- 15/05/2025
Jeudi 15 mai 2025, retrouvez Cristina Lunghi (Présidente et fondatrice, Arborus) dans MANAGER L'ODYSSÉE, une émission présentée par Alix Nguyen.
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00:00Générique
00:00Bienvenue dans Manager l'Odyssée, votre rendez-vous hebdomadaire sur Be Smart for Change.
00:13Un tête-à-tête de 28 minutes en immersion dans le quotidien d'un manager.
00:18Devenir un bon manager ne s'improvise pas.
00:21Aujourd'hui, je reçois Christina Lunghi, juriste, experte internationale
00:26auprès de la Commission européenne et des Nations unies sur les questions d'égalité.
00:32Docteur en droit européen, mais surtout fondatrice d'Arborus, une ONG pionnière
00:38qui milite depuis 30 ans pour l'égalité femmes-hommes
00:42et plus largement l'égalité des chances en entreprise.
00:46Créatrice du label Égalité et du premier label européen sur la diversité.
00:51Mon invité a conseillé des ministres bâti des référentiels
00:55et accompagné des dizaines d'organisations dans la transformation de leurs pratiques managériales.
01:02Comment modéliser le changement au cœur des entreprises ?
01:06Comment porter cette cause au quotidien ?
01:09Christina Lunghi nous raconte.
01:14Bonjour Christina.
01:17Bonjour.
01:17Bienvenue et merci d'avoir répondu présente.
01:20Merci à vous.
01:21Pour commencer, Christina, vous êtes juriste de formation, docteur en droit européen.
01:27À quel moment vous avez décidé de consacrer votre expertise à l'égalité professionnelle ?
01:34C'est toute la question que je résume en un mot, c'est le déclic.
01:39Et ça, c'est valable pour tout le monde.
01:40Je pense qu'il faut avoir le déclic pour entrer dans des matières aussi philosophiques finalement
01:46et visionnaires que celles d'un monde d'égalité.
01:49Moi, j'avais un parcours de juriste normal.
01:53J'étais spécialisée en droit des assurances, j'écrivais au juriste classeur, enfin tout allait bien.
01:57Et puis un jour, j'étais à la Commission européenne et j'ai vu un poster dans un bureau
02:03avec le palmarès des pays européens à l'époque, je vous parle des années 90 à peu près, 92, 93.
02:11Et il y avait un palmarès des pays européens en matière d'égalité entre les femmes et les hommes.
02:16Moi, je me suis dit, la France, ça doit être le numéro un quand même.
02:19On était avant-dernier, avant les Grecs.
02:22Et là, j'ai eu le fameux déclic.
02:23Je me suis dit, mais comment est-ce possible ?
02:26Et à partir de là, j'ai commencé à réfléchir en me disant, mais je ne comprends pas.
02:30Moi, j'ai fait des études, j'étais vraiment bien classée partout.
02:34Je suis première un peu de la classe, je suis première dans ma famille, l'aînée.
02:39Je n'ai jamais eu de problème de nature inégalitaire, on va dire.
02:43Et en réfléchissant bien à tout ça, en recommençant à regarder un petit peu les statistiques,
02:47en approfondissant le sujet, je me suis rendu compte qu'il y avait un vrai sujet,
02:52mais que le sujet était systémique et qu'il fallait vraiment agir.
02:57Et alors, il y a ce déclic.
02:59Oui.
02:59Et c'est quoi l'étape d'après ?
03:01L'étape d'après, c'est d'en parler avec des amis qui me disent,
03:04oui, effectivement, tu as raison, tu pourrais créer une association pour démarrer,
03:10pour réunir des gens et commencer une réflexion.
03:13Donc, j'ai créé Arborus le 5 juillet 1995.
03:16Nous fêtons nos 30 ans cette année.
03:18Et c'est à partir de cette création, de cette association,
03:24que j'ai commencé véritablement à me poser la question.
03:27Puis, une fois que j'ai commencé à trouver des solutions,
03:30à me dire, je vais les mettre en œuvre.
03:32Et sur le terrain, j'ai commencé à développer une expertise
03:35qui m'a amenée à créer un nouveau métier,
03:38qui est celui de consultante, d'experte, en égalité professionnelle.
03:44Et puis, c'est ajouter la diversité, les diversités.
03:47Et aujourd'hui, on parle d'inclusion.
03:50Vous parlez de modélisation du changement.
03:53Qu'est-ce que ça veut dire concrètement ?
