Passer au playerPasser au contenu principalPasser au pied de page
  • hier
La rédaction de l’Opinion organise sa conférence annuelle sur le secteur agricole. Parmi les grands sujets qui seront abordés cette année, l’enjeu majeur de la souveraineté alimentaire de l’Europe et celui des nouvelles barrières douanières imposées par l’administration Trump. Nous parlerons aussi de la « bataille de l’eau » qui se joue actuellement, dans un nombre croissant de territoires, entre agriculteurs et industriels. Enfin, nous nous pencherons sur les sujets qui feront l’agriculture de demain, comme la régénération des sols ou les NGT.

Catégorie

🗞
News
Transcription
00:00...
00:00Alors, nous allons parler un petit peu de la bataille de l'eau.
00:09On est dans l'actu, là, complètement, avec vous.
00:12Éric Frétillère, vous êtes président des Irrigants de France.
00:14On dira quelques mots sur cette entité dans quelques instants.
00:17Emma Aziza, vous êtes présidente et fondatrice de Mayan,
00:21centre de résilience territoriale,
00:23et spécialiste des questions hydrologiques.
00:25Alors, pas mal de chiffres sont tombés récemment.
00:30L'Institut Eram qui mettait en lumière le fait que la moitié,
00:33plus de la moitié des Français estiment que stress hydrique
00:35est déjà une réalité, maintenant, en France.
00:39Le Haut commissariat au plan a publié une note hier
00:42indiquant que ces tensions de sécheresse allaient s'accélérer
00:46et devenir plus ou moins une norme à horizon 2050.
00:50Ce n'est pas si lointain.
00:52Est-ce que vous pouvez nous faire un point d'étape
00:53et surtout, nous apporter un éclairage sur l'évolution
00:56qu'a connue la France en matière de sécheresse ?
00:59Oui.
01:01En fait, ce que l'on remarque aujourd'hui,
01:03c'est surtout, déjà, peu importe où on se situe en France,
01:07on voit de manière quasiment linéaire
01:10une augmentation des températures,
01:12que ce soit les températures minimales, journalières, maximales.
01:15Et donc, nécessairement, qu'est-ce qui va se transformer
01:17quand vous augmentez la température ?
01:19Eh bien, c'est la vitesse du cycle de l'eau.
01:21Et donc, dans ces deux extrêmes qui se confrontent,
01:25à l'image un peu de ce qui s'est passé cette nuit,
01:28eh bien, ce que l'on note partout,
01:30et je trouve qu'il y a un chiffre rassureur
01:32qui est assez prégnant et intéressant,
01:34c'est que plus de 50% des personnes
01:36qui ont été inondées ces cinq dernières années en France
01:39l'ont été en dehors de zones inondables.
01:42Alors, pourquoi c'est important de comprendre ça ?
01:45C'est qu'on est plutôt très bon en France
01:47pour cartographier le risque d'inondation.
01:50Donc, on n'est pas vraiment passé à côté d'une lecture du risque.
01:53C'est plutôt que le risque se transforme
01:55et donc que l'eau n'a pas le temps de rejoindre son bassin
01:59et va, en général, précipiter beaucoup plus violemment,
02:03avec beaucoup plus d'intensité
02:04et générer beaucoup plus d'effets de ruissellement.
02:08Donc, ça, c'est quelque chose qui est important
02:09parce que c'est quelque part le signal d'une France
02:14avec un cycle de l'eau qui a tendance à se modifier.
02:18Et donc, ça signifie qu'il va falloir aller protéger
02:20des territoires qu'on n'avait pas identifiés tout de suite
02:24comme étant un risque.
02:25Donc, ça, c'est une première chose sur les extrêmes dans un sens.
02:28Et puis, sur les extrêmes de l'autre côté,
02:31entre le trop d'eau et le trop peu d'eau,
02:33eh bien, nous nous retrouvons avec des flux évaporatoires,
02:36d'évapotranspiration et d'évaporation directe
02:39qui sont beaucoup plus importants,
02:41qu'on arrive aujourd'hui à cartographier très bien.
02:44On sait le faire, par exemple, personnellement,
02:46je le fais à l'échelle d'une parcelle agricole,
02:48à l'échelle d'un bâtiment.
02:50On est capable de reconstituer toutes les briques
02:52du cycle de l'eau.
