Lundi 26 mai 2025, retrouvez Pierre-Yves Dugua (Correspondant américain) dans SMART BOURSE, une émission présentée par Grégoire Favet.
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00:00Le dernier quart d'heure de Smartbourg chaque soir, c'est le quart d'heure thématique, le thème chaque lundi, c'est le thème américain avec ce quart d'heure américain hebdomadaire.
00:12Et nous retrouvons notre correspondant américain Pierre-Yves Dugas en visu avec nous.
00:16Bonsoir Pierre-Yves, bienvenue, ravi de vous retrouver pour évoquer bien sûr les fronts ouverts par Donald Trump.
00:23Sur la question commerciale, à nouveau, qui est plus qu'une question résiduelle, même si on a des trêves ici et là avec de grands pays comme la Chine,
00:31on a vu que les choses pouvaient à nouveau s'envenimer entre les Etats-Unis et l'Europe, même si effectivement le calendrier initial est toujours sur la table,
00:41à savoir une trêve et une marge de négociation jusqu'au 9 juillet entre les Etats-Unis et l'Europe.
00:46Avec cette question Pierre-Yves, qu'est-ce qui peut alimenter un deal entre les Etats-Unis et l'Europe ?
00:53Je crois qu'un des éléments fondamentaux de l'accélération, pour ne pas dire du véritable démarrage de cette négociation,
01:00serait un changement d'attitude de l'Union européenne dans son approche de la négociation.
01:07Donald Trump ne cherche pas à négocier un accord commercial qui ressemblerait aux accords commerciaux qu'il a négociés avec le Canada ou le Mexique par exemple,
01:15qui nécessiterait l'approbation du Congrès, des longues périodes de ratification en Europe, des amendements possibles de la part du Congrès.
01:23Non, non, il veut présenter un deal à l'opinion Maga, un deal qui soit vendable et qui lui permette de démontrer
01:31qu'il a obtenu rapidement quelque chose que ses prédécesseurs ne pouvaient jamais obtenir.
01:35Il veut mettre dans ce deal toutes sortes de considérations qui échappent aux négociateurs commerciaux envoyés par Bruxelles
01:44et qui font que du point de vue américain, les choses n'avancent pas, voire ne commencent pas.
01:50Par exemple, Donald Trump considère que l'Union européenne, d'une manière générale, est une construction anti-américaine
01:58qui a permis aux Européens de faire payer par les États-Unis leur défense militaire pendant que les Européens fabriquaient des Mercedes
02:07pour inonder le marché américain et des Airbus et des sacs Vuitton.
02:13Et il veut casser cette situation, quitte à mettre dans le panier d'une négociation commerciale
02:20des éléments qui n'ont rien à voir avec le commerce, comme les dépenses militaires,
02:24comme la réglementation antitrust des géants de la technologie,
02:28comme la taxation des sociétés multinationales,
02:33autant de portefeuilles qui ne sont pas directement de la responsabilité du Slovaque,
02:39éminent bureaucrate européen, qui a tout de même été formé à Moscou, dans une université,
02:45a étudié le marxisme et l'unidisme, s'est illustré à Bruxelles avec le Green Deal
02:51dont maintenant Ursula von der Leyen veut se dégager
02:53et qui est un étrange animal à mettre en face de la négociation,
03:00de l'autre côté de la table, face à un Scott Besson qui, lui, a travaillé pour Soros
03:03et a cassé la Banque d'Angleterre.
03:05C'est vraiment la carpe et le lapin qui essayent de parler et de négocier
03:10et pour le moment, ils n'ont pas beaucoup avancé.
03:11Si on veut que ça avance, il faut que les Européens comprennent
03:14que la nature du deal que recherche Donald Trump
03:17est totalement différente de ce qui a été fait dans le passé.
03:20Ça tombe bien, parce que Marco Sevkovic, en l'occurrence,
03:23ce commissaire européen qui mène ses négociations au niveau technique,
03:27est peut-être en train de passer la main à Ursula von der Leyen.
03:31Ursula a parlé à Donald dimanche soir
03:35et pour la première fois, Donald Trump a parlé d'Ursula von der Leyen.
03:40Voilà. Peut-être que la nature de l'échange est en train de changer
03:49et que les Européens ont intégré le fait que le type de deal
03:55que recherche Donald Trump n'est pas un accord purement commercial
03:59au sens traditionnel du terme
04:01et qu'il veut traiter de tous les problèmes transatlantiques
04:06en injectant, bien sûr, d'importants éléments commerciaux
04:11mais en abordant aussi d'autres choses.
04:15Un point essentiel qui agace énormément le Trésor américain et la Maison-Blanche,
04:20c'est la réticence des Européens de discuter avec les États-Unis,
04:24de faire front commun contre la Chine.
04:26Il y a eu des ouvertures de la part de Bruxelles sur ce thème
04:31et elles sont extrêmement faibles.
04:34On note d'ailleurs que le négociateur commercial européen
04:37va rencontrer son homologue chinois dans quelques jours.
04:43Les Américains voudraient qu'il y ait un front commun
04:46et que les Européens disent
04:48« Nous ne laissons plus rentrer les automobiles chinoises, électriques ou pas électriques.
04:53Nous allons suivre les États-Unis sur toutes nos restrictions d'exportation. »
05:00Pour le moment, les Européens ont peur de pratiquer ce genre de choses.
05:05Je notais par exemple, en allant consulter la liste des compétences du commissaire européen,
05:10qu'il figure encore le mot OMC.
05:12Les Européens s'accrochent à cette idée que l'OMC va édicter des règles du commerce international.