03:55Modéliser le changement ?
03:56C'est-à-dire qu'aujourd'hui, on a besoin,
03:59alors aujourd'hui, plus que jamais,
04:01avec les déclarations fracassantes qu'on entend tous les matins
04:04venant des États-Unis,
04:06et puis le populisme qui se développe,
04:08de toute façon, on est dans une vraie crise de la démocratie.
04:12Et donc, ce changement qui est nécessaire,
04:14et qui était déjà nécessaire il y a 30 ans,
04:16donc on n'est pas du tout en train de découvrir quelque chose aujourd'hui,
04:19c'est la continuité d'un mouvement
04:22qui nous amène face à l'obsolescence des systèmes d'organisation.
04:26Et donc, ces systèmes d'organisation
04:28doivent systématiquement être modifiés,
04:31mais quitte à les modifier,
04:33autant les modifier sur des bases de l'égalité
04:36entre les deux pôles de l'humanité,
04:38puisque nous sommes des humains faits de femmes et d'hommes.
04:41Et donc, la première brique de l'édifice, me semble-t-il,
04:45est celle de cette égalité entre les femmes et les hommes.
04:48Vous le disiez, vous avez créé Arborus dans les années 90,
04:51bien avant que l'égalité devienne une orientation politique,
04:55ou RH.
04:57À l'époque, comment votre engagement était-il perçu ?
05:01Très mal.
05:02Très très mal.
05:03Déjà, du côté de ma famille,
05:05j'avais quand même un doctorat de droit,
05:06j'écrivais à la chronique Europe du jurisclasseur,
05:09j'avais un petit nom, j'étais très jeune,
05:12j'avais déjà une petite notoriété dans le domaine.
05:15Ils ont pensé que j'étais vraiment une folle,
05:17et ils me l'ont dit d'ailleurs.
05:18Et donc, j'ai eu deux activités,
05:22une activité bénévole dans un premier temps avec Arborus,
05:25et puis je faisais du conseil à côté.
05:27Et puis petit à petit,
05:28à force de travailler sur ce sujet-là,
05:31et puis parce que le sujet a véritablement émergé,
05:34dans les années 2000,
05:36là, j'ai commencé à en faire mon métier,
05:39et j'ai pu développer une vraie activité.
05:41Je pense que j'ai été certainement la première,
05:44et peut-être la seule,
05:46pendant des années,
05:47à ne vivre que de ça,
05:48en faire véritablement un métier.
05:50Aujourd'hui, il y a plein de consultantes,
05:53et de consultants sur ces sujets, heureusement.
05:55Et qu'est-ce qui fait qu'avant les années 2000,
05:58malgré ces résistances,
06:00vous continuez, vous persévérez,
06:02et où est-ce que vous trouvez la force ?
06:04La force et la foi, je dirais,
06:06j'étais tellement convaincue
06:08que c'était le bon chemin,
06:10et que c'était le chemin de l'avenir,
06:12que je n'avais pas de doute.
06:14Donc pour moi, c'était une évidence
06:15qu'il fallait aller dans ce sens-là.
06:17Et puis quand vous rencontrez des gens,
06:19la première manifestation que j'ai faite,
06:21je l'ai faite à l'Assemblée nationale,
06:22pour le lancement d'Arborus,
06:24avec des femmes ministres,
06:25et des femmes présidentes d'entreprises
06:27de six pays européens différents.
06:29Et quand vous entendez des femmes
06:30qui étaient plutôt jeunes,
06:32vous racontez leur parcours,
06:34et puis comment ça évolue,
06:35et comment la loi dans les pays évolue,
06:37vous vous dites,
06:38mais il y a un truc là,
06:40c'est ça l'avenir.
06:41Et je reste convaincue aujourd'hui
06:43que c'est ça l'avenir.
06:45Vous êtes à l'origine du label Égalité,
06:48créé en 2004.
06:49Tout à fait.
06:51Aujourd'hui encore,
06:53beaucoup d'entreprises
06:53peinent à traduire leurs engagements
06:56en actions concrètes.
06:58Pourquoi ?
06:59Ah, très bonne question,
07:01très compliquée.
07:02Donc, il y a plein de raisons
07:03qui expliquent ça.
07:04Il y a une raison qui est celle de la...
07:07Je pense que c'est vraiment
07:08la problématique de notre société,
07:10c'est qu'on n'a pas la culture de l'égalité.
