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Jean-Christophe Rufin publie "Le revenant d'Albanie", Calmann Levy.
Regardez L'invité de 9h40 avec Stéphane Carpentier du 11 juillet 2025.
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00:00L'invité du 9-10
00:01On a beaucoup de chance à 9h42 de vous accompagner, chers auditeurs, et de recevoir en studio Jean-Christophe Ruffin.
00:08Bonjour à vous.
00:09Bonjour.
00:10De passage dans la capitale, vous n'êtes pas dans vos montagnes ?
00:12J'y retourne.
00:14Vous y retournez rapidement ?
00:15Oui.
00:16Le massif du Mont Blanc. Il vous manque régulièrement justement ce grand air, ces grands espaces ?
00:20Ah bah oui, moi je suis un homme de grand air et quand je suis à Paris, j'ai qu'une envie, c'est d'en repartir.
00:25Voilà, et vous suivez de là-bas, de chez vous, cette actualité qui ne cesse de bouger.
00:31Je voudrais vous demander un sujet qui vous interpelle en ce moment particulier, sur cette actualité, soit nationale, soit internationale.
00:38Ben, évidemment, je pense que le conflit en Ukraine qui ne se termine pas comme on le pensait,
00:46qui donne lieu quand même à une remilitarisation de tout, de l'Europe, du monde,
00:53et ça c'est quand même un conflit qui me préoccupe beaucoup, mais je ne suis pas le seul, évidemment.
01:00Évidemment. Donc Jean-Christophe Ruffin en studio pour votre dernier ouvrage qui est sorti au mois d'avril aux éditions Kalman Levy.
01:06Ça s'appelle Le revenant d'Albanie. On va y revenir, bien sûr.
01:09Vous qui avez eu 1000 vies, qui vous a publié une vingtaine de livres, dont Rouge Brésil, il faut le rappeler, qui avait reçu le prix Goncourt.
01:17Comment on le résume, cet ouvrage ? C'est toujours, bien sûr, Aurel Timejkou qui est là, le petit consul ?
01:23Oui, c'est une série. Enfin, j'ai commencé ça après avoir été ambassadeur pendant trois ans au Sénégal.
01:29J'avais plein d'histoires à raconter du monde diplomatique, de ce qui se passe à l'étranger,
01:33quand notamment les Français se retrouvent en situation difficile.
01:38J'ai toujours été fasciné par le rôle consulaire. Les consuls, c'est eux qui s'occupent de ça.
01:42Et donc, j'ai créé ce petit personnage d'Aurel Timejkou, qui est un peu un anti-héros,
01:47mais c'est en même temps un peu moi aussi, parce que, voilà, il ne veut pas tellement travailler.
01:55Ça, ce n'est pas moi.
01:56Mais quand il y a devant lui une injustice, quelque chose qui le révolte, alors là, il se mobilise.
02:04Voilà. Et à chaque fois, ça me permet d'évoquer, c'est la sixième aventure de ce personnage,
02:10à chaque fois, ça me permet d'évoquer à la fois une petite histoire, c'est-à-dire de quelques personnages,
02:15mais aussi d'éclairer un petit peu la scène internationale dans des recoins qu'on ne connaît pas bien,
02:22notamment les ambassades, comment ça fonctionne.
02:24Là, il est promu, il reçoit une promotion, c'est ça ?
02:27Oui.
02:27Il est en Europe ou presque, puisqu'il est nommé en Albanie.
02:30Voilà. Alors, normalement, il fait une carrière un peu calamiteuse,
02:33parce que, comme il n'est pas tellement courageux, on le met, évidemment, dans des espèces de placards.
02:39Là, cette fois-ci, par des relations qu'il n'a d'ailleurs pas sollicitées, il se retrouve en Albanie.
02:43L'Albanie, c'est un pays très intéressant, que je connais relativement bien,
02:46parce que je suis allé à plusieurs époques, notamment au monde de la fin du communisme,
02:52quand ce pays a sombré un peu dans l'anarchie, puis plus récemment,
02:56maintenant qu'il est, au contraire, une destination touristique majeure.
