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La rédaction de l’Opinion organise sa conférence annuelle sur le secteur agricole. Parmi les grands sujets qui seront abordés cette année, l’enjeu majeur de la souveraineté alimentaire de l’Europe et celui des nouvelles barrières douanières imposées par l’administration Trump. Nous parlerons aussi de la « bataille de l’eau » qui se joue actuellement, dans un nombre croissant de territoires, entre agriculteurs et industriels. Enfin, nous nous pencherons sur les sujets qui feront l’agriculture de demain, comme la régénération des sols ou les NGT.

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Transcription
00:00...
00:00Alors effectivement, on est dans la droite lignée
00:08de ce qui vient d'être évoqué à l'instant
00:10par les précédents intervenants.
00:12Yannick Fiali, vous êtes président du Centre national
00:15pour la promotion des produits agricoles et alimentaires.
00:18Vous êtes aussi éleveur de bovins en Haute-Loire.
00:20Vous présidez la commission économique de la FNSEA
00:22et vous présidez aussi le collectif export et souveraineté alimentaire
00:25qui va plus particulièrement nous intéresser aujourd'hui très logiquement.
00:29Ce collectif a publié en début d'année une étude
00:31réalisée par le cabinet Asterès
00:34qui a mis en lumière un déclin très net
00:37des exports de produits agricoles et alimentaires français.
00:41C'est quasiment une baisse de moitié en moins de 15 ans.
00:45Comment on peut expliquer ce déclin très significatif ?
00:50Bonjour à toutes et à tous.
00:52Alors effectivement, ce déclin, il est assez important.
00:54On est passé de 13 milliards d'euros sur la balance commerciale
00:57excédentaire en France à à peine 5 milliards aujourd'hui, 4 milliards 9.
01:01Il y a des faits conjoncturels, il y a des faits structurels.
01:04Alors effectivement, ça a été rappelé par les intervenants tout à l'heure
01:07sur la partie céréales.
01:08Il y a eu une moindre production l'année dernière, donc ça baisse.
01:11Il y a aussi une moindre production sur la partie viticole,
01:13mais qui aura un effet sur 2025, 26 plus important, 2025 et 26,
01:18parce que vous savez qu'on vénifie, il faut un peu de temps pour exporter.
01:21Mais c'est vrai que d'avoir perdu de 13 milliards à 4 milliards 9 d'excédents agricoles,
01:27ça pose une vraie question.
01:28Je dirais que ce qu'on a pu voir, et ça ressemble un peu aux tables rondes
01:32qu'il y a pu avoir tout le matin, il faut qu'on ait un message clair.
01:37Sébastien Abyss a parlé, le mot production était un peu un gros mot.
01:41Je dirais que le mot exporter était encore un mot encore moins développé.
01:46Il ne fallait pas le prononcer il y a quelques années en France.
01:48Et on a besoin d'exporter, parce que ça crée de la richesse.
01:53C'est une bonne chose pour nos filières, pour nos territoires.
01:56Et le cabinet Asterès nous a démontré que ça crée de la richesse localement.
02:00Et cette exportation, elle est bénéfique à la France.
02:04Et on voit qu'aujourd'hui, on a peut-être repris un peu du poil de la bête,
02:08mais c'est compliqué.
02:09Et ce que je peux regretter, c'est qu'on a des politiques publiques,
02:11un peu du stop and go depuis quelques années.
02:13Et arrive un jour un gouvernement qui dit qu'il faut monter en gamme.
02:19On ne fait que du luxe.
02:21Bon, oui, très bien.
02:22Qu'est-ce qu'on fait de l'entrée de gamme ?
02:23On n'est plus présent, donc on le laisse à l'importation.
02:26Un autre arrive en disant qu'il ne faut faire que du bio.
02:28Bon, ça pose des difficultés.
02:30Un autre arrive avec du carbone.
02:31Et face à cela, nous, agriculteurs et filiers agroalimentaires,
02:37on ne peut pas réagir.
02:38On a besoin d'un cap clair sur des années.
02:39Un agriculteur, c'est un investissement de 15-20 ans.
02:41Les filiers agroalimentaires, c'est 10-15 ans d'investissement.
02:44Vous ne pouvez pas vivre avec des politiques comme cela.
02:46Et donc, on a besoin de retrouver un cap clair sur l'exportation
02:50et de dire que la France est un grand pays producteur agricole.
02:54Mais je dirais qu'aujourd'hui,
02:54quand on fait un peu cette définition de la France,
02:57c'est un colosse au pied d'argile.
02:58Parce qu'aujourd'hui, il n'assume pas d'exporter, de produire.
03:01Mais par contre, il est capable de le faire.