05:18L'OMC n'existe plus déjà dans la tête de Donald Trump.
05:22Les Américains veulent autre chose.
05:25Si on en vient au sujet budgétaire,
05:28Pierre-Yves, juste avant vous dans l'émission des gérants,
05:31on évoquait évidemment la grande et belle loi budgétaire
05:36voulue par Donald Trump
05:37qui a passé l'épreuve de la Chambre des représentants
05:39en générant peut-être, oui, 4 000 milliards de déficit au bas mot.
05:45Le gérant me disait, si la loi est validée en tant que telle par Donald Trump,
05:50si elle passe le Sénat sous cette forme-là,
05:53les taux, ce n'est pas à 5% qu'on verra sur le 30 ans,
05:56c'est 6% peut-être au minimum.
05:58Donc il va se passer quelque chose au Sénat, forcément, Pierre-Yves.
06:02Alors la marge de manœuvre des Républicains est faible.
06:05Elle existe, mais elle est faible.
06:06Les Républicains sont doublement divisés.
06:10Ils sont divisés au sein de la Chambre haute.
06:13Ils ont 53 sièges.
06:15Les démocrates en ont 47.
06:18Je vérifie, c'est bien ça.
06:21Le type de procédure qui est employée pour les Républicains
06:25pour faire passer cette loi qui fait 1100 pages
06:28est une procédure qui, en gros, interdit aux démocrates
06:33de voter en sa faveur.
06:35Donc il n'y a que des sénateurs républicains qui peuvent voter.
06:40Donc les défections ne peuvent être que minimes.
06:43Ça, c'est la première partie de la division des Républicains.
06:46Il y a au sein du Sénat des Républicains
06:48qui pensent que la loi est trop dispendieuse,
06:50que la loi ne réduit pas suffisamment les dépenses,
06:53que la loi aggrave trop le déficit budgétaire.
06:56Et puis il y a d'autres Républicains qui pensent au contraire
06:59qu'on mord trop sur certaines dépenses sociales,
07:02que l'on veut aller trop vite dans la réduction des avantages fiscaux
07:06qui ont été accordés aux entreprises qui investissaient dans l'économie verte
07:10et qui donc font du rétro-pédalage.
07:12De l'autre côté, deuxième division des Républicains,
07:15c'est que si les sénateurs républicains rognent trop certains éléments de cette loi,
07:20de l'autre côté, à la Chambre des représentants,
07:23eh bien leurs collègues républicains ne vont pas les suivre.
07:26Parce qu'il y a beaucoup d'orthodoxes dans la minorité de la droite républicaine
07:31qui considèrent que cette loi est une horreur
07:34et ils ont été très réticents à l'adopter.
07:37Ça n'a été que par une voie de différence
07:41que Mike Johnson a pu convaincre ses collègues de voter cet énorme paquet.
07:47Alors, in fine, John Toon, le leader de la majorité républicaine du Sénat,
07:54va devoir contrôler ses troupes
07:57et Donald Trump va devoir réexpliquer,
08:02de la manière la plus pédagogique qu'il peut,
08:04que s'il n'y a pas un accord d'ici le 4 juillet,
08:07les Républicains vont perdre la face
08:10parce qu'ils vont démontrer à l'opinion américaine
08:12qu'en dépit de leur majorité dans les deux chambres,
08:14ils sont incapables de gouverner.
08:16– Ça laisse suffisamment de temps pour régler les choses
08:21telles que Trump le souhaite ?
08:24Cette marge, ce délai jusqu'au 4 juillet, cette date fixée ?
08:28– Il ne faut pas que ça traîne parce que ça ne vous aura pas échappé.
08:32Dans le cadre de ce projet de loi qui a été adopté à la Chambre,
08:36il y a toutes les grandes promesses électorales
08:38de Donald Trump en matière fiscale,
08:40l'exemption de la taxation des pourboires,
08:43l'exemption de la taxation des pensions de retraite,
08:45de social security,
08:47toutes sortes d'augmentation des dépenses militaires,
08:52augmentation des dépenses pour le contrôle de la frontière, etc.
08:55Mais ces choses-là sont délicates du point de vue républicain.
09:03Et puis, il y a dans le paquet le relèvement du plafond de la dette.
09:08– Bien sûr.
09:09– Donc si les sénateurs traînent à s'entendre sur une nouvelle version de cette loi,
09:14le compte à rebours du plafond de la dette qui est enclenché
09:17risque de poser problème.
09:20Scott Besset, le secrétaire au Trésor, l'a bien dit,
09:22il faut que l'histoire du plafond de la dette soit réglée mi-juillet.
09:26Parce qu'on s'attend à ce que fin juillet, début août,
09:29le Trésor ne soit plus en mesure de faire face à ses obligations
09:35s'il n'augmente pas ses encours de dette.
09:39Donc double compte à rebours enclenché.
09:42Donald Trump a fixé la date du 4 juillet, la fête nationale.
09:46Et il y a la date du mi-juillet pour le relèvement du plafond de la dette,
09:48sauf si ce plafond fait toujours partie de ce paquet de 1100 pages.
09:52Et au milieu de tout ça, un accord commercial avec l'Union Européenne.
09:57Un deal, comme vous dites, Pierre-Yves.
09:59Tous les enjeux convergent début juillet, effectivement, côté américain.
10:03Merci beaucoup, Pierre-Yves.
10:04Pierre-Yves Dugas avec nous chaque lundi dans Smart Bourse
10:07pour ce quart d'heure américain que vous retrouvez également
10:09en replay sur bismart.fr
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