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Comment sauver notre modèle de protection ? "Il faut mobiliser tous les leviers", annonce le directeur général de l'Assurance maladie. Thomas Fatôme est l'invité de Amandine Bégot.
Regardez L'invité d'Amandine Bégot du 30 juin 2025.

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Transcription
00:00Il est 8h17, l'interview d'Amandine Bégaud alors que la Sécu, elle aussi, va devoir se mettre au régime sec
00:10mais où économiser de l'argent sans remettre en cause la qualité des soins ?
00:13Ça fait partie des questions que vous vous posez Amandine et donc des raisons pour lesquelles vous avez choisi d'inviter ce matin
00:18le directeur général de la Caisse Nationale d'Assurance Maladie, la CNAM, c'est Thomas Fatome. Bonjour et bienvenue à vous.
00:24Bonjour et merci beaucoup d'être avec nous en studio. On a plein plein de questions d'auditeurs
00:28donc je vais essayer de résumer tout ça. D'abord ce nouveau formulaire papier pour les arrêts de travail
00:36qui sera mis en place dès demain, un formulaire plus sécurisé. On est d'accord pour nous assurer, ça ne change rien ?
00:42Ça ne change rien.
00:43Ça ne change rien. En fait l'objectif c'est de lutter contre la fraude, ces faux arrêts maladie notamment vendus en ligne.
00:50Est-ce qu'on sait aujourd'hui quelle est l'ampleur de cette fraude et combien ça coûte ?
00:52En tout cas ce qu'on sait, ce qu'on a détecté en 2024, c'est près de 40 millions d'euros de fraude
00:58liés à des faux arrêts de travail papier. Et donc on a mesuré qu'il fallait absolument renforcer la sécurité
01:04de ces formulaires-là, éviter des photocopies, éviter des formulaires qui se baladent.
01:09Ce sont des arrêts que les gens trouvent sur internet moyennant quelques euros ?
01:13Oui, ils les modifient. La meilleure prévention de la fraude de l'arrêt de travail, c'est d'abord l'arrêt de travail en ligne.
01:19Les médecins peuvent vous faire un arrêt de travail, le déclarer en ligne sur le portail Amélie de l'assurance maladie.
01:24Et ça, ça nous permet d'être sûr que c'est bien le médecin, c'est tracé, etc.
01:28S'il y a du papier, à compter du 1er juillet, c'est ce serfa sécurisé.
01:33On va laisser encore quelques toutes petites semaines cet été pour que les hôpitaux, pour que les médecins s'adaptent encore,
01:39pour qu'ils puissent avoir tous les serfas sécurisés qui soient disponibles.
01:42Mais vraiment, on veut absolument fermer toutes les possibilités de fraude aux arrêts de travail papier.
01:46Donc tous ceux qui achèteront de faux arrêts maladie sur le net ne seront plus pris en charge ?
01:50Oui, oui, exactement, ils ne seront plus pris en charge. Et puis surtout, attention, c'est dangereux, il y a des sanctions à la clé,
01:54il y a des pénalités financières, il peut y avoir des peines d'amende ou de prison.
01:57Et donc, on dit à tout le monde, faites attention, n'allez pas chercher évidemment des arrêts de travail sur Internet.
02:01Et donc, serfa sécurisé à compter du 1er juillet.
02:04Chez un médecin, que ce soit en visio-consultation ou en cabinet.
02:10Les amérées maladies, Thomas Fatome, c'est l'une des pistes que vous avez identifiées pour faire des économies.
02:14Vous avez fait la semaine dernière 60 propositions pour faire à peu près 4 milliards d'euros d'économies.
02:21Vous souhaitez limiter les arrêts de travail ? Pas plus de 15 jours, c'est ça pour ceux qui sont donnés en ville ?
02:25Alors, ce qu'on voit en effet, c'est qu'on a une très forte augmentation de la dépense d'arrêt de travail depuis le Covid.
02:29Il y a des facteurs économiques et en démographie qui expliquent que la population active augmente, les salaires augmentent.
02:34Donc, il y a une partie de cette augmentation qui est normale.
02:36Il y en a une autre partie, à peu près 30 à 40 %, on ne sait pas très bien l'expliquer.
02:39C'est multifactoriel, comme on dit, le rapport au travail, la santé au travail, les conditions de travail aussi, sans doute, des abus, des fraudes, des prescriptions qui ne sont pas adaptées.
02:47Et donc, on voit surtout, notamment des prescriptions d'arrêt de travail qui sont très longues, qui vont bien au-delà des durées de référence.
02:53Par exemple, quand vous avez un trouble mineur de la santé mentale, mineur, la recommandation scientifique, c'est 15 jours.