03:03Il suffit de leur donner un cap.
03:05Alors justement, on va y revenir sur ce qu'on peut préconiser
03:08pour exporter davantage, relancer cet export.
03:12Simplement, vous l'avez un petit peu effleuré.
03:14Mais pourquoi finalement, c'est si important que ça d'exporter ?
03:17Est-ce qu'il ne faut pas juste produire pour ses propres besoins
03:19avec ce qu'on a ?
03:20C'est une question naïve, vous l'avez compris.
03:23Mais est-ce qu'on peut expliquer un peu
03:23en quoi c'est un levier de croissance ?
03:26Alors, c'est un levier de croissance
03:27parce que je pense que ça crée de la richesse.
03:30L'export permet à notre pays d'avoir plus de devises
03:33et on en a bien besoin.
03:36C'est une réflexion qu'on devrait avoir sur le plan économique.
03:39En France, toutes filières confondues.
03:40Je pense que depuis 30 ans,
03:41on a basé notre développement économique
03:43sur les seuls biens de consommation.
03:45En disant qu'il fallait soutenir la consommation
03:47de l'ensemble des ménages français
03:48pour créer de la richesse,
03:49sans savoir d'où venaient ces biens de consommation.
03:52On est tous habillés dans la France,
03:53on est tous habillés dans la salle.
03:55Si on retourne les étiquettes,
03:56on verra qu'il y a peu de français.
03:58Effectivement, sur le luxe,
03:59mais on ne s'habille pas avec des cardins tous les jours.
04:02C'est la même chose sur un certain nombre de denrées.
04:04Et l'agriculture commence à être dans ce cadre-là.
04:06Donc, remettre une politique de production de biens
04:10agricoles et agroalimentaires,
04:12c'est créer de la richesse.
04:13Et je donnerai un exemple très concret
04:14qui me concerne en tant qu'agriculteur.
04:16Je suis producteur en haute loire, vous l'avez rappelé.
04:17Je suis producteur de lait
04:18avec une entreprise un peu importante
04:21qui est basée à Laval, en France.
04:24Il se trouve que pour des accords de collecte,
04:26ce lait est transformé à côté de chez moi,
04:28à Brioude,
04:29dans une entreprise qui fait de la raclette,
04:31qui est un consortium entre une entreprise sodiale
04:34et Savientia.
04:34C'est la plus grosse entreprise de création de raclette d'Europe.
04:3920 000 tonnes.
04:40400 employés.
04:42J'ai rencontré le sous-préfet.
04:43Quand il vient chaque année,
04:44je suis président de la chambre d'agriculture.
04:46Quand il y a un sous-préfet qui arrive,
04:48il veut me rencontrer.
04:48Et quand il me rencontre il y a 4-5 ans à Brioude,
04:50il me dit,
04:50mais l'agroalimentaire, c'est fini à Brioude.
04:53L'agriculture, ce n'est pas l'avenir.
04:55Je lui dis, mais sachez qu'à Brioude,
04:58quand on prend l'agroalimentaire,
04:59c'est le principal poste d'employabilité des actifs.
05:03Et puis, je n'ai pas parlé de tous les agriculteurs
05:04qu'il y avait autour.
05:05Il n'avait pas cette conscience-là
05:07qu'autour de lui, il y avait cela.
05:09Alors, le maire en est conscient,
05:11mais vous voyez qu'à l'intérieur de nos territoires,
05:13un certain nombre de décideurs
05:14n'ont pas cette conscience
05:16que l'agroalimentaire est un élément.
05:18Et cette usine de raclette,
05:19elle produit bien sûr pour la France,
05:20mais elle exporte de raclette.
05:21On l'exporte en Allemagne.
05:22Et c'est une bonne chose.
05:24Et ça permet de la création de richesses,
05:25de l'emploi.
05:26Ça permet des agriculteurs d'avoir une sécurité
05:27pour pouvoir commercialiser leurs produits.
05:29Et j'en fais partie.
05:30Donc, le vrai sujet,
05:33peu autour de cela,
05:34je dirais qu'il faut qu'on retrouve
05:35cette fierté d'exporter en France.
05:37Et alors, justement,
05:38vous avez évoqué déjà la nécessité
05:40d'un cap, d'un cap politique,
05:42même avec un horizon long terme.
05:46C'est ce dont le secteur a besoin.
05:47Qu'est-ce que vous préconisez d'autre
05:49pour relancer cette machine ?
05:52Alors, le CNPA a vocation
05:55de rassembler différentes filières
05:57et différents acteurs
05:58de l'agroalimentaire en France.
06:00Et on a publié un rapport
06:02avec 18 propositions.
