- 13/05/2025
Le 8 novembre 2000, le Japon est en ébullition. Contre toute attente, après trente ans de cavale internationale, celle que l'on surnommait "La Reine rouge" dans les camps palestiniens de la vallée de la Békaa libanaise était arrêtée à Osaka, rentrée illégalement quelques mois plus tôt. Son nom : Fusako Shigenobu, leader du Nihon Sekigun (Armée rouge japonaise – ARJ), la plus meurtrière et la plus mystérieuse organisation du terrorisme international des années de poudre.
Comment expliquer qu'un groupe d'anciens étudiants japonais se soit lancé dans le terrorisme à l'aube des années 70 ?
Pour le comprendre, il faut remonter trente ans en arrière ; se replonger dans l'année 1968, l'année du printemps de Prague, de la guerre du Vietnam, du quartier latin de Paris et des factions d'extrême gauche. En 1968, le mouvement étudiant embrasait les universités du Japon...
Comment expliquer qu'un groupe d'anciens étudiants japonais se soit lancé dans le terrorisme à l'aube des années 70 ?
Pour le comprendre, il faut remonter trente ans en arrière ; se replonger dans l'année 1968, l'année du printemps de Prague, de la guerre du Vietnam, du quartier latin de Paris et des factions d'extrême gauche. En 1968, le mouvement étudiant embrasait les universités du Japon...
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00:00Le 8 novembre 2000, le Japon est en ébullition.
00:15Entre toute attente, après 30 ans de cavale internationale,
00:19celle que l'on surnommait la Reine Rouge dans les camps palestiniens de la vallée de la Bekaa libanaise,
00:23était arrêtée à Osaka.
00:24Son nom, Fusako Shigenobu, leader de l'armée rouge japonaise,
00:31la plus meurtrière et la plus mystérieuse organisation du terrorisme international des années de poudre.
00:39Comment expliquer qu'un groupe d'anciens étudiants japonais se soit lancé dans le terrorisme à l'aube des années 70 ?
00:47Pour le comprendre, il faut remonter 30 ans en arrière, se replonger dans l'année 1968,
00:52l'année du printemps de Prague, de la guerre du Vietnam, du quartier latin de Paris et des factions d'extrême-gauche.
01:01En 1968, le mouvement étudiant embrasait également les universités du Japon.
01:05«Au le joli mois de mai à Paris »
01:15«Au le joli mois de mai à Paris »
01:20«Au le joli mois de mai à Paris »
01:30«Au le joli mois de mai à Paris »
01:35«Au le joli mois de mai à Paris »
01:45«Au le joli mois de mai à Paris »
01:55«Au le joli mois de mai à Paris »
01:58«Au le joli mois de mai à Paris »
02:04«Au le joli mois de mai à Paris »
02:17« à l'époque presque toutes les universités au Japon suivaient le mouvement »
02:21« je crois qu'en France la situation était la même »
02:23Nous l'avons appelé la grève des barricades.
02:29Les étudiants occupaient l'université.
02:32Ils bâtissaient une forteresse autour avec des bureaux et des chaises attachées avec du fil de fer.
02:39Cela a duré assez longtemps.
02:53A cette époque, le Vietnam, l'Asie du Sud-Est, le Proche-Orient ou même le Chili,
03:07mais ça c'était après que le président Allende eut trouvé la mort dans le coup d'État.
03:13Bref, à l'époque, beaucoup plus qu'actuellement, c'était le monde entier qui était agité de convulsions.
03:20D'autre part, c'était l'époque de la guerre du Vietnam.
03:23On ne soutenait pas entièrement le régime communiste de ce pays.
03:28Mais les Américains, sous la bannière de la lutte anticommuniste,
03:32lâchaient des bombes, des défoliants sur des civils vietnamiens innocents.
03:36Et il y avait le traité de sécurité nipo-américain,
03:56au terme duquel le Japon se chargeait, sur toutes les bases,
04:00de tout ce qui était transport de l'alimentation à envoyer au Vietnam,
04:02de la réparation des armes, des herbicides défoliants et des bonbons à palme.
04:11L'AMPO, le traité de sécurité nipo-américain ratifié en 1960 et renouvelable en 1970,
04:19obligeait le Japon, en échange de parapluies nucléaires,
04:21à fournir aux États-Unis les équipements, la logistique
04:24et les bases militaires dans le contexte de la guerre du Vietnam.
04:40Le 19 janvier 1968,
04:43tous les enkiotos, les syndicats étudiants d'extrême gauche,
04:46envoient leurs troupes sur le port de Sasebo
04:47pour protester contre l'AMPO
04:49et l'arrivée du porte-avions américain Enterprise,
04:52venu se ravitailler au Japon avant de reprendre le chemin de Saïgo.
04:55C'est dans cette atmosphère
05:08que les étudiants recevaient une éducation
05:11et étaient formés en sorte de devenir un rouage des entreprises.
05:17On ne voyait pas où on allait.
05:20C'est-à-dire que ce n'étaient pas des universités
05:22où l'on apprenait à penser avec sa tête, à porter des jugements,
05:27mais des universités où l'on apprenait aux étudiants
05:30à remplir parfaitement leur rôle de rouage
05:32au sein des entreprises auxquelles ils étaient destinés,
05:36ce qui procurait une sensation de blocage, de désespoir en somme.
05:42Donc il y avait pas mal d'étudiants pour se dire
05:43que si on faisait s'implanter le socialisme au Japon,
05:46on pourrait avoir une société qui, de toute manière au pire,
05:49vaudrait toujours mieux que ce capitalisme-là.
05:51telle est l'illusion qu'ils devaient porter en eux.
05:54Et moi, d'ailleurs, c'était l'illusion que je nourrissais sans doute à l'époque.
06:00L'université de Tokyo, plus connue au Japon sous le nom de Todai,
06:04est la plus prestigieuse du pays.
06:07C'est ici, aujourd'hui comme hier,
06:10que se fabriquent les futurs maîtres de la société moderne.
06:15Todai, symbole d'une technocratie arrogante
06:17et coupée des réalités sociales,
06:19se pose d'entrée comme le centre de la contestation étudiante.
06:28Kyoshi Imai, un étudiant en médecine,
06:31devient l'un des principaux leaders de l'université.
06:33L'université de Todai, ainsi que vous le savez,
06:39est une institution créée à l'ère Meiji
06:41pour former les fonctionnaires japonais,
06:43un peu l'équivalent de l'ENA en France.
06:48J'étais pour ma part étudiant en médecine à Todai.
06:51En juillet 68, on a organisé une assemblée de luttes communes
06:53de toutes les écoles.
06:54Il n'y avait pas de hiérarchie dans les postes de responsabilité,
07:02mais j'en étais un des principaux dirigeants.
07:06L'appellation « Université de Tokyo » remonte à 1949.
07:12Car avant cela, on l'appelait « l'Université impériale de Tokyo ».
07:16Elle avait été créée sous la restauration de Meiji,
07:22comme un organe clé pour réaliser le programme du régime
07:26qui était « Prospérité nationale et puissance militaire »,
07:30c'est-à-dire le renforcement économique et militaire du Japon.
