Passer au playerPasser au contenu principalPasser au pied de page
  • 23/05/2025
Taxer les riches pour financer la défense ? avec Olivier Janoray, Associé, Arsene.

Catégorie

🗞
News
Transcription
00:00On poursuit ce Lex Inside et on va parler de la taxation des plus riches du grand patrimoine pour financer l'effort de défense
00:19avec mon invité Olivier Janoré associé au sein du cabinet Arsène. Olivier Janoré, bonjour.
00:25Bonjour Janoré. Alors l'Observatoire européen de la fiscalité dirigé par l'économiste français Gabriel Zuckmann a proposé de taxer à hauteur de 2 à 3% le patrimoine des plus riches pour financer l'effort de défense européen.
00:44Quels sont les précédents historiques de la taxation du grand patrimoine avant de parler de ce projet de réforme ?
00:51Très bonne question. Tout à fait d'actualité et en quelque sorte c'est ce serpent de mer qui est l'imposition sur la fortune.
00:58C'est comme ça qu'on l'a connu il y a encore quelques années. Maintenant c'est l'impôt sur la fortune immobilière.
01:04Avant il y a eu l'IGF, l'imposition des grandes fortunes sous le président Mitterrand.
01:09Mais même au début du XXe siècle il y avait déjà des idées de taxation de la fortune au-delà de la taxation des donations des successions
01:17qui est une autre façon de taxer la fortune naturellement. Donc on a eu des prémices mais la réalité, la première fois où c'est arrivé dans notre système législatif
01:27c'est en 81 après l'élection de François Mitterrand. Et donc on a eu après un va-et-vient en lien avec le va-et-vient politique 81-86, de nouveau en 89.
01:38Puis des évolutions. La droite au final l'a conservée à un moment donné, l'a réformée. Il y a eu des questions de bouclier fiscal, il y a eu des questions de plafonnement.
01:46Ce sont un certain nombre de termes. C'est la sémantique qu'on a autour de l'impôt sur la fortune.
01:52Et voilà. Et donc la dernière grande réforme c'était la mise en œuvre avec la première élection du président Macron.
02:01Et c'est cette transformation de l'impôt sur la fortune à l'impôt sur la fortune immobilière où on est sur un rendement qui est moindre, une assiette qui est différente.
02:10Ce qu'il faut savoir, c'est intéressant aussi par rapport au débat qui est le nôtre, qui est qu'est-ce qu'on finance et pourquoi on a un tel impôt.
02:16C'est que l'impôt sur la fortune en 2017, donc la dernière fois où il y a eu l'impôt sur la fortune, on est à peu près à 5 milliards de rendement.
02:23L'impôt sur la fortune immobilière, on est à 2 milliards, 2 milliards 5 et ça augmente en réalité chaque année. Pourquoi ? Parce qu'il n'y a pas d'évolution du barème.
02:31On est toujours à 1,3 million pour rentrer dans l'impôt sur la fortune immobilière. Mais les prix de l'immobilier augmentant sur les 6-7 dernières années, on est quasiment à 25-30% d'augmentation.
02:42Donc forcément, ça fait entrer de nouveaux contribuables dans cet impôt, ce qui fait que cet impôt rapporte de plus en plus.
02:46Mais il faut le mettre en perspective avec d'autres impositions sur le patrimoine, notamment les impôts fonciers qui représentent quasiment 30 milliards.
02:54Donc voilà, il faut savoir de quoi on parle ici et pourquoi on le fait.
02:58Alors on va s'intéresser au projet d'impôt du grand patrimoine. Il y a plein de questions juridiques qui se posent.
03:05La première, c'est est-ce que ce projet est compatible avec la jurisprudence du Conseil constitutionnel ?
03:11Alors il faut savoir, c'est qu'aujourd'hui, sur la table, il y a une proposition de loi, donc de certains députés, notamment et principalement des députés de gauche,
03:19qui se sont appuyés sur les travaux de l'économie Zuckman. Et à côté de ça, il y a le gouvernement qui, aujourd'hui, réfléchit à son propre texte.