06:03Je ne veux pas vous détailler
06:0418 propositions,
06:05mais d'en détailler 2 ou 3,
06:06qui me semblent essentielles.
06:09Première chose,
06:10il faut qu'on simplifie
06:11un certain nombre de certificats
06:12d'export en termes de sanitaire.
06:14Bon, j'étais au Maroc
06:16il n'y a pas très longtemps
06:16lors du salon agricole au Maroc.
06:18Ils m'ont dit que c'est très compliqué
06:19de pouvoir importer des bovins
06:21qui viennent de France.
06:22Il faut quelquefois
06:23attendre 15 jours
06:23que le certificat sanitaire soit arrivé,
06:25que les animaux viennent.
06:26J'ai rencontré un abatteur
06:28qui m'a dit,
06:29moi je téléphone au Brésil
06:30en 3 jours,
06:32ils sont capables
06:32de m'envoyer le cargo
06:33qui me va bien
06:34avec les bovins.
06:35On est à côté,
06:36c'est quand même
06:36un petit problème.
06:38Il faut qu'on ait déjà aussi
06:39un bilan annuel
06:40de l'exportation en France
06:41parce que les chiffres
06:42que vous avez donnés,
06:43c'est la balance commerciale.
06:44La balance commerciale,
06:45c'est plus et moins.
06:46Nous, ce qu'on voudrait,
06:47c'est qu'au sein
06:49du ministère de l'agriculture
06:49ou de l'économie,
06:50on ait un bilan
06:51plus quantitatif
06:52et qualitatif
06:53de l'ensemble des filières.
06:56Et qu'on analyse cela.
06:59Ça a été dit tout à l'heure,
07:00notamment par mon collègue
07:01sur l'export des céréales
07:02avec l'Algérie.
07:03On souhaiterait, nous,
07:04avoir un conseiller
07:04interministériel
07:05de façon que,
07:06quand on prend
07:06une décision politique,
07:08et je comprends
07:08que le ministre de l'Intérieur
07:09a des problèmes
07:09avec l'Algérie,
07:11mais qu'on considère
07:12que derrière, attention,
07:13il y a un intérêt
07:13pour la France.
07:14Alors, je ne sais pas
07:16si on arrivera
07:16à remettre les choses,
07:17mais là, on a dit,
07:18on prend une décision,
07:19on ne regarde pas
07:19si derrière,
07:20il y a un effet économique.
07:21Donc, du coup,
07:21un conseiller interministériel
07:24à l'export agroalimentaire
07:25serait une bonne chose.
07:27Et puis,
07:28un dernier thème,
07:29un peu,
07:30voilà,
07:30qui est un terme
07:31qu'on utilise beaucoup
07:32au CNPA,
07:32c'est chasser en meute.
07:34Ça veut dire quoi,
07:34chasser en meute ?
07:35Chasser en meute.
07:35Alors, ça a été dit tout à l'heure
07:36et ça va un peu
07:37dans le sens
07:38de la montée en gamme.
07:39Oui, quand on est monté en gamme,
07:40on a plutôt privilégié
07:41les IGP,
07:43les démarches commerciales,
07:44locales.
07:45C'est très bien,
07:46il en faut
07:46pour le marché français.
07:47Par contre,
07:48quand vous êtes à l'international,
07:49ça ne parle à personne.
07:50Je suis de la région
07:51Auvergne-Rhône-Alpes.
07:52Oui, on a une marque
07:52Auvergne-Rhône-Alpes.
07:53Mais à l'international,
07:54la marque Auvergne-Rhône-Alpes,
07:55elle ne parle rien.
07:55Sud de France,
07:56pareil.
07:57Quand on parle des vins
07:58entre les Bordelais,
07:59les Bourgognes,
08:00les Côtes-du-Rhône,
08:01oui, c'est très bien
08:01pour la France
08:02parce qu'on a un peu
08:02de connaissances.
08:03Mais quand vous êtes
08:04à Shanghai,
08:04que vous êtes aux Etats-Unis,
08:06c'est le logo France.
08:07Donc, chasser en meute,
08:08c'est d'être fier
08:08de ce logo France,
08:09d'afficher fermement
08:10en France.
08:11Et là, on a
08:12des vrais progrès à faire.
08:14Je regrette
08:14qu'au salon
08:16que j'ai visité
08:17au Maroc,
08:18là, dernièrement,
08:19on avait,
08:20parce qu'il y a
08:20Business France,
08:21il y a l'Etat
08:21qui subventionne,
08:22on met République française.
08:24À côté de nous,
08:24il y avait l'Espagne.
08:25C'était des grands drapeaux
08:26espagnols,
08:26l'Espagne en Espagne.
08:27C'était clair.