02:59Et c'est un peu assez fascinant, et il va s'en rendre compte assez vite.
03:05Et là, évidemment, il est sollicité par une nouvelle affaire qui va le mobiliser.
03:15C'est-à-dire, il va découvrir qu'on va l'interroger, parce qu'un homme est mort en France,
03:22à Chamonix, plus exactement, pas loin de chez moi,
03:27et on s'aperçoit, les gendarmes s'aperçoivent, en faisant l'enquête, qu'il est d'origine albanaise.
03:33Et lui va se rendre compte que cet homme, en fait, est mort déjà en Albanie,
03:38au moment de la guerre civile.
03:4130 ans plus tôt, en fait.
03:42Voilà, 30 ans plus tôt.
03:43Et donc, voilà, la chose démarre comme ça.
03:45Il y a ce crime, puisque c'est un assassinat,
03:49mais qui ne peut se résoudre qu'en Albanie,
03:51et qu'Aurel va essayer de démêler.
03:54C'est sa sixième enquête, vous le disiez, justement.
03:56Il ne change pas, il est toujours, comment on dit, joyeusement étrange.
04:00J'aime bien ces deux mots-là.
04:01Oui, c'est ça.
04:03C'est-à-dire qu'il a...
04:05Bon, c'est un Roumain d'origine,
04:07qui a été racheté, en quelque sorte, par sa famille,
04:09à l'époque de Ceau-Cescu,
04:11qui était joueur de piano dans les bars,
04:13puis il a épousé une Française,
04:14il est devenu diplomate, mais avec un tout petit niveau.
04:17Il est entré par une toute petite porte.
04:20Ça ne l'intéresse pas beaucoup.
04:22Il s'habille toujours comme...
04:24Selon l'élégance qu'il croyait être,
04:27l'élégance française, quand il regardait des films,
04:29quand il était petit, en Roumanie.
04:32C'est-à-dire, il s'habille un peu comme Jean Gabin,
04:35vous voyez, dans les grandes familles.
04:36Et il est un peu décalé.
04:41Mais justement, c'est ça qui m'intéresse,
04:43c'est des personnages comme ça,
04:45qui ont toutes les apparences, au fond, de l'échec,
04:48même d'avoir raté leur vie,
04:51et qui, dans certaines circonstances,
04:52peuvent se révéler à la fois courageux,
04:54intelligents, efficaces,
04:56alors qu'on ne les attendait pas.
04:57Alors, qu'est-ce qu'il va découvrir, justement ?
04:59L'Albanie, et qu'est-ce que vous en dites de ce pays-là ?
05:01Parce que, quelque part, votre ouvrage,
05:03donc, Le Revenant d'Albanie,
05:04c'est un thriller géopolitique très enlevé.
05:08C'est une manière,
05:10à travers une petite histoire,
05:13encore une fois,
05:14de ce crime,
05:16et de la famille autour de ce personnage,
05:18c'est une manière de découvrir un peu ce qu'est ce pays,
05:20et de le faire découvrir au lecteur,
05:22sans qu'il ait besoin de faire un cours à Sciences Po,
05:25pour autant.
05:27Ce qu'il va découvrir,
05:28ce qu'on va découvrir,
05:29ce qu'Aurel va découvrir,
05:30c'est que ce pays, au fond,
05:32il a été envahi par des tas de gens
05:34depuis des siècles.
05:36Il a toujours été envahi par les Romains,
05:39les Grecs,
05:40les Italiens fascistes,
05:42les communistes stalinéens,
05:44tout ce que vous voudrez.
05:45Mais, au fond,
05:46ça lui est passé un peu en surface,
05:48et en profondeur,
05:50il y a des choses qui ne changent pas dans ce pays.
