- avant-hier
Deuxième partie de l’émission spéciale "Comme au cinéma" diffusée sur France 2 le 25 mars 2003, consacrée à Johnny Hallyday. Entre confidences, séquences live et extraits de films, Johnny dévoile son lien profond avec le 7e art et la scène. Un moment rare pour revivre l'artiste sous un autre angle, entre musique et cinéma.
Catégorie
🎥
Court métrageTranscription
00:003 heures du matin, on tourne.
00:03Moteur !
00:06Vas-y !
00:30Un making of 1970 !
00:39C'est vrai que comme ça, tout peut paraître drôle, parce que c'est vrai, bon.
00:45Mais tout ce que je remarque, c'est quand même que Robert et moi, on était jeunes et beaux, c'est pas vrai.
00:52Qu'est-ce qu'il était beau, disons !
00:53Alors, pourquoi vous avez voulu faire le film, vous disiez ?
00:56Pourquoi j'ai eu envie de faire le film ? Parce que d'abord, j'avais bien l'histoire,
00:58mais cette histoire, l'histoire de ces films, enfin maintenant c'est ce que m'a raconté Robert,
01:05parce qu'avec Robert tout est possible, mais Sergio Leone devait faire ces films,
01:10qui étaient au départ un western, qu'il aurait donné à Robert en disant
01:14je ne vais pas le faire en western finalement, donc si tu as envie d'en faire quelque chose, je te donne le scénario.
01:19Et Lille l'aurait fait, adapté à aujourd'hui, enfin à l'époque où on l'a fait,
01:25mais au départ ça devait être un western silencieux.
01:28Et alors effectivement, il vous explique déjà le regard...
01:31Ah oui, mais Robert, il a le coup pour expliquer le regard.
01:35Vous avez dit à propos de ce film, finalement, il m'a donné très peu de répliques,
01:39comme si à l'époque il ne me faisait pas vraiment confiance.
01:41Non, c'est pas ça, c'est qu'il n'y en avait pas beaucoup dans l'histoire,
01:44pas par rapport à moi, mais parce que c'était une époque où les westerns avaient...
01:50C'est vrai, quand on voyait les films de Clint Eastwood, il n'y avait pas beaucoup de répliques,
01:54et ça c'était au départ, ça devait être un western.
01:57Vous avez fait, vous êtes un des rares en France, vous avez fait un vrai western.
02:01On appelait ça à l'époque des westerns spaghettis.
02:03Oui, oui, oui. Qu'est-ce qu'on a mangé comme pâte d'ailleurs ?
02:07Oui, avec Sergio Corbucci.
02:08Mais spécialiste.
02:09Mais alors là, vous sautez du coq à la haine, parce que le western s'est fait avant le Robert Hossein.
02:15Ah, il s'est fait avant ?
02:16Eh oui.
02:21Donc vous avez tourné un vrai western avant Robert Hossein.
02:23Non, parce que je me rappelle quand même, c'était...
02:26Vous y étiez ?
02:26J'y étais d'abord, c'était dans les années 70,
02:31j'ai terminé le spécialiste de Sergio Corbucci,
02:34et trois mois plus tard, je rentrais dans le film de...
02:37Robert Hossein.
02:38Robert Hossein, voilà.
02:39J'ai eu un petit souci de chronologie,
02:40mais je voudrais qu'on regarde un extrait du spécialiste.
02:42Vous avez une chance folle, vous êtes allé en Arizona pour tourner ?
02:45Pour tourner ce western, non ?
02:46Ah non, non, on a tourné à Cortina Lampedjo.
02:49C'est une station de fleur d'hiver.
02:51Vous avez tourné donc...
02:52Vous savez pourquoi ?
02:53Parce que Corbucci est quelqu'un qui ne prend pas l'avion,
02:56il n'aime pas l'avion, il a peur de l'avion,
02:58et il ne voulait absolument pas prendre l'avion.
03:00Donc, il ne prend que le train.
03:01Donc, c'était plus facile d'aller à Cortina.
03:04Donc, ce western a été tourné dans les Alpes italiennes,
03:06dans une station de ski, le spécialiste.
03:08Vous allez voir que Johnny a la dégaine facile,
03:10il tire bien, regardez.
03:13Vous êtes fort, là.
03:14Vous êtes tout seul et vous les tuez tous.