02:54Et c'est là que ça devient intéressant
02:55parce que, eh bien, jusque là,
02:58quand on avait une sécheresse en France,
03:00dans une variabilité naturelle climatique,
03:02on a toujours connu des extrêmes climatiques,
03:04eh bien, nous avions le temps de voir venir une sécheresse.
03:08Et là, il y a quelque chose d'assez nouveau.
03:10Et je trouve que le pivot s'est fait à partir de l'année 2017.
03:13Moi, j'ai commencé à suivre ces données
03:15à partir des années 2002-2003,
03:17donc j'ai peut-être 20 ans de recul.
03:19Et on a vraiment vu une modification,
03:22c'est-à-dire que 2017, par exemple,
03:25a été une année particulièrement sèche
03:27avec une sécheresse historique
03:29sur certains territoires qui a duré quasiment 10 mois.
03:33Et ce qui est intéressant,
03:34c'est qu'en l'espace de quelques jours,
03:36on a basculé sur des inondations très importantes
03:38sur le bassin de la Seine
03:39et qui ont touché une grande partie de la France
03:41à un printemps très pluvieux.
03:44Et donc, on s'est retrouvé un peu serein
03:46parce qu'on s'est dit, eh bien,
03:47on a 30 % d'excédent dans nos nappes
03:49à la sortie du printemps.
03:51On va pouvoir passer l'été tranquillement.
03:53Et c'est là que ça devient intéressant
03:55parce que nous avons eu 3 semaines de canicule continue
03:59et notamment des températures qui ne redescendaient pas
04:01sous les 25 degrés la nuit.
04:04Et on voit que, quelque part,
04:05on a fait un effet sèche-cheveux sur la France,
04:08c'est-à-dire que d'un seul coup,
04:09on a augmenté le flux évaporatoire massivement
04:12et 3 semaines après,
04:13on rebasculait dans un état de sécheresse historique
04:16pire que l'année précédente.
04:18Et donc, pourquoi c'est important à comprendre ?
04:20C'est vraiment quelque chose
04:22qu'on voit partout dans le monde.
04:23On voit ce que l'on appelle maintenant
04:24des sécheresses éclaires s'installer,
04:27c'est-à-dire que les sécheresses prennent
04:28beaucoup moins de temps
04:29et elles sont beaucoup plus brutales.
04:31Donc, en fait, on ne peut plus vraiment s'appuyer
04:34sur nos acquis précédents
04:36en se disant, bon, il n'a plus pendant des mois.
04:38Là, par exemple, on a l'impression
04:39qu'il n'a plus pendant un an et demi en France
04:40et que ça ne s'est jamais arrêté.
04:43Et puis, eh bien, malgré tout,
04:45on se rend compte que tout le nord-est de la France,
04:47actuellement, commence à être touché
04:49par une sécheresse qui se réinstalle.
04:51Donc, voilà, je crois que c'est ça, la nouveauté.
04:54Et peut-être pour finir sur les signaux faibles
04:56qu'on ne voit pas, parce qu'on parle toujours
04:57des sécheresses et des inondations
04:59et de ces extrêmes,
05:00quand on regarde dans les détails,
05:02sur le plan macro,
05:05je pense, par exemple, à une activité industrielle
05:07qui avait dans son secteur
05:09une explosion du nombre de jours
05:11d'arrêtés en phase de crise,
05:13de sécheresse.
05:14Et on avait du mal à comprendre,
05:16parce que quand on regardait la pluie,
05:18on avait plutôt des quantités de pluie,
05:19voire même légèrement supérieures
05:20aux années précédentes.
05:22Donc, ça ne se justifiait pas.
05:24On avait plutôt une bonne hygrométrie dans l'air.
05:26On n'avait pas de signaux très clairs.
05:28Et surtout, on était dans le grand test,
05:29derrière le Jura,
05:30dans une zone qui était plutôt protégée
05:32d'un réchauffement.
05:33Et c'est là où ça devient intéressant.
05:35C'est qu'en mettant un zoom particulier
05:37sur la compréhension de ces datas,
05:40on parlait dans la table précédente,
05:41du fait de voir avec les données.
05:44Eh bien, en fait,
05:45on s'est rendu compte
05:46que ce qui se modifiait,
05:47c'était la température minimale journalière.
05:50Et pourquoi c'est important ?
05:51Parce qu'en fin de compte,
05:51le matin,
05:52on dépassait le point de rosée.
