Passer au playerPasser au contenu principalPasser au pied de page
  • 21/05/2025
Focus sur le travail dissimulé avec Karen Azran, Associée, Cabinet Lussan.

Catégorie

🗞
News
Transcription
00:00Musique
00:00On poursuit ce Lex Insight, on va parler du travail dissimulé avec mon invité Karen Azran, associée au sein du cabinet Lussan.
00:18Karen Azran, bonjour.
00:19Bonjour Arnaud.
00:20Nous allons voir ensemble les enjeux et les réalités du travail dissimulé en France.
00:26Mais tout d'abord, quelles sont les charges qui pèsent sur les entreprises ?
00:29Alors, elles sont de trois ordres.
00:32Il faut qu'elles commencent, bien sûr, quand elles veulent embaucher un salarié, par déclarer ce salarié auprès de la plateforme des URSAF.
00:39Déclaration préalable à l'embauche.
00:41J'insiste sur le mot préalable, puisque si vous faites une déclaration tardive, vous êtes visé par le travail dissimulé.
00:49Ensuite, les informations habituelles qu'il faut porter à la connaissance du salarié.
00:53Et enfin, et surtout, si vous embauchez un salarié de nationalité étrangère, vous avez l'obligation de vérifier qu'il est dans une situation administrative qui l'autorise à travailler en France.
01:05Et le contrôle est assez poussé, puisqu'on vous oblige aussi à remettre le titre que vous recevez, le titre de travail que vous recevez, à l'adresser à la préfecture dans les 48 heures qui précèdent l'embauche,
01:17pour en vérifier la validité et vérifier surtout qu'il n'y ait pas un faux titre de séjour.
01:23On a vu ensemble les obligations qui pèsent sur les entreprises.
01:26Comment, dans un contexte de tension sur le marché du travail, la recherche de main-d'oeuvre régulière se complique-t-elle ?
01:35Très simple Arnaud, deux chiffres.
01:37Vous avez France Travail, besoin de main-d'oeuvre en France en 2025, 2,4 millions d'embauches prévisibles.
01:45C'est énorme.
01:45Vous avez des filières, comme le bâtiment, où on sait qu'on ne pourra répondre à ce besoin qu'en ayant recours à de la main-d'oeuvre étrangère dans des proportions importantes, plus de 30%.
01:56Donc la question, c'est comment on fait coïncider ces deux réalités.
02:01Et malheureusement, les textes actuels, pour moi, compliquent la situation des entreprises considérablement.
02:08Pourquoi ?
02:09Pour régulariser.
02:10Si vous voulez régulariser un salarié, là, les dernières circulaires, elles ont allongé le temps de présence sur le territoire, allongé le temps de travail.
02:17On est passé de 3 ans à 5 ans, de 2 ans à 30 mois.
02:22Ça veut dire quoi ?
02:23Ça veut dire qu'on maintient les personnes dans la clandestinité, en fait, et que surtout, on maintient les entreprises dans la confusion pour savoir comment elles doivent réagir face à cette réglementation.
02:34Alors, le travail dissimulé expose les entreprises à des sanctions qui sont parfois lourdes.
02:39Quels sont les types de sanctions pour les entreprises qui auraient recours à du travail dissimulé ?
02:46Alors, elles sont de plusieurs ordres.
02:48La première, elle est pénale.
02:49Moi, c'est celle qui me choque le plus, puisque, en fait, vous vous encourrez, selon les textes, jusqu'à 5 ans d'emprisonnement et 150 000 euros d'amende par salarié pour les personnes morales, donc pour les sociétés.
03:01Vous avez aussi une sanction administrative qui est réelle.
03:03Je le vois avec... Je le rencontre avec mes clients.
03:06C'est la fermeture administrative de l'établissement, pour un certain délai, sur les chantiers, parce que c'est des situations qui surviennent régulièrement.
03:14Sur les chantiers, vous avez des arrêts de chantier, donc ça a des vraies conséquences.
03:18Ensuite, vous pouvez avoir aussi des sanctions URSAF, puisqu'ils peuvent vous reprendre des aides qu'ils vous auraient attribuées,
03:24ou éventuellement, vous privez de la possibilité d'avoir recoudré à ces aides.
03:29Vous avez des sanctions aussi administratives. L'OFI peut appeler une amende de l'ordre de 18 000 euros par salarié.