03:17Vous savez, je suis quand même le seul
03:19qui s'est capable de tirer un coup de feu
03:21et il y a trois Mexicans du Corbett.
03:25C'est le principe du western.
03:26Non, mais c'était ça les westerns d'Italia.
03:27Alors, il faut que ça se joue au premier degré, c'est ça ?
03:30Parce que là, vous vous la pétez un peu, quand même.
03:31Non, mais il faut le jouer au premier degré, bien sûr.
03:33Il faut le jouer au premier degré.
03:34Bon, le regard est très important dans un western.
03:36On va voir une photo de vous à l'époque.
03:38Vous avez 27 ans.
03:39Vous avez déjà des pas de doigt.
03:41Ça, ça a été fait volontairement.
03:42Parce que comme je n'en avais pas encore,
03:44on me maquillait des pas de doigt.
03:45Maintenant, je n'en ai plus besoin.
03:46Parce que j'ai naturellement.
03:48Donc, c'est quoi le personnage ?
03:49S'il y a des comédiens français qui nous regardent
03:51et qui doivent tourner un western dans les semaines qui viennent,
03:54quelques conseils pour tourner le cow-boy.
03:55Parce qu'il y a une sorte de brief qu'il faut accepter.
03:57Alors là, bon, d'abord, il faut le regard implacable.
04:02Il ne faut surtout pas être vif, parce qu'il faut être...
04:06Et puis, le chapeau est recommandé parce que le soleil...
04:16Il faut savoir tomber de cheval.
04:18Savoir tomber de cheval, très important.
04:20Et puis, savoir dégainer.
04:23Vous vous êtes entraîné ou pas ?
04:25Oui, bah...
04:27Toute la journée, oui.
04:30Mais bon, c'est facile, hein.
04:33Tant que ce ne sont pas des vrais balles, tu vas bien.
04:36C'était pour de faux.
04:37En tout cas, c'est assez rare, ça vous fait quoi ?
04:38Vous l'avez revu depuis, ou quoi ?
04:39Parce que c'est qu'un western,
04:41il n'y a pas beaucoup de comédiens français qui ont tourné, hein ?
04:43Euh...
04:43Si, il y en a quelques-uns, quand même.
04:47Non, ce sont tous les Italiens qui ont tourné.
04:55La réaction...
04:56Vous savez, quand même, je peux quand même dire...
04:58C'est que les Italiens, on a beau quand même se marrer
05:02en disant les westerns, Spaghetti...
05:04Mais quand même, il faut dire une chose,
05:05c'est que Clint Eastwood,
05:06qui pour moi est un des meilleurs acteurs du monde
05:08et surtout un des meilleurs metteurs en scène au monde,
05:12est quand même quelqu'un qui a réussi sa carrière
05:14grâce aux westerns italiens.
05:15Non, c'est vrai.
05:16C'est vrai.
05:16Non, c'est vrai, c'est vrai.
05:21Alors, il y a un tournant, à un moment donné, dans votre vie.
05:24C'est le cinéma d'auteur.
05:25C'est une rencontre
05:26qu'on n'aurait pas pu imaginer dans une fiction.
05:29C'était la réalité.
05:30C'est la rencontre Johnny Hallyday-Godard.
05:32Comment ça s'est passé ?
05:32Je crois que la première personne, vraiment,
05:37qui m'a fait confiance,
05:39bizarrement,
05:41mais certainement,
05:43c'est Godard,
05:45dans Détective.
05:46Godard m'a, un jour,
05:48m'a appelé
05:49et il m'a dit
05:51j'avais été rejointe
05:53Nathalie Baye sur un tournage.
05:56Elle tournait avec Alain Delon
05:56dans notre histoire
05:57et on venait d'avoir Laura.
06:00Et je me retrouve dans un déjeuner
06:03avec Jean-Luc Godard
06:05qui devait parler à Nathalie Baye
06:07du film qu'il voulait faire avec elle
06:09qui était Détective
06:09et Claude Brasseur.
06:11Et puis,
06:12il ne m'adresse pas la parole
06:14au déjeuner.
06:15Donc, il ne me regarde même pas
06:16bonjour,
06:17comme ça.
06:18Puis moi,
06:19je me demandais ce que je faisais là
06:20et puis,
06:21je m'en vais.
06:23Et 15 jours plus tard,
06:25le téléphone chante chez moi
06:26et Godard m'appelle
06:27en disant
06:27bonjour,
06:29c'est Jean-Luc Godard.