07:12Donc, c'est d'abord une question de culture
07:14plus que de cadre législatif
07:16ou de volonté.
07:17Le problème, il est vraiment culturel
07:20et systémique.
07:20À partir du moment où on vit dans un système
07:22où il est normal que finalement,
07:25les métiers, soit il y ait des métiers d'hommes,
07:27des métiers de femmes,
07:28qu'il y ait des valeurs dites féminines,
07:30des valeurs dites masculines,
07:32que les femmes s'occupent plus des enfants,
07:35c'est normal, plutôt que les hommes, etc.
07:37Cette spécialisation des rôles sociaux,
07:40ce poids de la tradition, quelque part,
07:43est tel que c'est difficile
07:46de revenir sur tout ça.
07:48Donc, il faut une sacrée dose de vision
07:50et d'envie pour qu'il y ait un changement.
07:53La loi, elle est plus ou moins coercitive,
07:56elle est plus ou moins bien comprise,
07:58d'où l'idée de faire des labels.
07:59Et là, quand vous offrez une méthodologie
08:03avec une récompense derrière,
08:04c'est-à-dire que vous avez des auditeurs
08:06qui viennent regarder si le travail est bien réalisé,
08:10si vous pouvez progresser aussi dans votre démarche,
08:13mais vous avez cette récompense d'être valorisé,
08:16là, vous allez au-delà de la loi.
08:18Et ma grande fierté, c'est d'entraîner
08:20beaucoup d'entreprises dans cette démarche volontaire,
08:23qui est beaucoup plus positive, à mon avis,
08:24que celle de la stricte approche législative,
08:29et de les entraîner vers une progression
08:33continue de leur politique d'égalité
08:35et d'inclusion.
08:37Vous avez aussi participé à la création
08:38du premier label européen,
08:40et même international, sur la diversité.
08:43Pourquoi était-ce important d'inscrire cette démarche
08:45à l'échelle transnationale ?
08:48Alors, ça a été, comme toujours,
08:50des rencontres, des moments un petit peu clés,
08:52comme ça, dans la vie.
08:54Le commissaire européen, Vladimir Spidla,
08:56qui était en charge du dialogue social,
08:59du droit du travail en Europe,
09:00m'avait dit, quand il avait appris
09:02que j'avais fait le label pour la France,
09:04m'avait dit, vous devriez en faire un pour l'Europe.
09:07Donc, évidemment, concomitamment à cela,
09:10des grandes entreprises, comme L'Oréal ou Orange,
09:12m'avaient dit, écoute,
09:14on a besoin d'un outil de pilotage,
09:18pardon, on a besoin d'un outil de pilotage
09:20au niveau international.
09:22Et donc, j'ai créé, d'abord,
09:24effectivement, à l'échelle européenne,
09:25on l'a lancé à Bruxelles,
09:26au Conseil économique et social européen,
09:29et très, très vite, le label est devenu international
09:32à la demande d'entreprises qui me disaient,
09:34mais on a besoin, pour les États-Unis,
09:36pour le Canada, pour l'Australie,
09:38d'avoir un référentiel qui soit aussi international.
09:42Donc, on a ouvert l'international,
09:44on l'a ouvert à la diversité,
09:46et puis aujourd'hui, on l'a ouvert
09:47à l'intelligence artificielle.
09:48On peut le dire, vous êtes une femme de procès,
09:51vous donnez une forme concrète
09:53aux valeurs d'égalité en entreprise.
09:56Quel est le rôle du manager
09:57dans leur mise en œuvre ?
09:59Essentiel.
10:00Le rôle du manager est essentiel
10:02parce que c'est lui qui est la courroie de transmission
10:04entre une volonté politique qui part du haut
10:08et la base.
10:09Donc, c'est le manager qui va organiser le travail,
10:14qui va organiser les process, justement,
10:17et qui va leur donner de la vie.
10:18Donc, je dis toujours, c'est un peu comme les enfants.
10:21Il faut répéter, répéter, répéter inlassablement.
10:23Et un jour, on a le déclic,
10:26on a le réflexe et on le fait automatiquement.
10:28Et ça, c'est le rôle du manager.
10:29Donc, le rôle du manager est essentiel.
10:31Et justement, vous travaillez avec des dirigeants,
10:33des RH, des managers.
10:35Comment est-ce que vous les aidez
10:37à passer du diagnostic à l'action ?
10:39Ça passe par quel levier concrètement ?
