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Mercredi 11 juin 2025, retrouvez Sébastien Maire (Délégué général, France Villes et Territoires Durables), Fanny Valembois (Copilote du secteur Culture, The Shift Project et consultante, Le Bureau des Acclimatations), Serge Ewenczyk (Président, Éditions çà et là) et Margaux Nicaise (Cofondatrice, Malizenn) dans SMART IMPACT, une émission présentée par Thomas Hugues.

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00:00Bonjour à toutes et à tous, bienvenue, c'est Smart Impact, l'émission de la transformation environnementale et sociétale de notre économie.
00:14Voici le sommaire. Mon invité, c'est Sébastien Maire, délégué général de l'association France Villes et Territoires Durables,
00:21qui propose aux élus locaux une boîte à outils et un réseau pour que leur territoire résiste mieux aux crises climatiques.
00:28Dans notre débat, on se demandera comment décarboner le secteur de l'édition, comment moins imprimer, mais aussi mieux distribuer pour réduire les stocks
00:37et ces livres qui finissent au pilon. On répondra à ces questions dans une dizaine de minutes.
00:42Et puis dans notre rubrique consacrée aux startups, je vous présenterai Malizenne qui crée des sacs à partir des chutes de céleri ou de textiles
00:51utilisées dans le nautisme. Collectivité locale, édition Maroquinerie, 3 univers, 30 minutes pour les explorer.
00:57Oui, c'est parti.
01:04L'invité de ce Smart Impact, c'est Sébastien Maire. Bonjour.
01:08Bonjour.
01:08Bienvenue. Vous êtes délégué général de France Villes et Territoires Durables, association qui a été créée en 2019.
01:15Avec quelle mission ?
01:16Avec la mission de repérer et de rediffuser le plus largement possible des méthodes, des outils et des solutions qui fonctionnent pour accélérer la transition écologique énergétique des territoires
01:28et en même temps les faire monter en résilience.
01:30Quand je parle de territoire, je parle d'un territoire avec tout ce qu'il contient, c'est-à-dire aussi bien les habitants que les collectivités et les entreprises et le tissu économique.
01:39Aujourd'hui, on est assez en retard sur un nombre de sujets.
01:42Et pour protéger notamment nos entreprises et l'action économique, on a besoin de changer de certains paradigmes.
01:48Oui, je disais dans les titres que vous proposez un certain nombre d'éléments, boîtes à outils, réseaux, aux élus locaux, mais aussi aux entreprises.
01:55C'est tout l'écosystème territorial qui peut bénéficier de votre action, c'est ça ?
02:00C'est exactement ça, en partant du principe que personne n'a la solution tout seul.
02:04Et que dans la mise en œuvre des actions nécessaires, il faut le faire ensemble et qu'on a besoin de renforcer en amont les réflexions, le partage de visions entre ces différents acteurs, publics et privés, pour qu'ils se mettent d'accord.
02:17Mais est-ce que c'est si facile de les faire dialoguer ? J'imagine que maintenant, en 6 ans, vous avez pas mal d'expérience, mais au départ, c'est parfois des langages un peu différents, des états d'esprit un peu différents.
02:28Ça fait partie des obstacles qu'il a fallu contourner ?
02:33Oui, mais c'est à la fois un obstacle et une chance, parce que c'est cette diversité d'approche, cette diversité de points de vue qui permet de trouver des solutions qui fonctionnent.
02:43Avant, il ne se parle pas forcément.
02:44Voilà, alors il se parle quand même. Il y a quand même des instances, peut-être un peu trop officielles d'ailleurs, qui permettent ces rencontres entre les deux mondes.
02:52Nous, on est beaucoup sur la logique territoriale, c'est-à-dire sur un territoire donné. Comment, avec les acteurs en place, on peut faire bifurquer les trajectoires ?
03:00Alors, si on prend quelques exemples, quels services, quelles actions vous avez menées depuis plus de 5 ans au sein de ces collectivités de ce territoire ?
03:08Eh bien, nous organisons, par exemple, j'étais encore hier à Lille-sur-la-Sorgue, avec des maires, des élus et des entreprises de 6 départements,
03:16où nous montrons qu'il est possible de faire autrement, en faisant intervenir des acteurs, publics et privés, qui ont déjà fait.
03:24Ça fonctionne beaucoup mieux quand un maire ou une maire dit à un ou une autre maire, j'ai fait ça et ça marche, que quand des techniciens ou des experts comme moi vont le dire derrière un PowerPoint.
03:36Et donc, notre idée, c'est de mettre en contact les acteurs pour qu'ils puissent s'inspirer les uns et les autres, car aujourd'hui, on a toutes les solutions.
