Après “Mandibules” et “Fumer fait tousser”, l’actrice retrouve Quentin Dupieux pour la troisième fois avec “L’Accident piano” (en salles). Pour Jérôme Commandeur, c’est une première. Le duo raconte l’expérience mi-jouissive mi-effrayante de tourner avec le réalisateur le plus prolifique du cinéma français.
00:00J'assume toute la merde qui est en moi et je m'en délecte dedans comme une truie.
00:05C'est ce qu'elle dit.
00:06Vous êtes prête ?
00:08Vous êtes née le 12 mars 1989.
00:15On sait que vous avez atteint un niveau de vie absolument délirant, très vite.
00:22Je suis trop pressée d'en savoir plus. Je me tais.
00:26Allez-y.
00:26Moi, je dirais, non, pas une réplique, mais je dirais quand il crache dans le yaourt,
00:34parce qu'il est son assistant, nounou, chauffeur, confident, machin.
00:36Et en fait, il la déteste.
00:38Et en fait, ça m'a fait hyper mal au cœur.
00:42Alors que c'est con, c'est du jeu.
00:45Mais je ne sais pas, je trouve qu'il y a un truc très résumé là-dedans.
00:51Et c'est très bien qu'il l'ait trouvé, Quentin, mais qui, moi, m'a mis un peu mal à l'aise.
00:54C'est toujours un peu effrayant. Tu te demandes toujours si tu vas être à la hauteur, si ça frôle le ridicule.
01:01Et après, je pense que la clé, c'est d'essayer de travailler et de rester sincère.
01:05Mais oui, il y a quelque chose d'assez effrayant à prendre le risque de composer quelque chose d'aussi extrême dans l'éloquence, dans le corps.
01:13Mais c'est ça qui est excitant, c'est d'avoir peur, quoi, de se sentir un peu vivant.
01:17Les portes qui claquent, les personnages qui tournent sur eux-mêmes en faisant ce crognonio, je les ai fait un petit peu.
01:22Donc là, j'étais content de... Et au contraire, j'adore, parce que son absence, elle est presque...
01:27Il est presque... Il est sale, ce personnage, quoi. Il la déteste, en fait, au fond.
01:31Et il reste avec elle pour le fric. Il le dit, il le redit. C'est abject, quoi.
01:37Et en fait, c'est génial d'être un peu comme ça, une espèce de petite ombre qui le suit, une espèce de petit toutou un peu dégueu.
01:45Et moi, j'ai... Ah oui, oui, j'ai vraiment beaucoup aimé.
01:48Et aussi des choses un peu plus droites, parce que c'est vrai, quand on vient du one-man ou du sketch, on appuie, quoi. C'est normal. Et là, c'est autre chose.
01:56C'est tout de même stupéfiant, vous ne trouvez pas ?
01:59Je le savais.
02:08Son écriture, son exigence, son univers et ce côté artisanal qu'il a de faire les choses, d'être à tous les postes,
02:15de faire des choses sérieuses et profondes, tout en ayant le sentiment de faire des choses de pur jeu, quoi.
02:24Légère, ouais.
02:26Moi, j'aime bien l'idée du... un peu du... du pote qui vous fait prendre des chemins de traverse en bagnole,
02:32parce que vous êtes sur l'autoroute, on en a ras le cul, et puis de toute façon, on va bien arriver un jour.
02:36Et puis il dit, bah viens, allez, vas-y, on coupe, et puis on part un peu sur les chemins de traverse.
02:42Et c'est là que ça devient génial, parce qu'on s'arrête dans un petit bistrot,
02:45et puis on va voir une église, une rivière, un truc, et puis...
02:48Et en fait, c'est ça que j'avais le sentiment, mais peut-être pas à ce point, en voyant le film.
02:53C'est-à-dire, je ne savais pas qu'il nous emmènerait collectivement aussi loin et aussi... aussi fort, quoi.
