On nous le martèle sans relâche : l’attention serait la ressource la plus précieuse du XXIe siècle, mais aussi la plus menacée. Fatigue informationnelle, surcharge cognitive, consommateurs ultra-connectés mais désinvestis… Autant de signes prétendument représentatifs de notre époque. Pourtant, cette obsession pour l’attention n’a rien de nouveau. Elle constitue plutôt une étape supplémentaire dans une longue histoire de l’angoisse communicationnelle. [...]
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00:00On nous le martèle sans relâche, l'attention serait la ressource la plus précieuse du 21e siècle,
00:14mais aussi la plus menacée. Fatigue informationnelle, surcharge cognitive,
00:20consommateur ultra-connecté mais désinvesti, autant de signes prétendument représentatifs
00:26de notre époque. Pourtant, cette obsession pour l'attention n'a rien de nouveau.
00:31Elle constitue plutôt une étape supplémentaire dans une longue histoire de l'angoisse communicationnelle.
00:38Dans les années 60, déjà, Herbert Simon, pionnier de la théorie de la rationalité limitée,
00:44soulignait la rareté de l'attention face à une offre informationnelle exponentielle.
00:49Deux décennies plus tard, le concept d'information overload émergeait en pointant les défis
00:57imposés aux consommateurs par un excès de choix. Ce phénomène n'est donc pas nouveau.
01:03Depuis l'invention de l'imprimerie, chaque révolution technologique dans la communication
01:08a entraîné des craintes similaires. Ces problématiques ne relèvent donc pas d'une
01:14tendance passagère, mais d'une dynamique structurelle inhérente à nos sociétés
01:19modernes. La rareté de l'attention n'est pas simplement une conséquence de l'évolution
01:24technologique. Elle révèle aussi notre difficulté collective à trier et prioriser l'information.
01:32Dès lors, plutôt que de céder à des discours alarmistes, il conviendrait de revenir aux
01:37fondamentaux de la communication. Et un constat s'impose, marques et individus partagent une
01:44même névrose de reconnaissance. Si les individus sont envahis par la fameuse faux
01:49mots, les marques, elles, souffrent de no mots, not enough of me. Elles redoutent de ne pas
01:55être suffisamment visibles, appréciées ou partagées. Cette anxiété chronique les
02:01pousse à orchestrer un spectacle incessant, souvent dénué de substances. Ce besoin insatiable
02:07de capter l'attention les amène à investir dans des stratégies de communication tapageuses
02:13qui se perdent dans la surenchère d'émotions et d'effets visuels.
02:17Le véritable enjeu du déficit attentionnel ne se situe peut-être pas dans la saturation
02:22de nos cerveaux par plus de 60 000 morceaux d'informations et 3 000 messages publicitaires
02:27quotidiens, mais ailleurs. Cette saturation, bien qu'omniprésente, ne signifie pas que nous
02:33soyons incapables de nous concentrer. Elle reflète plutôt une transformation dans la
02:39manière dont nous traitons et hiérarchisons les données qui nous entourent.
02:44L'attention n'est pas qu'une question de volumétrie d'informations. Le problème n'est
02:49pas tant le nombre de messages concurrents ou le manque d'attention du public. L'attention
02:54repose avant tout sur l'autorité et la pertinence de l'émetteur.
02:58Or, quelles sont les marques capables d'émettre des messages vraiment intéressants et non
03:04simplement impactants ? Quelles histoires savent-elles raconter avec une véritable intrigue et non
03:09de simple artifice de storytelling ? Sachant qu'une narration signifie une intrigue porteuse
03:16de sens qui suscite la curiosité et l'engagement du récepteur. La captation de l'attention
03:22n'est donc pas un problème en soi. Ce qui pose réellement question, c'est la manière
03:27dont on l'aborde. Au lieu de multiplier les stratégies pour créer le buzz, il serait
03:33préférable d'adopter une approche plus rigoureuse et méthodique. L'attention, ça se mérite.
03:39Elle se conquiert en proposant un contenu structurant et crédible, capable de capter l'intérêt
03:45et de nourrir une relation durable. Dans ce contexte, il est essentiel de distinguer
03:51l'impact du contenu. Créer de l'impact ne signifie pas sacrifier le contenu au profit
03:57du sensationnalisme. Les marques doivent s'ancrer dans des récits légitimes et porteurs
04:02de sens. C'est à cette seule condition qu'elles pourront transformer le prétendu déficit
04:07attentionnel en une opportunité pour raisonner avec leur public sur des bases solides et durables.