03:34Donc, ce sont des sanctions qui sont très lourdes.
03:37Alors, vous l'avez dit, vous avez décrit ce contexte qui est compliqué dans certains secteurs, où il est difficile de recourir à de la main-d'œuvre régulière.
03:45Est-ce que vous avez le sentiment que les entreprises sont parfois condamnées pour des situations qui relèvent de l'impossibilité de faire autrement ?
03:52Ah oui, c'est clairement mon point ici. Je vais vous donner un exemple très simple.
03:57Et c'est monnaie courante. Vous avez un salarié qui se présente, vous en avez impérativement besoin, il n'a pas d'autorisation de travail,
04:06vous l'embauchez, vous régularisez une déclaration de préalable embauche, vous établissez des fiches de paye,
04:12vous payez des charges sociales tous les mois pour ce salarié et vous êtes contrôlé et vous encourez toutes les sanctions que je viens de citer.
04:18Donc, oui, je pose la question de la légitimité de la sanction dans ce cadre précis.
04:25Et vous avez compris que moi, je trouve qu'on sanctionne les entrepreneurs pour des fautes que finalement, ils ont été contraints de commettre.
04:31Alors, on va essayer justement d'envisager des solutions.
04:34Qu'est-ce qu'il faudrait changer dans les textes, dans les procédures,
04:37pour mieux concilier la réalité économique que vous avez décrite avec la réglementation ?
04:43Il faudrait se poser la question de ce qu'on attend en fait des entrepreneurs et des entreprises.
04:47Est-ce qu'on attend d'eux de créer de la richesse, de l'emploi et on les laisse faire ?
04:52Ou est-ce qu'on attend d'eux d'être un peu le gendarme de la situation très difficile que connaît notre pays,
04:58du point de vue du travail, de la présence sur notre territoire de personnes qui ne sont pas autorisées à y être ?
05:03Moi, je suis pour dissocier les deux. C'est très simple.
05:05Laissons le soin aux régaliens de poursuivre les personnes qui n'ont pas à être sur le territoire
05:10ou à vérifier leur situation et laissons les entrepreneurs faire ce qu'ils savent faire
05:15et ne les sanctionnons pas lorsque, comme je viens de le décrire,
05:19ils ont déclaré le salarié, qu'ils ont payé leur charge sociale
05:22et qu'il y a un accord de volonté entre une personne qui, certes, est sur notre territoire dans des conditions difficiles
05:27et un employeur qui a besoin des services de cette personne.
05:30Est-ce qu'il y a d'autres leviers à impulser ? Peut-être des changements dans les mentalités aussi ?
05:37Je crois qu'effectivement, vous voyez, là, quand on assiste sur les circulaires de M. Retailleau,
05:44on voit bien comme c'est pénible pour eux d'établir, par exemple, une liste des métiers en tension.
05:48On l'attend depuis février 2025.
05:49Cette liste, elle n'est toujours pas sortie.
05:52Donc, je dis peut-être, cessons de maintenir ce système hypocrite qui fragilise nos entreprises
05:59et posons le débat et permettons encore une fois aux volontés qui se rencontrent,
06:04dans le respect d'un cadre que je viens de citer,
06:06de s'épanouir et de permettre enfin à nos entrepreneurs d'embaucher les personnes
06:11qui sont sur le territoire et qui veulent travailler.
06:13Pour terminer, vous êtes optimiste sur un changement de mentalité ?
06:18Ça n'en prend pas le chemin, malheureusement.
06:21Les dernières lois, enfin en tout cas les règlements de janvier 2025,
06:24montrent qu'on va toujours vers plus de difficultés à la régularisation.
06:29Je comprends, ça répond à un besoin peut-être de l'opinion publique,
06:32mais encore une fois, mon propos, c'est de défendre les entreprises et les entrepreneurs
06:36et je pense qu'on n'a pas envisagé cela sous cet angle-là.
06:40On va conclure là-dessus. Merci Karen Azran.
06:42Je rappelle que vous êtes associée au sein du cabinet LUSAN.
06:45Merci Arnaud.
06:46Tout de suite, l'émission continue.
06:47On va parler de l'encadrement en ligne des mineurs.
06:50Merci Arnaud.
06:51Merci Arnaud.

Recommandations