10:41Ça passe par plein de leviers différents.
10:42Le premier levier, je pense,
10:44c'est une volonté chez eux
10:46d'organiser les choses.
10:48d'avoir un outil de pilotage,
10:49un outil de confiance
10:52pour pouvoir évaluer,
10:54organiser et progresser.
10:57Donc là, ils cherchent.
10:58Ensuite, on se rencontre.
10:59En général, ça se passe comme ça.
11:01Et là, on partage des valeurs.
11:03On va travailler sur
11:05c'est quoi le monde qu'on veut demain.
11:07C'est comment on veut donner
11:08un input positif à l'entreprise.
11:11Comment on veut travailler avec les équipes.
11:13comment on veut justement manager
11:15de façon équitable
11:17et avec des vraies valeurs
11:19de projets de société.
11:21Et je pense que ça,
11:22ça les fait basculer véritablement
11:24dans une envie de travailler
11:26qui va au-delà
11:27d'un simple outil de management.
11:30Changer les choses,
11:31ça demande parfois
11:32de heurter les habitudes
11:34ou les zones de confort.
11:36Comment est-ce qu'on embarque
11:37une organisation sans la braquer ?
11:40Alors, on les embarque
11:41sur les valeurs, justement.
11:43Il faut avoir une approche
11:44extrêmement positive.
11:45C'est sûr que si vous êtes
11:46dans la contrainte
11:47et c'est le problème de la loi
11:48et je suis juriste
11:49et je le dis avec tout l'amour
11:50que j'ai pour le cadre légal
11:52qui est très important.
11:54Mais si vous n'êtes
11:54que dans la peur du gendarme,
11:56vous n'avancez pas.
11:57C'est très rare les gens
11:58qui avancent juste
11:59parce qu'il y a une sanction.
12:01Par contre, si vous les embarquez
12:02en leur disant
12:03« ça va être génial,
12:04on va faire un truc formidable,
12:05on va changer le monde ensemble,
12:07on va bouger les organisations,
12:09on va rendre les gens
12:10plus enthousiastes,
12:12on va travailler ensemble. »
12:13Une approche américaine, finalement.
12:14Je ne sais pas
12:14si c'est une approche
12:15samienne en tous les cas.
12:17Et franchement,
12:17c'est tellement enthousiasmant.
12:19Et quand vous discutez
12:20avec les équipes,
12:21avec les DNI,
12:23avec toutes les personnes
12:24qui travaillent sur ces projets-là,
12:26partout dans le monde,
12:26ils ont tous la banane,
12:28ils sont tous heureux
12:28de travailler sur ces yeux.
12:30Ils sont vraiment fiers
12:31et ils voient le résultat.
12:33On voit très vite le résultat.
12:35Et vous,
12:35la résistance au changement,
12:37vous la vivez comment au quotidien ?
12:39Ça vous épuise
12:40ou ça vous stimule ?
12:41Moi, je sais pourquoi
12:42je me lève le matin.
12:43Non, non,
12:44ça me donne de l'énergie.
12:45Si je n'avais pas ça,
12:46je ne sais pas ce que je ferais.
12:48Très franchement,
12:48c'est merveilleux
12:50de pouvoir contribuer
12:51avec les autres.
12:53Donc, c'est vraiment
12:54très collaboratif
12:55à un vrai projet,
12:57un projet positif.
12:58Un projet qui va être
13:00pour les générations comme vous,
13:02comme celle de mes enfants,
13:03les générations à venir,
13:05mais aussi pour la planète.
13:06Parce que nous lions
13:07l'objectif 5 des Nations Unies,
13:09qui est l'objectif d'égalité
13:10entre les femmes et les hommes,
13:12avec tous les autres objectifs
13:13du développement durable.
13:14Donc,
13:15l'eau pure,
13:16l'air pur,
13:17la lutte contre la pauvreté,
13:19mais aussi la paix.
13:20Donc,
13:21on a un objectif global
13:22aussi immense.
13:24C'est que l'égalité
13:26est le fondement même
13:27d'un monde de paix.
13:29Et vous,
13:30dans votre propre façon
13:32de manager,
13:32est-ce qu'il y a des valeurs
13:34qui vous guident
13:35particulièrement ?
13:36Oui.
13:37Alors,
13:37il y a les valeurs tout court,
13:38c'est-à-dire,
13:38il y a des valeurs,
13:40des vraies valeurs,
13:41qui sont de l'éthique,
13:45voilà.