05:52Et, notamment,
05:53tout ce qui concerne ce code,
05:56qui s'appelle le Kanun,
05:57qui est une sorte de code d'honneur,
05:58écrit,
06:00c'est assez rare,
06:01parce qu'il y a d'autres pays
06:01où il y a des codes comme ça,
06:03mais qui sont plutôt oraux,
06:04là, il est écrit,
06:06on peut le consulter,
06:07et il fixe toutes les règles de la vie sociale,
06:10y compris,
06:11et c'est ça qui est important,
06:12la vengeance.
06:14Et les vendettats,
06:15qui en Albanie,
06:16peuvent donner plusieurs dizaines de morts
06:18dans les familles,
06:19c'est-à-dire que c'est vraiment
06:20des générations entières
06:21qui renouvellent l'avant-d'Etat,
06:24ben, l'avant-d'Etat,
06:25elle est codifiée.
06:26Voilà.
06:26Par exemple,
06:27vous ne pouvez pas vous venger
06:28en tirant sur quelqu'un,
06:29en vous planquant à 200 mètres,
06:31non, non,
06:31il faut être à côté,
06:32et lui dire
06:33qui vous allez venger.
06:34Voilà.
06:35Ce qui fait que vous ne pouvez pas non plus
06:36lui tirer dessus
06:36à côté d'une cascade
06:37ou d'un moulin à vent,
06:38parce qu'il n'entendrait pas
06:39ce que vous lui dites.
06:40Vous voyez ?
06:40Tout est marqué.
06:41Et le regarder dans les yeux.
06:42Et le regarder dans les yeux.
06:43Pourquoi nous faire découvrir
06:44des pays à chaque fois ?
06:45Ça, c'est un vrai plaisir
06:46d'écrire.
06:48Oui, oui, parce que...
06:49Et Mozambique,
06:50si je me souviens bien.
06:51Oui, il y a eu
06:52l'Azerbaïdjan,
06:54il y a eu
06:55la Guinée,
06:58il y a eu
06:59l'Acapulco,
07:00le dernier,
07:01qui se passait au Mexique.
07:02Mais parce que je trouve que,
07:04si vous voulez,
07:04la réalité internationale,
07:06bon,
07:07moi, je l'ai d'abord abordée
07:09par l'humanitaire,
07:10parce qu'il est en
07:10de formation médicale,
07:12très engagée,
07:13très tôt,
07:13dans les mouvements humanitaires.
07:15J'ai toujours vu
07:16l'analyté internationale
07:18d'une façon un peu différente
07:19de ce qu'on peut voir
07:20ou entendre
07:21quand on écoute votre antenne
07:22et qu'on est très bien informé
07:23sur les grands enjeux,
07:24si vous voulez.
07:25Il y a les grands enjeux,
07:26puis il y a la petite réalité.
07:29Et le roman
07:29est un moyen,
07:30finalement,
07:31de faire pénétrer
07:32dans l'intimité d'un pays.
07:35Et je pense que
07:35quand on veut aller,
07:37je ne sais pas,
07:37par exemple en Albanie,
07:39et qu'on lit un livre
07:40comme celui-là,
07:41évidemment,
07:42ce n'est pas un guide.
07:42Ce n'est pas un guide touristique.
07:43Il n'y a pas d'adresse d'hôtel,
07:44ça, c'est sûr.
07:45Mais peut-être
07:47c'est une compréhension
07:48qu'on vous offre,
07:49qu'on essaie de vous proposer,
07:51d'un pays
07:51dans son intimité.
07:53Et ça, je trouve,
07:54c'est quelque chose
07:55qui manque
07:55et que le roman peut apporter.
07:56Qu'est-ce qui vous a plu
07:57dans ce pays-là,
07:58dans l'Albanie ?
07:59Ce qui me plaît,
08:00justement,
08:01c'est sa résistance,
08:04sa résilience,
08:05on pourrait dire.
08:05C'est-à-dire le fait
08:06qu'il a été tellement,
08:08on peut dire,
08:09écrasé par des pouvoirs
08:10successifs, etc.
