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Droits de douanes : une fabrique de biscuits à Ardin, en Nouvelle-Aquitaine, victime de Donald Trump ? Regardez l'inquiétude d'un patron.
Regardez L'invité de RTL Matin avec Stéphane Carpentier du 15 juillet 2025.

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Transcription
00:006h, 9h, RTL Matin, avec Stéphane Carpentier.
00:05Merci à vous tous d'être là, 8h15, nous avions envie ce matin de mesurer l'inquiétude des patrons,
00:10de ceux qui exportent vers les Etats-Unis, et qui s'inquiètent, et on peut le comprendre,
00:13des 30% de droits de douane décidés par Donald Trump à partir du 1er août prochain.
00:18Ça concerne plusieurs secteurs de notre économie, et nous allons pouvoir mesurer les choses concrètement
00:24avec le cas de la fabrique de Cookies, société-usine basée à Ardins, en Nouvelle-Aquitaine,
00:29une PME de 125 salariés désormais, 165 000 biscuits en sachets chaque jour.
00:36Le four fonctionne non-stop du lundi matin au vendredi soir.
00:39Bonjour Alexis de Galambert.
00:41Bonjour.
00:41Merci d'être en direct avec nous en studio, vous êtes le fondateur de cette PME.
00:45Je dis que vous êtes un patron inquiet, et pourtant votre entreprise, qui marchait déjà très très bien,
00:49a signé, si je ne me trompe pas, cet hiver un contrat en or, avec une très grosse enseigne américaine,
00:55au moment donc où Trump a retrouvé la Maison Blanche.
00:57Oui, c'est une entreprise que j'ai créée il y a 13 ans.
01:01On a démarré notre stratégie export il y a maintenant près de deux ans.
01:05Et c'est vrai qu'on est plutôt à contre-courant, puisqu'on démarre notre stratégie export
01:09par le continent nord-américain, et en particulier les Etats-Unis.
01:13Et on a signé notre premier très gros contrat quelques semaines avant l'élection de Donald Trump.
01:17Donc effectivement, contre-courant total.
01:19Vos exportations vers l'Amérique du Nord, ça représente combien de votre production ?
01:23En fait, ça va vite. L'avantage des Etats-Unis, c'est que c'est un marché très gros,
01:26beaucoup plus gros que la France, vous vous en doutez.
01:28La France, en termes de taille de marché, c'est presque équivalent d'un Etat américain.
01:32Donc on sait déjà 30%.
01:3430% pour les Etats-Unis, ou pour l'Amérique du Nord ?
01:37Non, je dis l'Amérique du Nord parce qu'on est en train de signer des contrats au Canada,
01:40mais pour le moment, c'est que les Etats-Unis.
01:41Donc ça marche très fort, vous avez signé, vous aviez prévu une augmentation de ces exportations
01:45l'an prochain, en 2026, donc très très bientôt.
01:47Sauf que voilà, les droits de douane sont arrivés.
01:49Et du coup, c'est quoi ? C'est le flou là, aujourd'hui ?
01:52Oui, c'est le flou total.
01:53C'est le flou total, en fait. Ce qui est très difficile, c'est qu'on est sur un marché dans l'agroalimentaire.
01:57Donc là, en l'occurrence, on parle de broyer du Poitou, de sablé bien beurré qu'on vend aux Américains.
02:01On est sur un marché qu'on négocie au centime.
02:05Et quand Donald Trump nous menace de droits de douane,
02:07ça remet en cause l'intégralité du contrat qu'on a signé avec notre distributeur.
02:10Donc c'est très compliqué.
02:11Soyons concrets pour les auditeurs.
02:13Ces droits de douane, ils ont quel impact sur vos prix ?
02:15Ils vont avoir quel impact sur vos prix si c'est maintenu ?
02:18Par exemple, le prix d'un paquet de biscuits ?
02:20Aujourd'hui, c'est 3,49$ en rayon, là-bas.
02:23Donc concrètement, on a déjà subi 10% de hausse,
02:26puisqu'on a signé un contrat sans droits de douane.
02:28Et en fait, on a déjà 10%.
02:29Si ça passe à 30%, ce qui est annoncé,
02:33et ce qui, objectivement, est une catastrophe,
02:35le paquet dépassera les 4,20$ au minimum.