13:45Et puis,
13:46il y a le courage.
13:47Je pense qu'il faut être courageux
13:48dans la vie.
13:48Il faut savoir dire non.
13:50Il faut savoir dire
13:50« je n'ai pas envie
13:51de travailler avec cette personne-là.
13:53Je vais constituer
13:54une équipe positive,
13:56etc. »
13:56Je pense que ça,
13:57c'est vraiment important
13:57d'avoir le courage
13:58d'aller jusqu'au bout
13:59de son truc,
14:00mais le courage aussi
14:01de renoncer
14:01et de dire
14:02« ça,
14:03ce n'est pas possible maintenant
14:04ou ce n'est pas une bonne idée,
14:05finalement. »
14:06Donc,
14:07ça,
14:07c'est vraiment le courage.
14:08Je pense que c'est important.
14:09Et puis,
14:10la collaboration,
14:11travailler vraiment dans l'écoute
14:12tout le temps
14:13avec les autres
14:14et se nourrir les uns les autres
14:16et de réfléchir ensemble
14:17et de prendre les décisions ensemble.
14:19Je pense que c'est vraiment important.
14:21Et comment est-ce que vous faites
14:22pour rester alignée
14:23même avec votre combat ?
14:24Parce qu'il y a une forme
14:25d'exemplarité
14:26qui est attendue de vous quelque part
14:27au regard de ce que vous portez
14:29comme cause au quotidien.
14:30C'est vrai.
14:31Comment est-ce que vous faites
14:31pour avoir l'assurance
14:33de rester parfaitement alignée
14:35toutes ces années ?
14:37Est-ce que,
14:37non,
14:37je veux dire,
14:37est-ce que vous avez
14:38déjà des mentors,
14:39des personnes
14:40sur qui vous reposez,
14:42si oui, qui ?
14:43Alors,
14:44oui.
14:44D'abord,
14:45moi,
14:45j'ai ma propre ligne de conduite
14:46et j'essaye vraiment de...
14:48Quand vous parlez
14:48d'exemplarité,
14:50j'ai été décorée
14:50de l'ordre du mérite,
14:51j'ai été décorée
14:52de l'ordre de la Légion d'honneur.
14:53De pression, quand même.
14:54Je trouve que le fait
14:56de représenter cela,
14:58ça nous oblige.
14:59Ça nous oblige.
15:00Vraiment.
15:01Bon,
15:01j'ai des enfants,
15:02ça oblige.
15:04Bon, voilà.
15:04Donc,
15:04je pense qu'on est obligé,
15:06après,
15:06je porte une cause,
15:08je pense que ça oblige aussi
15:09de respecter un minimum
15:10le cadre qu'on s'est fixé.
15:13Ça,
15:13je pense que c'est indispensable.
15:14Et après,
15:15vous avez raison,
15:16il y a tout votre environnement
15:17qui va faire que j'ai effectivement...
15:21Alors,
15:21ce n'est pas des mentors,
15:22c'est des amis,
15:23mais sur qui je peux vraiment compter.
15:25Et quand j'ai des doutes,
15:27je me dis,
15:28là,
15:28il y a un problème,
15:29je ne sais pas comment le résoudre.
15:30Est-ce que j'étais à la hauteur
15:31de la situation ?
15:32Comment je dois répondre ?
15:33Là,
15:33je peux les appeler
15:34et ils me disent,
15:35écoute,
15:35voilà,
15:35tu fais comme ça,
15:37ils me connaissent bien,
15:37ils savent comment me conseiller utilement.
15:42Et ça,
15:42c'est précieux.
15:43C'est vraiment précieux.
15:44J'ai beaucoup de chance.
15:45Et est-ce qu'il y a des figures
15:47qui vous ont inspirées
15:49ou vous inspirent aujourd'hui,
15:52même dans la cause,
15:54qui vous permettent aussi d'avancer ?
15:55Moi,
15:56il y a une figure,
15:56et j'ai vu qu'il y avait une série
15:57qui sortait sur Georges Sand.
15:59Oui.
15:59Moi,
15:59j'adore cette femme.
16:00Je la trouve extraordinaire.
16:03Après,
16:03il y a des tas de gens du quotidien.
16:05Et moi,
16:06j'aime bien parler
16:07d'être féministe au quotidien,
16:10d'être engagée au quotidien.
16:12Je pense que c'est le quotidien
16:13qui fait la différence.
