Violence dans le sport amateur : «Ils s'en foutent des matchs, ils viennent foutre la merde», constate Christophe Chiarello

Europe 1

17/02/2025

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00:00Et vous recevez ce matin le co-président du club de football de Sès-Frozen, en Haute-Garonne, Christophe Chiarello.

00:06Bonjour Christophe Chiarello.

00:08Bonjour.

00:09On en parle ce matin sur Europe 1, dossier spécial consacré à la violence dans le football amateur.

00:13Les chiffres sont édifiants, 12 000 cas de violence recensés rien que sur l'année dernière.

00:19Derrière ces chiffres, des jeunes joueurs, des adolescents, des enfants parfois,

00:23et des dirigeants pour qui le plaisir du sport parfois se transforme en peur.

00:28Christophe Chiarello, les insultes, les intimidations, vous le constatez vous aussi en tant que dirigeant de ce club amateur.

00:36Vous avez vous-même été témoin et victime, il y a deux semaines, un match classique, un rendez-vous dominical qui dégénère.

00:43C'était dans un quartier sensible de Montpellier, racontez-nous ce qu'il s'est passé.

00:48Alors, pour rectifier, ce n'est pas il y a deux semaines, c'était en février 2024.

00:53Très bien, d'accord.

00:54C'était l'an dernier.

00:55C'était l'an dernier, d'accord, excusez-moi.

00:57Mais enfin bon, ça ne change pas le contenu, de toute façon.

01:00Écoutez, on est arrivé dans ce quartier, on a été accueilli par une personne qui avait un porte-voix

01:07et qui nous a traité de sale français, de sale raciste, de mangeur de cochons.

01:13On s'est fait cracher dessus, on s'est fait gazer, et cerise sur le gâteau,

01:19on s'est fait fracasser le pare-brise du minibus à coups de barre de fer.

01:24Voilà, l'accueil, la belle après-midi que nous avons passé dans ce club, dans ce petit bar.

01:30Et on parle d'une rencontre, de quel niveau c'était une rencontre ?

01:33Alors, c'est une rencontre de niveau, alors d'abord c'est des gamins, des ados qui ont eu,

01:41c'est des U17 donc qui ont 16 ans, c'était le premier contre le second.

01:46Mais je veux dire, peu importe, le curseur aujourd'hui de la violence,

01:50on ne regarde même plus ça parce que, comme j'ai indiqué dans vos précédents,

01:55avec vos collaborateurs, aujourd'hui vous avez beaucoup de personnes qui viennent au stade,

02:00puis ils s'en foutent des matchs, ils viennent foutre la merde, c'est un passe-temps pour eux.

02:04Voilà, c'est ça le drame.

02:09Quel âge avaient à peu près vos agresseurs autour du terrain ?

02:12Oh, c'était des jeunes qui avaient entre 16 et 18 ans, pas plus âgés.

02:19Plus des ados que des majeurs.

02:22Christophe Chiarello, coprésident du club de football de 16-14 ans,

02:27est-ce que vous avez le sentiment que c'était un guet-apens ?

02:30Comment vous avez vécu cela ?

02:32Nous avons vécu cela comme un guet-apens, c'est le mot, c'est le terme tout à fait adapté.

02:37Un guet-apens, un piège.

02:38Vous étiez attendu.

02:39C'était un piège, voilà.

02:42Parce qu'on nous a interdit de rentrer les minibus dans l'enceinte du stade,

02:47ce qui normalement fait partie du cahier des charges quand on se déplace.

02:51Et donc, tout était bien organisé.

02:56Christophe Chiarello, ça fait 54 ans que vous êtes dans ce club.

03:01Exactement, 54 ans.

03:04En 54 ans, comment vous avez vu évoluer les choses au bord du terrain, mais aussi sur le terrain ?

03:10Quel est votre constat à vous ?

03:13Mon constat personnel, qui je pense n'est pas que personnel,

03:18c'est que depuis 5-6 ans, parce qu'après on a passé de très belles années,

03:24on venait au stade, tout le monde était content, il n'y avait pas de risque, il n'y avait pas de problème,

03:29mais ça s'est dégradé depuis 5-6 ans.

03:32L'implication d'un jeune, c'est beaucoup les parents.

03:36Beaucoup les parents qui nous emmerdent.

03:38C'est-à-dire ?

03:39C'est-à-dire que les parents, aujourd'hui, ils rêvent de voir leurs gosses,

03:43alors c'est la génération Mbappé, on peut parler de ça, mais ça ne se fait pas comme ça.

03:48Nous, on est des clubs amateurs, alors ces parents interviennent,

03:53et puis il y a un fait de société dont on parle régulièrement,

03:57c'est le communautarisme qui s'est infiltré dans ce football amateur.