02:38Et dans l'agro, sur beaucoup de marchés, c'est pareil,
02:44plus le prix augmente, plus les volumes augmentent,
02:47mais de manière disproportionnée.
02:48C'est-à-dire que si vous augmentez le prix de 20% supplémentaire,
02:51vous pouvez être sûr que les volumes vont baisser d'au moins 30%.
02:53Gros impact, on l'entend, pour vous,
02:55alors que vous avez beaucoup investi, en plus.
02:57Oui, on est en train de beaucoup investir.
02:59Je suis en train d'investir dans une nouvelle ligne de production.
03:00J'en ai pour 3 millions d'euros sur l'usine d'Ardin que vous avez citée.
03:05Et en fait, le risque majeur qu'on a,
03:07ce n'est pas forcément une baisse des volumes,
03:08une baisse de volume,
03:09on s'en remettra un peu de gestion derrière,
03:10on évitera les déficits, contrairement à d'autres,
03:13et on s'en sortira.
03:15Le risque majeur qu'on a, c'est que le contrat s'arrête.
03:18Et en fait, on en est là.
03:18Si Trump met des droits de douane à 30%,
03:20notre risque, c'est que toutes nos stratégies
03:23mises en place il y a deux ans
03:24soient finalement un énorme fiasco.
03:27J'essaie de comprendre.
03:27C'est-à-dire que vous n'avez pas de nouvelles, par exemple,
03:29de l'enseigne américaine en question, là ?
03:30Non, on n'a pas de nouvelles,
03:31parce qu'en fait, l'enseigne américaine
03:32achète des produits un peu partout dans le monde.
03:34Donc voilà, je pense qu'elle ne passe pas sa vie
03:36à appeler tous ses fournisseurs.
03:37Elle essaie, elle aussi, de s'adapter,
03:39puisqu'il y a des annonces très régulières de Donald Trump.
03:41C'est assez dur de savoir où on va.
03:43Mais ce qui est certain,
03:44c'est que le jour où les 30% sont fermes et définitifs,
03:48il va y avoir un coup de fil de faille,
03:50parce qu'il va bien falloir savoir
03:51qui prend cette perte.
03:53Vous le redoutez, ce coup de fil ?
03:55Oui.
03:56J'essaie d'arrêter de répondre à mon téléphone.
03:57Vous n'avez pas envie d'entendre quelqu'un parler américain, là ?
03:59Non, je fais l'autruche.
04:00Beaucoup d'investissements, vous nous le disiez,
04:03il y a eu des embauches.
04:04Si ça tournait mal,
04:06est-ce que ça voudrait dire qu'il faudrait faire marche arrière ?
04:09De toute évidence, oui.
04:13Après, Donald Trump n'est pas éternel.
04:14C'est ce que je me dis.
04:15J'essaie de me rassurer comme ça.
04:16Mais j'attends, en fait,
04:19avec impatience,
04:19les élections de midterms aux Etats-Unis.
04:22Mais oui, en tout cas,
04:23je ne peux plus faire marche arrière sur mes investissements,
04:25puisque j'ai engagé déjà des accomptes
04:27pour investir dans une nouvelle ligne.
04:28Il va falloir que je m'adapte.
04:31Et clairement, malheureusement,
04:32ça devra passer par des coupes drastiques
04:35dans beaucoup de mes charges,
04:38et donc notamment les salaires.
04:39Le plus dur pour vous, en tant que patron,
04:41et c'est le cas de nombreux patrons de notre pays,
04:44c'est quoi ?
04:44C'est l'instabilité de Trump.
04:45C'est-à-dire qu'il est capable, là,
04:47de décider ça,
04:47puis de changer d'avis rapidement aussi ?
04:49C'est insupportable.
04:50Je vous le dis, c'est insupportable.
04:53On vit dans un marché qui évolue déjà
04:55de manière très rapide
04:57et dans des directions parfois très opposées,
04:59et Trump vient ajouter énormément d'instabilité à tout ça.
05:02Et en fait, ça devient difficile de prendre des décisions,
05:04de structurer,
05:05de continuer à travailler,
05:06d'être optimiste,
05:07sachant que d'une heure à l'autre,
05:10il peut nous mettre un coup de massue sur la tête.