16:13C'est quoi être féministe au quotidien ?
16:15C'est que tous les jours,
16:16on fait quelque chose
16:17pour essayer
16:18que le monde soit mieux
16:19et que l'égalité soit respectée.
16:21Alors,
16:21ça peut être des choses toutes bêtes,
16:23ne pas se laisser dire certaines choses
16:25ou ne pas soi-même dire certaines choses.
16:28Voilà,
16:28on avait fait une année...
16:29C'est très exigeant avec soi-même aussi.
16:31Mais oui,
16:32et puis on avait fait une année,
16:33je me rappelle,
16:33un travail sur le féminisme au quotidien.
16:36On se disait,
16:37on se retrouvait une fois par mois,
16:38tout en groupe,
16:39et on se disait
16:39est-ce que j'ai été une bonne féministe ce mois-ci ?
16:43Et c'était vraiment intéressant
16:44parce qu'on décortiquait nos comportements
16:46et c'est très éducatif de faire ça
16:48parce qu'on se rend compte
16:49que c'est difficile.
16:52Vous vous sentez investie
16:53d'une responsabilité de transmission
16:56à l'égard des jeunes femmes,
16:58des juristes,
16:59des managers de demain.
17:00Oui,
17:01je ne le sens pas,
17:02pas comme ça ex abrupto,
17:05mais je me sens investie
17:06quand on me...
17:07Et ça,
17:07ça arrive très,
17:08très,
17:08très souvent
17:08quand on me demande des conseils.
17:12Alors,
17:13par exemple,
17:14là,
17:14j'ai une auditrice
17:15que je suis en train de former,
17:17donc elle m'envoie
17:17tout son travail
17:19pour que...
17:19Eh bien,
17:20je me sens très responsable de cela
17:21et je le fais
17:22complètement bénévolement
17:23à un moment donné
17:24parce que c'est important
17:26de transmettre.
17:28Et donc,
17:28moi aussi,
17:29j'aime bien transmettre
17:30des messages positifs.
17:31J'ai des jeunes femmes,
17:32par exemple,
17:33que je connais
17:34qui me...
17:35Quand elles ont leur premier bébé
17:36ou le deuxième,
17:37mais après le deuxième,
17:37elles savent.
17:38Je leur dis,
17:39profites-en.
17:40Je te le dis en tant que féministe,
17:41c'est trop bête
17:43de sacrifier ça
17:44et donc,
17:45je les aide
17:45à passer le cap
17:47de cette culpabilité,
17:49finalement,
17:49que les jeunes femmes ont
17:51encore aujourd'hui,
17:52très fort,
17:53quand elles sont enceintes
17:55et qu'elles n'osent pas
17:57s'occuper suffisamment
17:58d'elles-mêmes.
17:58d'elles-mêmes.
17:59C'est un choix qui n'a rien à faire.
18:00Oui,
18:01ça reste encore un vrai sujet.
18:03Beaucoup de femmes
18:04doutent encore
18:05de leur légitimité
18:06à prendre des postes
18:07à responsabilité.
18:10Qu'est-ce que vous leur dites
18:11quand vous les formez
18:12ou que vous les accompagnez ?
18:14Moi,
18:14je leur dis
18:15de rester elles-mêmes,
18:16surtout,
18:17et je ne souhaite pas
18:19qu'elles tombent
18:19dans les travers de...
18:21Il faut se mettre
18:21dans le moule
18:22du système.
18:23Moi,
18:24je suis anti-système,
18:25quelque part,
18:25puisque je lutte
18:27depuis toutes ces années
18:28pour essayer
18:29de rééquilibrer les choses.
18:30Donc,
18:30je pense qu'il faut
18:31rester comme on est.
18:33On nous a inculqué
18:34des soft skills,
18:36comme on dit,
18:37de façon pudique,
18:38une typologie
18:39de comportement.
18:40Allons-y.
18:41Je pense que c'est comme ça
18:42qu'on pourra arriver
18:43à changer le monde.
18:45Parce que
18:45ce n'est pas en adoptant
18:46les comportements masculins,
18:48surtout aujourd'hui,
18:49qu'on va y arriver.
18:50Donc,
18:51il faut vraiment insister,
18:52rester soi-même
18:53et faire bouger les lignes,
18:55en restant soi-même.
18:58Vous êtes convaincue
18:59que l'inclusion
19:00ne se décrète pas,
19:01elle se construit.