03:00Pourquoi 15 jours ? Parce qu'il faut un suivi régulier, que votre médecin vous revoie, que vous ne soyez pas laissé, entre guillemets, sur un arrêt de travail long.
03:05Donc, on voit malheureusement qu'on a des durées de prescription qui peuvent être de 1 mois, 2 mois, 3 mois.
03:10Donc, on veut mettre...
03:11Et pardon, ils sont prescrits par des vrais médecins ? Ça veut dire que ces médecins-là abusent ?
03:15Ça veut dire qu'il y a des situations dans lesquelles la prescription n'est pas conforme aux référentiels.
03:19Ça veut dire aussi que nous, on accompagne des milliers de médecins.
03:22On a nos médecins-conseils, les médecins-conseils de l'assurance maladie, les médecins de l'assurance maladie,
03:25vont voir les médecins-prescripteurs pour étudier des cas, échanger sur pourquoi telle prescription n'était pas forcément complètement adaptée.
03:34Et on mène aussi des contrôles pour les médecins qui sont vraiment très très fortement prescripteurs,
03:39qui prescrivent 2, 3, 4 fois plus d'arrêts de travail.
03:42On est en train de lancer une nouvelle vague de contrôles.
03:45Mais donc voilà, il faut absolument multiplier les leviers pour faire que la durée d'arrêt de travail soit plus en lien avec ce qui est recommandé.
03:51Surtout pour la santé des gens.
03:52J'insiste là-dessus.
03:54La santé justifie qu'on les voit régulièrement.
03:56Et puis aussi, le rapport au travail.
03:58Si vous êtes 6 mois, 1 an, 2 ans, 3 ans, éloigné du marché du travail, éloigné de votre entreprise,
04:04alors que vous pouvez éventuellement avoir un mi-temps thérapeutique, alors que vous pouvez avoir un aménagement de poste,
04:09on sait que ça va être beaucoup plus dur de revenir travailler.
04:12Et donc c'est tout ça qu'on veut un peu rendre plus dynamique.
04:14Pas plus de 15 jours.
04:15Donc pour ce, ces arrêts de travail prescrits en ville, un mois en cas d'hospitalisation, on est d'accord,
04:20ils pourront être prolongés, ces arrêts de travail, si nécessaire.
04:22Après, on va travailler aussi avec les sociétés savantes, on va travailler avec les médecins, les patients, les autorités sanitaires
04:27pour définir vraiment les bornes adaptées.
04:29Mais ce qu'on veut, c'est vraiment arrêter avec ces arrêts de 3 ou de 4 mois
04:33qui sont honnêtement ni bons pour la santé, ni bons pour la santé financière de l'assurance maladie.
04:36Thomas Fatome, je vous le disais, on a plein de messages au 64 900 avec le mot clé matin.
04:41Message notamment de Jean, directeur adjoint d'un établissement médico-social de 300 salariés en Corrèze.
04:46Il est dit, comme vous, les arrêts maladie sont un fléau de plus en plus lourd à gérer.
04:50Il y en a de plus en plus, la véracité est de plus en plus douteuse.
04:54Malgré les contrôles médico-sollicités, on se sent abandonné face à la complaisance de certains médecins
04:58et non soutenu par la caisse d'assurance maladie.
05:02Prévoyez-vous de durcir les contrôles ? Vous nous avez dit oui.
05:05Et de mettre en place de nouvelles mesures pour soutenir les employeurs ?
05:08Alors, ça fait partie en effet des sujets qu'on a posés.
05:11Il faut qu'on améliore les relations entre les employeurs et à la fois les médecins privés qui peuvent faire des contrôles.
05:19Et le cas échéant, l'assurance maladie est sollicitée.
05:21Sans rentrer trop dans l'État, l'année dernière, il y a un texte réglementaire qui est venu simplifier les procédures.
05:26Et on pense qu'il faut les rendre plus efficaces, plus opérationnels,
05:29pour que quand un employeur a des doutes sur la réalité de l'arrêt de travail,
05:32il puisse saisir soit un médecin contrôleur privé, ça existe,
05:35soit un médecin de l'assurance maladie, et que nous, on puisse être réactifs.
05:39Ça fait partie aussi des propositions que nous mettons sur la table.
05:42C'est vrai que nous voyons beaucoup de sollicitations d'employeurs.
05:44et c'est quelque chose auquel il faut qu'on réponde de façon plus efficace.
05:48Vous souhaitez aussi instaurer un jour de carence publique.
05:51En clair, si je prends un arrêt de trois jours, par exemple,
05:54il ne sera indemnisé que deux, même l'entreprise ne pourra pas indemniser les trois jours.
05:58On est d'accord ?