05:12Et surtout,
05:13l'Europe s'apprête a priori
05:15à annoncer des mesures de rétorsion,
05:18sachant que Trump a aussi annoncé
05:19que s'il y avait des mesures de rétorsion,
05:21il irait encore plus loin.
05:22Donc, voilà,
05:23aujourd'hui, je suis dans le flou total.
05:26C'est quoi la solution ?
05:27C'est que l'Europe se montre plus forte ?
05:28Si c'est possible ?
05:30Écoutez,
05:31je pense que,
05:32je ne sais pas si l'Europe doit se montrer plus forte,
05:34plus maligne.
05:35En tout cas, moi,
05:36je souhaite à tout prix un accord,
05:38qu'on arrête cet épisode qui est long quand même.
05:40Et je pense qu'on a quand même aussi
05:44beaucoup à perdre à se fâcher
05:45avec notre copain américain.
05:48Je ne parle pas que de moi,
05:50enfin, pas que de la Fabrique Cookie,
05:51je parle aussi en tant que citoyen.
05:54J'espère que l'Europe arrivera vraiment à un accord,
05:55parce que je pense qu'on a beaucoup à perdre.
05:58Notamment,
05:58je ne sais pas si les Allemands sont très satisfaits
06:00de savoir qu'il n'y a pas eu d'accord.
06:01Je me mets un peu de leur côté,
06:03parce que je suis un petit, petit industriel français,
06:05mais qui a aussi beaucoup à perdre dans cette histoire.
06:07Oui, patron d'une PME,
06:08125 salariés, vous le disiez,
06:09donc en Nouvelle-Aquitaine.
06:11C'est difficile pour les PME en particulier.
06:13Un grand groupe français va pouvoir s'en sortir,
06:16négocier pour une PME.
06:17Comment vous gérez ça ?
06:18Oui, j'ai l'impression qu'on est un peu comme d'habitude
06:22les plus fragiles de l'histoire.
06:24C'était un peu le cas aussi pendant le Covid.
06:27Et disons que les grands groupes
06:28ont des usines aux Etats-Unis,
06:29ont des filiales aux Etats-Unis.
06:30Et pour en côtoyer certains d'entre eux
06:32lors des salons d'agroalimentaire,
06:35je sais qu'ils ont déjà commencé
06:37à prendre des décisions d'investissement aux Etats-Unis
06:39pour limiter leurs exportations là-bas.
06:41Ce que nous, on est bien évidemment incapables de faire.
06:44C'est-à-dire investissement là-bas,
06:45ça veut dire ouvrir des usines là-bas ?
06:46Oui, ils ouvrent des nouvelles lignes de production là-bas
06:48parce que Trump, concrètement,
06:50la stratégie de Donald Trump fonctionne.
06:52C'est-à-dire que beaucoup de groupes agroalimentaires français
06:54aujourd'hui investissent aux Etats-Unis
06:55pour moins exporter et plus produire sur place.
06:59Voilà, une boîte comme la mienne ne peut pas faire ça.
07:01Ce serait beaucoup trop dangereux.
07:03Enfin, je n'ai pas les moyens de faire ça.
07:05Donc, moi, c'est...
07:06Voilà, j'y arrive ou je meurs.
07:07Si on en restait là,
07:08que l'Europe n'arrive pas à faire fléchir Trump,
07:10que la situation reste en statu quo
07:12par rapport à sa décision,
07:14vous exporterez quand même ?
07:16Écoutez, ce qui est sûr,
07:18c'est que c'est un marché qui est très sexy,
07:19c'est excitant.
07:21Enfin, voilà,
07:22pour le créateur d'entreprise que je suis,
07:24oui, j'ai envie d'y arriver.
07:26Mais il va y avoir un problème de prix.
07:27Donc, voilà, mon produit risque d'être beaucoup trop cher.
07:30Donc, il veut que je le positionne
07:31sur un marché encore plus premium
07:32qu'il n'est déjà.
07:34Et du coup, les volumes seront relativement faibles.
07:36On a mesuré la situation du moment,
07:38en tous les cas, avec votre témoignage.
07:39Merci beaucoup, Alexis de Galambert.
07:41Merci à vous.
07:41D'être passé sur RTL ce matin,
07:43donc fondateur de la PME,
07:44la fabrique de cookies.
07:46Entretien qu'on peut...
07:46...
07:47...
07:48...

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