Témoignage : un vigneron se donne la mort dans ses vignes

Sud Radio

Avec Thomas Guibert, président de l’appellation Castillon-Côtes de Bordeaux  Abonnez-vous pour plus de contenus : http://ow.ly/7FZy50G1rry  ______________________________________   Retrouvez nos podcasts et articles : https://www.sudradio.fr/  ______________________________________   Nous suivre sur les réseaux sociaux   ▪️ Facebook : https://www.facebook.com/SudRadioOfficiel  ▪️ Instagram : https://www.instagram.com/sudradioofficiel/  ▪️ Twitter : https://twitter.com/SudRadio  ▪️ TikTok : https://www.tiktok.com/@sudradio?lang=fr   ##SUD_RADIO_VOUS_EXPLIQUE-2025-05-16##

Transcript

00:00Le Grand Matin Sud Radio, 7h09, Maxime Liedot.

00:047h40 sur Sud Radio, on souhaite vous expliquer la crise qui est en train de traverser le monde du vin.

00:12Parce que samedi, l'un d'entre eux s'est tout simplement suicidé dans son domaine à Sainte-Magne-de-Castillon.

00:16Il avait 59 ans et il avait repris le domaine viticole familial dans les années 90.

00:22Et depuis plusieurs années, il était pris en tenaille par la crise, les difficultés financières, les contraintes administratives.

00:27Bonjour Thomas Guibert.

00:31Bonjour.

00:32Vous êtes le président de l'appellation Castillon-Côte de Bordeaux.

00:36C'est vrai que c'est un événement qui est tragique, qui a traversé la profession, un suicide, au pied de ses vignes.

00:42Quand vous avez appris cette nouvelle, qu'avez-vous ressenti quand on travaille comme vous dans ce domaine-là depuis des années

00:49et qu'on arrive à cette extrémité de choisir la mort sur son propre domaine ?

00:53C'est un véritable drame, on ne va pas se cacher.

01:00C'est compliqué, c'est un vigneron de notre appellation, que je ne connaissais pas personnellement, mais professionnellement.

01:10Voilà, la crise qu'on traverse a des effets durs, néfastes, terribles.

01:19Après, comme je le dis souvent, cette crise est dure, très dure.

01:26Après, en arriver à une telle extrême, il y a certainement plusieurs raisons.

01:31C'est certainement un effet multifactorial, professionnel ou autre.

01:36Voilà, mais c'est un drame.

01:38C'est difficile de parler d'un drame.

01:40C'est un drame.

01:41Thomas Guilbert, président de l'appellation Castillon-Côte de Rhône.

01:44Quand on se plonge dans cette...

01:46Côte de Bordeaux, pardonnez-moi.

01:48Quand on se plonge...

01:49Pas de concurrence comme ça.

01:51Quand on se plonge dans cette histoire,

01:54on apprend que Chris Leblanc avait décidé d'arracher 10 des 15 hectares en sa possession.

02:00C'est ce qu'on appelle l'arrachage.

02:01Est-ce que vous pouvez d'abord nous expliquer très rapidement qu'est-ce que l'arrachage ?

02:04Pourquoi c'est nécessaire ?

02:05Parce que ça a été un peu le début de l'engrenage infernal pour lui.

02:10C'est le début de l'engrenage infernal pour beaucoup.

02:12Pour beaucoup.

02:13L'arrachage, en deux mots, il y a une surproduction de vin mondial par rapport à la consommation mondiale.

02:20Donc, il y a une mise en place au niveau européen d'un arrachage, d'une aide à l'arrachage.

02:27C'est-à-dire qu'arracher des vignes, ça a un coût.

02:30Et pour diminuer la production, il y a une aide européenne pour arracher ces vignes.

02:34Et ensuite, on n'a plus le droit de les replanter pendant plus de 10 ans

02:38pour tout simplement baisser la production mondiale.

02:43Mais quand on vous écoute, on comprend qu'il y a cette aide.

02:46Mais quand on se penche sur le dossier, on apprend que du côté de Christophe Blanc,

02:50la banque rechignait à lui prêter la somme nécessaire pour financer cet arrachage

02:54sans lequel il ne pouvait pas toucher les subventions.

02:57C'est-à-dire qu'on est dans un monde où, quand il y a des aides,

02:59c'est vous qui devez avancer l'argent, Thomas Guébert ?

03:01Alors, toute aide, toute aide, de toute façon, il n'y a aucune aide qui existe

03:06sans qu'on ait besoin d'avancer l'argent.

03:08C'est souvent comme ça.

03:11Ensuite, moi, je vous dis, je ne connaissais pas en privé,

03:15je ne connaissais pas le dossier.

03:17Donc, c'est compliqué de juger.

03:21Non, mais c'est cette idée, si vous voulez, que quand ce sont des choix que vous devez faire...

03:26De toute façon, une aide, les aides agricoles, que ce soit la PAC, que ce soit tout,

03:30toutes les aides arrivent qu'après que vous ayez réalisé les choses.

03:33On vous paye, on vous donne une aide, entre guillemets, ou sur facture,

03:38ou sur... Donc, c'est souvent la règle des aides.

03:41Donc, les aides arrivent, en effet, sont versées très, très, très, très souvent

03:44après avoir réalisé un investissement, après avoir réalisé une chose.

03:50Donc, oui, ça, c'est le fonctionnement.

