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  • 12/06/2025
Le 12 juin, la commission des affaires sociales du Sénat recevait Jean Leonetti, auteur de la loi Leonetti de 2005 sur la fin de vie et co-auteur de la loi Claeys-Leonetti de 2016. Les échanges se sont concentrés sur la proposition de loi sur l’aide à mourir, adoptée à l’Assemblée nationale le 27 mai et sur la proposition de loi visant à garantir l’égal accès de tous à l’accompagnement et aux soins palliatifs, elle aussi adoptée par la chambre basse le 27 mai. Jean Leonetti a exprimé son opposition à la première proposition de loi qui institue un droit à l’aide à mourir pour un malade “atteint d’une affection grave et incurable qui engage son pronostic vital en phase avancée ou terminale”. L’ancien député se base sur un principe simple pour exprimer son opposition : “L’Homme ne donne pas la mort à l’autre”. Il avance que la loi est “une porte ouverte” à des dérives et que “très peu de médecins considèrent que donner la mort est un soin”. Il considère que plutôt que légiférer sur l’aide à mourir, il est nécessaire “de donner les moyens et affirmer la volonté politique de développer les soins palliatifs”. Selon lui, “on va peut-être dans le sens de la liberté individuelle mais on ne va pas dans le sens de la fraternité”. Revivez ces échanges. Année de Production :

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Transcription
00:00:00Bonjour à tous, soyez les bienvenus dans 100% Sénat, l'émission qui vous fait vivre le cœur du travail parlementaire.
00:00:17Tout de suite, on vous emmène en commission des affaires sociales.
00:00:20Les sénateurs auditionnent Jean Léonetti, ancien député, aujourd'hui maire les Républicains d'Antibes.
00:00:26Il a été à l'origine de deux textes de loi qui ont renforcé le cadre de la fin de vie en France.
00:00:31C'est justement à ce sujet que les sénateurs souhaitent l'entendre,
00:00:34parce qu'ils vont examiner eux-mêmes deux propositions de loi votées à l'Assemblée sur l'aide active à mourir
00:00:39et le renforcement des soins palliatifs. On regarde.
00:00:44Bon allez, mes chers collègues, nous allons débuter cette audition.
00:00:47Donc, c'est la première audition concernant nos travaux sur la profession de loi relative aux droits à l'aide à mourir
00:00:58et la profession de loi visant à garantir l'égal accès de tous à l'accompagnement et aux soins palliatifs.
00:01:03Je vous rappelle que ces textes ont été adoptés par l'Assemblée nationale le 27 mai dernier
00:01:07et donc ils seraient logiquement inscrits lors du jour du Sénat à la rentrée à l'automne prochain.
00:01:12Je vous rappelle que la Commission a désigné hier ses rapporteurs, Christine Bofortido,
00:01:18ça que j'excuse, puisqu'on a un peu improvisé les horaires, donc le jour, donc elle a été déjà engagée,
00:01:25et Alain Minon sur la proposition de loi relative aux droits à l'aide à mourir,
00:01:28et Jocène Guides et Flans, la Sarade, sur la proposition de loi visant à garantir l'égal accès à tous,
00:01:34notamment concernant les soins palliatifs.
00:01:36Dans ce cadre, nous sommes heureux de rencontrer et d'accueillir ici Jean Leonetti,
00:01:43donc je ne le présente plus, vous le connaissez tous,
00:01:47et nous avons eu l'occasion notamment d'accompagner ces travaux lors des lois de 2005 et 2016
00:01:53qui vont déjà poser un cadre concernant notamment le droit des malades et concernant notamment la fin de vie.
00:02:01Je vous précise que cette audition fait l'objet d'une captation vidéo retransmise en direct sur le site du Sénat
00:02:05qui sera ensuite disponible en vidéo à la demande.
00:02:09Voilà, donc M. Leonetti, d'abord merci d'avoir répondu à notre invitation.
00:02:14Donc nous avons, généralement nous aurons deux temps d'échange, un avec Jean Leonetti et un autre avec Alain Claes.
00:02:20Donc nous verrons en tous les cas les deux auteurs de la loi de 2005 et 2016,
00:02:25et nous vous souhaitons surtout avoir aujourd'hui un retour sur votre regard sur les évolutions législatives que proposent ces deux textes,
00:02:34nous dire un peu si ces évolutions portées par les lois portent notamment sur une évolution
00:02:40et donc notamment sur les enjeux autour de ce que vous aviez vous proposé à l'époque,
00:02:47qui était la sédation profonde et continue jusqu'au décès.
00:02:49Est-ce que, voilà, avec à la fois votre regard sur le texte actuel, mais peut-être avant même de parler du texte actuel,
00:02:57moi la question que j'aimerais poser en premier lieu, c'est savoir si déjà les lois Claes-Clenetti sont suffisamment aujourd'hui connues
00:03:04et suffisamment déployées sur le territoire national, alors que nous abordons déjà une phase suivante.
00:03:10Voilà. Je vais arrêter là cette introduction, je vais vous laisser, je vais vous donner la parole,
00:03:14et ensuite nos rapporteurs puis les commissaires seront amenés à vous solliciter pour des questions. Voilà.
00:03:22Merci.
00:03:23Merci, M. le Président, merci à vous tous, merci de me faire l'honneur de cette audition.
00:03:30Sur un sujet sur lequel ma fausse modestie m'oblige à dire que j'ai toujours pas les réponses à toutes les questions,
00:03:39et je pense que dans ce domaine, il vaut mieux avoir des doutes que des certitudes.
00:03:46Donc, juste un mot pour rappeler la philosophie des textes actuels, antérieurs.
00:03:552005, c'est un triptyque qui dit « je ne t'abandonnerai pas, je ne te laisserai pas souffrir, je ne te prolongerai pas de manière anormale ».
00:04:04Et donc, c'est une loi qui a la petite révolution, le grand changement.
00:04:12C'est la condamnation de l'obstination des raisonnables et de l'achatement thérapeutique,
00:04:17avec l'autorisation d'arrêter des traitements salvateurs ou de ne pas les mettre en œuvre.
00:04:25Donc, c'est « je ne te prolongerai pas anormalement ».
00:04:29Le deuxième, c'est « je ne te laisserai pas souffrir ».
00:04:32Et peut-être qu'à cette époque-là, personne ne l'avait vraiment perçu,
00:04:36mais il y a écrit dans le texte qu'on doit soulager la souffrance en fin de vie,
00:04:41même si cela doit accélérer la mort.
00:04:44C'est bien dire que la qualité de la vie prime sur la durée de la vie au fur et à mesure qu'on se rapproche
00:04:50de la fin.
00:04:54Et on verra tout à l'heure qu'un des problèmes, c'est le pronostic vital,
00:04:59engagé ou non engagé, à court terme ou à moyen terme.
00:05:03Donc, ces trois éléments-là sont inscrits dans la loi.
00:05:09On y ajoute, vous le savez, la personne de confiance et les directives anticipées.
00:05:14C'est remodelé ensuite en 2016.
00:05:17Je ne vais pas dire du mal de la loi de 2016, mais je rappellerai qu'elle corresponde
00:05:21à un engagement du président de la République à leur candidat.
00:05:25Et François Hollande avait dit qu'il souhaitait, dans une phrase qui pouvait être interprétée
00:05:30de deux façons, que les adultes, les personnes adultes puissent bénéficier d'une fin de vie
00:05:37digne avec un accompagnement médical.
00:05:39Et le mot dignité, dont vous connaissez l'ambiguïté et la récupération, fait qu'un certain
00:05:47nombre de gens pensent que c'est une proposition d'euthanasie.
00:05:50Les autres pensent que c'est un développement des soins palliatifs.
00:05:54Et finalement, le président de la République désigne à l'Inclès, dans la majorité à l'époque,
00:05:59et moi-même dans l'opposition, pour rédiger un texte qui aboutit sur la base d'un rapport
00:06:08qui disait qu'on mourait encore mal en France et avec des souffrances physiques, même dans
00:06:16les dernières heures de la vie, ce qui est le vrai scandale, puisqu'il y avait 12% à
00:06:22cette époque-là, je n'ai pas les chiffres aujourd'hui, 12% à l'assistance publique
00:06:27des hôpitaux de Paris, donc ce n'est quand même pas une mauvaise référence, qui souffraient
00:06:33de douleurs insupportables dans les heures qui précédaient leur mort.
00:06:37Et puis de l'autre côté, il y avait la parole du malade qui n'était pas écoutée, en particulier
00:06:42les directives anticipées, qui n'étaient pas considérées par les équipes médicales.
00:06:49C'est pour ça qu'elles deviennent opposables dans le deuxième texte de 2016, et c'est
00:06:54pour ça qu'on a introduit à la demande du malade la sédation profonde et continue jusqu'au
00:06:58décès, qui est déjà une pratique dans les soins palliatifs, ce n'est pas une invention
00:07:02législative.
00:07:05La sédation, ça existe, elle peut être temporaire, elle peut être profonde, elle peut être
00:07:09légère.
00:07:09Les sédatifs, c'est un élément majeur avec les ontalgiques dans les problématiques
00:07:15de souffrance en fin de vie.
00:07:18Dans ce contexte-là, en toute fin de vie, je dirais lorsque le pronostic vital est engagé
00:07:25à court terme, c'est le mot qu'on a utilisé, on se trouve dans une situation dans laquelle
00:07:30on ne va pas endormir le malade, puis le réveiller, puis le rendormir, puis le réveiller
00:07:34pour vérifier toutes les trois heures ou toutes les six heures s'il continue à s'offrir
00:07:39ou pas.
00:07:39Et donc il était logique de laisser la sédation se poursuivre et laisser la mort survenir
00:07:44pendant le sommeil.
00:07:46Au passage, vous le savez, c'est le rêve, entre guillemets, de tous les Français, mais
00:07:51même de tout l'Occident, qui s'est progressivement déchristianisé, d'avoir une mort pendant le sommeil,
00:07:59c'est-à-dire la mort qu'on ne voit pas venir, la mort qui vous surprend et qui donc ne vous
00:08:06entraîne pas l'angoisse de l'imminence de la fin tragique.
00:08:11Donc voilà les textes qui arrivent à cette époque-là.
00:08:15Ils sont votés à l'unanimité.
00:08:17Je dois dire avec sincérité que le premier est véritablement voté à l'unanimité, parce
00:08:22que c'est un travail parlementaire très long, de 18 mois d'audition, de réflexion,
00:08:28et que le groupe de députés à l'époque co-signe un projet de loi, une proposition
00:08:34de loi qui n'est pas un projet de loi et qui ensuite est validée, bien sûr, au Sénat
00:08:40dans un contexte paradoxalement moins serein, parce que le Sénat reçoit un projet auquel il
00:08:50n'a pas véritablement participé.
00:08:52Mais finalement, les deux votes se font de manière unanime.
00:08:55Le deuxième vote en 2016 se fait de manière unanime.
00:08:59Mais je dois dire que si je suis totalement sincère, c'est parce que le président François
00:09:03Hollande décide que le texte qui est proposé par les deux députés est validé par l'Elysée,
00:09:15validé donc aussi par Manuel Valls et le gouvernement.
00:09:21Et donc, je dirais qu'un certain nombre de personnes auraient voulu aller plus loin ou ailleurs.
00:09:30Le plus loin ou ailleurs, c'est aujourd'hui.
00:09:33Voilà.
00:09:34En réalité, on a fait des lois pour les gens, comme le disait un sénateur intelligent,
00:09:40comme beaucoup de sénateurs.
00:09:41il disait, vous avez fait des lois pour les gens qui vont mourir.
00:09:47Est-ce qu'il faut faire des lois pour les gens qui veulent mourir ?
00:09:50Et c'est tout le débat et c'est toute la question.
00:09:53On a bien sûr cheminé sur la ligne étroite, la crête étroite,
00:09:59qui consistait à...
00:10:00J'ai le droit de soulager, même si ça peut, par voie de conséquence, accélérer la mort.
00:10:07J'ai le droit de ne pas mettre en œuvre ou d'arrêter un traitement salvateur,
00:10:11arrêter un respirateur.
00:10:14J'ai pas le droit d'arrêter les soins, parce que j'accompagne mon malade jusqu'au bout.
00:10:17Mais pour autant, je ne donne pas délibérément la mort.
00:10:22Et donc, cet élément-là, pourquoi on ne l'a pas fait ?
00:10:25Parce que c'est, à mes yeux, une triple rupture.
00:10:28La première rupture, c'est une rupture médicale.
00:10:31Bien sûr, il n'y a pas très peu, en tout cas, de médecins,
00:10:35et en tout cas pas ceux des soins palliatifs,
00:10:37qui considèrent que donner la mort est un soin.
00:10:39Donner la mort, c'est l'arrêt des soins par la mort donnée.
00:10:43Le deuxième problème, c'est qu'on voit bien qu'on reste dans le code civil,
00:10:48mais on est presque dans le code pénal.
00:10:50On cherche une excuse légale, un peu comme la légitime défense,
00:11:01pour dire, dans telles circonstances, on peut envisager de donner la mort.
00:11:06C'est, au fond, la mort par compassion
00:11:09qui, effectivement, rend l'homicide,
00:11:14puisque c'est le terme utilisé dans notre droit acceptable,
00:11:19dans certaines conditions.
00:11:21Donc, on voit bien qu'on sort un peu du code civil,
00:11:23qu'on flirte avec le, si je me permets cette expression,
00:11:26avec le code pénal,
00:11:28et que dans cette situation,
00:11:30on a aussi une transgression,
00:11:31qui est une transgression significative.
00:11:34Je rappelle que le Sénat, dans un temps,
00:11:36et à l'occasion d'une situation sur une secte
00:11:42qui avait entraîné le suicide,
00:11:44avait interdit l'incitation au suicide.
00:11:48Et donc, on est, bien entendu, dans une société
00:11:52qui essaye d'éviter de donner la mort
00:11:56et éviter que la mort soit choisie comme issue dans le désespoir.
00:12:03La situation, donc, aboutit à ce que,
00:12:10dans ce contexte, il y a une troisième transgression qui est majeure,
00:12:15c'est la transgression anthropologique.
00:12:19Je conçois que ceux qui croient au ciel
00:12:22pensent que Dieu a donné la vie
00:12:24et qu'il est le seul maître pour la retirer.
00:12:27Mais dans le domaine des hommes,
00:12:31et si le ciel est vide,
00:12:32je pense que l'homme ne donne pas la mort à l'autre.
00:12:37Badinter le disait,
00:12:38dans une démocratie, on ne donne pas la mort.
00:12:41Et on ne donne pas.
00:12:41Il ne le disait pas à propos de la peine de mort.
00:12:44Il le disait à propos des auditions
00:12:46que nous avons eu la chance d'avoir avec lui sur ce sujet.
00:12:50Donc, qu'est-ce que c'est
00:12:51qui sont les problèmes aujourd'hui ?
00:12:54C'est ce type de transgression.
00:12:57Dans un conflit de valeurs
00:12:59qui est toujours l'éthique
00:13:00entre l'autonomie de la personne qui dit
00:13:04je veux, c'est mon choix,
00:13:06et la solidarité collective qui dit
00:13:08je te protège, nous te protégeons, malgré toi,
00:13:12l'exemple du suicide est assez significatif.
00:13:16Quelqu'un qui arrive
00:13:17et qui a tenté de se suicider à l'hôpital,
00:13:21évidemment, il a fait un choix.
00:13:22Évidemment, il a fait plus qu'un choix
00:13:24puisqu'il a exécuté son choix.
00:13:26Et même s'il a écrit
00:13:29une lettre d'adieu en disant
00:13:31toutes les raisons pour lesquelles
00:13:33sa souffrance était insupportable
00:13:34et que la vie ne valait plus la peine d'être vécue,
00:13:37les médecins qui vont le recevoir
00:13:38vont le réanimer.