03:43Qu'est-ce que... Alors, si on reprend cet événement-là, est-ce qu'il vous vient en tête, comme ça, des exemples de...
03:48Puisque nous, c'est exactement ce qu'on essaye de faire, nous, ici, avec Spartan Park, c'est de partager les bonnes pratiques et de faire en sorte que ce qui marche se diffuse le mieux possible.
03:58Est-ce que vous avez, voilà, un bon exemple de ce qui a été évoqué hier, que vous pouvez partager avec nos téléspectateurs, nos téléspectatrices ?
04:05Par exemple, il y a quelque chose qui se développe beaucoup aujourd'hui, c'est dans le domaine de l'adaptation des villes,
04:10c'est-à-dire comment on prépare nos villes à supporter des canicules à 50 degrés pendant un mois, elles ne sont pas du tout prêtes, ça va arriver vite, plus vite que ce qui était prédit jusqu'ici.
04:20Et il existe des solutions qui sont peu coûteuses, qui mobilisent de la donnée et qui permettent d'avoir de multiples points de fraîcheur partout en ville.
04:28Par exemple, en utilisant des données, on peut voir à quels endroits il est beaucoup plus facile de déconnecter les tuyaux de gestion d'eau pluviale
04:37pour que l'eau s'infiltre dans le sol plutôt qu'elle soit considérée comme un déchet et qu'elle parte dans des tuyaux.
04:43Si elle s'infiltre dans le sol, on a la possibilité de planter des arbres qui vont durer, des espaces verts qui vont supporter les arrêtés d'interdiction d'arrosage pendant l'été
04:51qui vont devenir la norme et donc autant d'îlots de fraîcheur partout disséminés dans la ville ou dans le territoire qui permettent de rafraîchir globalement la température.
05:00Ça ne coûte pas cher, c'est possible, mais ça va demander qu'on mobilise parfois un peu de foncier privé, parfois un peu de foncier public.
05:07Et donc, là encore, on a besoin de l'ensemble des acteurs.
05:10Vous vous présentez comme un doux tank, cercle de réflexion et d'action.
05:14Les deux sont importants. Là, on parle pas mal d'action, de bonnes pratiques à partager.
05:18Sur la partie réflexion, il y a aussi des experts qui vous accompagnent, des chercheurs.
05:23Vous voyez ce que je veux dire ? Parce que pour nourrir des actions efficaces, souvent, quand on parle avec des chefs d'entreprise ici, ils disent
05:30« Ok, moi je veux faire des choses, mais je vais être sûr que je vais dans la bonne direction. »
05:33Vous voyez ce que je veux dire ?
05:34C'est pour ça qu'on a un comité scientifique, en effet, qui accompagne tous nos travaux.
05:38On a même un doctorant in-house qui travaille sur les indicateurs territoriaux pour les entreprises et pour les collectivités
05:46qui permettent de faire bifurquer les trajectoires pour garantir la résilience des territoires et des entreprises.
05:52Donc oui, le cadre logique est important.
05:55Et d'ailleurs, ce cadre logique sur la transition écologique, il évolue beaucoup en ce moment.
05:59Le développement durable a du plomb dans l'aile, par exemple, parce qu'il est un peu considéré comme un oxymore.
06:04Aujourd'hui, on parlerait plus d'équilibre durable que de développement durable en partant du principe que le développement infini est une idéologie
06:13à partir du moment où les ressources qui sont nécessaires sont-elles en quantité limitée.
06:16Donc il y a aussi une révolution culturelle à conduire chez les décideuses et les décideurs, privées comme publiques,
06:22et c'est une grande partie de notre action.
06:24Il y a un mot que vous utilisez souvent, nous aussi, le mot smart, smart city.
06:27Qu'est-ce que ça signifie dans l'action d'une association comme la vôtre ?
06:31Ça a beaucoup évolué.
06:33C'est-à-dire qu'effectivement, au début, à sa création, l'association était très tournée vers les logiques de smart city technologiques.
06:39Et à l'instar de toute la société, on en est sortis, puisque la smart city, telle qu'elle avait été pensée il y a 10-15 ans, a montré que ça ne fonctionnait pas,
06:48que ça finissait par coûter plus cher et en coût de fonctionnement pour les collectivités et en impact environnementaux,
06:54puisqu'aujourd'hui, l'explosion de l'utilisation du numérique est en train de mettre par terre les 20 ans d'efforts qu'on a réalisés sur les transports,
07:03sur l'isolation des logements, etc. En quelques années, on perd tout le gain et les efforts qui ont été faits en 20 ans parce qu'on explose le numérique sans discernement.
07:13Et donc, ça veut dire que c'est une façon différente de rendre les villes intelligentes et résilientes ?
07:18Tout à fait, parce que la donnée, elle est utile. On a besoin d'outils technologiques pour, par exemple, mieux décider.
