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  • 23/05/2025
Anne Fulda reçoit Christine de Mazières pour son livre «Locarno» dans #HDLivres

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Transcription
00:00Bienvenue à l'heure des livres, Christine de Mazière.
00:04Alors vous êtes magistrate, vous êtes issue, c'est ce qui a son importance, d'une famille franco-allemande.
00:10Vous avez déjà écrit deux livres, deux romans, « Trois jours à Berlin » et « La route des Balkans »
00:14et vous venez de publier « L'Occarno », un livre qui est paru au Seuil, un roman qui est très bien documenté
00:20et qui revient sur un épisode de l'entre-deux-guerres, une conférence de paix qui s'est passée à L'Occarno, en Suisse,
00:26en 1925, il y a exactement un siècle, et qui n'a pas empêché la Seconde Guerre mondiale,
00:34mais il y avait un espoir quand même.
00:36Alors c'est une intrigue qui mêle petite et grande histoire, c'est un procédé que vous aimez bien
00:44puisque vous l'avez utilisé pour l'un de vos précédents romans,
00:48parce que vous trouvez que ça rend les enjeux de l'histoire plus accessibles ?
00:54Oui, absolument. J'aime bien braquer le projecteur sur un moment de l'histoire qui est un moment de bascule,
01:02un moment important et un moment important dans l'histoire, notamment de l'Europe et de la réconciliation franco-allemande
01:08puisque, comme vous le rappeliez, c'est mon histoire personnelle.
01:12Et je pense que, sans faire œuvre d'historien, puisque je ne suis pas historienne,
01:16à partir d'une documentation, j'aime bien nourrir un peu cette histoire-là,
01:22avec des personnages aussi inventés pour donner plus d'humanité,
01:26mieux résituer l'époque.
01:28Ces années 1920 étaient une époque absolument étonnante.
01:32Alors on vit donc la petite histoire, entre guillemets,
01:34à travers le cahier et le journal d'une jeune femme,
01:38une jeune journaliste française qui s'appelle Louise et qui s'est réfugiée en Suisse
01:43justement après la Première Guerre mondiale
01:46parce qu'elle a aimé un Allemand en la guerre dont elle a eu un enfant.
01:51Et la grande histoire, c'est donc cette conférence qu'elle est chargée de suivre comme journaliste
01:54puisqu'elle est devenue correspondante du Courrier de Genève,
01:57donc un journal suisse.
02:00Et donc elle se croise ses aspirations personnelles et ses aspirations
02:05pour que cette conférence puisse déboucher sur une paix entre surtout la France et l'Allemagne.
02:11Mais se retrouvent, en faisant un point déjà sur les personnes qui se retrouvent là-bas,
02:16c'est pendant la République de Weimar,
02:18et autour du chancelier, il y a sept ministres des Affaires étrangères.
02:23Absolument.
02:24Il y a sept pays européens qui se retrouvent.
02:26Il y a des conférences, il y en a eu énormément depuis le traité de Versailles.
02:30qui n'a pas tout réglé, loin de là.
02:32Et ces pays européens se retrouvent, alors en l'absence des Américains
02:35qui se sont retournés dans leur splendide isolement, déjà à l'époque.
02:39Il y a aussi, pas loin, les Soviétiques qui regardent tout ça.
02:45Mais là, nous avons sept Européens, sept pays dont la France et l'Allemagne
02:48qui sont les principaux anciens belligérants.
02:51Et en réalité, ils sont tous là pour essayer de garantir la sécurité de leur pays.
02:55Ce sont des hommes d'État, ce sont des ministres des Affaires étrangères,
02:57mais ce sont des gens qui, avant tout, pensent aux intérêts de leur propre pays.
03:01Et il y a deux manières, par la force ou par la paix.
03:06Et ils se disent qu'à ce moment-là, si on continue ainsi, en entretenant des haines,
03:12des nationalismes, on va droit vers une Deuxième Guerre mondiale.
03:16Ils ont conscience, déjà à l'époque, tous les textes le disent,
03:18que cette guerre serait ou sera bien pire que la Première Guerre mondiale,
03:23qui a déjà été un traumatisme épouvantable.
03:25Alors, pour la France, c'est Aristide Briand qui est présent.