07:34Ensuite, après la Deuxième Guerre mondiale,
07:37elle se mua en une forteresse de temps de paix,
07:40une forteresse pour livrer la guerre économique.
07:43Il faut donc faire remarquer que son rôle n'a guère changé
07:45puisqu'il est passé de forteresse de temps de guerre
07:47à celui de forteresse de temps de paix.
07:55Je faisais partie du personnel de l'Université de Tadai.
07:59Même si je n'étais qu'assistant,
08:02j'étais destiné à demeurer toujours dans l'université.
08:09J'étais très jeune.
08:12C'est moi, là.
08:13Satoru Saishu est l'un des rares enseignants de Tadai
08:17à s'être rangé du côté des étudiants
08:19et à avoir fait sienne leurs revendications.
08:24J'ai occupé avec 75 étudiants
08:26le bâtiment de la Faculté des Arts Libéraux.
08:31Je me suis retrouvé avec eux derrière les barricades.
08:34Ma présence était donc pour le moins singulière.
08:43Elle était étudiante en première année.
08:46Elle est devenue médecin et s'est présentée aux élections
08:47pour être députée.
08:48C'est à cette époque que j'ai entendu le professeur Saishu
08:54exprimer des opinions personnelles.
08:57Pour la première fois, les cours s'étaient arrêtés.
08:59Beaucoup de discussions se sont tenues dans les classes
09:08et il est venu dans la nôtre.
09:12Puis nous avons parlé ensemble
09:13à l'extérieur de la classe, dans la cour.
09:20Nous avons parlé pour la première fois
09:22de choses qui ne concernaient pas le cours.
09:24Jusque-là, ils ne m'avaient enseigné que la dissection.
09:31Parallèlement à Todai,
09:32le centre idéologique et politique du mouvement étudiant,
09:35la protestation enfle à Nichidai,
09:38la plus grande et la plus peuplée
09:39des universités privées du Japon.
09:50Suite à un scandale financier
09:51qui révèle la corruption de ses dirigeants,
09:53les étudiants de Nichidai se mettent en grève
09:55et investissent les locaux de l'université.
10:08Akehiro Akita, dit Akita Meidai,
10:12l'étudiant en troisième année de sociologie
10:13qui a mis à jour le scandale
10:14est propulsé le 30 septembre 1968
10:17à la tête du Zenkyoto de Nichidai.
10:19Le rôle de Nichidai est de former
10:26les travailleurs du secteur tertiaire
10:28et d'alimenter ainsi la société en classe moyenne.
10:38Nichidai est une université mammouth immense.
10:41Il y avait environ 100 000 étudiants à l'époque.
10:44Dans cette époque de forte croissance,
10:49la proportion de jeunes montant
10:50jusqu'à l'enseignement supérieur
10:51progressait fortement.
10:53Beaucoup voulaient entrer dans les universités.
10:56Nichidai fut l'une des universités privées
10:58les moins performantes.
10:59Ce n'est pas très gentil de dire cela,
11:01mais enfin c'est ainsi.
11:02Elle rassembla le plus grand nombre d'étudiants.
11:03A Nichidai, le droit de réunion
11:09et la liberté de parole
11:10étaient pratiquement inexistants.
11:13Et il y avait une affaire
11:14de 2 milliards de yens
11:15de dépenses non justifiées
11:16attribuées aux responsables de l'université.
11:19Les étudiants ont commencé
11:20à nourrir une sorte de méfiance
11:22vis-à-vis des autorités.
11:23Je pense que c'est cela
11:24qui a mis le feu aux poudres
11:25et qui m'a décidé à m'engager.
11:28Akita-san, c'était vraiment
11:29un étudiant de type conservateur,
11:31mais il n'a pas supporté
11:32l'étalage de ces malversations.
11:34Il avait un sens
11:35des responsabilités très poussé.
11:37Il se dépensait pour cette affaire
11:38sans ménager sa peine.
11:40Il a été bombardé sur un piédestal
11:42parce qu'il paraissait le plus sérieux
11:43pour être président du Zen Kyoto
11:44de l'université de Nichidai.
11:46Il a été bombardé sur le plan de l'université de Nichidai.
11:48J'ai été bombardé sur le plan de l'université de Nichidai.
11:51J'ai été bombardé sur le plan de l'université de Nichidai.
11:54J'ai été bombardé sur le plan de l'université de Nichidai.
11:56J'ai été bombardé sur le plan de l'université de Nichidai.
11:59J'ai été bombardé sur le plan de l'université de Nichidai.
12:29J'ai été bombardé sur le plan de l'université de Nichidai.
12:38En fait, à l'époque, il était extrêmement populaire.
12:42Et pourquoi était-il si populaire ?
12:44Tout simplement parce qu'il représentait
12:45le type de l'étudiant buveur
12:46qui se payait des cuites de force 8
12:48dans les troquets bon marché.
12:50Rien à voir donc avec ces élites du Zen Kyoto
12:52de l'université Todai.
12:57Akita Meidai
12:58Le leader de Nichidai
13:00n'est qu'un modeste étudiant de Hiroshima
13:02monté à Tokyo pour faire ses études.
13:06À la différence de Kyoshi Imai
13:08qui incarne les élites ultra-politisées
13:10de l'université de Todai,
13:12Akita inscrit sa révolte
13:13en dehors de tout discours politique ou théorique.
13:16Akita était radicale, non sectaire.
13:29À l'université Nichidai,
13:31dans les sectes d'obédience politique,
13:33les étudiants marxistes du Chukaku
13:34détenaient un ascendant considérable.
13:37Mais le nouveau mouvement qui apparu fut
13:39les radicaux hors sectes d'Akita
13:43et ses compagnons.
13:46À cause du coup de colère
13:46d'un homme simple et honnête.
13:50Le mouvement du Zen Kyoto
13:51cessait avec lui d'être réservé
13:52aux étudiants les plus brillants
13:54dès lors qu'il avait imposé l'image
13:55que c'était la lutte de tous.
13:57Tout découlait de lui
13:58et c'est ce qu'il rendait important.
13:59Personnellement, j'aime assez
14:00son type de personnage.
14:01Akita était hors secte,
14:12c'est-à-dire non affilié
14:13aux différentes factions d'extrême-gauche
14:15identifiées chacune par leur casque.
14:21Casque blanc pour les marxistes-léninistes,
14:23rouge pour les maoïstes
14:24ou jaune pour les trotskistes révolutionnaires.
14:28Les factions étudiantes ont évolué
14:30en marge du Parti communiste
14:31la plus puissante force politique
14:33d'après-guerre
14:34dont elle dénonce le stalinisme.
14:37Une contagion de la critique
14:38qui s'étend aux structures étudiantes
14:40elles-mêmes.
14:41Dès la fin de l'année 1968,
14:44les composantes du mouvement étudiant
14:45se subdivisent encore
14:46et créent de nouveaux groupuscules
14:48qui s'opposent entre eux
14:49et s'illustrent dans de violents combats de rue.
