00:00Michael Fribourg, bienvenue à Patron en Question.
00:03Vous avez une magnifique entreprise qui est la compagnie des chargeurs Invest.
00:08Mais avant, ça s'appelait comment ?
00:09Alors, le groupe s'est appelé d'abord les chargeurs réunis, il y a 150 ans, quand la maison a été créée.
00:14Puis ensuite est devenu chargeur international, puis chargeur tout court.
00:18Et nous avons voulu réunifier les doubles cultures industrielles et financières de la maison
00:23en revenant à la notion de compagnie chargeur et d'ajouter Invest
00:27pour traduire aussi la culture de développeurs de champions mondiaux qu'a notre maison.
00:33Formidable. Alors, au passage, vous êtes très peu diplômés.
00:36L'ENA, l'IEP de Paris, un DEA de philosophie, d'économie, un master d'humanité moderne.
00:45Je trouve ça magnifique. Je suis très admirative, surtout de Normale Sup.
00:49Mais ce qui est intéressant aussi, c'est que vous êtes passés par les cabinets ministériels.
00:54Et d'ailleurs, j'ai reçu Renaud Dutreil ici, il n'y a pas longtemps.
00:58Et figurez-vous que je l'ai reçu parce qu'il m'avait dit, mais j'étais à la campagne et il n'y avait plus de boulanger.
01:04J'ai passé un CAP de boulanger pour devenir boulanger. Il avait été boulanger un an.
01:08Je trouve ça, quand on était ancien ministre, c'était pas mal.
01:11C'est un bon exemple.
01:11C'est un bon exemple.
01:13Et alors donc, aujourd'hui, compagnie Chargeur Invest, qu'est-ce que vous voulez en faire vraiment ?
01:19Alors aujourd'hui, la compagnie Chargeur, c'est quatre champions mondiaux dans des activités de niche qui vont de la culture et l'éducation à la mode, au savoir-faire, en passant également par les matériaux innovants.
01:36Donc on est ce que les Allemands appelleraient une Mittelstand de Mittelstand, avec des très puissantes parts de marché internationales dans nos affaires.
01:44On fait 95% de notre activité à l'international.
01:49On a des filiales commerciales ou industrielles dans 100 pays.
01:53Donc on est un acteur du commerce mondial depuis la fondation de Chargeur en 1872.
01:59Mais aussi, on est un acteur de la conquête française à l'international.
02:03Et ça, on en est avec nos milliers de collaborateurs extrêmement fiers.
02:08Mais aussi, on est toujours très fiers de dire, dans un marché, on arrive à être le numéro un mondial,
02:12à avoir souvent un grand fossé...
02:15En quoi vous êtes numéro un mondial ?
02:17On est numéro un mondial dans la création et le développement d'institutions culturelles, de musées.
02:23Ah oui !
02:23On est le numéro un mondial dans les textiles techniques.
02:27Même devant les Américains, les musées ?
02:29De très loin, devant les Américains.
02:31Et d'ailleurs, nous réalisons nous-mêmes les plus grands musées aux États-Unis.
02:35Nous venons de terminer le musée du rêve américain, Washington.
02:38On a fait le musée de la Maison Blanche.
02:41On est en train de terminer le musée de l'air et de l'espace de Washington.
02:44C'est-à-dire, les plus grands musées américains se tournent vers nos filiales américaines et européennes
02:49pour créer les expériences des visiteurs de demain.
02:53Et c'est plus facile de faire amuser à l'étranger qu'en France ?
02:56D'abord, il y a beaucoup plus de moyens aux États-Unis qu'en Europe.
02:59D'accord.
03:00Car ce sont des modèles privés avec ce qu'on appelle des endoments.
03:04Donc des capitaux qui sont mis à disposition de ces institutions à long terme
03:09et qui sont des institutions qui trouvent leur modèle d'affaires.
03:12En Europe, nous avons beaucoup plus de modèles qui sont des modèles soutenus par l'argent public,
03:17par le contribuable.
03:19Et donc, évidemment, les ressources sont plus limitées.
03:21Et c'est pourquoi nous sommes évidemment très forts en Europe,
03:23mais surtout très puissants aux États-Unis, très puissants dans le Golfe,
03:26très puissants en Asie, qui sont, comme vous le savez, par exemple,
03:29dans le Golfe, c'est la nouvelle guerre du Péloponnèse culturelle,
03:32avec la lutte de toutes ces cités, Abu Dhabi, l'Arabie Saoudite.
03:36Le Louvre qui est allé...
03:38Le Louvre Abu Dhabi.
