Le jour où des lycéens ont jeté une porte du 4e étage sur leurs professeurs

Sud Radio

avant-hier

Avec Mégane, Professeur au lycée Saint-Hilaire à Étampes dans l’Essonne

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00:00Avec ce témoignage sur Sud Radio, celui d'une prof qu'on appellera Mégane, c'est un nom d'emprunt.

00:05Bonjour Mégane.

00:06Bonjour.

00:07Bienvenue sur Sud Radio.

00:09Merci beaucoup de nous avoir rejoints de si bon matin, d'autant plus que l'histoire que vous allez nous raconter

00:13est quand même assez traumatisante pour vous.

00:16Vous êtes prof, prof au lycée Saint-Hilaire, c'est à Étampes, c'est dans l'Essonne, un peu au sud de Paris.

00:22Il y a un peu plus d'un mois, c'est ça, vous étiez à l'extérieur de votre lycée, avec trois autres de vos collègues.

00:29Quand quelqu'un a crié « Attention », qu'est-ce qui s'est passé ?

00:33Alors en fait, on était sept collègues en train de fumer dans un coin fumeur,

00:39et en fait, tout d'un coup, du personnel de service qui passait par là, effectivement, a crié « Attention, attention »,

00:46parce qu'elles étaient un peu plus loin et elles ont vu, en fait, du quatrième étage de l'établissement,

00:50on était le long du mur, une porte, une grande porte, quoi, tomber sur nous.

00:57Oui.

00:59On a eu juste le temps de s'écarter, et en tombant, la porte a quand même heurté le dos d'une collègue.

01:06Oui, sachant que cette porte est tombée au milieu de votre groupe.

01:09En d'autres termes, trois élèves de 17 ans, manifestement, je crois que vous pouvez me le confirmer,

01:14ont jeté sur vous et votre groupe une porte qu'ils avaient sorti de ses gonds depuis le quatrième étage.

01:21C'est ça.

01:22Et ils vous avaient visé, clairement.

01:24Alors non, on ne peut pas le savoir, en fait.

01:27À ce stade-là, c'est l'enquête et le jugement, au terme de l'audience, qui le déterminera.

01:34Il y a des raisons de le croire.

01:37Eux, ils ont des arguments qui contre-argumentent ça.

01:42En fait, c'est assez délicat.

01:45Ils se défendent.

01:46Voilà, ce qui est logique de toute façon.

01:48Ce que vous pouvez confirmer, en tout cas, c'est qu'évidemment, vous avez été très choquée.

01:52Première question.

01:52D'abord, comment va votre collègue qui avait été blessé au dos ?

01:56Ça ne va pas super bien.

01:58Elle est arrêtée depuis cet incident, enfin cette agression, pardon.

02:02Et puis surtout, elle enchaîne les rendez-vous médicaux.

02:09Voilà, c'est assez lourd.

02:11Elle suit une thérapie post-traumatique qui lui coûte beaucoup d'argent.

02:16Parce qu'elle doit avancer plusieurs milliers d'euros de frais médicaux.

02:19Enfin, c'est un peu la double peine qui lui tombe dessus depuis cette agression.

02:25C'est-à-dire que clairement, elle s'est vue mourir.

02:27Et clairement, vous aussi, Mégane.

02:30Oui, oui.

02:30Et bien, franchement, à 10 centimètres près, elle le prenait sur la tête.

02:35Et vous, quelqu'un d'autre, et c'était fini.

02:37Et vous, comment vous allez ?

02:39C'est difficile, en fait.

02:41Parce qu'il y a le choc de ce jour-là.

02:46Et puis, il y a les suites aussi.

02:48De rien, la médiatisation.

02:50Et puis, on a été aussi éprouvés par la manière dont la justice et le parquet d'Evry nous a traités aussi.

02:57Parce qu'en fait, on était sept personnes à se retrouver sous la porte.

03:02Et au final, on a tous déposé plainte pour...

03:06À l'époque, c'était tentative d'homicide sur personne dépositaire de la fonction publique qui était retenue.

03:12Ça a été requalifié en agression aggravée.