04:02J'allais venir concrètement le communautarisme dans un club de football tel que le vôtre,

04:07ou dans les déplacements que vous pouvez faire avec vos joueurs, vous le constatez comment ?

04:11Alors, on le constate par le biais d'insultes,

04:20ça ne fait pas partie du communautarisme, mais ça rejoint beaucoup de choses.

04:25On le constate, ce sont des gens qui veulent imposer une façon de fonctionner

04:30qui n'est pas du tout celle de nos valeurs.

04:35Alors, il y a une période de ramadan qu'on va parler, que nous respectons, attention,

04:41ce n'est pas un problème, mais dans cette période-là, les gens sont plus agressifs,

04:46on a constaté, et puis ils veulent imposer certaines choses.

04:50Mais concrètement quoi ?

04:52Par exemple, dans les douches, les gamins, il faut qu'ils se douchent en caleçon,

04:58ce qui n'est pas du tout un fonctionnement normal sur un territoire comme le nôtre.

05:04Ça c'est quelque chose de nouveau ?

05:07Oh de nouveau, ça fait quelques années quand même que ça, ça fait 5-6 ans quand même.

05:13Alors, ça existait, mais c'était beaucoup plus discret aujourd'hui,

05:17le problème c'est que comme vous avez beaucoup de ces gens-là,

05:21il faut que les nôtres s'adaptent, autrement c'est l'intrus, le petit européen c'est l'intrus.

05:27Et ça ce n'est pas normal, ce n'est pas du tout normal.

05:30On sent qu'il y a un bouleversement, mais dangereux, dangereux.

05:36Est-ce que vous avez déjà pensé à démissionner Christophe Carrello ?

05:40Alors démissionner non, parce que moi quand je m'engage...

05:43Mais arrêter oui, tout à fait, je suis franchement sur le reculoir,

05:47parce qu'aujourd'hui je suis fatigué, moi je veux prendre du plaisir,

05:52je veux pas être invectivé, et puis les gens que je côtoie, que je connais,

05:57sont comme moi, ils veulent prendre du plaisir.

06:00Aujourd'hui le plaisir il est mitigé, on peut parler de démotivation pour beaucoup de personnes.

06:06Il y a le communautarisme, mais est-ce que vous avez le sentiment

06:09qu'il y a une forme de racisme anti-français parfois ?

06:13Alors oui, parfois ça se manifeste, c'est des raisonnements,

06:20dans les plateaux de gamins, un gamin il va jouer, il a un temps de jeu peut-être réduit

06:25parce qu'il n'est pas venu aux deux entraînements.

06:27Moi j'ai des éducateurs qui se font traiter de...

06:30Oui lui il est raciste, voilà, on entend ça.

06:33Non, non, c'est incroyable.

06:35Et malgré tout, je tiens à souligner que dans ces quartiers,

06:39il y a quand même des éducateurs qui ont vraiment beaucoup de volonté,

06:43ils s'accrochent, il y a des bons éducateurs.

06:45Mais le problème c'est beaucoup les parents, c'est les parents.

06:48Les éducateurs de quartier ils ont beaucoup de mérite je trouve,

06:51mais c'est les parents qui nous emmerdent.

06:53Aujourd'hui ils nous emmerdent franchement.

06:56J'insiste, je vous excuse, mais je suis obligé.

06:59Moi je dis vraiment ce que je pense, les parents c'est un problème,

07:02et ça va devenir un gros problème, ça va s'aggraver.

07:06Mais au sujet de ces violences sur les terrains et en dehors des terrains,

07:10le président de la Fédération française de football, Philippe Diallo,

07:13souhaite lancer une expérimentation dès l'année prochaine,

07:16il veut équiper les arbitres de caméras.

07:19Est-ce que c'est une solution selon vous ?

07:22C'est une expérimentation qu'il faut mettre en place,

07:25parce que vous faites le bien de parler des arbitres,

07:27les arbitres aussi il faut les protéger.

07:29Mais est-ce que ça peut réguler du moins une partie des problèmes ?

07:34Oui ça peut régler une partie des problèmes,

07:37ça peut peut-être dissuader aussi, parce qu'aujourd'hui,

07:40je ne sais pas si vous avez des chiffres,

07:42mais le nombre d'arbitres est en forte baisse.

07:44Chaque année la Fédération perd des arbitres à cause de ça.

07:47Les arbitres ils sont au premier plan,

07:49ils se font insulter, ils se font invectiver,

07:52il faut souvent les escorter, c'est incroyable.

07:56Merci beaucoup, merci Christophe Carrello

07:58d'avoir apporté votre témoignage ce matin sur Europe 1.

08:01Je vous en prie.

08:03Merci Christophe Carrello,

08:05co-président du club de football de Sès-Frousin en Haute-Garonne.

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