05:54Donc, en fait,
05:55le végétal n'avait plus le temps
05:57de récupérer la vapeur d'eau
05:58sous la forme liquide.
06:00Et donc,
06:00elle est plutôt cherchée
06:01dans son système racinaire.
06:03Et donc, ça explique en grande partie
06:04la manière dont a plongé ce territoire
06:08avec des niveaux très importants
06:10du nombre de jours
06:10de niveau d'arrêté de crise
06:13avec les conséquences
06:14que ça a derrière.
06:15Donc, voilà un petit peu
06:17pour vous tresser un peu ce portrait,
06:19à la fois de signaux très forts
06:20à l'image de ces pluies
06:22qui deviennent plus diluviennes,
06:24plus éclaires
06:25et qui n'ont pas le temps
06:26de rejoindre leur bassin,
06:27et à la fois avec des signaux
06:29beaucoup plus faibles
06:29mais qui ont peut-être même
06:31des conséquences plus graves
06:32parce que, quelque part,
06:34ça va sous les radars,
06:35on ne s'en rend pas compte,
06:36mais les conséquences,
06:37c'est vraiment des niveaux d'étillage
06:39dans les rivières qui sont beaucoup trop faibles
06:41et puis, à la fois,
06:42des nappes qui sont de plus en plus en souffrance
06:44en sachant que la plupart des nappes phréatiques
06:47sont conjointes et sont en lien
06:49directement avec ces rivières
06:50et donc, avoir des conséquences sur un,
06:52ça a des conséquences sur l'autre.
06:54Donc, voilà.
06:54Merci pour ce point très clair
06:58sur les évolutions climatiques
07:01qui impactent forcément l'eau.
07:03Éric Frétillère, je l'ai dit,
07:04vous êtes président de cette instance nationale
07:05Irrigants de France
07:06qui rassemble une cinquantaine
07:07de groupements départementaux
07:09d'agriculteurs irrigants de France
07:11et des sections irrigation, la FDSEA.
07:15Le secteur agricole est souvent pointé du doigt
07:19quand on parle de consommation d'eau,
07:21il faut rationaliser l'eau,
07:22il faut l'utilisation de l'eau,
07:23il faut faire preuve de sobriété.
07:25Est-ce que vous pouvez nous faire
07:26un petit rappel chiffré
07:27sur ce que consomme vraiment l'agriculture ?
07:30Oui, bien sûr.
07:31Je vais rappeler en premier
07:32que je suis agriculteur en Périgord.
07:34Vous avez raison, je l'ai rappelé.
07:35Le premier point important.
07:38Rappelez qu'effectivement,
07:39Irrigants de France, et on le voit,
07:41la problématique de l'eau
07:42au niveau du monde agricole se développe.
07:45Aujourd'hui, on a quasiment,
07:47comme vous l'avez évoqué,
07:48tous les départements français,
07:50notamment les départements
07:52auxquels on serait tenté de penser
07:53qu'ils ont moins besoin d'eau,
07:54comme le nord de la France et l'ouest.
07:56Mais ce n'est pas le cas.
07:58Tous ces départements-là se structurent
08:00et on a de plus en plus de filières.
08:02Toutes les filières des légumes,
08:04en pensant par l'horticulture
08:05et toutes les productions agricoles
08:08y sont représentées.
08:09Alors, pourquoi le monde agricole
08:10a besoin d'eau ?
08:11D'abord, le besoin d'eau,
08:13il est tout simplement parce que l'eau,
08:15c'est la vie et c'est la vie aussi
08:16pour le végétal.
08:17Et en fait, l'agriculteur a besoin d'eau.
08:21La majorité des productions agricoles,
08:23elles se situent,
08:24pour que ce soit le maraîchage,
08:26l'arboriculture,
08:27ça se situe au printemps et à l'été,
08:30à une période où il y a peu d'eau.
08:32Et donc, il faut compenser ce besoin en eau,
08:36en apportant de l'eau pour pouvoir produire,
08:38qui est un des éléments principaux
08:39et majeurs de l'agriculteur.