15:00Pourtant, lorsqu'il s'agit une nouvelle fois
15:09de protester contre la collaboration
15:11du Japon à la guerre du Vietnam,
15:13les Enkioto, en dépit de divergences internes,
15:16se rassemblent à l'occasion
15:17de la plus grande manifestation
15:18du mouvement étudiant.
15:21Dans la nuit du 21 octobre 1968,
15:24les étudiants prennent d'assaut
15:25la gare de Shinjuku
15:26en plein cœur de Tokyo.
15:51Il s'agissait, si je me souviens bien,
15:53de bloquer les voies
15:55de la gare de Shinjuku.
16:01C'est-à-dire d'arrêter
16:02les convois de carburant
16:04qui passaient par là
16:05pour ravitailler les avions
16:06de l'armée américaine.
16:10C'était lors d'une journée internationale
16:12contre la guerre.
16:17Un mouvement de protestation
16:18contre la guerre au Vietnam
16:19assorti d'une rébellion d'étudiants.
16:25Beaucoup de lignes ferroviaires
16:29allant aux bases militaires américaines
16:30passaient par Shinjuku.
16:32Les wagons citernes
16:33qui transportaient le combustible
16:34pour les bonbons à palme
16:35passaient par là.
16:37Donc l'idée était
16:38qu'en faisant fermer
16:39la gare de Shinjuku,
16:41on allait pouvoir empêcher
16:41ces transports de guerre
16:42vers le Vietnam.
16:43J'étais à Shinjuku, oui.
16:49J'étais poursuivie
16:50par les forces de l'ordre
16:51et je courais dans tous les sens
16:53pour leur échapper.
16:54C'était amusant.
16:55J'avais 19 ans.
16:56J'avais 19 ans.
16:58La guerre du Vietnam
17:25a réveillé pour les étudiants
17:26du baby boom
17:27le souvenir enfoui
17:28d'une autre guerre.
17:30Une guerre d'invasion
17:30menée avec brutalité
17:31en Chine et en Corée
17:32par un Japon nationaliste
17:34allié au fascisme européen.
17:37Durant tout le mouvement
17:37des Enkyoto,
17:39les étudiants pointeront
17:40un doigt accusateur
17:40sur la génération des parents.
17:43Aujourd'hui encore,
17:45Yasukazu Amano
17:46comme aux premières heures
17:47du mouvement étudiant
17:47poursuit sans relâche
17:49son combat
17:49contre le régime impérial japonais.
17:50C'est par le truchement
17:56du mouvement
17:56contre la guerre du Vietnam
17:58que pour la première fois
17:59le problème de notre passé
18:01est apparu au grand jour.
18:04Jusque-là,
18:05la responsabilité du Japon
18:06en tant que pays fasciste
18:07durant la guerre,
18:08l'invasion de la Chine,
18:10la politique coloniale
18:11du Japon,
18:12personne ne parlait
18:13de ce que nous avions fait
18:14sur tous ces points.
18:15Nous n'avions en somme
18:18que les souvenirs
18:19des bombes atomiques,
18:20des dommages immenses
18:21qui nous avaient été infligés,
18:23des vies précieuses perdues.
18:25Bref,
18:25on ne diffusait
18:26que des souvenirs historiques.
18:28Mais rien de ce que
18:29nos propres parents
18:30ou l'État japonais
18:31avaient réellement perpétré,
18:32c'est-à-dire qu'on ne s'était
18:33jamais donné la peine
18:34de réfléchir sérieusement
18:35sur une responsabilité
18:36découlant d'une position
18:37d'agresseur.
18:41Les Américains
18:42et les Allemands,
18:43les Américains par exemple,
18:44ont fait des films
18:45qui traitent de la guerre
18:46du Vietnam,
18:47comme Dear Hunter
18:47ou Apocalypse Now,
18:49ont des espèces de musées
18:52d'histoire naturelle
18:53des guerres.
18:55En gardant des traces
18:56de leur passé,
18:57de la guerre du Vietnam,
18:59ses bons
18:59et ses mauvais côtés,
19:01ils ont produit des documents
19:02qui permettent
19:03de penser leur avenir.
19:05Or les Japonais,
19:07pour tout ce qui est
19:08de la Deuxième Guerre mondiale,
19:10ce qu'ils ont fait en Chine,
19:12les traitements inhumains
19:13qu'ils ont fait subir
19:13aux prisonniers,
19:14les Japonais donc,
19:16ont un esprit national
19:17qui les pousse
19:18à vouloir oublier tout cela.
19:22Au Japon,
19:24après la guerre,
19:25des gens ont été
19:26décrétés criminels
19:27de classe A,
19:28mais il y en a quand même
19:29eu un qui est devenu
19:30premier ministre.
19:32Seuls quelques-uns
19:33ont été pendus
19:34après le procès de Tokyo.
19:36Le tribunal,
19:36à ce moment-là,
19:37a évidemment fait son travail.
19:39Mais en ce qui concerne
19:40tous les autres agresseurs,
19:42ils n'ont pas été inquiétés.
19:43L'empereur est un bon exemple
19:45de cet état de fait.
19:46Il va sans dire
19:47qu'il représentait
19:48l'autorité suprême.
19:49C'est lui qui détenait
19:50le plus de pouvoir.
19:52Il était Dieu.
19:53C'était le responsable
19:54de la guerre d'agression.
19:55Il n'a même pas été
19:56appelé à témoigner.
19:58On ne lui a rien demandé.
20:01Seuls quelques hauts
20:02gradés parmi les militaires
20:03ont servi de bouc émissaire.
20:04Tous les autres
20:05ont coulé des jours tranquilles.
20:06Et sur le fait
20:07qu'il se soit ainsi
20:07tiré d'affaires,
20:08personne alors n'avait conscience
20:09que ce fut là
20:10un escamotage
20:11éhonté de l'histoire.
20:13Je pense même
20:14qu'il n'y eut
20:14aucune critique à l'époque.
20:16Ce n'est qu'à la fin
20:17des années 60
20:17qu'on a mis pour la première fois
20:19le doigt sur le problème
20:20par une série d'actions diverses.
20:22On ne peut pas accepter cela,
20:23que l'état d'après-guerre
20:24n'est pas rompu
20:25avec celui d'avant-guerre.
20:31Pour les étudiants,
20:33la génération des parents
20:34qui, aux commandes
20:34de la société japonaise,
20:35ses compromises
20:36dans le fascisme
20:37de la Seconde Guerre mondiale
20:38est parfaitement symbolisée
20:40par cette forteresse du pouvoir
20:41que représente Todai
20:42avec en son centre
20:43la tour de l'amphithéâtre Yasuda.
20:47Assimilant le nationalisme
20:48du passé
20:49à la bureaucratie arrogante
20:50des élites nippones,
20:52les enkyotos
20:52de toutes les universités
20:53du Japon
20:53se donnent rendez-vous
20:55le 16 janvier 1969
20:56à Todai
20:57avec la volonté
20:58d'en découdre.
21:03Les autorités
21:04de l'université
21:05promettent
21:05de réformer
21:06cette situation
21:07dans laquelle
21:08ni les étudiants
21:09ni les assistants
21:10ne possédaient aucun droit.