06:33Je vous ai remarqué.
06:38Est-ce que vous voulez bien tourner
06:39dans mon film ?
06:42Alors,
06:42je lui ai dit
06:43ben oui,
06:44oui,
06:45il faudrait peut-être
06:46qu'on se voit,
06:46vous m'en parliez.
06:48Il dit
06:48on se retrouve demain
06:49au restaurant.
06:52Alors,
06:52je ne sais pas,
06:54c'était un restaurant de poissons.
06:56Bon,
06:56on se retrouve
06:56dans un restaurant de poissons.
06:57Il dit
06:57je veux une sole.
06:59Je vous recommande
06:59la sole,
07:00elle est très bonne.
07:00Bon,
07:00je mange une sole.
07:03Absolument,
07:04même pas poêlée,
07:05c'est-à-dire la vapeur.
07:06Bon,
07:06sans goût.
07:07Je mange ma sole.
07:09Il ne m'adresse pas la parole.
07:10À la fin,
07:11il me dit
07:11c'était bon,
07:12c'était...
07:13Super.
07:19Et il me dit
07:20bon,
07:22on se retrouve dans 15 jours
07:24au tournage.
07:26Je dis bon,
07:27je n'ai jamais su de quoi,
07:28je ne savais même pas
07:29ce que j'avais tourné.
07:30Mais ça,
07:30c'est Godard,
07:31voilà.
07:31Premier jour du tournage
07:36avec Godard.
07:37J'imagine qu'on a
07:37un tract particulier,
07:38non ?
07:39Mais je n'ai pas eu le temps.
07:42Parce que Godard,
07:42c'est très particulier,
07:43quand même,
07:43il faut bien dire les choses.
07:44Ce n'est pas du tout
07:45comme un film normal.
07:47C'est que le premier jour
07:48du tournage,
07:49on est arrivé,
07:50donc on avait rendez-vous
07:51à midi
07:51pour se faire maquiller
07:52avec un très bon maquilleur.
07:56Bruno Nuitaine
07:57devait faire
07:57des super belles lumières.
07:59Et puis,
08:00le maquilleur
08:01n'avait pas le droit
08:02de toucher aux acteurs.
08:03Parce que Godard dit
08:05je ne veux pas
08:05que les acteurs
08:06se maquillent.
08:07Bon, voilà.
08:08Donc,
08:09pour être sûr
08:09que les acteurs
08:10ne se maquillaient pas,
08:11il enfermait le maquilleur
08:12dans une pièce
08:13à clé.
08:15Il n'avait pas le droit
08:15de sortir.
08:18Bruno Nuitaine
08:19qui avait préparé
08:19des lumières
08:20et avait commandé
08:20des super belles lumières
08:22pour éclairer
08:23les pièces
08:24dans lesquelles
08:24on devait jouer
08:25dont le corridor,
08:26etc.
08:27Il a enfermé
08:28toutes les lumières
08:29dans une pièce.
08:31Et il disait
08:31à Bruno Nuitaine
08:32ça ne sert à rien
08:33d'éclairer.
08:33Regardez,
08:34moi je marche,
08:35je vois mes pieds,
08:35je vois que mes pieds marchent,
08:36il n'y a pas la peine
08:37de les éclairer.
08:39Alors Bruno Nuitaine
08:40était catastrophé.
08:41Bon,
08:41et tout le film
08:41s'est passé comme ça.
08:42Donc,
08:42on arrive le premier jour
08:44et puis on arrive
08:44donc à midi,
08:45donc pas le maquillage,
08:46donc on était évidemment prêt,
08:47sauf que les textes
08:48n'étaient pas écrits.
08:49Et alors on attend
08:52une heure de l'après-midi
08:53histoire d'avoir
08:54une page écrite,
08:55alors bon,
08:56un tel dit ça,
08:57l'autre dit ça,
08:58donc des dialogues.
09:01Et puis il regarde
09:02par la fenêtre
09:02et il dit
09:03Mossad,
09:06c'est Mossad le temps,
09:07c'est pas gay.
09:09Vous avez envie
09:10de tourner ?
09:11Oh,
09:11je le sens pas.
09:12Bon,
09:15ben,
09:17on met ça demain.
09:19Alors tout le monde
09:20se retrouvait dans la rue
09:21sur le trottoir
09:22en train de rentrer chez soi
09:23et rendez-vous le lendemain.
