Passer au playerPasser au contenu principalPasser au pied de page
  • 12/05/2025
Lundi 12 mai 2025, retrouvez Pierre-Yves Dugua (Correspondant américain) dans SMART BOURSE, une émission présentée par Grégoire Favet.

Catégorie

🗞
News
Transcription
00:00Le dernier quart d'heure de Smartbourg chaque soir, c'est le quart d'heure thématique et chaque lundi c'est le quart d'heure américain qui nous permet de retrouver à distance notre correspondant américain Pierre-Yves Dugas.
00:13Bonsoir Pierre-Yves, merci beaucoup d'être avec nous.
00:16Alors pour commenter ces deals qui ont été annoncés, verbalisés ces dernières heures, ces derniers jours,
00:24il y a eu beaucoup d'affaires sur le plan géopolitique qui ont été, j'allais dire, guidées par Donald Trump et son administration.
00:32Je pense à l'Inde, au Pakistan, on verra cette semaine ce qu'il en est d'une possible rencontre entre Volodymyr Zelensky et Vladimir Poutine.
00:38Mais sur le front commercial, il y a évidemment la trêve de 90 jours et la désescalade tarifaire entre les Etats-Unis et la Chine.
00:44Et puis précédemment, quelques jours auparavant, Pierre-Yves, et pour l'instant c'est, j'allais dire, l'accord commercial de référence, celui entre les Etats-Unis et le Royaume-Uni.
00:54Alors on veut des deals, on veut des deals, et si on n'en a pas, eh bien on va dire qu'on en a quand même.
01:03La logique s'est inversée. Après deux mois durant lesquels Donald Trump voulait renverser la table, faire peur à tout le monde,
01:10relever massivement les tarifs douaniers bien au-delà de tout ce que l'on anticipait et donner l'impression qu'il avait l'intention de les laisser très élevées
01:18parce qu'il avait besoin de recettes fiscales durables. Maintenant, la dynamique inverse semble engagée.
01:25On commence par le Royaume-Uni, on va y revenir, et puis il y a ce que Scott Bessent lui-même,
01:32et Donald Trump, il y a quelques minutes dans le bureau ovale, appelle le deal.
01:37Le deal avec la Chine, c'est extraordinaire. C'est un deal qui consiste à dire qu'on va négocier un deal.
01:45Revenir presque au statu quo exempté est présenté comme une victoire.
01:51Bon, tant mieux. Cela veut dire que peut-être Donald Trump est revenu sur sa conviction,
01:57selon laquelle les tarifs douaniers étaient la réponse à tous les problèmes.
02:02Et on va voir, en tout cas, la réaction immédiate des marchés est très positive.
02:07Alors, ce premier deal chronologiquement qui a été annoncé avec le Royaume-Uni
02:12était probablement le plus facile à négocier parce que le Royaume-Uni affiche un déficit commercial
02:20avec les États-Unis de l'ordre de 12 milliards de dollars.
02:24Rien à voir donc avec les énormes surplus que l'on connaît avec la Chine, la Corée ou le Japon, par exemple.
02:32Et puis, on parle la même langue dans tous les sens du terme.
02:37Et puis, politiquement, Donald Trump avait besoin d'afficher une victoire
02:41pour montrer que sa politique de tarifs douaniers massifs ne le précipitait pas dans l'impasse.
02:47Et de l'autre côté, le premier ministre britannique aussi avait besoin d'afficher une victoire politique
02:52parce que sa situation est quand même assez chancelante.
02:55Donc, il y avait cette conjonction de facteurs.
03:00Et finalement, ce deal qui n'est que tout à fait partiel, qui est loin d'être bouclé,
03:08ne présente pas de concessions massives de la part des Britanniques.
03:13On est très, très loin du rêve britannique formulé après le Brexit d'accords de libre-échange transatlantique.
03:22Mais les Britanniques n'ont pas cédé sur des points importants.
03:27D'abord, ils n'ont pas cédé sur leur taxation des services numériques.
03:33Ils n'ont pas cédé sur les normes d'accès au marché britannique pour les produits alimentaires.
03:40Les Britanniques ne sont pas prêts de manger du poulé américain s'il a été rincé à l'eau de Javel.
03:46Je dis cela avec une pointe d'ironie parce que moi, j'en mange presque toutes les semaines.
03:52Et vous voyez, ça ne m'a pas rendu malade.
03:55Donc, un petit effort pour le bœuf américain, oui.
03:59Ici, une plus grande ouverture du marché britannique sur l'éthanol, bien.