08:42Ça a été évoqué,
08:43le changement climatique,
08:44vous l'avez évoqué,
08:46on a beaucoup travaillé,
08:48notamment avec Inrae sur Explore 2,
08:51qui explique très bien
08:52ce que vous venez de dire,
08:54qu'en fait, il y a un réchauffement
08:55des températures qui est avéré
08:56et qu'au niveau du volume d'eau,
08:59le volume d'eau, il va rester constant,
09:00mais c'est sa répartition
09:01qui va être avec des excès,
09:04ce qu'on a vécu hier soir,
09:05effectivement,
09:06dans les périodes hivernales
09:07et des sécheresses en été.
09:09Donc, on a besoin de l'eau
09:10au printemps et en été.
09:11On en a beaucoup en hiver,
09:12on n'en a pas en été.
09:14Donc, effectivement,
09:16l'enjeu du stockage
09:17fait partie de ces solutions
09:20à apporter au monde agricole.
09:24On en reparlera tout à l'heure,
09:26mais en fait,
09:26la problématique de l'eau,
09:27c'est aussi une problématique locale,
09:29donc elle a résonné
09:30à l'échelle locale.
09:31Alors, vous m'avez demandé
09:33des chiffres.
09:35Aujourd'hui,
09:36la pluviométrie en France
09:38est de 500 milliards de mètres cubes.
09:40On considère que sur ces 500 milliards
09:42de mètres cubes,
09:43il y en a 200 qui sont les infiltrations,
09:46200 milliards qui sont utilisables.
09:48Sur ces 200 milliards,
09:49l'agriculture utilise 3 milliards,
09:52c'est-à-dire 1,7%.
09:54Donc, lorsqu'on regarde
09:56les prélèvements d'eau...
09:57Les prélèvements, hein ?
09:59Les prélèvements.
10:00Ce n'est pas la chose,
10:00c'est la consommation.
10:01On va faire la nuance
10:02entre les deux.
10:03C'est-à-dire que c'est antique.
10:04On considère que les prélèvements
10:05d'eau douce sont de 32,7 milliards d'eau
10:09de volume de mètres cubes.
10:12Et donc, l'agriculture en utilise
10:14toujours 3% et elle se retrouve...
10:16En utilise 3 milliards, pardon,
10:17elle se retrouve avec 9%
10:19de cette consommation,
10:20sachant que les premiers consommateurs
10:23sont le refroidissement
10:25des centrales nucléaires,
10:26les canaux, etc.,
10:28qui sont les gros consommateurs.
10:30Puis, il y a un petit peu plus de 2 ans,
10:31il y a eu un miracle extraordinaire.
10:33On a décidé que le monde agricole,
10:36lui, il ne se contentait pas
10:38de prélever l'eau,
10:39mais il l'a consommée.
10:40Comme si, nous, on prenait l'eau,
10:42l'agriculteur, il prend l'eau
10:44et il ne la remet jamais dans le milieu.
10:46Donc, ça, c'est assez étonnant.
10:48Et avec ce tour de passe-passe,
10:50si vous voulez,
10:51de la consommation des 9%
10:53de prélèvements d'eau douce,
10:55on est passé à plus de 58%
10:59de consommation de l'eau
11:01parce qu'on considère
11:02que sur les 3 millions,
11:03il y en a 2,4 qui sont consommés.
11:06C'est assez extraordinaire.
11:07Alors que je rappelle,
11:09lorsqu'on amène de l'eau,
11:10il y a l'évapotranspiration
11:11qui part dans les nuages,
11:13il y a l'eau qui s'infiltre
11:14dans le sous-sol.
11:16Et puis, au bout du compte,
11:18au bout du bout du bout,
11:19il y a le fruit, le légume
11:20ou la céréale qu'on récolte
11:22qui a sa propre humilité
11:23qui finira dans le cycle de l'eau.
11:25Mais on peut considérer
11:26qu'elle est exportée.
11:27Mais c'est absolument infime.
11:28Donc, ce tour de passe-passe
11:30fait que l'agriculture,
11:32qui était à 9%
11:33de la consommation
11:34des prélèvements,
11:36est passée à 58%
11:37de la consommation
11:39et de l'eau consommée,
11:42ce qui n'est pas forcément
11:43le reflet et la réalité.
11:45C'était bien de rappeler
11:46cette subtilité, va-t-on dire.
11:49Alors, on va essayer
11:49d'être hyper pratique
11:51et concret.
11:53On l'a compris,
11:54il y a une question
11:55de besoin en eau.
11:57Comment faites-vous,
11:58vous, dans votre exploitation ?