05:59Dans le rapport, vous avez dit 60 propositions,
06:02et on souhaite vraiment ouvrir la discussion sur un certain nombre de sujets,
06:05qui sont des sujets compliqués, qui sont des sujets sensibles,
06:07sur lesquels il faut sûrement qu'il y ait des concertations avec les partenaires sociaux,
06:10avec le gouvernement, le Parlement.
06:11Et ces couvertures d'arrêt de travail, ça fait partie en effet des sujets.
06:15Ça fait longtemps qu'on parle de ce jour de carence d'ordre public.
06:18Est-ce qu'il faut que le premier jour ne soit pas pris en charge,
06:20ni par l'assurance maladie, ni par la complémentaire, ni par l'entreprise ?
06:23Voilà, ça fait partie des débats qu'on veut ouvrir,
06:25parce qu'aujourd'hui, on a un système qui n'est pas très lisible.
06:28Et ça permettrait vraiment d'économiser de l'argent ou pas ?
06:30Ça fait partie du débat.
06:32Vous qui connaissez les chiffres ?
06:34Vous avez des études qui montrent des résultats différents.
06:38Moi, je pense en tout cas qu'aujourd'hui, le système n'est pas assez responsabilisant
06:41pour l'ensemble des acteurs, assurés, prescripteurs, entreprises.
06:44Et il coûte très cher, 16 milliards d'euros.
06:47Plus d'un milliard d'euros de dépenses supplémentaires en 2024.
06:49Il n'est tout simplement pas soutenable.
06:51Donc, il faut essayer de le refonder.
06:5216 milliards d'euros, c'est le déficit.
06:53Non, 16 milliards d'euros, pardon.
06:55Ça, c'est aussi le déficit, mais il faut que c'est les dépenses d'arrêt de travail de notre pays.
06:59Donc, en fait, s'il n'y avait plus d'arrêt de travail...
07:00Non, mais je schématise.
07:01Mais en gros, on comblerait le déficit.
07:02Il faut faire attention.
07:03Pardon, excusez-moi, on a besoin...
07:06L'arrêt de travail, c'est quand même quelque chose d'important.
07:07C'est d'ailleurs là-dessus que la Sécurité sociale a été créée.
07:09Elle a 80 ans et en 45, il faut se souvenir qu'elle a été créée pour fournir des arrêts de travail
07:14aux gens qui ne pouvaient pas travailler, qui ne pouvaient pas aller aux usines,
07:16qui ne pouvaient pas aller dans les champs.
07:17Donc, il y a une protection qu'il faut maintenir.
07:19Le problème, c'est qu'aujourd'hui, le système n'est pas équitable.
07:22Vous êtes plus ou moins couvert selon la taille de votre entreprise, selon votre ancienneté.
07:25Il n'est pas très lisible.
07:26Les gens ne comprennent pas très bien comment ça marche.
07:27Et puis, il n'est pas très soutenable.
07:29Les dépenses vont trop vite.
07:30Donc, on appelle vraiment à cette refondation.
07:32Et c'est un sujet qu'il faut que...
07:34Voilà, on pense que les partenaires sociaux, les médecins, le gouvernement, le Parlement doivent s'en saisir.
07:38Thomas Fatoum, j'ai encore deux questions.
07:40La première, elle concerne les ALD, les infections longue durée.
07:43Et vous proposez de sortir du dispositif les personnes en rémission.
07:46Ça a fait bondir plein d'associations de malades, des médecins aussi, qui disent...
07:50Ils disent, quand on a eu un cancer et qu'on est en rémission, très souvent, on a encore des traitements.
07:55Je pense notamment au cancer du sein, où il y a des traitements pendant 5 ans, une hormonothérapie.
08:01Ça ne sera plus remboursé ?
08:02Alors non.
08:03D'abord, ce qu'il faut bien là aussi dire, c'est que le système des ALD, le système du 100%,
08:07pour les personnes qui ont des maladies chroniques, c'est vraiment un des piliers, quelque part, du temple de l'assurance maladie.
08:11On est vraiment extrêmement attaché.
08:13Ça vous protège quand vous avez des soins coûteux sur de longue durée.
08:17Par contre, bonne nouvelle, il y a beaucoup de gens qui guérissent du cancer.
08:20C'est des pathologies dans lesquelles il y a éventuellement aussi des phases.
08:24Aujourd'hui, d'ores et déjà, il y a plus de 200 000 personnes qui sortent chaque année de l'ALD cancer,
08:30soit parce qu'ils ont une rémission très longue, soit parce qu'ils sont véritablement guéris.
08:33Et donc, ce qu'on dit simplement, nous, là aussi, c'est poser la discussion, de se dire,
08:37est-ce qu'on ne peut pas rendre le système, entre guillemets, un peu plus dynamique ?
08:40Quand vous avez une pathologie lourde, quand il y a des soins, là, évidemment, le 100% se déclenche.