07:25C'est-à-dire les outils d'aide à la décision, aujourd'hui, des outils numériques nous permettent, avec les jumeaux numériques par exemple,
07:31certains de nos adhérents les proposent, de mieux anticiper les impacts de telle ou telle solution avant la décision.
07:38Parce qu'aujourd'hui, les enjeux sont tels que l'évaluation ex ante, c'est-à-dire avant de réaliser les actions,
07:45est bien plus importante que celle d'après parce qu'à vrai dire, aujourd'hui, réaliser dans 15 ans qu'on s'est trompé ne nous servira pas à grand-chose.
07:51Est-ce que les assureurs sont vos partenaires ? Parce qu'il y a des débats de plus en plus importants avec des assureurs
07:57qui commencent à moins assurer les villes ou à mettre des primes tellement chères que, finalement, les élus disent
08:03« Non, on ne peut plus s'assurer ». Et à côté de ça, il y a aussi des outils développés par les assurances
08:10pour anticiper les crises, pour mieux les traiter. Donc, comment vous travaillez avec les grands agents ?
08:15Pas assez. J'aimerais beaucoup travailler davantage avec les assureurs, notamment parce que,
08:20comme vous venez très justement de le dire, leurs données sont extrêmement fiables et bien plus pointues
08:26que celles qui sont utilisées par les acteurs publics quand ils font un plan local d'urbanisme, par exemple.
08:31Aujourd'hui, un assureur, il sait prédire à la parcelle cadastrale le risque d'inondation par huissellement,
08:37le retrait gonflement d'argile, etc., etc., à la parcelle. Alors que les élus raisonnent encore,
08:42ou les services des collectivités à l'échelle des quartiers, des grands quartiers dans leur zonage.
08:46À terme, les deux maisons, l'une à côté de l'autre, risquent de ne pas être assurées de la même manière
08:52ou à la même prime parce qu'une va être beaucoup plus sujette, par exemple, à l'inondation par huissellement
08:56qui est en train d'exploser aujourd'hui et qui n'est pas prise en compte par la Réglementation Nationale des Risques.
09:01La Réglementation Nationale des Risques, elle tient compte de l'inondation par débordement,
09:05mais pas par huissellement. Et aujourd'hui, tous les dégâts dans les entreprises, dans les collectivités,
09:09c'est le ruissellement, beaucoup plus que le débordement. Les assureurs ont les données.
09:12Donc, vous leur lancez en quelque sorte un appel ?
09:15On aimerait beaucoup travailler davantage avec les assureurs, on le fait déjà,
09:19notamment dans cet intérêt commun qu'on a à convaincre les élus locaux
09:25qu'il est possible de faire autrement et de mieux protéger les biens et les personnes face au monde qui vient.
09:30Il y a plusieurs piliers, la sobriété, la résilience, l'inclusion, la créativité avec lesquels vous travaillez.
09:38Je voudrais qu'on parle de l'inclusion jusqu'à ce qu'il était récemment avec Marie-Amélie Le Fur,
09:43la présidente du comité paralympique et sportif français.
09:46C'est vrai que les Jeux Olympiques paralympiques de Paris, ça a permis d'avancer dans pas mal de domaines.
09:50Mais il y a un petit côté, parenthèse enchantée, et encore beaucoup de travail à faire sur l'accessibilité,
09:55notamment dans les villes.
09:56Et donc, est-ce que c'est un domaine sur lequel vous travaillez particulièrement ?
10:02Alors oui, on y travaille aussi, mais c'est vrai qu'on a une vision large de l'inclusion.
10:07C'est-à-dire, c'est pas seulement les personnes en situation de handicap,
10:10ça peut être aussi de l'inclusion sociale, culturelle, économique, numérique.
10:15Lutter contre la fracture numérique.
10:16Exactement.
10:17Bien sûr, les questions d'accessibilité transport, par exemple, au transport en commun,
10:23pour les personnes en situation de handicap sont loin d'avoir trouvé toutes leurs réponses.
10:28Néanmoins, là encore, des développements de nouvelles mobilités
10:34qui sont faites par des entreprises françaises,
10:36qu'on appelle les véhicules légers et intermédiaires,
10:40certains peuvent tout à fait permettre le transport de personnes en situation de handicap.
10:44Ça coûtera beaucoup moins cher que de mettre aux normes des stations de métro.
10:47Donc peut-être que vu la raréfaction des crédits publics et privés
10:52qui seront disponibles pour ces actions,
10:54on a intérêt à être plus smart et à réfléchir autrement qu'on ne l'a fait au XXe siècle.
10:59Merci beaucoup Sébastien May et à bientôt sur Bsmart4Change.