11:59Vous l'avez rappelé,
12:00vous êtes agriculteur,
12:01vous avez une exploitation
12:02de maïs.
12:03Exactement.
12:04Pour rationaliser,
12:05va-t-on dire,
12:06cette utilisation de l'eau
12:07dont vous avez clairement besoin.
12:09Il n'y a pas de débat là-dessus.
12:10Tout à fait.
12:10Alors, j'ai une particularité.
12:13Je suis producteur
12:14de maïs irrigués.
12:15En monoculture,
12:16depuis 60 ans,
12:17je cumule la totalité
12:19de ce qu'il ne faut pas faire.
12:20Mais figurez-vous
12:21que mon exploitation,
12:23elle a perduré dans le temps.
12:25D'abord,
12:25parce que ce maïs,
12:27il reste en local
12:28pour produire,
12:29je suis certain,
12:30tous les bons produits
12:30du Périgord
12:31que vous connaissez.
12:32Le foie gras,
12:33les magrets,
12:34les poulets labellisés.
12:36Et en fait,
12:37elle a une particularité,
12:38ce sont des petites terres
12:40et l'ensemble de mes terrains
12:41sont drainés
12:42et les drains réalimentent
12:45deux réserves,
12:46deux retenues collinaires
12:46qui ont été créées
12:48dans les années 70,
12:49à une période
12:50où on pouvait le faire.
12:51Et en fait,
12:52je suis entièrement
12:53autonome en eau.
12:54C'est-à-dire que,
12:55dès qu'il y a des excès d'eau,
12:57les drains réalimentent
12:58mes réserves
12:59et j'ai mon volume d'eau
13:00pour irriguer
13:01pour l'année.
13:02donc malgré ça,
13:04effectivement,
13:05j'ai des volumes d'eau potentiels
13:07qui ne sont pas soumis
13:08aux contraintes
13:09puisque je n'ai aucun lien
13:10entre le milieu
13:11et ses réserves.
13:12Je suis complètement,
13:13ce qu'on appelle,
13:14déconnecté du milieu
13:15et donc,
13:17j'ai de quoi produire.
13:18Mais effectivement,
13:19on a de plus en plus besoin d'eau
13:21puisque les chaleurs augmentent
13:23et donc,
13:24du coup,
13:25il faut gérer cette eau.
13:26Et pour gérer cette eau,
13:28on a des outils aujourd'hui
13:30qui nous permettent,
13:31notamment des sondes
13:32tensiométriques,
13:33de la cartographie
13:35et qui nous permettent
13:36d'apporter l'eau.
13:38Parce qu'en fait,
13:39il faut quand même le préciser,
13:41irriguer une exploitation agricole,
13:43c'est un travail.
13:43D'abord,
13:44c'est des investissements
13:45très importants
13:46qui coûtent cher,
13:47notamment avec le coût
13:48de l'énergie.
13:49Maintenant,
13:50l'augmentation de l'énergie
13:52qui a complètement plombé
13:54le budget de l'irrigation,
13:56l'agriculteur,
13:57il amène ses tuyaux,
13:58il met ses pivots,
14:00ses enrouleurs,
14:00etc.
14:01Donc,
14:01tout ça,
14:01c'est un investissement colossal.
14:03Et puis,
14:03c'est un travail.
14:04Pendant que tout le monde
14:05est en vacances,
14:06nous,
14:06on se promène avec la caisse à outils
14:07en plein mois d'août
14:08pour aller réparer
14:09les problèmes d'irrigation.
14:12Donc,
14:12c'est vraiment un travail
14:13à plein temps
14:14et un travail important.
14:16On ne fait pas ça
14:17pour le plaisir.
14:17Donc,
14:18du coup,
14:18l'eau,
14:19on regarde ça
14:19de façon très précise.
14:21et chaque millimètre
14:22est économisé,
14:23chaque millimètre
14:24est étudié.
14:25On a aujourd'hui
14:26des outils
14:28qui nous permettent,
14:29mais je pense
14:29qu'on va pouvoir aller.
14:31Ça a été évoqué tout à l'heure,
14:32l'intelligence artificielle.
14:34C'est quelque chose
14:34d'important
14:35qui,
14:35au service
14:36de la gestion de l'eau,
14:37peut être fondamentalement
14:38important.