03:27Pourquoi il le fait ? Parce que, naturellement, les angles d'attaque ne sont pas les mêmes.
03:32On est sur une mesure qui serait plus une mesure de rendement.
03:34Côté écologiste, de mémoire, ce sont eux qui portent la primeur de ce texte-là,
03:40puisque les 2% qui sont aujourd'hui annoncés à partir de 100 millions de patrimoine sont censés rapporter,
03:46toujours à garder avec des pincettes, entre 15 et 25 milliards.
03:49Autant dire que la fourchette est grande. On est plutôt sur une fourche que sur une fourchette.
03:51Là où, aujourd'hui, le gouvernement planche sur un texte qui est plus symbolique en termes de rendement,
03:58puisqu'on devrait être à 1, 2 milliards en fonction d'eux, et tout ça dépendra naturellement de l'assiette en la matière.
04:05Pourquoi ? Parce que, sur la proposition de loi, l'assiette est large, elle touche tout le patrimoine,
04:09notamment le patrimoine professionnel. Et on a ce seuil de 100 millions.
04:15C'est comme cela qu'ils essayent de justifier la constitutionnalité du texte. Pourquoi ?
04:20Parce qu'il faut savoir qu'en droit français, le système français, il y a le Conseil constitutionnel
04:25qui va s'assurer de la cohérence des lois avec la constitution.
04:28Et il y a le principe d'égalité devant l'impôt ?
04:30Alors, il y a le principe d'égalité devant l'impôt.
04:33Et après, il y a des principes aussi qui sont tirés de l'Union européenne,
04:37notamment le droit de propriété, qui en est mis.
04:39Bien sûr.
04:39Et au-delà de ce principe d'égalité devant l'impôt, il y a le caractère confiscatoire de l'impôt.
04:46Et c'est pour ça que sur l'impôt sur le revenu, il a été dit, notamment, si vous vous souvenez,
04:49il y a eu des décisions autour de l'élection post-élection de François Hollande,
04:53le président Hollande, sur un taxe à 75%.
04:56Ça n'a pas pu être mis en œuvre tel qu'il l'avait imaginé initialement, parce que c'était confiscatoire.
05:00Sur le revenu, on est à peu près au deux tiers.
05:02Au-delà d'une imposition prise au sens large, avec certains types de prélèvements, notamment la CRDS,
05:09on est au deux tiers.
05:10Sur l'imposition sur le patrimoine, il y a moins de décisions.
05:14Nécessairement, il n'y a pas chaque année rebelote des questions autour de ces textes-là.
05:20Et on en arrive, en réalité, à une obligation de plafonnement de l'impôt,
05:24si on atteint un taux qui est trop important,
05:27qui fait que le revenu disponible ne permet pas de couvrir l'impôt qui est demandé.
05:31Et c'est d'ailleurs là où, entre la proposition de loi, donc de certains parlementaires,
05:36et le projet de loi, qui n'est pas encore connu dans son détail, du gouvernement s'oppose,
05:42c'est que le gouvernement irait plus sur un taux à 0,5%.
05:45Là où, avec un démarrage à 1,3 million de patrimoine, ou 2 millions,
05:49ça serait quelques différences, mais pas grand-chose par rapport à l'ISF tel qu'on l'a connu,
05:54là où le taux de 2% ne s'applique qu'à partir de 100 millions de patrimoine.
05:58Aujourd'hui, dans la décision du Conseil constitutionnel,
06:01on a déjà eu des censures à 1,8% non plafonnées.
06:06D'accord.
06:07Mais, et c'est là aussi l'argument des députés,
06:11sans avoir un seuil d'entrée aussi élevé.
06:14Est-ce qu'introduire un seuil d'entrée très élevé
06:18aurait pour incidence de faire évoluer la jurisprudence du Conseil constitutionnel en la matière,
06:24tout en sachant qu'à ce moment-là, on retomberait dans un autre écueil, à mon sens,
06:28et qui me paraît quand même assez pertinent, celui de l'égalité devant l'impôt,
06:31quand il y a un impôt qui est payé que par 200, 300, 400 foyers en France.
