- 17/06/2025
Lundi 16 juin 2025, retrouvez Thomas Breuzard (Directeur permaentreprise, norsys & Coprésident, B Lab France) dans 4GOOD, une émission présentée par Alix Nguyen.
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00:00Et Thomas, comme à chaque fois, on commence avec ton audito, bien sûr.
00:08Thomas, on a coutume de dire que le lobbying est une arme d'influence, mais la vraie question, c'est pour défendre quoi ?
00:15Alors en effet, Alix, même si l'idée de l'arme est peut-être un petit peu excessive, bien sûr,
00:19mais déjà le mot lobbying au départ, en fait, vient des couloirs du pouvoir,
00:23puisqu'à l'origine, c'était en Grande-Bretagne notamment, que les lobbies désignaient là où dans les antichambres du Parlement,
00:28les citoyens venaient échanger avec les élus pour pouvoir discuter de différents sujets.
00:32Et donc en ce sens, le mot lobbying était très noble.
00:36Ce n'est pas du tout quelque chose comme on peut l'entendre aujourd'hui,
00:39en tout cas au sens où les multinationales s'en sont pleinement emparées en enrôlant des armées de consultants,
00:44peut-être là pour prendre un terme qui me semble un tout petit peu plus adapté ou usé justement,
00:49avec des consultants qui vont essayer d'avoir une forme d'influence sur les politiques publiques.
00:52Alors pour défendre quoi ? Un statu quo, une forme d'inertie, le maintien d'un périmètre business
00:57qui est très fructueux pour ces entreprises-là depuis bien longtemps.
01:02Et donnons un chiffre pour prendre la mesure et l'ampleur de l'influence que cela peut avoir
01:06sur les décisions et la consolidation de politiques publiques,
01:09puisque en Europe, on compte aujourd'hui officiellement plus de 30 000 lobbyistes,
01:14officiellement, donc il y en a sans doute un petit peu plus que ça.
01:16Si je le rapporte au nombre d'eurodéputés, ce sont 750 euros députés maximum
01:21qui sont représentants des pays de l'Union Européenne,
01:24ça veut dire qu'au bas mot, 40 lobbyistes sont rémunérés à temps plein
01:27pour discuter, échanger, écrire des projets de loi au service des élus
01:31qui, eux, du coup, se retrouvent très très influencés dans leur rôle
01:35par la présence de ces personnes qui représentent des intérêts avant tout privés.
01:39Alors pendant ce temps, celles et ceux qui défendent l'intérêt général
01:41jouent un petit peu à poil, pardonnez-moi l'expression,
01:44mais n'ont certainement pas les mêmes moyens, parfois manque de formation, de relais.
01:48D'ailleurs, nos invités aujourd'hui vont nous raconter ce qu'ils essaient de faire
01:50pour les outilliers davantage.
01:51Résultat, on parle beaucoup de bifurcation écologique,
01:53sauf que jusqu'à preuve du contraire, le train, lui, il reste exactement sur les mêmes rails.
01:57Oui, et pourtant, le lobbying d'intérêt général, ça existe.
02:00Et oui, il a notamment permis de faire émerger la loi climat dans sa première version.
02:04Il a fait émerger des propositions autour de l'utilisation des jets privés,
02:06évidemment, les séquences récentes sur les PIFAS,
02:09qui a été assez marquant, ou le devoir de vigilance.
02:12Alors, il est porté par des ONG, des coalitions sectorielles,
02:15le mouvement de l'économie sociale et solidaire, ou des syndicats,
02:18mais encore souvent trop marginal et peut-être encore trop dispersé.
02:21Peut-être aussi, il y a une certaine forme de tabou,
02:24eu égard à la perception qu'aujourd'hui, on a du lobbying,
02:26comme quelque chose étant négatif,
02:29alors que c'est peut-être là une forme d'amalgame malheureux
02:31entre lobbying et corruption.
02:33Avoir raison ne suffit pas, malheureusement, pour le convaincre.
02:36On a donc besoin de s'appuyer sur ces outils
02:37pour avoir cette influence sur les lois.
02:40Et puis, n'oublions pas que dans le lobbying,
02:42il y a des stratégies, des alliances, une narration, un tempo,
02:44peut-être une mobilisation citoyenne à aller chercher aussi
02:47pour obtenir certaines victoires.
02:48Et alors, comment faire un outil d'intérêt général largement déployé ?