21:14Mais au point
21:15où en étaient les choses,
21:16même si de quelconques réformes
21:17étaient mises en place
21:18pour démocratiser
21:19l'université de Todai,
21:20il n'était plus question
21:21de déposer les armes
21:22et de renoncer à la lutte.
21:25En dernier ressort,
21:26on s'est retranché
21:27dans l'amphithéâtre Yasuda.
21:28Mais il ne suffit pas
21:29de se retrancher.
21:30On ne pouvait pas
21:30le quitter en vainqueur.
21:31On le savait fort bien.
21:32Dans la tour de l'amphithéâtre
21:38Yasuda de Todai
21:39se sont enfermées
21:40les factions
21:41les plus radicales
21:42des enkyotos.
21:43Elles sont menées
21:44par Kiyoshi Imai.
21:48Conformément
21:48à la culture japonaise
21:49qui privilégie
21:50l'esthétique de la défaite,
21:52le suicide rituel
21:53à la victoire elle-même,
21:54l'occupation
21:55de l'amphithéâtre Yasuda
21:56est un échec programmé.
21:57Pendant trois jours,
22:09les étudiants parviennent
22:10à repousser les assauts
22:10du Kido Tai,
22:12les CRS japonais.
22:14Après avoir reproduit
22:15le schéma séculaire
22:16des châteaux assiégés
22:17de l'époque des samouraïs,
22:18les étudiants rendent les armes.
22:21La tour finit par tomber
22:22et le Kido Tai
22:23fait évacuer l'amphithéâtre.
22:24768 étudiants
22:30sont arrêtés.
22:31On compte
22:31170 blessés
22:33dans les rangs de la police,
22:3447 dans le camp étudiant.
22:37Yasuda Kodo Jiken,
22:39l'affaire de l'amphithéâtre Yasuda,
22:40marque la fin
22:41du mouvement étudiant.
22:44Les arrestations
22:44des dirigeants
22:45de tous les enkyotos du Japon
22:46se multiplient.
22:54La tour de Yasuda
22:56était devenue
22:59la structure
23:00symbolisant le fait
23:01que les jeunes
23:01ne se sentaient plus
23:02concernés
23:03par cette université.
23:06Mais sur le point
23:06de l'action violente,
23:07cela ne représentait
23:08pas grand-chose,
23:09c'en était même misérable.
23:13Ce que les étudiants
23:14utilisaient,
23:15c'était les pierres,
23:16les jets de pierre,
23:17c'est-à-dire
23:17qu'ils cassaient
23:18les revêtements
23:18de la chaussée
23:19pour en faire des projectiles,
23:21et puis aussi
23:21les cocktails Molotov.
23:22Tout ce qu'ils pouvaient faire,
23:25c'était de clamer
23:26un grand non,
23:27et qu'ils ne les faisaient
23:28pas avancer d'un pouce
23:29dans une quelconque direction,
23:31faute de plan d'action.
23:33Ils n'avaient pas établi
23:34de programme précis
23:35pour mettre en œuvre
23:36des réformes.
23:37Cela a donc abouti
23:38à s'opposer à tout
23:39et à n'importe quoi,
23:43qui était sans doute
23:43un peu immature
23:44de notre part.
23:47Je pense toujours
23:48qu'être allé jusqu'à ce point
23:49de non-retour
23:50n'était pas une erreur.
23:51Et si erreur il y eut,
23:52ce ne fut pas
23:53d'être monté en ligne
23:53avec le sentiment
23:54d'être les seuls
23:55à constituer une élite
23:56capable d'agir
23:57selon une idéologie
23:58et guidée
23:58par un sentiment
23:59de justice,
24:00mais plutôt
24:01de croire
24:01qu'il fallait combattre
24:02seulement en un petit
24:03nombre d'élus
24:03imbus de leur appartenance
24:05à une élite.
24:06Nous versions ainsi,
24:07sans nul doute,
24:08en plein dans une perspective
24:09militariste de l'action.
24:12Il s'en suivit
24:12que bien des gens
24:13prirent leur distance,
24:14imités par les camarades
24:16étudiants
24:16qui s'éloignèrent de nous.
24:17En définitive,
24:19nous perdîmes le soutien
24:20d'un grand nombre
24:20de citoyens.
24:22Là réside à notre erreur.
24:22Avec la fin de l'occupation
24:49de l'amphithéâtre Yasuda,
24:50la carrière d'Akita Meidai
24:52comme leader
24:53du mouvement étudiant
24:54s'achève brusquement.
24:59Je fus arrêté
25:00en février 1969.
25:02Les chefs d'accusation
25:03étaient rébellions
25:03contre fonctionnaires publics
25:05dans l'exercice
25:05de ces fonctions
25:06et contraventions
25:07au règlement
25:07de la sécurité urbaine.
25:08Le pénitencier,
25:37c'était la maison
25:37de détention
25:38de Tokyo.
25:40Je pense y être resté
25:41près de dix mois
25:41dans une cellule.
25:47Je n'ai pas
25:48de souvenirs particuliers.
25:50Non,
25:51il n'y en a pas.
25:51J'ai été relaxé
26:01à la fin 1969.
26:03Je me mis
26:04à fréquenter
26:04assidûment
26:05une petite rue
26:06où il y avait
26:06des troquets
26:07pas plus grands
26:08qu'une boîte
26:08d'allumettes.
26:10C'était dans ce quartier
26:11qu'on appelle aujourd'hui
26:12le Golden Guy.
26:15Mais à l'époque,
26:15il s'appelait encore
26:16le quartier Anazo.
26:17Je m'éloignais
26:22donc de plus en plus
26:23de tout ce qui
26:23s'apparentait
26:24de près
26:25ou de loin
26:25à des mouvements
26:26étudiants.
26:30Les mouvements
26:31étudiants
26:32étaient terminés
26:32et moi,
26:34je commençais
26:34un nouveau combat
26:35pour les résidents
26:35étrangers au Japon
26:36afin de leur permettre
26:38d'obtenir
26:38un permis de séjour.
26:41Nous,
26:41japonais,
26:42nous ne pouvons
26:43nier être habitées
26:44par un racisme
26:45qui vient de loin
26:46à l'égard des Coréens
26:47et des Chinois.
26:48Par exemple,
26:49tout récemment,
26:50Ishiara Shintaro,
26:51le maire de Tokyo,
26:52a utilisé l'expression
26:54« gens du tiers-monde »
26:55pour les désigner.
26:57Alors que ces Coréens
26:58et ces Chinois
26:58avaient été recrutés
26:59de force par le Japon
27:00pendant la guerre
27:01et astreints
27:02à un travail d'esclave.
27:03Il existe donc
27:04chez nous
27:04une pratique discriminatoire
27:05que je me suis employée
27:06à changer.
27:09Lorsqu'il y a eu
27:10la répression policière,
27:12supposons par exemple
27:13que 100 étudiants
27:13prennent part à un mouvement.
