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00:00Europe 1 Soir, 19h21, Pierre de Villeneuve.
00:04Premier invité d'Europe 1 Soir, l'ancien ambassadeur de France aux Etats-Unis.
00:07Bonsoir Philippe Etienne.
00:09Bonsoir.
00:09Merci d'être avec moi dans ce studio.
00:12Premier invité d'Europe 1 Soir, vous êtes, je le disais, vous avez été en poste de 2019 à 2023.
00:20Vous avez donc connu la fin de Trump 1 et évidemment l'administration Biden juste après.
00:25Cette riposte aux frappes américaines, cette riposte iranienne, qu'est-ce que vous en pensez sur...
00:33Elle était prévisible, j'imagine ?
00:35Oui, les Iraniens l'avaient annoncé et quelque part, par rapport à la réputation de ce régime,
00:44ils devaient montrer qu'ils réagiraient.
00:46La question est de savoir quel est le type de réaction.
00:50Il va falloir analyser ces frappes.
00:53Qu'est-ce qu'il peut y avoir comme type de réaction ?
00:55Alors, il y a deux...
00:57Alors, pour être un peu caricatural, moi je vois, je peux me tromper, mais je vois deux possibilités.
01:03Des frappes pour montrer qu'on frappe.
01:07Et apparemment, le Qatar vient de dire que l'attaque iranienne n'a pas fait de dégâts.
01:13C'est d'ailleurs le Qatar qui est visé, alors que ce n'est pas le pays le plus hostile à l'Iran.
01:22C'est là où il y a des bases américaines importantes.
01:25Mais c'est là qu'il y a la base de Halloudeid, qui est le commandement central aérien dans la région des Etats-Unis.
01:33Donc, premier type de...
01:34Je comprends qu'il peut y avoir en ce moment même, d'ailleurs, d'autres attaques contre d'autres pays.
01:38On attendait notamment qu'il se passe des choses en Irak.
01:40C'est un temps réel, c'est arrivé il y a dix minutes.
01:42Dix missiles ont été envoyés vers les bases américaines.
01:45Donc, vous dites, première possibilité, frapper pour frapper.
01:47Pour montrer qu'on est fort et qu'on frappe.
01:49Voilà, et deuxième possibilité, frapper vraiment pour atteindre des...
01:53Pour se venger, en quelque sorte, pour aller d'un pour d'un et pour tuer à ce moment-là.
02:00Et mettre le président américain dans une position où il ne peut pas faire autrement que,
02:05comme il l'a annoncé, d'ailleurs, il y aura une escalade par de nouveaux bombardements américains.
02:11Là, bon, le président Trump est dans la salle de crise.
02:14Les Américains autour de lui sont en train d'évaluer la situation.
02:17De nouveau, la balle va être dans son corps.
02:19Il va falloir qu'il décide comment il réagit à la réaction iranienne.
02:22C'est ce qu'on appelle un risque d'escalade.
02:24On l'avait annoncé.
02:25Le fameux risque d'escalade que dénonce Emmanuel Macron d'un côté, en conférence à Oslo,
02:31en disant qu'il n'y avait pas de légalité à ses frappes.
02:33Et puis, d'un autre côté, diamétralement opposé, Donald Trump qui annonce « MIGA, make Iran great again ».
02:39Ça, c'est intéressant parce qu'il a pris un peu à contre-pied,
02:42comme cela arrive très souvent, ses ministres, ses conseillers,
02:45qui affirmaient les heures précédentes, pas de changement de régime.
02:49Et puis, alors, de même que, finalement, la semaine d'avant,
02:52il avait évolué vers des frappes américaines en complément des frappes israélières.
02:54Il avait dit deux semaines, puis finalement, ça a surpris tout le monde dans la nuit de samedi à dimanche.
02:57Voilà, voilà.
02:57Là, on a l'impression d'un nouveau déplacement.
03:03En fait, venant d'Israël, c'est assez logique,
03:05parce qu'Israël estime qu'il faut aller jusqu'à un changement de régime pour être, entre guillemets, tranquille,
03:11d'autant plus qu'on n'est pas sûr d'avoir détruit le potentiel nucléaire iranien.
03:15On n'est pas sûr du tout.
03:16Il faut savoir exactement à quoi on servit ces frappes, notamment américaines.
03:21Du côté américain, il y avait quand même une différence par rapport à...
03:23C'est pour ça que les Israéliens continuent de frapper, d'ailleurs.
03:25C'est-à-dire qu'ils font, j'allais dire, une sorte de service après-vente,
03:28où, effectivement, ils continuent de frapper.