04:06Et des concessions importantes d'un point de vue commercial et politique de la part des Américains.
04:15L'acier et l'aluminium britannique vont rentrer sans droits de douane maintenant.
04:19Les Jaguars, les Range Rovers vont rentrer avec beaucoup moins de droits de douane
04:26dans une limite de contingent qui, en fait, correspond exactement à ce qu'elles vendaient de toute façon.
04:31On passe de quelque 27% à 10% de droits de douane seulement.
04:36Donc, un petit progrès.
04:39Un point de scepticisme tout de même dans mon commentaire sur ce qui nous a été présenté comme un deal comprehensive.
04:46Complet, parfait, bouclé, totalement ficelé.
04:49Non, ça n'est pas vrai. La preuve en est que l'on nous avait annoncé, par exemple,
04:54que dès le lendemain de cette annonce assez confuse faite dans le bureau ovale
04:59avec Keir Starmer qui était au téléphone et toutes sortes de chiffres qu'on nous jetait à la figure,
05:05nous les journalistes, un petit peu évahis.
05:07On nous a expliqué que vous allez voir ce que vous allez voir.
05:10Le deal est tellement extraordinaire que Boeing, demain, va recevoir une commande de 10 milliards de dollars.
05:15Demain, après-demain, après-après-demain, sont passés.
05:18On n'a toujours pas vu la commande de 10 milliards de dollars de Boeing.
05:22Bon, mais on y croit.
05:24C'est un geste important.
05:25Malheureusement, pour les raisons que je viens d'essayer de vous expliquer,
05:30en particulier le fait que les États-Unis affichent un surplus avec les Britanniques,
05:35ça ne peut pas servir de modèle à des négociations, avec l'Europe en particulier.
05:41Un autre point important, le Royaume-Uni n'avait pas mis en œuvre des mesures de rétorsion.
05:51Et là, je crois sincèrement que la Maison-Blanche veut accorder sa préférence
05:57aux pays qui ont eu, certains diront, la faiblesse, d'autres diront la sagesse ou la patience
06:05de ne pas imposer tout de suite des mesures de rétorsion.
06:09Ces pays-là sont récompensés.
06:11Le Royaume-Uni en est un et je pense que la Suisse va en être un autre.
06:14Bon, un deal facile avec le UK, allié historique, stratégique,
06:19mais une situation spécifique qui rend sans doute ce deal non reproductible,
06:24en tout cas dans les termes dans lesquels il a été noué.
06:28Et puis un focus asiatique très fort, Scott Bessent le rappelait tout à l'heure,
06:31la Chine bien sûr, mais désormais il y a toujours des négociations avec le Japon
06:36qui sont en cours, la Corée du Sud.
06:38Quant à l'Union Européenne, de ce que je comprends,
06:40on est toujours au niveau de relations ou de négociations techniques.
06:44Ça se joue à un niveau technique et pas encore à un niveau politique,
06:48en tout cas pas encore au plus haut niveau politique officiellement.
06:52Il y a trois flèches dans le programme de recomposition de l'économie américaine
06:58par Donald Trump, la question tarifaire, donc la flèche est partie
07:03et on va essayer de ramener des deals à la maison.
07:06Il y a la flèche de la baisse d'impôts, des baisses d'impôts, Pierre-Yves,
07:10et puis la flèche de la dérégulation, où est-ce qu'on en est du reste du programme
07:14et notamment la partie fiscale budgétaire avec toujours cette petite spécificité américaine,
07:19mais toujours un compteur qui tourne avec un plafond de la dette qui se rapproche, etc.
07:25Alors on commence à s'exciter sérieusement au Capitole sur la question fondamentale
07:32pour les électeurs américains et pour la conjoncture américaine
07:35et pour le calendrier constitutionnel américain qui oblige cette Maison-Blanche
07:41à faire voter quelque chose d'important avant que le Congrès parte en vacances d'été.
07:47Il faudrait vraiment que les choses se débloquent à la Chambre des représentants
07:51avant la fin du mois de mai pour que le Sénat se saisisse d'un paquet début juin,
07:56et il faut aller vite.
07:58Alors la commission des voix et moyens en matière fiscale a toujours le premier mot à dire.
08:04Elle est en train de produire une énorme loi d'une complexité totale,
08:10mais c'est une seule loi sur un seul paquet législatif que Donald Trump a insisté,
08:17plutôt que d'avoir deux lois en passant ce qui est facile d'abord
08:20et en repoussant au calendrier que ce qui est difficile.
08:23Il cherche à obtenir une seule loi.
08:25Alors où en est-on en matière fiscale ?