03:14Mais l'audience, en fait, qui a eu lieu il y a une semaine, n'a retenu que la collègue blessée, en fait.

03:23En gros, la seule victime considérée par la justice au début, c'était celle qui avait été blessée physiquement.

03:29Physiquement, j'entends.

03:30Et pas les autres.

03:31Bon.

03:31C'est toujours le cas aujourd'hui ou pas ?

03:33Alors non, grâce à nos avocates, parce que nous, on a tous pris des avocates qui ont fait un très beau travail

03:43et qui sont allées, du coup, à l'audience pour essayer de faire entendre raison au parquet.

03:52Et la présidente du tribunal leur a donné raison et a demandé au parquet de renvoyer l'affaire

04:00et de nous considérer tous les sept comme des victimes, qu'elles soient physiques ou psychologiques.

04:05Alors ça, c'est pour cet incident.

04:06Mais est-ce que c'est vraiment le premier incident dans ce lycée Saint-Hilaire à Étampes, dans l'Essonne ?

04:11Alors, on est dans un lycée qui est calme, qui a bonne réputation, où il y a une ambiance plutôt chaleureuse.

04:18Donc, ce n'est pas un lycée où on subit des agressions.

04:22Tous les jours.

04:23C'est important de le dire, justement.

04:24Oui, oui.

04:25Voilà.

04:26Et vous, d'habitude, tout se passe bien.

04:27C'est la première fois qu'il y a un incident ?

04:30On a eu, il y a quatre ans à peu près, une intrusion dans le lycée d'un élève qui venait d'un autre département

04:37pour régler des conflits avec sa copine.

04:39Et ça avait dégénéré.

04:41En bagarre.

04:42qui avait été blessé en séparant les élèves qui voulaient agresser sa petite copine.

04:50C'était il y a quatre ans.

04:52C'était il y a quatre ans.

04:53Et depuis, alors c'est vrai que depuis quelques mois, il y avait quand même un jeu qui consistait

04:59à nous jeter dessus nous, les collègues qui étions co-infumeurs, des objets en direction

05:05de notre groupe, c'est aussi ce qui nous fait nous demander si c'était pas...

05:09On vous jetait quoi ?

05:10Cette porte, on nous jetait des boulettes de papier toilette mouillée.

05:15Ça, c'est un classique de potache.

05:17Oui.

05:17Mais là, ça allait un petit peu plus loin.

05:20C'est-à-dire qu'on recevait, on commençait à recevoir des objets plus lourds comme des bouteilles d'eau remplies,

05:25des cigarettes électroniques, même un balai de toilettes.

05:31Jeter de quel étage ?

05:33Toujours du quatrième étage, des toilettes du quatrième étage.

05:36Oui, c'était devenu certainement un jeu.

05:39Alors, on ne peut pas savoir si ce sont les mêmes élèves qui ont jeté la porte.

05:43Mais bon, il y avait clairement une sorte de défi qui est allé jusqu'à un point qui aurait pu être gravissime.

05:50Oui, d'ailleurs qui est gravissime, mais qui aurait pu être sans retour.

05:53Heureusement, ce n'est pas le cas.

05:56Je ne sais pas quoi vous dire, à part bon courage, Mégane, en fait.

05:59Parce que j'espère que vous allez pouvoir retourner en cours dans la meilleure des manières possibles,

06:05dans les meilleures conditions possibles,

06:06et qu'on arrivera surtout à faire comprendre à ces trois élèves de 17 ans

06:10qui ont jeté, je le rappelle, une porte de 16 kilos sur un groupe de preuves

06:14dont vous faisiez partie depuis le quatrième étage,

06:17mais qu'on arrivera à leur faire comprendre la gravité de leur acte.

06:20Bon courage, Mégane.

06:21Merci.

06:22À vous et à vos collègues surtout, d'autant plus que vous faites un beau métier,

06:26et c'est ça quand même qu'il faut retenir.

06:27C'est pour ça que vous ne devriez pas avoir à l'exercer dans ces conditions.

06:31Bon courage à vous.

06:32Il est 7h41.

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