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Satisfaction professionnelle : Quand le genre ne fait plus la différence… chez les Docteurs [Clotilde Coron]
Xerfi Canal
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14/11/2024
Xerfi Canal a reçu Clotilde Coron, professeure agrégée des universités, Université Paris-Saclay, pour parler de la satisfaction professionnelle.
Une interview menée par Jean-Philippe Denis.
Catégorie
🗞
News
Transcription
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Bonjour Clotilde Coron, vous êtes professeure agrégée des universités à l'université
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Paris-Saclay.
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Papier dans la revue française de gestion, numéro 316, « Sentiment de satisfaction
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des docteurs en début de carrière et conditions d'emploi, une analyse au prisme du genre
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», donc papier que vous avez publié avec Mathieu Laffont et Anis Amokran.
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Papier extrêmement intéressant, j'ai droit au but, c'est en gros il faut pousser
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les femmes à faire des doctorats.
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Alors, je résume la thèse, on va creuser ensemble cette question.
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D'abord il y a un paradoxe, c'est le paradoxe de la satisfaction genrée, est-ce que vous
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pouvez nous l'expliquer ?
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Oui, alors ce paradoxe a été identifié à la base plutôt dans des pays anglo-saxons
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et il renvoie au fait que quand on interroge les salariés femmes et hommes, souvent les
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femmes en moyenne déclarent un niveau de satisfaction à l'égard de leur emploi
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supérieur au niveau de satisfaction des hommes, alors qu'on sait qu'elles font
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face à des conditions d'emploi souvent plus précaires, plus difficiles.
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C'est typiquement le cas sur la rémunération, souvent les femmes déclarent un niveau de
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satisfaction à l'égard de la rémunération plus élevé que le niveau de satisfaction
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des hommes alors qu'elles sont moins bien payées, donc ça c'est le paradoxe.
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C'est le grand paradoxe, alors pourquoi pour essayer de travailler ce paradoxe on s'intéresse
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à une population particulière, les docteurs ?
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Parce qu'une des pistes d'explication de ce paradoxe c'est que les femmes ayant conscience
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des inégalités et des discriminations auraient des attentes inférieures finalement à celles
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des hommes à l'égard de leur emploi et or on peut supposer que ce n'est plus le cas
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chez la population des docteurs puisque ce sont des personnes qui de toute façon investissent
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beaucoup sur le plan du diplôme et donc finalement sur le plan professionnel et que donc dans
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cette population-là, les femmes auraient des attentes similaires à celles des hommes.
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D'accord, alors quand on creuse auprès de cette population, qu'est-ce qu'on trouve ?
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Alors donc notre article porte sur une enquête qui a été menée auprès de 2000 docteurs,
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donc des données collectées par l'entreprise Adopt Talent Management. Alors on trouve plusieurs
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choses, d'abord que les conditions d'emploi, notamment la rémunération, le type de contrat,
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sont un déterminant fort de la satisfaction à l'égard de l'emploi, donc jusque là pas de
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surprise. Mais on trouve aussi que chez cette population-là des docteurs, il n'y a pas de
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différence entre femmes et hommes sur le plan de la satisfaction à l'égard de l'emploi. Donc
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effectivement déjà le paradoxe de la satisfaction genrée, il semble diminué pour cette population.
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Et l'autre chose qu'on montre, et c'est peut-être ça qui effectivement conduit à penser qu'il faudrait
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que les femmes fassent des doctorats, c'est qu'il n'y a pas d'inégalité, notamment quand on contrôle
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l'effet de la discipline, il n'y a pas d'inégalité entre femmes et hommes sur le plan des qualités
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des conditions d'emploi. C'est-à-dire qu'à discipline équivalente, les femmes et les
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hommes qui intègrent le marché du travail après un doctorat ont à peu près les mêmes conditions
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d'emploi en moyenne, ce qui est extrêmement rare, parce qu'on sait très bien qu'en France,
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les femmes et les hommes n'ont pas les mêmes conditions d'emploi. Les femmes sont beaucoup
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plus à temps partiel, elles sont moins bien rémunérées, mais ce n'est pas le cas pour cette
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population des docteurs. Donc ça peut s'expliquer d'abord parce que le doctorat pourrait être une
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forme de protection finalement contre les inégalités. Ça peut s'expliquer aussi d'une
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autre façon. Malheureusement, quand on ne contrôle pas l'effet de la discipline, on voit quand même
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qu'il y a des inégalités entre femmes et hommes. Ça veut dire que les disciplines les plus
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féminisées de recherche donnent accès à des conditions d'emploi moins favorables que les
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disciplines les plus masculinisées de recherche. Quand on a fait un doctorat dans une discipline
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en sciences humaines et sociales, on n'a pas les mêmes conditions d'emploi que quand on a fait un
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doctorat dans une discipline des sciences dures, par exemple. Donc finalement, ça peut contribuer
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in fine aux inégalités entre les femmes et les hommes. Mais quand on contrôle l'effet de
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discipline, en revanche, il n'y a pas d'inégalités. Et donc effectivement, le doctorat semble prémunir
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les individus contre les inégalités de genre. Un point qui est extrêmement intéressant dans
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votre article, c'est secteur académique versus secteur privé aussi. C'est-à-dire que vous dites,
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en revanche, il y a une forme de frustration souvent quand on est docteur de ne pas avoir
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pu intégrer le monde académique. Mais vous dites surtout que cette frustration est alimentée par
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le manque de reconnaissance du doctorat au sein du secteur privé. Donc là,
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il y a un enjeu absolument majeur. Oui, tout à fait. Parce que dans notre enquête,
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on voit aussi si les individus sont allés plutôt dans le secteur privé et dans le secteur public,
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ou dans le secteur public hors recherche aussi. Il y a différentes catégories. Et ce qu'on
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constate, c'est qu'il y a quand même une forme de satisfaction à l'égard des conditions d'emploi,
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même pour des personnes qui ont pu aller dans le privé. Mais ça montre aussi que valoriser le
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doctorat auprès des entreprises pourrait permettre effectivement à cette population des docteurs
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d'avoir la même satisfaction à l'égard des conditions d'emploi, quel que soit le secteur
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finalement dans lequel ils se dirigent. L'égalité professionnelle, c'est au cœur du débat politique,
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très clairement, homme-femme. Donc un des moyens d'y contribuer, c'est de valoriser le doctorat.
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C'est ce que vous rappelez dans cet article, et de le valoriser auprès du monde privé. Et je
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termine juste en précisant que l'enquête date de 2015, c'est ça ? Et vous dites, et vous avez
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tout à fait raison, qu'il y a eu l'inflation, il y a eu la crise sanitaire, il y a eu tout ça,
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donc il méritera d'être poursuivi. Donc vous reviendrez nous en parler, parce que c'est un
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sujet extrêmement intéressant, très attaché ici à la valorisation du doctorat. Avec plaisir, merci.
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Merci Clotilde. Merci Jean-Philippe.
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