00:13:40Et donc, on voit bien qu'il y a une contradiction.
00:13:42On voit bien que si on est dans la logique pure
00:13:44de l'autonomie, on dit
00:13:45il a choisi de mourir, on va le laisser mourir.
00:13:48Je dirais même qu'on peut,
00:13:50comme la loi le suggère d'ailleurs,
00:13:52aujourd'hui, on peut accélérer,
00:13:57compléter la thérapeutique,
00:13:59la loi actuelle qui a été votée à l'Assemblée nationale,
00:14:02pas la loi telle qu'elle est aujourd'hui.
00:14:05Donc, on peut imaginer ça,
00:14:07mais en même temps,
00:14:08on voit bien que le collectif protège
00:14:10et il dit
00:14:11nous allons te donner une chance d'espérance.
00:14:13Si je décide que ma vie
00:14:18ne vaut pas la peine d'être vécue
00:14:19et que je relis le mythe de Sisyphe de Camus
00:14:22qui dit que c'est le seul sujet philosophique valable,
00:14:27je décide que ma vie ne vaut pas la peine d'être vécue,
00:14:29je vais me jeter dans la scène.
00:14:31Si je dis ça au président,
00:14:32si je dis ça à Alain,
00:14:34si je dis ça à n'importe qui d'entre vous,
00:14:36vous allez essayer de m'en dissuader.
00:14:39Et vous allez essayer de m'empêcher.
00:14:41J'espère.
00:14:41Oui, je suis au Sénat,
00:14:43donc je ne suis pas à l'Assemblée nationale,
00:14:44donc je ne peux pas imaginer
00:14:46qu'une personne puisse me pousser à l'eau.
00:14:51Voilà, donc,
00:14:52cette ambiguïté,
00:14:54elle existera toujours
00:14:55avec quelques éléments supplémentaires
00:14:58que nous connaissons.
00:14:59C'est que,
00:15:00est-ce que nous sommes dans les conformités de la République ?
00:15:03Liberté, égalité, fraternité.
00:15:04Et au fond, on pourrait dire presque
00:15:05la liberté, c'est de choisir sa mort,
00:15:08la fraternité, c'est d'apporter l'aide
00:15:11pour qu'on change d'avis.
00:15:13Parce que dans la vie,
00:15:15la liberté, c'est de changer d'avis.
00:15:16Est-ce que cette liberté est une vraie liberté ?
00:15:19Est-ce qu'on se suicide par liberté
00:15:21ou est-ce qu'on se suicide par désespoir ?
00:15:25Bien sûr, ceux qui arrivent à l'hôpital
00:15:26et qui ont tenté de mettre fin à leur jour,
00:15:29généralement, c'est le désespoir.
00:15:31L'impossibilité de voir le futur
00:15:33et préférer le néant au futur
00:15:35est un signe de grand désespoir.
00:15:39Après, est-ce qu'il y a une part de liberté ?
00:15:41Quelqu'un qui est heureux, jeune, riche,
00:15:45entouré, épanoui,
00:15:47et qui un matin se lève en disant
00:15:50« J'ai lu le mythe de Sisyphe
00:15:51et j'estime que ma vie n'a pas la peine d'être vécue
00:15:53et je vais mettre fin à mes jours »,
00:15:56il n'y en a pas.
00:15:58Donc, cette liberté est une liberté
00:16:01un peu déviée de son objectif.
00:16:05Et le dernier point, c'est qu'une société
00:16:08qui dit à ceux-là,
00:16:10ceux-là ont droit à dire qu'ils peuvent mourir,
00:16:14et je suis assez triste de voir
00:16:17qu'on y met toujours des maladies dégénératives,
00:16:21comme si on passait le message
00:16:23aux gens qui ont une maladie de Charcot,
00:16:25« Nous, si on était vous,
00:16:29on n'accepterait pas de vivre cette misère
00:16:31et on se donnerait la mort. »
00:16:32Alors que le message qu'une société doit dire,
00:16:35c'est « Ce que tu es,
00:16:37tu le vaux par toi-même,
00:16:39ta dignité n'est pas altérée avec tes forces,
00:16:42et pour autant, on va continuer
00:16:43à te donner le goût à la vie,
00:16:45parce que c'est notre fraternité qui existe. »
00:16:48Enfin, le dernier point, c'est l'égalité.
00:16:50Vous savez tous qu'il y avait un département
00:16:52qui n'a pas de soins palliatifs.
00:16:53Je n'ai rien contre les lois
00:16:56qui réaffirment qu'il doit y avoir
00:16:58des soins palliatifs dans tout le pays,
00:16:59mais je rappelle que la première loi
00:17:01qui dit ça, c'est une loi de 99,
00:17:03et que cette loi n'est toujours pas appliquée.
00:17:06Et donc, peut-être que,
00:17:07plutôt que de légiférer,
00:17:08il faudrait donner les moyens
00:17:09et affirmer la volonté politique
00:17:11de développer les soins palliatifs.
00:17:12Voilà donc les éléments que j'ai à ma disposition
00:17:18aujourd'hui.
00:17:20Si j'étais parlementaire,
00:17:22je ne voterais pas cette loi.
00:17:24Je ne la voterais pas parce que je ne connais pas
00:17:26de garde-fou dans les autres expériences
00:17:29européennes ou atlantiques
00:17:31qui n'aient pas sauté et volé un éclat
00:17:34au fur et à mesure.
00:17:36Ensuite, parce que dans ce texte,
00:17:38il y a le délit d'entrave.
00:17:44Comment moi, qui essaierais de t'empêcher
00:17:47de te tuer et de demander la mort,
00:17:50je pourrais être accusé d'entraver ta liberté ?
00:17:54Non.
00:17:54Je fais mon travail d'homme
00:17:55quand je dis que ta vie vaut la peine
00:17:58d'être vécue.
00:17:59Et je ne fais pas mon travail d'homme
00:18:01si je dis que c'est ton choix.
00:18:03Vas-y.
00:18:03Donc, cet élément-là aussi
00:18:06est un élément important.
00:18:07Et puis, il y a le dernier élément,
00:18:09c'est le pronostic vital à court terme.
00:18:12Les médecins savent qu'ils arrivent à peu près
00:18:13à dire quand est-ce que ça va arriver.
00:18:16Quand vous avez une défaillance polyviscérale,
00:18:18que le cœur va moins bien,
00:18:21que le rein se bloque,
00:18:22que le foie fait plus son travail,
00:18:24on sait que la mort va survenir
00:18:25dans les jours qui viennent.
00:18:27Et je dirais qu'au fond,
00:18:29là, je ne dis pas tout est permis,
00:18:32mais la sédation profonde,
00:18:35si elle est très profonde
00:18:36et qu'elle accélère la mort,
00:18:39est-ce grave ?
00:18:40Non.
00:18:41Voilà.
00:18:42En revanche,
00:18:43le pronostic vital à moyen terme,
00:18:46je ne sais pas ce que c'est.
00:18:48Et une maladie avancée,
00:18:51je ne sais pas ce que c'est
00:18:52qu'une maladie avancée.
00:18:53Et donc, une maladie avancée,
00:18:56en phase avancée ou terminale,
00:18:57ça veut dire toutes les maladies graves.
00:19:00Et donc, ça veut dire que
00:19:01la porte est ouverte
00:19:03pour toute personne
00:19:04qui se trouverait avec une maladie
00:19:07qu'on ne peut pas guérir,
00:19:09ce qui est assez fréquent quand même,
00:19:11et qui déciderait
00:19:13que sa vie vaut plus la peine d'être vécue.
00:19:16On n'aurait pas de possibilité d'opposer
00:19:18à cause du délit d'entrave d'un côté,
00:19:22à cause aussi du fait
00:19:24qu'on doit respecter la volonté de la personne.
00:19:27Et donc, le pronostic vital à moyen terme
00:19:31est impossible.
00:19:33La Haute Autorité de Santé l'a affirmé.
00:19:35Impossible à définir.
00:19:37Donc, ça veut dire qu'on ouvre la porte du temps.
00:19:40Quand on ouvre la porte du temps,
00:19:42on va forcément se trouver avec des gens
00:19:44qui, peut-être, ont 3 ans, 4 ans, 5 ans à vivre.
00:19:48Et s'ils ont ce pronostic vital à moyen terme,
00:19:52peut-être d'ailleurs,
00:19:54l'avons-nous sans le savoir,
00:19:56est-ce que, si la moyenne d'âge
00:19:58des Français est autour de 80,
00:20:02est-ce qu'à partir de 75,
00:20:03on considère que le pronostic vital est engagé ?
00:20:06Et donc, on voit bien la dérive potentielle
00:20:08d'injonctions hypocrites
00:20:12qui consisteraient à dire
00:20:15aux plus faibles d'entre nous,
00:20:16aux plus âgés d'entre nous,
00:20:19aux plus handicapés.
00:20:21Peut-être qu'il y a une voie
00:20:23qui est la voie de quitter la vie
00:20:27plutôt que la voie d'essayer de l'accepter
00:20:31avec la fraternité qui t'entoure.
00:20:34Merci, Jean-Lenetti, pour ces propos.
00:20:41Je vais maintenant donner la parole
00:20:42à nos rapporteurs.
00:20:43Je vais commencer par Alain Milon.
00:20:46Oui, au travail, Alain.
00:20:47Merci, Président.
00:20:49Merci, Jean, pour ton exposé.
00:20:52Les questions...
00:20:53D'abord, je voudrais excuser
00:20:54ma collègue rapporteure
00:20:57qui ne pouvait pas être présente aujourd'hui.
00:20:59Je pense qu'elle t'a adressé des excuses également.
00:21:01Les questions qu'on nous avait proposées,
00:21:03tu as répondu par ton exposé.
00:21:05Alors, mais non, c'est très bien.
00:21:06Donc, je vais t'en poser d'autres.
00:21:08D'abord, je voudrais rendre à César
00:21:09ce qui appartient à César.
00:21:10Celui qui a dit
00:21:11la loi est faite pour ceux qui vont mourir
00:21:12et pas pour ceux qui veulent mourir,
00:21:13c'est Michel Amiel,
00:21:15qui est d'ailleurs un sénateur,
00:21:18qui était sénateur issu des ronds socialistes
00:21:20et qui est maintenant toujours maire
00:21:21et conseiller régional, je crois,
00:21:24en Provence-Alpes-Côte d'Azur.
00:21:25Il faut rendre hommage à Michel
00:21:27parce qu'il avait fait un très bon boulot
00:21:28dans le cadre de la loi Claes-Léonetti.
00:21:33Sur le suicide,
00:21:35tu as parlé de liberté,
00:21:36tu as parlé de désespoir.
00:21:39Est-ce que ça peut devenir pour autant un droit ?
00:21:42Sur les maladies incurables,
00:21:43existe-t-il véritablement des maladies incurables ?
00:21:47Aujourd'hui, oui.
00:21:49Hier, beaucoup plus qu'aujourd'hui.
00:21:51Et si on abrège l'avis de gens porteurs
00:21:55de la maladie incurable,
00:21:56est-ce que ça ne va pas nuire
00:21:58à la recherche et à l'expérimentation ?
00:22:00Merci.
00:22:03Merci.
00:22:03On...
00:22:03On plusieurs ?
00:22:04Alors, je vais vous demander...
00:22:05Oui.
00:22:06Bon, là, c'est ça.
00:22:08Bon, et...
00:22:08On va vous...
00:22:10Alors...
00:22:13Hop !
00:22:15Pardon, je voulais venir avec...
00:22:18Non, non, non, pas de souci.
00:22:19Non, non, pas de souci.
00:22:25Bien.
00:22:26Je vais donner la parole maintenant
00:22:27à Florence Lassarad.
00:22:30Oui, merci, monsieur le président.
00:22:33Merci, monsieur Jean-Léonetti,
00:22:35de venir auprès de nous.
00:22:37Moi, je suis rapporteure
00:22:38sur la partie soins palliatifs.
00:22:40Et...
00:22:42D'après ce que je comprends,
00:22:46vous finissez par être
00:22:47relativement fataliste
00:22:49sur le fait que les soins palliatifs,
00:22:50on n'y arrive pas.
00:22:54Moi, je vais vous raconter une anecdote.
00:22:56Peu avant mon élection...
00:22:59Enfin, mon arrivée au Sénat,
00:23:00puisque j'étais élue en 2014,
00:23:01je suis arrivée en 2017,
00:23:02à faveur de la loi NOTRe,
00:23:04je reçois une lettre en post-mortem
00:23:06d'un militant LR,
00:23:11un ancien gendarme,
00:23:13qui me...
00:23:15Avec une écriture vraiment
00:23:16très difficile,
00:23:18qui me demande de faire quelque chose,
00:23:21parce que lui,
00:23:22avec sa maladie de Charcot,
00:23:24il a eu l'impression
00:23:25qu'on le laissait tomber.
00:23:27Et je comprends dans sa rédaction
00:23:32qu'il était content
00:23:34que j'arrive au Sénat
00:23:35pour qu'on puisse parler de ça,
00:23:36alors qu'on en parlait
00:23:37depuis longtemps.
00:23:39Donc, première réflexion.
00:23:40Le même été,
00:23:42j'ai eu le malheur
00:23:43de perdre mon mari d'un cancer,
00:23:46mais n'étant pas à mon domicile,
00:23:48plutôt sur un lieu de vacances,
00:23:50le centre anticancéreux
00:23:53nous a dit de nous débrouiller.
00:23:55Il se trouve que je suis médecin,
00:23:56j'étais entourée
00:23:57de médecins généralistes
00:23:57dans ma famille.
00:23:59Et ça s'est quand même passé
00:24:01au mieux, je pense,
00:24:05parce que mon mari
00:24:05a pu rester au domicile.
00:24:07Mais par contre,
00:24:08quelques heures
00:24:08ou la veille de sa mort,
00:24:10il était psychiatre.
00:24:11Il me dit,
00:24:12dis donc,
00:24:12ça fait deux jours
00:24:13que je demande
00:24:14qu'on m'aide à mourir
00:24:14et je vois que rien ne vient.
00:24:17Moi, spontanément,
00:24:18je lui ai répondu,
00:24:19mais dans ton état,
00:24:19ça ne va pas tarder.
00:24:20et on se parlait assez librement.
00:24:23Puis maintenant,
00:24:23j'ai assez de recul
00:24:24pour l'exprimer.
00:24:27Mais néanmoins,
00:24:28je n'aurais pas eu
00:24:29de médecin autour de moi.
00:24:30J'avais une nièce oncologue
00:24:32qui m'avait donné un protocole
00:24:33avec de la morphine, etc.
00:24:35Le centre anticancéreux
00:24:36me dit,
00:24:36mais non, madame,
00:24:37vous n'allez pas faire ça
00:24:38à domicile,
00:24:38c'est beaucoup trop dangereux.
00:24:40Voilà ce que,
00:24:42quand on accompagne un patient,
00:24:44c'est du vécu.
00:24:46Bon, il se trouve
00:24:47que ça s'est terminé.
00:24:49Mais je pense au mieux
00:24:50parce qu'on n'a pas connu.
00:24:51On aurait pu connaître ça
00:24:52pendant la crise Covid.
00:24:53Enfin bon,
00:24:54je n'ai pas de regrets là-dessus.
00:24:58Néanmoins,
00:24:58le fait de ne pas avoir
00:25:00de soins palliatifs à domicile,
00:25:02là où on se trouve,
00:25:04alors que je pense
00:25:05que ça ne serait pas
00:25:05ce qui coûterait le plus cher,
00:25:09m'interroge quand même
00:25:11parce que j'ai de nombreux exemples.