03:00C'est vraiment un truc de... c'est...
03:03Le mot est un peu galvaudé, parce que maintenant, tout le monde dit ça pour tout, mais c'est une expérience.
03:06Mandibule, ça m'avait un peu fait ça. Je me rappelle d'avoir des immenses moments de transpiration,
03:11même pendant le film, à me dire, mais quel enfer, les gens voient ce que je fais.
03:15C'était horrible. Je me disais, bon, soit c'est un petit coup d'éclat, soit c'est une fin de carrière,
03:18donc profite du moment.
03:20Tout le monde connaît la règle, mais on va la répéter pour les petits nouveaux qui savent rien.
03:24Dans tous les dîners civilisés, même en voyage au bord de la mer,
03:28on commence à manger quand la maîtresse de maison a terminé sa première bouchée.
03:31C'est clivant, quoi, et c'est moi, c'est ça que j'aime, mais j'espère que ça va être la profondeur,
03:40la noirceur, mais l'humour vont être compris, quoi, que les gens passent à un bon moment.
03:44Oui, c'est ça, oui. Moi, j'adore l'idée de... je ne sais plus qui me disait ça à propos du film,
03:49mais c'est un film qui décante. J'adore cette idée. Moi, ça me le fait, 3-4 jours après,
03:55on repense à un film qu'on a vu, un film un peu choc. C'est exactement ce que dit Adèle,
04:00c'est-à-dire qu'on peut aimer ou ne pas aimer, mais en tout cas, il faut reconnaître
04:03que c'est une vraie proposition, puis tellement fouillée, tellement précise,
04:07tellement artistique, que du coup, on a hâte de la donner au public, quoi.
04:12Je me suis fait casser le nez et c'était une douleur quand même, mais horrible.
04:17Et sinon, la douleur, je pense comme tout le monde, chagrin d'amour, c'est dur.
04:21De faire le deuil de quelqu'un, mais qui est vivant, je trouve ça parfois même...
04:25Enfin, je trouve ça dur.
04:26Oui, c'est marrant, oui. Pire que la douleur physique.
04:28Mais sans foi, de toute façon, il y a des gens qui ont mal au thorax,
04:32enfin, tu vois, il y a des gens qui ont des douleurs physiques, de par un chagrin d'amour.
04:35Qu'est-ce que tu crois ?
04:36Oui, d'ailleurs, oui, il y a des conséquences physiques, ouais.
04:39Moi, j'avais eu un petit souci, j'étais parti à l'hôpital il y a une dizaine d'années,
04:44et pourtant, maintenant, on demande la fameuse question,
04:49si vous deviez situer votre douleur entre 1 et 10,
04:51et là, j'étais là, pourtant, je gueulais à 16.
04:55C'était vraiment, je n'étais pas bien, et l'infirmière, je me souviens très très bien,
05:00où elle avait peur, où elle n'osait pas, où, je ne sais pas, elle avait eu des consignes,
05:03j'en sais rien, enfin, bref.
05:05Puis, j'étais surtout pas en état de réfléchir,
05:07et j'étais vraiment, j'étais très très mal, très très très mal.
05:10Donc, il faut me donner...
05:11D'accord, je vais vous donner un tout petit peu de...
05:13Je pense que c'était de morphine, et vraiment, je disais,
05:14mais filez-moi la perf, que je la boive, que...
05:17Je... Vraiment, j'ai cru que j'allais y passer, quoi, de douleur, quoi.
05:21De douleur au cœur.
05:23Ah, relou.
05:24Ouais, et vraiment, j'avais un parpaing sur le cœur, quoi.
05:29Et je suis là, donc, finalement, on sait que ça s'est bien terminé.
05:33Sinon, je serais plus là.
05:36Merci, sinon je serais mort.
05:38Vous êtes contente, là ?
05:39Ah ben non, on va pas s'arrêter en si bon chemin.