08:27L'objectif politique des Républicains qui ont une très très faible marge de manœuvre
08:31à la Chambre des représentants et qui ont peur de la perdre lors des élections législatives l'année prochaine,
08:36et de mettre de l'argent dans la poche tout de suite, dès le mois de janvier 2026,
08:41de l'argent dans la poche des Américains pour qu'ils voient un petit bonus dans leur pouvoir d'achat
08:46et que ça leur rappelle que les Républicains ne les oublient pas.
08:50Comment pensent-ils procéder ?
08:52Alors je me reporte à mes notes parce que ça devient assez technique,
08:55mais les gens qui nous écoutent sont techniques par définition, n'est-ce pas ?
09:00Alors, nous avons une augmentation des abattements pour particuliers et pour familles.
09:06Alors ça, ça met de l'argent tout de suite dans la poche.
09:08Quand je dis tout de suite dans la poche, parce que les Américains pratiquent ce qui est,
09:13je crois maintenant la norme en France depuis assez peu de temps,
09:16qui est la retenue à la source.
09:18Dès que l'on change la formule de retenue à la source et qu'on en retient moins,
09:22eh bien à la fin du mois, les Américains ont un ou deux fois par mois,
09:25souvent les Américains sont payés deux fois par mois tous les 15 jours,
09:28ont un petit peu plus de sous.
09:31Augmentation des crédits d'impôt pour enfants et pour familles.
09:34Ça, ça marche.
09:35Ça donne aussi de l'argent dans la poche des Américains assez vite.
09:38Ajustement des tranches d'impôt pour les indexer un peu plus,
09:42pour tenir compte de l'inflation.
09:44Très important.
09:46Augmentation de l'exemption de la taxe sur les héritages.
09:49Là, je vais faire rêver les gens qui sont en France en leur disant
09:52que cette exemption fédérale porte sur la somme de, tenez-vous bien,
09:56à 15 millions de dollars.
10:00Réduction du taux effectif de taxation des auto-entrepreneurs.
10:03Alors ça, c'est capital et c'est souvent une chose qui est mal comprise.
10:07Énormément de petites entreprises américaines ne sont pas taxées
10:11en fonction du barème des sociétés,
10:13mais elles sont taxées au barème des revenus des personnes
10:16parce que les propriétaires de ces petites entreprises
10:20ne présentent qu'une seule déclaration d'impôt.
10:23c'est celle de leurs impôts personnels.
10:26Et lorsque le taux marginal d'imposition des particuliers
10:30est supérieur au taux marginal d'imposition des entreprises,
10:33ça peut poser un problème aux petites entreprises.
10:35Et là, les Républicains veulent procéder à un petit ajustement.
10:38En gros, on baisserait d'un pour cent,
10:40on passerait de 29% de taux maximal d'imposition
10:43à 28% pour les gens qui sont sur le Schedule C,
10:48je crois, dit-on, en termes techniques.
10:50Les grands mystères de cette affaire,
10:52parce que tout est sur la table,
10:54sont comment va-t-on faire pour tenir
10:56les grandes promesses électorales de Donald Trump
10:59qui a promis l'exemption de taxation
11:02sur le versement des pensions de retraite de Social Security.
11:06Comment va-t-on faire pour exempter de taxation les pourboires ?
11:09Tout ça est encore un grand mystère.
11:12Et le leadership de la Chambre des représentants
11:15se gratte la tête et le compte-retourne.
11:17Oui, on faisait le point avec un de nos invités
11:19dans la partie précédente de l'émission.
11:21On est déjà peut-être sur les 3-4 premiers mois de l'année.
11:23Je ne suis pas sûr qu'on ait l'exécution budgétaire
11:25encore pour le mois d'avril,
11:27mais on l'aura sans doute rapidement aux Etats-Unis.
11:29On est sur plus de 200 milliards de dollars
11:31de dérive budgétaire déjà depuis le début de l'année,
11:35sur les premiers mois de l'année.
11:36Grégoire, quand on aime, on ne compte pas.
11:40Oui, je sais bien.
11:42Mais à un moment, le marché peut-être
11:44se réintéressera à cette question budgétaire.
11:48Là, on est sur les tarifs.
11:49Le marché, généralement, court un lièvre à la fois.
11:52Merci beaucoup, Pierre-Yves.
11:53Pierre-Yves Duguay avec nous chaque lundi
11:54dans ce quart d'heure américain
11:55sur Bsmart for Change, bien sûr.
11:58A retrouver en replay sur bsmart.fr.

Recommandations