11:02On passe à notre débat, comment décarboner le secteur de l'édition.
11:12Comment décarboner le secteur de l'édition ?
11:14Voilà le thème de notre débat.
11:15Je vous présente tout de suite mes invités.
11:18Serge Evenzig, bonjour.
11:19Bonjour.
11:19Vous êtes le président de la maison d'édition Ça et Là
11:22et avec nous en duplex Fanny Vallembois.
11:24Bonjour.
11:25Bonjour.
11:26Co-pilote du secteur Culture au Shift Project
11:28et puis consultante au bureau des acclimatations.
11:33On va expliquer ce que vous faites l'un et l'autre.
11:35Peut-être d'abord Serge Evenzig, cette maison d'édition.
11:38Tu fêtes ses 20 ans.
11:39Tout à fait.
11:40Cette année, bon anniversaire.
11:41C'est quoi votre ligne éditoriale ?
11:43La particularité de la maison d'édition, c'est qu'on publie uniquement des bandes dessinées
11:46d'une part et d'autre part, excusez-moi, des auteurs et autrices de pays étrangers.
11:50D'accord.
11:51En 20 ans, puisqu'en fait nos 20 ans, on a publié des auteurs de 33 pays différents
11:55à travers 215 titres de notre catalogue.
11:59Pourquoi vous avez fait ce choix ? Moi qui suis passionné de BD, ça m'intéresse parce
12:02que les grandes maisons d'édition étaient déjà bien présentes avec les auteurs français
12:07ou francophones ?
12:08J'avais envie à la création d'avoir une petite spécificité pour le lancement de
12:12la maison d'édition et c'est vrai que le fait de se focaliser sur le domaine étranger
12:15qui me tient à cœur en plus culturellement.
12:16Moi j'étais un grand consommateur, on va dire, de biens culturels étrangers, que
12:20ce soit en cinéma, musique ou littérature et bandes dessinées, ça me semblait être
12:24plutôt intéressant et c'est vrai que c'est un modèle économique en plus qui me semblait
12:30à l'époque, alors ce n'était pas forcément non-aligné mais pertinent, je me suis rendu
12:33compte qu'il y avait des coups cachés en fait, la traduction, le lettrage, etc.
12:36Mais c'est vrai que faire découvrir des auteurs étrangers au lectorat français, c'était
12:39pour moi quelque chose d'important.
12:41Fanny Valambois, je veux bien que vous nous présentiez le bureau des acclimatations,
12:46de quoi s'agit-il ?
12:48Alors c'est un collectif, on est cinq consultants aujourd'hui et on accompagne les organisations
12:52du secteur de la culture mais aussi par moments du sport et du tourisme sur les enjeux
12:57de transformation écologique et on fait aussi bien des activités de recherche que
13:01de l'accompagnement des acteurs ou des acteurs publics ou des acteurs privés et de la formation.
13:06Et alors je reste avec vous Fanny Valambois sur le constat, déjà le point de départ,
13:10le bilan carbone du secteur, quel est-il et quel levier important on pourrait activer ?
13:19Ce qui est intéressant avec le secteur du livre, c'est que les études dont on dispose,
13:23qui viennent de plusieurs sources en France et à l'international, elles sont vraiment
13:26très convergentes, donc la connaissance est assez claire, l'impact principal c'est
13:30la fabrication.
13:31On a parfois l'impression que les enjeux de transport par exemple vont être plus importants,
13:35dans la réalité c'est vraiment très très clair, c'est la fabrication des livres,
13:39notamment la fabrication du papier et puis tout le process ensuite évidemment de transformation,
13:43c'est là que vont se faire l'essentiel des impacts, que ce soit en CO2 mais aussi
13:46en pollution, en jeux plastiques, etc.
13:49Le sujet il est là, après ça crée parfois un petit malentendu, on peut être amené
13:55à se dire si le problème c'est la fabrication, alors la réponse va se faire à l'endroit
13:59de la fabrication.
14:00Il va suffire entre guillemets, ce qui n'est déjà pas une mince affaire, d'éco-concevoir
14:03mon livre et tout va bien se passer.
14:05Nous on propose l'idée que probablement c'est au-delà, la réponse va être au-delà
14:10d'une réponse simplement de fabrication, c'est revoir le modèle économique, revoir
14:14les modes de production pour se demander comment on arrive à fabriquer moins et pas seulement
14:18fabriquer mieux et ça peut avoir aussi évidemment des impacts économiques importants dans une
14:22filière qui cherche son équilibre économique.
14:24Oui effectivement, vous travaillez d'ailleurs sur un projet de recherche intitulé Décarboner
14:28le livre et l'édition qui doit se terminer je crois en octobre prochain.