03:39Si vous pensez à Abu Dhabi, imaginez qu'aujourd'hui, vous avez côte à côte,
03:44à Abu Dhabi, le Louvre, le Guggenheim, Team Lab, le Zayen National Museum,
03:50dont nous avons...
03:50Mais pourquoi ? Alors, c'est formidable que ce soit à l'étranger,
03:53mais on fait un peu pauvrer avec nos musées.
03:56Bon, alors, j'exagère, parce que le Louvre, etc.
03:58Enfin, le Louvre, on s'est aperçu qu'il était dans un État épouvantable.
04:02On est obligé de fermer pour la Joconde, on va dévier pour essayer de la visiter.
04:08Vous savez...
04:09Comment ça se fait ?
04:10Vous racontez une aventure merveilleuse d'entrepreneurs,
04:14et en France, bon, les musées...
04:16Mais la France, comme l'Europe, souffre d'un manque de ressources
04:20pour les grands développements culturels, comme les grands développements industriels.
04:23Nous, nous sommes à la fois industriels...
04:24Comment fait Bernard Arnault pour développer son propre musée, alors ?
04:27Bien sûr, mais vous avez un manque patent en Europe,
04:31de capitaux disponibles à long terme, il n'y a pas de fonds de pension,
04:35vous n'avez pas l'épargne-retraite qui permet de financer les investissements
04:38réellement pour l'avenir.
04:40Il n'y a, par exemple, en France, vous le savez,
04:42qu'une retraite classique par répartition.
04:46Et donc, finalement, ce modèle pénalise énormément l'investissement,
04:52et nous qui sommes à la fois industriels, acteurs des services,
04:55aussi acteurs financiers, nous voyons finalement les limites d'un tel schéma,
05:00puisque les investissements en Europe sont beaucoup plus limités.
05:05C'est impressionnant.
05:06Et donc, la vie de votre groupe se passe à l'étranger ?
05:12L'essentiel de la vie de notre groupe se passe dans des développements français.
05:15On a des usines en France, on est un gros exportateur de notre pays,
05:20mais aussi, évidemment, le commerce, nos clients sont à l'étranger,
05:24donc on est très attentifs à tout ce qui se passe.
05:25Est-ce qu'il y a la reconstruction de Notre-Dame ou pas ?
05:27Alors, on a pris part marginalement à la reconstruction de Notre-Dame,
05:31mais surtout, en fait, on est engagé dans les nouveaux grands projets
05:35dont on parle peu ici.
05:37Mais prenez le Zayen National Museum à Abu Dhabi,
05:40on développe 15 musées en Arabie saoudite.
05:44Là, vous avez, en fait, des investissements stratosphériques
05:47qui vont faire concurrence à l'Europe.
05:49Et c'est un peu le paradoxe aussi.
05:51C'est-à-dire que, finalement, les acteurs européens,
05:53avec les contraintes européennes qu'ils ont,
05:55ils sont sur un territoire où toute la concurrence mondiale est présente
05:58et donc, ils sont obligés d'aller faire comme nous le faisons,
06:01d'aller chercher des marchés au long cours à l'international.
06:04Et quel est le deuxième pôle où vous êtes complètement leader ?
06:09Le deuxième pôle où on est leader, ce sont les textiles techniques
06:12pour le luxe et la mode.
06:13Donc, aujourd'hui, vous avez un tiers des vêtements dans le monde
06:16qui incorpore des produits du groupe Chargeur,
06:20soit notre laine, soit nos textiles techniques,
06:23que ce soit dans le luxe, mais aussi dans les produits
06:25beaucoup plus accessibles.
06:27Et nous sommes, par exemple, le plus grand fournisseur
06:30pour les marques américaines de ces produits.
06:32Et nous produisons en France, à la Lénière de Picardie,
06:35c'est un site dont on est extrêmement fiers
06:37et qui est un site extrêmement dynamique.
06:41Et, finalement, nous avons investi en France,
06:43nous continuons d'investir aussi à l'étranger.
06:45Il pensait qu'aujourd'hui, on fait 95% de notre chiffre d'affaires hors de France,
06:49mais on fait 70% de nos investissements industriels en France.
06:52Écoutez, c'est absolument remarquable.
06:54Et le mot de la fin, c'est bravo.
06:56Mais j'ai presque un regret.
06:58Pour moi, la compagnie de Chargeur,
07:00c'était un peu obscur.
07:03Une grosse compagnie industrielle,
07:05enfin, c'est fabuleux, c'est le flambeau français.
07:08Donc, à mon avis, il faut communiquer beaucoup plus.
07:10C'est le réveil d'une belle endormie
07:11et on essaie de la faire encore plus rayonner.
07:14Extraordinaire.
07:15Je sais que vous avez un beau projet de musée aussi,