1,3 milliard d'euros : c'est le coût des dégâts des tempêtes Ciaran et Dominingos. Nos primes d'assurance vont-elles augmenter ? Pour en parler, Florence Lustman, présidente de France Assureurs. Regardez L'invité de RTL du 14 novembre 2023 avec Amandine Bégot.
00:06 RTL 7h43, excellente journée à vous tous qui nous écoutez. Amandine Bégaud, vous recevez ce matin Florence Lussmann, la présidente de France Assureur.
00:14 Bonjour Florence Lussmann.
00:16 Bonjour.
00:17 Merci de prendre la parole ce matin sur RTL. Vous présidez donc France Assureur, la fédération qui regroupe l'ensemble des entreprises
00:23 d'assurance et de réassurance.
00:24 Et vous serez tout à l'heure aux côtés d'Emmanuel Macron dans le Pas-de-Calais. C'est pour cette raison que vous n'êtes pas en studio avec
00:29 nous ce matin. Le Pas-de-Calais, on va bien sûr en parler. Mais d'abord je voulais qu'on revienne sur ce chiffre que vous avez publié hier.
00:35 1,3 milliard d'euros, c'est le montant des dommages causés par les deux récentes tempêtes qui ont touché
00:41 le nord-ouest de la France, la Nouvelle-Aquitaine mais aussi la Corse, les tempêtes Kiaran et Domingos en ce début de mois de novembre.
00:48 Alors 1,3 milliard d'euros, Florence Lussmann, c'est bien sûr beaucoup d'argent pour tous ceux qui nous écoutent.
00:53 Mais est-ce que c'est beaucoup pour deux tempêtes ?
00:55 Oui, c'est beaucoup.
00:58 Si on compare l'effet de ces deux tempêtes
01:01 aux grandes tempêtes que notre territoire a connues, que la métropole a connues, je pense évidemment à
01:06 Lothar et Martin en 99, mais je pense à Daria, à Klaos, à Xynthia.
01:12 Eh bien, ces tempêtes se situent aujourd'hui en cinquième position en termes de gravité des dommages
01:20 pour l'ensemble des tempêtes qui ont balayé notre métropole.
01:24 A ce jour, on est à 517 000 sinistres répertoriés.
01:27 La plupart, ça concerne des logements de particuliers, c'est ça ?
01:30 Oui, à plus de 90 %, ce sont des logements de particuliers, ce sont des toitures qui sont arrachées,
01:38 des infiltrations d'eau dans les maisons.
01:41 C'est l'impact de ces tempêtes et de toute la pluie qui est tombée.
01:45 D'ailleurs, vous avez noté que pour ces tempêtes, nous avons étendu à un mois le délai pour déclarer
01:53 les sinistres qui sont liés à ces deux tempêtes, parce que la priorité dans de tels événements,
02:00 c'est d'abord de mettre les personnes en sécurité, de mettre les biens en sécurité,
02:05 et évidemment de déclarer le plus rapidement possible à son assureur, mais quand même dans cet ordre-là.
02:10 Pour tous ceux qui ne l'auraient pas encore fait, qui n'auraient pas encore fait ces démarches,
02:13 on est d'accord, ils sont dans les temps, c'est encore possible ?
02:16 Absolument, absolument, ils sont complètement dans les temps, bien sûr.
02:19 Alors, on a parlé de ces deux tempêtes, Kieran Domingos, 1,3 milliard d'euros de dommages,
02:25 et puis on surveille bien sûr la situation dans le Pas-de-Calais, vous y serez aux côtés d'Emmanuel Macron
02:29 dans les prochaines heures. Est-ce que là, vous pouvez déjà faire une première estimation des dégâts
02:34 sur ces seules inondations ?
02:36 Non, alors pour le Pas-de-Calais, c'est vraiment beaucoup trop tôt, les gens sont encore dans l'inondation,
02:43 donc là, ils se protègent, il faut les aider, mais c'est trop tôt pour avoir des remontées
02:49 sur la base des sinistres qui sont déclarés par les assurés, et c'est vraiment sur cette base réelle
02:56 qui remonte du terrain que nous fondons nos évaluations.
03:00 Il faut également préciser que les régimes d'indemnisation sont différents, en Bretagne, en Normandie,
03:07 en Corse, vous l'avez dit, c'est essentiellement le vent qui a frappé, c'est l'effet du vent.
03:12 L'effet du vent, il est couvert, donc c'est la tempête, et c'est couvert dans vos contrats de multirisques habitation.
03:19 Donc il n'y a pas besoin d'arrêter de catastrophes naturelles parce que ça ne relève pas du régime
03:25 des catastrophes naturelles.
03:26 En revanche, pour les inondations, c'est indispensable ?
03:29 Absolument, l'inondation relève du régime des catastrophes naturelles, donc là, l'État décide
03:35 de mettre les communes en état de catastrophes naturelles, et à partir de là, le processus
03:41 d'indemnisation peut commencer.
03:43 Donc les deux modes d'indemnisation sont assez différents.
03:46 Florence Lutzmann, on voit ces épisodes climatiques qui se multiplient, des épisodes aussi qui
03:51 coûtent de plus en plus cher aux assureurs.