14:32Alors le premier élément qui me vient en tête c'est les livres qui finissent au pilon,
14:37qu'est-ce que ça représente et comment on peut réduire cette masse ?
14:42Les livres qui vont au pilon aujourd'hui on estime que c'est 20% de la production, ce qui
14:46est beaucoup et pour moi bien sûr c'est une vraie question écologique mais en fait
14:50c'est surtout un symptôme.
14:51C'est un symptôme d'une industrie qui ne fonctionne, qui ne tient debout que parce
14:56qu'elle produit des volumes importants, parce qu'elle réalise en fait de toutes petites
14:59marges sur chaque volume, sur chaque exemplaire, sur chaque livre produit.
15:03Et donc évidemment il faut qu'on trouve comment limiter la quantité de livres qui sont détruits
15:08alors qu'ils n'ont pas été lus mais au-delà de ça il y a une vraie question de comment
15:11est-ce qu'on arrive à chercher d'autres modèles qui reposent moins sur le volume.
15:16Et notamment le fait qu'aujourd'hui l'industrie du livre, une fois qu'elle a vendu le livre
15:20une première fois, il n'y a plus du tout de valeur qui va être créée, elle ne sait
15:23pas du tout intégrer les questions d'économie circulaire alors même que ça fait partie
15:27complètement des pratiques de lecture.
15:28Un livre il a une durée de vie très très longue, il crée de la valeur culturelle,
15:32sociale, de plaisir, de découverte pendant très longtemps mais il ne crée de la valeur
15:36économique qu'au démarrage de sa vie.
15:38Et finalement là il y a un paradoxe sur lequel l'industrie du livre aurait besoin de travailler.
15:43Oui on pourrait notamment parler de location de livres, on va garder un peu de temps pour l'évoquer.
15:50Au niveau d'une maison d'édition indépendante comme la vôtre, est-ce que vous avez intégré
15:55cette dimension de la décarbonation et comment ?
15:58Oui tout à fait, je pense que c'est important, on ne peut pas faire abstraction de ce problème
16:01même si on est tout à fait conscient qu'étant éditeur de livres, notre matière première
16:04c'est le papier et donc les armes. Je pense que pour réagir aussi à ce qui a été dit
16:08une des modalités de réflexion et de réponse qu'on peut apporter c'est de réduire le
16:15nombre de parutions en fait. C'est le levier le principal j'irai pour une maison d'édition
16:19qui contrôle complètement le nombre de titres qu'elle a publié chaque année.
16:22Et donc en fait nous c'est vrai qu'on a décidé de publier par exemple de se limiter
16:26à maximum 11 titres par an, on pourra en faire plus.
16:29Mais le fait de limiter le nombre de titres mécaniquement ça limite le nombre de la production.
16:33C'est difficile, c'est un choix.
16:37Tout à fait, mais je pense que voilà, quand on est conscient de la problématique
16:40de la décarbonation, on n'a pas le choix. Et il y a aussi d'autres leviers qu'on peut utiliser
16:45notamment le fait de réduire l'étirage, d'ajuster l'étirage, puisqu'un des problèmes
16:49effectivement on parle des retours, il y a effectivement 25% de retours en moyenne.
16:52C'est vrai aussi pour la bande dessinée ?
16:53C'est vrai pour la bande dessinée comme le reste de l'édition. Dans le monde de l'édition
16:56ça représente à peu près 100 millions de livres par an, dans le monde de la bande dessinée
16:59un peu moins, le marché de la bande dessinée représente à peu près 20% du marché
17:02de l'édition globale. Mais donc on est confronté à ça et on doit trouver les moyens
17:06d'ajuster au mieux nos tirages pour limiter ce gâchis, en fait, ces retours.
17:10Et alors comment ? Comment vous faites ?
17:12Il y a la volonté, puis ensuite il y a la difficulté de mise en œuvre.
17:15C'est très très compliqué, c'est-à-dire qu'on doit travailler main dans la main avec nos distributeurs
17:19et avoir accès à des bases de données aussi qui nous donnent des estimations de vente
17:21en temps réel quasiment chez les libraires pour pouvoir gérer une réimpression ou pas.
17:27C'est-à-dire que ce qui pose un problème aussi, c'est la réimpression de trop, qui
17:30souvent finit à 100% au pilon. Ça, on a besoin d'outils statistiques, d'outils qui
17:35nous permettent, nous, d'évaluer la réalité des ventes sur le marché par les libraires
17:39pour permettre d'ajuster nos tirages. Un des moyens aussi qu'on a, c'est d'essayer de
17:43limiter la distance qu'il peut y avoir entre les endroits où le papier fabriqué, où les
17:47livres sont imprimés. C'est-à-dire que ça n'a pas de sens de faire imprimer un livre en Italie
17:53si le papier vient de Scandinavie, comme ça arrive souvent, pour après l'envoyer en
17:56France. Donc, on essaie de raisonner là-dessus, de travailler là-dessus avec nos imprimeurs.