09:24Ça a duré comme ça
09:24pendant trois semaines.
09:26La même chose.
09:26Tous les jours,
09:27la même chose.
09:28Sauf que le film
09:29devait durer six semaines
09:31et que moi,
09:32j'avais un spectacle à faire
09:34parce que je devais chanter,
09:35je devais faire un zénith
09:36six semaines plus tard
09:38et que je voyais
09:39les jours passés,
09:39je me disais
09:40j'aurais jamais fini le film
09:41pour commencer
09:41pour commencer mon spectacle.
09:44Et puis,
09:46un jour,
09:46ils se décident
09:47en disant
09:47bon allez,
09:48il faut y aller,
09:49il faut y aller,
09:49on commence.
09:50On a fait le film
09:51en deux semaines.
09:53On va regarder
09:54un petit bout du résultat.
09:55Une scène sortie du contexte.
09:56On a eu du mal
09:56à sortir une scène du contexte.
09:57On avait peur
09:58que les gens ne comprennent pas.
09:58Ben nous,
09:59on a eu du mal
09:59à comprendre aussi.
10:05Alors,
10:07c'est Godard.
10:08Il est assez inconditionnel.
10:09On regarde un petit extrait.
10:10normalement,
10:11c'était vous
10:12et Nathalie Baye.
10:13On regarde ce qu'il y a sur l'écran.
10:14J'ai tellement peu d'argent
10:16en ce moment
10:16que j'ai même pas de quoi
10:17me payer des putes.
10:21Pourtant,
10:22on doit en être couvert.
10:23C'est quand même
10:24un championnat d'Europe.
10:27Mais cet idiot
10:28est tombé amoureux
10:29d'une princesse
10:30des Bahamas.
10:30Il faut pas que j'oublie
10:34de dire à Eugène
10:35s'il a vérifié.
10:39Et paf,
10:39plus personne.
10:44Il y avait des centaines
10:45autour de lui.
10:47D'habitude,
10:48on pouvait en profiter après.
10:51Et là,
10:51personne.
10:53Et la princesse ?
10:54Je suis forcé
10:57de la lui laisser.
10:59Il l'aime.
11:02C'est mauvais pour le match.
11:05C'est très mauvais.
11:06Alors,
11:12c'est sorti du contexte,
11:13c'est un poème.
11:15Vous témoignez,
11:16c'était bien vous le sourcil ?
11:17Oui,
11:18c'est-à-dire qu'il m'a mis en position
11:21en disant,
11:22surtout,
11:23quand tu te dis ton texte,
11:25Nathalie sera là,
11:27toi tu seras là,
11:28donc tu regardes
11:29et il faut surtout
11:31que tu aies l'air pensif.
11:33En disant ça,
11:34c'est comme des souvenirs
11:34qui te reviennent.
11:36Sauf qu'il ne m'avait pas dit
11:37que j'ai découpé ici.
11:39Ça fait partie des surprises.
11:40Non,
11:40ça fait partie des surprises,
11:41voilà.
11:42Bon,
11:42en tout cas,
11:43les gens vous ont vu
11:44un peu différemment ?
11:45Une certaine partie,
11:46oui,
11:46c'est vrai.
11:47Parce que j'avais tourné
11:48avec Godard,
11:49simplement,
11:50c'est que je leur ai toujours
11:51répondu par la suite,
11:52j'ai dit,
11:53vous savez,
11:54avant d'avoir tourné
11:55avec Godard,
11:56j'étais comme je suis
11:57et après avoir tourné
11:58avec Godard,
11:59je suis toujours
11:59ce que je suis.
12:00Moi,
12:01je n'ai pas changé.
12:03Godard ne m'a pas changé.
12:05Si Godard,
12:05c'était intéressé à moi,
12:06c'est peut-être
12:07parce que justement,
12:08je ne suis pas
12:09ce que les gens
12:11ont de moi exactement.
12:13Vous savez,
12:13c'est facile
12:13de se faire des idées
12:14de quelqu'un
12:15sans connaître quelqu'un.
12:17Moi,
12:17je suis tout simplement moi,
12:18c'est tout.
12:19Voilà,
12:19et je fais mon métier
12:20tout le monde.
12:26Alors,
12:26vous disiez
12:27dans Détective
12:28que vous avez découvert
12:29au moment de la projection
12:30que vous n'étiez pas à l'image.