08:28Entre les deux,
08:29il y en avait un
08:29qui était plus atratif
08:30que l'autre.
08:31Donc, il faut qu'on apprenne
08:32un peu de nos erreurs
08:32et qu'on arrive
08:33à afficher clairement
08:34le drapeau France
08:35sur l'ensemble
08:36de nos produits agricoles
08:37et qu'on se sache
08:38à ses emmeutes.
08:39D'ailleurs, au CNPA,
08:40quand on accompagne
08:40les filières à l'exportation,
08:41on les oblige
08:42à y aller collectivement.
08:43Quand on va sur un salon,
08:44on dit qu'il faut au moins
08:45deux filières agricoles
08:46qui soient présentes
08:46sous la même bannière.
08:49C'est quoi votre état d'esprit ?
08:50Vous êtes optimiste ?
08:51C'est quoi le mood au CNPA ?
08:54Alors, oui,
08:55il faut être optimiste.
08:56Déjà, quand on est agriculteur,
08:57on est optimiste par nature
08:58parce que notre métier
09:01nous oblige
09:02à se projeter en permanence.
09:04Je sème un grain de blé
09:05au mois de septembre
09:06en espérant que je récolte
09:08mieux au mois de juillet prochain.
09:10Là, on est en train
09:11de faire les récoltes.
09:11On est déjà tourné
09:12sur la prochaine.
09:13C'est la même chose
09:13avec les animaux.
09:14On élève une vache.
09:16On espère que derrière
09:17la naissance,
09:18ça fera une bonne génisse
09:20et qu'on pourra produire
09:21avec cette bête
09:22pendant 10, 15 ans qui viennent.
09:23Donc, on se projette
09:24en permanence.
09:25Et l'agriculture
09:25et l'agroalimentaire,
09:26c'est un peu la même chose
09:27parce qu'on traite du vivant
09:28et c'est essentiel
09:29qu'on puisse se projeter.
09:30Donc là, je pense
09:34qu'il nous faut un cap clair.
09:36Les agriculteurs
09:36et les filles agroalimentaires
09:37qu'on a entendues ce matin
09:38sont prêtes à répondre
09:39à ce défi.
09:40Et donc, recréer de la richesse
09:42en France à partir
09:42des biens de production,
09:43on est prêt à le faire.
09:45Et puis, exporter,
09:46je finirai par...
09:47Je voudrais vous faire partager
09:48un mot, souvent,
09:49une expérience un peu personnelle.
09:52Mes grands-parents,
09:53quand j'ai commencé
09:54la ferme agricole,
09:55parce que vous avez vu
09:55qu'il y a un lien familial,
09:56bien sûr, dans les exploitations.
09:58Quand j'ai commencé,
09:58mes grands-parents,
09:59quand je me suis sent allé en 90,
10:01alors ils étaient à la retraite,
10:02mais ils m'expliquaient une chose
10:04qui, pour moi,
10:04a encore du sens.
10:06C'est qu'eux avaient vécu
10:08des périodes de disette importantes,
10:10l'après-guerre,
10:10qui étaient compliquées.
10:12Ils me disaient
10:12que tu sauras dans la vie
10:13que pour être sûr
10:14d'en avoir assez,
10:15il faut en avoir trop.
10:16Et ça colle complètement
10:17à notre filière agricole.
10:19C'est-à-dire que quand on veut
10:20baser, par exemple,
10:21la production sur une base 100,
10:23si vous n'êtes pas sûr
10:24de faire 120,
10:25vous allez faire 80.
10:26Et les orages de cette nuit
10:27nous ont bien démontré
10:28que celui qui a basé
10:29la filière agricole,
10:31par exemple,
10:31céréales en disant
10:32on ne va faire que 100 cette année.
10:33Il y a une partie
10:34qui a été détruite.
10:35L'an dernier,
10:35il y a eu un problème sanitaire
10:36sur les animaux
10:37avec la FCO,
10:38mais vous ne faites que 80.
10:39Et donc,
10:39pour être sûr d'avoir 100,
10:40il faut faire 120.
10:41Et c'est 120.
10:42Les 20% supplémentaires,
10:43c'est l'export.
10:43Je pense que là,
10:44c'est là qu'on redéfinit
10:45la souveraineté alimentaire.
10:47Je dirais que pour répondre
10:48tout à l'heure
10:48à Emmanuel Ducro,
10:49c'est plus la sécurité alimentaire
10:50que la souveraineté alimentaire
10:51qu'il faut mettre en avant.
10:52Très bien.
10:53Écoutez,
10:53un grand merci
10:54pour cet éclairage
10:55très concret.
10:56Très rapide.
10:58C'était très clair.
10:59C'était très clair.

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