00:25:14Plus on vieillit,
00:25:14plus on est entouré de personnes
00:25:16qui meurent.
00:25:19et dans des conditions
00:25:21parfois qu'on aimerait différentes
00:25:22et qui ne sont pas forcément
00:25:24si onéreuses que ça.
00:25:26Moi, je pense que le fait
00:25:28de pouvoir mourir à la maison
00:25:29avec ce qu'il faut,
00:25:32ça serait un progrès
00:25:34dans l'humanité
00:25:36de notre pays.
00:25:39Voilà.
00:25:39Mais c'est vrai que je ne pense pas
00:25:41que ça soit si simple que ça.
00:25:42J'ai voyagé il y a quelques jours
00:25:45avec des députés
00:25:46qui, la fleur au fusil,
00:25:48allaient voter pour la loi.
00:25:52Et je dis,
00:25:53oh là là, mais bon courage,
00:25:54ce n'est pas facile.
00:25:55Mais si, c'est très facile.
00:25:57On n'a aucun état d'âme.
00:25:58Nous, on est pour l'aide à mourir.
00:26:01Et le suicide assisté,
00:26:03ça ne nous pose aucun problème.
00:26:05Donc moi, ça m'interroge
00:26:06de voir un député de 40 ans
00:26:08qui, tranquillement,
00:26:10va voter cette loi.
00:26:13Ce n'est pas de la critique, mais...
00:26:17Quand même, quand même, quand même.
00:26:19Bon, allez, on continue.
00:26:22Je rappelle poser des questions.
00:26:24Donc, Jocelyne, Jocelyne Hides.
00:26:26Oui, merci, Président.
00:26:29Alors moi, je pense que c'est un sujet
00:26:30quand même qui reste passionnant
00:26:32et passionné,
00:26:33parce que c'est vrai que ça demande
00:26:34beaucoup de réflexion.
00:26:35et que selon ce qu'on a pu vivre,
00:26:37justement, nos expériences personnelles,
00:26:41va peut-être nous faire voter plus
00:26:44quelque chose que d'autres.
00:26:47Voilà.
00:26:47Et je pense qu'on a parfois tous
00:26:49eu des expériences,
00:26:51notamment en soins palliatifs,
00:26:52et vous l'avez souligné,
00:26:54en voyant mourir,
00:26:56soit son père, soit sa mère,
00:26:58malheureusement, je dirais,
00:27:01en ayant des douleurs inacceptables.
00:27:03Et on se demande où sont vraiment
00:27:05les soins palliatifs.
00:27:06Alors, est-ce que c'est un problème,
00:27:08comment dire, de compétences
00:27:10au niveau de tout ce qui est médico-social
00:27:13autour de tout ça ?
00:27:15Est-ce qu'il n'y a pas assez de formation ?
00:27:17Enfin, voilà, je me pose beaucoup
00:27:18de questions par rapport à ça.
00:27:20Ensuite, vous avez récemment déclaré,
00:27:22concernant les soins palliatifs,
00:27:23il n'y a pas besoin d'une loi,
00:27:24mais de moyens de volonté politique.
00:27:27Et en effet, de nombreux départements,
00:27:28par exemple, je crois qu'il y en a encore 19,
00:27:30qui n'ont pas, qui ne sont pas pourvus
00:27:33de, comment dire, de soins palliatifs.
00:27:36Et dans ce contexte,
00:27:38quels sont, selon vous,
00:27:38les principaux apports de ce texte ?
00:27:41Voilà, est-ce qu'il y a eu des améliorations ?
00:27:42Et quel regard portez-vous sur l'idée
00:27:44de droit opposable aux soins palliatifs
00:27:46inscrite dans la proposition de loi
00:27:47déposée par Mme Annie Vidal ?
00:27:50Et enfin, en 2013, vous indiquiez,
00:27:53concernant les soins palliatifs,
00:27:54il faut diffuser la culture palliatif
00:27:56dans tous les domaines de la médecine.
00:27:59Le soulagement de la douleur
00:28:00ne doit pas intervenir seulement
00:28:02quand on a abandonné l'espoir de guérir,
00:28:05mais à tout moment de la maladie,
00:28:06si nécessaire.
00:28:08Plus de 10 ans après,
00:28:09et si vous, que les médecins ont développé
00:28:11une véritable culture des soins palliatifs,
00:28:13moi, je n'en suis pas sûre,
00:28:15plus largement, pensez-vous que le regard
00:28:16de la société sur ce type de soins a évolué ?
00:28:18Et je vais revenir à ce qu'a dit Florence,
00:28:23parce que je te rejoins là-dessus en tous les cas.
00:28:25Quel regard portez-vous sur cette approche domiciliaire,
00:28:28sur les soins palliatifs domiciliaires ?
00:28:30Moi, c'est quelque chose que j'ai appris depuis peu,
00:28:33et peut-être que j'aurais choisi ça pour ma mère, du coup.
00:28:37Est-elle actuellement facilement accessible ?
00:28:39Et à défaut, quelles sont, selon vous,
00:28:41les principales barrières à lever ?
00:28:43D'abord, est-ce qu'il y a assez de connaissances
00:28:45pour les gens comme nous,
00:28:46qui ne sont ni médecins,
00:28:49mais qui ne savent même pas
00:28:51que les soins palliatifs à domicile existent ?
00:28:54Enfin, des maisons d'accompagnement créées par le texte,
00:28:56un mi-chemin entre le domicile et l'hôpital,
00:28:59constituent-elles à vos yeux un bon compromis,
00:29:02voire un modèle à encourager
00:29:03dans la perspective de cette 3e voie française
00:29:06que vous évoquez ?
00:29:07Merci.
00:29:08Merci beaucoup.
00:29:09Jean, je vous laisse répondre
00:29:10aux réactions et remarques et questions.
00:29:14Voilà.
00:29:14Et ensuite, je donne la parole,
00:29:15j'ai 3 sénateurs qui ont demandé la parole.
00:29:20Je n'ai pas de réponse sur le suicide.
00:29:22Un suicide, c'est un droit à liberté,
00:29:24ce n'est pas un droit à créance.
00:29:26Un droit à liberté,
00:29:27j'ai le droit de me suicider en sortant d'ici.
00:29:31Voilà.
00:29:32Et personne, si je survis,
00:29:35n'a le droit de me condamner.
00:29:37Depuis, je crois, 1792,
00:29:40depuis la séparation,
00:29:41un peu violente de l'Eglise et de l'Etat,
00:29:44ce n'est pas un péché de se suicider.
00:29:46Voilà.
00:29:46Donc, on a le droit de se suicider.
00:29:48Liberté.
00:29:49On n'a pas le droit de demander,
00:29:52Cour européenne des droits de l'homme,
00:29:53à faire prétit,
00:29:54on n'a pas le droit de demander
00:29:55à être suicidé.
00:29:57Voilà.
00:29:57Donc, c'est le droit à créance.
00:30:00Je peux réclamer qu'on me protège ma vie,
00:30:03je ne peux pas réclamer qu'on me donne la mort.
00:30:05C'est la différence entre l'un et l'autre.
00:30:08Est-ce que ce droit à liberté,
00:30:10je peux...
00:30:11Il est entravé.
00:30:12Voilà.
00:30:13Les partisans du suicide assisté disent,
00:30:17si je suis incapable de bouger,
00:30:19je ne peux pas me suicider.
00:30:20Voilà.
00:30:21Donc, il y a effectivement des possibilités
00:30:25d'entrave à la liberté,
00:30:26comme à la liberté d'aller et venir,
00:30:28qui est un droit de chacun.
00:30:30Mais si je suis paralysé,
00:30:33je ne peux pas avoir la liberté d'aller et venir.
00:30:35Donc, est-ce qu'on accepte cet élément
00:30:37ou est-ce qu'on essaye de le corriger ?
00:30:40Le vrai problème, à mon avis,
00:30:42c'est de dire comment on va définir
00:30:43les bons et les mauvais suicides.
00:30:45Il y aura le bon suicide qui sera validé
00:30:48et que l'on provoquera,
00:30:51la société provoquera le suicide,
00:30:53elle l'organisera.
00:30:54Je dirais presque qu'elle conduira le malade jusqu'au bout,
00:30:58puisqu'il y a même eu un débat à l'Assemblée nationale
00:31:02qui évoquait le fait que si la personne,
00:31:06au dernier moment, revenait sur ses décisions,
00:31:08il fallait que le médecin l'aide à accomplir
00:31:11ce vers quoi il s'était engagé,
00:31:14ce qui est quand même assez curieux.
00:31:16Mais, revenons, le mauvais suicide,
00:31:19je suis à l'hôpital,
00:31:21j'ai, pardon de la caricature,
00:31:23mais j'ai un service d'urgence,
00:31:25il arrive à un suicidé, je le réanime,
00:31:27et à côté, dans le service d'à côté,
00:31:29la même personne qui, avec des arguments définis,
00:31:34aurait droit à être aidée au suicide.
00:31:37On voit bien qu'une société,
00:31:40quand elle regarde globalement le suicide,
00:31:43elle le dit, c'est un marqueur négatif
00:31:45de la vision d'une société.
00:31:47Quand on dit dans les pays nordiques
00:31:49que l'augmentation du suicide des jeunes existe,
00:31:53c'est un mauvais marqueur.
00:31:55La France a une augmentation de ses suicides,
00:31:57et c'est un mauvais marqueur.
00:31:59C'est un marqueur qui n'a pas de futur,
00:32:02qui n'a pas d'espérance,
00:32:03et peut-être qu'il n'y a pas de fraternité suffisante
00:32:06pour accompagner cette souffrance.
00:32:09Ensuite, les maladies incurables,
00:32:11la vieillesse est une maladie incurable,
00:32:14et la vie est une maladie
00:32:17qui se termine généralement par le décès.
00:32:20Donc, beaucoup de choses sont incurables.
00:32:23Est-ce que...
00:32:26Regardez la caricature du sida.
00:32:30Le sida qui a d'ailleurs motivé
00:32:32une réflexion sur ces morts
00:32:35dans des conditions atroces de sujets jeunes
00:32:38et qui posaient le problème
00:32:39de l'accompagnement qui n'existait pas
00:32:43et de la mort volontaire
00:32:46qui a réémergé à cette époque.
00:32:49Aujourd'hui, c'est une maladie chronique.
00:32:52Donc, toutes ces maladies rapidement mortelles,
00:32:54cancer du sein avec métastase,
00:32:56c'était six mois.
00:32:57Cancer du sein avec métastase,
00:32:58maintenant, c'est plusieurs années,
00:33:00voire guérison.
00:33:00Donc, on est dans des situations
00:33:03qui, heureusement, évoluent.
00:33:05Et si on donne la mort
00:33:06sur des pronostics vitaux à moyen terme,
00:33:10eh bien, on va amputer la possibilité
00:33:12de ces personnes de guérir complètement.
00:33:15Donc, de manière générale,
00:33:18une société, elle doit sécréter
00:33:20l'espérance et la confiance.
00:33:22Elle ne doit pas aller dans le sens du désespoir.
00:33:24Mme la sénatrice, oui.
00:33:33Vous avez cité une phrase
00:33:35qui est une caricature
00:33:36et que j'ai déjà entendue
00:33:37à l'époque où il n'y avait pas de loi,
00:33:40quand les gens hurlaient de douleur
00:33:42et que je disais, mais il y a augmenté la morphine,
00:33:44quoi, je veux dire,
00:33:45et qu'on me faisait comme remarque,
00:33:47c'est dangereux, ça peut le tuer.
00:33:50Il y a un ridicule dans cette...
00:33:54Il va mourir, voilà.
00:33:56Ne t'inquiète pas de savoir.
00:33:58Inquiète-toi de savoir qu'il ne souffre pas.
00:34:01Et je pense que, malheureusement,
00:34:03cette situation que j'ai vécue
00:34:06et que vous avez vécue
00:34:09est une situation qui est insupportable.
00:34:12Insupportable d'expliquer
00:34:13qu'on ne doit pas prendre le risque
00:34:17d'une surdose de morphine
00:34:19devant une personne
00:34:22qui va mourir dans les heures
00:34:24et les jours qui vont venir
00:34:25et qui a mal, voilà.
00:34:27Donc, je crois que, malheureusement,
00:34:29ça prouve que la culture palliative
00:34:31n'est pas encore développée.
00:34:33Sur les soins palliatifs à la maison,
00:34:35j'ai un avis au cas par cas.
00:34:38J'ai vu des soins palliatifs
00:34:40développés à la maison
00:34:41avec des accompagnements
00:34:44qui étaient légers
00:34:45parce que la personne, elle est âgée,
00:34:47et à côté d'elle, elle a une personne âgée
00:34:49qui, généralement, est épuisée.
00:34:52Et donc, de temps en temps,
00:34:55quand on a un environnement médical,
00:34:58on sait réagir.
00:34:59Mais là, de temps en temps,
00:35:00sur un moment de panique,
00:35:01finalement, ça finit aux urgences de l'hôpital
00:35:03parce que la personne qui est âgée
00:35:06et qui accompagne,
00:35:07parce qu'elle soit à domicile,
00:35:09c'est pas 24 heures sur 24.
00:35:12Donc, il y a des trous dans la raquette
00:35:15et ces trous, quelquefois,
00:35:16ils sont mal comblés
00:35:17par des personnes âgées, épuisées
00:35:19et qui sont affectivement, bien sûr,
00:35:23en situation de près d'œil et d'angoisse.
00:35:27Donc, je crois qu'il y a des cas
00:35:29où c'est possible, il faut le faire.
00:35:31Les Français, à 70%,
00:35:33veulent mourir à la maison
00:35:34et à 80%, ils meurent à l'hôpital.
00:35:37Voilà, c'est comme ça.
00:35:39Mais je me demande
00:35:40si de temps en temps,
00:35:42l'arrivée à l'hôpital
00:35:43ne soulage pas un entourage épuisé
00:35:45et ne facilite pas la réponse rapide
00:35:49à des situations de souffrance.
00:35:53Donc, je dirais plutôt cas par cas.
00:35:56Et puis, surtout,
00:35:58ce que l'on sait,
00:35:59c'est que les soins palliatifs
00:36:00diminuent la demande de mort.
00:36:02Il la divise par 5,
00:36:03selon une étude,
00:36:04américaine.
00:36:08C'est dans les unités
00:36:09de soins palliatifs
00:36:10que ces demandes de mort diminuent.
00:36:13Et 19 ou 20 départements
00:36:16en sont dépourvus.
00:36:17Et on voit bien là
00:36:18l'inégalité de la situation.
00:36:20C'est quelqu'un qui dit
00:36:21je veux mourir
00:36:22parce que je souffre trop.
00:36:24C'est presque une urgence palliative.
00:36:26C'est presque quelqu'un
00:36:27qu'il faut prendre en charge
00:36:28dans une unité de soins palliatifs.
00:36:30Et si on ne peut pas lui donner
00:36:32l'unité de soins palliatifs,
00:36:33et qu'on lui dit il faut aller
00:36:34dans le département d'à côté,
00:36:36etc.,
00:36:37il ne veut pas renoncer
00:36:38à son projet mortifère.
00:36:40Donc, s'il y avait...
00:36:43Allez, admettons.
00:36:44Mettons-nous dans l'esprit
00:36:45de...
00:36:45il faut faire une aide active
00:36:47à mourir.
00:36:49Mais quand même pas avant
00:36:51qu'on ait offert
00:36:52à chaque Français
00:36:53une possibilité de soins palliatifs.
00:36:56Or, même si le gouvernement,
00:36:59et je le crois sincère,
00:37:01dit on va les développer.
00:37:03On sait très bien
00:37:04qu'aujourd'hui,
00:37:05dans nos hôpitaux,
00:37:06pour recruter,
00:37:07pour former,
00:37:08il va falloir plusieurs années.