27:14Il y en a bien 90
27:16qui sont dépassés
27:17et faiblissent
27:18ou bien qui se retrouvent
27:19moralement démolis
27:20ou bien qui fuient,
27:21qui renoncent
27:21à ce genre d'action
27:22et font en sorte
27:23de se remettre
27:24dans le droit chemin.
27:25Bref,
27:25ils s'éloignent.
27:27Restent les 10 autres
27:28qui se mettent tout de même
27:29à se demander,
27:30puisqu'ils ont pris
27:31une dégelée
27:31à l'auditoire Yasuda,
27:33ce qu'il faudrait faire
27:33pour gagner.
27:35Au milieu du marasme
27:37de cette défaite,
27:38on se demanda
27:38ce qu'il faudrait faire
27:39pour gagner
27:40la prochaine bataille.
27:40C'est dans ce contexte,
27:42dans le but d'une purification
27:43et afin de remporter
27:45la victoire
27:45par les armes,
27:46que n'a quitt
27:46le Sekigun,
27:47ou plutôt
27:47le Rengo Sekigun.
27:49Si j'avais beaucoup
27:50d'amis dans le Sekigun,
27:51j'ai tout de même
27:51coupé les ponts avec eux.
27:52En 1970,
27:59l'AMPO,
28:00le traité de sécurité
28:01nipo-américain
28:01contre lequel
28:02les étudiants
28:03s'étaient révoltés,
28:04est finalement prorogé.
28:07Dans l'année
28:08qui suit cet échec,
28:09naît le Sekigun.
28:11Pour la première fois,
28:13une faction issue
28:14du mouvement étudiant
28:15prône ouvertement
28:15la lutte armée
28:16et entre en clandestinité.
28:17La radicalisation
28:22d'anciennes factions
28:23du mouvement étudiant
28:24fait écho au thème
28:25développé par la
28:26contre-culture de l'époque.
28:32Traditionnellement,
28:32à l'extrême gauche,
28:33elle fait l'éloge
28:34de la violence
28:34à travers la bande dessinée,
28:36le cinéma ou le théâtre
28:37et s'emploie à dynamiter
28:38les fondements
28:39de la société japonaise.
28:47Des cinéastes indépendants
28:50se sont mis à concevoir
28:51des films extrêmes,
28:53mélanges de pornographie
28:54et d'ultra-violence
28:55conçus comme des cocktails
28:56molotov culturels.
28:58Leurs films,
28:59connus au Japon
28:59sous le nom de films pink,
29:01des objets cinématographiques
29:02inclassables,
29:03oniriques et dérangeants,
29:05s'inscrivent dans la lignée
29:06d'un Pasolini en Italie
29:07ou d'un Fassbinder en Allemagne.
29:14Attirés par le terrorisme,
29:16l'un de leurs thèmes favoris,
29:17des cinéastes pinks
29:19tels que Koji Wakamatsu
29:20ou Masawa Dachi,
29:22tous deux disciples
29:23du réalisateur Nagisa Oshima,
29:25sont séduits par la violence
29:26et le charisme
29:27qui se dégagent
29:28d'une jeune militante
29:29du Sekigun,
29:30Fusako Shigenobu.
29:33Née sous les décombres
29:34et l'humiliation de la défaite,
29:35Shigenobu,
29:36une vétérante
29:37du mouvement étudiant,
29:38revendique la direction
29:39de la branche internationaliste
29:40du Sekigun
29:41après le détournement
29:42réussi vers la Corée du Nord
29:43d'un avion de la Japan Airlines
29:45le 31 mars 1970
29:46par un groupe
29:47de l'organisation.
29:52Shigenobu,
29:53rejoint par Masawa Dachi
29:54et d'autres réalisateurs
29:55pinks de premier plan,
29:57croient en la possibilité
29:58d'une révolution mondiale.
30:00Ils réfléchissent ensemble
30:02au moyen de la mettre en œuvre
30:03ainsi qu'au pays
30:03qui lui servira de tremplin.
30:04Le rêve le plus grandiose
30:11que caresse la jeunesse
30:12c'est la révolution mondiale.
30:17Mue par de fortes affinités
30:18pour le Cuba de Castro,
30:20pour Guevara
30:20et pour les autres,
30:23non sans que s'y mêle également
30:24la révolution culturelle
30:25de la Chine,
30:26il s'était mis à bouger
30:28en direction
30:28de la révolution mondiale.
30:31Un tel objectif
30:32ne peut se réaliser
30:33qu'avec le recours
30:34à la violence.
30:36C'est en somme
30:37un état d'esprit
30:38qui se perpétue
30:39dans sa pureté.
30:42L'agitation politique
30:43par le truchement
30:44de mouvements d'étudiants
30:45prenait fin,
30:47tandis que prévalait
30:48l'agitation politique
30:49par des professionnels.
30:52Deux tendances
30:53vont dès lors
30:53s'affronter
30:54au sein du Sekigun.
30:55La première,
30:56internationaliste,
30:57qui prendra plus tard
30:58le nom de Nihon Sekigun,
31:00l'armée rouge japonaise,
31:01est incarnée par Shigenobu
31:03et les réalisateurs pink.
31:05Recherchée par toutes
31:06les polices du Japon,
31:07Shigenobu doit quitter le pays.
31:09Elle entame alors
31:09sa cavale de 30 ans.
31:12La seconde tendance
31:13du Sekigun,
31:14appelée Rengo Sekigun,
31:15l'armée rouge unifiée,
31:17persiste dans l'illusion
31:18d'une révolution intérieure.
31:19Une révolution enracinée
31:21sur le territoire japonais.
31:22Elle est dirigée
31:23par Yoko Nagata
31:24et Tsuné Omori.
31:26Au cours de l'année 1971,
31:28Nagata et Mori
31:29commandit des attentes
31:30à meurtrier dans tout le Japon,
31:31attaquant banques,
31:32commissariats et dépôts d'armes.
31:37S'étant engouffré
31:37dans une spirale de violence
31:39et une dérive sectaire
31:40qui le coupe
31:40de toute base populaire,
31:42le Lengo Sekigun,
31:43en préparant sa révolution,
31:45prépare en fait son désastre.
31:47Un désastre qui provoquera au Japon
31:49une onde de choc sans précédent.
31:52En hiver,
31:53le noyau dur
31:54de l'armée rouge unifiée
31:55s'est isolé à Nagano,
31:56dans des chalets de montagne
31:57transformés en bases
31:58d'entraînement militaire.
32:01Traqués par la police,
32:02la plupart de ses membres
32:03finiront par être arrêtés.
32:06Cinq d'entre eux
32:06parviennent cependant
32:08à échapper
32:08au maille du filet policier.
32:10Ils se réfugient
32:11dans un chalet,
32:11le chalet Asama,
32:13dans lequel ils retiennent
32:13une otage.
32:15Le chalet Asama
32:16se transforme rapidement
32:17en une forteresse assiégée.
32:18Masao Matsuda,
32:21un cinéaste pink
32:22proche du Sekigun
32:23de Fusako Shigenobu,
32:25a conservé
32:25la mémoire
32:25de ces événements.