03:30Alors, ils continuent de frapper les symboles du régime.
03:34Ils doivent aussi être en train de regarder, les Américains peut-être aussi,
03:38où les Israéliens sont susceptibles d'avoir caché leur matériel,
03:42notamment le fameux uranium enrichi à 60%.
03:47Comment est-ce que vous comprenez la phrase d'Emmanuel Macron,
03:51qui dit, il n'y a pas de cadre de l'égalité dans les frappes des États-Unis,
03:55je crois à la souveraineté des peuples et l'intégrité des territoires,
03:58il n'y a pas de double standard.
03:59Est-ce que, d'une certaine manière, le président français,
04:03à tort ou à raison, ou ne le voulant pas forcément,
04:08malgré lui, est-ce qu'il n'est pas en train de protéger le régime des Mola ?
04:12Je pense qu'il a dû ajouter quelque chose du genre,
04:15mais il faut absolument empêcher l'Iran d'avoir la bombe nucléaire.
04:19C'est une position...
04:21Mais la bombe nucléaire, c'est une chose, mais là, c'est...
04:23Non, mais je comprends votre question, Pierre, mais...
04:26On parle du régime.
04:27Oui, je pense que le double standard,
04:31c'est quelque chose qui est reproché aux Occidentaux,
04:34un peu dans le monde entier.
04:35Et donc, le risque, c'est que désormais, encore plus qu'avant,
04:39parce que c'est déjà un reproche qu'on nous adresse,
04:41tous les pays qu'on appelle du Sud,
04:44le Sud global, appelez-les comme vous voulez,
04:46disent, bon, l'Occident bombarde l'Iran,
04:50ils trouvent que c'est très bien,
04:52alors que c'est contraire au droit international,
04:54et ils nous demandent de critiquer les Russes qui bombardent l'Ukraine.
04:56Vous voyez ?
04:57Donc, c'est ça, la question du double standard.
05:01C'est un vrai...
05:01Vous voulez dire, en langage diplomatique, cher Philippe Etienne,
05:04qu'il était obligé de le dire vis-à-vis du droit international ?
05:08Je pense qu'il a eu la question, tout simplement.
05:10C'est un simple constat.
05:12Il y a beaucoup de gens qui parlent de ça et qui posent cette question.
05:14Je vais vous poser la question autrement, Philippe Etienne,
05:15est-ce que vous pensez qu'Emmanuel Macron
05:17ne souhaite pas le renversement du régime des Mollas ?
05:20Alors, ça, c'est une question
05:21qu'il faudra poser.
05:25Moi, je pense que,
05:26comme le président Trump l'avait dit jusque-là,
05:29comme les ministres américains l'ont dit jusque-là,
05:32on part du principe que, effectivement,
05:34le droit international
05:35ne prévoit pas
05:37de droit de renverser des régimes
05:40étrangers.
05:40Et pourtant, ça a été fait par le passé plein de fois.
05:42Oui, mais, justement, rappelez-vous 2003,
05:45quand on a eu ce cas de figure.
05:48Bon, là, c'est différent.
05:49Je ne veux pas non plus comparer des choses
05:50qui ne sont que partiellement comparables.
05:52Mais on n'était pas non plus favorable,
05:54à l'époque, à une intervention
05:55qui visait à renverser des régimes
05:57sous un prétexte, à l'époque, alors là, complètement faux.
05:59Là, vous parlez de l'Irak ?
06:00Je parle de l'Irak, qui était soi-disant
06:01en possession d'armes de destruction massive.
06:03Bon, là, c'est différent.
06:04Il y a ce danger nucléaire,
06:06qui est un danger iranien
06:08contre la sécurité d'Israël,
06:10mais aussi contre la sécurité de l'Europe, etc.
06:12C'est différent.
06:13Mais malgré tout,
06:14on ne peut pas ne pas dire
06:17la situation du droit international.
06:21Encore une fois, ça n'empêche pas,
06:23et la France, je pense, objectivement,
06:25on est obligé de le reconnaître,
06:27le président de la République actuelle
06:28et même ses prédécesseurs,
06:30comme les Européens, les Anglais, les Allemands notamment,
06:32ont vraiment tout fait pour s'engager,
06:33pour négocier, pour un accord
06:36qui empêche l'Iran d'avoir la bombe nucléaire.
06:38C'est bien l'objectif.
06:39Mais ça fait combien de temps
06:40qu'on essaye d'avoir cet accord, Philippe ?
06:41Mais attendez, ça fait...