03:29Pour l'Allemagne, c'est Gustav Streismann.
03:31Les discussions, notamment entre ces deux-là, sont les plus compliquées.
03:36Parce qu'évidemment, vous venez d'évoquer le traité de Versailles,
03:39cette humiliation qui reste quand même extrêmement présente,
03:43y compris dans la manière dont est organisée la conférence,
03:47dont la délégation allemande a dû se loger.
03:52Cette idée de l'humiliation, c'est quelque chose qui a été quand même un fil conducteur,
03:59enfin quelque chose qui a pesé beaucoup dans ces négociations,
04:01pour passer outre, même s'il y a la bonne volonté des hommes.
04:04À Locarno, il n'y a plus tellement d'humiliation, en réalité.
04:08L'humiliation, elle a eu lieu au traité de Versailles.
04:10Et puis surtout, il faut bien imaginer qu'on a là affaire à une nouvelle Allemagne.
04:15C'est une république qui a été construite en novembre 1918,
04:21lorsque l'empereur a fui avec toute la clique des militaires.
04:25Et ils ont porté la responsabilité d'une guerre qu'ils n'avaient pas du tout déclenchée.
04:29Ce sont des républicains, des sociodémocrates et des gens du centre,
04:34en fait, du centre droit, du centre gauche, qui sont arrivés au pouvoir.
04:37Et c'est d'ailleurs une république démocratique,
04:40puisque les femmes en Allemagne ont le droit de vote à partir de la fin de 1918,
04:45et pas les Françaises.
04:47Et cet aspect-là, notamment les Français, on peut comprendre,
04:51avec les destructions de la Première Guerre mondiale,
04:56n'ont pas voulu voir ça.
04:58Ils se sont dit, c'est toujours les mêmes Allemands, les Allemands restent les Allemands.
05:01Et donc, il y a eu, au traité de Versailles, effectivement,
05:03beaucoup de tentatives d'humilier des Allemands.
05:07Ce n'est plus le cas en 1925.
05:08Non, mais ce que je veux dire, c'est que le souvenir est présent.
05:10Le souvenir est présent, et c'est vrai que l'Allemagne est encore mise au banc des nations.
05:17Par exemple, elle n'a pas eu le droit d'être admise à la Société des Nations,
05:20qui a été créée, et qui va être une conséquence, en fait, de ces accords de localité.
05:25Oui, parce qu'il y a, effectivement, en filigrane, ce projet européen,
05:29qui commence à pointer son nez.
05:32Alors, juste, dernière question.
05:33Est-ce que vous avez l'impression que, finalement, les époques se suivent, les guerres se suivent ?
05:39La diplomatie tente de pousser ses avantages, mais que, finalement, les mêmes erreurs se reproduisent souvent ?
05:48L'histoire ne repasse pas, mais il faut connaître la mémoire et l'histoire.
05:53Il y a un temps pour la paix, il y a un temps pour la guerre.
05:55La paix est toujours, évidemment, préférable.
05:59Et lorsque le moment est bienvenu pour faire ces négociations, il faut le faire.
06:03Il ne faut pas être pacifiste, en ce sens que ce n'est pas la paix à tout prix.
06:07On a vu ce que ça a donné à Munich.
06:08Ce n'était plus le moment de faire la paix.
06:10À Locarno, c'était encore le moment.
06:12Et ce qui a, finalement, balayé toute cette tentative, c'est la crise de 1929,
06:17avec son cortège de misère et de chômage, qui a mis au pouvoir Hitler.
06:21Et tout.
06:22Voilà.
06:22Ça a été malheureusement fini.
06:26Mais, à ce moment-là, il y a eu les germes posés, comme vous le disiez,
06:29de la construction européenne, qui seront repris après la Deuxième Guerre mondiale
06:32par Monet, Schumann et tous les constructeurs de l'Europe.
06:36Très bien.
06:36En tout cas, merci, Christine de Mazière.
06:38Donc, c'est à lire.
06:39Ça s'appelle Locarno.
06:40C'est un roman qui est très documenté.
06:44Mais c'est un roman avec une intrigue.
06:46On n'a pas pu parler aussi des milieux artistiques que fréquente Louise.
06:51Et il n'est pas question que de diplomatie.
06:55Merci beaucoup.
06:56Merci à vous.

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