- 20/06/2025
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00:0011h-13h, Pascal Praud sur Europe 1
00:03Le problème de la télévision, c'est comme lorsqu'on recevait Patrice Laffont,
00:13on lui proposait le générique des chiffres et des lettres,
00:17et il est possible que cet effet attendu lasse au bout d'un moment.
00:22Bonjour Thierry Beccaro !
00:24D'abord bonjour et merci de m'accueillir.
00:26Eh bien non, non, et je m'en voudrais d'être lassé d'entendre ça.
00:32Parce que j'ai interviewé pas mal de personnes dans ma carrière,
00:37dans ma jeune carrière, et parfois certains artistes me disaient
00:41« Ah non, non, non, mais là, là, là, ce titre-là, il y en a marre et tout ça. »
00:45Oui, mais je leur disais « Attendez, c'est grâce à ce titre-là que vous êtes ici aujourd'hui, quoi. »
00:50Il ne faut jamais oublier ça.
00:52C'est-à-dire que c'est le plus beau cadeau qu'on puisse vous faire,
00:55c'est de rester dans la mémoire des gens à travers un film, une pièce, un livre, une émission.
01:03Pascal, c'est tellement difficile.
01:06Le tout, ce n'est pas d'exister.
01:08Le tout, c'est de durer.
01:10C'est d'être là encore 5, 10, 15, 20, 30 ans après.
01:15Moi, j'ai quitté France Télévisions il y a maintenant 5 ans,
01:17et j'ai passé 35 ans de ma vie à la radio et à la télé,
01:22et si on me fait écouter le générique de Motus, il n'y a pas de souci.
01:27Je rajouterais même « Motus ».
01:29Bon, Thierry Beccaro est avec nous, il est 12h34, vous êtes sur Europe 1,
01:33et puis il y a ce lien que créent certains, et que ne créent pas d'ailleurs d'autres.
01:38La télévision, parfois, ne crée pas toujours un lien entre un animateur, une personnalité et le public.
01:42Mais vous, ce lien, il est fort.
01:44Et vous serez sur scène du 5 au 26 juillet au Festival Off d'Avignon pour « L'amour à la menthe ».
01:51Et « L'amour à la menthe », c'est votre histoire.
01:53C'est librement inspiré du livre « Je suis né à 17 ans »
01:57parce que vous avez raconté votre histoire,
02:00qui est une histoire particulière, une enfance.
02:04Si je dis une enfance saccagée...
02:06Oui, une journaliste avait écrit dans un journal que vous aimez beaucoup,
02:13là c'est une petite parenthèse,
02:15en quatrième de la dernière page,
02:20« L'enfance volée ».
02:21Oui, « L'enfance volée ».
02:22Oui, c'est un peu...
02:24Ça raconte l'histoire d'un rendez-vous raté, on va dire.
02:31Et il y en a beaucoup qui sont concernés.
02:33Et c'est pour ça que quand j'ai écrit ce livre « Je suis né à 17 ans »,
02:37je n'imaginais pas à quel point j'allais rencontrer
02:41d'autres frères de l'arme ou des sœurs de l'arme.
02:46C'est-à-dire que quand on raconte ce genre d'histoire,
02:49que j'ai eu du mal à raconter parce que je suis quelqu'un d'assez discret,
02:53je me suis aperçu que ce livre avait ouvert des portes incroyables,
02:58que tout à coup, moi qui me croyais seul à avoir vécu ce que j'avais vécu,
03:01eh bien, je rencontre dans les salons du livre, à la sortie des théâtres,
03:06à côté de là où je travaillais,
03:08des proches avec qui je travaillais depuis des années,
03:11qui venaient me voir discrètement pour me dire
03:13« Écoute, est-ce qu'on peut prendre un café ensemble ? »
03:15parce que j'ai connu ça.
03:17Et je me suis aperçu que des tas de gens ont vécu telle ou telle maltraitance,
03:23qu'elle soit physique, psychologique, qu'ils aient été négligés,
03:27qu'ils aient été oubliés.
03:30Et ce spectacle, « L'amour à la menthe », c'est pour ça que ce titre est merveilleux.
03:35Emmanuel Robert Espallieu a trouvé.