18:00Et la filière est prête pour ça ou alors il y a des mauvaises habitudes tellement ancrées
18:04que c'est difficile de favoriser le circuit court en quelque sorte ?
18:08Ça évolue. Ça évolue. C'est-à-dire que les imprimeurs sont conscients de ça, que
18:11ce soit des imprimeurs en France ou des imprimeurs en Europe de l'Est ou dans d'autres pays européens.
18:15Il se trouve qu'en France, il n'y a quasiment plus de fabrication de papier. Donc, c'est un vrai
18:19enjeu et c'est une vraie problématique. Mais on peut trouver, par exemple, quand on travaille
18:22avec des imprimeurs dans les Pays-Balques, comme ça nous arrive, s'arranger pour utiliser
18:27du papier fabriqué en Scandinavie. Parce que là, pour le coup, les distances sont très
18:30limitées. Évidemment, après, il y a la distance de transport. Mais voilà, c'est des petites
18:34astuces qu'on peut essayer de mettre en œuvre.
18:36Fanny Vallembois, est-ce qu'il y a une prise de conscience des grandes maisons d'édition
18:40sur ces questions-là ?
18:42Oui, indéniablement. Pour certaines, depuis plusieurs années, la prise de conscience, enfin,
18:49les leviers qui sont mis en œuvre sont d'ordre très divers selon les maisons. Mais je crois
18:54qu'aujourd'hui, à peu près toutes les maisons s'en emparent. Les indépendantes comme les
18:57grands groupes, effectivement. Nous, on a la chance, dans le projet de recherche qu'on
19:00porte, d'avoir beaucoup de maisons qui travaillent avec nous. Sur le projet que vous mentionnez
19:04à l'instant de location de livres en librairie, on a une dizaine de maisons qui vont partir
19:09dans l'expérimentation avec nous. Donc oui, indéniablement. Et d'ailleurs, on le voit
19:12au niveau des institutions, que ce soit les différents syndicats, aussi bien des libraires
19:16que des auteurs, que des éditeurs ont des groupes de travail en place, travaillent à
19:21des projets de chartes, de formations, etc. Donc oui, ça bouge.
19:25Donc vous voulez nous faire vider nos bibliothèques dans nos salons. Ça peut être beau une bibliothèque
19:30avec des beaux livres. Non, mais je suis assez d'accord avec vous. Passer de la possession
19:34à la location, c'est ça le modèle qu'on pourrait commencer à développer ?
19:39En tout cas, c'est un modèle complémentaire. Parce que moi, je ne suis pas prête à renoncer
19:42aux livres qui sont effectivement partout autour de moi. Mais je me rends compte que pour un
19:46certain nombre de livres, la propriété n'est pas pertinente pour moi. Personnellement,
19:50je contribue beaucoup aux boîtes à livres, aux dons, à la revente parfois, etc. Et on
19:55se rend compte aussi, c'est ce que je disais tout à l'heure, que le modèle économique
19:58aujourd'hui, il est vraiment basé sur les volumes. Ce qui veut dire que des maisons
20:03comme ça et là, comme d'autres maisons qui essayent d'avoir une production raisonnée,
20:07en fait, elles ont énormément de difficultés à exister parce qu'elles ne vont faire que
20:10de faibles marges sur les exemplaires. Et donc le but aussi de cette expérimentation,
20:13c'est de rendre la lecture accessible économiquement pour les lecteurs, mais aussi
20:17de mieux rémunérer toute la chaîne. Et de se demander, plutôt que chercher la croissance
20:21par le volume, est-ce qu'on peut aller chercher une meilleure rentabilité, une meilleure
20:24profitabilité pour chaque exemplaire fabriqué ? Donc à la fois fabriquer moins de livres
20:28et les faire plus circuler et gagner sur le plan environnemental, mais aussi vendre
20:31mieux et rémunérer mieux tout le monde. Et intéresser sur le modèle économique
20:35à la fois les auteurs, les éditeurs et les libraires, évidemment. Et enfin, évidemment,
20:40lire plus, comment ce modèle-là, il peut permettre aussi d'encourager la découverte.
20:45On sait, on est dans un contexte où les livres coûtent de plus en plus cher par rapport
20:49à un contexte d'inflation, de pouvoir d'achat en baisse. Du coup, ça peut inciter à ne pas
20:55vraiment découvrir des nouveautés, mais plutôt acheter en priorité des choses qu'on
21:00connaît déjà, des best-sellers, des livres qui ont des prix.