32:29L'incident de l'Asama
32:30est arrivé
32:31à la fin février 1972.
32:35Il y eut,
32:35si je me souviens bien,
32:36quatre combattants
32:37du Rengo Sekigun
32:38qui opérèrent un repli
32:39dans ce chalet Asama.
32:43Là,
32:43ils prirent en otage
32:44l'épouse du concierge
32:45et se barricadèrent
32:46avec elle dans le chalet.
32:47Ils échangèrent finalement
32:50des coups de feu
32:51avec les forces de l'ordre,
32:52les Kidotai,
32:53venus les déloger.
32:58La prise d'otage
32:59qui dure neuf jours
33:00mobilise le plus impressionnant
33:01déploiement policier
33:02jamais opéré au Japon.
33:14Les assauts du Kidotai,
33:15sans cesse repoussés
33:16par les membres du Sekigun,
33:18se soldent par la mort
33:19d'un civil
33:19et de deux policiers.
33:27Filmé en continu
33:28par toutes les télévisions
33:29du Japon,
33:30la prise d'otage
33:31est vécue en direct
33:31par la population.
33:45Ce qui constitua le paroxysme,
33:48si l'on peut dire,
33:49de ce dépouement de force,
33:50c'est sans doute
33:51lorsque les Kidotai
33:52amenèrent une grue de chantier
33:53munie d'une boule de fonte
33:54avec laquelle
33:54ils démantelèrent la bâtisse.
33:57Ils parvarent ainsi
33:58jusqu'aux combattants,
33:58puis ils firent prisonniers
33:59et libérèrent l'otage.
34:12Celle qui était la dirigeante
34:13se trouve maintenant
34:14dans un pénitencier,
34:15je ne sais où,
34:16en attente de son exécution
34:17puisqu'elle a été condamnée à mort.
34:20Quant au capitaine de ce groupe,
34:22il se pendit dans la cellule
34:23où il était emprisonné.
34:24Enfin, le jeune homme
34:26si efficace
34:27dans son rôle de sniper,
34:29après avoir eu la bonne fortune
34:30de recouvrer la liberté
34:31en échange des passagers
34:32d'une crise d'otage réussie,
34:35il s'est éclipsé
34:35dans quelques pays arabes
34:36en Palestine.
34:44Yasuo Izumi
34:45a été personnellement affecté
34:47par l'affaire Assama,
34:48une cicatrice
34:49qu'il se refuse d'oublier.
34:54C'est la photo
34:57où Sakaguchi
34:58se fait arrêter.
35:00C'est le moment
35:00où il est extirpé
35:01du chalet Assama.
35:11Là, c'est Kuno Bando,
35:12le numéro 3
35:13de l'organisation.
35:15Maintenant,
35:15il est dans un pays arabe.
35:16Il a rejoint
35:17l'armée rouge japonaise.
35:22Lui, c'est mon ami Yoshino.
35:24On vient de le sortir
35:25du chalet.
35:31Il est l'un des 5
35:32qui s'étaient enfermés
35:33dans le chalet Assama.
35:35Et avant cela,
35:35il était resté tout le temps
35:36dans les montagnes de Nagano.
35:39Il était l'un des 7
35:40plus hauts dirigeants
35:41de ce groupuscule.
35:46Là, c'est Yoshino
35:48et moi.
35:50C'est une photo prise
35:50au cours d'un voyage
35:51à Hiroshima.
35:52Je connais Yoshino
35:53personnellement
35:54car on était des copains
35:55à l'école primaire.
35:57On avait 6 ans.
35:59C'était il y a
36:0045 ou 46 ans.
36:05À cette époque,
36:06il était déjà très impliqué
36:07dans les mouvements étudiants.
36:12Là, c'est sa femme.
36:13Quand elle est morte,
36:14elle était enceinte
36:14de 9 mois.
36:15La femme de Yoshino,
36:18comme 13 autres jeunes militants,
36:21a été assassinée
36:21dans les semaines
36:22qui précèdent
36:22la prise d'otage
36:23du chalet Assama.
36:25Yoshino a participé
36:26à la plupart des assassinats.
36:33Mais ce sont Yoko Nagata
36:34et Tsuné Omori,
36:36les deux leaders
36:36du Rengo Sekigun
36:37qui ordonnèrent
36:38les séances de torture
36:39puis les exécutions
36:40dans l'hiver glacial
36:41de Nagano.
36:53Assama,
36:54on s'en rendrait
36:55bientôt compte,
36:56était le dénouement
36:57d'une histoire
36:58bien plus terrible
36:58que la prise d'otage
36:59elle-même.
37:09Au début,
37:09tout le monde
37:10était scotché
37:10devant la télé
37:11avec la fusillade
37:12nourrie du 28 février.
37:15Chacun admirait
37:16le vaillant comportement
37:17au feu
37:17des petits gars
37:18de l'extrême gauche.
37:20Mais une semaine passe,
37:23dix jours passent
37:24et voilà
37:25que de cette montagne
37:26déboulent les cadavres,
37:30que de la vase
37:31de ces étangs
37:31émergent
37:32des corps emballés
37:33bien ficelés.
37:36Finalement,
37:37on retrouve
37:3814 corps.
37:41compagnons d'armes
37:42jusqu'à hier encore,
37:44ces hommes
37:44qui marchaient
37:44ensemble
37:45le fusil
37:45à l'épaule
37:46ont fini
37:46par s'entretuer.
37:48Posons-nous la question,
37:49comment sont-ils
37:50arrivés là ?
37:50Les partis révolutionnaires
38:12se livrent volontiers
38:13à cet exercice
38:14de purge
38:14à la Staline
38:15ou à la Chinoise
38:15une fois le pouvoir
38:16conquis
38:17afin d'en affermir
38:18les reines
38:18au cas où ils seraient
38:19mal assurés
38:20dans leurs mains.
38:22Là,
38:22au contraire,
38:23aucune affaire pressante
38:24ne les poussait
38:25à agir de la sorte.
38:27Ils se trouvaient
38:28encore entre camarades
38:29dans les prémices
38:30d'une révolution
38:30qui restait entièrement
38:31à faire.
38:33Et cependant,
38:34ils se sont littéralement
38:35entretués
38:35entre camarades
38:36de lutte.
38:39Voyez-vous,
38:40les Japonais,
38:41à la différence
38:42des Américains
38:42ou des Français,
38:44ont dirais-je
38:44une incapacité fondamentale
38:47à l'affirmation
38:47du moi.
38:50En somme,
38:50tout le monde
38:50doit être pareil.
38:53C'est-à-dire
38:53qu'on a horreur
38:54d'être différent
38:55des autres.
38:59L'environnement
38:59est comme cela
39:00et soi-même,
39:01on doit aussi
39:02être comme cela.
39:06C'est pour cette raison,
39:08par exemple,
39:08que lorsqu'ils sont
39:09au bureau
39:10dans une entreprise,
39:11ça marche parfaitement.
39:13Ils fournissent
39:13un superbe travail
39:14d'équipe.
39:16Mais alors pourquoi,
39:17lorsqu'ils sont
39:17dans la montagne,
39:18en sont-ils arrivés
39:19à des drames
39:19comme ces assassinats ?