03:36Il est également que, comme je le dis dans le texte,
03:39ou comme Emmanuel le dit,
03:40« Nous sommes des anges, et on n'a pas le droit de taper les anges. »
03:44Alors vous êtes sur scène évidemment tout seul,
03:46et vous racontez ce qui est votre histoire.
03:48Moi, ce qui me frappe toujours,
03:50pour parfois rencontrer,
03:53c'est assez rare,
03:54quand heureusement que tout le monde n'a pas eu ces enfances-là,
03:56c'est que pour ceux qui ont une enfance dite classique,
04:02c'est très difficile à comprendre ce que vous avez vécu.
04:05Et je trouve que c'est la vie,
04:08l'expérience est intransmissible.
04:12Et en revanche,
04:13quand vous avez parlé de frères d'armes,
04:15je devine ce que c'est.
04:17Parce qu'au fond, vous ne pouvez vous exprimer
04:20qu'avec quelqu'un qui a eu cette enfance-là,
04:24et qui vous comprend.
04:25Les autres peuvent faire dire « je vous comprends »,
04:27bien sûr, ils le disent.
04:29Mais c'est de la même manière que lorsqu'on dit
04:31« je sais ce que c'est que la prison,
04:33je sais que ce n'est pas bon,
04:35que ça ne sent pas bon, etc. »
04:36Mais tant que tu n'y as pas été...
04:38Ce qui est intéressant dans ce que vous dites, Pascal,
04:41c'est que j'ai rencontré,
04:43quand je faisais la promotion du film,
04:45le film a été adapté du livre,
04:49et j'ai rencontré un jeune animateur en Belgique
04:52qui me dit
04:53« un mec super sympa ».
04:56Il me dit « Thierry, excusez-moi,
04:57mais j'espère que vous le prendrez pas mal,
04:59mais moi je n'ai pas vécu ce que vous avez vécu. »
05:03Mais je lui dis « mais attendez,
05:06je suis très très heureux pour vous, moi.
05:09Ne vous excusez pas d'avoir eu une enfance heureuse.
05:13Moi ce qui m'intéresse,
05:15c'est que ce que je vous dis vous alerte,
05:17et que tout à coup vous vous dites
05:20« Ah bah oui, ça existe,
05:21il y a 51 000 enfants qui meurent chaque année
05:24sous les coups d'un proche. »
05:27Voilà, c'est ça qui est intéressant.
05:28Et ce qui est intéressant,
05:30c'est que je sois à côté de vous,
05:32et que vous me regardiez,
05:33que vous vous disiez
05:33« il est plutôt pas mal reconstitué. »
05:36Mais en même temps,
05:37pour reconnaître parfois,
05:39avoir rencontré des gens qui ont souffert,
05:43c'est incroyablement présent.
05:45Je ne peux pas vous dire autre chose.
05:46C'est incroyablement présent
05:48dans chaque moment de la vie.
05:51Ça peut créer une forme défiance au monde,
05:54un rapport effectivement douloureux,
05:57un rapport où on a peur de s'engager,
06:00peur de se livrer,
06:01parce qu'on a été abîmé dans les premières années.
06:05Alors, je ne sais pas si vous,
06:06dans votre vie affective,
06:08vous avez eu peur de la relation à l'autre,
06:11peur de l'engagement.
06:12Pascal, vous avez tout...
06:13C'est formidable que vous avez tout résumé.
06:16J'ai eu l'occasion d'être écouté
06:18à l'Assemblée nationale
06:19par rapport aux violences éducatives ordinaires,
06:22les fameuses VEO.
06:23Et il y avait un médecin qui était là
06:25pour établir tout ce que pouvaient provoquer
06:28les coups,
06:30les coups sur un enfant.
06:31Et là, vous avez tout résumé,
06:32et je l'assume parfaitement.
06:35Moi, mon sac à dos est beaucoup plus léger
06:37que ce qu'il n'a été.
06:39Mais sachez que la maltraitance sur un enfant,
06:43ça provoque des addictions,
06:45ça provoque de la solitude,
06:47ça provoque la peur,
06:48la peur de ceci,
06:49la peur de cela,
06:50la peur de souffrir,
06:51la peur d'avoir peur,
06:53la peur...