08:11Le dernier était terrible,
08:13c'était Anne-Vérodja,
08:14c'était vraiment
08:15une dictature épouvantable,
08:17sa ligne épouvantable.
08:18Et pourtant,
08:19c'est un pays
08:19qui a gardé sa langue,
08:21ses traditions,
08:22vraiment très intensément
08:24son identité,
08:26si vous voulez.
08:26Voilà.
08:27Et à travers,
08:28finalement,
08:29des moyens comme ça,
08:30ce texte,
08:31notamment,
08:31ce texte sur les Vendettas,
08:32ce texte,
08:33le Kanun,
08:34qui sont des choses
08:35très simples,
08:36mais qui, finalement,
08:37lui ont permis
08:38de préserver
08:38sa réalité.
08:40Et c'est ça
08:41qui est très fascinant.
08:42Dans l'ensemble
08:42des Balkans,
08:43je trouve que c'est
08:43un des pays
08:44qui a gardé
08:47de façon
08:48la plus forte
08:49son identité.
08:50Et donc,
08:51les querelles religieuses,
08:54par exemple,
08:54sont beaucoup moins fortes.
08:56Il n'y a pas,
08:56comme en Bosnie,
08:57qui n'est pas loin pourtant,
08:58il y a une cohabitation
09:00là-bas en Albanie
09:01entre les musulmans,
09:03les chrétiens orthodoxes,
09:05catholiques, etc.
09:06Vous avez des mosquées
09:07qui voisinent
09:07avec des églises orthodoxes
09:09et tout ça,
09:09ça fait bon ménage
09:10pour le moment.
09:11Mais je pense
09:12que c'est plus profond
09:13que ça.
09:13C'est-à-dire que
09:14la religion
09:15est un peu en surface
09:16et l'identité du pays
09:17qui fait bloc
09:18est plus forte.
09:19Et il y a beaucoup
09:20de Français
09:20qui vont en vacances
09:21là-bas maintenant.
09:22C'est une destination
09:23qui est en train
09:23de s'ouvrir.
09:24Oui,
09:24et ça s'ouvre beaucoup.
09:25Il y a d'ailleurs
09:26raison,
09:27parce que c'est très beau.
09:28Maintenant,
09:29il y a des infrastructures,
09:30il n'y en avait pas du tout
09:31dans les années 90,
09:33quand la dictature
09:35s'est effondrée,
09:36il n'y avait rien.
09:36Et maintenant,
09:37ils ont vraiment construit
09:38des routes,
09:39des rivières,
09:40des hôtels,
09:41etc.
09:41Donc c'est un pays
09:42très agréable,
09:44très beau,
09:44avec des ressources touristiques
09:46très belles
09:47et notamment
09:47ces ruines romaines
09:49qui sont un peu
09:51à l'image du pays.
09:52C'est-à-dire que
09:52quand vous marchez
09:52dans ces ruines romaines,
09:53je suis allé en voiture
09:55en visiter une
09:56en dernier séjour
09:58et ma voiture
09:59est tombée dans un trou.
10:01Pourquoi ?
10:01Parce que dessous,
10:02il y avait probablement
10:02une villa romaine
10:03qui n'avait pas encore
10:03été excavée
10:04et ma voiture
10:05avait une roue dedans.
10:07Et c'est typique
10:08de ce pays,
10:08c'est-à-dire que
10:09même quand vous parlez
10:10aux gens,
10:11il y a ce qu'ils vous disent,
10:12il y a la réalité
10:12et puis il y a tout ce passé
10:14qui est présent,
10:15qui est là,
10:16dessous et pas loin.
10:17Voilà,
10:17c'est à voir l'Albanie
10:18et c'est à lire
10:19le revenant d'Albanie
10:20donc paru au mois d'avril
10:21aux éditions Kalman-Lévy.
10:23Merci à vous.
10:23Jean-Claude.
10:24Merci à vous.
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