Avec Bruno Cautrès, Politologue, chercheur au Centre national de la recherche scientifique (CNRS) et au CEVIPOF (le centre de recherche politiques de Science Po)
00:00On parle politique avec notre invité Bruno Cotteres, bonjour.
00:04Bonjour.
00:05Bienvenue sur Sud Radio, vous êtes politologue, chercheur au Cvipof et au CNRS.
00:11C'est à 18h que le vote ouvre pour les adhérents du parti Les Républicains.
00:16Qui de Bruno Retailleau ou de Laurent Wauquiez est le favori auprès des adhérents d'après vous ?
00:23Bruno Cotteres.
00:24Eh bien vous savez, c'est compliqué de répondre à cette question car on ne dispose d'aucune donnée qui nous permettrait de répondre à la question.
00:32Il y a des sondages qui ont été faits, mais ces sondages ne sont pas faits.
00:35Et c'est un chercheur qui le dit, un spécialiste de la matière qui le dit.
00:39Eh oui, ils sont faits auprès des sympathisants, ça n'est pas du tout la même chose.
00:43On dit parfois que les adhérents sont un peu plus radicaux que les sympathisants,
00:47mais c'est vrai que toutes les enquêtes d'opinion qui montrent par exemple que Bruno Retailleau a une meilleure image que Laurent Wauquiez,
00:54c'est auprès des sympathisants, non pas auprès des adhérents.
00:57Donc il faut être très très très prudent.
00:59Par ailleurs, le parti Les Républicains a vu son nombre d'adhérents bondir, littéralement,
01:05multipliés par deux au cours des dernières semaines, des derniers mois.
01:09Alors il y a de grandes hypothèses.
01:11Certains vont dire que du côté des deux candidats, on a fait adhérer des supporters pour essayer de remporter le match.
01:18D'autres, moi j'en fais partie, ils trouvent que c'est plutôt une bonne nouvelle que des adhérents adhèrent à des partis politiques.
01:23Vous savez que les partis politiques, c'est assez faible en France.
01:26On n'est pas un pays où il y a une grosse tradition d'adhésion aux partis politiques.
01:30Donc c'est plutôt une bonne nouvelle pour l'avis de ce parti.
01:33Mais du coup, ça rend l'issue du scrutin encore plus incertaine, car on ne sait pas très bien d'où viennent ces adhérents,
01:39leurs profils, sont-ils des pro-Retailleaux, des pro-Voquiers ?
01:43Donc voilà, un scrutin assez ouvert en fait.
01:46Il serait étonnant que l'un des deux l'emporte de manière absolument écrasante sur l'autre,
01:53dans la mesure où il s'agit de deux personnalités qui sont bien connues des adhérents du parti
01:59et surtout qui ont quand même beaucoup de soutien à l'intérieur du parti.
02:04Alors on a des souvenirs, et vous aussi d'ailleurs, de guerres sanglantes à l'intérieur des partis de droite,
02:09en particulier le rocambolesque épisode de la guerre Fillon-Copé avec la fameuse COCOE,
02:15cette commission chargée de recompter des bulletins.
02:17Les deux candidats qui clament leur victoire, qui accusent l'autre d'avoir triché,
02:21est-ce qu'on risque d'avoir le même scénario ou pas cette fois-ci ?
02:25Alors pour le moment, on semble s'éloigner de ce scénario.
02:29Tout sera fait en vote digital, en vote électronique.
02:32Ces deux candidats ont pris beaucoup de soin en interne pour au fond demander des garanties
02:39sur le contrôle des opérations de comptage des votes,
02:44mais dans la mesure où c'est du vote électronique,
02:47évidemment ça devrait s'aptifier considérablement cet aspect.
02:51Par ailleurs, le mouvement politique Les Républicains, qui est un peu un miracle de la politique,
02:56ils étaient à deux millions de votes aux élections européennes ou législatives,
02:59et là maintenant ils se retrouvent au gouvernement.
03:01Ils ont même eu un matignon avec Michel Barnier,
03:04donc c'est un parti politique qui n'a absolument aucun intérêt à envoyer un message
03:09de désorganisation, d'incapacité à organiser une élection interne.
03:14Donc il me semble qu'on s'est éloigné au fond de ce psychodrame
03:18qu'avait été, vous l'avez rappelé, Copé-Fillon, La Cocoblée, etc.
03:22Après, dans les partis politiques, les élections internes donnent lieu souvent
03:27à des crispations, des tensions, il y a beaucoup de passions, évidemment.
03:30Je dirais que pour le moment, je suis assez optimiste sur le fait que le scrutin se déroule
03:35dans de bonnes conditions.
03:36Sauf que pourtant, l'enjeu est énorme pour chacun des deux candidats.
03:41Est-ce que le vaincu de demain soir est condamné à une mort politique ?
03:46Par exemple, est-ce que Laurent Wauquiez, s'il perd, devra dire adieu à ses rêves de candidature
03:49à la présidentielle ? Et Bruno Retailleau, s'il perd, devra dire adieu à son ministère
03:53de l'intérieur ?
03:54Ça ne sera pas nécessairement corrélé, parce qu'à l'intérieur du mouvement
03:58Les Républicains, il y a d'autres ambitions présidentielles que celle de Laurent Wauquiez
04:03et de Bruno Retailleau.
04:05Je pense à un élu du Sud, par exemple David Lissnard.
04:09Et certains de ses candidats, lui en particulier, réclament une primaire.
04:14Donc sans aucun doute, demanderont qu'il y ait l'organisation d'une primaire,
04:18quel que soit le vainqueur de demain.
04:20Mais évidemment, le vainqueur entre Bruno Retailleau et Laurent Wauquiez
04:24considéra, lui, qu'il a pris une sérieuse option sur la candidature présidentielle.
04:29Et il tiendra la boutique.
04:30Et si c'est Laurent Wauquiez qui l'emporte, il a déjà dit qu'il était contre
04:32l'organisation d'une primaire, d'ailleurs.
04:34On est d'accord ?
04:35Tout à fait, tout à fait.
04:36Et il y fera donc obstacle.
04:38Écoutez, on va suivre ça.
04:39Et pourquoi pas, on va vous rappeler, d'ailleurs, Bruno Cotteres.
04:41Merci beaucoup pour cet éclairage, chercheur au CNRS et au Cevipot.