03:53 10,6 milliards d'euros en 2022, c'était en moyenne 3,6 milliards il y a 10 ans, et d'après
03:58 vos projections, ce devraient être deux fois plus d'ici 30 ans.
04:02 À l'arrivée, il va bien falloir que quelqu'un paye ? Est-ce que ça veut dire que nos tarifs
04:06 d'assurance, de nos primes d'assurance vont forcément augmenter ?
04:08 Je sais que le patron d'AXA a déjà annoncé une hausse pour le mois de janvier prochain.
04:12 Vous avez raison, il y a une tendance que tout le monde peut constater malheureusement,
04:18 c'est l'aggravation des événements naturels.
04:20 Aggravation en termes de fréquence, aggravation également en termes d'intensité.
04:26 Et donc tout cela a une conséquence sur l'équilibre de ce régime des catastrophes naturelles,
04:32 dont il faut quand même rappeler qu'il est extrêmement protecteur de nos concitoyens.
04:37 C'est un régime que le monde entier nous envie, parce qu'en France, moyennant environ
04:43 25 euros par an, vous êtes couvert contre les conséquences des événements naturels
04:49 de type inondation.
04:51 Aujourd'hui, depuis 2015, ce régime est financièrement déficitaire, et donc effectivement,
04:59 il va falloir le remettre à flot, mais le plus important c'est de le pérenniser, parce
05:04 qu'il est très protecteur de l'ensemble des Français face à cette aggravation.
05:08 Ça veut dire qu'il faut augmenter le montant de la surtaxe ? Je crois que c'est 12% pour
05:12 une assurance habitation.
05:13 Aujourd'hui, c'est 12% et c'est un taux qui est fixé par l'État, donc effectivement,
05:19 vraisemblablement, il va falloir augmenter un peu cette surprime pour financer le régime
05:24 de catastrophes naturelles.
05:25 Mais franchement, pour pérenniser ce régime, ça vaut le coup.
05:29 Mais ça veut dire combien ? Pour les auditeurs qui nous écoutent, combien en plus ?
05:32 C'est à l'État d'en décider, ce n'est pas aux assureurs.
05:35 Mais vous, vous souhaitez que ce soit une augmentation de quel ordre ?
05:38 On pourrait passer de 12% à 18%, mais en parallèle, il faut bien comprendre que dès
05:44 qu'on est face à un risque, la première chose à faire, c'est de maîtriser ce risque
05:49 et donc de faire de la prévention.
05:50 Et là, on a encore des marges de manœuvre significatives pour progresser sur le front
05:56 de la prévention.
05:57 Je reviens sur les tarifs des assurances.
05:59 Vous disiez, le patron d'Axa a annoncé il y a quelques jours qu'il y aurait une
06:02 hausse des tarifs de ces primes, sans doute aux alentours de +6% dans son cas.
06:07 Est-ce que ça va être le cas pour tous les assureurs ?
06:10 Est-ce que vous pouvez nous donner un ordre d'idée ?
06:12 Non, parce que moi, je suis la fédération des assureurs et donc je n'ai pas le droit
06:19 de regarder les tarifs de mes membres.
06:22 Ça, ça relève du droit de la concurrence.
06:24 En revanche, ce que je peux expliquer, c'est que pour n'importe quel type de risque,
06:29 et pas seulement les risques naturels, à partir du moment où les risques augmentent,
06:34 le coût de la couverture du risque, parce que qu'est-ce que vous payez avec votre
06:37 cotisation d'assurance ?
06:38 Vous payez cette couverture du risque et évidemment, le prix de la couverture du risque
06:43 a tendance à augmenter.
06:45 Je reviens un instant sur le changement climatique et ses événements climatiques.
06:50 Est-ce qu'il y a un moment où certaines zones risquent tout simplement de devenir
06:54 impossibles à assurer ?
06:56 Alors, on n'y est pas du tout aujourd'hui, mais c'est la raison pour laquelle nous
06:59 sommes tous mobilisés.
07:01 D'abord pour pérenniser ce régime des catastrophes naturelles qui est très, très
07:06 protecteur pour l'ensemble des Français.
07:09 Et puis, pour engager une vraie démarche nationale de prévention de façon à limiter
07:15 l'impact de ces événements naturels dans le futur.
07:17 Mais est-ce qu'on pourrait aller jusqu'à imaginer, je ne sais pas, de forcer par exemple
07:21 les gens qui habitent dans des zones à risque à déménager ?
07:24 C'est possible ça ou c'est inconcevable ?
07:25 Non, aujourd'hui on n'en est pas là, mais c'est précisément la raison pour laquelle
07:30 nous souhaitons que ce sujet de la prévention devienne véritablement une cause nationale.
07:35 Ce qui est sûr en tout cas, c'est que le changement climatique forcément va changer
07:38 le monde de l'assurance.
07:39 On ne pourra plus assurer aujourd'hui, enfin demain plutôt comme avant.
07:42 Ça changera, ça changera la donne, mais on s'y prépare et on s'y prépare pour
07:46 continuer à protéger les Français.
07:48 Merci beaucoup Florence Lutzmann d'avoir été avec nous.
07:51 Je rappelle donc que vous serez ce matin dans le Pas-de-Calais aux côtés d'Emmanuel Macron.