12:31Est-ce que c'était
12:31un soulagement
12:32pour vous à l'époque ?
12:33Parce que vous avez
12:33beaucoup dit
12:33que vous détestiez
12:34vous voir sur un écran.
12:35Non,
12:37vous savez,
12:38ce n'est pas forcément
12:41parce que je déteste
12:42nos voir sur un écran.
12:43C'est simplement
12:43que je crois
12:44que c'est douloureux
12:44de se voir sur un écran.
12:46Mais pas moi,
12:46uniquement.
12:47Il y a beaucoup
12:47de combien qui en parle ?
12:48Tous les acteurs,
12:49je pense,
12:49vous savez.
12:50On ne s'habitue pas
12:51avec les amis ?
12:51C'est bien de se voir
12:52comme ça naturellement,
12:53mais en énorme,
12:55ce n'est pas toujours évident.
12:55Et vous avez été sévère
12:58avec vous-même,
12:58vous disiez,
12:59à mes débuts,
12:59c'était insupportable
13:00de me voir,
13:00je trouvais que je jouais faux.
13:02Oui,
13:02mais je trouve
13:03que je joue toujours faux.
13:04Sauf que plus personne
13:05n'est d'accord avec vous.
13:06Je trouve que je chante faux,
13:07je trouve que je joue faux.
13:10Non,
13:10mais vous savez,
13:11c'est sincère en plus.
13:13Oui, bien sûr,
13:14je suis pour la perfection.
13:16Je ne serai jamais content de moi
13:18parce que je trouve
13:19qu'on peut toujours faire mieux
13:20et je veux toujours faire mieux.
13:23Je considère que je peux chanter mieux
13:24que ce que je chante,
13:26que je peux jouer mieux.
13:27Mais ça,
13:27c'est le temps
13:28qui va me laisser le temps
13:29de le faire.
13:30Donnez-moi le temps
13:31d'avoir le temps de le faire.
13:32Alors,
13:33vous disiez tout à l'heure,
13:33détective,
13:34c'est lié à un moment important
13:35de votre vie,
13:36c'est la naissance de Laura.
13:37Et Laura,
13:37aujourd'hui,
13:38fait du cinéma.
13:39On va avoir une affiche
13:39de son prochain film
13:40quand elle vous dit
13:41qu'elle va faire du cinéma.
13:42Vous êtes inquiet
13:43ou est-ce que vous dites
13:44ben voilà,
13:45elle va faire ce que moi
13:45j'ai toujours voulu faire ?
13:46Écoutez,
13:48d'abord,
13:49c'est une fille
13:49et comme tous les papas,
13:52je suis évidemment inquiet
13:53parce que
13:54ce n'est pas un métier facile.
13:57C'est un métier
13:57qui vous prend beaucoup de temps,
13:58qui vous prend beaucoup
13:59de votre tête,
14:00beaucoup de...
14:01Il faut être très costaud,
14:03je pense,
14:03pour faire ce métier.
14:06Il ne faut pas être vulnérable
14:07parce que c'est un métier
14:09qui vous prend beaucoup de choses.
14:10ça peut vous meurtrir,
14:12quelque part.
14:15Il faut accepter
14:16dans sa vie privée
14:18de faire des concessions
14:21par rapport à ne pas avoir
14:23totalement une vie privée
14:24comme M. Tout-le-Monde,
14:26comme on aimerait tout savoir.
14:27Mais ça fait...
14:28Il faut faire notre métier
14:29si on ne veut pas ça.
14:30Mais moi,
14:31j'aime ce métier
14:31donc j'ai accepté de le faire.
14:34Je suis inquiet,
14:35évidemment,
14:35c'est ma fille.
14:36Maintenant,
14:36il paraît qu'elle est formidable,
14:37je n'ai pas vu le film encore.
14:39Mais je souhaite
14:41qu'elle réussisse
14:42parce que si elle sait son désir,
14:45sa plus grande réussite,
14:46c'est qu'elle réussisse
14:47à faire ce qu'elle veut faire.
14:48Elle a choisi,
14:55il s'appelait Laura Smet.
14:57Moi,
14:58j'ai voulu m'appeler
14:58Jean-Philippe Smet
14:59quand j'ai dit cinéma.
15:00Mais les producteurs
15:00n'ont jamais voulu.
15:01C'est important ce que vous venez de dire.