14:40Et en fait,
14:41je m'aperçois
14:42que sur ces petites terres
14:43que j'ai,
14:44grâce à l'irrigation,
14:47j'ai pu passer
14:48toutes ces années
14:49de sécheresse
14:50que vous avez évoquées,
14:51d'inondations
14:52parce que mes terres
14:52sont filtrantes.
14:54Et en fait,
14:55on s'aperçoit
14:55que sur une exploitation
14:56agricole,
14:57d'ailleurs,
14:58c'est ressorti
14:58sur le dernier RGA,
15:02le moyen de production
15:03qui était l'outil de production
15:05qui était l'irrigation,
15:07c'est devenu un outil
15:08de durabilité
15:09d'une exploitation agricole.
15:10Parce qu'en fait,
15:11les exploitations irriguées,
15:12elles se transmettent mieux.
15:14C'est une des meilleures
15:14assurances
15:15par rapport
15:15au changement climatique.
15:17Et donc,
15:18cette adaptation
15:19et l'eau,
15:21c'est un des enjeux
15:22absolument fondamentaux.
15:23On a évoqué
15:24la souveraineté alimentaire
15:25tout à l'heure.
15:26Effectivement,
15:27si on veut préserver
15:28notre sécurité alimentaire,
15:31c'est-à-dire limiter
15:32nos importations,
15:33eh bien,
15:33il va falloir produire
15:34en France.
15:35Et produire en France,
15:36on a de la chance
15:37parce qu'on a de l'eau
15:37en France.
15:38On l'a évoqué,
15:40plus de 500 milliards
15:40de pluviométrie.
15:42On a de l'eau en France.
15:43On a tous les moyens
15:44pour produire.
15:44si on veut préserver,
15:46on peut le faire,
15:47mais il va falloir
15:48mobiliser de la ressource
15:49en eau pour le faire.
15:51Emma Aziza,
15:51quelles sont vos préconisations
15:53en termes de bonnes pratiques ?
15:55Éric Chrétillère,
15:55on a cité quelques-unes.
15:56Qu'est-ce que vous,
15:57vous pouvez recommander ?
15:59Alors,
16:00quand on regarde,
16:01ça a été dit,
16:02cette question de la pluie,
16:03effectivement,
16:03le 2 tiers repartant
16:04dans l'atmosphère,
16:06on va avoir seulement
16:07à peu près 26 %
16:08qui ruissellent
16:09et 9 %
16:10qui s'infilrent.
16:11Ça, c'est dans un cas
16:12de laboratoire.
16:13C'est vraiment
16:13les chiffres
16:14qu'on nous apprend
16:15à l'école en hydrologie.
16:17Ce n'est pas la réalité
16:17derrière en fonction
16:18des sols.
16:19Donc, plus vous allez réussir
16:21à capter cette eau de pluie
16:23et plus vous allez lui permettre
16:24de faire le plus long chemin possible,
16:27plus vous allez lui permettre
16:28notamment de s'infiltrer
16:30dans les premières couches de sol.
16:32Et donc, je crois que
16:33quand on a un flux évaporatoire
16:35qui est trop important
16:37dans un sens,
16:38ce qu'il faut qu'on retrouve,
16:39c'est cette verticalité
16:40de l'eau dans l'autre sens
16:41et donc qu'on cherche
16:42au maximum
16:43à réussir à infiltrer.
16:45Donc, pour ça,
16:45il existe différentes méthodes.
16:48Tout dépend
16:48de quel type d'agriculture
16:50on parle.
16:51Par exemple,
16:52pour certaines façons,
16:54notamment la viticulture,
16:55on peut jouer
16:56avec l'axe des pentes
16:57quand il y a
16:58des systèmes de pentes.
17:00Et donc, on peut,
17:01quelque part,
17:01créer des formes
17:02d'axes de drainage
17:03pour que quand la pluie passe,
17:05elle ait ce plus long chemin possible.
17:07Ce sont des techniques
17:08qui ont été développées
17:09un peu partout dans le monde
17:10qui, aujourd'hui,
17:11commencent un peu
17:11à arriver en France.
17:12Il y a certains départements
17:14qui se les approprient
17:15comme, par exemple,
17:16la Drôme
17:17qui a décidé
17:18de les tester,
17:20au moins.