00:37:09Donc, on ne peut pas dire
00:37:10demain,
00:37:11on ouvrira 20 unités
00:37:12de soins palliatifs
00:37:13dans les départements
00:37:14qui en sont dépourvus.
00:37:16Donc, on va mettre
00:37:17un certain temps.
00:37:18Pendant ce temps-là,
00:37:20il y aura une inégalité
00:37:21des Français devant la loi
00:37:22et inégalité devant la mort,
00:37:25ce qui n'est pas négligeable.
00:37:26Madame la sénatrice,
00:37:31vous évoquez bien sûr,
00:37:33comme toujours,
00:37:34les expériences personnelles.
00:37:35Je me rappelle
00:37:36que la première mission parlementaire,
00:37:39celle de 2005-2004,
00:37:41tous les députés sont arrivés
00:37:43et on a assisté
00:37:44à une situation
00:37:45que je n'avais pas prévue.
00:37:48Moi-même,
00:37:48j'ai pensé
00:37:49à ceux qui m'ont quitté
00:37:51et chacun évoquait
00:37:52la mort de l'autre,
00:37:54mais pas de l'autre
00:37:55ailleurs,
00:37:57la mort de l'autre,
00:37:58de celui qu'on a aimé
00:37:59et qui est mort.
00:38:00Et la réaction des députés
00:38:02était de dire
00:38:03je voudrais mourir comme lui
00:38:04ou je ne voudrais surtout pas
00:38:06mourir comme lui.
00:38:07Voilà.
00:38:08Et donc,
00:38:09bien sûr,
00:38:10je vais reciter
00:38:11Badinter,
00:38:12qui disait
00:38:13ne faites pas de loi
00:38:14à propos d'un cas particulier.
00:38:16Et nous avons tous,
00:38:16malheureusement,
00:38:17aucune expérience de la mort
00:38:19si ce n'est la mort
00:38:20de l'être aimé.
00:38:21Et donc,
00:38:21qui nous a marqués
00:38:23de manière définitive
00:38:25avec ce que ça comporte
00:38:26de regret,
00:38:27de remords,
00:38:28de culpabilité.
00:38:29Logique,
00:38:29voilà,
00:38:30j'aurais dû l'aimer plus,
00:38:31j'aurais dû le lui dire,
00:38:32j'aurais dû,
00:38:32j'aurais dû,
00:38:33etc.
00:38:34Et donc,
00:38:34dans cette situation-là,
00:38:36qu'est-ce que c'est que,
00:38:37comment on peut projeter
00:38:38quelque chose de collectif
00:38:39à partir de ces multiples
00:38:41expériences personnelles
00:38:43qui déstabilisent ?
00:38:44Moi,
00:38:45j'avais une expérience
00:38:45qui m'avait été racontée
00:38:47qui montre que
00:38:49la mort,
00:38:50elle arrive à tous les âges.
00:38:51grossesse gémélaire.
00:38:53La mère a deux jumeaux
00:38:55dans le ventre
00:38:57et un des deux
00:38:59a une anencephalie.
00:39:00Il n'a pas de cerveau.
00:39:02Normalement,
00:39:03il y a un droit
00:39:05à l'avortement thérapeutique.
00:39:08L'autre fœtus
00:39:11est normal.
00:39:13Donc,
00:39:14comment fait-on ?
00:39:16proposition d'injection
00:39:19dans le cordon
00:39:20ombilical
00:39:21de l'enfant
00:39:22anencephalique
00:39:23d'un produit mortel.
00:39:27Mais risque
00:39:28de toucher l'autre.
00:39:30Voilà.
00:39:30Et donc,
00:39:31finalement,
00:39:32accouchement,
00:39:33euthanasie
00:39:34de l'enfant
00:39:34anencephale
00:39:36et
00:39:37vie normale
00:39:39de l'enfant
00:39:40sans problème.
00:39:43Je ne sais pas.
00:39:43Je ne sais pas
00:39:45et je pense
00:39:46que ce n'est pas
00:39:47la pire des solutions
00:39:48qu'on a choisie.
00:39:49Je dirais presque
00:39:50que c'est la meilleure.
00:39:52C'est la moins mauvaise.
00:39:53Et donc,
00:39:53on voit bien
00:39:54que de temps en temps,
00:39:55on est dans l'exceptionnel.
00:39:58Et là aussi,
00:39:58pardon,
00:39:59Badinter m'a beaucoup influencé
00:40:00parce que c'était
00:40:01un homme lumineux
00:40:02et
00:40:03d'une intelligence
00:40:06et d'une rigueur
00:40:07forte
00:40:07sur le plan juridique.
00:40:10C'est que
00:40:10dans ce
00:40:12dans le contexte,
00:40:15on ne légifère pas
00:40:16à partir
00:40:17d'un cas particulier
00:40:19parce que
00:40:22sinon,
00:40:23on va légiférer
00:40:24pour l'exception.
00:40:25Et il disait
00:40:25les lois d'exception.
00:40:27Ce n'est que
00:40:27dans les pays totalitaires.
00:40:29La loi,
00:40:29les normatives,
00:40:30elle est universelle.
00:40:32Bien sûr
00:40:33que
00:40:33je prends la comparaison
00:40:36du code
00:40:37de la route.
00:40:38Le code de la route
00:40:39me dit
00:40:39je ne dois jamais,
00:40:41jamais
00:40:41franchir la ligne jaune.
00:40:44C'est d'ailleurs
00:40:44une expression
00:40:45qui est passée
00:40:45dans le langage courant.
00:40:47Mais
00:40:47s'il y a un ébouli,
00:40:49s'il y a un enfant
00:40:50qui traverse,
00:40:52si je suis obligé
00:40:53de le faire,
00:40:54je le fais en conscience.
00:40:56Donc,
00:40:56il peut y avoir,
00:40:57comme je viens
00:40:58de le décrire,
00:40:59des exceptions d'euthanasie
00:41:00qu'avait évoquées
00:41:01le comité d'éthique.
00:41:04Il peut y avoir
00:41:05des exceptions.
00:41:06Est-ce qu'on fait
00:41:06une loi pour l'exception
00:41:07et pour faire en sorte
00:41:09que l'exception
00:41:10devienne la règle ?
00:41:11Par contre,
00:41:12essayons de développer
00:41:13une culture palliative,
00:41:14une culture du doute,
00:41:16de l'interrogation,
00:41:18du dialogue,
00:41:21une doute de l'espérance
00:41:22aussi,
00:41:24qui vient quand même
00:41:26ne pas trancher brutalement
00:41:31dans un contexte
00:41:33de souffrance
00:41:34ou de douleur ?
00:41:36Est-ce que nous avons
00:41:37une connaissance
00:41:37et une formation
00:41:38bien meilleure,
00:41:39bien meilleure
00:41:40que celle dont j'ai bénéficié
00:41:42en tant que médecin ?
00:41:44Donc,
00:41:44les choses s'améliorent,
00:41:45indubitablement.
00:41:46Et ça,
00:41:47c'est une véritable espérance.
00:41:51Dans le métro,
00:41:52il y a une petite année,
00:41:55dans un métro nocturne,
00:41:57je vois trois jeunes
00:41:58en face de moi
00:41:59qui me regardent
00:42:00et qui chuchotent.
00:42:01donc le vieil homme
00:42:04que je suis
00:42:04s'attend
00:42:05à une mauvaise issue
00:42:08à cette situation
00:42:10et à la fin,
00:42:11ils disent
00:42:11« Ah,
00:42:12je vous ai vu à la télé,
00:42:13vous êtes Léonetti,
00:42:14on a appris votre loi
00:42:15à la faculté de droit. »
00:42:20Bon,
00:42:20en dehors d'être reconnu
00:42:21dans le 9-3,
00:42:22c'est plutôt sympathique,
00:42:23mais en dehors
00:42:25de cet élément,
00:42:26ça veut dire
00:42:27qu'on apprend
00:42:28à nos jeunes
00:42:29ces complexités
00:42:32de situations
00:42:33de fin de vie
00:42:33qui n'existaient pas
00:42:35à l'époque,
00:42:37à notre époque.
00:42:40Est-ce qu'il doit y avoir
00:42:41un droit opposable
00:42:42aux soins palliatifs ?
00:42:43Encore faut-il
00:42:43que derrière le droit opposable,
00:42:45c'est comme les lois d'Allo
00:42:46que vous vivez par ailleurs,
00:42:48derrière le droit opposable,
00:42:50il faut une solution
00:42:51et une solution pratique.
00:42:53Donc, voilà.
00:42:54Donc, c'est pour ça
00:42:55que j'ai eu
00:42:55à ma adresse
00:42:56ou la franchise
00:42:57de dire
00:42:58qu'il n'y a pas besoin
00:42:59de loi sur les soins palliatifs.
00:43:00Donnez-moi des moyens,
00:43:02fais une volonté politique.
00:43:03Il y a une petite loi
00:43:04qu'on pourrait faire,
00:43:05c'est qu'on ne pourrait
00:43:07valider les projets hospitaliers
00:43:09que s'il y a
00:43:10une culture palliative
00:43:11à l'intérieur
00:43:12du centre hospitalier.
00:43:13Ça, c'est un cliquet
00:43:14qui va obliger...
00:43:16Matéi, autre jour,
00:43:18à l'Académie,
00:43:19me disait
00:43:19« Moi, je suis le premier
00:43:20à avoir donné
00:43:21à l'assistante publique
00:43:22des hôpitaux de Paris
00:43:23des moyens
00:43:23pour les soins palliatifs.
00:43:25Quand il était ministre.
00:43:26Ce n'était pas hier.
00:43:28Quand il revient
00:43:29quelques temps après
00:43:30et qu'il voit
00:43:30le directeur
00:43:31de l'assistante publique
00:43:32des hôpitaux de Marseille,
00:43:34il lui dit
00:43:34« Alors, vous avez développé ? »
00:43:36Il dit « Ah non,
00:43:37je n'avais pas d'argent,
00:43:38j'ai mis aux urgences. »
00:43:39Voilà.
00:43:39Donc, les soins palliatifs,
00:43:41c'est toujours
00:43:41ce qui reste
00:43:43quand on a tout dépensé.
00:43:44Voilà.
00:43:45Donc,
00:43:45si on disait
00:43:46« C'est un critère obligatoire. »
00:43:48Il faut qu'il y ait
00:43:49des lits identifiés.
00:43:51Il faut qu'il y ait
00:43:51une unité identifiée.
00:43:54Vous allez voir
00:43:54que dans le processus
00:43:56des directeurs,
00:43:57des présidents
00:43:57de CME,
00:43:59il va y avoir
00:44:00un processus
00:44:00qui va dire
00:44:00« On est obligé
00:44:01de le faire,
00:44:02on va le faire. »
00:44:02Voilà.
00:44:02Donc,
00:44:04peut-être que c'est
00:44:05un peu coercitif
00:44:07ce que je dis.
00:44:08Mais enfin,
00:44:08c'est peut-être
00:44:09un bon élément.
00:44:10Les maisons d'accompagnement,
00:44:12franchement,
00:44:13on a beaucoup discuté
00:44:15est-ce qu'on doit appeler
00:44:16les soins palliatifs
00:44:17soins d'accompagnement
00:44:17ou soins palliatifs.
00:44:19J'étais un de ceux
00:44:20qui défendait
00:44:21les soins d'accompagnement
00:44:21parce que,
00:44:22comme je le disais,
00:44:23il faut que l'accompagnement,
00:44:25ça commence au début.
00:44:26On n'aille pas
00:44:27dans les derniers jours
00:44:28mettre en place
00:44:30les soins palliatifs.
00:44:32Et d'ailleurs,
00:44:33il y a une étude
00:44:33nord-américaine
00:44:35sur deux cohortes
00:44:36de patients
00:44:37qui ont un cancer
00:44:39métastasé
00:44:40avec la première cohorte
00:44:43qui bénéficie
00:44:44des soins palliatifs
00:44:44dès le diagnostic
00:44:46et l'autre
00:44:47qui bénéficie
00:44:48des soins palliatifs
00:44:49lorsque la souffrance
00:44:50aboutit.
00:44:51Il y a une survie,
00:44:54pas une qualité de vie,
00:44:55bien sûr,
00:44:55une qualité de vie,
00:44:56c'est évident,
00:44:56mais une survie
00:44:57de la cohorte
00:44:58qui bénéficie
00:44:59des soins palliatifs
00:45:00d'emblée
00:45:00qui est plus importante
00:45:02que l'autre
00:45:03et à peu près
00:45:05équivalente
00:45:05à celle
00:45:06d'une ligne
00:45:07de chimiothérapie.
00:45:09Je ne sais pas pourquoi,
00:45:10mais en tout cas,
00:45:12ces éléments-là
00:45:15nous disent
00:45:15que la priorité,
00:45:17les priorités,
00:45:18et je dirais plus
00:45:18que la priorité,
00:45:19le préalable
00:45:20à toute loi
00:45:21qui serait capable
00:45:22de donner la mort
00:45:23ou d'aller dans le sens
00:45:24de donner la mort,
00:45:26devrait être
00:45:26que chacun puisse
00:45:27bénéficier
00:45:27des soins palliatifs.
00:45:30Merci beaucoup.
00:45:31On va continuer
00:45:32les séries de questions
00:45:34et je donne maintenant
00:45:34la parole
00:45:35à Anne Suris.
00:45:37Merci,
00:45:38M. le Président
00:45:38et merci,
00:45:39M. Lenonetti,
00:45:40de cette introduction
00:45:43à nos débats
00:45:44puisque c'est la première audition
00:45:45que nous faisons ici
00:45:47et c'était important
00:45:49de vous avoir là.
00:45:50Alors,
00:45:50j'ai une question
00:45:51concernant en fait
00:45:54l'application des lois,
00:45:57en particulier le fait
00:45:59que le droit
00:46:00à la sédation profonde
00:46:02est très peu,
00:46:03il y a très peu de recours
00:46:04et très peu connu en fait
00:46:05par les personnes,
00:46:07par les patients,
00:46:08que c'est aussi
00:46:11la question
00:46:12des directives anticipées
00:46:13qui sont mal connues,
00:46:15la désignation
00:46:15d'une personne de confiance.
00:46:16En fait,
00:46:19ce sont des lois
00:46:20qui sont encore
00:46:21finalement
00:46:22pas assez utilisés,
00:46:24pas seulement
00:46:25parce que,
00:46:26là pour le coup
00:46:27sur les droits palliatifs,
00:46:28les soins palliatifs
00:46:29c'est une question d'argent,
00:46:30mais là c'est pas
00:46:30une question d'argent,
00:46:31c'est pas une question de moyens,
00:46:33ce serait pourquoi
00:46:33votre avis
00:46:34s'est si peu utilisé.
00:46:37Et puis je voulais juste dire,
00:46:39effectivement pour aller
00:46:39dans votre sens
00:46:40sur les soins palliatifs,
00:46:41c'est vrai que les soins palliatifs
00:46:42sont aussi curatifs
00:46:43et ça n'est pas que,
00:46:45c'est pour ça que c'est un mot
00:46:46un peu,
00:46:47en France,
00:46:48on oppose les deux
00:46:49et il y a une aberration
00:46:50dans ce terme-là
00:46:52qui va beaucoup plus loin
00:46:53que juste,
00:46:54voilà,
00:46:54c'était pour aller
00:46:55dans votre sens
00:46:55sur ce sujet.
00:46:57Merci bien.
00:46:58La parole à Bernard Jomier.
00:47:02Merci,
00:47:02Monsieur le Président,
00:47:03merci pour
00:47:04pour vos propos.
00:47:08Ma première question,
00:47:09elle porte sur les directives
00:47:10anticipées.