15:02C'est-à-dire qu'à un moment donné,
15:02vous avez dit
15:03Johnny Hallyday,
15:03c'est pour la scène.
15:05Absolument, oui.
15:06Et pour le cinéma,
15:07vous vouliez
15:07vous appeler Jean-Philippe Smet.
15:09Vous aviez pensé à ça ?
15:09Oui,
15:09parce que je voulais
15:11vraiment démarquer
15:13le chanteur
15:14de l'acteur.
15:16Mais bon,
15:17les producteurs
15:18n'étaient pas
15:20tout à fait
15:21vraiment bons d'accord.
15:23Mais je trouve
15:24très bien
15:25et très courageux
15:27que ma fille le fait.
15:30En tout cas,
15:31les corps impatients.
15:33Alors,
15:34on faisait comme ça
15:34votre parcours,
15:35la rencontre avec Godard,
15:36autre grand cinéaste,
15:38Costa Gavras.
15:39On se souvient de Z,
15:40de Laveu.
15:41Oh,
15:41Costa Gavras.
15:42Quel bonheur.
15:43Alors,
15:43vous faites une comédie avec lui.
15:44Ça s'appelle
15:45Conseil de famille,
15:46Fanny Ardant.
15:47Guy Marchand.
15:48Quel souvenir de ça ?
15:49C'est une comédie ?
15:50Costa Gavras n'en avait jamais refait
15:51depuis,
15:51d'ailleurs,
15:51des comédies.
15:52Je crois que c'est la seule comédie
15:54que Costa Gavras
15:55ait jamais faite.
15:57Moi,
15:57je me rappelle,
15:57je m'étais fait opérer
15:59de la hanche.
16:00J'étais à l'hôpital
16:00quand Costa est venu me...
16:02C'était d'après un bouquin.
16:05Il est venu me faire lire le bouquin.
16:06J'étais à l'hôpital Cochin.
16:08Et il me fait lire
16:08en me disant
16:08lis ça,
16:09voilà,
16:09j'aimerais qu'on tourne ça.
16:11Voilà.
16:12Donc,
16:13je le rappelle
16:13quelques jours plus tard
16:14en disant,
16:15j'adore le livre,
16:16oui,
16:16c'est super.
16:17Et il dit,
16:18bon.
16:18Et on a commencé le tournage
16:20trois mois plus tard.
16:21Et j'avais encore des béquilles
16:22parce que j'avais encore mal à la hanche.
16:24J'avais encore des béquilles
16:25et quand on attendait pour tourner,
16:28j'avais mes béquilles
16:28et puis quand on devait tourner,
16:29j'en ai mis béquilles pour...
16:31Et alors,
16:31je me rappellerai toujours
16:32parce que c'était très douloureux
16:33parce que la première scène
16:35qu'on a tournée,
16:36c'était Guy et moi,
16:37Guy Marchand et moi,
16:39en jogging.
16:39On devait courir.
16:40Et j'avais très mal.
16:42Alors,
16:43à chaque fois qu'on a arrêté de tourner,
16:44je reprenais mes béquilles.
16:46Mais c'était un tournage formidable.
16:48Et c'est un des meilleurs souvenirs
16:49que je garde
16:50des tournages des films
16:51que j'ai faits.
16:51En tout cas,
16:52grand cinéaste
16:52et en même temps,
16:55c'était pas son meilleur film.
16:57Il s'est tenté,
16:58on tente tous
16:59de faire des choses différentes.
17:00Il s'est tenté dans la comédie,
17:01c'était peut-être pas tout à fait son truc.
17:02Et moi, en tout cas,
17:03je ne considère pas
17:04que ce soit un film raté.
17:05J'étais heureux de le faire.
17:06Alors, ensuite,
17:06il y a Terminus et la gamine
17:08et ensuite,
17:09il y a presque une décennie
17:10d'absence au cinéma.
17:11C'est quoi l'explication ?
17:12J'ai arrêté vraiment
17:13après avoir fait les lances qui
17:15qui étaient pour la télévision.
17:16C'est-à-dire toujours l'image
17:17du vengeur solitaire.
17:18Je voulais essayer autre chose.
17:20Je voulais faire,
17:21comment dire,
17:21plus,
17:22je ne dis pas des films intimistes,
17:24mais plus
17:26plus vrai acteur,
17:28enfin, plus acteur, quoi.
17:29Des contre-emplois,
17:30des choses comme vous.
