Mussolini: Ascension, Chute et Héritage du Fascisme Benito Mussolini est passé d'un agitateur socialiste influent à l'architecte du fascisme italien, un mouvement qu'il a fondé en mars 1919. Il a accédé au pouvoir par la "Marche sur Rome" en octobre 1922 et a progressivement démantelé la démocratie pour établir une dictature totalitaire axée sur la suprématie de l'État. Son régime était caractérisé par un nationalisme extrême, un système économique corporatiste contrôlé par l'État, le militarisme et un culte de la personnalité autour d'"Il Duce". Sa politique étrangère expansionniste, motivée par la quête d'un empire et d'un "espace vital", l'a conduit à une alliance avec l'Allemagne nazie et à une participation désastreuse à la Seconde Guerre mondiale. Suite aux échecs militaires et à la perte de soutien, il fut arrêté en juillet 1943, sauvé par les Allemands pour diriger une république fantoche, avant d'être capturé et exécuté par des partisans en avril 1945
02:45Oui, ces deux années de grève intense, d'occupation d'usines.
02:49Et surtout, la peur.
02:51La peur d'une révolution communiste chez les élites, les industriels, les grands propriétaires terriens.
02:56Et c'est cette peur qui va jouer un rôle majeur dans la marche sur Rome.
03:00Octobre 1922.
03:01C'est absolument crucial pour comprendre.
03:03Parce que cette marche sur Rome, ce n'était pas une conquête militaire.
03:06C'était avant tout un coup de bluff politique.
03:09Un coup de bluff ?
03:10Oui.
03:11Ces milices, les chemises noires, terrorisaient déjà pas mal le pays, surtout dans le nord.
03:16Face à la menace de cette marche sur la capitale, le roi Victor Emmanuel III, eh bien il a peur.
03:22Peur de la guerre civile ?
03:23Peur de la guerre civile et il est sans doute influencé par ses élites industrielles et agraires qui voient Mussolini comme un rempart contre le socialisme, contre le désordre.
03:33Et donc il ne déclare pas la loi martiale ?
03:35Non. Au contraire, il refuse de signer le décret préparé par son gouvernement et il l'invite, Mussolini, à former un gouvernement.
03:42Incroyable. Il devient premier ministre légalement, sans combat majeur.
03:47Tout à fait légalement. L'intimidation a suffi.
03:49Une fois au pouvoir, comment est-ce qu'il démontait la démocratie ?
03:53Ça ne se fait pas en un jour, j'imagine.
03:55Non, c'est progressif, mais très déterminé.
03:59D'abord, il y a la loi Acerbo, en 1923.
04:02Une loi électorale, en gros, qui garantit une majorité écrasante de sièges aux partis arrivés en tête.
04:08Taillé sur meuvure pour les fascistes, donc.
04:10Évidemment.
04:11Ensuite, un événement clé, l'assassinat du député socialiste Giacomo Matteotti, en 1924.
04:17Un opposant très critique.
04:19Ça a provoqué une crise.
04:21Une énorme crise politique.
04:23Beaucoup sont choqués.
04:25Mais Mussolini, lui, il réagit en doublant la mise.
04:30Le 3 janvier 1925, il fait un discours célèbre où il assume, en quelque sorte, la responsabilité politique et morale.
04:37Et il revendique ouvertement la dictature.
04:39Le point de mon retour.
04:40Exactement.
04:41Et entre 1925 et 1927, il met en place les instruments de cette dictature.
04:47Interdiction des autres partis, fin de la liberté de la presse, création de l'Ovra, la police politique secrète.
04:53La peur s'installe.
04:54Oui, un climat de peur.
04:56Et les caractéristiques de ce régime fasciste, si on devait résumer ?
04:58Bon, d'abord, un État totalitaire.
05:00L'État prime sur tout, sur l'individu.
05:03Ensuite, un nationalisme, mais alors extrême.
05:06Avec ce rêve un peu fou de recréer un empire romain.
05:10Une troisième Rome.