08:44Quand ce n'est plus le cas, vous pouvez sortir de l'ALD.
08:46Et évidemment, s'il y a un rechute, évidemment, si la pathologie revient, alors le 100% doit se déclencher.
08:52Et ça, honnêtement, c'est clé.
08:53Parce qu'aujourd'hui, enfin, en tout cas, à l'horizon 2035,
08:56on va avoir un quart de la population française qui va être en infection de longue durée.
08:59Un quart.
09:00Plus de vieillissement, plus de pathologies chroniques.
09:02Et donc, il faut se poser la question de comment on a un système
09:05qui est centré sur les pathologies chroniques écouteuses.
09:08Comment aussi on agit en prévention ?
09:10C'est un des messages clés du rapport sur lequel je veux insister ce matin.
09:13Plus de prévention, moins de tabac, moins d'alcool, plus d'activité physique, une meilleure nutrition.
09:18On parlait tout à l'heure du Nutri-Score sur vos antennes.
09:20C'est absolument clé si on veut retarder l'apparition des maladies chroniques.
09:23À propos du remboursement des médicaments, Yannick Noderre, le ministre de la Santé,
09:26s'est dit favorable au déremboursement des médicaments pris en charge à 15%.
09:30Le SPACE-Fonds, par exemple, est-ce que vous y êtes favorable, vous aussi ?
09:33En tout cas, c'est des questions qu'on pose également.
09:35Alors, nous, on prend l'angle, mais qui est tout à fait convergent à ce qu'évoque le ministre.
09:39Aujourd'hui, ces médicaments à 15%, si vous êtes en ALD, ils sont pris en charge à 100%.
09:43Alors que leur efficacité, elle est questionnée.
09:47Donc, est-ce que ça...
09:47Si on n'est pas en ALD, c'est pris en charge à 15%.
09:49Exactement.
09:50Mais si on est en ALD, c'est 100%.
09:51Ça veut dire que l'assurance-médie finance à 100% un médicament qui n'est pas toujours extrêmement efficace
09:54puisqu'il est seulement remboursé à 15%.
09:56Donc, là aussi, c'est une interrogation qu'on porte
09:58parce qu'on pense qu'il faut réserver le 100% aux produits de santé,
10:02aux traitements qui sont effectivement efficaces.
10:04Mais M. et Mme Tout-le-Monde, qui n'est pas en ALD,
10:06est-ce que demain, il sera moins remboursé sur ces médicaments ?
10:09Ça, ça fait partie des...
10:10Non, mais vous le souhaitez ? 15%, 20% ?
10:12Vous souhaitez que...
10:13Je pense qu'il faut que l'assurance-maladie concentre ses remboursements
10:16sur les médicaments les plus efficaces.
10:18Voilà, ce taux de 15%, il a été fait il y a une quinzaine d'années
10:21parce que c'était des médicaments pas hyper efficaces.
10:25Est-ce qu'il faut le faire bouger ?
10:26Je pense qu'on aura cette discussion dans le cadre de la loi de financement de la Sécurité sociale.
10:28Toute dernière question, est-ce que pour responsabiliser,
10:32pour reprendre votre mot, les patients et les Français,
10:34il ne faudrait pas que tout le monde paye un peu ?
10:37Un peu à la pharmacie, un peu à l'hôpital ?
10:40Alors, d'abord, notre système, honnêtement, il a quand même une force.
10:43C'est que le reste à charge, c'est-à-dire que ce qu'on paye, honnêtement, est limité.
10:47Et ça, c'est quand même un élément de protection des Français.
10:49Ce qu'on ne sait pas forcément combien ça coûte.
10:50Oui, mais alors peut-être qu'il faut, si je peux me permettre, avancer davantage.
10:52Ça fait partie des 60 propositions pour faire connaître le coût de la santé.
10:56Ce n'est pas parce que vous, vous ne payez pas, que c'est gratuit.
10:59Et nous, on n'aime pas quand on dit que c'est gratuit.
11:00C'est prise en charge par l'assurance maladie.
11:03Donc, faire connaître le coût d'un acte à l'hôpital.
11:04Affiché sur les médicaments, par exemple.
11:06On va rénover en profondeur ce qu'on appelle le relevé annuel de l'assurance maladie,
11:10qui vous indique combien, finalement, l'assurance maladie a remboursé pour vous.
11:13Dans les prochaines semaines, vous aurez systématiquement aussi un retour sur votre consommation de soins.
11:16Et donc, ça, il faut progresser pour qu'en effet, les Français mesurent que la santé, ça a un coût,
11:22qu'on est là pour prendre en charge.
11:23Et ça, c'est un élément de responsabilité important.
11:26Merci beaucoup.

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