00:47:12Elles ont 20 ans,
00:47:13les directives anticipées
00:47:14et pour parler un peu brutalement,
00:47:17ça ne fonctionne pas bien.
00:47:19Est-ce qu'au fond,
00:47:20il faut rester dans cette logique-là ?
00:47:22On peut constater que dans la loi
00:47:25qui vient d'être adoptée
00:47:26à l'Assemblée nationale,
00:47:27d'ailleurs les députés
00:47:28ont sorti les directives anticipées
00:47:30comme étant d'un indicateur
00:47:32de l'expression
00:47:33de bénéficier
00:47:34de l'aide à mourir
00:47:36au nom de la nécessité
00:47:38que cette expression
00:47:39soit très actuelle
00:47:40et fasse suite
00:47:42à une prise en charge
00:47:43en soins palliatifs,
00:47:44enfin,
00:47:44que ce soit vraiment
00:47:45le terme absolu
00:47:47d'une démarche
00:47:48et pas un principe
00:47:50qui serait appliqué
00:47:51trop tôt,
00:47:52si je puis dire.
00:47:53Donc, au fond,
00:47:53qu'est-ce qu'il faut faire
00:47:54avec ces directives anticipées ?
00:47:55Je suis sûr que
00:47:56si on demandait
00:47:57dans cette salle
00:47:57qui en a rédigé,
00:47:58il n'y aurait pas beaucoup de mains
00:47:59qui se lèveraient.
00:48:00Vous êtes exemplaire
00:48:01parce que vous êtes
00:48:02l'auteur de la loi.
00:48:04Mais voilà,
00:48:04ce sera très peu
00:48:05et on le sait
00:48:07parmi les patients,
00:48:08bon, évidemment,
00:48:09c'est lié à la question
00:48:10de la difficulté
00:48:11d'une société
00:48:12et de chaque individu
00:48:13à aborder la question
00:48:14de la mort.
00:48:15Mais peut-on aller au-delà ?
00:48:17Après, j'ai plusieurs questions
00:48:18à vous poser
00:48:19qui portent toutes
00:48:19sur des valeurs
00:48:20que vous avez exprimées
00:48:21et qui me paraissent
00:48:21être le fond
00:48:22de la discussion
00:48:23de ce qui nous préoccupe
00:48:25aujourd'hui.
00:48:26La première,
00:48:26c'est que vous avez dit
00:48:27que donner la mort,
00:48:29c'était une rupture médicale.
00:48:32Alors, bien sûr,
00:48:34les soignants ne sont pas là.
00:48:36Leur but premier
00:48:37est de soigner,
00:48:38de maintenir la vie,
00:48:40de soulager les souffrances,
00:48:41de guérir
00:48:41si la guérison veut bien arriver
00:48:45et pas de donner la mort.
00:48:47Mais,
00:48:48on est plusieurs médecins
00:48:50dans cette salle
00:48:50et de la même génération.
00:48:51on a tous,
00:48:54quand on était interne
00:48:56ou étudiant,
00:48:57vécu le chef de service
00:48:59qui dit
00:49:00monsieur ou madame X,
00:49:02on va lui poser un DLP.
00:49:04Tout le monde sait
00:49:04ce que c'est un DLP.
00:49:06C'est trois médicaments
00:49:07qui étaient associés
00:49:08dans la perfusion
00:49:09et qui mettaient fin à la vie.
00:49:11Et nos chefs de service
00:49:12qui faisaient ça,
00:49:14ils ne le faisaient pas
00:49:15en violation
00:49:16d'une éthique médicale.
00:49:18Ils le faisaient
00:49:19au nom de ce que Paul Ricoeur
00:49:21nomme
00:49:22le jugement moral en situation,
00:49:24c'est-à-dire que le cadre légal
00:49:26qui existait
00:49:28ne permettait pas
00:49:29de répondre objectivement
00:49:31aux souffrances d'une personne
00:49:32et il décidait
00:49:34avec ce jugement moral en situation
00:49:36respectable
00:49:37qu'il fallait arrêter
00:49:39et qu'il fallait poser
00:49:40cette perfusion
00:49:41qui mettait fin à la vie.
00:49:44Et ça ne nous a pas disqualifiés
00:49:46dans la suite
00:49:47de notre vie de soignant.
00:49:48ça n'a pas fait de nous
00:49:50des porteurs
00:49:51d'une rupture
00:49:52anthropologique majeure
00:49:54comme on l'entend parfois.
00:49:56Certes,
00:49:57ce n'est pas
00:49:57ce qui doit fonder
00:49:58la démarche
00:49:59du soignant,
00:50:01mais il est des circonstances
00:50:03dans lesquelles
00:50:04il est nécessaire
00:50:06d'avoir ce type de démarche.
00:50:07Et la question,
00:50:08et vous l'avez soulevée,
00:50:09c'est
00:50:09est-ce qu'il faut légiférer
00:50:11sur ces situations
00:50:14qui doivent être peu nombreuses
00:50:15et comment faire en sorte
00:50:17que ce cadre légal
00:50:19ne devienne pas une norme
00:50:21mais reste bien
00:50:22une exception,
00:50:23même si
00:50:24elle est accessible
00:50:25à tout le monde,
00:50:26mais qu'elle reste bien
00:50:27une exception.
00:50:28Et quand on regarde
00:50:29les 25 pays à peu près
00:50:31du monde
00:50:31qui ont légalisé,
00:50:3325 États, pardon,
00:50:34l'aident à mourir,
00:50:35il y en a 4
00:50:37dans lesquelles
00:50:38il y a plus
00:50:39de 1000 cas par an,
00:50:41le Canada,
00:50:42les Pays-Bas,
00:50:43la Belgique
00:50:43et la Suisse,
00:50:46pardon.
00:50:47Dans tous les autres,
00:50:48ça reste quelques centaines,
00:50:50c'est-à-dire
00:50:50que ça reste bien
00:50:51une exception.
00:50:53On va rappeler
00:50:54780 000 personnes
00:50:55décèdent chaque année
00:50:56dans notre pays.
00:50:58Donc,
00:50:58il me semble que,
00:50:59voilà,
00:51:00dans l'interrogation
00:51:01que vous portez
00:51:02de savoir
00:51:03si c'est une rupture
00:51:04ou pas,
00:51:04on ne peut pas écarter
00:51:06la question
00:51:07qu'il y a dessous
00:51:07et que vous portez
00:51:08vous-même,
00:51:09est-ce qu'on doit
00:51:09légiférer
00:51:10sur l'exception ?
00:51:12Ma deuxième question
00:51:13porte sur un principe
00:51:15qui est...
00:51:15Il n'y a aucun principe
00:51:16en bioéthique
00:51:17qui prévaut absolument.
00:51:19C'est le substrat
00:51:22de la démarche bioéthique
00:51:23que de mettre en tension
00:51:25les différents principes
00:51:26et pour trouver
00:51:26un équilibre
00:51:27qui correspond
00:51:28à ce qui est
00:51:29jugé le plus souhaitable.
00:51:32Et il y a un principe
00:51:33que vous n'avez pas cité
00:51:35mais que vous portez
00:51:35parce que vous l'avez cité
00:51:36à d'autres occasions,
00:51:37c'est tout de même
00:51:38le principe d'autonomie.
00:51:40Et ce principe d'autonomie
00:51:41doit nous amener
00:51:42tout de même
00:51:44à réfléchir
00:51:45à une expression
00:51:46qui est répétée,
00:51:47qui est ancienne
00:51:48de nos concitoyens
00:51:50sur le fait
00:51:51qu'on ne les respecte pas assez
00:51:53dans ce principe.
00:51:54Donc,
00:51:54quelle réponse
00:51:55y apporter ?
00:51:57Le troisième,
00:51:58le principe suivant,
00:51:59j'ai entendu
00:52:00un collègue député
00:52:02exprimer une position
00:52:05tout à fait intéressante
00:52:06disant
00:52:07cette loi
00:52:08est une loi d'abandon.
00:52:10Je ne partage pas
00:52:11ce qu'il dit
00:52:12mais je trouve
00:52:12que c'est intéressant.
00:52:13Il disait
00:52:14on abandonne les gens
00:52:16en fin de vie
00:52:16si on légalise
00:52:17l'aide active
00:52:18à mourir
00:52:19et donc
00:52:20on marque le fait
00:52:21que notre société
00:52:22abandonne
00:52:23ceux qui sont
00:52:24les plus en difficulté,
00:52:26les plus vulnérables,
00:52:27les plus fragiles.
00:52:28et d'ailleurs
00:52:29je le dis
00:52:30s'il y a
00:52:30un débat intéressant
00:52:32qui a surgi
00:52:33pendant l'examen
00:52:34à l'Assemblée nationale
00:52:34c'est notamment
00:52:36celui porté
00:52:36par des associations
00:52:37et des personnes
00:52:38en situation de handicap
00:52:39qui ont porté
00:52:40la question
00:52:41du validisme
00:52:42dans la loi
00:52:44même si je...
00:52:45Bon,
00:52:45je ne vais pas creuser
00:52:46cette question-là
00:52:47mais pour dire
00:52:48que c'est tout à fait intéressant.
00:52:50Mais l'abandon
00:52:51on peut le retourner.
00:52:52Est-ce qu'à l'heure actuelle
00:52:53nous n'abandonnons pas
00:52:54des personnes
00:52:56qui sont très peu nombreuses
00:52:58mais auxquelles
00:52:59nous n'apportons pas
00:53:00une réponse
00:53:01qui est humainement
00:53:02satisfaisante ?
00:53:03Donc voilà
00:53:04la question de l'abandon
00:53:05comment est-ce qu'on la résout ?
00:53:07Et puis enfin
00:53:08est-ce que...
00:53:13Enfin je le répète
00:53:14mais je voudrais...
00:53:15Je pense que c'est
00:53:16un point fondamental
00:53:17c'est la question
00:53:18d'exception
00:53:18c'est-à-dire que
00:53:19le comité consultatif
00:53:21national d'éthique
00:53:22dans son avis
00:53:23ouvre bien la possibilité
00:53:27d'une aide active à mourir
00:53:28mais en la cadrant
00:53:29avec tout un ensemble
00:53:30de conditions
00:53:31qui font que son avis
00:53:32est beaucoup moins
00:53:33on va dire
00:53:34largement ouvert
00:53:36que ce qui a pu être dit
00:53:37à l'époque.
00:53:38Mais malgré tout
00:53:39en admettant
00:53:40que ce principe
00:53:42peut entrer dans la loi
00:53:43d'abord
00:53:44il tord le coup
00:53:46excusez-moi l'expression
00:53:47au fait que ce serait
00:53:48une rupture majeure
00:53:50il ne porte pas
00:53:51le CCNE
00:53:53porte la continuité
00:53:55de nos principes
00:53:55de bioéthique
00:53:56il ne porte pas
00:53:57c'est pas un organe
00:53:58révolutionnaire
00:53:59qui porte une rupture
00:54:00qui serait une rupture
00:54:01majeure
00:54:02et donc
00:54:03en posant
00:54:05cette conditionnalité
00:54:08il parle bien
00:54:09lui-même d'ailleurs
00:54:09d'exception
00:54:10il emploie bien
00:54:12le terme
00:54:12donc
00:54:13la question
00:54:15elle est
00:54:15comment est-ce que
00:54:16l'exception
00:54:17se conjugue
00:54:18en l'occurrence
00:54:18avec ce que vous avez
00:54:20rappelé
00:54:20ce qu'il faut
00:54:21que la loi
00:54:21puisse aussi
00:54:22s'adresser à tout le monde
00:54:23et puis un dernier
00:54:24dernier mot
00:54:25parce que Robert Badinter
00:54:27a été beaucoup
00:54:28exhumé
00:54:29pendant
00:54:29ces débats
00:54:31mais
00:54:32je trouve que
00:54:33Robert Badinter
00:54:34dans les années
00:54:352000 et 2010
00:54:36était défavorable
00:54:37à l'aide d'Activamour
00:54:38il l'a exprimé
00:54:39et puis il semble
00:54:40qu'il ait évolué
00:54:41et cette évolution
00:54:42a été attestée
00:54:43par deux personnes
00:54:44par Olivier Falorni
00:54:46qui ne peut pas
00:54:46être suspecté
00:54:47d'avoir tordu
00:54:48non non
00:54:49ce que lui a dit
00:54:50Robert Badinter
00:54:51en 2021
00:54:52qu'il était favorable
00:54:53à une évolution
00:54:54du cadre
00:54:55strictement encadré
00:54:56par la loi
00:54:56et c'est confirmé
00:54:58par Elisabeth Badinter
00:54:59vous le savez
00:55:00qui l'an dernier
00:55:00a confirmé
00:55:01que Robert Badinter
00:55:03avait évolué
00:55:04et qu'aujourd'hui
00:55:05il serait plutôt
00:55:06il serait favorable
00:55:07à ce principe
00:55:07donc voilà
00:55:08laissons Robert Badinter
00:55:09à ses évolutions
00:55:10et travaillons ensemble
00:55:12à avoir
00:55:14le meilleur cadre
00:55:14législatif possible
00:55:15merci beaucoup
00:55:17je donne la parole
00:55:18à Patricia Demas
00:55:19merci
00:55:20merci Jean
00:55:21pour tous ces éclairages
00:55:23et surtout
00:55:23ce témoignage
00:55:24à la fois humain
00:55:25et d'expertise
00:55:26effectivement
00:55:28aujourd'hui
00:55:29en tant que législateur
00:55:30au final
00:55:31l'urgence
00:55:32s'il y a urgence
00:55:34c'est bien
00:55:36de développer
00:55:36l'accessibilité
00:55:38aux soins palliatifs
00:55:39puisque
00:55:40ta loi
00:55:41a 20 ans
00:55:42et au final
00:55:44peu de moyens
00:55:45ont été déployés
00:55:47et la véritable question
00:55:48que l'on peut se poser
00:55:49aujourd'hui
00:55:50c'est l'accessibilité
00:55:52aux soins
00:55:52c'est l'accessibilité
00:55:54à la prise en charge
00:55:56de la douleur
00:55:56parce que c'est sûrement
00:55:57je pense
00:55:58la première question
00:55:59à se poser
00:55:59parce que lorsqu'on parle
00:56:02de fin de vie
00:56:03effectivement
00:56:04dans ce que tu dis
00:56:05il y a
00:56:06ceux qui vont mourir
00:56:07et là la question
00:56:08j'allais dire
00:56:09pardon de l'expression
00:56:10mais presque
00:56:11ne se pose pas
00:56:12puisque
00:56:13les accompagnements
00:56:14dans le cadre
00:56:15des soins palliatifs
00:56:16c'est bien de cela
00:56:17dont on parle
00:56:18mais les soins palliatifs
00:56:20c'est aussi
00:56:20la gestion de la douleur
00:56:21bien en amont
00:56:22et aujourd'hui
00:56:23la connaissance
00:56:25des soins palliatifs
00:56:26dans l'accessibilité
00:56:27et dans l'accompagnement
00:56:29des patients
00:56:29elle est peu développée
00:56:32et surtout
00:56:32peu accessible
00:56:34et donc moi
00:56:35la question
00:56:36que je me pose
00:56:37aujourd'hui
00:56:38c'est pas une question
00:56:39qui fait référence
00:56:41à des expériences
00:56:42personnelles
00:56:43parce qu'on en a tous
00:56:44c'est justement
00:56:45passer ce cap-là
00:56:47et se dire
00:56:48aujourd'hui
00:56:48si on avait
00:56:49des priorités
00:56:50à développer
00:56:51quelles seraient-elles
00:56:52pour faciliter
