,
04:08qui disaient « bon, pour l'instant, c'est peut-être un peu désagréable,
04:11mais ça pourrait être utile demain
04:12en cas de crise climatique majeure ».
04:15Alors, la force de l'écologisme,
04:17on pourrait dire que de ce point de vue,
04:17l'écologisme radical,
04:18pas le souci de l'environnement,
04:20la force de l'écologisme,
04:21c'est de proposer, un peu comme un certain islam,
04:24un mode de vie complet.
04:25Dans nos sociétés libérales,
04:26où les gens se cherchent,
04:27ne savent plus exactement qui ils sont,
04:28l'écologisme dit « j'ai une vision religieuse,
04:31une conception de l'homme,
04:31voilà comment tu vas mener ta vie,
04:33voilà de quelle manière tu vas te comporter pour être bien
04:35et voilà comment tu vas exiger de ton voisin
04:37qu'il se comporte comme toi. »
04:38Car l'homme n'aime rien tant qu'obliger son voisin
04:40à faire la même chose que lui.
04:42Par ailleurs, je pense que cet écologisme
04:44vient aussi avec une autre dimension.
04:46C'est un instrument de contrôle social
04:47au service des élites mondialisées aujourd'hui
04:49qui permet de légitimer les inégalités de caste.
04:52À bien des égards,
04:54les ZFE,
04:55on pourrait dire qu'il y avait les gueux,
04:57étaient les inéligibles d'un autre débat.
05:00C'est-à-dire,
05:01les inéligibles d'un autre débat, pardonnez-moi,
05:02c'est-à-dire les gueux
05:03devraient être tassés de la cité,
05:05laissés le plus loin possible,
05:06ne venaient pas nous contaminer
05:07et par ailleurs,
05:08une élite pourra profiter
05:09de tout ce qui sera interdit aux autres.
05:11Donc certains auront le droit à l'avion,
05:13le droit à l'avion permanent,
05:14certains auront le droit
05:15à leur voiture individuelle,
05:16certains auront le droit
05:17à leurs privilèges,
05:18certains auront le droit
05:19à leur dacha,
05:19comme on disait l'Union soviétique
05:21et il y aura de ce point de vue
05:22les privilégiés technocratiques
05:27On revient directement à Alexandre Jardin
05:30si vous le voulez bien,
05:31on en parlait.
05:31Il a fait de cette croisade
05:32un symbole de sa lutte
05:34contre un système politique
05:35de plus en plus, dit-il,
05:36déconnecté de la population
05:37et il plaide désormais
05:39pour le référendum
05:40d'initiative populaire, le RIP.
05:43Est-ce que la population
05:45pourrait suivre ?
05:46La population, je n'en doute pas,
05:47mais depuis quand elle décide ?
05:48On est en démocratie,
05:49ça implique qu'on ne considère pas le peuple.
05:51Alors, non, je ne doute pas
05:53qu'effectivement,
05:54il y a aujourd'hui un désir.
05:55En fait, c'est partout visible,
05:56non pas seulement le désir
05:58de participer,
05:59mais surtout le sentiment
06:00d'une dépossession.
06:01Je pense que, contrairement
06:02à ce que croient
06:02certaines formes d'anarchisme,
06:04le peuple ne désire pas
06:05faire de la politique à temps plein.
06:07Les gens ont d'autres choses
06:07à faire avec raison dans leur vie
06:09que de faire de la politique
06:09à temps plein.
06:10Mais ils ne veulent pas
06:11être gouvernés par des gens
06:12qui, globalement,
06:13les méprisent et considèrent
06:14qu'on doit transformer
06:15en permanence leur mode de vie
06:16au nom de je ne sais quel
06:18plan de modernisation.
06:19Donc, le commun des mortels
06:20voit le référendum
06:21non pas comme une espèce
06:22d'instrument de soviets
06:23des temps présents
06:24pour participer à temps plein
06:25à la délibération de la cité.
06:27Le référendum,
06:27c'est l'instrument
06:28pour fixer de grandes orientations
06:29et pour dire non
06:30de temps en temps.
06:32Et quand le régime,
06:33les élites,
06:33ne comprennent pas du tout
06:35dans quelle direction
06:36il faut aller,
06:36le peuple peut s'emparer
06:37du référendum pour dire
06:38« Désolé, là, ça ne va pas du tout.
06:39On va vous imposer
06:40cette direction
06:41parce que la caste
06:42n'en veut pas. »
06:44Alors, le référendum,
06:45Alexandre Jardin dit
06:46qu'il y a deux modèles possibles.
06:48Il dit qu'il y a
06:48le référendum d'initiative populaire,
06:50un peu à la Suisse,
06:51et le référendum
06:51d'initiative parlementaire.