39:21Moi, je pense
39:21qu'un des éléments
39:22pourrait être
39:22une espèce de grégarisme
39:24qui bloque toute expression
39:25de soi.
39:26C'est une forme extrême,
39:27terriblement condensée,
39:28qui se manifeste
39:29lorsqu'on se trouve
39:30ainsi enfermé
39:30dans les montagnes.
39:32Ce genre de drame,
39:33je pense que pratiquement
39:34tous les Japonais
39:34avec leur caractère,
39:36placés ainsi
39:36au cœur des montagnes,
39:38se seraient comportés
39:38de la même façon.
39:40Mais ils ne se rendent
39:41pas compte de cela.
39:42Le fait même
39:42qu'ils peuvent considérer
39:43que c'est quelque chose
39:44qui ne les concerne pas
39:45et n'arrive qu'aux autres
39:46est une forme
39:47de mentalité nationale
39:48pour le moins curieuse,
39:49sinon celle
39:49d'imbécile heureux.
39:51La terrible purge
39:52des chalets de montagne
39:53et l'affaire à sa main
39:54provoquent une fracture
39:55sans précédent
39:56au sein de la politique
39:56japonaise.
39:58Outre l'extrême-gauche
39:58ou le parti communiste,
40:00dont la puissance politique
40:01était jusqu'alors considérable,
40:03c'est l'intégralité
40:03des partis représentant
40:04la gauche
40:05qui se trouve
40:05durablement discrédité.
40:07Ils mettront 30 ans
40:08à se relever de cette épreuve,
40:09si toutefois
40:10ils ne s'en sont jamais relevés.
40:11Le Sekigoun intérieur
40:13est peut-être mort
40:14dans les chalets de Nagano,
40:15mais la branche internationaliste
40:16menée par Fusako Shigenobu,
40:18loin d'avoir subi
40:19le même destin,
40:20s'est installée au Liban,
40:21dans les camps d'entraînement
40:22du Front Populaire
40:23de Libération de la Palestine.
40:25C'est là que Shigenobu,
40:27allié au FPLP,
40:28prépare son plus violent coup d'éclat,
40:29celui qui donnera
40:30le coup d'envoi
40:31du terrorisme international.
40:35L'année 1972
40:36fut l'année
40:37où sous la même appellation
40:38de Sekigoun,
40:39Armée Rouge,
40:41on avait d'une part
40:41le Rengo Sekigoun,
40:43d'autre part
40:44le Nihon Sekigoun,
40:46à l'époque
40:46on disait
40:47Arabu Sekigoun,
40:48issu de la même faction
40:50de l'Armée Rouge.
40:52Des demi-frères en somme,
40:54un peu comme
40:54Cain et Abel,
40:56sortis de la matrice
40:56d'une même mère,
40:58en l'occurrence
40:59la même faction
40:59du Sekigoun.
41:03L'un des deux
41:03avait éliminé
41:04une quantité épouvantable
41:05de ses camarades de combat,
41:07comme Abel
41:07avait tué Cain.
41:08et les autres
41:11qui s'en étaient allés,
41:13comme Cain,
41:14en Palestine,
41:16étaient en train
41:16de concevoir
41:17un théâtre d'opérations
41:18entièrement différent,
41:20de créer une situation
41:22entièrement nouvelle,
41:25car c'est bien
41:26de cela
41:26qu'il s'agissait.
41:29Comme s'il avait fallu
41:30poursuivre
41:30cette suite macabre,
41:32deux mois plus tard,
41:34le 30 mai 1972,
41:35éclate le nouvel exploit
41:36de l'armée rouge japonaise
41:37par le Nihon Tsikigoun,
41:40le massacre
41:40de l'aéroport
41:41de Lod Tel Aviv.
41:44Pour la première fois,
41:46le nom de l'armée rouge
41:47dépasse les frontières
41:48du Japon
41:48et se révèle aux yeux
41:49du monde
41:50lors du premier attentat
41:51suicide de l'histoire.
41:54Le 30 mai 1972,
41:56deux mois après Assama,
41:57trois terroristes japonais
41:58sortent des fusils automatiques
41:59dans le hall
42:00de l'aéroport
42:01Lod Tel Aviv
42:01et mitraillent la foule.
42:02Le bilan est très lourd.
42:0526 morts
42:06et une centaine de blessés.
42:24Seul l'un des terroristes,
42:25Kozo Okamoto,
42:26un jeune homme de 22 ans
42:27qui n'aurait pas pu,
42:28quelques mois plus tôt,
42:29situer le conflit israélo-palestinien
42:31sur une carte géographique,
42:33survit à l'attentat.
42:39Son arrestation,
42:41suivie de ses aveux,
42:42vont permettre de faire le lien
42:43avec le Sekigun
42:44de l'affaire Assama.
42:47Le nom de Shigenobu
42:48émerge alors.
42:55Elle devient de fait
42:56l'unique leader
42:57de l'armée rouge japonaise.
43:11Shigenobu pensait pouvoir
43:12conduire la révolution mondiale
43:14à travers la cause palestinienne.
43:17Après la fulgurante victoire israélienne
43:18de 1967,
43:20les Palestiniens
43:21qui ont tourné le dos
43:22aux pays arabes
43:23se sont engagés seuls
43:24dans une lutte de guérilla
43:25contre l'État hébreu.
43:26Ils ont établi
43:27leur camp d'entraînement
43:28dans la vallée de la Beka.
43:39Shigenobu,
43:39qui intègre avec ses commandos
43:40les camps palestiniens,
43:41devient rapidement
43:42la maîtresse de Georges Abash,
43:43le fondateur du Front Populaire
43:44de Libération de la Palestine.
43:47Sous sa tutelle,
43:48Shigenobu organise
43:49l'attentat de Lod
43:50après avoir ressenti
43:51le choc provoqué
43:51par l'affaire Assama
43:52dans laquelle plusieurs
43:53de ses camarades
43:54ont été engloutis.
43:59Masao Matsuda
44:00est devenu membre
44:01de l'armée rouge japonaise
44:02au début des années 70.
44:05Assigné à résidence au Japon,
44:07c'est l'un des idéologues
44:07du groupe terroriste.
44:10En dépit des bombes
44:11et des bains de sang,
44:12Matsuda est resté fidèle
44:13à ses camarades
44:13du Sekigun
44:14et n'a jamais renié
44:15ses convictions de jeunesse.
44:18Dernier témoin
44:18du départ de Shigenobu
44:19pour le Liban,
44:20Matsuda se souvient
44:21de ce qui avait conduit
44:22ses amis
44:22à rejoindre
44:23le FPLP
44:23de Georges Abash.
44:30Ce qui ressortit
44:31plus particulièrement
44:32de tous ces événements,
44:33ce fut la Palestine,
44:35c'est-à-dire
44:35la lutte contre Israël.
44:37Israël,
44:38comme on le sait,
44:39est le fer de lance
44:39du capitalisme mondial.