17:21Je crois que
17:22c'est extrêmement intéressant
17:23parce que,
17:24vous savez,
17:25la science avance
17:26par à-coups
17:27et donc,
17:27on apprend toujours
17:28des choses nouvelles
17:29et il y a quelque chose
17:30qu'on ne nous avait pas
17:31spécialement appris
17:32dans nos cours d'école,
17:34en hydrologie.
17:38C'est ce lien inhérent
17:39qu'on a entre les nappes
17:41et la fertilité des sols.
17:44Et ça,
17:44c'est quelque chose de nouveau.
17:45C'est une très grosse étude
17:46qui a été menée
17:47à travers le monde
17:48qui a mis en évidence
17:49que c'est vraiment
17:50le niveau de la nappe
17:51qui va conditionner
17:52le taux d'humidité
17:54dans les premières couches
17:55de sol.
17:56On avait un peu
17:56ce sentiment, quelque part,
17:58que l'eau allait dans un sens.
17:59On n'avait pas vraiment
18:00le sentiment
18:00que l'eau remontait
18:01à ce point-là
18:02à travers le sol.
18:03On connaissait plutôt
18:04la connexion
18:04entre les nappes
18:05et les rivières.
18:06Donc ça,
18:07c'est quelque chose
18:07d'important.
18:08Donc plus on préserve
18:10la nappe,
18:10plus quelque part
18:11on forme un bouclier
18:12qui va servir tout,
18:14qui va servir la fertilité
18:15du sol,
18:15mais qui va servir aussi
18:16la rivière,
18:17qui va servir tout le milieu.
18:19Donc comprendre ça,
18:20c'est intéressant
18:20parce que ça nous permet
18:22de réfléchir
18:23avec ces logiques-là.
18:24On n'a pas tellement besoin
18:25de beaucoup de technologies,
18:26surtout qu'on a déjà
18:27toutes les cartographies numériques.
18:29Donc en fait,
18:30tracer ce chemin
18:31quand c'est possible,
18:32quand on n'est pas
18:32dans des zones de plaine,
18:33eh bien ça permet déjà
18:35d'optimiser les capacités
18:37de réserve du sol
18:38à accueillir de l'eau.
18:40Donc ça,
18:40c'est vraiment
18:41extrêmement intéressant
18:42et j'ai pu échanger
18:44avec différents agriculteurs
18:46et certains
18:46dans les Hauts-de-France
18:47qui mettent en place
18:48des sortes de techniques
18:49de bourrelets derrière
18:51avec des espaces définis
18:55suivant les pentes.
18:56et donc si vous créez
18:57des sortes de mini-barrages
18:58de quelques dizaines
18:59de centimètres de hauteur
19:01ou 20 centimètres de hauteur,
19:03eh bien vous allez freiner
19:04les écoulements.
19:04Et donc dans une phase
19:06où les écoulements s'accélèrent,
19:08ça devient quelque chose
19:08d'intéressant.
19:09Pourquoi ?
19:10Parce que quand je vous parlais
19:11de ces phénomènes
19:12de ruissellement
19:12qui s'accélèrent,
19:14c'est en fait
19:14le pouvoir précipitant
19:15du nuage
19:16qui augmente
19:16au fur et à mesure
19:18que l'atmosphère est chaude.
19:20Et donc plus l'atmosphère
19:22est chaude,
19:22plus elle va accueillir
19:23de la vapeur d'eau,
19:24plus elle accueille
19:24de la vapeur d'eau,
19:25plus finalement
19:26c'est un réservoir potentiel
19:28aux précipitations.
19:29Et donc c'est une sorte
19:30de cercle interne
19:31qui ne s'arrête pas
19:32jusqu'à un moment donné
19:33où, parce que la vapeur d'eau
19:35c'est un gaz à effet de serre,
19:37qui réchauffe l'atmosphère
19:38et donc qui laisse encore plus
19:40accueillir de l'eau
19:40jusqu'au moment où,
19:42parce qu'une goutte d'eau
19:43ne reste jamais plus
19:44de 9 à 10 jours
19:44dans l'atmosphère,
19:45eh bien elle précipite.
19:46Mais du coup,
19:47avec cette capacité augmentée,
19:50eh bien on estime,
19:51c'est une relation de physique
19:52qui estime qu'à chaque degré
19:53d'augmenté dans l'atmosphère,
19:55on va augmenter de 7%
19:56le pouvoir précipitant du nuage.