06:54Et dans le texte,
06:55à un moment donné,
06:55vous verrez,
06:56il y a cette petite pirouette
06:57qui fait qu'à un moment donné dans ma vie,
06:59la croix verte,
07:01la croix verte,
07:03c'était devenue ma grande ours.
07:05Les addictions aux médicaments,
07:07ça peut être l'addiction à l'alcool,
07:09ça peut être des idées...
07:10Ce n'était pas votre cas.
07:11Non, non, non, ce n'est pas mon cas.
07:12Donc l'addiction que vous avez eue,
07:14c'était la croix verte,
07:15c'est ce que vous dites.
07:15La croix verte, oui.
07:16Les médicaments pour essayer parfois d'aller mieux,
07:18pour essayer d'apaiser...
07:20Mais ça ne se voyait pas du tout à l'antenne.
07:23C'est ça qui est sidérant.
07:24C'était poker fest, quoi, vous.
07:26Parce que quand vous voyez,
07:27vous êtes le plus gentil du monde...
07:29Oui, alors je vais dire joker face.
07:31Oui.
07:32Non, mais c'était incroyable.
07:33Personne n'aurait pu...
07:34Quoi, on ne peut jamais imaginer...
07:36De toute façon, c'est idiot ce que je dis,
07:37on ne peut jamais imaginer la vie des uns et des autres.
07:39Mais ça ne se...
07:40On ne le percevait pas.
07:42Je vais tout vous dire, Pascal.
07:43J'ai eu la chance sur mon chemin,
07:45voilà, depuis mes 17 ans,
07:47de rencontrer des gens qui m'ont tendu la main.
07:49Je les saisis, cette main.
07:51Et j'ai travaillé, entre autres,
07:52avec une femme remarquable,
07:54qui était Macha Béranger.
07:55Et Macha, Macha Béranger faisait une émission la nuit.
07:58Sur France Inter, allô Macha.
08:00Sur France Inter, oui.
08:01Que nous écoutions, moi j'adorais ça.
08:02Pour les sans-sommeil, bien sûr.
08:04Les jeunes étudiants qui travaillaient la nuit.
08:06Et elle s'adressait à ceux qui ne dormaient pas la nuit,
08:10qui étaient seuls,
08:11qui étaient parfois en mauvaise santé,
08:14qui étaient dans la détresse.
08:16C'est moi qui sélectionnais les appels.
08:17Et tous les appels ne passaient pas à l'antenne.
08:22Et parfois, des appels déchirants...
08:25Alors parfois, j'étais tout minot.
08:26Je rentrais chez moi, j'étais dévasté.
08:29Oui, mais ça, écoutez ces gens-là,
08:31écoutez la solitude,
08:33écoutez la détresse,
08:34écoutez le désarroi des gens
08:38entre minuit et trois heures du matin.
08:40Et là, vous vous dites,
08:41« Il y a des gens qui souffrent beaucoup plus que moi. »
08:45Alors ceux-là, je vais leur apporter du sourire.
08:48Je vais faire l'inverse.
08:49Je vais faire comme dit Boris Cyrulnik.
08:51Je vais transformer ce malheur
08:52en un merveilleux malheur.
08:55Et c'est ce que j'ai voulu faire
08:56quand je suis arrivé à France Télévisions.
08:59C'est-à-dire qu'on va donner du sourire,
09:02on va faire ou poker face ou joker face.
09:05Et mes problèmes, je vais les garder,
09:06je vais les régler de mon côté.
09:08Mais je vais faire en sorte que
09:10ceux avec qui je vais jouer,
09:13par exemple à Motus
09:15ou à Télématin.
09:18Je vais leur donner du plaisir.
09:19Parce que parmi ces gens-là,
09:21ceux qui sont venus jouer avec moi,
09:23il y avait certainement des gens
09:24qui étaient dans des souffrances
09:25bien plus terribles
09:27que celles que j'ai pu vivre.
09:30Thierry Beccaro était avec nous.
09:31Vous êtes sur Europe 1, il est 12h43.