05:11Le militarisme aussi, très présent.
05:13Ah oui, glorifié.
05:14La guerre seule, disait-il, porte au maximum de tensions toutes les énergies humaines.
05:20Économiquement, il y a le corporatisme.
05:21C'est-à-dire ?
05:22Présenté comme une troisième voie pour harmoniser les classes, patrons et ouvriers, sous l'égide de l'État.
05:28Mais le rapport le décrit comme une fraude élaborée.
05:31Qui favorise et qui, alors ?
05:33Surtout les grandes entreprises, en fait.
05:35Sous contrôle étatique, oui, mais ça s'apparente à un capitalisme d'État.
05:38Et bien sûr, le culte de la personnalité.
05:41Le douce, omniprésent.
05:43Et la question de l'antisémitisme, différent de l'Allemagne nazie au début ?
05:48Oui, initialement, le fascisme italien n'est pas fondé sur l'antisémitisme racial comme le nazisme.
05:54Mais ça change.
05:55Après l'alliance avec Hitler et surtout après la guerre d'Éthiopie.
05:58Une conquête très brutale d'ailleurs.
06:00Extrêmement brutale.
06:021935-36 avec usage d'armes chimiques.
06:05C'est suite à ça, et dans le cadre du rapprochement avec l'Allemagne, que le régime adopte des lois raciales en 1938.
06:12Ce qui nous amène logiquement à la Seconde Guerre mondiale.
06:15Et à sa chute ?
06:15Oui, l'entrée en guerre en 1940 aux côtés de l'Allemagne.
06:18Ce fut un désastre militaire quasi complet pour l'Italie.
06:21En Grèce, en Afrique du Nord.
06:22En Russie aussi.
06:24Les défaites s'accumulent, ça érode son soutien, même au sein du parti fasciste.
06:28Le débarquement allié en Sicile en juillet 1943, c'est le coup de grâce.
06:33Et là, son propre camp le lâche.
06:34Oui, le grand conseil du fascisme vote sa défiance.
06:37Et le roi, cette fois, le fait arrêter immédiatement.
06:40Mais il est libéré par les Allemands.
06:42Oui, par un commando allemand spectaculaire.
06:44Hitler le place alors à la tête de la République de Salaud.
06:47Un état fantoche dans le nord de l'Italie.
06:49Totalement.
06:50Un régime sous occupation et contre l'Allemand.
06:52Mais ça ne dure pas.
06:53En avril 1945, alors que tout s'effondre, il tente de fuir en Suisse.
06:58Et il est capturé.
06:59Capturé et exécuté par des partisans communistes.
07:02Avec sa maîtresse, Clara Pettacci.
07:04Quelle fin.
07:05Et l'héritage de tout ça ?
07:07Il est complexe et lourd.
07:10Mussolini reste le fondateur du fascisme.
07:12Il a inspiré Hitler d'autres dictatures.
07:15Son usage du culte de la personnalité, de la propagande, ça servit de modèle.
07:19Et l'Italie après la guerre ?
07:21L'Italie a eu du mal à solder se passer.
07:23Le rapport parle de purges qui ont été superficielles.
07:27Ce qui a permis une continuité considérable du personnel administratif, judiciaire et même de certaines lois de l'époque fasciste dans le nouvel État démocratique.
07:35Une sorte de pacte de l'oubli ?
07:37C'est l'expression utilisée, oui.
07:39Un pacte qui a laissé des traces durables.
07:41Finalement, ce qui reste peut-être comme leçon, c'est cette vulnérabilité des démocraties.
07:46Quand l'instabilité, la crise économique, la peur s'installe.
07:49Oui, comment ces crises peuvent être exploitées par des figures autoritaires ?
07:53Et le rôle ambigu, parfois, des institutions établies, des élites, qui peuvent soit résister, soit, comme on l'a vu ici, faciliter une prise de pouvoir qui va les détruire.
08:02Tout à fait.
08:03Ça pose des questions fondamentales sur la solidité des garde-fous démocratiques.