06:43Je vais vous dire trois choses
06:44qu'il faut quand même avoir en tête.
06:46Ce sont les Européens qui ont le premier essayé.
06:48Si on n'avait pas commencé...
06:49Quand je dis les Européens,
06:50c'est précisément les Anglais,
06:51les Allemands, les Français.
06:52Si on n'avait pas commencé en 2003,
06:54peut-être que l'Iran,
06:54il aurait déjà la bombe nucléaire,
06:56premièrement.
06:56Deuxièmement,
06:58ce n'est pas les Européens qui ont voulu l'accord nucléaire de 2015,
07:02que certains ont trouvé trop faible,
07:03y compris la France.
07:04Ce n'est pas les Européens qui sont sortis du même accord nucléaire.
07:07C'est un pays qui s'appelle les États-Unis,
07:09avec deux présidents différents, certes,
07:11mais c'est quand même les États-Unis qui signent un accord.
07:13Il a été signé sous Obama,
07:15et il n'y a pas sous Trump qui a une autre vision des choses.
07:17Il signe un accord que d'aucun trouve trop faible,
07:20et puis après, il sort de ces accords.
07:21Et enfin, en 2019,
07:23c'est nous qui voulons arriver à une négociation,
07:26et qui parvenons presque à une négociation
07:28entre les États-Unis et l'Iran.
07:29Et celui qui empêche le résultat de cette négociation,
07:32c'est l'Iran.
07:33C'est Trump, à l'époque,
07:35qui était prêt à négocier.
07:35Donc, on ne peut pas dire aux Européens,
07:37et notamment aux Français,
07:38qu'on n'a pas tout fait pour avoir cet accord.
07:40Mais vous conviendrez qu'il n'y a pas forcément
07:43à un accord au sein même de l'Europe,
07:44puisque quand on entend Friedrich Merz
07:45qui dit que les Américains ont fait le sale boulot,
07:49je n'ai pas entendu ça dans la bouche du président Macron.
07:51Je reconnais qu'il y a des nuances dans l'expression,
07:53et moi j'étais ambassadeur en Allemagne.
07:55Non, je ne crois pas.
07:56Je crois que les gouvernements négocient sur la même base
07:58pour essayer d'éviter une escalade.
08:00Je parle des gouvernements européens,
08:01et pour reprendre la négociation.
08:03Je crois que dans l'expression politique,
08:05on voit ces nuances.
08:05Et vous savez, j'étais ambassadeur en Allemagne,
08:07et c'est normal en Allemagne une sensibilité
08:10encore plus forte qu'en France vis-à-vis d'Israël,
08:13pour l'histoire que vous connaissez bien.
08:16Donc je pense que c'est dans ce contexte
08:19qu'il faut interpréter la déclaration du chancelier Merz,
08:22qui d'ailleurs n'a pas été sans créer
08:24certains remous dans son propre pays.
08:27Mais nous sommes tous d'accord en Europe.
08:29Donc vous ne diriez pas qu'aujourd'hui,
08:30l'Europe est isolée par rapport aux Etats-Unis
08:32sur une volonté de poursuivre un travail
08:35qui est soit effectivement la destruction du nucléaire iranien
08:38jusqu'au bout, puisque vous l'avez très bien mentionné,
08:41on n'est absolument pas sûr de cela.
08:43Ou alors carrément, jusqu'à la fin du régime,
08:46Reza Palavi, qui prend la parole rarement aujourd'hui,
08:49a comparé ce moment de l'histoire
08:51à la chute du mur de Berlin.
08:53Non mais, moi je ne sais pas
08:55ce que Reza, le fils du chat, représente actuellement.
08:59Je ne suis pas un spécialiste de la société iranienne.
09:02Mais en tout cas, personne en France,
09:06surtout avec les otages,
09:07vous avez parlé de Jacques Paris et Cécile Collère,
09:09à la prison des vins,
09:10personne en France ne va se plaindre certainement
09:13s'il y a une amélioration du sort des Iraniens,
09:17que ce régime soumet à une répression féroce.
09:21Et en plus, ils prennent des otages,
09:23y compris en France, des citoyens français.
09:26Donc c'est le sujet.
09:27On n'a aucune divergence.
09:31Les Européens, simplement,
09:33sont dans la position de ceux qui disent
09:35attention aux escalades,
09:37attention aussi à voir exactement
09:39quels sont les effets de ces bombardements.
09:41À un moment, il va falloir reprendre
09:43un processus politique.
09:44Merci beaucoup, Philippe Etienne,
09:45d'être passé par le studio d'Europe 1.

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