09:33Alors je rappelle que vous avez été
09:34présentateur de Motus de 90 à 2019.
09:37Vous avez commencé votre carrière,
09:38vous venez de le dire,
09:38à Radio France en 78.
09:41Vous avez été reporter pour Radio Bleu.
09:44Vous avez animé les matinées,
09:45les débuts d'après-midi sur Radio France.
09:47Vous avez été un peu sur TF1,
09:50la une chez vous.
09:51Et puis à partir de 84,
09:52vous étiez à EQUILX.
09:54Cadence 3.
09:55En 87, matin bonheur,
09:58jusqu'en janvier 90.
09:59Et puis au cours de l'été 88,
10:00l'occasion du Tour de France à la voile.
10:03Vous étiez...
10:03Mais attendez, c'est plus un dossier,
10:05c'est des archives.
10:07Exactement.
10:07Mais je vais quand même lire
10:08quelques petits extraits de la pièce
10:09parce que vous jouez sur scène.
10:12Forcément, quand je les regardais partir,
10:15le visage coincé entre deux barreaux de la grille
10:17de chez mes mères
10:18et que je leur tirais la langue,
10:20c'était ma mitraillette à moi,
10:21l'arme des enfants contre les grands.
10:23Je leur en voulais de m'abandonner.
10:25En même temps, j'étais bien chez mes mères.
10:27C'était le temps où le temps n'existait pas.
10:29C'est joli ça.
10:29C'était le temps où le temps n'existait pas,
10:31justement.
10:31Le temps où les jours n'avaient pas de nom
10:33jusqu'à ce que ce jour arrive.
10:35Il s'appelait Dimanche.
10:38Mes mères m'avaient prévenu.
10:39Ça va énerver ton père.
10:40Il faut dire que du côté de la famille de maman,
10:42ils ne l'aimaient pas beaucoup, le Rital.
10:44Malgré tous les efforts pour leur plaire,
10:46un bon boulot, toujours le mot pour rire,
10:48tirer à quatre épingles,
10:49une belle gueule à la Don Diego,
10:51à la Don Diego de la Vega,
10:52avec ça.
10:53C'était Zorro qui rentrait tous les soirs.
10:55Enfin, que j'aurais aimé le voir rentrer tous les soirs.
10:59Mais il est où ce père aujourd'hui, à votre avis ?
11:03Je l'ai accompagné.
11:05Je l'ai accompagné.
11:06Comme j'ai accompagné ma mère.
11:08C'est pour ça que je suis...
11:09Ce spectacle que vous verrez,
11:11est un spectacle fort, drôle.
11:15Parce qu'il y a des moments, forcément,
11:17où c'était drôle.
11:18Où il y avait des...
11:19Je parle à ma petite sœur.
11:21Ma petite sœur qui était témoin
11:23de ce que je vivais,
11:25sans qu'elle ne soit jamais touchée.
11:28C'est ça qui est fou.
11:30Et puis, il y a mes mères à venir.
11:32Pourquoi ?
11:33Pourquoi ?
11:33Parce que si vous venez voir le spectacle,
11:35Pascal...
11:36Pourquoi, à votre avis ?
11:37Pourquoi ?
11:37Moi, je le sais,
11:38mais il faut que vous venez voir le spectacle
11:39pour comprendre ce qui s'est passé.
11:41Et en même temps, c'est...
11:43Je n'ai aucun...
11:47Il n'y a pas d'amertume.
11:48Il n'y a pas d'idée de revanche.
11:51Il n'y a pas de...
11:53Je pense à eux.
11:54Je pense à eux.
11:55Je pense que...
11:55Quelqu'un m'a dit un jour, tu sais,
11:57tu es venu ici, tu es venu sur Terre.
12:00Tu es venu chez tes parents.
12:01Ils t'ont montré ce qu'il ne fallait pas faire.
12:06Mais ce qui est vrai,
12:07et parfois, je perçois ça aussi,
12:09pour avoir entendu des adultes,
12:13aujourd'hui,
12:14mais qui ont souffert de ce dont vous avez souffert,
12:17curieusement,
12:18il n'y a pas de haine.
12:19Il n'y a pas forcément de rancœur.
12:22Il peut y avoir une tristesse.