00:56:54l'accès
00:56:54au regard
00:56:55des constats
00:56:57que l'on porte
00:56:57aujourd'hui
00:56:58dans la prise en charge
00:56:59de la santé mentale
00:57:01dans la prise en charge
00:57:02du handicap
00:57:04dans ce regard
00:57:06en fait
00:57:06aujourd'hui
00:57:08la question
00:57:09que l'on se pose
00:57:10in fine
00:57:11c'est au final
00:57:12le regard
00:57:13de la société
00:57:14sur la condition humaine
00:57:17sur notre condition humaine
00:57:18et moi
00:57:19je voulais
00:57:20savoir
00:57:21quelles seraient
00:57:22aujourd'hui
00:57:23les priorités
00:57:24du sachant
00:57:25que tu es
00:57:26pour pouvoir
00:57:27améliorer
00:57:29une situation
00:57:29qui perdure
00:57:30depuis 20 ans
00:57:31et qui laisse
00:57:32désemparer
00:57:33et à la fois
00:57:35ceux qui vivent
00:57:36la douleur
00:57:37et ceux qui vivent
00:57:38une certaine déchéance
00:57:39qu'on considère
00:57:40comme une déchéance
00:57:41mais qui n'en est
00:57:41pas une
00:57:42dans une société
00:57:43qui peut être
00:57:44humaine
00:57:45et concentrée
00:57:47sur l'essentiel
00:57:48quelles seraient
00:57:49ses priorités
00:57:49parce que l'urgence
00:57:50aujourd'hui
00:57:51ce n'est pas tant
00:57:52de légiférer
00:57:53c'est de se dire
00:57:54au regard
00:57:55des carences
00:57:56de notre société
00:57:57quelles sont
00:57:58les actions
00:57:59prioritaires
00:57:59aujourd'hui
00:58:00que nous
00:58:00en tant que
00:58:01législateurs
00:58:01je pense
00:58:03au vote
00:58:03des budgets
00:58:04que nous avons
00:58:05à l'action
00:58:06qu'on peut faire
00:58:07et bien
00:58:08quelles sont
00:58:08les priorités
00:58:09selon toi
00:58:09qu'il faudrait
00:58:11déterminer
00:58:12s'il n'y en avait
00:58:12que 5
00:58:13pour qu'enfin
00:58:14cette loi
00:58:15qui date
00:58:15de près
00:58:16de 20 ans
00:58:17puisse avoir
00:58:18une résonance
00:58:19humaine
00:58:20auprès des familles
00:58:21dans tous les territoires
00:58:22de France
00:58:22je te remercie
00:58:23merci beaucoup
00:58:24et je termine
00:58:25par Corinne Aber
00:58:26oui merci
00:58:29président
00:58:29merci cher Jean
00:58:30Leonetti
00:58:30pour tout
00:58:32votre exposé
00:58:34alors ma question
00:58:35rejoignait
00:58:35celle d'Anne
00:58:36Suiris
00:58:36sur la connaissance
00:58:39de la loi
00:58:40de 2016
00:58:41notamment
00:58:42j'ai eu la chance
00:58:42de travailler
00:58:43sur un rapport
00:58:43en 2021
00:58:44sur les soins
00:58:44palliatifs
00:58:45avec Christine
00:58:46Beaufort
00:58:46et Michel
00:58:47et Michel Meunier
00:58:47en 2023
00:58:49nous avons fait
00:58:50un rapport
00:58:50sur la fin de vie
00:58:51que nous avons
00:58:52intitulé
00:58:53privilégier une éthique
00:58:54du soin
00:58:54déjà dans le titre
00:58:56même si la conclusion
00:58:59il y avait un avis
00:59:00divergent
00:59:00entre nous
00:59:02mais vous voyez
00:59:02l'approche
00:59:03que nous avons eue
00:59:04et entre 2021
00:59:05et 2023
00:59:06le constat
00:59:07d'une méconnaissance
00:59:08de la loi
00:59:09de 2016
00:59:10notamment des directives
00:59:11anticipées
00:59:12alors j'entends
00:59:12ce que dit
00:59:13effectivement Bernard
00:59:14on n'a pas envie
00:59:16de les écrire
00:59:17mais au moins
00:59:17si on en a connaissance
00:59:20on sait que ça existe
00:59:21c'est déjà
00:59:21une évolution
00:59:23alors quel est votre regard
00:59:24sur cette connaissance
00:59:25aujourd'hui
00:59:26donc deux ans plus tard
00:59:28en 2025
00:59:29sur cette approche
00:59:30la ministre de l'époque
00:59:31en 2023
00:59:32reconnaissait que
00:59:33en fait
00:59:34elle n'avait pas
00:59:34les moyens de savoir
00:59:35combien de sédations
00:59:36profondes et continues
00:59:38étaient pratiquées
00:59:39voilà
00:59:39est-ce que
00:59:40vous avez des informations
00:59:41alors
00:59:41il faudrait qu'on interroge
00:59:43l'assurance maladie
00:59:43mais en fait
00:59:44ça interroge déjà
00:59:45quand la ministre
00:59:46vous avoue
00:59:46ça c'est-à-dire
00:59:47qu'on ne cherche pas trop
00:59:47à savoir
00:59:48et on n'encourage pas
00:59:49on ne cherche pas
00:59:50à coter l'acte
00:59:51etc.
00:59:52et puis sur l'avis du CCNE
00:59:54notamment
00:59:55son avis 139
00:59:57quand le CCNE
00:59:59dit qu'en fait
00:59:59le cadre législatif
01:00:00est satisfaisant
01:00:01il évoque
01:00:02le court terme
01:00:03et on voit bien
01:00:04que la difficulté
01:00:05de ce qui est proposé
01:00:06à notre examen
01:00:07aujourd'hui
01:00:07c'est le moyen terme
01:00:08et je rejoins
01:00:09à votre propos
01:00:09donc là c'est plutôt
01:00:10une appréciation
01:00:11et je vous rejoins
01:00:12complètement
01:00:12sur la notion
01:00:14de moyen terme
01:00:15mais encore une fois
01:00:16la question
01:00:17et Philippe l'a dit
01:00:19dans ses propos introductifs
01:00:20c'est la connaissance
01:00:20de la loi actuelle
01:00:21appliquons la loi
01:00:23c'est comme celle de 99
01:00:24c'est ça le sujet
01:00:26et comment on peut y arriver
01:00:27merci
01:00:30Jean
01:00:31tout ça est bien dense
01:00:34moi aujourd'hui
01:00:39j'ai mon temps
01:00:40c'est vous qui
01:00:40vous qui avez
01:00:41probablement
01:00:42d'autres choses
01:00:42à faire
01:00:43la sédation profonde
01:00:45c'est
01:00:46c'est un sujet
01:00:48c'est un sujet
01:00:49compliqué
01:00:50c'est un sujet
01:00:51compliqué
01:00:52parce qu'on réveille
01:00:54pas le malade
01:00:55et la mort
01:00:57va survenir
01:00:57pendant son sommeil
01:00:58quand on le dit
01:01:00et qu'on l'écrit
01:01:00comme ça
01:01:01c'est parfait
01:01:02quand on le met
01:01:03en oeuvre
01:01:04je vais être
01:01:06un peu brutal
01:01:07mais au bout
01:01:08de 48 heures
01:01:09la famille vient
01:01:09et dit
01:01:10quel est le sens
01:01:11qu'est-ce qu'on attend
01:01:12voilà
01:01:13l'équipe médicale
01:01:15dit je peux plus
01:01:16dialoguer avec lui
01:01:17j'étais
01:01:18j'étais en empathie
01:01:20j'étais en
01:01:21en dialogue
01:01:23et là j'ai plus
01:01:24de dialogue
01:01:25je le regarde
01:01:25je continue
01:01:27ma perfusion
01:01:28etc
01:01:28et
01:01:29donc
01:01:31un certain nombre
01:01:32de gens
01:01:32je rejoins
01:01:34ce que dit
01:01:36tout à l'heure
01:01:37monsieur Soumier
01:01:37ils fantasment
01:01:41sur
01:01:41la DLP
01:01:42le fait d'argan
01:01:45qui permettait
01:01:47effectivement
01:01:48de soulager
01:01:49mais aussi
01:01:49d'accélérer la mort
01:01:51très significativement
01:01:53et donc
01:01:53il y avait
01:01:53une ambivalence
01:01:55j'y reviendrai
01:01:56et même
01:01:57une ambiguïté
01:01:58volontaire
01:01:59donc
01:02:00dans ce contexte
01:02:02pourquoi la sédation
01:02:03ne fonctionne pas
01:02:03un
01:02:04les malades
01:02:04ne savent pas
01:02:05qu'ils ont le droit
01:02:05de dormir
01:02:06à la fin de leur vie
01:02:07deux
01:02:09l'hypnovelle
01:02:10qui est le médicament
01:02:11le plus largement
01:02:12utilisé
01:02:13on a une énorme
01:02:14difficulté
01:02:14pour l'utiliser
01:02:15à domicile
01:02:16donc
01:02:17on ne peut l'utiliser
01:02:18qu'en milieu hospitalier
01:02:19il faut quand même
01:02:21une seringue autopousseuse
01:02:22il faut quand même
01:02:22un minimum de matériel
01:02:24ce n'est pas
01:02:24des comprimés
01:02:25qu'on met sous la langue
01:02:26et trois
01:02:27les médecins
01:02:29sont
01:02:30relativement
01:02:31réticents
01:02:31à
01:02:33à une inversion
01:02:34de l'ordre des facteurs
01:02:35on parlait
01:02:36tout à l'heure
01:02:36d'autonomie
01:02:37c'est à la demande
01:02:39du malade
01:02:39la sédation
01:02:40le malade constate
01:02:42qu'il n'est pas soulagé
01:02:43le médecin constate
01:02:44que la mort
01:02:45est à court terme
01:02:47et c'est le malade
01:02:49qui gagne
01:02:49pardon de dire ça
01:02:50comme ça
01:02:51or on a un peu
01:02:52l'habitude
01:02:52d'une verticalisation
01:02:53de la médecine
01:02:55qui dit
01:02:56c'est moi qui sais
01:02:57c'est moi qui dis
01:02:58là franchement
01:02:59c'est le malade
01:02:59qui sait
01:03:00parce que
01:03:00le médecin
01:03:01il sait qu'une chose
01:03:02c'est que le malade
01:03:03va mourir
01:03:03dans les jours
01:03:04qui viennent
01:03:05et on est au service
01:03:07de l'attente
01:03:08du malade
01:03:09et je dirais même
01:03:10que dans cette période là
01:03:12tous les tabous
01:03:15qui existent
01:03:16dans notre société
01:03:16sur la mort
01:03:17qui font que
01:03:18on n'ose plus parler
01:03:20il n'y a plus de deuil
01:03:21on veut plus d'agonie
01:03:23on aimerait bien
01:03:24que finalement
01:03:25on disparaisse
01:03:25à un certain moment
01:03:28de manière
01:03:29un peu
01:03:31subrétive
01:03:32qui fait
01:03:33qu'on ne s'en rendrait
01:03:35pas compte
01:03:35donc
01:03:36la mort
01:03:37c'est le tragique
01:03:38de la vie
01:03:38voilà
01:03:39on ne pourra pas
01:03:40éviter
01:03:41cette issue
01:03:43on peut
01:03:45réfléchir
01:03:47sur la mort
01:03:48de la mort
01:03:48le jour
01:03:49où on arrivera
01:03:50à prolonger
01:03:52la vie
01:03:52au-delà
01:03:53du raisonnable
01:03:54et peut-être
01:03:55l'immortalité
01:03:57mais en tout cas
01:03:57on n'y est pas
01:03:59donc ce tragique
01:04:00de la mort
01:04:00il est occulté
01:04:01par notre société
01:04:02il est occulté
01:04:03par les médecins
01:04:04c'est pour ça
01:04:05qu'ils font
01:04:05de l'acharnement
01:04:05thérapeutique
01:04:06et de l'obstination
01:04:06des raisonnables
01:04:07parce que ça leur
01:04:08permet de ne pas
01:04:08regarder la mort
01:04:09si je continue
01:04:10à traiter le malade
01:04:11comme s'il allait vivre
01:04:12ça me permet
01:04:13d'éviter
01:04:14de me dire
01:04:15qu'il va mourir
01:04:15et comme la mort
01:04:17renvoie toujours
01:04:18à sa propre mort
01:04:19c'est toujours compliqué
01:04:21d'évoquer
01:04:21ces sujets
01:04:22donc je crois
01:04:23qu'on a une société
01:04:25qui est malade
01:04:26de la vie
01:04:27parce qu'elle
01:04:27n'accepte pas
01:04:28l'idée que
01:04:29la finitude
01:04:31est le seul élément
01:04:33que l'humain
01:04:34c'est peut-être
01:04:35d'ailleurs sa noblesse
01:04:36là-dessus
01:04:39rappelez-vous
01:04:41Ulysse refuse
01:04:43l'immortalité
01:04:44à Calypso
01:04:44et Camus l'interprète
01:04:47en disant
01:04:47que c'est notre fierté
01:04:49de nos limites
01:04:49voilà
01:04:50peut-être
01:04:51qu'on
01:04:51nous sommes humains
01:04:53parce que nous avons
01:04:54une finitude
01:04:55et ça se termine
01:04:57comme ça
01:04:57on ne veut pas
01:04:58l'évoquer
01:04:59on ne veut pas
01:04:59l'accepter
01:05:00et la sédation profonde
01:05:02elle doit être
01:05:03bien pesée
01:05:05parce que
01:05:05une semaine
01:05:07de sédation profonde
01:05:08c'est difficilement
01:05:09supportable
01:05:10pour l'équipe médicale
01:05:11la famille
01:05:12et donc si la mort
01:05:13n'est pas imminente
01:05:14et qu'on la donne
01:05:15à quelqu'un
01:05:15qui a trois mois
01:05:16à vivre
01:05:16on se met en difficulté
01:05:18et on ne va plus
01:05:19faire une sédation profonde
01:05:20et continue jusqu'au décès
01:05:21on va faire une sédation
01:05:22temporaire
01:05:23c'est pas
01:05:24une sédation
01:05:25l'avantage
01:05:26c'est que
01:05:26c'est irréversible
01:05:27mais je pense
01:05:28que c'est un problème
01:05:29de société
01:05:29plus qu'un problème
01:05:30technique
01:05:31directive anticipée
01:05:34je vais vous citer
01:05:36les miennes
01:05:37elles sont insupportables
01:05:38si je
01:05:39je subis
01:05:41des lésions
01:05:41cérébrales
01:05:42majeures
01:05:42et irréversibles
01:05:43entraînant
01:05:44une incapacité
01:05:45de la conscience
01:05:46de moi-même
01:05:47et une incapacité
01:05:48de connecter
01:05:49la moindre
01:05:50relation
01:05:51à l'autre
01:05:51je souhaite
01:05:53après un délai
01:05:53raisonnable
01:05:54parce que je me méfie
01:05:55de mes collègues
01:05:56bénéficier d'une sédation
01:05:59profonde
01:06:00et qu'on est tenu
01:06:00jusqu'au décès
01:06:01et un arrêt
01:06:01de toute thérapeutique
01:06:02salvatrice
01:06:03il n'y a qu'un médecin
01:06:04qui peut écrire ça
01:06:05et la
01:06:06l'énorme
01:06:07voilà
01:06:08voilà
01:06:09l'énorme faute
01:06:10voilà
01:06:11parce que je ne me suis pas
01:06:12je ne me connais pas
01:06:13porteur d'une maladie mortelle
01:06:15et donc la seule chose
01:06:16que je me dis
01:06:16c'est
01:06:17un camion va me passer
01:06:18sur la tête
01:06:19dans un premier temps
01:06:20je veux que
01:06:21le jeune interne
01:06:22me réanime
01:06:22et qu'il ne dise pas
01:06:23il est trop vieux
01:06:24on ne va pas se fatiguer
01:06:26là-dessus