06:36Est-ce que réellement on est dans de l'égalité, ou est-ce qu'on est dans de l'opportunisme ?
06:40Est-ce qu'il y a d'autres obstacles juridiques ou politiques, hormis ceux-ci ?
06:44En réalité, moi, ce que j'aime bien voir dans les textes de loi, c'est pourquoi on les fait.
06:52Et notamment, je fais une petite digression sur tout ce qui est niche fiscale,
06:55parce que c'est aussi un grand débat aujourd'hui, c'est les niches fiscales.
06:58Est-ce que supprimer une niche, c'est augmenter l'impôt ?
07:00Je dirais, c'est une façon de voir le sujet, et je pense qu'on peut le voir de notre façon.
07:04Mais ce qui est toujours intéressant, c'est qu'il y a des niches fiscales qui ont été mises en œuvre
07:08il y a 10, 15, 20, 30 ans, 40 ans, 50 ans, qui aujourd'hui n'ont plus de raison d'être.
07:12Là, ici, c'est la même chose. C'est pourquoi on fait ce texte-là ?
07:16Qu'est-ce qu'on cherche à couvrir ?
07:17Si l'idée, c'est de résorber le déficit, ce n'est pas avec les quelques milliards,
07:22même 15 milliards version Zuckmann, puisqu'il y en a plus ou moins la paternité,
07:28ce n'est pas ça qui va répondre au problème qui est le nôtre.
07:31Si c'est juste dire, on va financer tel type de dépense,
07:34c'est un peu se cacher derrière son petit doigt, je pense, en tout cas,
07:37qui est de dire, non, le problème, il est plus structurel.
07:40C'est comment est-ce qu'on répond à nos besoins d'investissement,
07:43à nos besoins financiers, à le fait de résorber la dette aussi,
07:47et de compenser, en réalité, des politiques fiscales passées qui peuvent être discutables.
07:52En définitive, l'impact réel de cette mesure ?
07:58L'impact réel de cette mesure, elle est toujours très difficile à estimer.
08:03Pourquoi ? Parce que, un, on voit entre 15 et 25, si je reste sur cette proposition de loi,
08:08entre 15 et 25 milliards, autant dire qu'il y a toutes les possibilités entre les deux.
08:12Après cela, il y a les approches, en tout cas, les stratégies qu'on appelle d'évitement,
08:19que les gens peuvent appeler d'évitement d'impôt, qu'on appelle évasion fiscale.
08:22Après, il faut voir, l'évasion fiscale, il y a l'évasion fiscale qui est légale et celle qui est illégale.
08:28Il y a un peu le côté péjoratif de ce terme,
08:30mais l'évasion fiscale, de prime abord, ce n'est pas une fraude.
08:33L'évasion fiscale, simplement dire, je suis en France et je pars vivre dans un autre pays,
08:38c'est l'évasion fiscale.
08:39Mais si vous partez réellement vivre dans cet autre pays, il n'y a personne qui peut vous critiquer.
08:42Bien sûr.
08:43Et personne qui peut venir vous réclamer de l'argent en la matière.
08:47Donc la question, ça va être un peu, quel est l'impact ?
08:49Parce qu'on nous dit, oui, mais la politique fiscale ne fait évoluer qu'à 0,2, 3, 4% les départs hors de France.
08:57Oui, mais la question, c'est une question qualitative, ce n'est pas une question quantitative, je pense.
09:02Et si les personnes qui sont amenées à payer cette taxe ne sont plus là pour la payer,
09:06les 15-25 peuvent se réduire comme peau de chagrin,
09:09sans compter d'autres types de conséquences qu'on ne mesure pas ici.
09:13Ce sera le mot de conclusion.
09:15Merci Olivier Jeannoret.
09:16Je rappelle que vous êtes associé au sein du cabinet Arsène.
09:19Merci Arnaud.
09:19Tout de suite, l'émission continue.
09:21On va parler de la complémentarité entre le règlement sur l'intelligence artificielle et l'URGPD.

Recommandations