17:30C'est-à-dire pas faire
17:31du simili Johnny Hallyday
17:34acteur
17:35dans l'action,
17:37mais faire
17:37Johnny Hallyday
17:39qui fait du
17:40Monsieur Dupont,
17:41par exemple,
17:41qui est loin
17:42de Johnny Hallyday.
17:44C'est ça que je voulais faire.
17:45Donc, pour ça,
17:45j'avais besoin d'un long break.
17:47Mais vous avez un statut particulier
17:48parce qu'effectivement,
17:50ben voilà,
17:50vous avez cette image,
17:51Johnny,
17:51vous en parlez même
17:52comme d'un personnage,
17:53un argumentaire.
17:54C'est pas facile
17:55d'être ce que je suis à la chanson
17:56et de faire...
17:57Faire oublier ça.
17:58Et de faire oublier ça
17:59et d'être Monsieur Dupont.
18:01C'est pas évident.
18:02Donc, pour ça,
18:03il m'a fallu du temps.
18:03C'est plus compliqué
18:04pour vous que pour les autres,
18:05en fait.
18:05Mais oui, c'est difficile
18:06parce que, vous savez,
18:07c'est pas facile pour les gens
18:08quand je joue...
18:10Si je jouais Monsieur Batignolle,
18:11d'oublier que je chante Marie, quoi.
18:13Oui, bon.
18:15Marie ou autre chose, bon.
18:16Donc, ce succès,
18:17cette gloire,
18:17est une forme d'handicap
18:18pour votre métier de comédien.
18:20Était !
18:20Parce qu'on va voir tout à l'heure
18:21que ça a changé.
18:22Mais pendant ces années-là,
18:23ça a été comme ça.
18:23Oui, parce que, en tout cas,
18:24je fais tout ce que je peux pour ça.
18:27Alors, quand vous dites
18:28après des années d'absence,
18:29vous avez envie de surprendre,
18:30c'était réussi.
18:31Et il y a un garçon
18:31qui s'appelle Stéphane Justy
18:33qui réalise son premier film.
18:34Ah oui.
18:35Ça s'appelle
18:35Pourquoi pas moi ?
18:37J'ai recommencé le cinéma, là, d'ailleurs.
18:39Avec une forme de dérision, en fait,
18:40qui a été payante, en réalité,
18:42puisque vous acceptez
18:43d'être complètement inattendu,
18:45de surprendre.
18:46On va voir dans l'extrait,
18:47puisque vous jouez
18:47le père d'une jeune fille
18:48qui est homosexuelle,
18:49mais vous ne le savez pas,
18:50vous et votre femme,
18:51Elimille Léros,
18:52vous ne le savez pas
18:52au moment où on va vous voir
18:53dans le film.
18:54Mais c'est ça qui m'a plu, d'ailleurs.
18:55C'est pour ça que j'ai dit oui.
18:57Et puis, on va vous voir
18:58en tauréador.
18:59Ça, c'était inédit.
19:00Regardez.
19:02J'ai une femme,
19:03j'ai une fille.
19:05C'est pour elle que j'ai arrêté.
19:08Surtout pour ma fille.
19:10Elle avait peur
19:10quand je descendais dans l'arène.
19:13Vous savez,
19:14elle est très sensible.
19:17Bon.
19:18On ne vous avait jamais vu
19:19en tauréor.
19:21Vous non plus.
19:23Moi, je me demande
19:23comment un jeune réalisateur
19:25qui fait son premier film
19:26s'y prend
19:27pour vous expliquer ça,
19:28pour vous demander
19:29ou vous convaincre
19:30de vous mettre en tauréor.
19:31Comment il s'y prend ?
19:31Il a appelé mon agent,
19:33François Molin,
19:34François Terry Molin
19:35de Cher Média.
19:35On me demanda un rendez-vous.
19:36Je suis venu.
19:37Il m'a dit,
19:37voilà, je voudrais que je vous vois
19:38en tauréador.
19:39Est-ce que vous voulez faire
19:39un petit rôle dans mon film ?
19:42C'est mon premier film,
19:43en plus.
19:44En tant que tauréador,
19:46l'idée m'a amusé.
19:47J'ai dit,
19:47pourquoi pas ?
19:49Et puis,
19:49on l'a fait.
19:50Mais il vous dit ça.
19:50Il vous dit ça.
19:51Sous-titrage Société Radio-Canada,