03:52Après, tous les vignerons, comme tous les entrepreneurs,

03:56ont aussi besoin des banques, ont aussi besoin d'un soutien bancaire,

03:59surtout dans une période telle qu'elle est aujourd'hui,

04:03et ont encore plus besoin d'un soutien bancaire aujourd'hui pour les investissements,

04:07pour acheter un tracteur, pour planter des vignes, pour acheter une cuve.

04:11Voilà, on a tous besoin des établissements bancaires.

04:14Donc, ce ne sera pas mon propos, aujourd'hui, de taper sur des établissements bancaires

04:17que tout vigneron...

04:19Non, sans taper dessus, mais évoquer, en effet, la difficulté

04:21et les différentes crises que vous traversez,

04:23pour dire que, de temps en temps, un peu de souplesse ne peut pas faire de mal.

04:26Dans ce que vous dites, et vous l'avez répété à plusieurs reprises

04:28depuis le début de cette interview, Thomas Guibert,

04:31c'est une crise terrible du jamais vu dû à quoi ?

04:34À cause des prix, des ventes, de la reconnaissance,

04:36de la place du vin qui a peut-être un peu perdu de sa superbe en France ?

04:40Oui, je pense que vous avez tout résumé,

04:44mais vous avez résumé beaucoup de choses,

04:47de la crise, il y a beaucoup de choses qui se mettent.

04:51C'est très, très dur à résumer en deux mots.

04:54Oui, il y a une baisse à la consommation,

04:56oui, il y a une concurrence mondiale,

04:58il y a une crise mondiale,

05:00il y a des taux d'intérêt qui se sont envolés,

05:02ce sont souvent des professions qui sont soumises

05:04à des prêts bancaires,

05:06à des courts termes pour financer des stocks,

05:08pour faire une mise en bouteille,

05:09pour faire des choses comme ça.

05:10Donc les taux d'intérêt se sont envolés,

05:13donc ça impacte aussi,

05:15c'est une profession où on a du stock,

05:17pour vendre des bouteilles, il faut avoir du stock.

05:19Donc ce stock, il est financé,

05:21lorsque les prêts sont plus élevés avec les courts termes,

05:23de suite ça vous détruit un peu la marge.

05:26Donc il y a beaucoup de choses,

05:27mais on a quand même une chance,

05:30parce que moi je voudrais aussi avoir un discours un peu positif,

05:34parce que par rapport à ça,

05:36on a une chance,

05:37c'est qu'il y aurait quelque chose de très simple pour résoudre la crise,

05:40mais alors d'une simplicité.

05:41La solution miracle, Thomas Guilbert, allez-y.

05:43La solution miracle, vous savez laquelle c'est monsieur Guilherme ?

05:46C'est que tous les Français se remettent à boire un petit coup de vin rouge,

05:49ou de vin blanc.

05:50Ah oui, à 7h46 avec modération, oui.

05:53C'est aussi simple.

05:54Alors la modération, vous savez, je vais vous raconter,

05:55la politique hygiéniste, bien sûr, pas de soucis, tout ça,

05:58mais aujourd'hui, j'aime bien le dire,

06:01arrête, passons d'une politique hygiéniste

06:03à une politique hédoniste, pardon,

06:07ou épicurienne.

06:08Vous savez, la définition de la politique épicurienne,

06:11c'est trouver des moyens pour vivre en se faisant plaisir.

06:16Donc c'est quoi ?

06:17C'est boire un canon, on sort d'envignon, c'est ça ?

06:20Peut-être en se faisant plaisir,

06:21vous savez, on prendra moins d'antidépresseurs,

06:23moins d'anxiolétiques,

06:24et la vie sera plus belle.

06:26Et puis dans la politique hygiéniste,

06:27je me demande ce qui est le pire,

06:29entre aller dans une brasserie française,

06:31qui est notre patrimoine, ou dans un bistrot,

06:34prendre un poireau-vinaigrette,

06:35une entrecôte à la Bordelaise,

06:37avec un canon de rouge,

06:38plutôt que d'aller dans un fast-food,

06:41manger un burger qui est rempli de produits

06:43pour vous redonner envie de manger,

06:44avec des frites surgelées,

06:46et boire un soda,

06:47un demi-litre de soda sucré.

06:50Bon, je ne sais pas quelle est la politique des deux

06:52qui vous rendra le plus de bonheur,

06:55et en meilleure santé.

06:57Je peux vous dire, déjà, merci Thomas Guibert,

06:59président de l'appellation Castillon-Côte de Bordeaux,

07:01parce que là, dans le studio,

07:02il n'y a pas quelqu'un qui n'a pas fermé les yeux

07:04quand vous avez évoqué le bon bistrot français,

07:07le poireau-vinaigrette,

07:08accompagné d'un bon verre de vin.

07:08Mais oui, sauvons notre patrimoine.

07:10Mais bien sûr.

07:10Vous savez, il y a une loterie pour le patrimoine,

07:13et moi, je vous en propose une.

07:14Achetez une bouteille de vin,

07:16partagez-la avec vos amis ce soir,

07:18invitez vos amis, vos voisins de palier.

07:20Mais oui, l'invitation est lancée, Thomas Guibert.

07:22Merci beaucoup d'avoir fini ce sujet sur les normes

07:25qui poussent parfois certains vignerons

07:27au geste le plus dramatique.

07:29Merci d'avoir été avec nous, 7h40,

07:30pour nous expliquer, en effet, ce phénomène.

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