19:02Tout à fait.
19:03Par quoi un manager
19:04ou une entreprise,
19:05puisque les managers
19:06sont ceux qui nous regardent,
19:08doit-il commencer
19:09pour agir concrètement ?
19:10Sur l'inclusion ?
19:12Oui.
19:12Je pense qu'il faut avoir
19:13cette prise de conscience
19:14que ce n'est pas juste
19:17pour faire du KPI
19:18ou que ce n'est pas juste
19:19parce que la direction
19:20l'a demandé.
19:21Il faut être convaincue
19:22que l'inclusion,
19:23c'est vraiment bien.
19:24Et pour ça...
19:25Mais ce n'est pas une posture.
19:26C'est vraiment une posture,
19:28mais intérieure,
19:29de valeur.
19:30Donc,
19:30il faut être convaincu
19:31de cela.
19:32Et à partir de là,
19:33on a tous les outils.
19:34Et d'ailleurs,
19:34quand on travaille
19:35sur le label Giz
19:37ou avec Arborus,
19:39on a toute la panoplie.
19:40Donc,
19:40on ne peut pas passer à côté.
19:42Mais je pense
19:43que c'est ce fameux déclic
19:44que chacun d'entre nous
19:45doit avoir.
19:46Et de se dire
19:47personne ne doit rester
19:49sur le bord du chemin.
19:50Personne.
19:50après,
19:52les gens incompétents,
19:53on a tout à fait le droit
19:54de ne pas travailler avec eux.
19:55Oui, c'est autre chose.
19:56C'est complètement différent.
19:57Mais quelqu'un,
19:59parce qu'il est
19:59d'une certaine couleur de peau
20:01ou d'un genre
20:03ou d'un âge
20:04ou d'une condition physique
20:06ou de santé différente
20:08de soi-même,
20:09ne doit pas être laissé
20:10sur le bord du chemin.
20:11Et je le disais
20:13en introduction,
20:13vous êtes pionnière
20:15sur le sujet
20:15depuis,
20:18donc ça fait 30 ans.
20:1930 ans maintenant.
20:20Oui, 30 ans.
20:22Qu'est-ce que vous retenez ?
20:23Vous êtes plutôt optimiste ?
20:26Oui.
20:26Moi, je reste
20:27complètement optimiste.
20:29Je pense qu'on traverse
20:30des crises,
20:31que les crises sont positives
20:32parce que c'est pendant
20:34les crises
20:34que l'on va trouver
20:36les moyens
20:37de les dépasser.
20:38Quand il y a eu le Covid,
20:40tout le monde était
20:40avaché dans son canapé
20:42complètement désespéré,
20:44nous, qu'est-ce qu'on a fait ?
20:45On s'est dit
20:46on va continuer les réunions.
20:48On n'a jamais été aussi soudés
20:50que pendant le Covid
20:51et on a créé
20:52la première charte internationale
20:54pour une IA inclusive
20:54où nous avons plus de 150 signataires
20:57et on a été déclaré
20:59par le gouvernement français
21:00livrable au moment du sommet
21:02de l'IA de Paris
21:03au mois de février.
21:05Et on a rajouté une pierre
21:06à notre édifice GIZ
21:08de notre label
21:09en rajoutant
21:10de l'intelligence artificielle
21:11inclusive.
21:12Donc, il faut...
21:13Là, Trump nous met à mal.
21:16C'est maintenant
21:16qu'il faut démontrer...
21:17C'est peut-être plus
21:17une source d'opportunité, en fait.
21:19Oui, c'est maintenant
21:20qu'il faut qu'on démontre
21:21qu'il a tort
21:21et que nous, on a raison.
21:24Donc, c'est une source
21:25de progrès pour moi.
21:26Ça devrait consolider
21:27nos bases
21:29qui sont déjà,
21:30je pense,
21:31juridiquement,
21:32en tous les cas,
21:32assez solides.
21:33Quel est le prochain chantier
21:36qui vous mobilise ?
21:38Sur quoi est-ce que
21:38vous travaillez en ce moment ?
21:39Alors, on travaille
21:40sur une application
21:41qui s'appelle
21:41Respect Me,
21:42qu'on va lancer
21:43au mois de novembre,
21:44qui est sur le respect.
21:45Donc, toujours
21:46dans notre lignée positive,
21:49on n'est pas là
21:49pour accuser
21:50ni pour juger.