06:53Donc, d'un côté,
06:54soit le peuple réussi
06:55à partir d'un certain
06:56nombre de signatures,
06:57une proportion de la population,
06:58du corps électoral,
06:59à imposer un référendum,
07:01ou alors les élus
07:02parviennent à imposer
07:02un référendum.
07:03Et là, le référendum
07:04devient un instrument
07:05d'opposition
07:06à un souverain
07:07quelquefois capricieux.
07:08Je parle de personnes
07:09en particulier, évidemment.
07:10Un souverain quelquefois
07:11capricieux
07:12qui dit
07:13« Je vais consulter peut-être
07:14le bon peuple cette année,
07:15mais on verra bien
07:16sur quel sujet. »
07:17Ça n'est pas encore venu.
07:18Mais je préfère aussi
07:19des conventions citoyennes,
07:20vous savez,
07:21avec des experts
07:21qui pensent tous
07:22la même chose tirée au hasard.
07:23Mais je pourrais aussi...
07:25On ne parle pas du tout
07:25à qui vous faites référence.
07:26Je parle surtout
07:27de pays étrangers et lointains.
07:30Donc, il y a
07:30le caprice du souverain
07:32qui consiste à...
07:32Je verrai sur quoi
07:33je vous consulterai,
07:34mais surtout pas
07:35sur le sujet
07:36sur lequel vous voulez
07:37être consulté vraiment
07:38aujourd'hui.
07:39C'est la question
07:40de l'immigration.
07:41Il y a un petit livre
07:42qui est paru
07:42il y a quelques semaines
07:43qu'il faut lire vraiment.
07:45C'est de Raphaël Dohan.
07:46Et le titre,
07:46c'est faire de la France
07:48une démocratie.
07:49Alors, vous aurez peut-être
07:49la même réaction que moi
07:50en le lisant.
07:51Pourquoi il n'y a pas
07:51un « re » au début ?
07:53Refaire de la France
07:54une démocratie en disant
07:54« Elle l'était,
07:56elle en a... »
07:56Et lui, il défend comme thèse,
07:57je rends compte de sa thèse,
08:00il nous dit
08:00l'aspect de la souveraineté populaire
08:02n'a jamais été vraiment intégré,
08:04dit-il,
08:05plus largement qu'en France,
08:06partout en Occident.
08:07Donc, il dit
08:07qu'il faut faire une place
08:08à la souveraineté populaire
08:09en gouvernant
08:10selon la logique référendaire,
08:12pas toujours,
08:12mais davantage.
08:13À la rigueur,
08:14ça a déjà existé
08:14au temps du général de Gaulle
08:16qui, lui, apparemment
08:17souverain autoritaire,
08:18nous disait-on,
08:18n'hésitait pas à consulter le peuple,
08:20même sur des questions
08:20sur lesquelles, aujourd'hui,
08:21on ne voudrait plus
08:21qu'il consulte le peuple.
08:23De Gaulle ne pourrait pas,
08:24aujourd'hui, par exemple,
08:24tenir les référendums
08:25qu'il a tenus
08:26parce que le Conseil constitutionnel
08:27lui dirait qu'il n'en a pas le droit.
08:29C'est une autre histoire.
08:30Quoi qu'il en soit,
08:31à travers tout cela,
08:31il y a un sujet
08:33qui remonte à la surface,
08:35c'est cet empêcheur
08:36de moderniser en rond,
08:37cet empêcheur
08:38de gouverner en rond,
08:39cet empêcheur
08:39de libéraliser en rond,
08:40cet empêcheur
08:41de technocratiser en rond,
08:42c'est le peuple.
08:43C'est-à-dire le peuple
08:44qui n'est pas une forme
08:45de catégorie fictive,
08:46juridique, administrative
08:47désincarnée,
08:48qui est un peuple culturel,
08:49historique,
08:50avec une identité,
08:51qui réussit à intégrer
08:52les gens qui viennent d'ailleurs,
08:53bien évidemment,
08:53mais qui voudrait quand même
08:54demeurer lui-même
08:55et maître chez lui.
08:56Ce peuple est vu
08:57comme, finalement,
08:57la catégorie de trop,
08:59la catégorie obstacle
09:00pour une partie
09:00de nos gouvernants.
09:01Voilà pourquoi
09:02on ne veut pas le consulter
09:07des plans
09:07de nos souverains
09:08au pluriel.
09:09Et de ce point de vue,
09:10la démocratie aujourd'hui
09:11consiste essentiellement
09:12à tout faire
09:13pour ne pas consulter
09:14ce peuple obstacle.

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