00:00On va parler de la fiscalité sur le patrimoine depuis le projet de surtaxe des grandes fortunes, des grosses fortunes.
00:07Eh bien, certains gros patrimoines s'inquiètent et on en parle avec Jean-Marc Ribes, président du directoire de la banque Richelieu France.
00:15Merci d'être avec nous, vous êtes spécialiste de la gestion de fortune.
00:18Cette menace sur les grandes fortunes, elle revient de nouveau encore, ça veut dire plus d'impôts pour les plus riches.
00:23Je crois que depuis la dissolution, il y a eu une certaine exaspération de certains clients qui se sont dit que va-t-il se passer.
00:30Les résultats des législatives ont permis d'atténuer un petit peu, vu des résultats, les peurs éventuelles qu'ils pouvaient avoir.
00:37Et à partir de là, les clients nous ont questionnés, mais on peut bouger, il faut quand même dire la vérité.
00:43Il y a eu beaucoup de questionnements, est-ce que je dois partir, pas partir ?
00:47Écoutez, nous avons à travers la banque Richelieu conseillé nos clients en leur disant, écoutez, pas de panique, on se pose, on réfléchit à l'organisation de votre patrimoine
00:56et nous avons été assez proactifs et proches de nos clients.
01:00Et c'est toujours punitif, malgré tout, même si on parle de la taxe Zuckmann, c'est ça, qui serait 2% sur les très grandes fortunes,
01:07ça serait un impôt encore de plus.
01:09Oui, alors la taxe Zuckmann, c'est 2% à partir de 100 millions d'euros, mais il faut rappeler que le 12 juin,
01:15le Sénat n'a pas validé cette taxe et qu'aujourd'hui, le gouvernement réfléchit à une autre taxe différente, peut-être inférieure,
01:22et peut-être pas à 2%, mais peut-être à 0,50 ou autre.
01:25Qu'est-ce qui inquiète les grandes fortunes ? C'est l'incertitude ? On ne sait jamais de quoi demain sera fait ?
01:31Oui, c'est surtout cette instabilité fiscale, avec parfois des effets rétroactifs,
01:36et c'est cette incertitude, tout le temps on a une incertitude fiscale.
01:42Et cette peur de l'effet rétroactif fait paniquer les gens.
01:44Mais encore une fois, il faut aussi rassurer les Français, il n'y a pas de panique aujourd'hui.
01:49Tout le monde attend la décision du budget à l'automne, en fonction des 40 milliards qu'il faudra effectivement réduire en termes de déficit,
02:00mais aujourd'hui, il n'y a pas de panique. Il y a des questionnements.
02:03Mais le profil de ces très grosses fortunes, quel est-il ?
02:06Écoutez, vous avez des clients qui ont beaucoup d'immobilier, qui ont des patrimoines immobiliers,
02:11mais encore une fois, on parle beaucoup de revenus, et maintenant on commence à parler du patrimoine,
02:15et puis vous avez aussi des liquidités, et vous avez aussi beaucoup de chefs d'entreprise qui ont du patrimoine,
02:20mais du patrimoine dans leurs propres entreprises. Donc ce ne sont pas des liquidités.
02:24Oui, c'est ça, et cela, le patrimoine d'entreprise ne peut pas être taxé, parce qu'il sera transmis, il fait vivre du monde aussi.
02:30Bien évidemment, il fait vivre du monde, et puis il faut bien rappeler une chose,
02:33parce que moi j'en entends depuis au moins 50 ans, si je puis dire aujourd'hui,
02:38c'est qu'on parle du tissu PME-ETI, qui est toujours plus fort en Allemagne qu'en France.
02:44Bon, on se plaint toujours en France de ne pas avoir suffisamment de PME et d'ETI qui poussent la croissance économique en France,
02:50mais si on taxe trop ces chefs d'entreprise, elles seront délocalisées ou elles seront vendues à des étrangers.
02:57Vous avez le sentiment quand même qu'Emmanuel Macron protège quand même les entreprises ?
03:01Oui, je pense qu'aujourd'hui, le président de la République, avec le gouvernement,
03:05protège les entreprises parce qu'on a besoin de créer des emplois,
03:09car à chaque fois qu'une entreprise est vendue, on sait très bien comment ça se passe,
03:12surtout si elle est vendue à des étrangers, il y a de la délocalisation,
03:15ça prend le temps que ça doit prendre, et puis finalement on perd des emplois et on crée du chômage.
03:20Alors des impôts en plus pour ces grandes fortunes, c'est toujours accompagné d'une menace de quitter la France,
03:25l'exil, la délocalisation, ça va revenir, vous pensez ça ?
03:29Écoutez, je ne le pense pas, parce que la délocalisation, elle a existé il y a plusieurs années,
03:35il y a quelques années maintenant.
03:36François Mitterrand en 1981.
03:38Voilà, alors on revient à François Mitterrand en 1980,
03:41finalement il y a eu des ménages français qui sont partis,
03:46beaucoup en Belgique d'ailleurs, une grande mode partir à Bruxelles,
03:50ils sont tous revenus, pratiquement pour la plupart.