21:51Mais quand on vous parle mal
21:52ou quand on vous fait
21:53une réflexion
21:54qui vous dérange,
21:55alors que ce soit
21:56au travail,
21:57à l'école,
21:58à la maison,
22:00etc.,
22:00c'est la façon
22:01de riposter
22:02pour remettre l'autre
22:02à sa place gentiment,
22:04poliment,
22:04mais pour lui montrer
22:05qu'il y a des limites
22:06à ne pas dépasser,
22:07que ce soit sur le sexisme,
22:10l'homophobie,
22:11les comportements déplacés,
22:13etc.
22:13Donc, on est très vigilant.
22:16Mais comment est-ce
22:16que ça va fonctionner exactement ?
22:18Déjà, vous pouvez le télécharger.
22:20Ça s'appelle Respect Me,
22:21vous pouvez le tester,
22:23vous pouvez rajouter des répliques.
22:24Donc, l'idée,
22:25c'est de créer
22:25une culture commune
22:27de la réplique.
22:27C'est-à-dire que les utilisateurs
22:28nourrissent l'application
22:29avec des situations concrètes.
22:31Exactement.
22:32Et donc, l'idée,
22:33c'est de nourrir.
22:34Et c'est que dans le monde
22:34de l'entreprise ?
22:35Non.
22:35Vous avez plein de petits visuels,
22:38donc vous pouvez aller
22:38des petites rubriques.
22:39Vous avez l'entreprise,
22:40vous avez la maison,
22:41vous avez les copains,
22:43vous avez la rue.
22:45Donc, il y a plein d'univers
22:46qui sont proposés.
22:48Et selon les univers
22:49et les âges
22:50des personnes
22:51qui vont l'utiliser,
22:53c'est des répliques.
22:54Moi, on m'a dit ça,
22:55voilà comment j'ai répliqué.
22:56Et ça peut être quoi
22:57dans le monde
22:57de l'entreprise, par exemple ?
22:59Dans le monde de l'entreprise,
23:00ça peut être un manager
23:02qui dit
23:03« Oh là là,
23:04très sexy aujourd'hui,
23:05quel joli petit blouson,
23:06courage ! »
23:07Et bon,
23:10selon le ton
23:11et selon comment c'est dit,
23:12ça peut être…
23:13Le problème aussi,
23:15c'est que parfois,
23:16si c'est un supérieur hiérarchique
23:17ou si c'est un prof,
23:18imaginons que ce soit un prof
23:19qui fasse une réflexion déplacée
23:21ou un manager
23:23qui est plus gradé que vous,
23:25comment vous faites ?
23:26À ce moment-là,
23:27on a mis aussi
23:27des petites alertes
23:28avec des trucs rigolos,
23:29des sirènes de pompiers,
23:31des sifflets de police.
23:32Donc, il y a ce petit côté
23:34où dans le métro,
23:35vous voyez une scène
23:36un peu qui vous dérange.
23:38Vous pouvez faire un bruit
23:40pour que, par exemple,
23:41si vous voyez un type
23:42qui essaye de se faufiler,
23:44hop,
23:44vous faites une petite alerte,
23:45personne ne sait
23:46que ça vient de vous,
23:47mais ça met fin à la situation
23:48et ça évite peut-être
23:50de passer à une étape…
23:52Et qu'est-ce qu'ils pensent,
23:52les réponses ?
23:53C'est nous,
23:54c'est nous tous,
23:55donc c'est vous,
23:56c'est moi,
23:56c'est les gens
23:56qui utilisent des applications.
23:58Donc, aujourd'hui,
23:59c'est notre petit collectif
24:01qui a créé cette application,
24:03mais à l'avenir,
24:04après le lancement,
24:05on espère en avoir beaucoup
24:06des répostes.
24:08Si vous deviez adresser un message
24:12à une manager compétente,
24:16expérimentée,
24:17mais peu reconnue,
24:19que le diriez-vous ?
24:20Vas-y, fonce.
24:23Et je suis là pour toi
24:24si tu veux.
24:26Merci beaucoup.
24:27Merci, Christina.
24:28Merci beaucoup.
24:29C'est un échange éclairant
24:30et pour votre engagement
24:32de longue date.
24:33Christina Longhi,
24:34présidente, fondatrice
24:36d'Arborus.
24:36Quant à moi,
24:38je vous dis à la semaine prochaine
24:39pour un nouvel épisode
24:40de Manager l'Odyssée.
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