12:23Il y a une présence.
12:25Mais il n'y a pas non plus de pardon, d'ailleurs.
12:27Et je ne sais pas exactement décrire
12:30le sentiment, dans ces cas-là,
12:32qui anime.
12:33Mais voilà, il y a...
12:35Je vais vous répondre.
12:38Et ça va s'enchaîner très bien.
12:41Je n'ai pas le choix.
12:42Je le dis dans les pièces, à un moment donné.
12:45Si je veux continuer d'avancer, de vivre,
12:47il faut que je fasse avec.
12:49Je ne vais pas rester.
12:51Et malheureusement,
12:52certains que j'ai rencontrés restent
12:53avec cette espèce de...
12:55Non, non, moi, je ne pardonne pas.
12:57Je reste avec...
12:58Mais si vous restez avec tout ça sur l'estomac,
13:01vous vous auto-dévorez.
13:04Jamais je ne peux faire
13:05le quart de ce que j'ai fait
13:08à la télévision.
13:09Si je reste avec tout ce poids
13:12sur l'estomac,
13:14je ne peux pas...
13:14faire le quart de ce que j'ai fait
13:18sur scène, au théâtre,
13:20lire de la poésie,
13:22jouer tous les auteurs
13:24que j'ai joués,
13:25et puis surtout,
13:27me dire que ceux qui viendront me voir
13:29au théâtre de l'Oriflam,
13:31dans ce seul en scène
13:33qui est mis brillamment en scène
13:35par Anouche Tadbon,
13:37et je tiens à l'embrasser très fort,
13:39parce qu'on fait vraiment un travail
13:41de...
13:43Vous savez,
13:43comme je dis souvent,
13:44si vous jouez aux fléchettes,
13:46si vous voulez toucher,
13:47c'est dans le mille.
13:49Ce n'est pas à droite,
13:50ce n'est pas à gauche,
13:51ce n'est pas en haut,
13:51ce n'est pas en bas,
13:52c'est...
13:53Et ce que je souhaite,
13:54moi,
13:55c'est que les gens
13:55qui viennent voir
13:56L'Amour à la Monte,
13:57tout à coup repartent
13:58en se disant
13:58« Waouh ! »
14:01Voilà.
14:01Forcément,
14:02ils seront touchés
14:03à 12h47,
14:04je le dis,
14:05c'est Thierry Beccaro
14:06qui est avec nous
14:06depuis quelques minutes,
14:08et je rappelle
14:08L'Amour à la Monte
14:09du 5 au 26 juillet,
14:10c'est au Festival
14:11Of Davignon,
14:12c'est évidemment très émouvant,
14:13chacun connaît évidemment
14:14son histoire,
14:15et je lis quelques passages
14:16de cette pièce,
14:18« Papa,
14:18je pleure,
14:19parce que j'ai 5 ans
14:20et que j'ai peur,
14:21je pleure,
14:22parce que j'en ai 10
14:23et que je ne comprends
14:24toujours pas,
14:25je pleure,
14:26parce que j'en ai 15
14:27et que c'est injuste,
14:29je pleure,
14:29parce que j'ai 17 ans
14:31et que tu es toujours
14:32en colère,
14:33je pleure parce que
14:34je meurs de chagrin,
14:35de douleur et d'ennui
14:36depuis toutes ces années,
14:38je pleure parce que
14:39je suis grand
14:39et que depuis tout petit
14:41je n'ai rien fait,
14:43je pleure parce que
14:44ça sentira toujours
14:44la menthe,
14:45même quand il ne sera plus là,
14:46je pleure parce que
14:47je suis un ange
14:48et qu'on n'a pas le droit
14:49de taper les anges,
14:50je pleure parce que
14:51j'ai les ailes brisées
14:53et que des ailes,
14:54c'est difficile à remplacer.
14:57Je m'assure,
14:57en lisant ça,
14:58ça te renvoie
15:00à ta propre enfance,
15:01moi j'ai eu de la chance
15:02d'avoir mes parents,
15:03je pense qu'ils m'aimaient bien
15:04et à chaque fois
15:06que j'entends
15:08ces témoignages
15:08de ces enfances
15:10que nous,
15:10on n'a pas vécu,
15:12je trouve que c'est...