01:06:26et dans un deuxième temps
01:06:28j'aimerais bien
01:06:28qu'on convoque ma famille
01:06:29et qu'on dise
01:06:30bon voilà
01:06:30les lésions cérébrales
01:06:33sont majeures
01:06:33et invasibles
01:06:33on arrête
01:06:34voilà
01:06:35et que tout le monde
01:06:36ait bien compris
01:06:37que c'était aussi
01:06:38ma volonté
01:06:38les directives anticipées
01:06:40je vais être brutal
01:06:42elles ne servent
01:06:42qu'à lever les angoisses
01:06:43les angoisses
01:06:45du malade
01:06:46qui dit
01:06:46si un jour
01:06:47je me trouve
01:06:47dans telle situation
01:06:48est-ce que vous allez
01:06:50me prolonger anormalement
01:06:51c'était surtout
01:06:52les directives anticipées
01:06:53anti-obstination
01:06:55des raisonnables
01:06:55et moi je la pratiquais
01:06:57les directives anticipées
01:06:58quand il n'y avait pas de loi
01:07:00et que j'étais médecin
01:07:01les malades
01:07:01je me rappelle
01:07:04d'un malade
01:07:04qui avait un névrisme
01:07:05de la communicante antérieure
01:07:06qui peut entraîner
01:07:07une hémorragie sérébrale
01:07:08et des lésions majeures
01:07:10et qui disait
01:07:11docteur
01:07:12vous ferez ce qu'il faut
01:07:12si ça pète
01:07:14vous ferez ce qu'il faut
01:07:14voilà
01:07:15et je disais
01:07:16je ferai ce qu'il faut
01:07:16sans trop savoir
01:07:17ce qu'il voulait que je fasse
01:07:18et puis
01:07:19il écrivait
01:07:20voilà
01:07:21mais on voit bien
01:07:22que dans ces contextes-là
01:07:25ça ne doit pas être
01:07:26ce qui est aujourd'hui
01:07:28l'obligation
01:07:29d'écrire
01:07:29des directives anticipées
01:07:31chez tout malade
01:07:31qui rentre à l'EHPAD
01:07:32voilà
01:07:33c'est
01:07:34c'est
01:07:36violer
01:07:36les consciences
01:07:37Paul Ricoeur
01:07:39il dit
01:07:39il y a des vérités
01:07:41qui transpressent les cœurs
01:07:42et détruisent les âmes
01:07:43on n'est pas obligé
01:07:43de lui dire
01:07:44vous savez
01:07:44peut-être vous allez être
01:07:45hémiplégique
01:07:47peut-être vous allez être
01:07:47handicapé
01:07:48il ne le demande pas
01:07:49donc s'il y a une angoisse
01:07:51on répond par les directives
01:07:53anticipées
01:07:53et la directive
01:07:54anticipée
01:07:54elle calme
01:07:55deuxième angoisse
01:07:56on va arrêter
01:07:57tout traitement
01:07:58parce que
01:07:58maintenant
01:07:59et on va
01:08:00sédater
01:08:01la famille
01:08:02elle dit
01:08:02ah oui
01:08:03c'est ce qu'il aurait voulu
01:08:04parce que c'est ce qu'il a marqué
01:08:05dans les directives anticipées
01:08:06et on déculpabilise
01:08:08la famille
01:08:08donc on enlève
01:08:09l'angoisse avant
01:08:10et on déculpabilise
01:08:12la famille
01:08:12les entourages
01:08:13après
01:08:13mais franchement
01:08:15directive anticipée
01:08:16si vous réfléchissez
01:08:17sur le plan juridique
01:08:18c'est une aberration
01:08:19c'est une délégation
01:08:21de votre liberté
01:08:22de votre volonté
01:08:23à autrui
01:08:25par anticipation
01:08:26or on sait
01:08:28que
01:08:28changer d'avis
01:08:29c'est la vie
01:08:30et c'est la liberté
01:08:31donc
01:08:32on a changé d'ailleurs
01:08:35les directives anticipées
01:08:36et
01:08:36plutôt que de dire
01:08:38on demande l'avis
01:08:39à l'entourage
01:08:39on dit
01:08:40on demande le témoignage
01:08:42de l'entourage
01:08:43parce que moi
01:08:44si j'ai
01:08:44une mère
01:08:46ultra
01:08:49enfin
01:08:50catholique
01:08:51pratiquante
01:08:52et que moi
01:08:52je suis agnostique
01:08:54c'est pas à ma mère
01:08:56à décider
01:08:57ce qu'on doit faire
01:08:58on doit s'interroger
01:08:58qu'est-ce que cette personne
01:09:00aurait voulu
01:09:00par qu'est-ce que
01:09:02sa femme
01:09:04ou sa mère
01:09:04aurait voulu
01:09:05c'est l'affaire
01:09:07Vincent Lambert
01:09:07dont on a vu
01:09:08que contrairement
01:09:09à ce qu'on dit
01:09:10la loi
01:09:11n'a pas été mise
01:09:11en difficulté
01:09:12elle a été validée
01:09:13par le conseil d'état
01:09:14en cette séance plénière
01:09:16et validée
01:09:17par la cour européenne
01:09:18des droits de l'homme
01:09:18donc la loi
01:09:19qui n'était qu'une proposition
01:09:21de loi
01:09:21elle a bénéficié
01:09:22du double label
01:09:23si j'ose dire
01:09:24et elle dit
01:09:25effectivement
01:09:26l'argument
01:09:28qui a été donné
01:09:29c'est que
01:09:29c'est l'entourage
01:09:31de Vincent Lambert
01:09:32qui était un entourage
01:09:33médical
01:09:34qui a témoigné
01:09:35qu'il n'aurait pas voulu
01:09:36vivre en état végétatif
01:09:38donc
01:09:39directive anticipée
01:09:40bon
01:09:42on les a mis
01:09:42dans la première loi
01:09:43mais honnêtement
01:09:44c'est pas
01:09:45l'élément
01:09:46majeur
01:09:46d'un texte
01:09:48est-ce que c'est
01:09:50une rupture médicale
01:09:51ou pas
01:09:51franchement
01:09:52on n'avait pas
01:09:54d'autres moyens
01:09:55à cette époque là
01:09:56et le cocktail
01:09:58lithique
01:09:58je l'ai pratiqué
01:10:00je l'ai ordonné
01:10:01en tant que chef
01:10:02de service
01:10:02mais très honnêtement
01:10:04il y avait quand même
01:10:04deux éléments
01:10:05un
01:10:06c'était rare
01:10:07qu'on aille demander
01:10:08au malade
01:10:08s'il était d'accord
01:10:09c'était
01:10:10sans l'accord
01:10:11du malade
01:10:12bon
01:10:12ensuite
01:10:13évidemment
01:10:15on accélérait
01:10:16la perfusion
01:10:17donc franchement
01:10:18on était
01:10:19non pas dans une démarche
01:10:20de soulagement
01:10:21mais on était dans une démarche
01:10:22d'accélération
01:10:23donc je ne vais pas revenir
01:10:26sur le double effet
01:10:27que vous connaissez
01:10:27aussi bien que moi
01:10:28mais je ne voudrais pas
01:10:31que la sédation
01:10:32profonde et continue
01:10:33soit interprétée
01:10:34comme une
01:10:35DLP
01:10:36et aujourd'hui
01:10:37à l'Assemblée nationale
01:10:38il y a cette réflexion
01:10:41est-ce que je fais
01:10:42une sédation profonde
01:10:43et c'était
01:10:44c'était ce que disait
01:10:45Alain Clès d'ailleurs
01:10:46quand on débattait
01:10:49la loi en 2016
01:10:50il disait
01:10:50oui mais au bout
01:10:51de 48 heures
01:10:51il faut
01:10:52arrêter tout
01:10:53et devenir
01:10:55létal
01:10:56j'ai dit
01:10:56mais si tu le fais
01:10:57létal au bout
01:10:58de 48 heures
01:10:59c'est une hypocrisie
01:10:59parce que
01:11:00tant vaut-il
01:11:01le faire tout de suite
01:11:02voilà
01:11:03donc si c'est
01:11:04une euthanasie
01:11:05différée
01:11:05avec une sédation
01:11:07d'attente
01:11:08on voit bien
01:11:09qu'on est
01:11:09on retombe
01:11:10dans l'ambiguïté
01:11:12c'est assez compliqué
01:11:12cette situation là
01:11:14alors
01:11:15je ne veux pas
01:11:17l'interpréter
01:11:18mais les sédations
01:11:19profondes et continues
01:11:20en réanimation
01:11:21sont plus courtes
01:11:22dans la durée
01:11:23que les sédations
01:11:24profondes et continues
01:11:25en soins palliatifs
01:11:26ça peut s'expliquer
01:11:27de deux façons
01:11:28ça peut s'expliquer
01:11:29par le fait
01:11:30que le réanimateur
01:11:31quand il arrête
01:11:32sa réanimation
01:11:33il accélère forcément
01:11:34la mort
01:11:35voilà
01:11:35et ça peut s'interpréter
01:11:37aussi
01:11:37que les doses
01:11:38utilisées par les réanimateurs
01:11:39ne sont pas les mêmes doses
01:11:40que celles utilisées
01:11:41par les médecins
01:11:42de soins palliatifs
01:11:43je n'ai pas
01:11:44d'éléments
01:11:46là-dessus
01:11:46mais enfin
01:11:46les interprétations
01:11:47méritent quand même
01:11:49qu'on étudie
01:11:50et on n'étudie rien
01:11:51le soin palliatif
01:11:53c'est un machin
01:11:54qui est hors la médecine
01:11:55on n'a pas
01:11:57de cohorte suivie
01:11:58on n'a pas
01:11:59de
01:11:59on ne sait pas
01:12:01rentrer dans le monde
01:12:02scientifique
01:12:03on ne sait pas
01:12:03combien on fait
01:12:04de sédations profondes
01:12:05c'est quand même bizarre
01:12:06on ne sait pas
01:12:07combien il y a
01:12:07de demandes de mort
01:12:08en soins palliatifs
01:12:09les médecins de soins palliatifs
01:12:11disent exceptionnel
01:12:12voilà
01:12:12mais il y en a
01:12:14dans quelles circonstances
01:12:16voilà
01:12:17donc je pense que
01:12:18priorité pour moi
01:12:19c'est développer
01:12:20les soins palliatifs
01:12:21comme une discipline
01:12:22autonome
01:12:23scientifique
01:12:23qui n'est pas
01:12:24le tapotement
01:12:25de la main
01:12:25de manière compassionnelle
01:12:27mais qui
01:12:28avec tous les médicaments
01:12:29et la science
01:12:30qui est venue
01:12:31les épauler
01:12:32en faire une véritable discipline
01:12:35voilà
01:12:35ça me paraît
01:12:37effectivement utile
01:12:38oui
01:12:39je suis celui
01:12:40qui a défendu
01:12:41l'idée
01:12:42que l'éthique
01:12:43est un conflit
01:12:44de valeurs
01:12:44entre une éthique
01:12:46de l'autonomie
01:12:46et une éthique
01:12:47de la vulnérabilité
01:12:48l'éthique de l'autonomie
01:12:50elle dit
01:12:50c'est mon choix
01:12:51je
01:12:52et l'éthique
01:12:54de vulnérabilité
01:12:54elle dit
01:12:55nous te protégeons
01:12:56nous
01:12:56c'est d'ailleurs
01:12:57le conflit
01:12:58qui existe
01:12:59dans nos lois
01:13:00et dans nos vies
01:13:00entre l'intérêt individuel
01:13:03et l'intérêt collectif
01:13:04si on pousse
01:13:05le curseur du collectif
01:13:06il n'y a plus de liberté
01:13:07si on pousse
01:13:08le curseur
01:13:09de la liberté
01:13:10il n'y a plus de solidarité
01:13:12parce que c'est
01:13:13les loups libres
01:13:14dans les bergeries
01:13:15libres si on donne
01:13:16la liberté à tous
01:13:17donc
01:13:18trouver cet équilibre
01:13:19c'est toujours compliqué
01:13:20moi je ne fais pas
01:13:22parler
01:13:22Badinter
01:13:23je relis
01:13:23ce qu'il a écrit
01:13:24je ne conteste
01:13:26aucun témoignage
01:13:27de Badinter
01:13:29qui a probablement
01:13:30et comme nous tous
01:13:31changé d'avis
01:13:32et qui pouvait
01:13:33rechanger d'avis
01:13:34mais il a eu
01:13:35deux auditions
01:13:36et sur ces auditions
01:13:37il a été clair
01:13:38il a même
01:13:39m'a fait l'honneur
01:13:40de préfacer
01:13:41un de mes livres
01:13:43et il est assez clair
01:13:44aussi
01:13:45donc moi
01:13:46je ne fais pas parler
01:13:47les morts
01:13:47je lis ce qu'ils ont écrit
01:13:49et j'essaie
01:13:50de m'y référer
01:13:51en ce qui concerne
01:13:53l'abandon
01:13:54je ne dirais pas
01:13:55abandon
01:13:56parce que
01:13:57abandonner
01:13:59c'est ce qui s'est fait
01:14:01aussi dans une génération
01:14:02que nous avons connue
01:14:03où on n'ouvre même pas
01:14:06la porte du mourant
01:14:07parce que comme
01:14:08il était mourant
01:14:09il n'intéressait plus
01:14:10la médecine
01:14:11et donc on passait
01:14:12à la porte suivante
01:14:13parce qu'on était là
01:14:14pour sauver
01:14:15et non pas pour accompagner
01:14:16et je dirais que
01:14:19dans une société
01:14:20telle que la nôtre
01:14:21qui est quand même
01:14:22très individualiste
01:14:23je pense qu'il y a
01:14:25une peur
01:14:26enfin qu'il y a une peur
01:14:27j'ai une crainte
01:14:28de la facilité
01:14:30voilà
01:14:30aujourd'hui
01:14:33on a une médecine
01:14:34qui est
01:14:36tout aussi humaine
01:14:37que ce qu'elle était
01:14:38auparavant
01:14:38mais dans lequel
01:14:39les jeunes médecins
01:14:42sont plus attachés
01:14:43à ce qui est
01:14:44le droit
01:14:45ce qui est écrit
01:14:46ce qu'ils peuvent faire
01:14:47ce qu'ils peuvent ne pas faire
01:14:48et peut-être que
01:14:51c'est une façon aussi
01:14:52de se protéger
01:14:52je ne voudrais pas
01:14:55qu'on protocolise
01:14:56complètement
01:14:57la fin de vie
01:14:59on veut que ce dialogue
01:15:00continue à être
01:15:01dans cette zone grise
01:15:02quelque chose
01:15:03qui est sincère
01:15:04qui
01:15:05je l'ai dit
01:15:06de temps en temps
01:15:07est à la limite
01:15:09des préceptes
01:15:12et de l'ensemble
01:15:12que cette culture palliative
01:15:14envahisse les citoyens
01:15:16comme l'ensemble
01:15:17du corps médical
01:15:17et qu'on parle
01:15:18de la même chose
01:15:19voilà
01:15:20je ne voudrais pas
01:15:22non plus
01:15:22que dans une pénurie
01:15:25financière
01:15:25et en particulier
01:15:26qui va s'adresser
01:15:27à l'assurance maladie
01:15:28on nous montre
01:15:29comme les canadiens
01:15:30que ça rapporte
01:15:321 milliard 4 par an
01:15:33l'euthanasie
01:15:35à 6 mois
01:15:35et que si on l'a fait
01:15:37à 1 an
01:15:37ça rapporte
01:15:383 milliards 5
01:15:39j'ai pas envie de ça
01:15:40voilà
01:15:40donc effectivement
01:15:42ça peut être
01:15:43une forme de facilité
01:15:44ces CNE
