00:00C'est l'heure de l'édito politique de Jacques Serret qui est avec nous tous les matins cette semaine.
00:05Jacques Serret, vous revenez sur l'offensive de Bruno Retailleau dans le dossier algérien, on en parlait déjà hier.
00:12Et hier, on apprenait aussi qu'un ressortissant algérien, signalé comme islamiste radical expulsé par la France, avait été refusé par son pays.
00:20Le ministre de l'Intérieur va donc s'entretenir avec Emmanuel Macron ce jeudi et vous me dites, il était temps.
00:26Oui, c'est un feuilleton interminable et l'on pourrait se dire que de temps perdu, l'écrivain Boilem-Sonsal croupit dans une prison algérienne depuis 8 mois.
00:35Très exactement 248 jours, 8 mois que l'Elysée et le Quai d'Orsay réagissent mollement quand le pouvoir algérien qualifie notre compatriote d'imposteur.
00:45L'Algérie entre dans une histoire qui la déshonore.
00:48Empêcher un homme gravement malade de se soigner, ce n'est pas à la hauteur de ce qu'elle est, a bien dit Emmanuel Macron.
00:54C'était temps, janvier, une éternité.
00:57Pourquoi Jacques ?
00:58Parce que Paris n'a eu de cesse de changer de pied.
01:01Souvenez-vous, au lendemain de l'attentat commis à Mulhouse en février par un islamiste algérien sous OQTF,
01:06François Bayrou lançait un ultimatum, 4 à 6 semaines, pas plus, pour qu'Alger réexamine l'application des accords passés avec la France.
01:14Nous voulons qu'enfin ces accords soient respectés, a insisté le Premier ministre,
01:19menaçant de remettre en cause l'accord de 68 qui donne aux Algériens des droits et des facilités uniques en France.
01:26Évidemment, cet appel étant resté lettre morte, le gouvernement avait alors défendu l'idée de la fameuse riposte graduée.
01:33Une riposte progressive avec, par exemple, la réduction du nombre de visas délivrés,
01:37la non-autorisation des titulaires de passeport diplomatique algérien d'entrée sur le territoire français.
01:44Mais à peine ces mesures avaient-elles été simplement évoquées par Matignon, qu'Emmanuel Macron décrochait son téléphone ?
01:51Un rebondissement qui aurait pu faire changer les choses.
01:54Oui, fin mars, c'est un échange téléphonique entre le président français et le dirigeant algérien qui a rebattu les cartes.
02:00Emmanuel Macron et Abdelmajid Tebboune disaient alors vouloir relancer un dialogue fructueux.
02:05Ni une ni deux, Jean-Noël Barraud se rendait sur place alors qu'Alger n'avait toujours pas répondu à l'ultimatum de la France
02:12sur la reprise de ses ressortissants sous OQTF, ni sur la libération de Boilem Sansal.
02:18Un déplacement qui a donné au Quai d'Orsay et à l'Élysée l'illusion de la réussite de leur stratégie.
02:25Une illusion, car deux semaines plus tard, Paris rappelait son ambassadeur et expulsait 12 diplomates algériens.
02:31Depuis, aucun réchauffement diplomatique.
02:34Bien au contraire, un journaliste français, Christophe Glaze, a même été arrêté et condamné à 7 ans de prison.
02:40Et le silence de l'exécutif ces dernières semaines, qui espérait une libération de Boilem Sansal lors de la fête de l'indépendance du pays, n'y a rien changé.
02:48En fait, ce dossier, depuis le début, c'est un enfer pour Paris.
02:51Oui, comme le dit le diplomate Xavier Driancourt dans les colonnes du Figaro,
02:55l'Algérie insulte, interdit, refuse, humilie, et la France se tait ou murmure.
03:02La faute à cette peur qui ronge nos élites, environ 10% de la population française a un lien avec l'Algérie.
03:09Parler de l'Algérie pour un président français ou un ministre des Affaires étrangères,
03:13ce n'est donc jamais faire de la politique étrangère pure.
03:16C'est toujours prendre en compte son impact intérieur, décrypte l'ancien ambassadeur de France à Alger.
03:22Ou comment dire, sans le dire, que le potentiel réveil de certaines banlieues
03:27suscite une peur structurelle chez nos politiques, et cela justiférit donc l'immobilisme.
03:34Où voulez-vous en venir Jacques ?
03:35Eh bien que Bruno Retailleau a raison de taper du poing sur la table.
03:39Fini la diplomatie des bons sentiments, il l'a dit dans la presse,
03:42et il devrait le répéter sans détour, dans deux jours, à Emmanuel Macron.
03:46Le ministre va venir avec des propositions, confirme son entourage.
03:50Gel des avoirs, révision de la politique des visas, mesure de rétorsion sur les compagnies aériennes.
03:56Ces propositions seront sur la table, tout comme la révision de l'accord de 68.
04:00Et cette fois, l'hôte de Beauvau apparaît en position de force,
04:03car Emmanuel Macron voit sa popularité s'effondrer au plus bas dans le dernier baromètre IFOP JDD.
04:09Le premier flic de France veut que l'exécutif revienne à la position de François Bayrou de février dernier.
04:15La fermeté, un retour à la case départ salutaire.