15:13On a du mal à croire
15:14que ça puisse exister.
15:15On a des enfants nous-mêmes
15:16et on se dit
15:17mais la nature humaine
15:19est si étrange.
15:19Mais si vous saviez
15:20le nombre de personnes
15:21qui vont se retrouver
15:23dans ce que je vais évoquer
15:26parce que je vais peindre
15:28la toile de ma vie...
15:29On sait combien ?
15:30On a des statistiques,
15:31par exemple.
15:32On sait qu'il y a
15:3251 000 enfants
15:34qui meurent
15:35chaque année.
15:36Il y a un enfant
15:36qui meurt tous les 5 jours
15:38sous les coups
15:38de ses parents.
15:40On sait qu'il y a
15:40un numéro de téléphone,
15:41le 119,
15:43que les enfants
15:44peuvent appeler
15:45ou les proches
15:46ou le petit copain
15:47de l'école
15:49qui s'aperçoit...
15:50Est-ce que vous pensez
15:52par exemple
15:52qu'aujourd'hui
15:53la sensibilisation
15:56du plus grand nombre
15:57fait que ces choses-là
15:59existent moins ?
16:00Par exemple,
16:01dans votre cas,
16:02si vous aviez
16:025 ans,
16:0310 ans aujourd'hui,
16:04est-ce que les voisins
16:05qui ne parlaient pas avant
16:06peut-être parleraient ?
16:07Parce qu'il n'y avait pas
16:08que la famille
16:09qui savait.
16:10Qui était témoin de cela ?
16:11A l'école,
16:12j'imagine,
16:12on le devinait.
16:13Bien sûr.
16:14Et les professeurs
16:15n'ont rien fait.
16:16Ce qui est intéressant
16:17dans ce que vous dites,
16:18c'est que moi,
16:19ce que je raconte,
16:19ça se passe au XXe siècle.
16:21On est en 1970-80.
16:25Là, aujourd'hui,
16:26c'est exactement
16:27la même chose.
16:28Vous croyez ?
16:29Ah ben,
16:30si vous...
16:31Moi,
16:31je vous écoute,
16:33je vous regarde,
16:34je suis un peu
16:35les infos,
16:37les infanticides,
16:39c'est régulier.
16:41Donc,
16:42les campagnes
16:43de sensibilisation
16:44ne servent à rien ?
16:44Le problème,
16:46il est que,
16:47en général,
16:47on parle des féminicides.
16:48On parle beaucoup
16:50des féminicides
16:50et ça,
16:51c'est vraiment
16:51un vrai,
16:53vrai problème,
16:53régulièrement.
16:55Et on oublie
16:55à chaque fois
16:56que quand il y a
16:57une femme
16:57qui meurt
16:58sous les coups
16:58de son mari,
16:59juste à côté,
17:00il y a les enfants.
17:02Il est 12h50,
17:02je suis obligé,
17:03malheureusement,
17:04de vous interrompre
17:06parce que
17:06c'est passionnant.
17:07D'ailleurs,
17:08on pourrait rester
17:08vraiment plus longtemps.
17:11On vient de parler
17:11de 20 minutes
17:12d'un sujet
17:12qui est essentiel.
17:13Oui,
17:13ça,
17:14c'est un sujet
17:14qui me paraît essentiel.
17:15Mais on s'en sort.
17:16Ça n'a pas existé.
17:17Bien sûr,
17:17l'amour à l'amende.
17:18On s'en sort, Pascal.
17:18Mais bien sûr,
17:20bien sûr,
17:20l'amour à l'amende
17:21du 5 au 26 juillet
17:22au Festival
17:23Off d'Avignon
17:25et nous étions
17:26avec Thierry Beccaro.
17:28Vous avez un avantage,
17:29parfois,
17:29je peux vous envoyer,
17:30c'est que tout le monde
17:30vous aime.
17:33Et en général,
17:34on rajoute
17:35que c'est louche.
17:36Tout le monde
17:37vous aime.
17:37Et alors là,
17:38moi,
17:38ce n'est pas toujours le cas.
17:40Il est 12h51.
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