01:15:45c'est des gens
01:15:48d'une immense qualité
01:15:50mais ils sont pas
01:15:51obligés d'écrire la loi
01:15:52c'est facile
01:15:54pardon de dire ça
01:15:55c'est assez facile
01:15:56de définir les principes
01:15:58mais quand on se met
01:15:59à la plume
01:16:00et qu'on dit
01:16:00voilà
01:16:01les directives anticipées
01:16:03elles sont opposables
01:16:04opposables sauf si
01:16:06parce que
01:16:07dans l'éthique
01:16:08il y a toujours
01:16:08cette recherche
01:16:10d'équivalence
01:16:11et de contre-pouvoir
01:16:13qui dit
01:16:14attention
01:16:14c'est pas toujours
01:16:15comme ça
01:16:15attention
01:16:16la zone
01:16:17elle est pas
01:16:18ligne droite
01:16:20elle est quelquefois courbe
01:16:22et quelquefois
01:16:23on rentre dans
01:16:23des zones grises
01:16:24donc
01:16:25s'il y a un peu
01:16:26de flou
01:16:27sur les décisions
01:16:29à prendre
01:16:29et qu'on y injecte
01:16:30un peu d'humains
01:16:31et de dialogues
01:16:32je trouve
01:16:33que ça serait bien
01:16:34et vous posiez
01:16:35la question juste
01:16:36faut-il légiférer
01:16:37là-dessus
01:16:38je rappelle
01:16:39avec un peu
01:16:40de modestie
01:16:40et d'arrogance
01:16:41que les lois
01:16:42antérieures
01:16:43ne sont pas
01:16:44des cadres
01:16:45législatifs
01:16:46elles auraient pu
01:16:47très bien
01:16:48être gérées
01:16:49dans du cadre
01:16:49réglementaire
01:16:50le seul élément
01:16:51du cadre législatif
01:16:52c'est que
01:16:53on a condamné
01:16:54l'obstination
01:16:55des raisonnables
01:16:55et que les médecins
01:16:56s'y sont référés
01:16:57alors que c'était écrit
01:16:58dans leur code
01:16:58de déontologie
01:16:59et qu'ils ne le lisaient pas
01:17:00donc
01:17:01le cadre
01:17:03effectivement
01:17:03c'est un cadre
01:17:05et moi je pense
01:17:06que ces lois
01:17:06doivent être
01:17:06des cheminements
01:17:07et non pas
01:17:08des protocoles
01:17:10je craindrais
01:17:11qu'un jour
01:17:12je dirige
01:17:14Technopole
01:17:15de Sofia
01:17:16Antipolis
01:17:16je vois l'évolution
01:17:17de l'intelligence
01:17:18artificielle
01:17:19franchement
01:17:20je n'aimerais pas
01:17:20qu'un jour
01:17:21les décisions
01:17:22tombent par
01:17:23l'intelligence
01:17:23artificielle
01:17:24et qu'il y ait
01:17:25toujours ce dialogue
01:17:27et ce doute
01:17:28voilà
01:17:28en se disant
01:17:29après
01:17:30je pense que
01:17:32j'ai fait le moins
01:17:32mal possible
01:17:33c'est pas si mal
01:17:34que ça
01:17:35de dire ça
01:17:36plutôt que de dire
01:17:36j'ai appliqué
01:17:37le protocole
01:17:38sur
01:17:39la priorité
01:17:42c'est la vulnérabilité
01:17:43dans notre société
01:17:44cette vulnérabilité
01:17:46il faut pas
01:17:47je crains aussi
01:17:49une autre chose
01:17:50c'est qu'on vit
01:17:51une période difficile
01:17:52sur le plan budgétaire
01:17:53on vit une période difficile
01:17:54sur le plan
01:17:55du coût
01:17:56de la santé
01:17:57la deuxième raison
01:18:00de la demande
01:18:01de mort
01:18:02après la souffrance
01:18:03la deuxième
01:18:04c'est je pèse
01:18:05sur ma famille
01:18:07et la société
01:18:08il faut dire
01:18:10personne n'est de trop
01:18:11dans cette société
01:18:12voilà
01:18:12ceux qui sont
01:18:13handicapés
01:18:14ceux qui sont vulnérables
01:18:15ceux qui sont mourants
01:18:17ceux qui sont mendiants
01:18:18et pardon de dire aussi
01:18:20ceux qui sont migrants
01:18:21ils sont humains
01:18:22et donc
01:18:23leur vulnérabilité
01:18:25nous implique
01:18:26directement
01:18:28si elle nous implique pas
01:18:29alors on a
01:18:30on va tourner
01:18:32le dos
01:18:33à ce qu'est la civilisation
01:18:35je dirais française
01:18:36la France
01:18:37c'est l'universel
01:18:38la France
01:18:38c'est la solidarité
01:18:39c'est pas
01:18:40c'est pas
01:18:42c'est pas
01:18:43un cadre
01:18:44et la priorité
01:18:45des priorités
01:18:46à mon avis
01:18:47c'est
01:18:47regardez les drames
01:18:49qui se passent
01:18:49je vais pas dériver là dessus
01:18:50mais
01:18:51est-ce que cette société
01:18:53est pas malade
01:18:54d'une quête
01:18:56de sens
01:18:57voilà
01:18:57d'une quête
01:18:58de solidarité
01:18:59d'une recherche
01:18:59de fraternité
01:19:00d'une transmission
01:19:03de quelque chose
01:19:05qui était peut-être
01:19:06quelquefois rigide
01:19:07ça c'est certain
01:19:08mais qui se faisait aussi
01:19:10avec
01:19:11une recherche
01:19:13de sens
01:19:14et de signification
01:19:16des actions
01:19:17que l'on mène
01:19:17donc je voudrais
01:19:19introduire beaucoup
01:19:19de doutes
01:19:20dans la loi
01:19:20et donc c'est embêtant
01:19:21d'une loi
01:19:22qui dit des choses
01:19:23et puis en même temps
01:19:24qui dit
01:19:24attention
01:19:25c'est un cadre
01:19:28c'est un cheminement
01:19:28c'est pas
01:19:29c'est pas
01:19:30le taux de TVA
01:19:31donc
01:19:33je suis un peu énervé
01:19:35sur les charcot
01:19:36parce que
01:19:36voilà
01:19:37toute la journée
01:19:39on a qu'à leur dire
01:19:40les charcot
01:19:41qui sont de trop
01:19:41puisque c'est les seuls
01:19:43qu'on prend comme référence
01:19:45qui auraient
01:19:45droit prioritaire
01:19:47à mourir
01:19:47je sais pas
01:19:49moi si je suis
01:19:49dans une catégorie
01:19:50vous avez raison
01:19:51d'évoquer
01:19:52les personnes
01:19:52en situation
01:19:53de handicap
01:19:53je suis dans une catégorie
01:19:55dans laquelle
01:19:55on m'en répète
01:19:56d'un côté
01:19:56tu coûtes cher
01:19:58et de l'autre côté
01:19:59tu sais que tu as le droit
01:20:00de mourir
01:20:01le jour où je suis
01:20:02dans l'alternative
01:20:03dans les maisons
01:20:04d'accompagnement
01:20:05dans lesquelles
01:20:05j'ai entendu quand même
01:20:06qui auraient le double choix
01:20:08comme au Canada
01:20:09et comme à l'Oregon
01:20:10et comme en Belgique
01:20:11vous avez le choix
01:20:12des soins palliatifs
01:20:13avec peu de moyens
01:20:14et vous avez le choix
01:20:15aussi du suicide assisté
01:20:17franchement
01:20:18je trouve
01:20:20au même endroit
01:20:21je trouve que c'est
01:20:22très dangereux
01:20:22moi je suis content
01:20:24que le Premier ministre
01:20:25ait dissocié
01:20:26les deux textes
01:20:27parce qu'on ne parle pas
01:20:30de la même chose
01:20:30dans les amalgames
01:20:32on finit par croire
01:20:33qu'on va dans le sens
01:20:34de la fraternité
01:20:36on va peut-être
01:20:37dans le sens
01:20:38de la liberté individuelle
01:20:39mais on ne va pas
01:20:39dans le sens
01:20:40de la fraternité
01:20:40ensuite
01:20:42le court terme
01:20:46et la sédation profonde
01:20:48effectivement
01:20:49la sédation profonde
01:20:52il faut réfléchir
01:20:54pourquoi on ne l'utilise pas
01:20:56voilà
01:20:56je rejoins la même
01:20:57situation
01:20:58on devrait
01:21:01se fixer comme objectif
01:21:02médical
01:21:03et sociétal
01:21:05personne
01:21:06dans la dernière semaine
01:21:08de sa vie
01:21:09ne doit souffrir
01:21:10voilà
01:21:10personne
01:21:11c'est un petit objectif
01:21:14c'est pas grand chose
01:21:15mais
01:21:16qu'est-ce qui c'est
01:21:18qui a blessé
01:21:18le coeur des survivants
01:21:19c'est les dernières heures
01:21:21les derniers jours
01:21:22où on a constaté
01:21:24que
01:21:24la souffrance
01:21:25n'était pas prise en charge
01:21:26bien
01:21:27déjà
01:21:28la sédation profonde
01:21:29et continue
01:21:30elle s'adresse
01:21:30à ça
01:21:31voilà
01:21:32et
01:21:33on voit bien
01:21:34que lorsqu'elle a été appliquée
01:21:35la famille
01:21:36puisque le témoignage
01:21:38du patient
01:21:39on ne peut pas l'avoir
01:21:39famille
01:21:40elle le dit
01:21:41ça s'est bien passé
01:21:42il s'est endormi
01:21:43progressivement
01:21:44et puis
01:21:45et puis la mort est venue
01:21:46et
01:21:48j'étais là
01:21:49ou j'étais pas là
01:21:50au passage
01:21:50les statistiques
01:21:52montrent que
01:21:52les morts
01:21:53choisissent
01:21:55la solitude
01:21:58pour mourir
01:21:59comme ça
01:21:59c'est un peu
01:22:00le pied de nez
01:22:01qui nous font
01:22:02on se dit
01:22:03je veux rester
01:22:04je veux rester
01:22:04je veux être là
01:22:05je veux être là
01:22:06tu sors
01:22:07tu reviens
01:22:07c'est fini
01:22:08voilà
01:22:08donc
01:22:09c'est ambigu
01:22:11il y a une très belle histoire
01:22:12là dessus
01:22:12où il y a une
01:22:13un homme
01:22:15qui n'arrive pas
01:22:16à mourir
01:22:16voilà
01:22:16dans un service
01:22:17et donc
01:22:18de soins palliatifs
01:22:20et personne ne comprend
01:22:21pourquoi il ne meurt pas
01:22:22parce qu'il a tous les critères
01:22:23défaillance polyviscérale
01:22:25il doit mourir
01:22:25voilà
01:22:25et l'interrogation
01:22:28est sur le fait
01:22:29que sa fille
01:22:30n'est pas venue le voir
01:22:31voilà
01:22:32parce qu'on veut
01:22:34protéger le vivant
01:22:35de la vision
01:22:36du père
01:22:37etc
01:22:37finalement
01:22:38on accède à cette demande
01:22:39alors
01:22:40coïncidence
01:22:41ou pas coïncidence
01:22:42il voit sa fille
01:22:44elle sort de la chambre
01:22:45et il meurt
01:22:45moi je crois aussi
01:22:48que les morts
01:22:50attendent quelquefois
01:22:51un moment
01:22:52de passer un moment
01:22:54pour lâcher prise
01:22:55et se trouver
01:22:56dans cette situation
01:22:57ces choses là
01:22:58ça ne s'écrit pas
01:22:59dans les textes
01:22:59et ça ne s'écrit pas
01:23:00dans les lois
01:23:00enfin
01:23:01rappelons
01:23:02la dérive
01:23:03puisqu'il y en a une
01:23:04au Canada
01:23:05aujourd'hui
01:23:06on est à presque
01:23:078% de morts
01:23:08provoquées
01:23:10dans la mortalité
01:23:11c'est beaucoup
01:23:12et donc
01:23:13vous avez raison
01:23:16ce jamais
01:23:17de rappeler
01:23:18que
01:23:19si ça reste
01:23:19une exception
01:23:20et en phase terminale
01:23:22pardon
01:23:23de l'exprimer
01:23:25comme ça
01:23:25mais c'est moins grave
01:23:26que si ça s'applique
01:23:28à une masse
01:23:28de population
01:23:29et de manière
01:23:30très antérieure
01:23:31au décès
01:23:33prévisionnel
01:23:34et
01:23:35les Canadiens
01:23:37ils ont copié
01:23:38l'Oregon
01:23:38je caricature un peu
01:23:39donc c'est un suicide assisté
01:23:41dans le suicide assisté
01:23:42un jour
01:23:43ils ont dit
01:23:44le pronostic vital
01:23:45à moyen terme
01:23:46on va l'enlever
01:23:46parce qu'après tout
01:23:47après tout
01:23:48pourquoi celui
01:23:49qui est en fauteuil roulant
01:23:50et qui ne supporte plus
01:23:51n'accède pas
01:23:53à la même demande
01:23:55pourquoi il n'y aurait pas droit
01:23:56voilà
01:23:56pourquoi le mineur
01:23:57n'y aurait pas droit
01:23:58etc etc
01:23:58et un jour
01:24:00au nom du droit
01:24:01et de la liberté
01:24:01on va ouvrir
01:24:02les portes entre ouvertes
01:24:04finissent dans ce domaine
01:24:05grand ouvert
01:24:06et donc
01:24:06ils ont enlevé
01:24:07le critère
01:24:08du pronostic vital
01:24:09quand ils ont enlevé
01:24:11le critère
01:24:12du pronostic vital
01:24:12ils sont passés
01:24:13de 2,5%
01:24:14à 7,8%
01:24:15de suicides assistés
01:24:17donc
01:24:18ça veut bien dire
01:24:20que le pronostic vital
01:24:21c'est aussi quelque chose
01:24:23qui est important
01:24:24malheureusement
01:24:25on ne peut pas le définir
01:24:26puisqu'on peut le définir
01:24:26à court terme
01:24:27et on ne sait pas le définir
01:24:28à moyen terme
01:24:29merci bien
01:24:31Alain
01:24:31tu voulais rajouter
01:24:31un dernier point
01:24:32je vais conforter
01:24:34ce que vient de dire
01:24:34Jean
01:24:35sur la maladie de Charcot
01:24:36parce que c'est vrai
01:24:37que c'est un peu irritant
01:24:38d'entendre toujours
01:24:39cet exemple
01:24:39de la maladie de Charcot
01:24:40alors je vous invite
01:24:41à aller revoir
01:24:41toute l'histoire
01:24:43de Stephen Hawking
01:24:44qui était l'un des plus grands
01:24:45physiciens du 20ème siècle
01:24:46et du début du 21ème
01:24:47très bien
01:24:49un grand merci
01:24:50un grand merci
01:24:51pour ton échange
01:24:52qui est toujours riche
01:24:53pour nous
01:24:53merci
01:24:54merci à vous
01:24:55ça nous permet
01:24:56quelles que soient
01:24:57nos convictions
01:24:57et nos positions
01:24:58d'avancer dans nos réflexions
01:25:00voilà
01:25:00merci Jean
01:25:01voilà pour cette audition
01:25:03de Jean Léonetti
01:25:04par la commission
01:25:05des affaires sociales
01:25:06du Sénat
01:25:06une audition
01:25:07à retrouver
01:25:08sur notre site internet
01:25:09très bonne journée
01:25:10sur les chaînes parlementaires
01:25:11merci à vous
01:25:12merci à vous

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