03:53Ce n'est pas si facile que ça de s'expatrier.
03:55Donc les riches préfèrent payer finalement et vivre en France ?
03:57Oui, c'est un beau pays, déjà la France.
04:00Et c'est compliqué dit-on de partir à l'étranger, de tout lâcher du jour au lendemain ?
04:03Oui, parce que c'est un choix de vie.
04:05C'est un choix de vie, quand vous partez à l'étranger, vous avez votre famille,
04:08vous avez vos enfants qui sont scolarisés, qui ont leurs amis,
04:11vous avez vos propres amis, il y a aussi des barrières de la langue, parfois.
04:15Bien sûr.
04:15Certains sont partis en Portugal par exemple,
04:18qui a été un Eldorado à une époque, mais qui l'est beaucoup moins aujourd'hui.
04:21Et puis c'est beaucoup plus compliqué aujourd'hui de vivre dans ces pays-là.
04:25Oui, alors ça veut dire que finalement, le gouvernement ou les futurs gouvernements
04:28vont taper encore sur les riches un peu plus,
04:31parce qu'ils savent qu'ils ne partiront pas.
04:32Alors écoutez, je ne sais pas s'ils vont taper plus sur les riches.
04:36En tout cas, ce qui est certain, c'est qu'il va bien falloir déjà dissocier la partie revenus,
04:40les taxations sur les revenus, et les taxations sur le patrimoine,
04:43qui sont deux choses différentes.
04:45C'est vrai, oui, le travail ne doit pas être taxé.
04:47En général, le travail, il est taxé par l'impôt sur le revenu.
04:51Oui, absolument.
04:51Ce que je voudrais voir, c'est avec vous, le Luxembourg,
04:54parce que c'est un paradis fiscal, on en parle peu, et pourtant c'est l'Europe.
04:58Est-ce que ce n'est pas juste tout de même ?
05:01Écoutez, depuis très longtemps, nous rêvons tous d'une harmonisation fiscale européenne,
05:05qui n'arrive pas à se mettre en place finalement,
05:07parce que même au sein de l'Europe aujourd'hui,
05:09vous avez des régions dans certains pays européens
05:12où la fiscalité n'est pas la même par rapport à d'autres régions.
05:15Comme l'Irlande, par exemple.
05:18Donc écoutez, cette harmonisation, il faudra bien un jour qu'on la fasse,
05:20mais elle a beaucoup d'enjeux, compliqués pour certains pays,
05:24parce que ça pourrait être des sources de chômage.
05:27Je pense à l'Irlande, je pense au Luxembourg, par exemple.
05:30Après, il faut bien distinguer deux choses.
05:33Les Français ne partent pas vivre au Luxembourg,
05:36car l'impôt sur le revenu au Luxembourg pour les Français
05:38est identique à celui qu'ils auraient dû payer en France.
05:42Ils optimisent, c'est ça ?
05:44Alors, je n'aime pas trop le mot optimiser,
05:46je préfère une réorganisation du patrimoine.
05:48Par exemple, à la Banque Richelieu,
05:50nous réfléchissons sur une organisation du patrimoine de nos clients.
05:55Alors, le Luxembourg a un avantage, évidemment, par rapport à la France,
05:58c'est qu'il a une diversité dans son offre de produits
06:03beaucoup plus large que la France.
06:05Donc, il y a des opportunités.
06:06Mais ce n'est pas une optimisation fiscale,
06:08c'est une organisation fiscale avec des chefs d'entreprise
06:12ou des familles patrimoniales qui restent en France.
06:14Mais l'optimisation n'est pas interdite par la loi, si je ne me trompe.
06:18Elle n'est pas interdite.
06:19C'est-à-dire que souvent, il y a confusion entre optimisation et évasion.
06:22Ce n'est pas du tout la même chose.
06:24Donc, je crois que non, elle n'est pas interdite par la loi
06:26et chaque Français est libre de gérer son patrimoine comme il l'entend.
06:29Donc, au final, si on vous comprend bien,
06:31les riches resteront en France ?
06:33Écoutez, vous savez, je crois qu'il ne faut pas faire la chasse aux riches.
06:36On est bien content que les riches soient en France.
06:38Parce que ce sont quand même les riches qui contribuent
06:42au développement de l'économie française,
06:44qui créent des emplois, qui créent des entreprises,
06:46qui font de la croissance externe.
06:47Donc, je pense qu'il ne faut surtout pas monter les uns contre les autres.
06:50Alors, pourquoi cette jalousie ?
06:52C'est très français.
06:54Vous savez bien que quand quelqu'un a réussi en France, on est jaloux.
06:56Il vaut mieux se poser la question de savoir pourquoi il a réussi
06:59et comment il a pu réussir que de vouloir le jalouser.
07:02La jalousie est un des plus mauvais défauts qui existe.
07:05C'est le mot de la fin.
07:06Merci Jean-Marc Ribes, donc je rappelle le président du directoire