21:02Je voudrais un peu plus le spectre, effectivement. Qu'est-ce que vous en pensez, Serge Evenzig,
21:07de la location ? Est-ce que c'est adapté à la BD ? Moi, j'aime bien relire mes BD
21:13favorites, et donc je suis content qu'elles soient dans la bibliothèque.
21:15Oui, c'est vrai. Et puis l'autre aspect important pour nous, par exemple, dans la bande dessinée,
21:19c'est que c'est un cadeau par excellence. On a un cycle de ventes qui le montre bien,
21:23une saisonnalité des ventes qui le montre bien. On fait une grosse partie de notre chiffre d'affaires
21:26à Noël. Donc ça, c'est des cadeaux qui sont offerts aux gens. Donc bon, c'est le système
21:30de location, mais je pense qu'effectivement, comme ça a été dit, la mécanique de location
21:34serait un complément, mais ça risque d'être à la marge aussi, parce qu'il y a quand même
21:39une... on voit à quel point ça tient à cœur aux gens d'avoir le livre chez soi, de l'offrir.
21:45Il y a aussi le problème du marché de location. Enfin, j'ai un problème. C'est intéressant
21:50de voir ce qui se passe au niveau du marché de location, qui peut être perçu comme une
21:54réponse, une forme de réponse à la décarbonation, mais ça pose aussi beaucoup de problèmes
21:57de rémunération des auteurs, notamment, qui ne sont pas du tout rémunérés quand le
22:00livre est vendu de location. Et ça, c'est un vrai problème, parce qu'il y a une vraie
22:03précarité, une précarisation accentuée des auteurs. Et donc, il faut absolument
22:06trouver des moyens, des formes de compensation quand il y a ce type d'activité qui se développe.
22:12Notamment sur les... Il y a des sites qui proposent ça, ou des applis...
22:16Il y a des gros sites internet étrangers, notamment, qui ont fait exposer le marché de l'occasion.
22:19Ça, ça m'est arrivé. Donc, on le connaît bien. Il n'y a pas de rémunération des auteurs ?
22:24Non, ni des auteurs, ni des éditeurs, incidemment. Et ça pose des gros problèmes pour les
22:28petits états indépendants. Sur des typologies de livres, comme, par exemple, le polar ou
22:32la bande dessinée, c'est en train d'exploser. Ça représente 20% du marché du polar.
22:36Donc, il faut faire vraiment...
22:38Quand on trouve des marges, effectivement, c'est... Et donc, c'est quoi ? C'est un espace de décision
22:43européen ? C'est... Qu'est-ce qui... Comment on peut faire en sorte qu'il y ait un
22:46intéressement des auteurs, des éditeurs ?
22:47Il y a des discussions, là, en France, entre les associations d'auteurs, les associations
22:50d'éditeurs, les associations de libraires, pour trouver, essayer de voir si on peut mettre
22:54en place des taxes parafiscales, enfin, des systèmes de rémunération avec un ipsilin,
22:58enfin, quelques centimes d'euros, une dizaine de centimes d'euros qui seraient reversés
23:02à des sociétés collectives qui, après, redistribueraient aux ayants droit une partie des revenus
23:07issus de l'exploitation de livres en occasion.
23:10Merci beaucoup. Merci à tous les deux et à bientôt sur Bsmart for Change. J'en passe
23:15tout de suite à notre rubrique Startup et Innovations.
23:24Smart Ideas, c'est notre rubrique Startup avec Margot Niquez. Bonjour.
23:28Bonjour.
23:28Bienvenue. Vous êtes la cofondatrice de Malizenne. Vous l'avez créée en 2022, tout début de
23:33l'année 2022, avec Stéphane Aslangul. Et avec quelle idée ? C'est quoi le point de départ ?
23:38Alors, Malizenne, en fait, c'est un atelier de valorisation de déchets textiles issus
23:43du nautisme. Donc, on travaille avec des entreprises localement autour de Concarneau et
23:49l'idée, c'est de valoriser leurs chutes qui n'ont aucune filière de recyclage.
23:53D'accord. Ça a commencé avec une céleri, c'est ça ?
23:56Oui. Par exemple, une céleri qui travaille sur le pont des bateaux pour faire des taux
24:00d'hivernage, des taux d'ombrage. Toutes ces matières, ça génère beaucoup de petites
24:04chutes. Et donc, nous, on a une grosse matériothèque. On récupère tous ces textiles, on les trie
24:10et on essaye de faire des objets du quotidien avec. Donc, des accessoires, des chapeaux,
24:15des objets.
24:16Des sacs.
24:16Des sacs, exactement. Et l'idée, c'est vraiment de faire de plus en plus d'objets du quotidien
24:22avec des déchets.
24:23Alors là, on est vraiment dans un écosystème breton, c'est-à-dire que vous vous adressez
24:28à des entreprises qui sont dans la région.