02:52C'est justement pour ça que nous avons invité Valérie, Jordan et Vincent.
02:56Merci à tous les trois encore d'être présents.
02:58Ils seront mieux placés que moi pour en témoigner.
03:01Mais si on veut que l'économie de demain,
03:03telle qu'on l'appelle souvent,
03:04mais l'économie au service du bien commun en tout cas,
03:07soit utile aux humains et prenne mieux soin du vivant,
03:10on ne peut plus juste innover en silence
03:12ou signer des tribunes le dimanche,
03:14comme on a tendance à le faire assez souvent.
03:15Il faut militer avec une méthode,
03:17influencer parfois son complexe,
03:19et jouer finalement avec les mêmes armes que de grands groupes
03:22et des multinationales qui défendent l'intérêt privé
03:24face à l'intérêt général.
03:26Je pense que le temps est vraiment venu
03:27de passer du lobbying de la rente à un lobbying de la conscience,
03:32celui qui permet à toutes et tous,
03:34finalement à tous les citoyens, toutes les citoyennes,
03:36de penser ensemble à une société
03:38qui soit plus juste et plus soutenable,
03:40non pas pour manipuler,
03:42mais pour organiser l'intérêt collectif,
03:44pas pour acheter des voix,
03:45mais pour donner une voix à celles et ceux
03:47qu'on entend trop peu.
03:48Merci Thomas.
03:49Je m'adresse à vous maintenant,
03:51chers invités,
03:52vous êtes à la croisée des choix
03:53entre lobbying, engagement, impact.
03:56Est-ce que vous partagez ce constat ?
03:59Oui, le lobby c'est un jeu d'argent,
04:01et pour l'instant,
04:02ce sont les entreprises,
04:04quelques multinationales,
04:05une poignée en réalité,
04:07avec des fonds américains,
04:09qui s'accaparent les lois
04:11et l'accès direct.
04:14Donc ils divisent les scientifiques,
04:16ils manipulent l'opinion publique.
04:20Dernier exemple,
04:22en date,
04:23Chine est ténue de la fast fashion.
04:26Se sont payés les services de Christophe Castaner
04:31et une grande campagne de publicité payée par Avas.
04:34Et pour autant,
04:35c'est une succès story,
04:37puisque l'intérêt général a réussi à s'imposer
04:40grâce à une recette,
04:42trois ingrédients,
04:43une opinion publique au taquet,
04:46très concernée.
04:48Ça s'est fait sur une dizaine d'années,
04:50depuis l'effondrement du Rana Plaza,
04:53jusqu'à des pétitions,
04:55jusqu'à des émissions envoyées spéciales,
04:57qui ont vulgarisé
04:58tous les effets néfastes
05:00de la fast fashion,
05:01pas seulement écologiques,
05:02mais surtout économiques.
05:0430 000 emplois détruits.
05:07Et donc,
05:07une opinion publique très favorable.
05:09Des politiques de tous bords
05:11qui se sont mobilisées,
05:12jusqu'à un républicain
05:13qui a farcé,
05:17moqué
05:17les pratiques d'influenceurs
05:19qui promeuvent la fast fashion,
05:23jusqu'à le parti Horizon,
05:25Edouard Philippe,
05:26qui a voulu se positionner
05:27habilement
05:27dans l'objectif
05:29d'exister pour les présidentielles
05:31et qui a saisi l'opportunité
05:33d'une niche parlementaire.
05:35Mais le fait déterminant,
05:37ça a été des entrepreneurs,
05:39des entreprises,
05:40puisque c'est bien ça qui compte,
05:42de pouvoir faire contrepoids
05:45et de pouvoir avoir
05:47un discours cohérent
05:48face à Bercy
05:49et face à Matignon.
05:50Et là, on a eu des fédérations,
05:52l'industrie du textile
05:53et des grandes marques
05:55l'ADG de Zappa
05:58et de Tara Germont
05:58qui s'est positionnée.
06:00Et ça a fait basculer,
06:01ça a fait toute la différence.
06:02Donc on a eu une vraie success story
06:04et on peut combattre
06:06et on a tous un rôle,
06:07en particulier les entreprises.
06:08Jordan, Vincent.
06:10Oui, je voudrais revenir
06:11sur ce que disait Thomas
06:12parce que tu disais
06:13que les entreprises,
06:14les multinationales
06:15défendent les intérêts privés
06:17et les associations,
06:18l'intérêt général.