44:43C'est un peu
44:43comme le Black Power
44:44aux USA,
44:46qui avait engagé
44:46un combat
44:47contre la patrie
44:48du capitalisme.
44:50Et comme les premières
44:50lignes de front
44:51de ceux qui voulaient
44:52faire la révolution,
44:54autrement dit,
44:55renverser les barrières
44:56du capitalisme mondial
44:57se trouvaient là,
44:58entre la Palestine
44:59et Israël,
45:02il nous fallait collaborer
45:03à la libération
45:04de la Palestine.
45:05C'est ce que je pensais.
45:09Bien sûr,
45:09en ce qui concerne
45:10Shigenobu Fusako
45:11et son départ
45:12pour la Palestine,
45:14si elle avait
45:14ses idées personnelles,
45:16je crois pouvoir dire
45:17que, dans une grande mesure,
45:19elle a subi
45:19mon influence
45:20sur ce point.
45:26Dans les camps palestiniens
45:28du FPLP,
45:29Shigenobu croise
45:30les membres
45:30de la bande abadère,
45:32contacte
45:32les brigades rouges italiennes
45:33avec lesquelles
45:34elle collabore
45:35à plusieurs reprises.
45:36Parmi les groupes
45:40d'extrême-gauche
45:41qui se sont ralliés
45:42au fantasme
45:42d'une révolution mondiale
45:44se trouve donc
45:45la jeunesse
45:45issue des pays
45:46de la défaite
45:46et des fascismes
45:47de la Seconde Guerre mondiale.
45:49Allemagne,
45:50Italie,
45:51Japon.
45:53Hasard de l'histoire
45:54ou conséquence
45:55d'un même traumatisme,
45:57la réponse
45:58est à construire.
46:02En 1974,
46:04Fusako Shigenobu
46:05prend ses distances
46:06avec le FPLP
46:07et tente
46:08de se recentrer
46:09en Europe.
46:10Alliée au terroriste
46:11Carlos,
46:12elle est soupçonnée
46:13d'avoir commandité
46:14une retentissante prise
46:15d'otages
46:15dans l'ambassade
46:16de France de la Haie,
46:17ce qui lui vaudra
46:18un premier mandat
46:18d'arrêt international.
46:21Puis ce sera
46:21le détournement
46:22d'avions vers Dakar,
46:23au Bangladesh,
46:24en 1977,
46:26par lequel elle fait libérer
46:27la plupart des membres
46:28incarcérés
46:28de l'armée rouge japonaise
46:29et empoche
46:306 millions de dollars
46:31de rançon
46:32du gouvernement japonais.
46:33En 1988,
46:37dernier attentat
46:38en date du groupe,
46:39Shigenobu est pour la première fois
46:40identifié par des témoins
46:41comme l'auteur
46:42de l'explosion
46:42de la voiture piégée
46:43qui, à Naples,
46:45fait 5 morts
46:45et de nombreux blessés.
46:53Privés de soutien
46:53logistique et populaire,
46:55ayant perdu le support
46:56des Palestiniens
46:57et de la Libye,
46:58leurs anciens alliés,
46:59la plupart des membres
47:00de l'armée rouge japonaise
47:02sont arrêtés
47:02aux quatre coins du monde
47:03au cours des années 90.
47:09Shigenobu elle-même,
47:10prenant le risque
47:11de rentrer au Japon
47:11après 30 ans d'exil,
47:13sera finalement arrêté
47:14au mois de novembre 2000.
47:15Les membres du Sikigun
47:25sont certes les enfants
47:27du mouvement étudiant
47:28d'extrême-gauche,
47:30mais ce sont des enfants
47:31inattendus,
47:34non désirés
47:35et pour le moins turbulents.
47:37A l'époque,
47:41les gens croyaient
47:41en la démocratie.
47:45Ils pensaient
47:46pouvoir changer
47:46la société
47:47par une démocratisation
47:49du pouvoir politique.
47:54Le tort du Sikigun,
47:57c'est d'avoir voulu
47:57changer la société
47:58par la violence
47:59et la lutte armée.
48:02Or, on ne change pas
48:03la société japonaise
48:04par la violence.
48:06Les membres du Sikigun
48:07ont une conception
48:07du monde dépassée
48:09et leur action
48:10n'a jamais influencé
48:11le monde moderne.
48:12J'ai donc pitié
48:13de leur erreur.
48:15Ils ne m'inspirent
48:15aucune émotion,
48:17aucun intérêt particulier.
48:19Cependant,
48:20en ce qui concerne
48:21ce qu'ils ont réellement fait
48:22dans le reste du monde,
48:23tout n'est pas encore établi
48:24et je pense que la police
48:26le découvrira progressivement.
48:28Cela dit,
48:29même si je ne ressens
48:30aucune émotion pour eux,
48:31cela ne veut pas dire
48:32que je cautionne
48:33la répression policière
48:34contre eux.
48:35Je pense qu'à l'époque,
48:36ils étaient
48:36complètement à côté
48:37de la plaque.
48:38Cela n'a pas changé,
48:40ils le sont toujours
48:40aujourd'hui.
48:54Aujourd'hui,
48:55la gauche japonaise
48:56est toujours ensevelie
48:57sous les ruines
48:57du chalet Asama.
48:58La dérive terroriste
49:04a réduit à néant
49:05les revendications
49:06du mouvement étudiant
49:07des années 60
49:07dont il ne subsiste rien.
49:096 mai 68 en France,
49:18le printemps de Prague
49:19où le Black Power américain
49:20ont changé en profondeur
49:21le monde occidental.
49:23Le Japon n'a conservé
49:24aucune trace
49:24de la révolte étudiante
49:25qui avait pourtant
49:26fait vaciller le pouvoir
49:28et la société tout entière.
49:29quant au Sekigun,
49:41seul semble demeurer
49:42ces portraits de police
49:43affichés durant 30 ans
49:44dans tous les commissariats
49:45et les gares du Japon
49:46mais qu'on a bien du mal
49:47à rapprocher
49:48de ces visages
49:49vieillis et fatigués
49:50qu'on a vus revenir
49:51ces dernières années.
49:51Leur procès,
50:00celui de Shigenobu
50:01et des autres
50:01se poursuivent encore
50:03dans l'indifférence générale.
50:05Leur procès,
50:06le d'exé Guvid
50:06le
50:07de la
50:07«
50:11Ce n'est pas
50:12qu'on a fait
50:12ce que c'était ? »
50:14«
50:16«
50:17«
50:18«
50:21«
50:24«
50:24«
50:26«
50:29«
50:29«
50:30«
50:32«
50:32«
50:33Donc, je n'ai pas pas de passe.
50:38Je n'ai pas pas de passer paris.
50:40Je n'ai pas pas de passer paris.
50:43Je n'ai pas pas de passer paris.
50:45Donc, j'ai pas de passer paris.
50:49C'est passé en 1971.
50:53La situation est encore plus tôt dans le monde ?
50:57«続くと思うか思わないかという客観的なことではなくて
51:08僕は非常に主観的に答えるとするならば
51:12必要があるならば私自身もテロをやります
51:15というふうにしか答えられないですね
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