19:58Donc en fait,
19:59face à ces précipitations
20:00plus intenses,
20:01la question que l'on a,
20:03enfin la solution à apporter,
20:04c'est vraiment de freiner
20:05les écoulements
20:06avec des différents moyens.
20:08Et donc il existe des solutions
20:10qui en tous les cas
20:11font leur preuve
20:12et montrent qu'on préserve
20:14tout le milieu,
20:16notamment c'est des agriculteurs
20:17qui ont pu faire face
20:18beaucoup plus,
20:20enfin de meilleure manière
20:21derrière aux sécheresses répétées
20:23qu'on a eues de 2022-2023
20:24dans les Hauts-de-France,
20:26alors que ses voisins
20:27étaient plutôt extrêmement impactés.
20:29Donc on voit que le rapport
20:31qu'on a au sol,
20:32à ces premières couches de sol,
20:33le rapport aux axes d'écoulement,
20:35c'est quelque chose
20:35qu'on va pouvoir mettre en place.
20:36Et puis on est à l'heure de l'IA,
20:38donc à l'heure où on va pouvoir
20:40avoir de l'IoT,
20:41des moyens pour pouvoir
20:43justement analyser ces écoulements.
20:45Moi, je crois beaucoup
20:46dans le fait que l'agriculture
20:48de demain,
20:48ce sera aussi une agriculture
20:49qui aura des formes
20:51de tableaux de bord
20:52assez simplifiés,
20:53mais qui permettra
20:53de mieux comprendre,
20:55de voir le cycle de l'eau
20:56se dérouler sous nos yeux.
20:57C'est-à-dire qu'aujourd'hui,
20:58que ce soit les agriculteurs,
21:00alors peut-être pas tous,
21:01mais en tous les cas,
21:01une grande partie,
21:02et les industriels,
21:03on avance un peu à l'aveugle
21:04face au cycle de l'eau.
21:06On fait face,
21:07on subit des extrêmes,
21:09mais finalement,
21:10on n'a pas tous les indicateurs
21:12pour voir les tendances.
21:13Et donc, observer les tendances,
21:15c'est déjà reprendre
21:15un peu le pouvoir
21:16sur ce qu'il faut faire
21:18et sur le niveau
21:19plus ou moins important
21:20de déstabilisation
21:22du cycle de l'eau.
21:23Donc, voilà,
21:24je crois qu'on a vraiment
21:25tout cet enjeu
21:26à mettre en place
21:27et ce frein.
21:28Juste pour vous donner
21:28une anecdote,
21:30il faut savoir
21:30qu'en France,
21:32dans les années 60-80,
21:34on a eu plutôt tendance
21:35à freiner le cycle de l'eau.
21:37D'ailleurs,
21:37on a même limité
21:38durant cette période-là
21:40le nombre d'inondations.
21:41Et comment on a freiné ?
21:43Avec l'industrialisation
21:44de la France,
21:45on a émis beaucoup de matière
21:46en suspension
21:47dans l'atmosphère
21:48et donc,
21:49ça avait un pouvoir
21:49derrière de couverture
21:52qui a baissé
21:53la température
21:54et donc,
21:55en baissant la température,
21:56on a freiné
21:57le cycle de l'eau.
21:58Et puis,
21:58dans les années 90,
21:59le réchauffement
22:01et les différentes émissions
22:02ont repris le relais
22:03sur ce frein.
22:05Je crois qu'il y a
22:05une question de frein
22:06et d'accélérateur,
22:08mais qu'en tous les cas,
22:09nos modèles
22:09et nos modèles agricoles aussi
22:11peuvent jouer
22:12un rôle prégnant derrière
22:13dans la manière
22:14dont on va activer
22:15ces vitesses-là.
22:16Et donc,
22:16plus on va rajouter
22:17ce long chemin,
22:18plus on va réussir
22:19à appuyer sur le frein
22:21là où on en a besoin
22:22parce que finalement,
22:23c'est tout le secteur
22:24qui en dépend.
22:25Merci à tous les deux.
22:26Je suis désolée.
22:27Effectivement,
22:27au cours après le temps,
22:28j'avais encore des tas de choses
22:29à évoquer avec vous,
22:30mais voilà,
22:31nous sommes arrivés
22:31au terme de cet échange
22:33riche, Noury.
22:34Un grand merci.
22:35Merci beaucoup Stéphanie.
22:36Merci à tous les deux.

Recommandations