06:18Or, c'est vrai que l'intérêt général,
06:20c'est une notion
06:20qui est quand même difficile
06:22à expliquer
06:22et à définir
06:24dans le sens où
06:25tout bon lobbyiste
06:27va toujours se réclamer
06:28de l'intérêt général,
06:29y compris le lobby du tabac.
06:31Donc l'intérêt général,
06:32en fait,
06:32il est instrumentalisé
06:34et donc c'est difficile
06:36de s'en prévaloir
06:37quand on est une association.
06:38par conséquent,
06:40je pense qu'il faut
06:41avoir en tête
06:43que le lobby,
06:46ce sont des techniques,
06:48la question,
06:48c'est qui s'en empare
06:50et pour le coup,
06:51beaucoup d'associations,
06:52notamment sur les sujets
06:53environnementaux
06:54et a fortiori
06:55sur les sujets climat,
06:56défendent des intérêts
06:57qui les dépassent.
06:58On n'est pas sur un intérêt
07:00catégoriel
07:02ou un intérêt économique,
07:03on est sur un intérêt
07:04plus que général,
07:06un intérêt quasiment
07:07cosmologique.
07:09Et c'est là
07:09où il y a une vraie différence
07:11entre une entreprise
07:12ou une fédération professionnelle
07:14et une association
07:15ou des collectifs associatifs,
07:17y compris des collectifs
07:18qui, comme tu disais,
07:19incluent des entreprises,
07:21là,
07:22elles défendent quelque chose
07:23qui les dépasse.
07:23C'est ça qui,
07:25à mon sens,
07:25fait la différence
07:26entre un lobby privé
07:27et un lobby d'intérêt général
07:30au sens où
07:31on en parle maintenant.
07:32Jordan,
07:33peut-être pour aller
07:34dans ton sens,
07:35effectivement,
07:35et dans le tien,
07:36il y a un tabou en France
07:37autour du lobbying.
07:38qui vient du fantasme français
07:40qu'on a autour
07:41des représentants d'intérêts.
07:43En réalité,
07:43le lobbying renvoie
07:44à une logique très simple,
07:45c'est représenter des intérêts
07:46en essayant de mettre en place
07:48une stratégie d'influence
07:49pour avoir un impact
07:52sur les décisions politiques.
07:53On peut le faire
07:54pour toute une série d'intérêts,
07:55on peut le faire
07:55pour des intérêts économiques,
07:57privés,
07:57on peut le faire aussi
07:57pour des intérêts écologistes
07:58ou d'intérêts généraux.
08:00Donc le lobbying
08:01n'est pas un problème en soi,
08:01il est même consubstancié
08:03à la démocratie.
08:04Les parlementaires,
08:05les décideurs politiques
08:06ne peuvent pas tout savoir.
08:07Et donc le lobby,
08:07c'est celui qui vient négocier,
08:10qui vient apporter
08:10un certain nombre d'éléments
08:12et qui essaye de faire en sorte
08:14que la décision soit prise
08:15au regard de la lumière
08:16de tous ces enjeux-là.
08:18La difficulté est,
08:19dans n'importe quel marché,
08:21il y a le principe
08:21de la concurrence libre
08:22et non faussée.
08:23dans le marché
08:25des affaires publiques
08:25ou du lobbying,
08:26c'est un principe
08:27qui ne s'applique absolument pas.
08:28Le marché n'est ni libre
08:30ni non faussé
08:31puisqu'il y a une distorsion
08:32de concurrence,
08:33en tout cas une asymétrie
08:34entre les lobbies écologistes
08:36et les lobbies privés
08:37ou économiques
08:38avec des différences
08:41qui sont considérables
08:41en termes de moyens humains,
08:43tu l'as rappelé,
08:43en termes de moyens financiers,
08:45en termes de techniques
08:46et même d'outils.
08:46On pourra en parler
08:47dans un instant,
08:48il y a un certain nombre
08:49d'outils qui commencent
08:50à émerger,
08:50notamment liés
08:51à l'intelligence artificielle.
08:52Et en réalité,
08:53au fond,
08:54lobbying écologiste
08:55et lobbying économique,
08:56c'est un peu David contre Goliath,
08:57le gros contre le méchant.
08:59On verra si à la fin
08:59de cette émission,
09:00le petit gagne contre le gros.
09:01Oui, gardons-en un peu
09:02pour le débat.
09:03On passe tout de suite
09:03au top et au flop.
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