24:31Oui, c'est très local. Donc, il va y avoir Glicotène qui travaille plutôt pour fabriquer
24:38des objets, des vêtements pour la pêche, pour le nautisme, pour les skippers, pour la course
24:43au large. Il va y avoir une entreprise de matelotage. Donc, énormément de chutes, de cordages,
24:49tout ce qui est boot, amarre pour les bateaux. Donc, voilà, tout ça, c'est vraiment des
24:55sacs poubelles qu'on récupère et qu'on trie.
24:57Et alors, ça veut dire qu'à partir de cette matière, vous créez quelques pièces parce
25:03que chaque pièce est différente des autres en fonction de ce que vous récupérez comme
25:07matériau ? Comment ça marche ?
25:08L'idée, c'est de créer de l'unique à partir de la série. Donc, on a des modèles
25:13définis et l'idée, c'est qu'ils sont tous uniques parce qu'il y a toujours une
25:17variation du fait de travailler avec des petits bouts de matière.
25:22Si on fait la liste des matériaux, avec quelle chute, finalement, de matériaux vous
25:28travaillez ?
25:30Alors, ça va être des PVC, donc une bâche comme pour les camions, des acryliques.
25:35Alors, c'est des matières techniques, en fait. C'est très technique. Ça va être
25:39vraiment pour résister au soleil, au sel. Donc, ça va être sur les ponts des bateaux
25:43plutôt. Et après, il va y avoir du cordage, donc du boot. Il va y avoir des matières
25:47encore plus techniques, de la bâteline qui permet de ne pas faire de la rétention d'eau
25:52à partir du moment où il y a du désécoulement. Il va y avoir du filet. On travaille aussi
25:59avec du filet, donc tout type de filet, notamment catamaran. C'est pas tout à fait du filet
26:05pêche. C'est d'eau de filet.
26:06Ah oui, des filets qui servent dans les catamarans pour pouvoir se filer d'un point
26:11à l'autre.
26:11C'est ce qu'on appelle les trampolines.
26:12D'accord. OK. Et alors, en termes de créativité, vous voyez arriver un nouveau matériau.
26:21Vous vous dites, tiens, qu'est-ce que je vais pouvoir en faire ? Comment vous créez
26:24en quelque sorte ?
26:25C'est vrai que l'idée, c'est de fabriquer des objets sans générer plus de chute.
26:29Donc, on va essayer de s'adapter à la forme du type de matière que je récolte.
26:34Et les modèles sont définis comme ça. Et au fur et à mesure que la matériothèque
26:38grandit, on sait le potentiel d'une chute. En fait, c'est un peu ça, l'idée.
26:44Combien de pièces vous produisez par mois ?
26:47C'est très variable. Là, on prépare la saison d'été. Donc, on est sur des gros volumes.
26:51Enfin, des gros volumes. Ça reste des pièces uniques. Donc, une centaine, 200 à peu
26:56près. Voilà. Ça dépend des objets aussi. On a des sacs à dos qui demandent beaucoup
27:00de temps de fabrication, des petites pochettes qui demandent peu de temps de fabrication.
27:04Ça dépend de l'objet.
27:05Je vous pose la question parce que comment on passe à l'échelle avec un modèle comme
27:08le vôtre ? C'est encore en réflexion. Je pense que c'est un modèle qui peut être
27:15où plusieurs mains peuvent travailler peut-être plus sur de la coupe en premier temps ou avec
27:21d'autres systèmes de l'emporte-pièce qui permet de couper en grosses épaisseurs
27:28plusieurs strates de matière. Et après, à l'assemblage, ça reste tout à fait artisanal.
27:35Oui. Et donc, ça pose cette question parce que après, c'est à quel prix vous les vendez ? Est-ce
27:41que ça devient un objet de luxe ? Enfin, vous voyez ce que je veux dire pour que le modèle
27:44économique de l'entreprise tienne ?
27:46C'est un vrai objet artisanal. On n'est pas sur un prix industriel. On n'est pas sur
27:51un prix luxe non plus. Donc, je pense que c'est un peu une nouvelle forme d'artisanat
27:59dans le sens où on peut faire de la grande série. Mais ça reste de la pièce unique.
28:03Donc, ça a un certain coût.
28:06Merci beaucoup, Margot Niquez. Bon vent à Malizène.
28:09Voilà, c'est la fin de ce Smart Impact. Je voudrais remercier Alexis Mathieu, Marie
28:15Billat et Juliette Muglierina à la programmation, à la production. Le réalisateur, Mani Pézèche
28:20qui est l'ingénieur du son, Fabien Boukenog. Merci à toutes et à tous de votre fidélité.
28:26Merci.